Le manuel du prince génial pour sortir une nation de l’endettement – Tome 1 – Chapitre 3 – Partie 5

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Chapitre 3 : Trop d’une bonne chose

Partie 5

Jiva avait été conduit à la salle de réception et avait attendu patiemment sur une chaise. Au premier coup d’œil, il pouvait sembler méditatif, assis tranquillement les yeux fermés, mais un peu de nervosité avait refait surface sur son visage rond.

Mais ce n’était pas du tout étrange. Après tout, de son point de vue, il était au milieu du territoire ennemi. Il était courant que des émissaires soient tués, même s’ils étaient envoyés pour négocier. Il était fort possible que des soldats armés se rassemblent à l’extérieur de la salle en ce moment-là.

… Mais je pense que ça va aller.

S’ils voulaient le tuer, ils l’auraient déjà fait. De plus, compte tenu de son statut et de la bienveillance présumée du prince héritier, ils pourraient probablement avoir une discussion.

La conclusion d’un accord sera notre plus gros problème.

Si quelque chose le rendait nerveux, c’était bien ça. Il avait donné la priorité au temps et n’avait guère fait de recherches sur son adversaire. Il ne connaissait pas les détails, et il n’était pas clair si c’était pour le meilleur ou pour le pire.

Tandis que ces soucis remplissaient son esprit, la porte s’ouvrit pour révéler une fille aux cheveux blancs translucides et aux yeux rouges. Une Flahm. En y repensant, il avait entendu dire qu’ils étaient communs à Natra.

« Son Altesse, le Prince régent Wein est arrivé, » déclara-t-elle.

Un jeune homme était entré dans la pièce en la suivant et accompagné de plusieurs gardes.

« C’est un honneur de vous rencontrer, Votre Altesse, » exalta Jiva en s’inclinant avec respect. « Je suis un diplomate de Marden, Jiva. »

« Et je suis le prince régent du royaume de Natra, Wein Salema Arbalest, » déclara l’autre.

Il est si jeune.

Jiva avait entendu dire que le prince était au milieu de l’adolescence, mais il avait toujours l’air d’un enfant innocent alors qu’il se tenait là devant lui. Mais son comportement était digne d’un fier dirigeant. Il n’était ni une décoration, ni un symbole, ni un roi en raison de son sang. Jiva ne l’oublierait pas de sitôt.

« Tout d’abord, je vous prie d’accepter mes plus humbles excuses pour avoir comparu à l’improviste, Votre Altesse, » commença-t-il avec courtoisie.

Ils se faisaient face dans la pièce. Ninym prenait des notes depuis derrière Wein.

Le prince répondit avec diplomatie. « Nous comprenons que certains problèmes exigent notre attention immédiate. C’est pourquoi j’aimerais vous souhaiter de tout cœur la bienvenue pour être venu jusqu’ici, » avait-il dit, puis il avait haussé les épaules. « Mais c’est arrivé un peu trop vite, donc nous n’étions pas prêts à recevoir des invités. Toutes mes excuses. C’était la seule salle disponible. J’aurais aimé préparer un cadre plus formel. »

« Merci de votre hospitalité, Votre Altesse. C’était ma propre folie de ne pas vous en avoir informé plus tôt. Même si vous me saluiez dans un champ vide, je serais comblé de gratitude, » déclara Jiva.

« Je suis heureux que vous disiez cela. » Wein s’était mis à sourire, comme s’il parlait à un ami proche.

Jiva pouvait voir pourquoi les résidents de Natra l’aimaient. Mais il ne se laisserait pas influencer. Après tout, c’était un individu de Marden, et la bataille entre les deux ne faisait que commencer.

« Alors, Seigneur Jiva, qu’est-ce qui vous a amené jusqu’à nous aujourd’hui ? Vous devez savoir que ce territoire n’est pas très amical pour les citoyens de Marden en ce moment, » déclara Wein.

Il était là, le cœur du problème. Jiva avait grincé des dents pendant un moment.

« Oui, bien sûr, » commença Jiva. « En lieu et place d’une armée, je suis venu exprimer notre gratitude. Merci d’avoir pris la responsabilité de protéger cette terre. Nous vous sommes tellement reconnaissants d’avoir accepté de discuter de la façon dont nous pouvons transférer la propriété de cette mine d’or. »

*

En entendant ses paroles, Ninym et les gardes avaient fait la même expression de stupéfaction. Il vient de dire quoi ?

S’il leur avait hardiment ordonné de rendre la mine, les soldats auraient été prêts à mettre fin à ses jours. Bien sûr. Mais il avait dit la dernière chose qu’ils s’attendaient à entendre.

Même Wein avait été surpris par cette tournure des événements. Mais voici ce qui l’avait séparé des autres.

« Hmm, oui, je vois. Votre esprit est concentré, » déclara Wein.

Pendant que tout le monde restait là, stupéfait, Wein avait compris ses intentions en un instant.

Ninym avait griffonné une question sur une feuille de papier. Wein, que se passe-t-il ?

En gros, il dit : « Faisons comme si rien de tout ça n’était arriver. » Son écriture était fluide, et calme.

Elle fronça les sourcils pendant quelques secondes, puis se rendit compte de ce qui se trouvait sur son visage. Il lui avait donné un petit sourire secret.

Marden voulait récupérer la mine d’or dès que possible. Mais toute négociation s’éterniserait sans aucun doute au fur et à mesure des réparations, des échanges de prisonniers de guerre et de la redéfinition des frontières, entre autres choses, tout en dansant autour du thème des précédents actes d’agression et de violence commis par Marden contre Natra.

On dirait qu’il saute à la partie où nos pays pardonnent et oublient. Ce gros lard n’en a peut-être pas l’air, mais il ne donne pas de coups de poing.

Cela pourrait aussi être un moyen de dissimuler la vérité de leur défaite et d’aider leur fier roi Fyshtarre à sauver la face. C’était une décision plutôt brillante.

« Il n’y a pas de mots pour décrire notre gratitude pour la sauvegarde de cette région de nos voisins communs, les Kavalinu. Ces ennemis continuent de nous menacer de toutes parts. Nous aimerions vous offrir une récompense en guise de remerciement, » déclara Jiva.

Bien sûr, cette soi-disant récompense n’était rien de plus qu’une réparation et un rachat. Certains se disputeraient sur le montant total, mais jusqu’à présent, les choses allaient mieux que la négociation moyenne de l’après-guerre.

Bien que cette proposition semblait céder plus d’avantages à Marden, il y avait aussi bien des mérites évidents pour Natra.

« Ah, vous nous avez vraiment sauvés. Cette mine d’or est la force vitale de notre pays. Si elle avait été volée par une puissance étrangère… Oh, nous devrons peut-être déclencher notre colère et détruire impitoyablement cette nation ennemie, » déclara Jiva.

Il s’agissait de l’un de ces mérites. Éviter la guerre avec Marden était une bonne affaire.

Natra avait peut-être gagné la bataille dans les terres désolées de Polta. Mais qu’en est-il de la prochaine bataille ? Et s’ils gagnaient à nouveau, la bataille d’après ? En ce qui concerne leur force militaire, Natra était manifestement désavantagée. À un moment donné, leur pays atteindrait ses limites. Même s’ils résistaient contre Marden, un autre pays trouverait une occasion d’attaquer.

Bien sûr, Marden faisait face au même problème, mais Wein avait de sérieux doutes quant à la capacité du roi Fyshtarre à évaluer les risques, même s’il essayait.

Les agissements de Fyshtarre sont une question de fierté. Peu importe le nombre de fois qu’il perdra, il se relèvera… Une autre défaite l’énervera. Désolé, mais je n’ai aucun intérêt à aller face à ça.

Ce n’était pas une mauvaise idée de faire disparaître cette bataille de l’histoire. Sans la honte de perdre, il y avait de bonnes chances que leur roi se calme pendant au moins un moment. Pendant ce temps, Natra pouvait utiliser l’argent qu’ils avaient escroqué à Marden et augmenter leur force militaire.

Eh bien, il y avait aussi quelques inconvénients. Pour commencer, leur patriotisme et leur valeur seraient meurtris. Les troupes ne seraient pas très heureuses d’entendre cela, vu que leurs honneurs et leurs mérites lors de la bataille seraient censurés en même temps que la guerre elle-même. Et si Marden les compensait financièrement, ça laisserait un mauvais arrière-goût dans la bouche de tout le monde. Mais il y avait encore assez de raisons d’accepter la proposition de Jiva.

C’est fondamentalement confirmé… Marden n’a aucune idée que la mine s’assèche.

Seuls quelques rares individus connaissaient toute la vérité. S’il continuait d’attendre une autre solution, sa chance finirait par s’épuiser, ce qui signifierait que la confiance de ses hommes en lui s’effondrerait. D’un autre côté, il était évident qu’ils seraient fous si la mine d’or était vendue à un autre pays.

Et s’ils le revendaient à Marden maintenant ?

Il pourrait le rendre avant d’en profiter. Cela signifiait qu’il ne serait pas tenu responsable, même si la vérité sur la valeur décroissante de la mine était découverte. Au lieu de cela, des conflits éclateraient dans le cercle restreint de Marden.

Et si Marden avait dit qu’ils voulaient un remboursement, Natra pourrait feindre l’ignorance. Il perdrait d’abord le respect de ses soldats, mais ils pourraient réévaluer ses actions s’ils savaient la vérité.

C’est ma seule chance d’éviter la guerre et de les escroquer d’une tonne d’argent…

Vas-tu aller dans le sens de sa proposition ? Ninym avait écrit son message.

Ouais, mais si on mord à l’hameçon trop tôt, ils sauront qu’on cache quelque chose. Nous devons agir avec incertitude pendant un moment, répondit Wein.

Ne sois pas trop gourmand, prévient-elle.

Tout se passera bien. Je ne ferai rien pour les prévenir, répondit Wein.

Elle l’avait regardé d’un air mal à l’aise, mais Wein lui avait fait un sourire confiant en retour.

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2 commentaires :

  1. Ethan Nakamura

    Merci pour le chapitre.

  2. amateur_d_aeroplanes

    La, je doit dire que je ne m’attendait pas a cette stratégie 😉

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