Kimi to Boku no Saigo no Senjo – Tome 7

Table des matières

***

Prologue : Le Seigneur Yunmelngen

L’Empire céleste — un territoire uni et construit telle une forteresse.

Toutes les décisions politiques étaient prises ici, dans la zone impériale, qui contrôlait la plus grande masse de terre du monde. Le pouvoir législatif était géré par le Sénat impérial, et les objectifs militaires étaient émis par les quartiers généraux des armées et les ordres n’étaient exécutés qu’après avoir reçu l’approbation du Seigneur.

Au dernier étage de la plus ancienne tour de la capitale impériale — Le Paradis entre la Clairvoyance et la Perspicacité…

« J’ai un rapport pour vous, Votre Excellence. Nous avons lancé notre attaque sur le palais de Nebulis. »

« … »

« Bien sûr, c’est leur palais — considéré par eux comme leur forteresse planétaire. Les forces qui les envahissent sont d’élite, mais peu nombreuses. J’imagine qu’ils auront quelques difficultés à conquérir l’endroit. »

Le messager était un homme costaud et moustachu en uniforme militaire. Personne dans cette nation n’ignorait son identité.

C’était le Seigneur Yunmelngen lui-même — ou du moins, c’est ce que le public avait été amené à croire.

« Cela fait presque trente minutes que l’invasion a eu lieu, » poursuit l’homme.

« … Et ? »

« Par les flammes et par la nuit, quatre Disciples Saints ont réussi à infiltrer le palais. »

 

Cet homme austère avec une moustache pouvait être vu à toutes les cérémonies impériales agissant en tant que Seigneur. La vérité était… qu’il n’était qu’une doublure du vrai Seigneur derrière le mince rideau.

 

« Les trois Disciples Saints — Risya, Mei, et Sans Nom — ont chacun localisé les descendants de la Fondatrice. Ils ont commencé à se battre pour éliminer les menaces. »

« Et Joheim ? »

« Il agit seul, en route vers l’espace de la Reine. Cela fait quinze minutes que nous n’avons pas communiqué avec lui. Il est peut-être déjà tombé aux mains de l’ennemi. »

« … Ou bien il est en train de se battre avec la reine, » râla une voix âgée et rauque de l’autre côté du rideau. On aurait dit quelqu’un sur son lit de malade, tenant à peine le coup, proche de son dernier souffle. « Ces huit grands apôtres sont nuisibles. »

Derrière le rideau, l’ombre du Seigneur tremblait comme si elle était éclairée par la lumière d’une bougie. Un doux soupir était suffisamment audible pour être entendu.

« J’ai cru comprendre que le plan était d’attaquer le palais pendant que la Fondatrice Nebulis sommeillait — pour capturer les Sangs Purs. J’imagine que la Fondatrice ne sera pas contente de moi quand elle sera réveillée. »

« J’imagine. »

« J’aimerais que cette chose continue à sommeiller pendant un moment. » Un autre soupir de derrière le rideau.

Cela avait conclu le rapport. Les deux secrétaires qui servaient le double corporel s’inclinèrent et quittèrent la pièce. Seul l’homme d’âge moyen — le double lui-même — était resté en présence du Seigneur.

Un silence s’était abattu sur eux. Le Paradis était silencieux.

« Si je peux me permettre, Votre Excellence. » Le sosie s’était éclairci la gorge. « Si vous voulez bien me faire l’honneur d’une petite conversation : vous êtes-vous récemment glissé dans le quartier des affaires de la capitale ? »

Le double corporel avait gardé les yeux fixés sur l’autre côté du rideau, fixant durement la silhouette.

« Selon les rumeurs de la Première Avenue, les policiers militaires ont reçu le rapport d’une jeune femme affirmant avoir vu une bête étrange — un renard argenté marchant sur deux pattes. »

« … »

« Je crois vous avoir demandé de vous abstenir d’excursions imprudentes ? »

« Hmm… ? Je ne me souviens pas que quelqu’un m’ait dit ça. » La voix derrière le rideau était presque méconnaissable. Elle semblait presque vivante maintenant, comme si quelqu’un retenait son rire, comme un garçon soprano. « Mais je suppose que ta mémoire est meilleure que la mienne. »

Le rideau s’était ouvert…

+

… Il avait révélé une bête humanoïde argentée qui avait doucement gloussé.

+

La figure était assise sur des tatamis tissés, avec ses jambes de renard bipèdes croisées. Ses doigts étaient articulés comme une main humaine. La silhouette n’était pas entièrement animale — seul le corps ressemblait à un renard, tandis que le visage était presque humain. En d’autres termes, un Therianthrope, comme sorti tout droit d’un conte de fées. Le monstre avait gloussé de plaisir.

« … » Le double n’avait rien dit. Après tout, cette bête argentée était son maître.

« Ha-ha, ça me rappelle quelque chose. » Le chef du plus grand État militaire du monde, le Seigneur Yunmelngen, avait l’air exalté. « Cela fait déjà trente ans ? Je crois me souvenir avoir vu un jeune garçon s’enfuir en larmes après avoir vu ce pauvre vieux Meln. »

« Je me souviens avoir été figé de terreur comme si c’était hier. » Le double avait hoché la tête. « J’ose dire que la fille qui vous a vu a dû avoir une peur similaire. »

« Tout est écrit dans les étoiles. L’enfant d’il y a trente ans est maintenant mon double. Tu joues bien ton rôle, tu te fais pousser la barbe et tu me parles. Ce n’est pas une mauvaise vie, n’est-ce pas ? »

 

« … »

 

« Je vais peut-être faire de cette fille mon dixième double. Donne-lui encore dix ans. » Une queue touffue avait remué tandis que le Seigneur regardait dans le vide, apparemment amusé.

La Fondatrice Nebulis s’était révoltée il y a seulement un siècle… une période relativement courte comparée à l’histoire derrière le titre de Seigneur. La personne qui recevait ce titre était choisie par une méthode clandestine appelée la Cérémonie de l’Ascension, qui était tenue secrète même pour les citoyens impériaux. Sous la surface et cachés de l’histoire, les seuls à changer de fonction étaient les doubles corporels.

Le chef de l’Empire n’avait jamais changé. Celui qui s’était autoproclamé Meln régnait sur l’Empire.

« Je dois avoir l’air d’un disque rayé à ce stade, mais… » La bête argentée avait tendu une main d’apparence humaine dans l’air, son bras couvert de fourrure comme un renard ou un loup. « L’énergie astrale qui bouillonne au cœur de cette planète est extrêmement puissante. Elle peut pousser la vie à de nouveaux niveaux. »

« Je suppose que vous faites référence à votre propre corps ? »

« Hmm ? Je ne parle pas de moi pour le moment. » La bouche du Seigneur forma un rictus — des canines acérées de loup pointant sur les côtés. « Apparemment, une autre sorcière est née dans la souveraineté de Nebulis. Et je ne parle pas de la Fondatrice. C’est pourquoi j’ai fait l’effort d’envoyer Risya pour qu’elle enquête. Et j’ai fait une petite allusion au sorcier transcendantal. »

« Voulez-vous dire le Subjet de Test E ? »

« J’imagine que cette nouvelle sorcière se révélera au cours de notre raid. Bref, assez parlé de ça… » La bête argentée avait levé les yeux au plafond, en contemplant quelque chose. « … Cela nous met certainement dans une impasse. L’Empire attaque actuellement le palais. Si la Fondatrice se réveille, elle reportera sa colère sur moi. Je suppose que je n’en ai pas fait assez pour arrêter les Huit Grands Apôtres. Je ne voulais pas être mêlé à leurs problèmes. »

Le Seigneur avait haussé les épaules, comme s’il n’y avait pas d’autres options. Ces gestes étaient remarquablement humains.

« Fondatrice Nebulis. » Maintenant, le visage du renard semblait intimidant, comme si la bête féroce à l’intérieur s’échappait. « Il semble que votre pays va se transformer alors que vous vous endormez d’un rêve dont vous ne pouvez vous réveiller. Mais ce n’était pas la volonté de l’Empire. Vos propres descendants ont cherché cette guerre. »

***

Chapitre 1 : Nuit de la chasse aux sorcières, Première partie

Partie 1

Le palais de Nebulis.

Abritant les descendants de la Fondatrice, il s’enorgueillit d’une défense imprenable que les forces impériales n’avaient jamais réussi à franchir.

La forteresse planétaire avait été construite par la puissance astrale cristallisée qui avait été invoquée par des techniques anciennes. Nichée dans le ciel nocturne noir de jais, elle dominait la terre comme un récif de corail lumineux.

 

Le château était en flammes.

 

Sous l’effet du vent, des braises s’étaient déposées sur la pelouse et l’avaient embrasée. Les flammes qui clapotaient sur les murs extérieurs du château étaient de plus en plus fortes et ne montraient aucun signe d’affaiblissement.

« Rin ! Dépêche-toi ! »

Et maintenant… le diadème lunaire, le couloir suspendu reliant les tours du palais, avait explosé sous le regard d’Alice depuis la fenêtre de Cadillac One.

« … Comment cela peut-il arriver ? »

Des centaines de tonnes de gravats étaient tombées du ciel. S’il y avait eu des membres du corps astral dans sa trajectoire, les pertes subies auraient été incalculables.

« Ne t’inquiète pas, Lady Alice. Nous savions que cela arriverait, » répondit Rin en saisissant le volant depuis sa position sur le siège du conducteur. « Le couloir aérien a été conçu pour se détacher des autres tours, un mécanisme visant à empêcher quiconque d’atteindre le palais de la reine en cas de raid impérial. Les défenses du château fonctionnent correctement. C’est une bonne nouvelle. »

« … »

Mais, Rin, n’est-ce pas la même chose qu’un lézard qui se coupe la queue pour l’utiliser comme un leurre ? Alice s’était mentalement interrogée. C’était un sacrifice pour le bien de la survie. N’était-ce pas la même chose que de signaler aux forces impériales qu’elles avaient coincé les mages ?

« Ces flammes sont le vrai problème. Les troupes impériales auraient-elles pu ouvrir le feu sur les réservoirs de carburant cachés… ? » Rin avait serré les dents du fond.

Craquement. À ce moment-là, un petit trou avait percé le pare-brise de la Cadillac One.

Était-ce un tireur d’élite ? S’ils tiraient sur cette voiture avec des balles spéciales, ça devait vouloir dire…

« Rin, sors de là ! »

Alice avait ouvert la porte de la banquette arrière, se jetant hors du véhicule. Rin avait évacué le siège du conducteur. Alors qu’elles roulaient sur la pelouse sombre, une bombe incendiaire avait frappé la voiture, qui s’était instantanément enflammée.

« Je le savais. Ils se mettent à l’abri dans la nuit pour nous tirer dessus ! »

« Lady Alice, j’y vais en première. Nous ne savons pas combien de soldats impériaux sont sur le terrain ! Fais attention aux balles perdues ! »

Alors que les flammes de l’enfer crépitaient tout autour d’elles, Rin s’était élancée plus loin dans la zone. Alice suivit, se dirigeant vers le Palais de la Reine — la tour abritant sa mère, la reine Nebulis IIX.

« Lady Alice ! Vous êtes vivante ! » Les membres du corps astral s’étaient retournés pour la regarder.

Illuminée par les flammes, la robe royale d’Alice — d’un blanc pur — était si belle qu’ils avaient momentanément oublié qu’il s’agissait de son uniforme de combat. Elle criait aussi sa présence. Conçue uniquement pour les descendants directs de Nebulis, cette tenue avait été conçue pour que ses sujets puissent la reconnaître au premier coup d’œil.

« Mettez-moi au courant de la situation, » ordonna Alice.

« Oui, madame ! Nous nous sommes concentrés sur la protection du Palais de la Reine. Nous avons aidé tous les civils à évacuer les tours vers les abris souterrains. »

« Des attaques sur les bunkers ? »

« Aucun à noter. Les membres du corps astral stationnés les gardent. D’après les rapports, les mercenaires de l’Hydra sont venus en renfort. »

« … Je m’assurerai de remercier le Seigneur Talisman. »

Il restait donc deux autres préoccupations : garantir la sécurité de la reine et contenir la propagation de l’incendie. Sans surveillance, les flammes pourraient causer des blessures en dehors de l’enceinte du palais.

« Dépêchez-vous de rejoindre Sa Majesté, la reine ! » Plusieurs membres du corps astral couraient vers elle, essoufflés. « Nous allons nous occuper de… »

« Stop ! » Alice cria.

Une masse de feu avait explosé à côté d’eux, trop grande pour être vue dans toute son ampleur. Elle avait englouti les membres du corps astral. Les pouvoirs d’Alice s’étaient activés automatiquement dès qu’elle avait senti l’explosion. Tout ce qu’elle avait réussi à faire, c’est un mur fait d’une fine pellicule de glace, d’une épaisseur d’à peine un centimètre.

« Uh… Ack ! »

« Êtes-vous tous — !? »

Traversant le mur de glace, un vent avait soufflé sur le corps astral. Même leurs uniformes résistants à la chaleur n’avaient pas pu absorber l’impact. Alice n’avait pas agi assez vite pour les couvrir. Ses subordonnés s’étaient effondrés sur le sol, leur dos gravement brûlé.

« Lady Alice, vas-tu bien ? » demanda Rin.

« Ne t’inquiète pas pour moi ! Inquiète-toi de ces quatre-là… On a besoin de médecins ! Où sont les médecins ? Par ici ! » cria Alice.

Elle connaissait cependant la vérité brutale. Les médecins ne viendraient jamais. Les membres du corps astral étaient effondrés sur tout le terrain du palais.

« Rin ! Crée un golem. Emmène ces quatre-là dans l’abri souterrain de la Maison des Lou. Les médecins devraient être en attente là-bas. Je vais attendre ici. »

« Qu… quoi !? Mais, Lady Alice —, » balbutia Rin.

Leur objectif était de se diriger vers le Palais de la Reine. Cela nécessitait de laisser les soldats au sol.

« Je pense clairement… J’essaie, du moins. » Alice serra les dents et secoua lentement la tête. « Ma mère a ses propres gardes. Le palais de la reine a des défenses parfaites, donc les pires victimes seront dans l’enceinte du palais. »

« … »

« Reviens dans un quart d’heure. Pendant ce temps, je vais travailler à éteindre les flammes. »

« Comme tu le souhaites. » Rin s’inclina. Le sol derrière elle se souleva, donnant vie à un gigantesque golem qui berça les soldats blessés. « J’ai l’intention de revenir dans exactement quinze minutes, mais je m’attends à ce qu’il y ait des soldats impériaux sur mon chemin. Si je suis en retard, même d’une minute, veille à te rendre au Palais de la Reine, Lady Alice. »

Rin et son golem coururent dans la nuit, des braises les suivirent.

Quinze minutes.

Ça devrait aller, s’était dit Alice en expirant.

… Tout ira bien. Je sais que c’est le bon choix.

… Même un Saint Disciple ne pourra pas entrer dans l’Espace de la Reine en si peu de temps.

Pas même Iska. Ni même Sans Nom. Alice savait que les Saints Disciples étaient des soldats d’élite à craindre, mais le palais était un labyrinthe vivant créé par les puissances astrales. Sans savoir comment la tour avait été construite, il était impossible d’atteindre l’Espace de la Reine.

« Astral Corps, écoutez bien ! » Alice avait forcé sa voix, essayant de parler par-dessus le brasier crépitant. « Je vais contenir le feu ici en utilisant mon pouvoir astral. Les choses vont devenir dangereuses. Repliez-vous derrière moi immédiatement ! »

Elle resterait sur le terrain et aurait pour priorité d’éteindre les flammes.

… À ce moment-là, Alice ne savait pas qu’elle finirait par regretter ce choix.

 

+++

Souveraineté de Nebulis. État central.

La campagne était pittoresque et boisée. En dehors de la ville, des vallées enneigées s’étendaient jusqu’à l’horizon lointain. Cette zone abritait une villa appartenant à la Reine Nebulis IIX de la Maison des Lou. Le manoir des Lou Erz.

Le château d’ivoire se dressait sur un terrain qui s’étendait à perte de vue. Aucune rénovation n’avait été apportée à son extérieur, mais la porte automatique équipée de dispositifs de surveillance n’était que l’une des nombreuses technologies de pointe qui avaient remplacé l’intérieur du bâtiment.

 

Le château avait commencé à s’effondrer.

 

Le plafond de la salle principale du premier étage s’était effondré, ses quatre murs étaient troués. Le deuxième étage était dans un état encore pire. Des coups de feu intermittents résonnaient dans les couloirs.

« Ils nous ont encore trouvés… ! Patron ! Néné ! Par ici ! » hurla Jhin, le sniper aux cheveux argentés, entre deux tirs sur les deux membres de l’unité 907. Il s’agrippait à la main de la jeune fille qui s’était blottie près de lui.

« Eeeek ! »

« Nous allons sortir d’ici. Où est notre prochaine cachette ? »

« Je suis à l’arrière ! » En tenant sa main, Sisbell avait commencé à se précipiter en avant.

Une fille avec de grands yeux de biche et des cheveux brillants blonds-roses comme des fraises. Elle était mignonne avec la faible lueur sur ses joues et ses lèvres, mais elle semblait visiblement nerveuse.

Elle devait avoir quatorze ans, peut-être quinze. Il ne connaissait pas son âge réel. En tant que soldat impérial, Jhin n’avait pas besoin de cette information. Il avait juste été chargé de la protéger. De plus, c’était une sorcière. Si c’était un champ de bataille, il aurait pointé son arme sur elle…

C’était une exception. Ils avaient fait un échange — la garder en échange de quelque chose qui leur était bénéfique.

« Nous avons accepté de l’emmener au palais en échange de l’obtention de ces auto-adhésifs permettant de cacher les crêtes astrales pour le patron… Je savais que ce serait risqué, mais pas au point de mettre sa vie en danger. »

« Avez-vous dit quelque chose ? »

« Rien. Vous gardez la tête baissée et vous courrez. Si vous vous faites toucher par une de ces balles perdues, vous souffrirez plus que vous ne l’auriez cru, » dit Jhin tandis que Sisbell court à ses côtés.

Leurs ennemis étaient les corps astraux de l’Hydra, qui étaient déguisés en soldats impériaux. Organisant secrètement un coup d’État contre la reine, l’Hydra avait tenté de faire taire Sisbell avant qu’elle ne puisse révéler la vérité en utilisant l’Illumination.

Les assaillants avaient attaqué la résidence, ce qui avait mis l’Unité 907 dans une situation difficile.

« Hé ! Ne pouvez-vous pas faire quelque chose en utilisant votre pouvoir astral ? Comme les faire exploser ou autre ? »

« Je n’aurais pas engagé de gardes si j’avais pu ! »

« Et les serviteurs ? »

« Les chefs et les jardiniers ne peuvent pas vraiment se battre. Les serviteurs pourraient être capables de se défendre. S’ils ne se cachent pas, nous aurons plus de victimes ! » Sisbell avait pratiquement répondu en hurlant.

***

Partie 2

Ils étaient évidemment désavantagés en termes de puissance de feu. Les ennemis qui les poursuivaient dans le couloir étaient des mages astraux équipés de matériel destiné aux troupes impériales. D’un autre côté, Jhin et les autres ne portaient que des armes suffisantes pour se défendre.

« N’avez-vous pas d’arme !? »

« C’est pour le tir à longue distance. Je n’ai pas le temps de le préparer pour une mêlée dans un manoir. En plus, je n’ai pas assez de munitions. Je ne pourrai pas tous les tuer. »

S’il devait diriger sa lunette sur quelqu’un, ce serait sur le chef ennemi. En d’autres termes, il aurait dû tirer sur Talisman, le chef de famille, mais Iska retenait cet homme au premier étage. Pour l’instant, Jhin devait se concentrer sur la sécurité de sa protégée, Sisbell.

« Je crois qu’on va jouer au chat et à la souris pendant un moment. »

« Oh… si on ne fait que courir, mon pouvoir astral pourrait nous faire gagner du temps. »

« Vraiment ? »

« Une seule fois. C’est du bluff, donc il n’y aura pas de seconde chance. » Sisbell mit sa main sur sa poitrine et pivota pour faire face à l’arrière, se tournant vers les assaillants à leur suite. « Planète, s’il te plaît, montre-moi ton passé. »

Le blason sur sa poitrine brillait d’énergie astrale, sa lumière manifestant une illusion tridimensionnelle élaborée qui bloquait les assassins. Le mirage avait produit une unité impériale avec plus d’une douzaine de soldats.

« Quoi !? » Les assassins se mirent immédiatement en position de combat. Instantanément, ils enregistrèrent la possibilité que des soldats impériaux autres que l’Unité 907 se soient cachés dans le manoir.

Ils n’avaient pas réalisé que ces troupes étaient leurs propres déguisements.

« Tsk ! Je croyais que le rapport ne mentionnait que quatre soldats impériaux… »

« Il y en avait donc d’autres qui se cachaient ! »

Ils ouvrirent le feu. Le jet de balles traversa l’hologramme. Au moment où les assassins avaient compris que c’était l’oeuvre de Sisbell, Jhin et les autres s’étaient réfugiés dans l’ombre des escaliers.

« Hé, patron ! Comment est la situation ? »

« Je — Je pense que nous allons bien. Ils ont perdu notre trace… ! » Le capitaine Mismis avait écouté le bruit des pas.

À côté d’elle, Sisbell était assise sur le sol, haletante. « Haah… Haah… Qu’est-ce que vous en pensez ? Je les ai piégés. »

« Votre pouvoir astral peut-il aussi créer des hallucinations ? »

« Ce n’était pas une hallucination. Je viens de reproduire leur raid, qui s’est produit dans cette résidence il y a quelques minutes à peine. » Sisbell avait essuyé des perles de sueur. « Personne de la Souveraineté ne pourrait garder son calme si des soldats impériaux armés apparaissaient devant eux — en tenue de l’Empire, qui plus est. Cela a dû les faire sursauter temporairement. »

« Je vois. Ça explique pourquoi on ne peut pas utiliser ce tour deux fois. Ils ne se laisseraient pas prendre une seconde fois. » Jhin regarda fixement le palier de l’escalier. Ils étaient au deuxième étage du vieux château. Le chef de l’Hydra était au premier étage, bloqué par Iska. La chambre de Sisbell était au troisième étage, mais des assassins l’y attendraient.

« Si nous ne sortons pas d’ici, nous allons être encerclés. Avez-vous des idées d’endroits d’où on pourrait sauter au deuxième étage ? »

« Uh… At... at... ttendez. »

« Oh. Ouais, ne parlez pas. Nous allons gagner du temps ici jusqu’à ce qu’ils nous trouvent. »

Elle était en état de choc. Ils avaient été poursuivis sous la menace d’une arme, après tout. En plus, c’était sa maison de vacances, et son ennemi était un autre membre de la famille royale. Elle prenait les choses bien, tout bien considéré.

« Mais vous ne me surprendrez jamais à faire l’éloge d’une sorcière. »

« Quoi ? »

« Rien. Restez tranquille et écoutez-moi. Secouez la tête quand vous voulez dire non. »

« — »

« Laissez-moi confirmer la situation. Vous êtes leur cible, c’est évident. Vos poursuivants sont la Maison d’Hydra, qui critique la lignée de la reine. Ils vous poursuivent pour votre pouvoir astral, n’est-ce pas ? »

Illumination pouvait reproduire le passé en trois dimensions, ce qui signifiait que Sisbell pouvait dénoncer des crimes odieux en recréant la scène. Son pouvoir était idéal pour analyser des informations et rassembler des preuves de méfaits.

C’est pourquoi elle était leur cible. Elle était poursuivie par les cerveaux derrière le complot d’assassinat de la reine.

« Et le nom du type louche qui s’est engagé avec Iska est… Talisman, non ? Il a essentiellement reconnu qu’il est celui qui est derrière tout ça. »

 

« Lord Talisman !? C’était vraiment vous… !? »

« C’était nécessaire. Nous avons besoin de la puissance de l’Empire pour atteindre le noyau de la planète. »

 

Le chef de l’Hydra, Talisman. L’homme responsable de l’attaque de ce manoir avait pris la question de Jhin avec le sourire. Si sa collusion avec l’Empire avait été révélée, il n’aurait pas seulement été qualifié de traître, il aurait certainement été chassé de la famille. Il devait y avoir une raison pour laquelle il avait semblé si imperturbable.

« La réussite de son stratagème repose sur une chose : vous faire disparaître pour empêcher la vérité sur l’assassinat d’éclater au grand jour. Il doit convaincre la population que des soldats impériaux sont responsables de l’attaque de ce manoir et de votre enlèvement. Et personne ne doutera de lui, après tout, de véritables forces impériales font un raid sur le palais royal en ce moment même. »

C’est exact. Une attaque orchestrée par l’Hydra avait commencé sur le palais, qui était situé loin de cette villa.

« Et il y a une autre personne sur cette photo : votre sœur Elletear. Nous n’avons que des preuves circonstancielles concernant son implication, donc nous essaierons de le prouver plus tard. Quoi qu’il en soit, elle n’est pas dans le manoir pour le moment. »

« … C’est ça. »

« Je vais dire ceci juste pour être clair : nous sommes des sujets impériaux. Il est tout à fait normal pour nous d’attaquer un pays ennemi — nous sommes en guerre depuis cent ans, après tout — alors nous nous fichons complètement de ce qui arrive à votre palais. »

« … Je comprends. »

« Mais nous vous protégerons », dit-il à la jeune fille dont les grands yeux papillonnent, mal à l’aise.

Silencieusement, Jhin lui avait fait signe de se mettre debout.

« Je me fiche que nos soldats attaquent ou que vous soyez une sorcière ennemie. Nous vous escortons jusqu’au palais, alors arrêtez de faire cette tête, Mopey. »

« Qui croyez-vous appeler Mopey ? » grogna Sisbell en se levant. « Et vous êtes vous-même grossier ! »

« Si vous avez assez de matière grise pour répondre, vous devez vous mettre en tête le fait suivant. La chose la plus importante est de sortir d’ici. Je ne suis pas difficile. Alors, dites-moi : Par quelle fenêtre du deuxième étage peut-on sauter ? »

Le filet se refermait lentement sur eux. Leur seul moyen de s’échapper était de sortir. Ils n’attireraient pas l’attention s’ils sautaient dans les jardins sous le voile de la nuit. S’ils arrivaient jusqu’à la ville, les assassins ne pourraient pas les attraper.

« Ils sont habillés comme des soldats impériaux, donc s’ils descendent dans la rue, on les prendra pour des ennemis, et le corps astral sera à leur poursuite. Ils ne vont pas s’en prendre à nous. »

« Mais qu’est-ce qu’on va faire pour Iska !? »

« Il va se débrouiller. »

« … Mais il se heurte à la famille royale, et à un chef de famille, en plus. »

« Je ne nierai pas que les sangs purs sont synonymes de danger, mais Iska n’aura aucun problème. Il sera en difficulté s’il est désespérément en surnombre, mais il saura quand se sortir de la situation avant que les choses ne commencent à mal tourner pour lui. Maintenant, restez tranquille pendant un moment. » Jhin pressa une main sur la bouche de Sisbell et regarda la commandante à côté de lui. « Patron, qu’est-ce qui se passe avec nos poursuivants ? »

 

 

« Euh. Je n’entends pas leurs bruits de pas. Ils sont peut-être déjà dehors, pensant que nous sommes sortis du manoir. »

« Ce n’est probablement pas le cas, mais j’espère qu’ils se séparent pour que certains d’entre eux puissent monter la garde à l’extérieur… Hey. »

« Je — je vous entends. Vous voulez que je vous montre le chemin, non ? » Sisbell acquiesça et désigna le couloir. « Au coin du chemin, tout droit. Il y a plusieurs pièces inutilisées et un dense fourré d’arbres à l’extérieur de la fenêtre, donc je pense qu’il devrait être difficile pour eux de nous repérer. »

Puis elle a commencé à marcher.

Dès que ses pieds délicats avaient commencé à bouger, le sol avait craqué et s’était enfoncé sous elle.

« … Hein ? » Sisbell s’était arrêtée dans son élan, sentant que quelque chose n’allait pas du tout.

Ses pieds n’avaient pas foulé le tapis couleur vin. À sa place, elle avait trouvé une couche de neige blanche cristallisée.

 

Je vous ai trouvé, soldats impériaux — et Lady Sisbell.

 

« Sisbell, attention ! » Néné lui avait tiré la main par derrière.

Le plafond avait explosé, s’ouvrant sur le troisième étage. La neige s’était déversée comme une cascade.

« Un blizzard dans le manoir ? Ça doit être cette vieille femme ! » Jhin avait préparé son fusil à lunette. Il tira sur la sorcière rouge qu’il distinguait derrière la poudre neigeuse ruisselant du plafond.

« C’est inutile, soldat impérial. » La vieille femme avait été aspirée par la tempête de neige. « Un mètre cube de neige tassée peut peser une demi-tonne. Elle peut absorber n’importe quel son, amortir n’importe quel impact. Même une mitrailleuse ne pourrait pas la transpercer, sans parler d’une si petite balle. »

Le couloir du manoir de Lou Erz avait été inondé de blanc, se transformant en un paysage hivernal.

« Vous avez pu me fuir auparavant, mais il semble que vous ne puissiez pas fuir longtemps — pas avec Mlle Sisbell avec vous. »

« Comment ça va, grand-mère », grogna Jhin. « Tu es là. »

En sautant du trou se trouvait une vieille femme — une sorcière élancée dans une tenue rouge rappelant l’habit d’une nonne. Sur le fond blanc pur, le contraste était saisissant.

Grugell, la sorcière du soleil de minuit. Cette sorcière chevronnée pouvait contrôler la neige, une sous-espèce du pouvoir astral de la glace. Elle était tristement célèbre, se plaçant sur la liste des sorcières pourchassées par les soldats impériaux.

« Persistant, n’est-ce pas ? N’as-tu pas dépassé l’heure du coucher, mamie ? »

« J’aimerais me reposer si vous me le permettez. Je suis fatiguée de jouer au chat et à la souris. » La sorcière en rouge avait levé les mains. « Vous me donnerez Miss Sisbell. »

« J’ai bien peur que non. »

Au moment où la neige explosait sous les pieds de la sorcière, Jhin attrapa la main de Sisbell et commença à sprinter.

« Jhin ! Les soldats de tout à l’heure reviennent… ! » cria le capitaine Mismis.

« Ne t’inquiète pas pour eux, patron. Ne regarde pas derrière toi — cours ! »

Derrière eux grondaient des géants faits d’énergie astrale. Des Golems. Jhin en avait déjà vu des faits de terre, mais jamais de neige.

« Néné — n’utilise pas ton arme. Tu vas gaspiller tes munitions. »

***

Partie 3

Ils auraient du mal à abattre les géants. Même si Néné détruisait une partie de ces choses avec un pistolet ou une mitrailleuse, elles se régénéreraient et attaqueraient à nouveau.

Les golems sur les talons de l’unité 907 firent trembler le sol sous leurs pieds.

« Qu-qu’est-ce qu’on va faire !? » demanda Sisbell.

« Nous ne pouvons pas aller au premier étage, » répondit Jhin. « Et nous ne pouvons pas les distancer à cet étage… ce qui nous laisse le troisième étage. Allez-y ! »

Le groupe s’était précipité vers l’escalier. Les escaliers avaient été conçus pour les humains, ce qui les rendait presque inaccessibles aux golems.

Cependant… le groupe d’humains avait manifestement été conduit là.

« … C’est comme si nous étions chassés. »

La vieille sorcière marchait lentement vers eux. Ils avaient pensé qu’elle allait laisser les golems les poursuivre, mais elle les avait poursuivis tout en gardant ses distances. Ses pieds suivaient les empreintes laissées par Jhin et les autres dans la neige tombée. Elle ressemblait exactement à un chasseur.

« Tu sais, grand-mère, tu deviens trop vieille pour ce genre de choses. » En grimpant les escaliers, Jhin avait soufflé des bouffées de blanc dans l’espace gelé. « Qui penses-tu qui chasse qui ? Ne sous-estime pas les soldats impériaux. »

+++

La maison de Lou Erz. Hall du premier étage.

Des étincelles crépitaient. Une fumée noire, fine comme des aiguilles, s’enroulait vers le plafond depuis les murs de droite et de gauche. Tout ce qu’il pouvait voir, c’était d’épais nuages de poussière, qui recouvraient ses poumons. C’était la seule chose qui restait après que les murs et les plafonds aient été détruits au-delà de toute reconnaissance.

« La Souveraineté est un pays qui est vieux — très vieux. »

Comme s’il séparait la mer, un homme d’âge moyen, élégamment vêtu d’un costume blanc, émergea de la poussière. Il avait le visage d’une star de cinéma — sur lequel il arborait un sourire de gentleman — et des muscles bien définis. C’est le chef de l’Hydra, Talisman, un puissant sang pur qui dirigeait l’une des trois maisons royales et qui était à l’origine du coup d’État.

« La reine de la Maison de Lou cherche désespérément à maintenir l’impasse dans la guerre avec l’Empire. Les Zoa attendent de prendre leur revanche. L’Hydra, vous voyez, s’ennuie avec le statu quo. »

« … »

« Quel est votre avis sur la question, sujet impérial ? » demanda Talisman, la voix douce.

« Vous n’aimeriez pas le savoir ? » cracha l’épéiste impérial — Iska — en réponse. « Je n’ai pas l’intention de faire durer cette conversation. Je suis presque sûr de vous l’avoir déjà dit. »

« Hmm ? »

« Je sais déjà comment vous faites les choses. Vous gagnez juste du temps pour pouvoir attraper Sisbell. »

Iska, l’ancien Saint Disciple, s’était séparé de l’Unité 907 pour gagner du temps et permettre à Sisbell de s’échapper. Il était resté derrière pour une raison : le chef de l’Hydra. Bien que l’homme semble doux au premier abord, son expression géniale n’était qu’un masque qu’il montrait au public. En réalité, c’était un monstre — et un monstre aux pouvoirs extraordinaires.

Un des descendants de la Fondatrice Nebulis — un sang pur avec le pouvoir astral des Ondes.

Il est un danger pour nous tous.

Plip. Une gouttelette rouge avait atterri sur la peau d’Iska.

La blessure qui, il en était sûr, avait cessé de saigner plus tôt s’était rouverte sur son front. Le sang coulait le long de sa paupière. Avant qu’il n’entre dans ses yeux, Iska avait utilisé le dos de sa main pour l’essuyer.

« Je me demande ce que vous sous-entendez, que je gagne du temps pour attraper Sisbell. »

À ce moment-là… la silhouette de Talisman avait commencé à devenir floue.

Les piles de débris sur le sol avaient explosé. Dès qu’Iska avait senti quelque chose se presser contre sa peau, il avait bondi en arrière, exerçant toute sa force physique.

Fwoom. L’air avait éclaté. Le poing de Talisman avait effleuré le bout du nez d’Iska avant de déchirer l’espace. C’était comme si un train était passé près d’Iska, dont quelques cheveux avaient été arrachés. Son corps s’était légèrement soulevé du sol.

Tout cela avait été causé par la seule pression du vent.

Est-ce qu’il n’a vraiment que le pouvoir astral des Ondes !?

Quelle est la force qu’il a concentrée dans son poing !?

Ces vagues étaient des déferlantes, qui manipulaient une énergie mécanique invisible. Ce type de pouvoir astral en lui-même n’était pas trop rare, mais les forces impériales avaient déterminé qu’il ne pouvait tirer que des coups de feu comme des balles invisibles.

Mais Talisman était différent. Il pouvait accélérer cette énergie mécanique et renforcer sa constitution corporelle.

« Vos yeux. Ils sont si observateurs. » La forme de Talisman avait disparu en un instant.

Iska l’avait senti en haut. Avant qu’il ne puisse descendre, le soldat avait levé la tête pour regarder le plafond.

« Vous avez aussi senti ça ? C’est votre ouïe ? Ou le toucher ? »

« Les deux, » répondit Iska.

Le souffle atmosphérique avait créé du vent. Dès que la brise avait caressé la peau d’Iska, il s’était mis en position de combat avant même de pouvoir voir l’homme. S’il ne pouvait pas se fier à ses yeux, il devinait les mouvements de son adversaire avec un autre sens. C’était le but de son entraînement.

Quelque chose explosa.

Talisman avait bondi, touchant presque le plafond, puis avait abattu son poing sur le sol de l’ancien château. Le résultat ressemblait à un bombardement aérien. Le sol en pierre avait éclaté comme si de la poudre à canon avait explosé.

« Incroyable. C’est comme si vous aviez un système de sonar de la tête aux orteils », commenta-t-il. Les yeux de Talisman pétillaient d’un sourire tandis qu’il poursuivait Iska.

Lorsque l’épéiste tentait de contrer, le sang pur attaquait lui-même le Saint Disciple, neutralisant le coup. C’est pourquoi Iska gardait ses distances. Dès que Talisman s’en était rendu compte, il fit une pause pour brosser la poussière de son costume.

Les spectateurs n’auraient jamais pu se rendre compte que pendant que les secondes s’écoulaient et qu’ils se dévisageaient, des manœuvres de vie ou de mort se jouaient sous la surface.

« Je sais que je me répète, mais je ne comprends vraiment pas. » L’homme d’âge moyen arrangea le col de son costume et haussa les épaules. « Pourquoi des soldats impériaux protègent-ils un membre important de Nebulis ? Pourquoi risquer votre vie pour la protéger ? Quelle est l’importance de la récompense promise ? »

« C’est vous qui avez attaqué en premier. Qu’y a-t-il de mal à chasser les insurgés ? »

« Je suppose qu’il est trop tard pour avoir cette discussion, mais tout ceci n’est qu’un malentendu. » Talisman avait forcé un sourire. « C’est un domaine appartenant aux Lou. Personne n’imaginerait même que des soldats impériaux se trouvent dans un château appartenant à notre famille royale. »

« J’en doute. Vous avez dû entendre parler de nous par Elletear. »

« Tsk. »

Bien que cela n’ait duré qu’un instant, le chef de l’Hydra avait plissé les yeux. Iska les avait regardés droit dans les yeux. « Vous vous faites une fausse idée de nous. »

Il y a quelque chose que Talisman ne savait pas. La plus jeune princesse, Sisbell, avait recherché le traître de la famille royale avant même que cette attaque ne se produise.

+

« Elleteaaaaaar ! »

« Je… Je ne comprends pas ce que tu penses ! Tu essaies de trahir notre patrie !? »

+

La princesse aînée, Elletear, avait essayé de renverser la reine. Elle était déjà rentrée au palais avant que les forces impériales ne commencent leur raid.

… Et elle était retournée sur les lieux pour l’orchestrer.

… Pour conduire les troupes d’élite de l’Empire au palais royal.

Ce n’était pas un plan à court terme. Il avait été comploté pendant des années — ou transmis pendant des générations jusqu’à ce qu’il atteigne Talisman, et Elletear lui avait donné son soutien.

« C’est moi qui pose les questions. Pourquoi Elletear a-t-elle trahi la reine ? » poursuit Iska.

« Hmm ? »

« Ne faites pas l’idiot. Je sais que vous êtes derrière tout ça. Vous ne pourrez pas vous en sortir tant que Sisbell sera là. »

« Que pensez-vous de sa beauté ? »

« … Pardon ? »

Était-ce censé le déstabiliser ?

Talisman continua sans se soucier de la position défensive d’Iska. « Si la magie existait dans ce monde, elle prendrait la forme d’Elletear. Une déesse a dû la chérir pour qu’elle soit si belle. Son apparence est un don du ciel. »

« … Qu’est-ce que cela a à voir avec ma question ? »

Avant qu’Iska puisse demander…

« Mais la planète ne partageait pas le même amour pour elle, » déclara le chef de l’Hydra d’un ton froid. « Il semble que vous ayez mal compris quelque chose. Elle et moi ne partageons pas le même objectif. Nous voulons des choses opposées. Il se trouve que nous avons un moyen commun pour atteindre chacune de nos fins. »

« … Et ça, c’est renverser la reine ? »

« Je pense qu’un sujet impérial serait d’accord avec moi. Si la reine actuelle venait à disparaître, la Souveraineté serait temporairement désarmée. Et cela pourrait permettre à l’Empire de prendre le dessus dans cette guerre. »

« Est-ce ainsi que vous l’avez proposé à l’Empire ? »

« Je laisse ça à votre imagination. »

« … Je vais répondre à une question pour vous. » Iska avait fixé le sang pur comme s’il le testait. Il dirigea la pointe de l’épée astrale noire dans sa main droite. « Ce n’est pas le genre de combat que je veux mener contre la Souveraineté. »

« Et qu’est-ce qui vous fait penser ça ? »

« Rien ne changera avec la façon dont l’Hydra fait les choses. Cela ne fera que nuire progressivement aux deux pays et creuser le fossé. »

Ils allaient frapper et contre-attaquer. Le conflit entre les deux superpuissances ne fera qu’augmenter.

Ce n’est pas ce que je veux.

Ou comment je veux que les choses se terminent.

Iska était un sujet de l’Empire. Il espérait que la fin de la guerre serait synonyme de victoire pour l’Empire. Mais cela ne signifiait pas qu’il souhaitait la chute de la Souveraineté. Il voulait mettre fin à la guerre en faisant capturer par les forces impériales un membre de leur famille royale, afin de pouvoir négocier la paix avec les dirigeants impériaux.

« Vous prenez les choses trop au sérieux. Je ne veux pas que l’Empire ou la Souveraineté tombe. »

« Ha-ha. On dirait que vous êtes un romantique. » Le membre de la famille royale avait applaudi et gloussé. « Un beau rêve. Vous êtes un sacré romantique pour un tel éleveur d’enfer. Malheureusement, je crois que tous les autres Disciples Saints et les membres de la famille royale attendaient ce jour. »

« … Qu’est-ce que vous voulez dire ? »

« C’est un match de vantard. Ne nous sommes-nous pas tous demandé qui serait le plus fort pendant des décennies ? »

Le sang pur contenant une puissante énergie astrale — Talisman le Tyran — avait ouvert ses bras.

« Ce sont les fiers Disciples Saints de l’Empire contre les sangs purs, descendants de la Fondatrice Nebulis. Il est temps de déterminer qui régnera en maître. C’est ce qui se passe ce soir. »

***

Chapitre 2 : Nuit de la chasse aux sorcières, Deuxième partie

Partie 1

Le palais de Nebulis.

Une forteresse construite par la Fondatrice Nebulis et d’autres mages astraux persécutés en territoire impérial. Composé des trois flèches — l’Étoile, la Lune et le Soleil — et du Palais de la Reine, le château possédait quatre tours distinctes connues de l’Empire. En ce moment, une unité impériale échafaudait un plan pour envahir le Palais de la Reine.

« Wôw là ! Il s’en est fallu de peu… »

Six pouces devant les soldats impériaux, le couloir de verre flottant appelé le Diadème de la Lune s’effondrait, se brisant en morceaux alors qu’ils entraient dans le couloir.

« Oof. Danger de construction. Si je n’avais pas reculé assez vite, j’aurais plongé la tête la première dans le sol. On est pratiquement aussi haut qu’un gratte-ciel ici. C’était super effrayant. »

« Gah ! … Mei ! »

Au moins une personne avait réagi trop tard. Le commandant de l’unité s’était agrippé au bord du sol en train de se briser et avait crié. Toute tentative de se relever aurait pu faire céder davantage le plancher et envoyer l’officier au sol.

« S’il vous plaît, aidez-moi ! »

« Qu’est-ce que je vais faire de toi, Commandantino ? Ne t’ai-je pas dit de t’écarter du chemin ? » lui répondit une femme soldat sauvage avec un sourire exaspéré. Le Saint Disciple du troisième siège. L’Incessante Tempête, Mei.

Bien qu’elle soit petite, les bras qui dépassent de son débardeur étaient durs comme l’acier, ses longs cheveux étaient en désordre, sa peau était bronzée et ses longues canines se dessinaient sur ses lèvres. La lueur dans ses yeux lui donnait l’apparence d’un grand prédateur félin.

« Bon sang. Tu es vraiment impuissant. »

Elle avait attrapé la nuque du commandant et l’avait lancé dans l’air derrière elle d’une main, jetant le soldat, qui pesait bien plus de deux cents livres, comme s’il était une bouteille d’eau vide.

Un bruit sourd. Il s’était écrasé dans le couloir.

« Merci beaucoup... ! »

« Pensez-vous que ça vous a sauvé la vie ? » Une voix avait crié, devant les troupes impériales, depuis le couloir aérien qui s’était brisé. Une fille était descendue du plafond de verre dans le couloir. « Vous allez rencontrer votre fin ici, soldats impériaux. Parce que je vais vous éliminer. »

Une fille aux cheveux noirs, avec une allure presque enfantine. Sa robe était scintillante, et la monotone de sa voix la faisait ressembler à une poupée.

Kissing Zoa Nebulis IX. C’est ainsi qu’elle s’était présentée lorsqu’ils s’étaient croisés pour la première fois. Elle ouvrit les bras, ce qui fut le signe avant-coureur de l’apparition de milliers de minuscules aiguilles sur tout son corps.

« Je vais vous effacer. Disparaissez de ma présence. »

Les épines violettes s’étaient matérialisées à partir de rien, ressemblant presque à celles d’un oursin. Elles s’étaient abattues sur Mei, en bourdonnant sinistrement à mesure qu’elles s’approchaient d’elle.

« Oh, oups. » Mei sauta, un sourire féroce sur le visage, et toucha le plafond treize pieds au-dessus d’elle. Le sol en dessous était criblé de trous, les pointes de Kissing l’ayant transpercé.

Le sol avait-il fondu ? Ou bien avait-il simplement disparu ?

L’unité impériale avait retenu son souffle en regardant cette scène terrifiante.

« Ha-ha. Je comprends maintenant. Donc vous pouvez effacer la matière physique. »

L’unique voix qui avait parlé était celle de Mei, incroyablement joviale, alors qu’elle s’accrochait au lustre.

« Je pensais que vous étiez du genre à interférer avec l’espace-temps, mais il semble que vous n’ayez pas effacé l’espace. Vous interférez donc avec la matière grâce à votre pouvoir astral de type planétaire. N’est-ce pas ? »

Les aiguilles qui avaient effacé le sol de l’existence avaient recommencé à traquer leur proie. Mei les avait observées.

« J’ai entendu dire que les sorcières ayant un pouvoir astral de deuxième génération provenant du noyau planétaire ont des crêtes violettes. Pourriez-vous me laisser jeter un coup d’œil à la vôtre ? »

« Hélas, je suis une jeune femme, et je n’ai pas l’intention d’exposer la moindre peau. »

« Ha. Une jeune femme ? C’est quelque chose venant de vous — vous semblez presque humaine, alors que vous êtes une sorcière avec du sang sur les mains. C’est votre façon de me dire que vous voulez devenir humaine, monstre ? »

« … »

« Je vais arracher votre joli petit costume. »

Kissing portait un vêtement royal resplendissant, qui était exclusivement réservé aux descendants de la Fondatrice. Il était parfaitement adapté à sa taille délicate.

« Je voulais un échantillon de sang pur pour jouer avec. Je vais déchirer cette jolie petite robe jusqu’à ce que je puisse jeter un coup d’œil à votre crête astrale, où qu’elle soit. »

« Ça a l’air d’être un bon moment », répondit Kissing.

Alors même que Mei abreuvait la jeune fille de menaces impressionnantes, la charmante sorcière aux cheveux noirs écoutait, agissant comme si elle était réconfortée par les paroles de Mei.

« Les soldats impériaux semblent être tout aussi sauvages que mon oncle m’a dits. Cela me convient parfaitement. Je n’aurai pas à me retenir. Je peux vous faire des choses innommables — disparaissez, sujet impérial. »

Ses aiguilles s’étaient combinées, formant un fouet comme un fil barbelé. Kissing avait saisit le fouet d’épines et le fit claquer. Comme si le fouet avait un esprit propre, il avait serpenté sauvagement dans l’air, se dirigeant vers la Sainte Disciple suspendue au lustre au-dessus d’elle.

« Sujet impérial stupide. Je vous ferai disparaître avant même que vous n’atteigniez le sol. »

Échec et mat.

La seule option de Mei était de se jeter du lustre à l’air libre, mais même si elle parvenait à esquiver le coup de fouet, l’arme était faite d’un amas d’épines. Le fouet la suivrait, et l’endroit où elle se tenait cesserait d’exister.

« C’est ce que vous pensez ? » Plus vite que les épines ne pouvaient la piquer, Mei se servit du lustre comme d’un pied et se lança sur la sorcière. « Je vais vous baptiser… avec du verre. »

« Huh !? »

Mei aurait dû avoir un choix. En observant l’ensemble du combat, les soldats impériaux de Kissing et Mei en avaient été convaincus.

Ils n’auraient jamais imaginé que cela se produirait — qu’elle aurait donné un coup de pied au lustre, qui pesait plusieurs centaines de livres, pulvérisant des projectiles de verre sur Kissing.

Le pouvoir astral avait activé sa défense automatique. Les épines, qui auraient dû s’en prendre à Mei, changèrent de direction en un instant, rencontrant la pluie de balles de verre et effaçant chacune d’entre elles.

« Vous avez utilisé le mécanisme de défense de mon pouvoir astral contre moi !? »

« Quoi ? Oh, vous avez vécu une vie protégée pour quelqu’un avec de tels pouvoirs. Si vous ne connaissez pas la stratégie, vous êtes loin d’être une sorcière. Êtes-vous sûre que vous n’êtes pas juste une poupée ? »

La Saint Disciplee prit son temps pour redescendre au sol, gracieuse comme un chat. Elle était presque silencieuse jusqu’à ce qu’elle atterrisse, et que des fragments de verre crissent sous ses pieds.

Mei fit claquer ses doigts. « Ou peut-être que c’est vous qui serez criblée de trous, petite demoiselle… feu. »

Des coups de feu résonnèrent dans le couloir. Les quatre soldats impériaux en attente derrière Mei portaient leurs fusils automatiques TH87 — un équipement anti-sorcière qui pouvait tirer six cents balles par minute.

Quatre canons tirant quarante balles par seconde. Ils pouvaient même faire sauter les boucliers anti-émeute du corps astral.

« Avez-vous oublié que je suis une descendante de la Fondatrice ? »

Toutes les balles avaient disparu dans l’air vide juste avant d’entrer en contact avec Kissing. Des centaines de balles avaient été tirées sur elle, qui auraient pulvérisé n’importe quel humain, mais elles avaient disparu comme par magie.

« … Impossible ! Mais il y en avait tellement ! »

Ping. Ce bruit indiquait qu’ils n’avaient plus de munitions. Après avoir épuisé un chargeur, l’un des soldats impériaux s’était figé, la peur au visage. Tout le monde supposait qu’un sang pur serait capable de se défendre contre une pluie de balles, mais le soldat impérial avait commencé à paniquer quand il avait vu que cela se passait devant lui — parce que les Épines de Kissing l’avaient protégée.

Les épines n’étaient pas censées protéger les gens contre les balles, contrairement aux barrières de vent ou aux décharges.

Pour se défendre contre quarante balles à grande vitesse par seconde, elle aurait dû tirer sur chacune d’entre elles. C’était comme tirer des centaines de balles pour abattre des centaines de balles ennemies. Ce niveau de précision n’était pas réalisable sans les systèmes d’interception les plus avancés de l’Empire.

« … Vous voulez dire que vous les avez toutes abattues ? »

« Bien sûr, vu que je suis de Zoa. »

Une lumière astrale violette irradiait de tout le corps de Kissing. Des épines avaient émergé de cette lumière, s’élevant dans les airs.

« Les Zoa ont une méthode de contrôle du pouvoir astral que les sujets impériaux n’ont pas rencontré en combattant les Lou et les Hydra… Oh, je n’aurais pas dû dire ça. Mon oncle m’a dit de ne pas en parler à qui que ce soit. »

Les trois lignées avaient chacune leur propre domaine de recherche. Les Zoa expérimentaient le berserking et le contrôle de la puissance astrale. Les Lou et les Hydra n’avaient pas réussi à contrôler leurs attaques. Alors que la reine Mirabella et Alice possédaient des pouvoirs qui pouvaient accidentellement être dirigés vers leurs alliés, Kissing ne pouvait cibler que ses ennemis. Elle s’était défendue des balles en utilisant ce contrôle précis.

« Un lapsus. Il ne devrait pas y avoir de problème si je fais disparaître tous ceux qui connaissent ce secret. Dans ce cas… »

Mei posa un genou à terre. « Hurricane du Roi Déchu, engagé », déclara le Saint Disciple du troisième siège, la Tempête Incessante. La peau exposée de son épaule s’était déchirée, faisant gicler du sang.

Kissing n’avait rien fait. Mei s’était positionnée comme si elle portait quelque chose, ce qui avait fait suinter le sang de son épaule comme si des griffes acérées avaient traversé sa peau.

« Uh ! » Pour la première fois de sa vie, la sang pure avait senti un picotement froid dans son corps. Quelque chose n’allait pas.

Elle pouvait sentir avec son corps qu’elle n’avait jamais connu ce genre de menace pendant son entraînement rigoureux organisé par la Maison Zoa.

« Mes épines, déchire cette femme apar — ! »

« C’est trop tard. »

C’était sa condamnation à mort.

L’arme à camouflage actif que portait Mei avait repris sa forme originale et s’était engagée. L’objet autrefois invisible s’était transformé en un gigantesque canon bélier à l’éclat terne. Un autocanon à contrôle électronique, modèle 36 — le Hurricane du Roi Déchu. L’arme en forme de cuirassé pouvait tirer mille balles par seconde, et aucune puissance astrale ne pouvait s’y opposer, qu’il s’agisse de flammes, de vent, d’éclairs, de glace, d’eau ou de terre.

Cette arme pourrait anéantir n’importe quel mage astral.

« Ai-je oublié de vous le dire ? Mon surnom est la Tempête Incessante. Je vais vous apprendre pourquoi on m’appelle ainsi. » Mei sourit, montrant ses canines pointues. Son corps semblait avoir le charme d’un chat et la soif de sang d’un lion. « Bye-bye, jolie petite sorcière. »

Kissing, la sorcière des épines, avait entendu le grondement de la tempête qui soufflait vers elle.

***

Partie 2

Le palais de la Reine. Jardin de l’air.

La zone avait été soufflée par des vagues de chaleur, portant le parfum des fleurs de jardin, de la fumée et des cendres, qui avaient commencé à irriter les sinus des deux personnes qui occupaient l’espace.

« Oups, j’ai presque oublié. Puis-je vous poser une question, charmant Sainte Disciple ? »

Sur Zoa Nebulis. Habillé élégamment d’un costume noir, il était l’une des rares personnes autorisées à donner des ordres à la place du chef des Zoa, qui était l’une des trois lignées royales. Parce qu’il cachait les anciennes cicatrices de son visage sous un masque, il avait pris le pseudonyme de Seigneur Masqué.

« J’ai négligé de demander quelque chose de très important. Pourriez-vous me dire comment vous êtes entré dans le palais de la reine ? »

La porte du Palais de la Reine était fermée. Il n’y avait pas d’autres soldats impériaux qui avaient réussi à explorer au-delà de ses portes. Alors comment cette femme avait-elle pu envahir le palais seule ?

« Hmm. Je préférerais ne pas révéler mes secrets commerciaux. » La grande Sainte Disciple à lunettes inclina la tête, jouant la comédie. Puis son ton s’était détendu. « Je n’ai rien contre votre audace à questionner l’ennemi. »

La Sainte Disciple du cinquième siège, Risya. Connue comme la conseillère du Seigneur Yunmelngen, elle avait quitté la capitale impériale de son plein gré pour se battre. Ce seul fait était suffisant pour montrer que l’Empire était sérieux.

« Je ne vous demande pas de dévoiler vos astuces, mais pourquoi ne pas me donner une base de travail ? »

« Je vais vous donner un indice, mais c’est tout. Votre porte d’entrée était fermée. »

« D’accord. » Le Seigneur Masqué s’était mis la main au menton en fredonnant à voix basse. « Dans ce cas, je suppose que je vais… »

Il a disparu en clignant des yeux. Seule sa voix est restée derrière lui, l’homme masqué se glissant dans la nuit comme s’il se fondait dans l’obscurité.

« Grk. »

« — l’entendre à partir de la dépouille d’un Saint Disciple. »

Risya l’avait entendu par-derrière.

Il s’était téléporté. La pointe du couteau du Seigneur Masqué s’était enfoncée dans le dos de Risya — ou plutôt, elle aurait dû.

« Qu’est-ce que — ? »

« … Wôw. C’était proche. Je pensais que vous pourriez essayer ça. »

La pointe du couteau avait fendu l’air. Le Seigneur Masqué poussa un cri de surprise alors que Risya — la Sainte Disciple et conseillère du Seigneur — tournait autour de lui avec agilité. Elle semblait glisser vers l’arrière.

« Oh, j’ai oublié de vous dire. Je suis déjà au courant de vos attaques surprises, malheureusement. Vous souvenez-vous d’un soldat impérial nommé Mismis, par hasard ? »

« Mismis ? »

« Au Canyon, vous avez poussé un commandant dans le vortex. Vous vous en souvenez ? Je suppose que ça n’a pas d’importance si vous vous en souvenez. » Par-dessus ses lunettes, elle fixait son adversaire. « J’étais sa camarade de classe, vous voyez, donc j’ai beaucoup entendu parler de vous. »

« … Mismis. Oh, maintenant je me souviens. Vous voulez dire cette petite femme. C’est donc comme ça que vous savez. C’est logique. Mes pouvoirs ne sont pas très importants, comme vous le savez peut-être. » Il rangea son couteau propre dans sa poche de poitrine. « Lady Risya, êtes-vous en train de me dire que vous êtes le seul à avoir été promu Saint Disciple dans votre cohorte de commandants ? »

« Plus ou moins. »

« Il me semblerait que la hiérarchie dans les forces impériales soit délicate. Je suis sûr que quelqu’un d’aussi talentueux que vous doit susciter la jalousie de vos pairs. »

« J’ai l’habitude. » La Sainte Disciple enleva ses lunettes à monture noire.

Le Seigneur Masqué ne s’imaginait pas que ses yeux semblaient encore plus aiguisés maintenant qu’elle avait enlevé ses fines montures.

« Je veux dire, c’est la quatrième fois que j’ai vingt-deux ans. »

« … Hmm ? »

« Oh, mais c’est un secret entre vous et moi. Si quelqu’un le découvrait, le Seigneur m’en ferait voir de toutes les couleurs. » Elle passa son doigt autour de la charnière de ses lunettes, les faisant habilement tourner autour de son doigt tout en souriant.

Et ce n’est pas comme si tu pouvais utiliser ça contre moi. Ses yeux brillaient, le provoquant.

« Les soldats impériaux s’appliquent jour après jour. Nous devons nous entraîner si nous voulons affronter les sorcières et les sorciers. »

« C’est quelque chose. Je pensais que vous étiez une jeune femme, mais vous êtes en fait un vieux vétéran chevronné avec une longue histoire. »

« Oh non, je suis une jeune femme. Recommencer la vie avant d’atteindre la trentaine, c’est ma façon de faire. Je suis une jeune femme épanouie et pleine de grâce. » Risya agita sa main libre et sourit. « Le secret n’est pas un médicament miracle contre le vieillissement ou la chirurgie plastique. C’est beaucoup plus douloureux et effrayant. Si vous voulez en savoir plus, vous pouvez venir à l’Empire et le découvrir par vous-même. »

« C’est bon. »

« C’est une honte. Oh, je sais. Basé sur la tâche donnée par les Huit Grands Apôtres — ! »

Fwoom. Il avait eu le sentiment que quelque chose n’allait pas. Caché dans l’air du soir qui fouettait autour d’eux, il entendit un son comme si quelqu’un coupait à travers l’espace.

« On nous a dit de capturer un sang pur. »

Un fil scintillait, plus fin qu’une mèche de cheveux. Il s’était enroulé autour du cou de l’homme masqué. Pour la première fois, l’homme élégant ne put retenir la surprise dans sa voix.

« Quoi ? »

Puis il se téléporta. Risya regarda le Seigneur Masqué, qui se téléportait juste deux mètres devant, et le fil de lumière qui n’avait pas réussi à capturer sa cible revint dans ses mains.

« Oh, c’est dommage. Je suis impressionnée que vous l’ayez remarqué. » Elle se déplaça comme une araignée après avoir manqué sa proie d’un cheveu. La Sainte Disciple sourit amèrement. « Connaissez-vous le réflexe du sinus carotidien ? C’est l’endroit le plus tendre du corps humain. »

« … »

« N’importe quel homme, aussi grand soit-il, perd conscience en cinq secondes si une pression est exercée au bon endroit de son cou. Et comme c’est indolore, il est difficile d’y répondre avant qu’il ne soit trop tard. Si j’avais tiré sur le fil autour de votre cou juste un peu plus vite, je vous aurais fait tomber par terre. C’est ma faute si je suis inexpérimentée. »

Le Seigneur Masqué était silencieux. Le membre le plus affûté du Zoa réalisa quelque chose à propos des mains de la Sainte Disciple. Alors qu’elle continuait à faire tourner ses lunettes, une lumière astrale sortait du bout de ses doigts.

« Les pouvoirs astraux sont si gênants. Même les fils les plus fins brillent d’énergie astrale, ce qui les rend faciles à détecter la nuit. J’aimerais que ce soit l’après-midi. »

« … »

« Eh bien, considérez ceci comme une vengeance. C’est beaucoup plus civilisé que la façon dont vous avez fait le tour de mon dos — le dos d’une jeune femme, je précise — et essayé de me transpercer avec un couteau. »

L’énergie astrale était une force inexplicable que les pouvoirs astraux dégageaient. Ce n’était pas quelque chose que les humains pouvaient produire. Seuls les mages dotés de pouvoirs astraux avaient la chance de pouvoir l’utiliser.

Alors comment une Sainte Disciple de l’Empire pourrait-elle utiliser une telle chose ?

« Les serviteurs impériaux sont vraiment irrécupérables, » grogna une voix grave derrière le masque, étouffée, mais qui donnait froid dans le dos. « Vous avez beau nous condamner en tant que sorciers et sorcières, vous utilisez des pouvoirs astraux dans notre dos. Vous êtes comme nous, mais dans la peau d’une Sainte Disciple… »

« Vous dirigez votre colère vers la mauvaise personne. »

« Hmm ? »

« Je ne nie pas que nous avons fait des expériences pour lier les pouvoirs astraux aux humains, mais nous n’aurions jamais pu le faire sans l’aide de la famille royale. »

« … Vous dites donc qu’il y a des traîtres parmi nous. » L’homme en noir tapa sur le bord de son masque avec le bout de son doigt. « Les Zoa sont déjà arrivés à cette conclusion, mais j’accueille toutes les informations. Pourquoi ne pas me dire leurs noms pendant que vous y êtes ? »

« Oh, vous êtes si lent. » Risya remit ses lunettes et regarda le descendant de la Fondatrice à travers ses verres fins. Sa bouche s’était courbée en un sourire en coin. « Il faut vraiment que je vous dise quelque chose d’ennuyeux — “Je vous le dirai si vous gagnez contre moi” — pour que vous le compreniez ? »

« Oh, pardonnez-moi. »

« C’est pourquoi vous ne pouvez pas vous échapper. »

Risya In Empire. La Saint Disciplee du cinquième siège étendit ses bras devant le sang pur masqué. Des fils d’étoiles apparurent des poings de Risya et se dispersèrent dans l’air, commençant à recouvrir le jardin comme une toile d’araignée. C’était un pouvoir astral, un tissage de quatrième génération. Il n’existait pas au sein de la Souveraineté de Nébulis car ce pouvoir astral était apparu dans un vortex dans le propre domaine de l’Empire.

« Ne voulez-vous pas connaître tous mes secrets ? Vous ne voulez pas me perdre de vue, n’est-ce pas ? C’est pour ça que vous n’avez jamais pu quitter cet endroit. »

« C’est exactement ce que je veux. »

Le Seigneur Masqué s’était redressé et s’était incliné avec une grâce parfaite.

C’était comme une soirée mascarade. Un homme et une femme se sont rencontrés par hasard, leur échange ressemblant à une invitation à danser.

« Une belle jeune femme a fait appel à moi. Je ne serais pas un gentleman si je devais refuser. »

« Je ne dirai pas que je ne suis pas un fan de votre théâtralité. Cependant… » La conseillère du Seigneur plissa les yeux avant de se retourner de manière fascinante et de replier ses membres sur son corps. « Je pense que je préfère votre visage sans fioritures. Votre vrai visage derrière le masque — une forme hideuse, inhumaine. Il semble qu’il conviendrait à un sorcier. »

 

 

« Même moi, je ne me souviens pas de quoi j’ai l’air dessous. »

« Je vais vous obliger à me le montrer, même si je dois vous arracher ce truc du visage. »

Leurs yeux étaient comme le vide lorsqu’ils se parlaient.

Le sorcier et la Sainte Disciple avaient décollé du sol en même temps, comme s’ils étaient sur le point de danser.

***

Partie 3

Pendant ce temps… dans la flèche de la Lune, qui était reliée au Diadème de la Lune, le couloir aérien menant au Palais de la Reine…

Plink-plink…

Plink… Des cailloux frappèrent le sol, des cristaux spéciaux du plafond et des restes qui avaient constitué les murs des flèches il y a encore quelques secondes. Ces pierres étaient assez dures pour que des impacts de puissance modérée n’ébrèchent pas leur extérieur.

Et pourtant, les murs s’étaient effondrés comme un château de sable, laissant un trou béant.

C’était l’œuvre de l’autocanon à contrôle électronique, modèle 36 — l’Hurricane du Roi Déchu. Une simple arme à usage individuel avait infligé cette destruction.

« Ouf. C’est un coup de poing. »

Mei avait jeté le gigantesque autocanon sur le sol. Manipuler l’arme sur son épaule avait déchiré sa peau. Elle saignait. Le recul de l’arme avait forcé ses pieds à s’enfoncer dans le sol.

Ce qui était remarquable, ce n’était pas l’arme, mais Mei elle-même. Le soldat portait l’arme depuis qu’elle avait envahi le palais, invisible grâce à un camouflage actif. Il avait été conçu pour être plus léger, mais le canon pesait encore un poids substantiel. Il avait été conçu à l’origine pour un navire de guerre. Mei avait marché, sauté et couru en portant cette arme tout le temps.

Tout comme les sorcières et les sorciers avaient leurs pouvoirs astraux, elle avait été dotée d’un don : une constitution physique particulière.

« M’dame, hum… Je crois que nous essayions de capturer le sang pur vivant… »

« Oh, oups. Je me suis laissée emporter. » Mei avait fait un sourire forcé.

Une montagne de gravats s’était formée dans le couloir, qui était recouvert de poussière. Il était difficile de voir, même à travers la lunette d’un fusil.

Quelqu’un touché par mille balles par seconde ne garderait pas une forme humaine.

« Je me sens obligée d’intimider les petites filles protégées. Mais il est vrai que je suis née entourée de fusillades. J’ai survécu grâce à l’eau boueuse et j’ai creusé la pourriture de mes plaies suppurantes… Le champ de bataille signifie la vie ou la mort. Mais les sangs purs ont une vie différente. »

Par chance, ils sont nés avec leurs pouvoirs. C’était la seule raison pour laquelle on leur garantissait une vie protégée. Ils pouvaient valser sur le champ de bataille s’ils en avaient envie et battre les soldats impériaux comme s’ils étaient des puces.

Les sangs purs regardaient les soldats impériaux avec mépris, comme s’ils demandaient : « Pourquoi êtes-vous si faibles ? »

+

L’Empire avait-il persécuté les sorcières ? Non.

Les sorcières étaient celles qui regardaient les humains de haut.

+

Mei et les soldats sous son commandement vivaient essentiellement sur le champ de bataille. Ils avaient vu les sorcières se moquer des faibles humains. Naturellement, la Souveraineté de Nebulis elle-même n’avait jamais admis cela.

La Souveraineté voulait-elle un monde qui ne persécute pas les mages astraux ?

C’était forcément un mensonge.

De tous, ce sont les descendants de la Fondatrice qui avaient le plus déprécié les humains, même s’ils en vantaient les mérites.

« C’est ce qui me met le plus en colère. Vous n’êtes pas d’accord, Commandantino ? »

« Oui, m’dame. Nous ne sommes que des humains dans ce combat. »

L’Empire avait sa propre idée de la justice. Les soldats impériaux — simplement humains — se consacraient à l’entraînement avant d’être finalement jetés sur le champ de bataille.

Et puis… ils étaient mis à l’écart par les sorcières, qui étaient nées fortes. Des rumeurs d’armes impériales inhumaines pouvaient circuler, mais les soldats étaient presque toujours ceux qui étaient blessés par les membres du corps astral.

« D’où la raison pour laquelle les soldats impériaux utilisent leurs cerveaux, petite miss. C’est valable pour mon arme et notre raid. Je parie que vous ne comprenez pas, vu que vous portez des lunettes roses. »

Mei jeta un coup d’œil au tas de gravats. Elle jeta un coup d’œil à ses hommes, puis leur tourna le dos. Elle avait entendu les débris s’entrechoquer avant qu’ils ne tombent et soient projetés en l’air.

« … »

« Madame ? »

« Oh, bien. Nous essayions de prendre l’un d’entre eux vivant, après tout. Je suis contente que vous soyez en vie. »

Mei regarda devant elle… en tendant le cou pour voir le tas de gravats qui laissa échapper un cri strident en fondant comme de la glace.

« Non ! »

« Comment pourrait-elle être en vie après avoir pris ces balles !? »

« Calmez-vous, Commandantino. Restez en arrière et surveillez. Le corps astral va se rassembler d’une minute à l’autre à cause de ces tirs, de toute façon. »

Dans tous les cas, ses hommes ne lui seraient d’aucune utilité. Si un tir de l’Hurricane du Roi Déchu n’avait pas suffi à stopper la sang pur dans son élan, toute sorte de tir de secours ne servirait pas à grand-chose.

« On dirait que la sang pur n’est pas indemne. »

« … Euh… ah… » Le souffle de la jeune fille était irrégulier alors qu’elle luttait pour sortir d’un trou dans les décombres.

Ses vêtements royaux taillés sur mesure avaient été réduits en lambeaux. Sa peau blanche, épargnée par le soleil, avait été éraflée par des débris, la laissant ensanglantée.

Ses cheveux noirs, comme de la soie, étaient blancs de poussière.

Et le plus important… son joli visage était froissé par la peur et la douleur.

« Aïe… Aïe… Est-ce que c’est… mon sang… ? »

Ce n’est pas que Kissing n’avait jamais connu la défaite. Contre l’épéiste impérial Iska, elle avait subi une défaite inattendue. Cette Sainte Disciple Mei, cependant, avait quelque chose que lui n’avait pas.

La colère. La colère de milliers — des dizaines de milliers de soldats impériaux — envers les sorcières.

Ils ne voulaient pas la paix. Kissing n’avait pas ressenti une telle animosité dans son combat contre Iska. Elle n’avait pas senti qu’il voulait que toutes les sorcières soient anéanties.

À ce moment, elle avait appris quelque chose de nouveau, la nature de la guerre.

« … Oncle, je crois que je comprends maintenant. » Ses yeux brillaient, mais pas à cause d’un changement de caractère.

 

 

Les yeux de Kissing brillaient littéralement devant les soldats.

« Wôw. Je vois. Je me demandais pourquoi je ne voyais pas votre crête astrale même après que vos vêtements aient été détruits. Donc votre crête astrale est dans vos yeux. »

Son écusson astral scintillait derrière ses yeux. Quand Kissing avait fait son entrée, elle les avait couverts d’un bandeau. Même l’Empire ne savait pas que des crêtes astrales pouvaient se trouver dans un tel endroit. Elle devait être une rareté, même parmi les sangs purs.

« Voilà qui a piqué ma curiosité. J’aimerais d’autant plus vous avoir comme échantillon. »

« … » Kissing s’était soudainement levée et avait touché la coupure sur sa joue. Elle regarda les gouttelettes rouges sur le bout de ses doigts. « J’ai réalisé quelque chose. La guerre n’est pas une bonne chose, pas le moins du monde. Continuer cela serait une perte de temps. Surtout si l’on considère que c’est si douloureux. »

« Oh ? Avez-vous changé d’avis ? » Mei avait répondu par une boutade.

« Oui. Mettons fin à cette guerre. » La fille à la robe déchirée avait étendu ses bras vers le ciel qui s’étendait derrière elle. Ses yeux irradiaient d’une envie de meurtre. « En éliminant toutes les forces impériales ! »

L’air avait gémi.

En quelques secondes, des épines s’étaient matérialisées dans le ciel, masquant la lumière. C’était une marche d’épines — le Tout de la Destruction.

Ils étaient des centaines de milliers, assez pour anéantir un dirigeable et peut-être même la flèche lunaire. Ils avaient tourné au-dessus d’eux, se répandant instantanément sur Mei et les soldats.

« Quoi ? »

« … Huh. Maintenant, c’est un sacré regard sur votre visage. »

La fille était furieuse.

Elle avait perdu le contrôle. Rien ne l’empêchait de détruire la flèche lunaire, et elle ne craignait pas la mort.

Kissing était un pur-sang. Elle avait pris la forme d’un des monstres que l’Empire n’avait jamais réussi à capturer dans l’histoire.

« Madame ! Nous sommes entourés par son attaque astrale ! »

« J’ai des yeux. Bouge ton cul, Commandantino. Tu dois tuer ou être tué. »

« Croyez-vous que vous pouvez me tuer ? Je ne vous montrerai pas une once de pitié, “prévient Kissing.

Toutes les épines s’étaient déployées pour créer une barrière. En raison de leur nombre, Mei ne pouvait pas les anéantir avec un barrage de l’Hurricane du Roi Déchu.

Le Saint Disciple, cependant, avait souri férocement.

” “Sans pitié”, vous dites ? N’avez-vous toujours pas appris votre leçon ? »

« … ? »

« Ne vous excitez pas juste parce que vous avez survécu à un coup. »

L’Hurricane du Roi Déchu était toujours sur le sol alors que le Saint Disciple en traçait la surface du bout des doigts.

« Vous voulez m’entendre prédire l’avenir ? La prochaine fois que vous entendrez des coups de feu, ce sera la dernière. »

« Oui, le dernier pour vous, soldats impériaux. » Kissing semblait confiante alors qu’elle faisait s’envoler ses épines dans les airs.

Mei laissa un autre sourire féroce se glisser sur son visage, certaine de la victoire.

Qui bluffait ? Aucune des deux. La Sainte Disciple et la sang pur étaient convaincus de leur victoire.

Elles avaient toutes les deux bougé en même temps… Kissing produisant toutes les épines possibles à envoyer sur le chemin de Mei, Mei visant avec l’Hurricane du Roi Déchu les projectiles.

+

Aucune des deux n’avait eu l’occasion de tirer.

+

Des créatures violet foncé que les soldats impériaux n’avaient jamais vues auparavant avaient déchiré le sol, encaissant l’impact des épines de Kissing.

« … Hein !? »

« Quoi ? »

Les bêtes à six pattes ne s’étaient pas dissoutes dans le néant, même si elles avaient été englouties par les épines de Kissing. Elles n’appartenaient pas à l’Empire. Les créatures montrèrent les dents à la fois à Mei et à Kissing avant de bondir, la bouche ouverte jusqu’aux mâchoires et la salive brillante comme le pouvoir astral en dégoulinait. En tombant sur le sol, la bave avait grésillé, corrodant le sol.

Frisson. Le sixième sens de Mei, qui l’avait sauvée au bord de la mort, avait détecté une menace qu’elle ne pouvait décrire.

Était-ce de la rancune ? Cela lui rappelait le très rare pouvoir astral des malédictions, mais elle ne pouvait pas dire si c’était le cas. Le fait que les choses puissent prendre les épines de Kissing et rester indemnes était le développement le plus étrange de tous.

« Ça a l’air dangereux. Je suppose que nous devons tous faire une pause pour ça ! »

Mei avait fait un bond en arrière. Les quatre soldats n’avaient pas essayé de discuter avec elle.

« Hé, mademoiselle, ce truc, c’est… »

« Ne me dites pas que c’est… le pouvoir astral de Grand-père Growley ! » Kissing se retourna, le sang s’écoulant de son visage.

La sang pure déployant son pouvoir astral sous le coup de la colère avait fait face aux bêtes.

« Attendez, grand-père, ces soldats impériaux sont mes… »

De nulle part était venu le hurlement sinistre des bêtes.

***

Partie 4

Les chefs des trois familles royales étaient les personnages les plus fiables, car ils servaient de figure de proue à leur lignée.

Alors qu’est-ce qui les rendait si fiables ?

« Être le plus fort des mages astraux. Être ingénieux. Avoir vécu de nombreuses vies. Les exigences sont terriblement claires. »

« Et qu’est-ce que ça signifie d’être une reine ? »

« Ce n’est pas si différent du chef de famille. Si vous devez me presser de dire quelque chose à son sujet, je suppose que la popularité dans les sondages est un autre facteur. » L’homme âgé en fauteuil roulant a gloussa.

Le chef de la famille Zoa, Growley. Son visage était affligé par les rides et la vieillesse. Bien qu’il soit un homme de plus de soixante-dix ans, sa voix était étonnamment pleine et ses yeux brillaient avec férocité.

« Si une belle jeune fille aux forts pouvoirs astraux devient reine, cela suffit à donner de l’espoir aux citoyens. »

« On dirait que vous êtes insatisfait. Êtes-vous furieux d’être un homme qui ne pourra jamais être une reine ? »

« C’est absurde. Nous n’avons pas de scrupules avec les capacités de notre reine actuelle. Je suis impressionné par la façon dont les automates de guerre — choses sans espoir il y a trente ans — sont devenus si humains. »

La flèche lunaire de la souveraineté de Nebulis — un gigantesque espace de trois étages éclairé par un luminaire inspiré de la pleine lune et doté d’une salle polyvalente utilisée pour des événements.

Ce soir-là, elle avait reçu la visite de l’un des plus grands assassins de l’Empire.

« C’est exact. Elle était semblable à vous : comme le tranchant froid d’une épée assoiffée de sang et une barrière qui empêchait quiconque de l’approcher. Une marionnette de guerre. »

« Votre reine ? Semblable à moi ? Ha ! Je préfère que vous ne me mettiez pas dans le même sac qu’une sorcière. Même moi, je me targue d’être une humaine. Nous sommes différents de vous. » Le sujet impérial grogna. Il était le Saint Disciple du huitième siège, la Main Invisible de Dieu, Sans Nom.

Sa forme semblait se fondre dans le décor, puisqu’il était vêtu de la tête aux pieds d’un manteau gris foncé. Il pouvait se faire disparaître grâce à un camouflage actif, un maître du meurtre silencieux sans arme.

« Au bon vieux temps, je veux dire. Un temps où vous étiez un nouveau-né ou pas de ce monde. »

Craquement, le vieil homme avait légèrement tourné son fauteuil roulant.

« Quand elle avait quatorze ou quinze ans. C’était son apogée — quand elle était une tueuse silencieuse et assoiffée de sang. Pendant ces deux années, elle était la candidate à la couronne la plus puissante de toute l’histoire… Maintenant, ses crocs se sont émoussés. Peut-être une conséquence de son éloignement du champ de bataille depuis qu’elle est devenue reine ou mère. »

« Qu’est-ce que vous essayez de dire ? »

« Il est temps de changer de dynastie. » Il y avait de la puissance dans les mots de Growley. « Je suis reconnaissant envers les forces impériales. La faute en reviendra à la reine qui a invité le chaos. Dans le prochain conclave, la Maison de Lou tombera — laissant seulement le Soleil et la Lune. »

Il pointa du doigt le Saint Disciple baignant dans la lumière.

« Les forces impériales ont donc rempli leur mission. Périssez. »

Des ombres avaient jailli des pieds du vieil homme. Des gerbes de lumière violette avaient inondé le hall avant de se condenser et de se transformer en chiens à six pattes hurlants.

« Avez-vous matérialisé l’énergie astrale ? »

« Ce sont des avatars. Vous êtes déjà coupable d’un crime. Ce crime est devenu votre punition. »

Le vieil homme sortit une tige de fer qui était enfoncée dans son épaule, une arme d’assassinat qui ressemblait à la pointe d’un pic à glace. Lorsqu’ils s’étaient rencontrés il y a quelques minutes, le vieil homme avait volontairement laissé Sans Nom lancer l’arme et le frapper.

« Vous êtes devenu mon ennemi dès que vous m’avez attaqué. Pouvez-vous échapper à votre propre vice ? »

« Le vice ? Je n’ai pas l’intention d’expier quoi que ce soit. » Sans Nom leva une de ses mains. D’un coup sec, il lança une autre barre de fer. Dès qu’elle toucha le plafond, des étincelles jaillirent au-dessus de la tête de Growley.

Une petite bombe enterrée dans la tige avait explosé. Un panneau du plafond s’était effondré et avait écrasé les avatars situés juste en dessous.

« Cela ne fait rien. »

Les créatures qui étaient coincées sous le panneau étaient sorties en rampant.

« Rien de physique ne pourra affecter ces avatars. Même les missiles impériaux ne seraient pas capables de les vaincre. Votre bras gauche n’en est-il pas la preuve ? »

« Ce sont des pouvoirs astraux contre-offensifs ? » Sans-Nom avait protégé son bras gauche immobile et avait bondi en arrière.

C’est le résultat du conflit qui avait eu lieu deux minutes auparavant.

Il avait tenté de frapper un avatar avec son poing gauche alors qu’il tentait de l’attaquer, mais la chose l’avait traversé et avait pris possession de son bras. Cela s’était transformé en malédiction, corrodant son bras.

C’était quoi, le Vice ?

Quel genre de pouvoir astral avait ce sorcier ?

« L’énergie astrale réagit à ses ennemis et évolue. Une fois qu’elle a dépassé un certain stade de croissance, elle prend la forme d’une bête pour attaquer. Pour évoluer, elle a besoin que l’ennemi lui fasse mal… Non, ça ne peut pas être la seule condition. Il y a plusieurs choses qui peuvent déclencher sa croissance. Alors c’est ça, ce Vice ? »

« Je n’ai pas l’intention de révéler mes astuces. Je vous féliciterai cependant d’être sur la bonne voie. » Growley souriait comme s’il grognait. « Et si je partageais un secret avec vous ? Ces créatures grandissent indéfiniment. »

« Un pouvoir astral répréhensible. Ne pensez-vous pas que c’est contre-productif qu’il puisse traverser la matière ? »

Le tueur silencieux donna un coup de pied au sol, touchant la barrière au fond du couloir et ricochant vers le haut, sautant de mur en mur. Par-dessus la tête des avatars qui le poursuivaient, Sans Nom avait levé sa main droite.

Il tenait un couteau en céramique.

À pleine vitesse, Sans Nom pouvait lancer aussi vite qu’un pistolet. La première fois, il avait visé l’épaule du vieil homme pour voir ce qui se passerait. Cette fois, il visa la poitrine de l’homme.

Les avatars ne seraient pas affectés par quoi que ce soit de physique. En d’autres termes, le couteau les traverserait, sans rien faire pour arrêter leur progression.

« Disparaissez, sorcier, en même temps que votre pouvoir astral. »

« Avec l’éclosion des fleurs viennent le vent et la pluie… Avant que les choses n’aillent dans votre sens, quelque chose va se mettre en travers de votre chemin, jeune homme. »

Le couteau s’était arrêté.

Un bras d’un autre avatar avait jailli de sous le fauteuil roulant, attrapant la lame que Sans Nom avait lancée. Cela ressemblait à une main humaine.

« … Quoi ? »

« Vous ne pouvez pas les affecter par des interférences physiques. Mais ils peuvent interagir avec la matière. Comprenez-vous ce que cela signifie, jeune homme ? »

Le Saint Disciple Impérial atterrit sur ses pieds. « C’est comme si vous prétendiez être invincible. »

« C’est précisément ce que je dis. »

Les avatars étaient imbattables. En plus de venir attaquer en meute, ils se transformaient en bouclier ultime, protégeant le vieil homme de tout type d’attaque physique. C’était le pouvoir astral du Vice.

Ce pouvoir de contre-offensive qu’entretenait Growley pouvait se transformer en quelque chose de ridicule une fois ses conditions remplies.

« Donc en gros, vous et vos créatures ne pouvez jamais être blessés par les attaques de vos ennemis. Vous seul pouvez attaquer vos adversaires. »

« En effet. »

« C’est assez absurde. Il me semble qu’il y aurait une échappatoire. »

« Il n’y en a pas. Pour cette raison, je suis invincible. Bombes impériales, gaz toxiques, missiles, aucun d’entre eux ne peut me vaincre. La preuve en est ces soixante-dix années. »

« … »

« Être couronné chef de famille n’est pas seulement un titre, vous savez. »

Growley contrôlait la famille de Zoa.

Aucun des bombardements du passé n’avait réussi à vaincre ce vieil homme. C’était la raison pour laquelle le Seigneur Masqué et Kissing l’idolâtraient.

« Si seulement mes jambes pouvaient bouger. J’aurais réduit la capitale impériale en cendres il y a cinquante ans. »

« Nous devrions être en admiration devant la jeune génération. Comment pouvons-nous savoir ce qu’ils ont l’intention de faire ? » avait récité le sujet impérial.

« … Quoi ? » Le vieil homme avait été surpris. Il plissa les yeux d’un air dubitatif. C’était un vieil idiome. Pourquoi les jeunes d’aujourd’hui connaîtraient-ils les mots d’un grand homme du passé ?

Toute forme de gloire passée serait écrasée dans le futur. La maxime se moquait du vieil homme qui se vantait de soixante-dix ans d’expérience au combat. C’était le contraire de la citation précédente de Growley : « Avec l’éclosion des fleurs viennent le vent et la pluie. »

« Vous dites que cela serait arrivé si seulement vos jambes étaient mobiles ? Vous exagèrez votre gloire passée. Vous êtes devenu vieux, sorcier. »

Le bras gauche de Sans Nom, maudit par l’avatar, était toujours détendu et incapable de faire le moindre mouvement. Le Saint Disciple du huitième siège bondit une nouvelle fois du sol, assez rapidement pour laisser une image rémanente en sautant sur le côté. De justesse, il esquiva l’avatar silencieux qui le poursuivait par-derrière.

« J’admets que votre pouvoir astral est extraordinaire. Cependant… »

Le sorcier aurait pu prétendre que les crocs de la reine s’étaient émoussés, mais lui aussi était prisonnier de sa vieillesse.

« Votre pouvoir astral est peut-être resté le même. Mais celui qui le manie n’a-t-il pas vieilli ? »

« Haha ! » Growley se mit à rire. Marqué par des taches de vieillesse, son visage se déforma et ses lèvres formèrent un rictus amusé. « Je pensais que vous n’étiez qu’un assassin, mais il semble que vous soyez plus que ça. Je n’en ai pas vu un comme vous depuis longtemps. Quelqu’un qui peut tenir une conversation décente ? Dites-moi votre nom. »

« Je n’ai pas de nom à offrir à un monstre. Ne vous l’ai-je pas déjà dit ? »

« Je vous demande à nouveau votre nom. Cela n’arrive pas souvent. »

« Votre audition a-t-elle été affectée ? »

« Quelle impolitesse ! » Le vieil homme ne cachait pas sa joie de vivre. « Mais vous ne pouvez pas vaincre la mort simplement par l’esprit. »

Derrière Sans Nom les avatars avaient commencé à gonfler. Le vice grandissait à l’infini. Les bêtes — autrefois au niveau des hanches, de la taille d’un chien — se mirent à faire pousser trois têtes et devinrent assez grandes pour que même le Saint Disciple doive tendre le cou pour les regarder.

« Ça ressemble exactement à Cerbère. Quelle taille font ces choses ? »

« Jusqu’à ce que vous épuisiez vos forces. Le plus grand record était… à peu près aussi grand que cette flèche lunaire, je suppose. »

Le Cerbère était devenu assez grand pour écraser Sans Nom et semblait terriblement agile. Conjuguant l’énergie astrale, il était resté silencieux. Cependant…

« Hmm… » Growley doutait de ses propres yeux. Ils ne pouvaient pas l’attraper. Les avatars qui avaient continué à poursuivre Sans Nom ne pouvaient même pas rattraper un Saint Disciple — un simple humain.

De la même manière que Growley était une menace pour les forces impériales, cet homme était indubitablement un danger pour les mages astraux du monde entier.

« Si je vous écrase, alors tous mes vices ou autres disparaîtront, non ? »

Sans Nom s’était approché du vieil homme avec un poing prêt à l’emploi. Sous ses pieds, le sol avait rebondi comme une balle en caoutchouc.

« Ils se propagent donc ? »

« Ils ne font pas que grandir. Vos vices vont continuer à se reproduire. »

De sous le fauteuil roulant de Growley, de nouveaux avatars avaient rampé en forme de lions. Ils étaient encore plus grands que le Cerbère. Sans Nom avait des lions devant lui et des Cerbères derrière lui.

Il n’avait pas réussi à s’échapper.

Si une partie de son ennemi touchait le Sans Nom, il serait rongé par la malédiction. S’il touchait sa tête, cela signifiait une défaite instantanée. Dès qu’il s’en était rendu compte, il avait agi rapidement, tournant sur lui-même comme une toupie. L’accélération leva son bras gauche immobilisé — dans la gueule du lion qui lui montrait les dents.

« Vous pouvez le prendre. » Il les avait laissés mordre son bras gauche.

Faisant en sorte que le lion ferme sa gueule, Sans Nom laissa son bras gauche s’arracher de l’épaule sans un bruit avant que la malédiction ne puisse se répandre sur son corps.

« … Alors vous l’avez abandonné ! »

« C’est un bras artificiel. »

Il l’avait perdue dans une bataille à mort avec un certain mage.

***

Partie 5

Tous les soldats impériaux risquaient leur vie. Chaque Saint Disciple avait erré à la frontière de la vie et de la mort au moins une fois. C’était ce qu’il fallait pour défier un sang pur.

Et maintenant… en échange de la perte de son bras artificiel gauche, Sans Nom avait fait un pas vers la gorge de Growley.

« — Gh ! »

Le poing du Saint Disciple avait essayé de percuter Growley.

Un avatar avait reçu ce coup de poing. Un géant de forme humanoïde avait rampé de sous le fauteuil roulant tel un mort-vivant.

« … Quoi ?

« Un deuxième crime. Vous êtes devenu un récidiviste en essayant de m’attaquer. Une récidive est plus pécheresse, vous savez. »

Les sept vices : attaques surprises, récidives, utilisation d’armes, surnombre de l’adversaire, destruction, tromperie et trahison.

Sans Nom avait commis les deux premiers. L’« attaque surprise » de la barre de fer dans l’épaule de Growley et la « récidive ».

À cause de cela, le vice s’était multiplié à ce moment-là.

« Soyez engloutis par vos péchés. »

Cinq géants avaient atteint le Sans Nom. Le Cerbère et le lion avaient plongé vers lui. Le Saint Disciple qui leur faisait face avait perdu son bras gauche. Son poing droit avait été profané par la malédiction et était resté immobilisé.

« Tsk. »

Les avatars gonflés étaient sur le point de l’écraser, mais juste avant qu’ils ne le fassent… le combattant le plus haut gradé de l’Empire fit un signe d’irritation et leva sa jambe droite. Il la ramena sur le sol.

« Espèce d’idiot. Croyez-vous que les avatars vont faiblir — ? »

« Ils le feront. »

Le talon du Sans Nom visait l’objet gisant sur le sol — son propre bras gauche. Il écrasa le mécanisme qui constituait son bras artificiel et le brisa en morceaux.

Un flash de lumière.

La dernière astuce incrustée dans son bras artificiel avait dénoté et inondé la salle de lumière.

« … Est-ce une grenade à énergie anti-astrale ? »

« Donc les interférences physiques ne fonctionnent pas sur eux. Mais quelque chose qui obstrue le pouvoir astral pourrait le faire. »

Les avatars autour de Sans Nom avaient cessé de bouger.

La grenade pouvait perturber les longueurs d’onde du pouvoir astral dans un rayon de 30 mètres. Le seul problème était qu’elle était active pendant exactement deux secondes.

Le Saint Disciple passa devant les avatars qui l’entouraient en une fraction de seconde et sprinta vers le fond de la grande salle.

« J’ai vu votre pouvoir astral. Je l’arrêterai la prochaine fois que je vous verrai. »

« Croyez-vous que je vais vous laisser vous échapper ? »

Le Cerbère avait bondi, poursuivant Sans Nom. Les géants le poursuivaient, déchirant les murs et le plafond de la flèche. Ils s’étaient élancés vers l’homme en fuite.

Le seul à être resté dans l’espace était le chef de maison Growley.

« … »

Il vérifia que le Saint Disciple avait quitté la grande salle.

« … Je n’avais pas l’intention de bâcler ça. C’était un manque de respect, soldat impérial. »

Le vieil homme cracha du sang en tombant de son fauteuil roulant.

Le poing qui avait frappé sa poitrine avait fracassé sa cage thoracique. Il siffla, utilisant chaque once de force en lui pour se remettre sur son siège.

« Vous ne pouvez pas vous échapper. Les mœurs vous poursuivront jusqu’aux confins de la souveraineté. »

Même le chef des Zoa, Growley, n’avait aucun moyen de savoir, cependant… que la Souveraineté avait déjà commencé à s’effondrer, avec le palais en son centre.

+++

Le palais de la Reine.

Une tour centrale surplombait le palais composé des flèches de l’étoile, de la lune et du soleil. Une forteresse pour la reine.

L’endroit était un labyrinthe vivant construit par le pouvoir astral. Les sorties des couloirs changeaient en fonction du mois et du jour. Chaque étage avait un ascenseur qui ne fonctionnait que grâce à l’énergie astrale. Même si l’armée impériale envahissait les lieux, elle ne serait pas capable de faire bouger un seul ascenseur.

Un raid aurait dû être impossible.

Tous les habitants de la Souveraineté avaient fait confiance au Palais de la Reine pendant cent ans.

+

Il était temps de détruire leurs croyances séculaires.

+

L’espace de la Reine.

Un lieu tranquille décoré de tapis couleur vin, actuellement secoué par d’intenses souffles provenant de l’extérieur des fenêtres. C’était l’ombre de sa gloire passée. Les vents du soir presque glacials et les braises brûlaient la peau.

Au milieu du chaos…

« Oh, Reine de Nebulis, » cria un assassin impérial, sa voix résonnant dans l’espace de la Reine.

Techniquement, il serait imprécis de qualifier un des gardes du Seigneur d’assassin.

« Je n’ai pas l’intention de faire traîner les choses en longueur. De plus, les Astraux seront là dans quelques minutes. Raison de plus pour se dépêcher. »

Le Saint Disciple du premier siège. Le Chevalier du « Flash », Joheim. Les cheveux roux et costaud, il portait un manteau de combat personnalisé intégré à une armure. Il fit un pas en avant.

Un seul pas.

Dès que la Reine Nébulis IIX l’avait reconnu, sa frange s’était désagrégée.

Un changement dans la pression du vent ? De ce seul pas ?

« Allez dans le repos éternel, ici et maintenant. »

Il abaissa sa lame étroite.

Il s’était téléporté — ou du moins c’est ce qu’il semblait alors que l’épéiste la poursuivait. Cela ressemblait presque à une illusion.

La reine ouvrit grand les yeux et cria : « Feu ! »

C’était un tir aérien.

Une masse d’air s’était rassemblée au plafond. Comme si elle avait été activée par l’incantation d’une sorcière, elle s’était transformée en une balle qui s’était abattue, creusant un trou dans le sol.

Le courant d’air se transforma en un mur invisible qui protégea la reine. Elle se précipita vers le palier du deuxième étage. Le Saint Disciple fut repoussé vers les portes de l’Espace de la Reine, le vent balayant la pièce.

« Mira, le vent silencieux. Vos pouvoirs sont violents pour un tel surnom. »

« Vous êtes coincé des décennies dans le passé. » Elle regarda l’épéiste impérial depuis le palier.

La reine Mirabella Lou Nebulis IIX avait replacé sa frange ébouriffée avec sa main. Elle s’était empêchée de porter une main à sa poitrine. Son cœur battait la chamade, l’avertissant. Il n’y avait pas besoin de mots pour le dire : Elle était agitée par le Saint Disciple qui avait réussi à s’approcher d’elle d’un seul pas.

« Mirabella Lou Nebulis IIX — vous pouvez manipuler l’atmosphère, un mage astral de type vent. Vous ne contrôlez pas le vent. Vous contrôlez l’air, » déclara l’épéiste impérial sans émotion comme s’il lisait un rapport. « Vous vous êtes dirigé vers le champ de bataille à l’âge de onze ans. Au cours des dix années suivantes, vous avez gagné 3 % du territoire impérial. Votre apparition sur le champ de bataille était fréquente, même pour un sang pur. Vous avez des compétences physiques et des capacités d’assassinat exemplaires pour une sorcière. Les regards se sont tournés vers vous en tant que plus grande candidate à la reine de l’histoire et prodige de la Souveraineté. »

« … »

 

 

« Mais vous êtes en déclin. »

Il ne la provoquait pas. Il faisait juste ses observations en tant que Saint Disciple du premier siège.

« Votre force est venue de votre temps sur le champ de bataille en tant qu’automate de guerre sans émotion. Maintenant, vous fabriquez des sourires comme la reine devant le peuple. Même l’acier rouille quand il ne fait que s’asseoir dans des réunions qui font bâiller. »

« Vous parlez comme si ces situations imaginaires avaient été vécues, sujet impérial. »

« Je l’ai appris. » Son épée longue et fine avait pivoté. « Par ceux qui vivent dans ce château. »

« Oh, vraiment ? » La reine Mirabella n’en avait cure.

Il y avait un traître parmi eux. Elle savait déjà que c’était quelqu’un de proche d’elle. Dans son coeur, elle pouvait même deviner de quelle fille il s’agissait.

« C’est un processus d’élimination. »

Dans un hall occupé par eux deux seulement, la voix de la reine Mirabella l’interpella.

« Je ne me soucie pas de savoir si mes propres capacités sont en déclin. Si je peux protéger la Souveraineté en tant que sa reine, c’est le bon choix. »

Derrière l’épéiste impérial se trouvaient les ruines de la porte qui avait été découpée en morceaux en forme de dés.

Pourquoi mes gardes ne sont-ils pas venus ?

Ceux qui étaient à proximité auraient dû venir en courant directement ici quand ils ont entendu le rugissement.

D’une manière générale, il y avait deux systèmes de défense dans le Palais de la Reine.

Les Astrals étaient les protecteurs des figures de proue importantes, dont la reine. L’autre était l’unité commando, les Régisseurs, qui chassaient les envahisseurs. Ils étaient de véritables maîtres dans leurs occupations.

Le fait que pas un seul d’entre eux ne soit apparu montrait sans aucun doute que quelque chose ne tournait pas rond ici.

Ce sabreur a-t-il battu les gardes devant ma porte ?

Ou bien d’autres Saints Disciples ont-ils pénétré dans le Palais de la Reine et sont en train de les attaquer ?

Alors qu’elle se concentrait sur chaque petit mouvement de son adversaire, elle pensait à une personne. Pas à l’un de ses gardes, mais à sa fille cadette, Aliceliese. À seulement 17 ans, elle était incontestablement l’atout des Lou lorsqu’il s’agissait de se battre. Elle devrait être arrivée au palais maintenant.

« Avez-vous l’intention d’attendre l’arrivée de la Sorcière de la Calamité Glaciale ? »

« Quoi ? »

Il avait deviné sa main. L’esprit vide à cause du choc, la reine arrêta de penser pendant un moment.

La forme de Joheim vacilla. S’élançant du sol d’un coup de pied assez puissant pour faire trembler la pièce, l’épéiste se déplaça dans l’espace devant ses yeux, comme s’il flottait.

« Avez-vous utilisé mon propre tour sur moi !? »

Bomb Cyclone.

Un terme météorologique qui indiquait un changement rapide de la basse pression barométrique. La technique de la reine Mirabella créait une mine invisible qui entraînait sa proie dans un tourbillon de la taille d’un typhon. À pleine capacité, elle pouvait même désarmer un char impérial. Avait-il prévu le vent qui s’en formait et fendu l’air avec son épée ?

Impossible.

Maître épéiste ou non, il ne serait pas capable de répondre à l’attaque de la reine sans connaître sa stratégie.

« Il y avait donc un conspirateur… ! »

« C’est une guerre de l’information. Je n’avais pas l’intention de vous attaquer directement. »

« C’était Elletear, n’est-ce pas ? »

L’épéiste était resté silencieux.

Il avait simplement balancé sa lame vers le bas, droit sur elle. Alors que les vents qui formaient la barrière autour de la Reine Mirabella prenaient de la vitesse, l’épée du Saint Disciple continuait à avancer, déchirant l’air.

Elle sentit un frisson froid la parcourir.

À ce moment, quelque chose de dur était passé près de son visage. Du sang avait giclé de sa joue.

« Aïe ! »

À quel point l’avait-il coupé ?

C’était une éraflure ? Ou bien avait-il coupé plus profondément dans sa chair ? Elle n’avait même pas eu le temps de déterminer l’étendue de sa blessure. Elle avait utilisé toutes ses forces pour s’enfuir.

Il était rapide. Ce n’était pas une façon précise de décrire l’épéiste.

Il était outrageusement rapide.

S’il n’était que rapide, il n’aurait pas été capable de surmonter sa barrière de vent. Son agilité et sa force étaient parfaitement équilibrées, ce qui lui conférait une mobilité étonnante.

« Préparez-vous. »

+

«  — Êtes-vous sûr que vous ne vous trompez pas gravement sur ce que je peux faire ? »

+

Ils s’étaient arrêtés.

La reine Nébulis IIX n’avait pas utilisé son pouvoir astral, et pourtant Joheim s’était brusquement arrêté en posant le pied sur le palier.

Ses yeux scintillaient. Si ses filles Alice ou Sisbell avaient été là, elles auraient douté de leurs yeux. Il y avait une lueur inhumaine dans le regard de Mirabella Lou Nebulis IIX — pur-sang et machine. C’était un regard qu’elle n’avait jamais montré à ses filles.

« … Quel malheur. Il semble que les gardes et Alice ne soient toujours pas là. »

Ses vêtements bruissaient alors qu’ils descendaient le long de son corps. Elle s’était débarrassée du manteau qui recouvrait les épaules de sa robe royale. Elle s’était dévêtue de l’armure légère pare-balles et anti-lames qu’elle portait.

« Je ne veux pas être responsable de la destruction de l’espace de la Reine. »

Craquement. Le son sinistre qui résonnait autour de Mirabella Lou Nebulis IIX provenait de l’air créé par l’atmosphère remuée par son pouvoir astral. C’était la libération de ses pouvoirs qu’elle avait retenus.

« Et voici comment ça se termine. »

« … »

Le Saint Disciple avait pris la déclaration de la reine en silence.

Un murmure s’échappa de l’homme. « Il semblerait que vous ne compreniez pas… qui je suis. »

Rien n’aurait pu contenir plus de pitié et de mépris que son soupir.

***

Chapitre 3 : La nuit de la chasse aux sorcières, Troisième partie

Partie 1

Le manoir de Lou Erz.

Des coups de feu avaient retenti. Des étincelles avaient jailli de la fenêtre brisée.

Les bruits de combat parvenaient jusqu’à l’extérieur de l’enceinte. C’était suffisant pour attirer l’attention des citoyens qui frissonnaient devant l’avancée des forces impériales.

Ils s’agitaient.

À l’extérieur de l’enceinte du manoir de Lou Erz, la police militaire était arrivée en courant.

« Un raid impérial !? Jusqu’ici !? »

« On a entendu des coups de feu… Ne me dites pas qu’ils attaquent la villa de la reine ! »

Les rapports des témoins avaient déjà commencé à affluer depuis un petit moment. Selon ces rapports, des gens ressemblant aux forces impériales avaient voyagé par la route pour attaquer le manoir.

+

« — Les choses se sont surtout arrangées en dehors de ce château. »

+

Dans le manoir de Lou Erz. Hall du premier étage.

Le chef de l’Hydra, Talisman, marchait sur le sol poussiéreux.

« Comme cette propriété appartient aux Lou, les résidences environnantes sont occupées par des citoyens qui adorent la famille Lou. J’imagine qu’ils ont vu des soldats impériaux armés prendre d’assaut ce château. »

« Je suppose qu’ils ne sont pas arrivés sur les lieux par hasard. Vous les y avez conduits. »

Iska regarda fixement les yeux doux de Talisman. C’était un démon dans la peau d’un gentleman. L’homme qui menait le coup d’État avait pour spécialité de déstabiliser ses ennemis en leur parlant comme ça. Même maintenant…

« Les détails n’ont pas d’importance. Ce qui est important, c’est que les témoins croiront que la villa de la reine a été attaquée par les forces impériales. Parce que c’est la réalité. »

Il plaça la main dans sa poche de poitrine. Le chef de l’Hydra en sortit un petit appareil de communication. Iska l’avait reconnu. Il avait été fabriqué dans l’Empire.

« À l’aube, le peuple souverain sera furieux. Contre l’armée impériale — et c’est la gestion de la reine actuelle qui leur a permis d’envahir. »

« … »

« Oh, êtes-vous intéressé par cet appareil de communication ? C’est une imitation créée pour faire croire qu’elle a été fabriquée dans l’Empire. Je parlais à mon personnel avant de venir dans cette demeure, vous voyez. Je n’en ai plus l’utilité. »

Il l’avait jeté sur le sol. Même cette action apparemment insignifiante était calculée. Si un appareil de communication impérial était laissé dans la villa, cela constituerait une preuve supplémentaire de l’invasion de l’Empire.

« Bien. Si vous voulez bien m’excuser, je vais partir, “déclara Talisman.

« … Qu’est-ce que vous avez dit ?” Iska avait froncé les sourcils. “Qu’est-ce que vous voulez dire ? Sisbell est toujours — !”

« Ne serait-il pas étrange qu’un membre de la famille royale soit absent lorsque le palais est attaqué par l’armée impériale ? » Il redressa le revers de son costume. « Vous étiez acculé dès le départ », déclara le démon jouant le rôle d’un gentleman. « Combien d’années pensez-vous que nous ayons passées à élaborer ce plan ? Il y avait une chance que les choses ne fonctionnent pas, même si je venais dans cette maison. Eh bien, il est préférable d’être prudent. Selon les circonstances, Alice aurait pu être ici à votre place. »

« … »

« Saint Disciple Iska, vous avez bien fait, juste vous quatre. Je m’incline devant vous pour votre courageux effort pour protéger Sisbell. Mais nous avons atteint notre but. »

Iska était resté silencieux.

Qu’est-ce que ça veut dire ?

Ont-ils déjà kidnappé Sisbell ? Ou est-ce une autre de ses stratégies ?

Il n’avait aucun moyen de le découvrir maintenant. À cause de ça…

« Croyez-vous que je vais vous laisser vous échapper ? » Iska avait pointé le cou de Talisman avec la pointe de son épée astrale noire. « Après tous ces coups de feu et ces détonations, il ne serait pas étrange que la police militaire fasse irruption ici. Que croyez-vous qu’ils penseraient s’ils vous voyaient ? »

« Ils réaliseraient que je suis le cerveau de tout ce qui se passe ici. »

« C’est donc la vraie raison pour laquelle vous essayez de partir d’ici. Vous avez l’intention de vous échapper avant que les citoyens du château ne vous voient. »

C’est pourquoi Iska ne voulait pas le laisser s’enfuir. La tête de l’Hydra était ici. Si cela sortait au grand jour, ce serait un moyen facile de faire échouer leur plan.

« Je me demande si c’est vrai ? »

Tap… Tap… Sous les pieds de Talisman, les gravats sur le sol avaient commencé à bouger.

Plus de deux cents livres de débris s’éparpillaient le long du mur et des fragments de lustre serpentaient sur le sol.

« Qu’est-ce que c’est ? »

« Vous avez de bons instincts. Vous avez compris que ce n’est pas moi qui ai fait ça et vous êtes sur vos gardes. Vous avez raison. Ce n’est pas mon pouvoir astral. »

Le pouvoir astral des Ondes était spécialisé dans la force brute, détruisant les choses en les écrasant et en les soufflant. Ce n’était pas quelque chose qui pouvait attirer autant de gravats vers lui. La masse fragmentée rampa sur le sol, se dirigeant vers la porte brisée derrière Talisman et à l’extérieur vers le jardin.

Qu’est-ce qui se passe ?

Ce n’est pas la première fois que je vois ça. J’ai l’impression d’avoir déjà vu quelque chose comme ça avant.

Iska ne pouvait pas rediriger toute sa concentration pour y penser. S’il était distrait, il ne ferait pas assez attention à Talisman lui-même.

« J’ai dit que je communiquais avec mon personnel, mais je suppose que je dois faire un ajout. » Le chef de l’Hydra avait piétiné l’appareil de communication au sol. Sa voix était jubilatoire. « Tout à l’heure, une sorcière qui avait été emprisonnée pour haute trahison s’est échappée de la prison du palais. J’ai parlé avec elle. »

« Une sorcière ? »

Il y avait deux significations à ce mot. Dans l’Empire, c’était un terme péjoratif pour les mages astraux. Quand un mage astral appelait quelqu’un « sorcier » ou « sorcière », il voulait dire « criminel ».

« Vous connaissez vous-même cette jeune femme. Ne vous en êtes-vous pas vous aussi rendu compte avec votre instinct ? »

« … Qu’est-ce que vous avez dit ? »

« Vous l’avez vaincue une fois. Malheureusement, si l’inquisition pensait pouvoir la retenir dans une pièce isolée, elle se trompait lourdement. Surtout dans l’état de chaos dans lequel se trouve le palais. Après tout, elle n’est plus humaine. C’est une sorcière au sens propre du terme. »

Clack… Clack-Clack.

Alors même que Talisman rassemblait ses mots, des débris volumineux étaient extraits du château.

Était-ce une forme de magnétisme ? C’était comme si une immense force gravitationnelle tirait les choses vers elle.

Une sorcière. La gravité. Qui était associé à de tels termes… ?

« Non ! »

« Adieu, romantique. » Le chef de la maison Hydra, Talisman, avait ouvert son costume en se retournant rapidement et en sautant par la porte.

C’était mauvais.

Le pire des scénarios se dessinait dans l’esprit d’Iska, et cela ne concernait pas l’évasion du cerveau derrière toute cette affaire. C’était à propos des décombres qui avaient été traînés au loin. Il avait déjà vu ce pouvoir astral invoqué auparavant.

« Euh, attendez — ! »

« Finis-en, Vichyssoise. »

+

Le canon ultime.

+

Tous les débris de la grande salle de l’ancien château s’étaient combinés et comprimés pour créer une balle qui avait soufflé le premier étage du manoir de Lou Erz, Iska et tout.

+++

La maison de Lou Erz. Troisième étage.

Poursuivis par des golems de neige en haut des escaliers, Jhin et le reste de l’Unité 907 avaient trouvé une scène de neige d’un blanc pur devant eux.

C’était le fait de Grugell, la sorcière du soleil de minuit.

L’intérieur du vieux château était recouvert de neige comme un mirage, mais les apparences étaient trompeuses. Il n’y avait aucune chance que ce soit n’importe quelle vieille neige.

« … Les assassins ne sont pas là. Se sont-ils retirés ? »

« Jhin, derrière toi ! Attention au golem ! » Néné avait crié depuis l’arrière.

Le golem de l’escalier avait fait trembler l’endroit en montant les marches du troisième étage.

« Courez vers l’arrière. »

« Je… Je sais ! Je sais, alors s’il vous plaît, ne lâchez pas ma main ! » Sisbell avait saisi sa main comme si sa vie en dépendait.

Dès que Jhin et Sisbell, les deux premiers de la file, avaient mis le pied dans la neige, le sniper avait senti une douleur intense lui traverser la cheville.

« Aïe ! Stop ! Néné ! Patron ! Vous ne pouvez pas marcher dans cette neige ! »

« Pourquoi pas !? »

« Ne sentez-vous rien ? »

« Non, alors c’est quoi — ? Eek ! » La voix de Sisbell s’était brisée quand elle avait regardé la jambe enterrée de Jhin. La surface duveteuse était lentement tachée de rouge.

« La neige m’a mordu. Si je n’avais pas porté des chaussures fabriquées dans l’Empire avec des plaques de métal, elle m’aurait arraché le pied, chaussure et tout. »

Il avait enduré la douleur en retirant son pied. La neige ensanglantée qui s’accrochait à sa chaussure s’était transformée en fragments de cristal solides, semblables à du verre.

« C’est comme marcher dans une montagne d’aiguilles ! » s’écria Sisbell.

« Je le sais. Il est temps de faire un peu d’analyse. Pourquoi suis-je le seul à avoir été blessé par la neige ? Pourquoi êtes-vous indemne ? »

« Huh !? Umm… » Sisbell fixa la scène hivernale devant elle et fronça les sourcils. « Les créations de puissance astrale réagissent parfois en fonction de l’absence de cette énergie. Les ascenseurs et les portes du palais — Oh, je — je n’aurais pas dû dire ça. Faites comme si vous n’aviez pas entendu. »

« Continuez. »

« D-Donc cette neige n’attaque que ceux qui n’ont pas de pouvoirs astraux ! »

« Alors nous n’avons pas de problème. Hé, patron, c’est à toi. »

« … Je savais que tu me ferais faire ça ! Allez ! Tu ne peux pas traiter ton commandant comme ça ! »

Mismis s’était précipitée devant eux et avait soulevé la neige tombée aussi fort qu’elle le pouvait. Mismis pouvait le faire. Elle avait repoussé la neige que Jhin et Néné ne pouvaient même pas toucher.

« Continue comme ça, patron. Frappe juste la neige qui est sur le chemin… Je suppose que je devrais me concentrer sur ça d’abord. »

Quelque chose avait rugi dans le passage. Jhin se retourna pour faire face au golem qui rampait dans les escaliers.

« C’est vraiment dommage — je voulais garder ça pour plus tard. »

« Vous ne pouvez pas, Jhin. Les balles ne fonctionnent pas sur un golem fait de poudre astrale… »

« Alors je suppose que je vais brûler ce truc. »

« Hein ? »

Jhin avait lancé quelque chose. Dès que le golem toucha et brisa la chose qui s’élançait vers lui, l’odeur de l’alcool emplit leurs narines. Sisbell l’avait sentie avec acuité dans son nez.

« Est-ce de l’alcool ? »

« Un alcool rectifié de la table du banquet. J’ai emprunté une bouteille. »

C’était de l’alcool distillé à 93 % et une boisson qui n’en avait que le nom. La moindre flamme l’aurait enflammé, le rendant aussi inflammable que de l’essence.

« Dommage que tu sois née, poupée de neige. »

Jhin avait jeté un briquet sur le golem. Cela avait enflammé l’alcool. Le géant avait été englouti dans des flammes rouges torrides. Le feu avait même fait fondre la neige autour de lui.

D’un autre côté…

« … C’est une blague. »

Jhin n’avait même pas eu le temps de célébrer. Au sein des flammes frémissantes, le tas de neige se condensa, d’où naquirent de nouveaux soldats de neige. Ce n’était pas un golem. C’étaient des poupées, chacune à peu près aussi grande que Néné. Maintenant plus petites, elles compensaient cette différence par leur rapidité alors qu’elles commençaient à courir vers les flammes.

« … Donc ils ont l’intention de se frayer un chemin à travers le feu pour nous attaquer. »

« Jhin, par ici ! Il n’y a personne dans cette pièce au fond ! » Au bout du couloir, Mismis ouvrit la porte d’une pièce et leur fit signe d’entrer.

Les traces de ses pas avaient été laissées dans la neige — les seuls endroits qu’ils pouvaient traverser dans ce passage.

« Néné, suis ses pas et fais attention à ne pas toucher la neige. »

« Je le sais déjà, Jhin. » Néné avait traversé le hall à toute vitesse, marchant seulement sur les traces de Mismis. Une fois arrivée dans la pièce, elle fit signe à tout le monde du regard. « Entrez, les gars ! On ferme la porte ! »

Dès que Jhin avait bondi dans la pièce, il avait verrouillé la porte de l’intérieur. Il s’était appuyé contre le mur et avait retenu sa respiration.

« Croyez-vous qu’on peut se cacher ici… !? » demanda Sisbell, les épaules lourdes.

« Qui sait ? Nous n’avons aucune garantie de pouvoir nous échapper, quoi que nous fassions », répondit-il gravement. Ils étaient acculés. Ils auraient pu réussir à atterrir par la fenêtre du deuxième étage, mais un amateur aurait eu du mal à sauter du troisième étage. « Nous n’avons qu’une seule option pour nous échapper — si nous faisons quelque chose à propos de cette vieille dame et que nous retournons au deuxième étage. Et si nous parvenons à échapper aux autres soldats, nous pourrons peut-être sauter dans le jardin par une fenêtre ouverte. »

« Ça fait beaucoup de si ! » s’écria Sisbell.

« Shhhh. » Néné lui saisit les épaules par-derrière, faisant frémir son corps.

Crunch. Des pas traversaient la neige.

***

Partie 2

Il s’agissait des poupées de neige qui avaient survécu aux flammes — mais le problème était leur nombre. On aurait dit qu’une armée entière marchait vers eux.

« … Je dois le reconnaître. La vieille dame est tenace. On dirait qu’elle essaie de faire croître son nombre autant qu’elle le peut. »

Les balles ne fonctionneraient pas contre les poupées de neige. Mobilisées par le pouvoir astral, leur force physique dépassait de loin celle des humains. Si l’une d’entre elles clouait Jhin au sol, il ne serait pas en mesure de s’en défaire.

« Oh ? Vous vous cachez dans une pièce ? »

Ils pouvaient entendre le ricanement de la vieille femme de l’autre côté de la porte qui les séparait. On aurait dit une sorcière de conte de fées. Sa voix rauque faisait froid dans le dos.

« La neige n’est pas la même chose que la terre. Aviez-vous cru que vous pouviez faire fondre un golem de neige ? Ne savez-vous pas que les pouvoirs astraux de la terre ne peuvent être activés que là où il y a de la terre ? C’est la différence avec mes pouvoirs. Je peux faire tomber la neige n’importe où. »

Crunch, crunch… Poupées à la main, la vieille femme avançait lentement sur le sol enneigé.

« C’est un monde de neige. Jetez un coup d’œil. Je vous félicite d’avoir traversé cette scène, mais je peux voir exactement où vous êtes allé grâce à vos empreintes de pas. »

« — ! »

« — Ferme-la. » Jhin avait serré la bouche de Sisbell alors qu’elle commençait presque à émettre un son.

Les traces de pas continuaient tout le long du couloir. Ils pouvaient l’imaginer au fond d’eux-mêmes — Grugell, la sorcière montrant du doigt les empreintes qui s’arrêtaient à la porte en souriant, les yeux plissés.

« Vous vous êtes enfermés dans cette pièce, en essayant de trouver un moyen de sauter du troisième étage à l’extérieur dans le jardin avant que votre poursuivant ne vous atteigne ? Eh bien, je suppose que c’est tout ce que vous pouvez faire, mais je ne vous laisserai pas le temps de le faire. C’est à ça que servent ces poupées. »

Sa présence était presque volatile.

« Enfoncez cette porte ! »

Les troupes des neiges s’étaient ruées sur la porte. Après que des dizaines d’entre elles aient chargé, des parties de la porte avaient explosé. Les poupées s’étaient glissées par le trou dans la pièce, dégringolant comme une avalanche.

« Écrasez ces soldats impériaux. Ne laissez que Mlle Sisbell — Mlle… Hein… ? »

Ils n’étaient pas là. Pas une seule personne n’était dans le coin salon de la chambre. Même la salle de bain et les toilettes étaient vides.

« Ils n’auraient pas pu ! Ils n’auraient pas pu bondir dehors à ce moment précis… »

« Nous sommes derrière vous, grand-mère. »

« … Non ! » Tout le corps de la vieille femme frissonna lorsqu’elle entendit les pas des soldats impériaux derrière elle.

Pourquoi ? Pourquoi les soldats impériaux, qui auraient dû se cacher dans la pièce du fond, étaient-ils derrière elle ? Grugell ne pouvait même pas se retourner pour faire face à cette incroyable réalité.

« Nous n’étions pas cachés dans la pièce du fond. On était deux portes avant ça. »

« Qu’est-ce que vous avez dit… ? »

« Vous avez sous-estimé ce qu’un commandant impérial peut faire. Notre chef est une fainéante et une tête de linotte, mais elle n’est pas idiote. »

C’est ce que Mismis avait dit.

+

« Jhin, par ici ! Il n’y a personne dans cette pièce au fond ! »

+

Elle leur avait dit de se cacher dans la pièce du fond, en criant, en fait, pour s’assurer que la sorcière entende le cri exprès.

« M-Mais les empreintes de pas ! »

« Nous sommes revenus sur nos pas. Nous avons laissé des traces de pas dans la neige jusqu’à la dernière salle, puis nous avons marché dans les mêmes pas pour retourner d’où nous venions. »

« Impossible ! »

C’était une méthode d’évasion utilisée dans le règne animal. Les lièvres de la toundra le faisaient par instinct pour échapper aux renards. La sagesse des humbles qui essaient de survivre avait eu raison de la sorcière.

« Ne sous-estimez pas les soldats impériaux, grand-mère. »

« — Espèce d’ordure ! »

« Extinction des feux. » Jhin la frappa à l’arrière de la tête avec la bouche de son arme de poing. Il ne l’avait pas laissée utiliser son pouvoir astral, assommant la sorcière. Elle s’était effondrée sur le tapis de neige.

« … Est-ce qu’on va s’en sortir ? » Sisbell avait jeté un coup d’œil à la chambre, regardant la vieille femme inconsciente avant de soupirer de soulagement. « Ce n’est pas le moment d’être soulagée », se dit-elle. « Nous n’avons pas dû voir d’autres assassins parce qu’ils se sont retirés pour ne pas être pris par le pouvoir astral de Grugell. Il faut fuir pendant qu’ils se font discrets… mais je m’inquiète de la laisser ici. »

« Nous devons la laisser ainsi. » Mismis avait baissé les yeux sur la femme effondrée et avait secoué la tête sans hésiter. « Nous avons déjà décidé de nous échapper de cet endroit. J’aimerais l’utiliser comme otage, mais nous ne sommes pas dans un état tel que l’un de nous puisse la porter sur son dos et s’enfuir. »

« Je — Je comprends. Dans ce cas, allons en bas. Nous pourrons peut-être faire un saut à l’extérieur depuis une chambre de domestique ! » Sisbell avait désigné les escaliers.

À cet instant… le canon ultime avait rugi.

Le rire d’une sorcière avait résonné, venant de nulle part. Personne ne comprenait ce que c’était.

+

Le premier étage du vieux château avait été soufflé.

+

Sisbell, les trois membres de l’Unité 907, et même les soldats armés qui attaquaient la villa, ils avaient été tous assommés par la force de l’impact.

C’était deux secondes ? Ou plus de dix ?

Ils ne pouvaient pas dire combien de temps s’était écoulé.

Le vieux château penché sans rez-de-chaussée. Lorsque Mismis avait ouvert les yeux, pas tout à fait consciente, l’endroit entier était sombre.

« … Hein ? » Elle était sur le côté, effondrée.

Le passage avait fait une embardée.

Il semblerait que les lignes électriques aient été coupées. Toutes les lumières étaient éteintes. Elle pouvait voir à la lumière de la lune à travers les fenêtres que des carreaux étaient tombés du plafond et que les vases et les portraits suspendus aux murs avaient dégringolé sur le tapis.

« Qu… que… que s’est-il passé… ? » Elle s’était levée du sol incliné, prudente. « Jh-Jhin ? Néné ? Où êtes-vous ? »

Elle avait senti un mouvement.

C’était Jhin, le sniper aux cheveux argentés, qui marchait vers elle en se tenant le côté. Derrière lui, Néné était apparue dans l’obscurité. Il semblerait qu’elle se soit ouvert la lèvre quand elle avait pris le coup.

« Hé, patron. J’ai dit qu’on descendait au deuxième étage, pas qu’on allait faire sauter le château. »

« Ce n’était pas moi ! »

« Je sais. C’est forcément l’Hydra, mais… qu’est-ce qui se passe ici ? Ce n’était pas des coups de feu tirés par un simple soldat. Ont-ils prévu de raser l’endroit ? » Jhin avait scruté l’obscurité plusieurs fois. « Où est la fille que nous gardions ? »

« Huh !? Oh, c-c’est vrai… Où est Sisbell !? » s’écria Mismis.

Ils ne l’avaient vue nulle part. Bien qu’elle soit une sorcière, elle était plus menue que les autres. Elle avait dû être emportée par l’impact.

+

« Je t’ai trouvé. »

+

Le rire séduisant d’une sorcière avait traversé le passage éclairé. Des flammes violettes avaient jailli.

La lumière astrale avait frémi comme un feu follet et illumina ce qui semble être un véritable monstre.

« Je t’ai trouvé, petite Sisbell. Oh, on ne bouge pas, n’est-ce pas ? Je vois. Tu t’es évanouie. Quel soulagement ! J’avais tellement peur d’en avoir trop fait. »

Le monstre avait ramassé la fille inconsciente et l’avait hissée sur son épaule.

La sorcière en violet. Vichyssoise — c’était indubitablement elle.

Ses cheveux étaient d’un rouge flamboyant et ils étaient solidifiés comme une pierre précieuse. Tous ses muscles s’étaient transformés en quelque chose qui ressemblait à du verre. Ils pouvaient voir les fenêtres et le plafond derrière son corps, transparent comme une méduse.

Pourquoi le monstre qu’Iska avait combattu était-il ici ?

« Pourquoi… !? »

« Hmm ? Oh, donc il y avait encore des sujets impériaux dans le coin. Ce qui signifie que Tante Grugell a dû perdre. Pas que je m’en soucie. » La sorcière portant Sisbell s’était tournée vers eux.

Elle avait enfin remarqué l’Unité 907. Enfin, c’est ce qu’on aurait dit.

« Vous pensez vraiment que je peux être confinée ? Aucune chance. Les menottes pour contenir le pouvoir astral sont en acier. Pour me contenir, il faut trouver le vrai matériau forgé par les Astraux. »

C’était comme si un cauchemar avait refait surface.

Même Grugell, la sorcière du Soleil de Minuit, contre laquelle ils s’étaient désespérément battus jusqu’à présent, était dépassée par cette vraie sorcière.

C’était ainsi parce qu’elle était un monstre inhumain.

« J’ai Sisbell sous ma surveillance. Je me demande ce que je vais faire de vous. Je vais peut-être vous faire rôtir avec cette villa. »

« Alors, venez nous voir. Rendez-nous Sisbell ! »

« Eh bien, c’est ce que j’avais pensé, mais je suis d’excellente humeur en ce moment. Je viens de prendre ma revanche, après tout. Ce serait une perte de temps de me battre contre vous, alors je suppose que je pourrais vous laisser tranquille. »

« … “Revanche” ? » répéta Jhin. « Vous ne voulez pas dire… »

« L’ancien Saint Disciple Iska, c’est ça ? Je l’ai fait exploser tout à l’heure, ainsi que tout le premier étage. » Elle avait pointé son pouce vers le sol. « Le sol du troisième étage commence même à se pencher. Cet endroit devrait s’effondrer dans, disons, oh, quelques minutes ou plus. »

« Non ! » hurla Néné, les épaules tremblantes.

« Iska n’aurait jamais — ! » Le cri de Néné résonna dans le couloir faiblement éclairé.

« Lady Sisbell !? »

Plusieurs bruits de pas résonnaient dans le couloir. Trois jeunes filles qui s’étaient cachées à l’arrière semblaient avoir entendu le bruit, chacune portant un uniforme de serviteur.

« Ah oui, les servantes de cet endroit. »

« Eek !? »

Dès qu’elles avaient vu le monstre en face d’elles, elles avaient glapi. La peur, cependant, n’avait duré qu’un instant. Elles avaient vu Sisbell sur l’épaule de Vichyssoise. La colère avait brillé dans leurs yeux et elles avaient serré les dents en réponse.

« Lady Sisbell ! »

« Fripouille ! Elle est l’une des personnes les plus importantes de la Souveraineté. Lâchez-la ! »

« Ça n’arrivera pas. » La sorcière ricana. « Elle ne reviendra pas vers vous, jamais. »

« Silence ! » Une des filles, indignée, avait sorti un couteau d’autodéfense. « Lâchez Lady Sisbell, monstre ! »

« Stop ! Ne soyez pas stupide ! » Jhin ne l’avait pas retenue assez vite.

Aucun des serviteurs de la villa n’avait de pouvoirs astraux pouvant être utilisés pour le combat. Il n’y avait aucun moyen pour eux de se battre contre une sorcière.

Surtout pas avec un seul couteau.

« Aïe. Je plaisante. »

La lame sortait du flanc de la sorcière, mais elle n’avait fait qu’ouvrir un petit trou dans sa chair semi-transparente. Pas une seule goutte de sang n’avait coulé de la blessure.

« Vous ne pouvez pas me battre avec ça. »

« Êtes-vous un monstre ? »

« Si vous êtes violent, vous allez vous-même vous faire malmener — et ça va faire mal. Comme ça. »

« Euh… gah ! »

Le couteau dépassant toujours de son côté, la sorcière attrapa le cou de la jeune fille et la serra lentement, fixant les yeux de la servante. « Joli visage. Assez mignon pour qu’on t’ait choisi pour travailler pour les Lou. Tu n’as probablement pas eu un seul souci en tête depuis le jour de ta naissance. »

« Ah… »

« Je vais peut-être brûler ton joli petit visage au point qu’il ne retrouvera jamais son état d’origine. Tu ne seras plus jamais capable de te regarder dans un miroir. »

« Uhhh !? St… stop… »

« Nuh-uh. Je ne serai pas plus gentil avec toi… »

+

« Vichyssoise. »

+

Le sourire de la sorcière s’était figé.

***

Partie 3

Elle avait oublié qu’elle tenait la servante et s’était retournée pour regarder. Il y avait là un garçon aux cheveux noirs, couvert de poussière de la tête aux pieds. Il n’y avait que de légères éraflures sur sa joue et son front.

« Encore vous ? »

« … Maintenant, vous l’avez vraiment fait. J’ai failli mourir à nouveau. » Iska tenait ses épées astrales. L’épée blanche pouvait libérer le pouvoir astral scellé par son homologue noire juste une fois.

S’il n’avait pas eu le pouvoir astral de Talisman à sa disposition, il aurait été soufflé au premier étage par le tir magique.

Il avait déjà vu le pouvoir astral une fois auparavant. Sa réaction en une fraction de seconde avait fait la différence entre la vie et la mort.

« Comment pouvez-vous être inhumain !? » Iksa avait crié ceci.

La sorcière avait rapidement pris une décision. Après l’avoir affronté une fois, elle le savait dans ses os — combattre cet épéiste impérial était dangereux.

« Lâchez Sisbell ! »

« Vous êtes arrivé sept secondes trop tard, intrépide chevalier. » La sorcière avait lancé la servante sur Iska. Elle n’avait pas seulement jeté la servante, elle avait lancé la fille comme un boulet de canon humain.

« Guh ? »

« Ah-ha-ha-ha ! Dommage que je n’ai pas pu vous tuer. Mais c’est fini maintenant. »

Iska avait attrapé la fille. Pendant ces quelques secondes, la sorcière avait sauté par la fenêtre avec Sisbell sur son épaule. Elle avait utilisé la gravité pour léviter dans les airs. Même Iska ne pouvait plus la poursuivre.

« Cet endroit a été détruit par les soldats impériaux. Plusieurs centaines de citoyens en ont déjà été témoins. Vous n’avez aucun endroit où fuir. »

« Vichyssoise ! »

« Au revoir, Saint Disciple. Je serais heureuse que vous soyez enterré avec les décombres du château. »

Le plafond avait commencé à craquer. Après avoir reçu le tir magique, le bâtiment lui-même penchait d’un côté.

« Lady Sisbell ! »

« Stop. » Iska avait attrapé la main d’un des serviteurs qui avait couru vers la fenêtre. « Vous n’y arriverez pas à temps. Vous devez vous concentrer pour sauver votre propre vie. »

« Lâchez-moi… Qu’est-ce que vous savez ? Elle est importante pour la famille Lou. A quoi servons nous en tant que serviteurs si nous ne pouvons même pas protéger Lady Sisbell !? »

« Nous allons la sauver, » dit Iska.

« Quoi ? » Sa bouche était restée ouverte, ses yeux étaient devenus grands.

Quelles absurdités ce sujet impérial racontait-il ? Les deux personnes derrière lui avaient soudainement perdu la capacité de parler.

« Nous allons la sauver. Nous allons la sauver tout de suite, alors sortez d’ici et cachez-vous dans un endroit sûr. »

« … Qu’est-ce que vous… ? Continuez à rêver, soldat… » La jeune fille n’avait pas cessé d’essayer de secouer Iska qui s’accrochait à sa main. « Que pouvez-vous faire ? Vous voulez qu’on vous fasse confiance !? Lady Sisbell a été enlevée sous nos yeux ! Et vous n’avez fait que regarder ! »

« Vous vous êtes laissée prendre en otage », ajouta Jhin.

« Uh ! »

Sa remarque avait arrêté la jeune fille dans son élan.

« Pourquoi pensez-vous qu’Iska a appelé le nom de cette sorcière pour la distraire ? S’il ne l’avait pas fait, vous auriez été rôtie par ce monstre, et votre vie aurait été terminée. »

« … C’est… »

« Si vous n’aviez pas été prise en otage, il y avait une chance sur deux pour que nous puissions récupérer Sisbell. Ces chances ont explosé quand vous vous êtes laissée capturer. »

C’est pourquoi Jhin avait essayé de l’arrêter au début.

« Stop ! » Jhin avait dit.

Iska avait essayé de passer derrière la sorcière. Jhin avait voulu dire, ne vous mettez pas en travers du chemin, mais aucun des serviteurs ne l’avait réalisé.

« Nous allons réessayer. Nous ferons revenir Sisbell, c’est sûr. »

Le couteau qui avait transpercé Vichyssoise était sur le sol. Iska ramassa la lame et la pressa dans la paume de la jeune fille, enroulant ses doigts autour d’elle.

« Et si je ne peux pas le faire, vous pouvez prendre ma vie vous-même. Vous pouvez vous en prendre à moi avec ce couteau. »

« Quoi ? »

« Nous ne pouvons pas vous dire pourquoi, mais nous risquerons nos vies pour protéger Sisbell, au minimum. Nous sommes venus dans cette nation ennemie en prévoyant d’obéir aux lois. Si vous voulez la protéger, alors suivez nos instructions pour une fois. »

« … »

« Vous deux. »

Les deux filles qui tenaient des lampes avaient soudainement repris leurs esprits et avaient levé les yeux quand Iska les avait appelées.

« Où sont les autres ? S’ils se cachent toujours, vous devez les attraper tout de suite. Cet endroit va s’effondrer. »

« Euh, hum, bien… »

« Dépêchez-vous ! »

« O-oui, monsieur ! » Les deux filles s’étaient enfuies plus loin dans le château.

Yumilecia, Ashe, Noel, Sistia, et Nami — les cinq serviteurs travaillant au château. S’ils devaient évacuer, ils devaient le faire ensemble.

S’ils n’y arrivent pas, je ne pourrai pas les affronter.

Pas Sisbell. Pas Alice.

« Si vous promettez de nous écouter, je lâcherai votre main. »

« Bon… » Yumilecia, la fille la plus âgée, avait saisi le couteau de sa main libre, avait tranquillement rengainé sa lame et s’était mordu la lèvre en tremblant. « Nous vous écouterons, mais seulement pour ce soir, si cela signifie récupérer Lady Sisbell… »

+++

Le palais.

Des coups de feu dans la nuit. Des cris retentissant sur le terrain. Ces sons s’accrochaient aux oreilles comme les damnations des morts.

Je vais perdre la tête.

Je préfère être sur les lignes de front du champ de bataille qu’au château dans ce purgatoire.

« C’est sérieux ! » La jupe d’Alice se gonflait tandis qu’elle continuait à sprinter sur la place.

Les soldats criaient. Elle ne pouvait plus dire s’ils venaient du corps astral ou des forces impériales. Tout ce qu’elle pouvait faire était d’essayer de pacifier les braises du feu de l’enfer.

« Où sont les pompiers ? Qu’est-il arrivé aux réservoirs de carburant ? »

« Ils sont toujours en feu ! Des soldats impériaux sont postés près d’eux. Nous sommes déjà à pleine capacité pour essayer d’échapper aux snipers et tenter de contenir le feu ! »

« … Ils n’attaquent donc pas et se consacrent à entretenir le feu. »

Tout ce que l’armée impériale avait à faire était de laisser les flammes se développer d’elles-mêmes.

Ensuite, j’irais — Alice s’était empêchée de le dire à voix haute.

À ce moment-là, Rin évacuait les blessés vers les abris souterrains.

Rin ! Qu’est-ce que tu fais ? Ça fait vingt minutes.

Tu m’avais promis de me retrouver ici.

Elle espérait que Rin soit juste occupée. Le pire scénario serait qu’elle soit bloquée sur place parce que l’armée impériale l’attaquait.

Doit-elle attendre ? Ou doit-elle partir à la recherche de Rin ?

Toutes les dix secondes lui semblaient être une minute. Alors qu’elle serrait les dents et tenait bon, un golem de terre se précipita vers elle. « Lady Alice ! »

« Rin ! Je suis contente que tu sois en sécurité. Les blessés vont-ils bien ? »

« J’ai mis du temps à entrer en contact avec les médecins, mais ils sont tous dans l’abri des Lou et reçoivent des soins. » Rin avait sauté du golem. « La Maison d’Hydra est venue avec ses médecins et ses gardes arrangés par le Seigneur Talisman. »

« Il sait tout simplement comment gérer les choses. Il a été d’une grande aide. »

« … »

« Qu’est-ce qui ne va pas, Rin ? »

Rin fit une grimace. « J’ai vu à quoi ressemblait Vichyssoise quand elle a attaqué Lady Sisbell. »

« … Oui, je sais. »

Vichyssoise — envoyée de l’Hydra — avait attaqué la sœur d’Alice, se transformant en un monstre bizarre. Alice n’avait pas vu à quoi elle ressemblait, mais Rin en avait été témoin, ainsi que Sisbell.

Ses crimes avaient été commis indépendamment de la Maison d’Hydra, selon le chef de famille, Talisman, mais ils n’avaient aucun moyen de savoir si c’était vrai. Quoi qu’il en soit, Sisbell pourrait tout mettre en lumière avec l’Illumination une fois qu’elle serait de retour.

« Lady Alice ! J’ai une demande urgente ! »

C’était l’un des gardes d’Elletear, un garde armé qui ne quittait jamais la porte de sa sœur, qui courait vers eux, éclairé par une lumière.

« Un assassin ! Dans l’espace de la Reine ! »

« … Qu’est-ce que vous avez dit ? » Sa voix s’était presque prise dans sa gorge. Alice et Rin se regardèrent l’une l’autre.

« Rin. »

« Je — Je n’ai pas non plus entendu parler de ça. Le palais de la reine est gardé contre les envahisseurs. »

« C’est un Saint Disciple ! » Le garde ignora Rin. « Nous avons découvert ses deux gardes effondrés, loin de l’Espace de la Reine — tous deux gravement blessés. Les médecins font tout ce qu’ils peuvent pour arrêter l’hémorragie. »

« Un Saint Disciple… » Alice avait répété ces mots une nouvelle fois, les retournant dans sa bouche.

Le visage d’Iska lui avait traversé l’esprit. Puis Sans Nom, l’assassin habillé en camouflage actif.

« Donc vous me dites d’aller voir la reine immédiatement ? »

« O-oui. Je vous demande de vous occuper d’elle, mais je m’inquiète aussi pour la princesse aînée. »

« De quelle manière ? »

« … Elle s’est précipitée hors de la tour des étoiles et s’est dirigée directement vers l’espace de la reine. »

Alice était devenue pâle. Rin douta de ses oreilles quand elle réalisa ce que cela signifiait.

« Quoi !? Ma sœur Elletear ne sait pas se battre ! »

« Elle était si inquiète pour la reine qu’elle ne pouvait pas rester en place. Elle a passé ses gardes, bien que nous ayons essayé de l’arrêter, et… »

C’était imprudent.

Alice comprenait son inquiétude, mais c’était imprudent de la part de sa sœur sans défense d’entrer dans une pièce avec un assassin.

Elle ne fera qu’empirer la situation si elle est prise en otage.

Pourquoi ferais-tu ça ? Tu dois réaliser ce qui va se passer !

Alice ne pouvait pas comprendre cela. Ces actions n’auraient-elles pas juste causé plus de chaos ?

« Lady Alice, s’il vous plaît, arrêtez la princesse aînée. »

« D’accord. Vous restez à la Flèche des Étoiles. Je vais aller au Palais de la Reine. Rin, » Alice l’appela. Elle sauta sur l’épaule du golem, passant avant ça par sa main. Le golem de terre se leva sans même attendre quelques secondes, le sol autour de lui grondant comme s’il s’agissait d’un tank alors qu’il se mettait à courir.

« Je vais aller aussi vite que je peux, » dit Rin. « Si tu parles pendant que tu es à bord, tu risques de te mordre la langue, alors, fais attention. »

« Comme si j’allais laisser faire ça. »

Elles avaient regardé plus loin dans les terres depuis l’épaule du golem. En regardant le Palais de la Reine qui brillait comme un rêve dans la lumière astrale, Alice avait serré sa main en un poing.

« Pourquoi ferais-tu une telle chose, chère sœur… !? »

+++

Il y a environ trente minutes…

+

Dans la Flèche des Étoiles. La chambre de la princesse aînée, la Petite Salle des Miroirs.

Par la fenêtre d’une pièce tentaculaire qui ressemblait à une suite tout droit sortie d’un hôtel de luxe…

« Tu es une si gentille petite fille, Alice. »

Regardant les pelouses brûler en contrebas, Elletear était ravie de la vue, les yeux bridés. Sa petite sœur faisait un effort herculéen pour éteindre ces flammes.

« Si ces flammes grandissent, il y aura des victimes même au-delà du palais. Tu veux absolument empêcher cela. Quel merveilleux désir que tu as ! »

Elle n’était pas sarcastique. Elletear voulait peut-être que le paradis tombe, mais elle n’était pas sans cœur au point de souhaiter plus de victimes. La chute de la Souveraineté était une question entièrement différente du sacrifice de son peuple.

« Mais il semble que l’Hydra ne partage pas mes sentiments. »

« Hmm ? »

« Lorsque vous avez attaqué ma sœur dans le huitième état, vous vous êtes déchaîné dans les rues, détruisant apparemment les bâtiments sur votre passage. »

« C’est parce qu’elle avait des gardes. Apportez vos griefs au Saint Disciplee Iska, si vous voulez blâmer quelqu’un. »

Dans le salon derrière Elletear, une rousse en tenue de prisonnière se prélassait sur un canapé. Une paire de menottes avec une chaîne cassée pendait à ses poignets.

« Ce serait bien si vous pouviez au moins me dire que j’ai fait du bon travail en m’évadant de prison. »

« Ne serait-ce pas condescendant ? S’évader de prison ne serait pas une mince affaire pour vous, Vichyssoise. » Elletear avait ricané en faisant face à la fenêtre. « J’envie vos pouvoirs. Si je les avais, je n’aurais peur de rien. »

« … C’est quelque chose venant de vous — vu que vous êtes un monstre. » Vichyssoise soupira depuis le canapé. « Avec votre beau visage et votre corps, vous pourriez faire sursauter la déesse de la beauté. Mais vous avez de drôles d’intérêts. Pourquoi sacrifiez-vous tout pour fréquenter des bêtes ? »

« Qui peut le dire ? »

***

Partie 4

« Non choisie par les étoiles, la princesse jette son poste pour se venger de la planète et se transformer en sorcière. Est-ce ce que vous appelez une tragédie ? »

« … » Elletear n’avait pas répondu au début. « N’est-il pas temps ? »

« Oh, ok. Eh bien, je suppose que je vais aller capturer Sisbell. »

La sorcière aux cheveux rouges se leva. Des flammes violettes jaillirent de tout son corps, enflammant l’uniforme de prisonnière. Il brûla sur elle, et elle se transforma d’une personne en un monstre. Elle se transforma en quelque chose d’inhumain, que les Astrals avaient autrefois appelé l’Etoile Mutante par peur.

« Je ne pense pas qu’il y ait une raison de me faire y aller quand tante Grugell est déjà là. »

« Il y a un Saint Disciple parmi eux. Comme il vous a vaincu une fois, le Seigneur Talisman sera naturellement prudent. »

« … Devez-vous vraiment mettre du sel dans ma blessure ? Vous me parlez comme ça, et votre sœur… »

« Vichyssoise. » La princesse aînée avait gardé le dos tourné.

La sorcière en violet avait frissonné en entendant la princesse.

« Si vous posez la main sur ma sœur, j’écraserai l’Hydra immédiatement. »

« … Comptez-vous trahir ma famille ? »

« J’ai donné trois conditions à Lord Talisman dès le début. C’était l’une d’entre elles. Tant que vous les respectez, nous devrions pouvoir nous entendre. »

« … »

« Maintenant, allez-vous-en. J’ai un rôle important à jouer bientôt. »

« Ha. » La fille qui s’était transformée en monstre grogna. « Se faire blesser fait mal, même si on a un corps comme le mien. Je suis sûre que ça fera encore plus mal si c’est un Saint Disciple qui le fait. »

« Je le sais. »

« J’espère que vous pourrez continuer. Pour tromper le monde entier. » Elle fit un clin d’œil avant de disparaître.

Des braises violettes s’étaient répandues sur le tapis et avaient fini par disparaître.

« … » Elletear ne se retourna pas. La princesse aînée, la fille de la reine, observait la scène à l’extérieur. « Alice. »

Elle ne se souciait pas de la sorcière en violet. Tout ce qu’elle voulait voir, c’était sa petite sœur adorée. Ce soir, ce sera la dernière fois, la dernière fois qu’elle sera avec sa mère et ses deux sœurs.

« Ton défaut est que tu es trop forte. Je parie que tu penses pouvoir sauver tout le monde, même dans cette situation. Tu penses pouvoir repousser l’armée impériale, sauver la reine, et être le héros. C’est une chose splendide. »

La princesse du milieu, Aliceliese Lou Nebulis IX. Ce n’est pas seulement son pouvoir astral qui la rendait forte. C’était son empathie et sa bienveillance envers son peuple, et surtout, sa capacité à être impitoyable quand il le fallait.

Elle pouvait ignorer ses émotions. Au nom de la protection de la souveraineté, Aliceliese combattrait l’armée impériale sans pitié, même si elle pleurait en le faisant.

Elle étouffait ses sentiments et pleurait pendant la bataille. Elle était si forte.

« Mais ça ne suffira pas. »

Ce n’était pas suffisant. Alice ne serait pas capable de faire de cet endroit, la Souveraineté, un paradis pour tous les mages astraux dans tous les sens du terme.

« Tes idéaux sont fondés sur ta propre force. Ne feras-tu pas de cet endroit un paradis pour les plus forts ? »

Qu’arriverait-il aux outsiders qui n’étaient pas nés avec le pouvoir astral ? En tant que représentante de tous ces gens, Elletear brûlerait ce faux paradis.

Et pour commencer…

« Laisse-le brûler dans tes rétines et ressens le désespoir, Alice — regarde l’Empire me tuer. »

La princesse aînée caressa légèrement la vitre et sourit.

+++

Le palais de Nebulis. La flèche lunaire.

La bataille entre les forces impériales et les corps astraux avait fait exploser les murs du Diadème de la Lune. Le vent avait soufflé dans les niveaux supérieurs. Des solidifications d’énergie astrale d’un violet profond avaient rampé du sol, le détruisant au passage.

« Ce sont les avatars de Grand-père Growley ? » Kissing se renfrogna.

Le géant fait d’énergie astrale regarda par le trou dans le sol et se leva, essayant de se hisser des niveaux inférieurs. Il était indemne, même en touchant les épines flottantes. Les pouvoirs de Kissing pouvaient faire disparaître n’importe quoi. En termes de potentiel destructeur, elle était la plus forte des Zoa, mais les avatars de Growley étaient indemnes.

« J’aime mon grand-père, mais je déteste ces…, » Kissing fit la moue, s’éloignant d’un bond agile.

Ses Épines et son Vice étaient incompatibles. Même Kissing ne pouvait que garder ses distances lorsque les avatars faisaient ce qu’ils voulaient de l’endroit. Elle devait s’empêcher de s’y laisser prendre.

D’un autre côté… l’unité impériale que Mei dirigeait ne savait pas ce qu’étaient les avatars.

« M-ma'am ! Nos armes ne fonctionnent pas sur eux ! »

« C’est parce que c’est de l’énergie astrale. Ceux-ci seront ennuyeux à gérer. »

Mei fixa les géants qui rampaient. L’Ouragan du Roi Déchu sur son épaule était dans un état tel qu’elle pouvait l’utiliser à tout moment, mais son instinct lui disait qu’elle devait en priorité découvrir ce qu’était le pouvoir astral.

« Les balles les traversent et les épines de la petite demoiselle ne fonctionnent pas sur eux. Ce qui signifie logiquement que c’est de l’énergie astrale pure sur laquelle la force physique ne fonctionne pas… »

Comment les avatars ont-ils traversé le sol ? S’ils n’existaient pas dans la forme physique, alors ils n’auraient pas dû pouvoir détruire quoi que ce soit de matériel.

« Alors, qu’est-ce qui se passe, Sans Nom ? »

« Ce sont des avatars créés par le pouvoir astral du Vice. Pour faire court, ils sont apparemment invincibles. »

Les soldats avaient fait un pas en arrière, surpris. L’espace vide se brouilla, et un homme portant un manteau intégral apparut de nulle part. Le Saint Disciple du huitième siège, Sans Nom…

« Où est ton bras gauche ? »

« Si vous touchez à l’une de ces choses, vous finirez comme moi. Les chefs de famille, c’est quelque chose. Il est difficile à gérer en solo, même pour un Saint Disciple. »

« Alors tu t’es enfui ? »

« Je l’arrêterai la prochaine fois. »

« … Hmm, en supposant qu’il y ait une prochaine fois, » plaisanta Mei, puis son expression baissa, ses yeux se rétrécissant comme ceux d’une bête.

Des avatars humanoïdes géants avaient rampé pour former un mur là où les deux Disciples Saints se tenaient dans le passage. Des cerbères avaient bondi depuis le trou.

« Juste pour confirmer : Tu es sûr qu’ils sont invincibles ? Et si on utilisait des missiles ou des tirs ? »

« Je doute que cela fonctionne. Au contraire, cela augmenterait le nombre de nos péchés et les rendrait plus grands. Ça défie la logique. C’est si peu pratique. Mais ils ne font pas la différence entre ami et ennemi. »

Les avatars s’étaient précipités sur Sans Nom.

Pour remplir leur mission, ils avaient créé un chemin de destruction, piétinant sans discernement dans leur poursuite de Sans Nom. C’est pourquoi le corps astral ne se serait pas précipité ici sans plan.

« Ne vous faites pas de fausses idées. » Kissing leva sa main droite, et des milliers d’épines dispersées s’étaient agitées, marquant leur objectif sur Mei et Sans Nom. « Je ne laisserai pas mon grand-père s’occuper de ça. C’est moi qui vais vous éliminer. »

« Ah-ha-ha. Donc le chef de famille a mis son nez dans les affaires de sa petite-fille — tout ça pour la protéger. Que quelqu’un m’apporte des mouchoirs ! Peut-être que vous devriez retourner dans votre chambre pour l’heure du coucher. »

« … Je ne vous aime vraiment pas. » La sorcière aux cheveux noirs pointa Mei du doigt, qui riait. « Disparaissez… »

Jingle. C’était apaisant, apparemment inapproprié pour un champ de bataille qui déterminait la vie et la mort. Cela provenait de nul autre que l’oreille de Kissing. « Kissing, retourne au point de rencontre immédiatement. »

« Oncle !? »

L’appareil de communication en forme de boucle d’oreille était dissimulé sous les cheveux de Kissing. Le Seigneur Masqué et Kissing parlaient en un murmure, mais Mei et Sans Nom avaient une ouïe surhumaine. Ils avaient tout entendu.

« Pourquoi !? » demanda Kissing.

« Circonstances atténuantes. J’ai coupé court à un combat avec un Saint Disciple. Je m’y rends maintenant. » Sa voix semblait encore plus exaspérée. Kissing n’avait même pas eu le temps de s’en rendre compte. « La princesse Elletear a été tuée dans l’espace de la reine. »

« … Excuse-moi ? » Pour la première fois, l’arme de la famille, Kissing, avait laissé échapper une voix mignonne convenant à une jeune fille.

Un assaillant impérial attaquant la reine aurait été crédible. Mais… pourquoi la princesse aînée était-elle dans l’espace de la reine ?

« Je n’arrive pas à y croire. Elle ne sait pas se battre. Elle ne serait jamais sortie dans une telle situation… »

« C’est exactement ça. Je pensais qu’elle aurait été évacuée vers l’abri souterrain. Elletear aurait dû savoir qu’il fallait le faire — aussi sage et impuissante qu’elle soit dans cette situation. »

C’était un acte téméraire — comme si elle était sortie pour être tuée.

« … »

« Je n’ai également été informé que par la subordonnée d’Alice. Nous devons confirmer le rapport… Pour être franc, je ne sais pas non plus ce qui s’est passé. »

+

C’est à ce moment que le complot provenant d’une seule sorcière, Elletear… avait complètement renversé les hypothèses des Zoa.

***

Chapitre 4 : L’impardonnable

Les portes principales du palais de la Reine étaient fermées.

Ces portes ne pouvaient être ouvertes et fermées qu’à l’aide de la puissance astrale, et elles ne pouvaient pas être refermées avant un certain temps après avoir été déverrouillées. Cela signifiait que cela jouait entièrement en faveur des forces impériales s’ils pouvaient les ouvrir. Cela les laisserait entrer en masse et les envahir.

« Rin, tu sais ce qu’il faut faire : Passe par la porte cachée à l’arrière. »

Elles avaient ignoré les portes principales et s’étaient dirigées vers l’arrière. Alice avait couru le long de l’arrière du château tentaculaire où la lumière n’arrivait pas.

« Lady Alice, je comprends pourquoi tu es pressée, mais tu dois garder ton calme. »

« Je suis parfaitement calme. »

Un mensonge gênant.

Elle haletait. De la sueur se formait sur son front, ce qui n’était pas habituel pour elle. Elle savait qu’elle était loin de jouer le rôle d’une princesse posée. Son cœur battait la chamade dans sa poitrine.

Un ennemi se trouve dans le Palais de la Reine. Un Saint Disciple est un adversaire trop dangereux.

J’espère qu’Elletear et la reine sont saines et sauves.

« Cache-toi, Rin. »

Elles s’étaient dissimulées dans les arbustes le long du mur extérieur du Palais de la Reine. Rien ne semblait s’y trouver, du moins aux yeux des forces impériales. Alice — une mage expérimentée — pouvait repérer la faible présence de la lumière astrale sur le mur.

« Pouvoirs astraux, c’est moi. Écoute,-moi. » Alice tendit la main.

Le mur sembla se tortiller en réponse.

Le Palais de la Reine était vivant. Réagissant à un descendant de la Fondatrice Nebulis, les pouvoirs microscopiques avaient pris vie et avaient créé un petit tunnel dans le mur.

« Je ne vois pas de forces impériales. Si nous partons maintenant, je ne pense pas qu’ils remarqueront cette porte. »

« Dépêchons-nous, Rin. »

Elles s’élancèrent à travers le tunnel caché dans le hall du premier étage du Palais de la Reine. Là, elles trouvèrent les gardes royaux commandés par la reine et un des Astrals.

« Lady Alice, vous êtes de retour ! »

« Nous avons un rapport. Tout à l’heure, Dame Elletear — ! »

« Je le sais déjà. » Elle fit un signe de tête à ses subordonnés et courut dans le hall. « Je vais me rendre immédiatement à l’Espace de la Reine. Vous trois venez avec moi. Les autres peuvent continuer à monter la garde ! »

+++

Je me demande depuis combien de temps ce sentiment m’habite.

Quand ai-je réalisé que quelque chose clochait dans ce combat ? Quelque chose me dérange.

Elle sentait quelque chose — quelque chose de prémonitoire. Elle ne pouvait pas faire taire ce sentiment de malaise dans son esprit. Dans les centaines de batailles que la Reine Mirabella Lou Nebulis IIX avait livrées, l’instinct l’avait toujours conduite sur le bon chemin. Dans les champs de mines impériaux. Dans les plaines empoisonnées par les gaz. Quand ses communications étaient interceptées. Quand elle avait affaire à des espions. Quand ils étaient encerclés.

 

Son odorat détectait l’odeur de la mort.

 

« Je me demande pourquoi je reçois ça de vous. »

Elle essuya la poussière qui s’était déposée sur ses lèvres. L’espace où se tenait la reine avait été rasé. C’était son déchaînement. Les colonnes rondes qui soutenaient le toit avaient été découpées en disques. Là où il y avait autrefois des escaliers se trouvaient maintenant des tas de pierres taillés comme de minuscules dés.

Plink-plink. Des vitraux s’étaient détachés des fenêtres brisées.

« Une faux faite d’air. Une fois, elle a même coupé en deux un bombardier impérial. J’ai décidé que l’utiliser sur une personne serait trop inhumain et me suis retenue dans le passé, mais je ne vois aucune raison d’avoir de la retenue pour quelqu’un qui est assez perfide pour essayer de tuer la reine. »

« … » L’assaillant impérial était assis, affalé sur le sol, sous le mur fissuré. Il tenait son épée, complètement immobile, tandis qu’une petite flaque de son sang se formait sous lui.

« Dites-moi en quoi cela a un sens. Pourquoi êtes-vous encore en vie ? »

« … »

« Je peux entendre les battements de votre cœur. L’atmosphère capte tous les sons. Même le plus petit des souffles. »

« Je vois. C’est un pouvoir utile, » observa l’épéiste avec franchise. Il secoua le sang qui s’était déposé sur ses cheveux cramoisis. Une partie de son armure avait été largement entaillée, mais il se releva comme pour montrer que cela n’affectait pas son aptitude au combat. « Tu es atrocement cruel — c’est normal, je suppose, pour un descendant de la Fondatrice. Vous pouvez utiliser vos pouvoirs lorsque vous êtes attaqué par-derrière. Cela a de nombreuses applications. »

« … Pourquoi êtes-vous encore en vie ? On dirait que vous ne voulez pas répondre à ma question. »

« C’est parce que je suis moi. »

« … »

« Vous devez penser que je dis n’importe quoi. Je n’ai pas l’intention de vous forcer à comprendre. » Il fit tournoyer son épée, aussi longue que grande, en la ramenant à la verticale. Le Saint Disciple du premier siège, Joheim, suivait des yeux les mouvements de la reine. « Cette fois, je vais vous tuer. »

« Vous avez raison. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, et je n’aime pas la façon dont vous me regardez. Je peux dire par expérience que ce n’est pas un bon regard. »

Elle fit un pas en arrière sur le sol craquelé. Avec des mouvements fluides, la reine tapa le sol avec ses orteils.

« Alors, disparaissez. Disparaissez dans le vent, votre pierre tombale non marquée. »

Sous l’impact du Vent divin, Mandala, les murs de l’Espace de la Reine s’étaient déformés. Les vents s’étaient superposés et avaient commencé à souffler dans l’espace de la Reine. Les rafales désordonnées créèrent une barrière géométrique qui tordait tout ce qui l’entourait et annihilait son environnement.

En temps normal, elle l’aurait utilisé pour faire un siège. C’était l’un de ses secrets pour détruire une ville fortifiée, forteresse et tout le reste. Utilisée à petite échelle dans l’espace de la Reine, cette attaque n’était pas comparable à l’originale en termes de puissance brute.

« On dirait que vous m’avez sous-estimé », fit observer Joheim.

L’homme était indemne. Il avait glissé devant des centaines de tourbillons violents. Le plus grand épéiste parmi les Saints Disciples la poursuivait, arrivant juste devant ses yeux.

« Quoi ? »

« Vos vents évitent l’énergie astrale en avançant. »

C’était une attaque à grande échelle. C’est pourquoi elle s’était retenue de tout déclencher.

Ils étaient dans le Palais de la Reine. Si son peuple avait couru dans la pièce maintenant, ils auraient été frappés par les vents et leurs membres arrachés.

Elle avait donc limité son pouvoir astral, s’assurant qu’il ne pouvait pas nuire aux mages astraux.

« C’était votre chute. »

 

« Pourquoi… vous ne voulez pas dire !? » L’alarme avait trouvé son chemin dans sa voix.

 

Le Saint Disciple du premier siège. Joheim. L’assaillant de l’Empire.

C’était sa véritable identité.

« Vous êtes le traître. »

« C’est exact. J’ai trahi la reine pour changer la souveraineté. »

Joheim. Il était né dans la Souveraineté, un mage astral qui avait trahi le paradis et était passé à l’Empire. La reine ne l’avait pas su, c’est pourquoi son attaque inhibée, visant à ne blesser aucun mage astral, avait été fatale.

« Je savais que vous existiez, mais vous, la reine, vous ne vous souciez pas du tout de moi. Je n’étais qu’un combattant ennemi pour vous. C’est ce qui a fait la différence. »

« Grk !? »

Une seule épée longue. À son apogée, elle aurait été capable de s’en défaire en un instant en tant que meilleur automate de guerre de la Souveraineté.

Je l’ai esquivé ?

Et puis elle avait vu sa robe royale en lambeaux coupée en rubans. Le sang giclait. Elle avait de la chance de n’avoir été coupée que du bras gauche jusqu’à l’épaule… ou peut-être pas autant. Le Saint Disciple préparait déjà une seconde attaque.

« Cela va changer l’histoire. »

La lame destinée à détruire le paradis des mages astraux s’abaissa. La reine ne pouvait qu’accepter que c’était le moment où elle rencontrerait son destin.

« Maman ! »

« … Hein ? »

Quelqu’un cria.

+

La princesse aînée, Elletear, avait protégé la reine, blessée par l’épée du Saint Disciple.

+

« … Mè… re… fuis… » avec son dos toujours tourné vers la reine, la fille aînée tomba à genoux.

Le Saint Disciple avait été arrosé par le sang qui coulait de la blessure de l’épaule d’Elletear à sa poitrine. Avant que la reine, sa mère, puisse voir la scène jusqu’au bout… elle s’était évanouie.

La reine luttait pour rester consciente en raison de la blessure qu’elle avait au bras, et son esprit s’était éteint en voyant la tragédie qui frappait sa fille.

Elle avait perdu connaissance.

La princesse aînée avait été tranchée, trempée dans le sang.

Les témoins de l’événement n’étaient autres que le Saint Disciple Joheim et…

+

« … Elletear ? … Mère ? … »

+

Le Saint Disciple s’était retourné.

Loin devant l’épéiste qui tenait l’épée longue ensanglantée, se tenait une jeune fille dans l’embrasure de la porte de l’Espace de la Reine. Un sang pur portant une robe royale blanche. Une sorcière avec de beaux cheveux dorés.

« Je ne sais pas qui vous êtes, mais on dirait que vous êtes arrivée trop tard », murmura Joheim, l’impardonnable. « Cette nation est tombée. »

***

Chapitre 5 : Aliceliese, la Sorcière de la Calamité Glaciale

Partie 1

Aucun cri n’était sorti de son côté.

Au lieu de cela, ce qui remplissait l’espace de la Reine était le sang d’Elletear provenant de la blessure qui traversait la poitrine et l’épaule.

« … Mè… re… fuis… »

Alors que le sang s’écoulait de sa bouche, Elletear tomba comme une marionnette dont on aurait coupé les fils. La reine Mirabella s’était effondrée après elle, et toutes deux n’avaient plus bougé.

« … Elletear ? … Mère ? … »

Ça ne pouvait pas être vrai.

Alice avait au début douté de sa propre santé mentale. Elle n’avait jamais rien vu de tel auparavant, pas même dans ses pires cauchemars. Dans l’espace de la Reine, elle avait été témoin de la tragédie de la mort de sa famille bien-aimée.

« Je ne sais pas qui vous êtes, mais il semble que vous êtes arrivée trop tard. Cette nation est tombée. »

L’épéiste tenant l’épée ensanglantée s’était tourné vers elle. Elle ne le reconnaissait pas, mais elle savait qu’il devait être l’assaillant impérial. Un Saint Disciple ? Peut-être. Pour l’instant, cela n’avait pas d’importance. Elle savait une chose : cet homme avait commis un crime impardonnable —, et elle en avait le regret.

Elle avait été naïve. C’est pour ça qu’elle n’avait pas pu protéger la reine ou sa sœur.

Cela prouvait juste son point de vue. Cela prouvait que l’Empire devait être détruit.

« Je suppose que vous êtes la prochaine », lui déclara l’homme.

+

« Comment osez-vous, sujet impérial ! »

+

Pour la première fois de sa vie, elle cria, voyant rouge.

Elle savait que son cri était indigne d’une princesse, mais qui l’arrêterait ?

Jusqu’à présent, j’ai soupçonné ma sœur d’être responsable du coup d’État.

Je pensais que c’était en partie la raison pour laquelle elle avait emmené Sisbell à la villa.

Mais ça ne l’avait pas été. Sa sœur était innocente. C’était un malentendu qu’elle ne pouvait pas retirer.

Après tout… il n’y avait aucune chance que quelqu’un essayant d’usurper la reine protège la reine. Sa sœur Elletear n’avait pas été la traîtresse dans la Maison des Lou.

« — Sujet impérial, je ne vous pardonnerai jamais ! »

Elle ne pouvait pas contrôler son pouvoir astral. Son énergie — poussant les limites de ses capacités — s’était infiltrée de la crête sur son dos, se transformant en givre qui s’était manifesté derrière elle comme deux ailes bleues.

« De la glace, hein ? Vous devez donc être la Sorcière de la Calamité Glaciale. »

« C’est exact. Pour vous, je suis une sorcière. »

Elle pointa du doigt — en plein sur l’épée qui s’était abattue sur sa famille. Si cela signifiait obtenir sa vengeance, elle deviendrait une sorcière pour provoquer la destruction de l’Empire.

« Je vais geler les villes impériales. Et vous ! »

Le gel avait soufflé vers lui, se matérialisant en lames de glace qui s’étaient abattues sur le Saint Disciple. Cependant…

« On dirait que vous ne comprenez pas la situation. » Joheim tenait un bouclier dans sa main, un bouclier humain. Il tenait la princesse aînée, qui saignait abondamment de sa blessure à la poitrine.

 

« Lady Alice, ne fais pas ça ! »

 

« … Guh !? »

Alice avait repris ses esprits lorsque Rin lui avait crié dessus. Elle s’était arrêtée juste au moment où elle allait attaquer. La glace dans l’air avait fondu. Si elle ne s’était pas arrêtée, ses lames auraient transpercé sa sœur, l’otage, au lieu de sa cible.

Comment ose-t-il déshonorer sa sœur ? Après tout ce qu’elle avait vécu, Elletear avait été réduite à un bouclier humain. Cet acte de barbarie était indescriptible.

« J’ai capturé une sang pure. Je retourne dans ma nation. »

« Silence ! … Je… ne vous pardonnerai jamais. Ne vous avisez pas de penser que vous allez rentrer dans l’Empire en un seul morceau ! »

« C’est ce que nous verrons. » L’épéiste changea de direction, tenant toujours sa sœur dans le creux de son bras gauche. Dès qu’il tourna le dos à Alice, il se mit à courir vers l’arrière de l’Espace de la Reine.

Est-ce qu’il essaie de s’échapper ?

Mais c’est juste un mur là-bas. La seule porte est derrière moi.

Non.

Il y avait une autre porte, un couloir de secours connu uniquement de la famille royale et de ses proches. Mais elle ne s’ouvrait que si elle était touchée par un descendant de la Fondatrice.

« J’ai la clé. »

C’était Elletear dans ses bras. Il prit sa main immobile et lui fit toucher le mur. Quand les pouvoirs astraux avaient senti la princesse aînée de la Maison de Lou, le mur avait creusé un tunnel, créant un passage.

« Comment avez-vous pu utiliser ma sœur comme un outil !? »

« Je me sers de tout son potentiel. » Puis il s’était enfui de l’espace de la Reine.

Le passage caché était directement relié au terrain. Son plan était de rencontrer les autres forces impériales et de ramener la princesse aînée, Elletear, en territoire impérial.

 

« Rin ! Comment va la reine ? » Elle se tourna vers son assistante.

 

Rin et les trois gardes qui l’accompagnaient entouraient leur reine effondrée. Deux d’entre eux étaient déjà en train de demander des renforts sur leurs appareils de communication.

« Elle est vivante. Mais la lacération sur son bras gauche est allée jusqu’à l’os… C’est un miracle qu’il soit encore attaché. » Rin se mordit la lèvre, à côté de sa chef inconsciente, qui semblait souffrir. La préposée avait arrêté l’hémorragie en nouant un fil fin autour de l’artère de l’épaule.

« Elle a besoin d’une opération pour son bras dès que possible. Quand les médecins arriveront, nous devrons l’emmener dans la salle médicale, et ils devront commencer les procédures immédiatement… »

« Je te fais confiance pour gérer ça. Fais ce qui est nécessaire. »

« … Lady Alice. » Rin retint son souffle. « Tu ne vas pas le poursuivre, n’est-ce pas ? »

« Non. Je vais aller chercher Elletear. »

La priorité était de secourir la princesse aînée. Sa préoccupation secondaire était de déchirer cet homme membre par membre et de détruire l’Empire.

« Si quelque se produit, Rin, informe-moi immédiatement ! »

Alice n’avait même pas attendu une réponse avant de se mettre à courir et de se glisser par la porte cachée, hors du Palais de la Reine.

« Où est-il ? Où est cet homme… ? »

Elle était sûre que le Saint Disciple portant sa sœur se tenait ici il y a seulement dix secondes. Ils n’avaient pas pu aller bien loin. Sous la faible lumière, Alice pouvait seulement distinguer des taches noires sur la chaussée.

Le sang d’Elletear.

Le temps était essentiel. La blessure de sa sœur n’était pas comparable à celle de la reine. Si sa sœur ne recevait pas de soins médicaux immédiats, ce serait une question de vie ou de mort.

« Je ne vous laisserai pas vous échapper. Je ne vous laisserai pas emmener ainsi ma sœur… ! »

 

La trace de sang avait mené à la place du terrain. Plus loin, une voiture ordinaire garée avait commencé à s’éloigner.

 

« Vous essayez de la kidnapper ? »

Le but du Saint Disciple n’était donc pas de rencontrer l’armée impériale. Il allait immédiatement ramener la sang pure dans l’Empire.

Alice ne serait jamais capable de les atteindre sur ses propres jambes. Que pouvait-elle faire ? Ordonnerait-elle au corps astral de les poursuivre et de fermer les frontières ?

« Lady Alice, par ici ! »

Une voiture blanche du gouvernement avait crissé derrière elle. Un des gardes royaux de l’espace de la Reine était sur le siège conducteur.

« Dame Rin m’a confié un ordre : préparer une voiture pour partir à la poursuite des forces impériales qui ont enlevé Dame Elletear. »

« Une excellente décision. Faites-le avancer ! »

Alice avait plongé dans le siège du passager. Avant même qu’elle ait eu le temps de boucler sa ceinture, la voiture avait commencé à accélérer à la poursuite de l’autre véhicule, le suivant hors de l’enceinte du palais.

« Se dirigent-ils vers les résidences ? »

« Ils doivent prévoir de prendre l’autoroute. L’autoroute centrale 8 est directement reliée à la frontière. » Le garde qui tenait le volant avait un appareil de communication dans son autre main.

« Appel au poste de contrôle. Véhicule transportant la royauté. La princesse Elletear a été enlevée par l’ennemi, qui tente de s’introduire sur l’autoroute. Fermez toutes les frontières. »

Ils avaient traversé la ville à toute allure au milieu de la nuit, le véhicule ennemi ignorant les feux de signalisation. Ils avaient fait de même.

Les voitures autour d’eux klaxonnaient, mais ils n’avaient pas le temps de se soucier de la priorité de passage.

« Dépêchez-vous ! Ma sœur est sur le point de mourir. Nous n’avons pas assez de temps pour les poursuivre jusqu’à la frontière. Ça va lui coûter la vie ! »

« Je comprends, mais — ! »

 

Ils n’avaient pas pu réduire la distance. Dans cette course-poursuite à grande vitesse, seules cinq secondes séparaient les deux véhicules. Ils pouvaient voir la voiture transportant Elletear, mais ils n’arrivaient pas à la rattraper.

 

C’est incroyable. Comment peuvent-ils conduire si parfaitement à cette vitesse et à cette heure de la nuit !?

J’imaginais qu’ils dépenseraient toute leur énergie à s’assurer qu’ils étaient sur la bonne route.

Elle devait supposer qu’ils étaient déjà familiers avec les routes de l’État central. Sans l’ombre d’un doute, il y avait un traître de la Souveraineté — et qui que ce soit, il devait être dans cette voiture.

« Il y a quelque chose que je dois dire à l’avance », dit-elle au conducteur qui tenait le volant à côté d’elle. « Il s’agit de ce que nous ferons une fois que nous les aurons attrapés. Si ma sœur est en sécurité, nous devons l’emmener immédiatement à l’hôpital le plus proche. »

« Bien sûr. »

« Mais… si elle ne va pas bien… ou si nous ne sommes pas assez rapides pour la secourir, je voudrais que vous retourniez au palais royal immédiatement. »

« O-Oui, madame. Pour retourner auprès de la reine, vous voulez dire. »

« Non. »

Ses prochains mots allaient être la déclaration la plus cruelle qu’elle ait jamais faite dans sa vie.

« Pour écraser l’armée impériale restante. Pas un seul d’entre eux ne remettra les pieds sur sa terre natale. »

« … »

« Si ma sœur n’est pas saine et sauve, je ne sais pas si je peux garder mes émotions sous contrôle. Alors je vous le dis à l’avance. Je compte sur vous. »

« … Compris. »

À l’extérieur de la fenêtre, le paysage passa des immeubles du centre-ville aux banlieues. Ils s’étaient dirigés vers des routes qui s’étendaient dans la campagne et les bois pittoresques.

« Lady Alice, le véhicule ennemi s’est arrêté… N-Non, il ne s’est pas arrêté ! »

Le véhicule s’était arrêté brusquement.

Mais seulement pour un moment. La voiture visible depuis leur pare-brise avait commencé à faire marche arrière et à foncer sur eux.

« Ils ne peuvent pas être — !? »

Avant qu’elle ait pu dire autre chose, la vision d’Alice était en flammes.

La voiture avait explosé.

Alors que le pouvoir astral activait instantanément ses défenses automatiques face aux menaces humaines, il était lent à réagir face aux menaces mécaniques. La proximité de la bombe avait rendu difficile une réponse appropriée, même pour Alice.

C’était donc un piège.

Ils m’ont fait croire qu’Elletear était emmenée, mais la voiture était vide.

Elle commençait à perdre conscience. Au moment où elle avait senti la chaleur des flammes, la voiture dans laquelle se trouvait Alice avait été projetée en l’air par le souffle de l’explosion.

« — »

« Madame… Al... glace… s’il vous plaît… restez calme… »

Elle avait ouvert les yeux. Alice avait senti la fraîcheur du métal dans la voiture qui avait été retournée sur le côté.

Le pouvoir astral de l’acier. Le garde avait contrôlé le métal et arraché une partie de la voiture pour créer un bouclier de fortune, la protégeant du tir direct de l’explosion.

Il n’avait cependant réussi à fabriquer qu’un seul bouclier.

« Et vous ? »

« Je suis juste heureux… que vous… soyez… en sécurité… » Tournant le dos au pare-brise, le conducteur s’était affalé sur les genoux d’Alice. Son uniforme avait brûlé dans son dos. Sa peau était rouge et en sang.

« Vous m’avez protégé… »

***

Partie 2

Elle n’avait pas reçu de réponse. Après l’avoir protégée, il avait perdu connaissance.

 

« S’il vous plaît, réveillez-vous. Je vais chercher de l’aide tout de suite ! »

 

Elle posa sa main sur son dos brûlé, le recouvrant de givre pour le calmer. Elle sortit par la fenêtre de la voiture et attrapa l’homme, le tirant de toutes ses forces.

Puis Alice avait crié dans son appareil de communication : « Rin, s’il te plaît, j’ai besoin de toi ! » Elle n’avait pas eu le temps d’attendre sa réponse. « S’il te plaît, fais venir un médecin ici immédiatement. C’est une urgence ! »

« Lady Alice !? Comment va Lady Elletear !? »

« Ils se sont échappés. Même la voiture de l’ennemi était un piège. Pas le temps pour ça maintenant. Envoie une équipe médicale ici. J’ai quelqu’un qui est blessé. Il a été brûlé… pour me protéger… »

« Je m’en occupe immédiatement ! »

Rin n’avait pas demandé où était Alice. Elle pouvait savoir où elle se trouvait grâce à l’appareil et au centre de communication du palais royal. Tant qu’Alice ne bougeait pas, les médecins seraient en route dans un peu plus de dix minutes.

« … Je compte sur toi. » Elle avait raccroché et avait relevé la tête.

La voiture qui avait explosé au milieu de la route rugissait sous l’effet des flammes. Les braises volaient sur les épaules d’Alice comme de la neige.

À ses pieds, le garde gisait inconscient.

Derrière elle, il y avait la voiture écrasée par l’explosion.

« … »

Avec tout ça devant elle…

« Pourquoi ? » Alice s’était mordue la lèvre, si fort que cela avait saigné.

Ressentait-elle de la colère ?

Non. Cela ne rendait pas justice à ses émotions. La reine, sa sœur, et maintenant même l’un de ses subordonnés — les gens s’écroulaient sous ses yeux, la vie quittant leurs corps comme l’eau s’écoulant de ses doigts.

« J’étais censé les sauver — la reine, ma sœur, cet homme ! … Pourquoi rien ne va plus ! »

 

Alice était convaincue qu’elle avait le pouvoir de changer la guerre. Dès qu’elle était arrivée au palais, elle avait travaillé à contenir les incendies comme si sa vie en dépendait. Elle avait couru jusqu’au palais de la Reine et était venue jusqu’ici pour sauver sa sœur bien-aimée.

 

Et tout cela avait été en vain.

Pourquoi n’avait-elle pas été capable de sauver quelqu’un quand ça comptait le plus pour elle ?

« … »

Sa sœur était au bord de la mort après que ce Saint Disciple l’ait mutilée. Et la reine avait besoin d’être opérée immédiatement. Même cet homme qu’elle avait déposé sur la chaussée devait être amené à l’hôpital. Sinon, qui sait ce qu’il adviendrait de lui ?

Les forces impériales — non, tous les sujets impériaux !

Si ça faisait partie de votre plan, je ne vous pardonnerais jamais.

« Préparez-vous… J’aurai ma vengeance… » Elle avait fait de sa main un poing.

C’est alors qu’elle avait entendu des bruits de pas… et qu’elle avait réalisé qu’elle avait senti quelqu’un courir sur la chaussée.

Mais qui ?

Elle leva les yeux pour trouver un garçon aux cheveux noirs debout, haletant.

Un épéiste avec une paire d’épées — une noire et une blanche.

« Alice ? »

« … Est-ce que… ka… ? »

Maintenant, de tous les temps. La nuit où les relations entre l’Empire et la Souveraineté avaient touché le fond…

+

Iska, le Successeur de l’Acier Noir, et Alice, la Sorcière de la Calamité Glaciale, s’étaient croisés.

+

La jeune fille avait été sensibilisée au fait que chaque soldat impérial était un ennemi sans exception.

Sa sœur et sa mère avaient été blessées par un sujet impérial. Elle ne pouvait pas en laisser un seul s’échapper. Peu importe qui ils sont.

« … »

« … Alice ? » Le garçon avait retenu son souffle en la regardant.

Il avait dû remarquer quelque chose tout de suite — la colère sur son visage et l’énergie astrale qui s’échappait de la crête sur son dos. Tout était si différent de la normale.

Oui. Oui, je suppose que c’est ça.

Vous seriez capable de le dire, d’une manière ou d’une autre. Alice observa l’épéiste impérial lorsqu’elle réalisa que ses yeux étaient en train de pleurer.

« … Pourquoi dois-je te voir maintenant, plus que jamais ? » Ses lèvres, fendues par des marques de dents, tremblaient. Sa voix était faible comme un gémissement. « Nous… ne pouvons plus… nous appeler rivaux. Nous ne pouvons plus avoir une simple relation… »

« Alice ? Qu’est-ce que tu dis ? Tu dois m’écouter, il y a quelque chose de plus important. C’est à propos de Sisbell, elle est… »

« Je sais que je t’ai dit de rester à la villa, » l’interrompit-elle, refusant de prendre autre chose pour une réponse.

Dès qu’elle avait entendu parler du raid, elle était sûre de le lui avoir dit en le croisant dans le hall de la villa avant de se précipiter au palais royal.

+

« Je veux croire que ça n’a rien à voir avec toi. Alors si tu veux prouver que c’est vrai, reste dans le manoir. »

« Alice ? Qu’est-ce que tu racontes — ? »

« Ne sors sous aucun prétexte. Si tu montres le moindre signe de collusion avec l’armée impériale, je ne te le pardonnerai pas ! »

+

Elle savait qu’elle l’avait prévenu.

C’est lui qui n’avait pas tenu sa promesse.

« Écoute-moi, Alice ! Sisbell a été kidnappée ! Vichyssoise de la Maison d’Hydra s’est échappée de prison et elle a détruit la villa ! »

« … Sisbell a été kidnappée ? »

« Je les suivais. Et puis j’ai entendu une explosion, alors je suis arrivé sur la route. »

Est-ce la vérité ? Elle fronça le visage pour retenir ces mots qu’elle avait presque prononcés.

On ne peut pas faire ça. Je ne peux plus t’écouter.

Même si je veux te croire. Je ne peux pas à cause de ma position.

L’armée impériale était ennemie. Et elle était la princesse qui devait succéder à la reine.

« Dis-tu que ma sœur a été enlevée ? Et tu prétends que c’est Vichyssoise qui est derrière tout ça, et non l’armée impériale ? Et si c’était toi qui avais aidé à ce que cela arrive ? »

« Alice ! Qu’est-ce qui te prend ? »

« … »

Cela faisait mal qu’Iska la regarde de cette façon.

Elle savait qu’elle ne voulait pas dire cela, même si elle avait été forcée de le cracher. Mais elle devait détruire l’Empire pour protéger la Souveraineté.

Elle ne pouvait pas gracier un sujet impérial, quelle que soit son identité.

« Je ne te crois pas ! Je ne peux pas croire ce que tu dis, citoyen impérial ! »

« … Quoi ? »

« C’est ridicule de ta part de me dire de te faire confiance ! I… J’ai vu ma sœur se faire tuer devant mes yeux. Par un Saint Disciple — tout comme toi ! »

Sa voix avait résonné entre eux, tendue et affligée.

 

Elle ne pouvait pas empêcher les larmes de couler sur ses joues.

 

« Et ce n’était pas seulement ma sœur. La reine, aussi. Il n’y a plus de retour en arrière possible. Je ne peux pas pardonner à quiconque de faire du mal à ma famille ou à mes subordonnés ! »

Elle ne pouvait même pas essuyer ses larmes… parce qu’elle ne comprenait pas pourquoi elle pleurait.

Pourquoi… ?

Pourquoi est-ce que je pleure ? Pourquoi suis-je triste ?

Était-ce parce que sa famille avait été blessée ? Ou parce que… ?

« Je suis Aliceliese, princesse intermédiaire de la souveraineté de Nebulis. Je dois faire tomber l’Empire. Même si cela signifie te faire tomber avec lui. »

« … Alice. » Iska était resté confus. Il l’avait regardée en face.

Mais cela n’avait servi à rien.

Elle ne pouvait plus l’arrêter.

« Pourquoi ? Pourquoi est-ce que ça arrive !? Je… n’ai jamais voulu me battre avec toi quand on est comme ça ! »

C’est tout.

C’est pour ça que je pleure — la plus grande raison pour laquelle je dois crier.

Je voulais te voir sur un champ de bataille, un champ spécial, juste pour nous deux. Je voulais oublier les querelles entre l’Empire et la Souveraineté. Je voulais m’échapper de la bataille de sang entre les royautés.

+

— Je chérissais notre croisade.

+

Mais le rêve était terminé.

Et de la pire façon possible. Cela s’était transformé en un futur alimenté par l’antagonisme.

« Je… » Au lieu d’essuyer ses larmes, Alice avait écarté les bras. Le pouvoir astral sur ses paumes scintilla, créant des glaçons à partir du vide. « Ancien Saint Disciple Iska, ceci est une déclaration de guerre contre toi. Prépare-toi au combat. »

« Alice ! Ce n’est pas le moment pour ce… »

« Il n’y a plus de retour en arrière possible ! » Sa voix était rauque.

Alice pointa du doigt l’épéiste impérial en face d’elle.

« Je n’ai jamais voulu me battre contre toi dans cet état d’instabilité ! Je n’ai jamais voulu que les choses se terminent ainsi… ! »

+

En ce moment, le rideau s’était ouvert sur la deuxième bataille entre Iska, le successeur de l’acier noir et Alice, la sorcière de la calamité glaciale.

+++

Une énergie astrale bleu vif.

Il s’était divisé en milliers, puis en dizaines de milliers de particules, s’élevant dans les airs avant de disparaître. Peu de gens avaient été témoins de cette scène fantastique. Les civils désarmés avaient fui vers les abris souterrains. La seule exception était…

« Cette intense étincelle de pouvoir astral. Je me demandais qui c’était. Donc c’est la princesse du milieu. La fille de Mira. »

Il était sur une légère colline dans la zone rurale.

Comme s’il recevait la bénédiction divine des cieux, le bel homme aux cheveux blancs était baigné par la lumière de la lune.

Salinger le sorcier transcendantal. Le criminel qui s’était infiltré dans le palais pour attaquer l’ancienne reine trente ans auparavant. À plus de cinquante ans, il avait le physique et le visage d’un homme d’une vingtaine d’années. Loin d’atteindre son déclin, sa forme musculaire s’était au contraire durcie davantage.

« … »

Il regardait quelque chose à plusieurs kilomètres en dessous de la colline. N’importe qui d’autre aurait eu besoin de jumelles spécialisées pour voir la scène, mais il avait à sa disposition des pouvoirs astraux qui faisaient l’affaire.

 

« Et qui est-ce, sinon le bretteur impérial lui-même… ? »

 

Il fit claquer sa langue. Salinger avait subi une défaite contre cet adversaire dans le passé.

+

« La bataille est terminée, sorcier. »

« Tu es une bête qui se cache sous la peau d’un épéiste ! »

+

« Je n’y comprends rien. Pourquoi est-il encore dans la Souveraineté ? Et surtout… »

Ce garçon avait protégé la préposée d’Aliceliese. Cela signifie-t-il que l’épéiste impérial était l’un des sbires d’Aliceliese ? C’est ce que Salinger avait suspecté, mais maintenant…

« Je vois. Quel malheureux coup du sort ! » Le sorcier aux cheveux blancs poussa un soupir.

Une bataille se développait en dessous. Le pouvoir astral d’Alice transformait la chaussée et les champs autour d’eux en bleu vif, les gelant.

Elle était sans pitié. Il était clair qu’elle ne serait pas tendre avec le soldat d’après ses attaques, mais son visage était la chose la plus effroyable qui soit.

Elle serrait les dents. Ses yeux s’ouvrirent brusquement et elle continua à attaquer l’épéiste impérial avec ses pouvoirs astraux.

« Princesse Aliceliese. Vous êtes vraiment la fille de Mira. Vous devez croire que tout ceci n’était qu’un plan planifié par l’Empire. »

Le sorcier transcendantal savait que le raid impérial était en fait un effort conjoint orchestré par la Maison d’Hydra.

Il y a 30 ans.

Depuis longtemps, il était au courant de tout cela… bien avant que les deux personnes en dessous de lui ne soient nées.

« Quelle ironie ! Rien ne change sur cette planète. Mira, ne te l’ai-je pas dit ? Tu n’es pas faite pour être reine. »

 

Elles étaient trop innocentes — la Reine Mirabella Lou Nebulis IIX… et sa fille Aliceliese. Elles n’étaient pas faites pour être les descendantes de la Fondatrice. Elles ne pouvaient pas supporter une bataille de même sang. Il avait prévu qu’elles finiraient par devenir des héroïnes tragiques — juste comme ça.

 

« … Imbéciles. »

Dans un rare moment, l’Adonis aux cheveux blancs exprima sa colère envers les autres.

« Vous allez donc répéter la même erreur que par le passé. »

***

Intermission : Notre dernière bataille ou la Nuit des Larmes Versées

Il y a trente ans et quelques mois, Salinger avait été son seul et unique challenger.

Devant lui, les bras écartés, se tenait une descendante de la Fondatrice, une belle fille — celle qu’il appelait Mira, sa plus grande rivale.

+++

« Salinger, tu es fait de muscles. Je suppose que c’est la raison pour laquelle tu manques de cervelle. »

« … »

« Une personne normale n’en sortirait pas avec cette même apparence. Pas après une explosion de mon pouvoir astral. »

Dans une prairie géante d’une réserve naturelle, Salinger, allongé sur le dos, saignant librement sur l’herbe, était approché par une fille aux cheveux dorés. Elle tenait des couteaux acérés dans chacune de ses mains. Ses cheveux longs comme des épaules flottaient au vent. Son pas était aussi précis qu’un moteur. Alors qu’elle marchait, ses yeux ne montraient aucune émotion, comme une machine.

« Tu es un criminel qui a volé plus d’une centaine de pouvoirs astraux dans notre souveraineté. En fait, tu as aussi essayé de voler le mien. Il serait plus approprié de t’exécuter sur le champ. »

« … »

« Mais j’ai eu ma montée d’adrénaline, alors je suppose que je vais te laisser vivre. Aussi longtemps que tu seras mon partenaire d’entraînement, » dit-elle en léchant une éraflure sur son épaule à la place d’y mettre du désinfectant.

Elle était pratiquement sauvage. Même ses vêtements n’étaient pas la tenue habituelle du corps astral mais un haut qui ne couvrait que sa poitrine. Le plus petit rectangle de tissu nécessaire pour faire une jupe était enroulé autour de ses hanches.

Elle commença à enlever ces choses qui servaient à peine de vêtements devant Salinger.

« Je vais me laver de toute cette sueur dans l’eau là-bas. Si je retourne au palais couvert de sang et de saleté, je vais inquiéter les vassaux. Et toi ? On dirait que tu n’aimes pas être sale. »

« … Qui voudrait… se baigner… avec toi… ? »

Avant même qu’il n’ait terminé, les couteaux avaient presque effleuré son visage où il était allongé, toujours immobile. Techniquement, ils avaient pris une couche de sa peau avec eux.

« Alors tu gardes mes couteaux pour moi. Ils sont personnalisés, tu sais. »

Elle n’avait pas un seul vêtement. Même avec un homme juste en face d’elle.

Vers quatorze ou quinze ans, elle ne semblait pas du tout gênée de montrer sa belle peau. Elle n’était pas non plus élégante le moins du monde.

Faisait-elle vraiment partie de la famille royale ? Était-elle la candidate pour être la prochaine reine ?

N’importe qui en aurait douté. Mais s’ils l’avaient vue au combat, ces doutes auraient été dissipés en quelques secondes.

Après tout, elle était la plus forte candidate à la couronne de l’histoire — Mirabella Lou Nebulis IIX.

« Salinger, comment as-tu pu me laisser te battre ? »

« Salinger, tu es si brutal avec ton pouvoir astral. »

« Salinger, est-ce vraiment la meilleure attaque furtive que tu as pu trouver ? »

Mirabella ne l’avait pas accueilli avec pitié, mais avec dédain.

Lorsqu’il s’effondrait, en sang, après avoir combattu la princesse connue sous le nom d’automate de guerre, elle fixait un regard froid sur son partenaire d’entraînement.

+

Puis un jour, elle avait complètement changé.

+

La souveraineté de Nebulis. État central.

Salinger pouvait voler des pouvoirs astraux. Célèbre pour ses capacités, il se promenait en ville incognito et achetait sa nourriture dans un magasin d’alimentation en vrac. Il était sur le chemin du retour vers sa base d’opérations.

Il réfléchissait à la façon dont il allait défier son adversaire.

« Oh… »

À midi, à l’intersection… une fille s’était arrêtée dans sa course.

« Salinger ? »

« … Tu es — ! »

Alors que Salinger rôdait dans la ville, la princesse Mirabella vit clair dans son déguisement, car elle se promenait dans son propre camouflage.

« Je n’aurais jamais pensé que nous nous rencontrerions dans un endroit comme celui-ci… »

Il n’avait pas encore guéri. Mais quelle importance ? La bataille commencerait dès qu’ils se croiseraient. C’était l’accord tacite entre eux.

Du moins… c’était censé être la compréhension.

« Ah… ah-ha-ah-ha-ha-ha-ha-ha-ha-ha-ha ! »

Il n’aurait pas pu imaginer que son ennemi juré se mettrait à rire aux éclats, se serrant le ventre et tombant à la renverse.

« Ah-ha-ha-ha-ha-ha ! Qu’est-ce que tu fais, Salinger ? As-tu l’intention de me faire mourir de rire !? Ah-ha-ha-ha-ha-ha ! »

« … Qu’est-ce que tu m’as dit ? »

« Je — je veux dire, toi — le Salinger — tu te promènes en portant un sac de courses de l’épicerie ! Quand je pense que tu te mêles aux gens normaux, que tu regardes les légumes et les viandes et que tu fais la queue à la caisse ! »

« … »

Maintenant qu’elle l’avait dit… Salinger s’était souvenu qu’il tenait, en fait, des sacs d’épicerie dans ses deux mains.

« Il suffit d’imaginer ce même homme hautain qui a le culot de me dire, Mira, c’est aujourd’hui que je vais te faire t’agenouiller devant moi, en faisant la queue avec les ménagères à la caisse de l’épicerie… Ah-ha-ah-ha-ha-ha-ha-ha-ha-ha-ha ! Je ne peux pas le supporter ! Tu as gagné ! »

Elle ne pouvait pas se contenir, jetant son corps à terre pour se rouler sur le sol. Elle ne s’était pas souciée du fait qu’elle se trouvait au milieu d’une intersection en plein jour ou que les gens qui passaient par là la regardaient tous.

« Quel plan effrayant ! Je ne peux pas le croire — tu m’as rendue invalide ! »

« … Mira. »

« Et tu as même un autocollant de rabais sur ton paquet de viande ! Je suppose que tu as dû faire un match héroïque contre ces ménagères pour l’obtenir ! »

« Ferme-la ! »

Des larmes s’étaient formées dans ses yeux après qu’elle ait remarqué l’autocollant du rabais à travers le sac d’épicerie translucide.

D’ailleurs, l’autocollant était une coïncidence. Salinger n’y avait pas vraiment pensé quand il avait pris l’objet. Il avait juste eu la malchance d’être un objet d’occasion.

« … Tsk. » Il avait commencé à s’éloigner. Il avait perdu l’envie de se battre avec la fille qui se roulait par terre en riant.

De plus, attirer autant de regards était sûr de faire venir la police militaire.

« Oh, s’il te plaît, attends. » Celle qui suivait n’était autre que la fille elle-même. « Je suppose que ce genre de choses fortuites arrive. Alors, avons-nous une trêve aujourd’hui ? »

« Ferme-la. Considère que ta vie est épargnée, » cracha-t-il.

« Ok. J’étais si près de mourir de rire. »

« … »

« Hé, attends ! Pourrais-tu garder secret pour la famille royale que je traîne en ville ? »

« … Quoi ? »

Il n’avait jamais eu l’intention d’en parler à qui que ce soit en premier lieu. S’il s’était approché du palais royal, le corps astral aurait pointé ses armes sur lui.

« J’ai eu des ennuis avec une secrétaire pour m’être endormie pendant une réunion. J’étais tellement énervée que j’ai quitté le palais en trombe. C’est un peu mon mode opératoire, je suppose. »

« … Tu as vraiment fait ça ? » Il regarda durement la jeune fille qui faisait plus d’une demi-tête de moins que lui.

« Une conférence est un lieu conçu pour faire la sieste. Mon devoir est de me battre, j’ai donc besoin de faire la sieste pendant les réunions pour récupérer mes forces après être allée sur le champ de bataille. »

C’était inattendu.

Il la voyait comme un automate de guerre maculé de sang et pensait à elle comme à l’effroyable berserker sur le front. Il avait supposé qu’elle accomplirait parfaitement son devoir de princesse. Précise comme une machine. Indifférente comme une machine, aussi.

Mais elle s’endormait pendant les réunions ? Et elle avait boudé et s’était enfuie après avoir été grondée par ses serviteurs ?

« C’est comme si tu étais humaine. »

« Je ne comprends pas ce que tu dis, mais je compte sur toi pour garder ce secret. »

Puis elle était partie. Ses pas étaient silencieux, comme d’habitude. Personne n’aurait été aussi prompt qu’elle à lui tourner le dos.

« … Un automate de guerre peut rire ? »

C’était la première fois qu’il la voyait faire ça.

La fille ne laissait pas un sourcil bouger quand elle était arrosée du sang de Salinger. À l’instant, cependant, elle avait tellement ri que son visage s’était froissé. Et surtout… elle avait l’air mignonne en le faisant.

Il avait pensé que son visage était plutôt proportionné, mais comme une jolie poupée. Il n’avait pas ressenti de charme humain chez elle auparavant.

« Tsk. » Il gloussa encore une fois et se dépêcha.

Il avait été captivé par elle. Salinger avait frappé un mur devant ses yeux, comme si cela allait changer sa réalité.

« Seulement pour aujourd’hui. Ne pense pas que je t’oublierai la prochaine fois. »

+++

C’était censé être un duel de vie ou de mort.

Salinger défiait Mira pour lui voler son pouvoir astral, et elle le repoussait. Même après leur rencontre dans la rue, cela n’avait pas changé.

Alors depuis quand les choses sont-elles devenues différentes ?

Quand avait-il commencé à chérir ces moments où ils se disputaient ? Quand avait-il commencé à souhaiter sincèrement que cette relation continue pour toujours ?

Tout avait changé il y a trente ans, lors de la tentative de meurtre de Nebulis VII.

Salinger s’était retrouvé impliqué dans une intrigue singulière. Alors qu’il poursuivait le coupable impliqué dans le complot, il avait entendu parler du projet de coup d’État contre la reine.

Mais il y avait deux cibles.

« Vous me dites donc qu’ils en ont après la reine et… la candidate qui a le plus de chance de remporter le conclave, Mirabella… ? »

Quelqu’un en voulait à la vie de la princesse Mira.

Et ce quelqu’un était un autre descendant de la Fondatrice.

« … Une bataille entre les sangs. Pathétique, vous tous. Qui vous a donné la permission de poser la main sur mon adversaire ? »

Guidé par une émotion inconnue, Salinger s’était dirigé directement vers le Palais de la Reine.

Mira était plus forte que tous ceux qu’il connaissait. Tous les descendants de la Fondatrice, cependant, étaient puissants au-delà de toute comparaison, et tout complot impliquant un coup d’État serait à grande échelle. S’ils lançaient une attaque surprise, même Mira serait en danger.

— Quelqu’un…

— Quelqu’un doit se battre à ses côtés.

« Ne te fais pas de fausses idées, Mira. Ce n’est pas parce que je suis désolé pour toi. Je le fais pour moi-même. »

C’est ce qu’il s’était dit.

Et quand il s’était faufilé dans le palais de la reine, Salinger avait été témoin de quelque chose…

+

La reine Nebulis VII était effondrée sur le sol.

+

« … Non. »

Il était arrivé trop tard. Quelqu’un avait eu vent des détails du coup d’État… et le cerveau s’était empressé de mettre son plan à exécution.

Salinger était arrivé un peu trop tard. Et c’est alors qu’il avait vu le monstre qui avait attaqué la reine.

« C’est quoi cette bête !? »

C’était quelqu’un d’une des lignées royales — l’Hydra. Il avait vu l’un d’entre eux se transformer en monstre sous ses yeux.

Sujet de test F.

Une sorcière mutante avait commencé à l’attaquer et ce qui émanait d’elle était une force qu’il ne pouvait pas décrire. Leur combat avait duré quelques minutes, mais chaque seconde lui avait semblé être une heure alors qu’il faisait face au combat le plus dur de sa vie.

« Salinger !? »

Lorsque la sorcière mutante s’était échappée de ses griffes, il ne restait plus dans la pièce que la reine et Salinger… et Mira, qui avait accouru sur les lieux.

« Sa Majesté… »

La reine, effondrée, et Salinger.

D’après ce qu’elle voyait, Mira ne pouvait que supposer qu’il s’était faufilé dans le palais pour voler le pouvoir astral de la reine.

« Salingeeer ! »

Pour la première fois de sa vie, elle lui cria dessus. La princesse, automate guerrier, éprouvait la sensation nouvelle d’une rage pure et débridée.

« … As-tu attaqué la reine ? »

« … »

« Réponds-moi ! »

Si Salinger lui avait dit la vérité, l’histoire aurait changé de cours.

Mais il n’avait pas pu le faire. Il était trop fier pour le lui dire et s’immoler en implorant son pardon.

S’il te plaît, crois-moi. Il ne pouvait pas s’imaginer se permettre d’être honteux au point de lui offrir une explication.

Mirabella ne pouvait pas le croire quand il continuait à se taire — à cause de sa position et de sa dignité de princesse.

+

Ce qui divisait les deux était le statut et la morale.

+

C’est là qu’ils s’étaient fait leurs adieux.

Elle s’était effondrée en sanglots. En pleurant, elle avait sorti une lame et s’était jetée sur lui.

« Salinger ! Pourquoi as-tu fait une telle chose ? Qu’est-ce qui t’a poussé à faire ça ? »

« … Mira. »

« Je te considérais comme mon ennemi juré — mon seul. J’aimais être avec toi, même en tant qu’adversaires. Je voulais passer plus de temps avec toi. Pourquoi voudrais-tu souiller notre temps ensemble !? »

Ils n’étaient plus rivaux. Salinger était un criminel pour avoir blessé la reine, et Mirabella était le juge et le bourreau. Leur relation s’était transformée en une relation entre le bien et le mal.

« … Je n’ai jamais voulu me battre contre toi dans cet état de chaos émotionnel ! »

A la fin de leur combat, Salinger fut capturé et envoyé à la flèche de la prison d’Orelgan dans le treizième état. Il fut accusé d’être le sorcier diabolique qui avait envahi le palais royal pour voler le pouvoir astral de la reine.

Il n’avait pas l’intention de lui dire la vérité. Il n’avait jamais eu l’intention de s’impliquer dans les querelles de la famille royale en premier lieu. Salinger se fichait de savoir si l’administration actuelle allait tomber et finir dans les mains de l’Hydra.

Il ne se souciait que d’elle. Et il avait perdu sa confiance. C’était tout ce qu’il y avait à dire.

+

L’acteur principal du passé — Salinger — regardait silencieusement la scène se dérouler sous lui… tandis qu’Iska, le Successeur de l’Acier Noir et Alice, la Sorcière de la Calamité Glaciale, approchaient du même sort.

***

Chapitre 6 : Notre bataille tordue ou la nuit des vœux promis

Partie 1

Quand et pourquoi nos roues du destin ont-elles déraillé ?

Même en tant qu’ennemis, j’ai toujours pensé que nous avions une compréhension mutuelle qui transcendait nos places dans la société.

En fait, je pense toujours que c’est vrai.

C’est pourquoi j’ai couru après Vichyssoise pour récupérer Sisbell de son ravisseur.

+

« Nous allons la sauver. Nous allons aller à son secours tout de suite, alors, sortez d’ici et cachez-vous dans un endroit sûr. »

« Bon… »

« Nous vous écouterons, mais seulement pour ce soir, si cela signifie récupérer Lady Sisbell… »

+

Les servantes avaient fui le manoir.

La capitaine Mismis, Jhin et Néné allaient surveiller le domaine en ruine pendant qu’Iska poursuivait la sorcière de son côté.

« Alice, écoute-moi ! » Iska avait crié, l’air autour d’eux était assez froid pour le refroidir jusqu’aux os.

Le pouvoir astral avait recouvert la campagne et les routes de glace, lissant la terre comme une patinoire.

« Je suis ici parce que je veux sauver Sisbell. Je ne mens pas. »

 

« Je ne veux pas écouter ce que tu as à dire ! » hurla la jeune fille aux cheveux dorés, en essayant de contenir un sanglot. « Je… J’ai vu ma sœur se faire tuer sous mes yeux. Et Sa Majesté ! »

 

« … Qu’est-ce que tu as dit ? »

« C’est la guerre. Bien sûr, quelqu’un sera blessé. Mais en tant que princesse, je dois me venger de la souffrance de la famille royale ! »

Elle ne pouvait pas avoir d’opinion sur le sujet. La princesse Aliceliese ne pouvait pas avoir une discussion avec un sujet impérial.

« L’armée impériale a franchi une frontière qu’elle n’aurait pas dû franchir… Maintenant, nous ne pouvons vraiment pas éviter la guerre. Pas avant que l’un de nous ne soit réduit en cendres ! »

« … »

Tout avait changé en quelques minutes. Iska s’en était instinctivement rendu compte quand Alice avait élevé la voix. La relation entre l’Empire et la Souveraineté avait dépassé les limites du possible. Elle était retournée à ses racines.

Les choses étaient revenues à un siècle en arrière… quand la Fondatrice Nebulis avait commencé sa rébellion. Même leur relation personnelle avait régressé jusqu’au moment de leur première rencontre.

« Veux-tu qu’on se batte jusqu’à ce qu’un de nos pays soit anéanti ? Est-ce vraiment ce que tu veux, Alice ? »

« En tant que collectif, oui. Ce n’est pas moi qui décide ici. » La jeune fille avait construit un mur de glace entre eux, essuyant ses larmes. « Mon but ultime a toujours été de renverser l’Empire. Mais je n’ai jamais voulu aller aussi loin. Je n’ai jamais voulu penser à éradiquer l’Empire ou à le réduire en cendres… Cela signifierait que je m’abaisserais au même niveau que les Zoa. »

Même s’ils parvenaient à détruire l’Empire pendant la guerre, cela se ferait au prix de pertes au sein de la souveraineté de Nebulis — de la royauté au corps astral combattant dans les tranchées.

 

Il était cependant trop tard pour arrêter les roues du destin.

 

« En te rencontrant, j’ai appris qu’il existe des sympathisants dans l’Empire. Je voulais que les choses se terminent le plus pacifiquement possible lorsque nous aurions renversé l’Empire, mais l’armée impériale a ruiné nos chances d’avoir cet avenir pour nous tous ! »

L’énergie astrale qui irradiait d’Alice s’épanouissait presque sur son corps comme une fleur dans la nuit noire.

Ils se dirigeaient vers le début de leur combat final.

« Viens vers moi, Iska, comme si tu voulais m’arrêter ! Je ne vais pas non plus me retenir ! »

+

C’était la deuxième vraie bataille entre Iska, le successeur de l’acier noir et Alice, la sorcière de la calamité glaciale.

+

Craquement. Sous les pieds d’Iska, la patinoire avait commencé à craquer.

On aurait dit que quelque chose sortait des fissures. Iska s’était repositionné. Devant ses yeux s’élevait un miroir de glace poli qui ressemblait à une énorme gemme.

Huit miroirs l’entouraient, dépassant sa taille.

« Miroirs de glace !? »

« Je vais le répéter : je ne me retiendrai pas ! »

Il n’avait jamais vu quelque chose comme ça avant.

La glace est un pouvoir astral assez basique, même si les pouvoirs d’Alice sont d’un autre niveau.

Ils peuvent délivrer des attaques physiques ou gêner les adversaires. Mais ceci… semble différent.

À quoi servaient les miroirs ?

Il ne pouvait pas imaginer qu’ils aient des pouvoirs spéciaux. Au fond, les miroirs étaient simplement faits de glace. Si c’était le cas, il supposait qu’il serait capable de les briser en utilisant ses épées astrales.

« Calamité glaciale — Miroir de lumière infinitésimale. »

Les lumières avaient vacillé pendant un instant. Iska était sûr qu’il ne s’agissait pas de lumière électrique dès qu’il avait vu les miroirs se refléter au bord de sa vision. La lumière, faible et presque fantastique, avait commencé à converger.

La lumière astrale s’épaississait-elle ?

Il se souvint d’une conversation entre Néné et Sisbell.

+

« Quelle est cette énergie… ? Ce n’est pas de l’électricité — ou du gaz. Quelle est la source de cette… ? »

« C’est la lumière de l’énergie astrale ! »

+

L’Objet. Une machine qui chassait des sorcières.

Il s’était souvenu du signal qui les avait informés du moment où elle utiliserait sa forme de vie intégrée.

« J’ai compris maintenant ! »

L’éclair projeté par les huit miroirs — qui n’étaient pas de la glace mais la source du pouvoir astral — était de l’énergie astrale. Un rayon de lumière se reflétait sur un miroir, se transformant en deux, et ainsi de suite, amplifiant la puissance à chaque fois. Une fois qu’ils avaient amassé plus d’une centaine de lumières, ils étaient tirés à travers la cible devant eux — Iska.

Ou plutôt, cela aurait dû être le cas.

Alice l’avait félicité. « Tes instincts sont ridiculement aiguisés, comme toujours. »

C’était sa façon d’exprimer sa prudence envers son incroyable ennemi.

« C’est un nouveau truc pour moi, » a-t-elle admis. « Je suis encore en train de l’expérimenter. Je ne l’ai même pas encore montré à Rin. »

« … Alors j’ai de la chance. » Iska s’était sauvé d’un bond, des éclaboussures de sang maculant ses joues.

En moins d’une seconde, il avait échappé d’une marge infinitésimale aux huit surfaces réfléchissantes, sautant hors de leur portée.

« Si j’avais essayé de briser les miroirs, je ne serais pas arrivé à temps. »

 

« C’est vrai. Je pensais que tu allais essayer de les briser tout de suite, ce qui est un piège. »

 

« … C’est presque comme si tu l’avais inventé spécialement pour moi. »

« Je l’ai fait. Il n’y a aucune raison d’utiliser ça sur quelqu’un d’autre. » Alice le regardait droit dans les yeux, les yeux rouges et gonflés. « Je l’ai préparé depuis notre premier combat dans la forêt de Nelka. Mais j’ai arrêté de le développer avant qu’il ne soit terminé. Je pensais que c’était trop injuste de l’utiliser contre toi… »

Elle avait mis au point une stratégie spécialement pour contrer Iska. N’importe quel autre soldat impérial se serait enfui dès qu’il aurait été entouré de ces miroirs de glace.

Mais pas Iska.

Alice savait qu’il essaierait d’aller de l’avant et d’utiliser ses compétences pour briser les miroirs. Elle avait prévu de l’utiliser contre lui en lui envoyant de la lumière au moment où il s’approcherait des miroirs.

Aucun épéiste n’aurait été capable de réagir à un tir de lumière.

Elle a raison.

Si elle l’avait perfectionné, j’aurais eu des problèmes.

Le scintillement de la lumière lui avait donné un signe de ce qui allait arriver.

C’est ainsi qu’Iska avait compris le mécanisme de sa ruse. Si elle avait été jusqu’au bout, il n’y aurait pas eu une seule étincelle pour le prévenir.

« C’est un piège, en fait. Ce n’est pas juste — et ça ne fait même pas partie de mes pouvoirs originaux. J’espérais pouvoir compter uniquement sur mes propres capacités lorsque nous aurions réglé les choses. Mais maintenant, nous sommes dans une situation où je ne peux plus le dire. »

« … Donc tu feras tout ce qu’il faut. »

« Nous n’avons pas le temps ! Le raid impérial est toujours en cours au moment où nous parlons. Je dois protéger la souveraineté ! »

 

Envers un ennemi impardonnable, elle ne pouvait pas avoir la pitié de se demander si quelque chose était juste ou non. Alice n’hésiterait pas à utiliser toutes les tactiques nécessaires, aussi barbares soient-elles.

 

Pour protéger la famille royale et son peuple… Aliceliese s’abaisserait à n’importe quel niveau et infligerait tout ce qu’elle jugerait nécessaire pour assurer sa victoire. Même si ce n’était pas ce qu’elle voulait elle-même.

« Attaque-moi avec tout ce que tu as, Iska. Comme tu l’as fait lors de notre combat dans la forêt de Nelka. Je te combattrai comme si tu étais un soldat impérial dont je ne connais même pas le nom. »

« Toi — ! » Iska avait saisi ses épées.

Il ne pouvait pas nier qu’elle émettait une rage meurtrière qui semblait lui geler la peau. La personne en face de lui n’était pas Alice, mais Aliceliese, la Sorcière de la Calamité Glaciale, la plus grande menace contre l’armée impériale.

Elle ne plaisante pas. Et elle veut régler les choses alors que je suis censé sauver Sisbell.

Alice veut régler les choses ici et maintenant, entre tous les endroits possibles !?

Un terrible coup du sort. La princesse du milieu s’était mise en travers de son chemin, l’empêchant de sauver la plus jeune princesse.

« Écarte-toi, Alice. Je dois faire quelque chose avant ça ! »

« Je te dis qu’il faudrait me tuer pour passer ! Tue-moi si tu le peux ! »

Un golem de glace s’était formé à côté d’Alice.

Est-ce qu’elle créait plus de pions pour elle-même ?

Iska avait essayé de comprendre ce qu’elle prévoyait exactement. Le golem avait ramassé le conducteur mou sur le sol.

La botte royale d’Alice se balançait majestueusement tandis qu’elle étendait ses bras.

Elle a fabriqué un golem pour protéger son subordonné.

Est-ce qu’elle prévoit de geler tout ce qui l’entoure au hasard ?

Il l’avait réduit à une technique possible, une attaque astrale, symbolique de la fille qui se faisait appeler la Sorcière de la Calamité Glaciale.

La grande calamité glaciaire.

L’air de la nuit semblait sifflé, puis hurlé. La campagne — les arbres bordant la route, les réverbères, tout — était ensevelie dans une brume blanche surréaliste.

C’était mauvais.

Sous le voile de la nuit, la brume rendait la visibilité dangereusement faible. C’est ce que voulait Alice. Iska avait peut-être réussi à lui échapper une fois, mais maintenant la nuit était de son côté.

« Gah !? » Iska s’élança imprudemment, ne sachant pas encore si son environnement avait gelé ou non.

Crick. Quelque chose avait gelé. Un front froid d’une taille sans précédent l’avait balayé.

« … » Iska avait atterri au sommet d’un mur de glace à cinq mètres du sol.

Quand il avait revu la scène, un nouveau frisson lui avait parcouru l’échine. C’était comme s’ils étaient piégés dans l’âge de glace. La campagne, les lampadaires, la voiture renversée dans la rue — tout était gelé. S’il s’agissait d’un champ de bataille, les chars et les bases militaires seraient devenus de la glace solide.

« Je savais que tu allais l’esquiver. » Sa voix venait de derrière lui.

Au-delà du vent qui balayait les flocons de neige se tenait une jeune fille aux cheveux d’or illuminée par la lumière astrale.

« Honnêtement, je n’avais pas été si secouée que ça lorsque tu l’as évité dans la forêt de Nelka. Dans mon esprit, j’ai supposé que ce n’était qu’une coïncidence. »

La fille se tenait sur une colline de glace. Un souffle blanc s’échappait d’entre ses lèvres brillantes.

« Finalement, Rin avait raison. Elle disait toujours que l’épéiste impérial deviendrait inévitablement une menace pour moi un jour. Elle m’a dit que je ne devrais pas te laisser entrer. »

 

« Je pourrais dire la même chose de toi. Quand il s’agit d’être une menace, du moins. »

 

« … Alors… » Des cristaux de glace s’accumulaient sur ses épaules. Se tenant de toute sa hauteur, la sorcière de la calamité glaciale continua : « Ne vas-tu pas me maudire ? »

« Hmm ? »

« Tu peux m’appeler une sorcière. Je suis une ennemie de l’armée impériale, après tout. Et je t’ai aussi déclaré la guerre. J’accepterais donc que tu me traites de sorcière. »

« … »

« C’est bon. Ça ne me dérange pas si tu m’appelles comme… »

« Alice, » Iska lui avait coupé la parole.

+

« Ta voix tremble. Je ne veux pas t’entendre te rabaisser. »

+

Elle avait ouvert les yeux en grand. Ses épaules avaient légèrement tremblé, et ses lèvres avaient frémi.

« — »

« Cela ne profite à personne. Je — »

« Stop ! » Elle secoua la tête, décoiffant ses cheveux. Sa voix était rauque, presque comme si elle allait cracher du sang. « S’il te plaît… ne sois pas gentil avec moi. Je n’ai plus le droit d’être ta rivale ! »

***

Partie 2

La fille s’était mordue la lèvre, les larmes coulant dans ses yeux. Elles se transformèrent en perles de glace scintillantes, comme des cristaux en forme de larmes. Le vent les avait emportées, mais elles avaient continué à tomber, ne montrant aucun signe d’arrêt.

« J’ai besoin d’être une princesse de Nebulis ! J’ai besoin de détruire l’Empire ! Alors, arrête ! Oublie tout, et bats-toi contre moi ! » cria Alice.

C’était la plus triste déclaration de bataille qu’Iska ait entendue de la part d’une sorcière.

« Grande Calamité glaciale — Blizzard d’épines. »

Des dagues de glace s’étaient matérialisées à partir du vent dans l’espace au-dessus d’Iska.

Il l’avait vue utiliser cette attaque dans la forêt de Nelka, mais cette situation était différente. Il avait du mal à tracer les lames avec ses yeux au milieu de la nuit.

C’est inutile. Je savais que je ne pourrais pas me retenir.

Je me bats contre Alice, et elle est sérieuse à ce sujet !

Il s’était réprimandé. S’il ne se battait pas contre elle, il n’aurait plus de vie à vivre. Son adversaire était si forte.

« Viens, Iska ! » Alice lui avait fait signe.

Alors Iska s’était jeté sur les lames qui volaient dans l’air.

Ils lui arrivaient de toutes les directions — du haut, bien sûr, et derrière, devant, à gauche, à droite, comme une pluie de mai. Il n’avait pas la possibilité d’esquiver cette fois.

Tout ce qu’il pouvait faire était de tuer — avant d’être tué.

Alice avait choisi cette attaque astrale pour pousser Iska à prendre cette décision.

« Hah ! » Iska avait saisi son épée astrale noire et il repoussa les lames qui venaient vers lui.

Il plongea à travers les fissures qui se formaient à la surface de la glace, en tournant son corps dans les airs comme un chat. Du coin de l’œil, Iska avait vu des lames frôler les poignets de sa chemise alors qu’il esquivait de justesse.

« Ils viennent d’en bas ! »

Il donna des coups de pied et brisé les aiguilles de glace qui s’étaient formées sous ses pieds.

Puis il continua à avancer. Il n’avait même pas pris le temps de cligner des yeux alors qu’il fonçait vers le blizzard, comme s’il glissait sur la glace. Il s’était dirigé droit vers la lumière bleue de la fille.

« Maintenant, viens, Iska. Finissons-en ici. »

Aliceliese, la Sorcière de la Calamité Glaciale, avait tendu ses deux mains devant elle.

« Peu importe qui de nous deux gagne, ce sera fini maintenant. Nous allons terminer notre combat — endoloris par le regret que le destin nous ait fait régler les choses d’une manière que nous n’avons jamais voulue ! »

+++

Le vent était passé devant eux en sifflant, transportant de la glace et de la neige.

Le front froid créé par la princesse Aliceliese avait effacé leur environnement, les ramenant à l’âge de glace.

« … »

Le sorcier transcendant Salinger, indifférent au froid, observait la scène en contrebas depuis une colline basse qui surplombait la campagne. L’homme aux cheveux blancs n’avait pas bronché, même si l’herbe sous ses pieds avait gelé.

« Le destin des étoiles. C’est ce que vous attendiez du monde ? »

La princesse Aliceliese et l’épéiste impérial s’étaient affrontés.

L’armée impériale et le corps astral étaient toujours engagés dans un combat acharné au palais royal. Dans ce contexte de guerre, Salinger était le seul à observer le combat entre les deux individus.

« … Ou bien testez-vous l’humanité ? Mais il n’y a pas d’avenir au-delà de ce combat futile. »

Salinger ne connaissait pas les circonstances entre les deux, mais il pouvait deviner ce qui s’était passé. Il avait déjà vu cela auparavant. Alice avait pris la même expression que Mirabella lorsqu’elle l’avait surpris dans l’Espace de la Reine, il y a trente ans.

« La famille royale va donc répéter les erreurs du passé… »

+

— Pourquoi tous nos chemins mènent-ils à des résultats si horribles ?

+

Elle aurait pu se lamenter sur le sort des étoiles, déconcertée par la providence divine. Mais en tant que princesse, elle n’avait pas le luxe d’hésiter. Dans le passé comme dans le présent, les filles nées pour protéger la Souveraineté étaient devenues les jouets du destin.

« … Je ne peux pas supporter de voir ce qui se passe. » Salinger avait tourné le dos au combat en bas.

Le combat allait se terminer dans quelques minutes. Il pouvait le dire à la gravité de leurs expressions. Et peu lui importait de savoir qui tombait et qui survivait.

Celui qui survivrait à ce conflit ne serait pas le vainqueur. Il aurait perdu, lui aussi.

Après tout, il n’y avait rien à gagner de cette bataille. Ce qui les attendait de l’autre côté était le vide absolu. En d’autres termes, les deux combattants avaient perdu au moment où la bataille avait commencé — perdus pour le destin.

Tout comme l’ancienne princesse et le sorcier transcendantal il y a trente ans.

« … Je ne peux pas le supporter, » murmura Salinger pour lui-même, irrité, tournant le dos au duo qui se dirigeait vers la dernière étape de leur combat.

+++

C’était ça.

Des lames de glace avaient traversé la nuit, pleuvant sur le sol, au nombre de près d’un millier.

Iska, poursuivi par une pluie de mort, avait couru droit vers la fille aux cheveux d’or.

« Fleur de glace ! » Alice avait poussé ses mains devant elle.

La surface lisse sous ses pieds avait craqué. Un bouclier gelé avait fleuri comme une fleur en germination. C’était une caractéristique de son pouvoir astral — la fleur de glace — un bouclier invincible qui pouvait protéger les attaques lancées par la Fondatrice Nebulis.

 

Était-ce pour contrer ses épées astrales ? Iska avait essayé de voir si sa supposition était juste.

 

Quelque chose dépassait du centre de la fleur.

Une graine, belle et translucide comme un cristal de glace. Juste assez grande pour tenir dans sa main, elle avait commencé à briller là où elle était entourée de pétales.

La lumière venait du centre de la graine elle-même.

« Est-ce que c’est — !? »

« Lorsque cette fleur est activée, mon pouvoir astral sort de mon corps pour se répandre dans la graine », lui déclara Alice en préparant le bouclier à deux mains. « C’est mon pouvoir astral lui-même. »

« … Voilà qui explique tout. »

La fleur de glace avait même repoussé les épées d’Iska par le passé. Sa lame pouvait couper l’énergie astrale, mais ces pétales étaient faits d’énergie astrale.

« Je ne te cacherai rien, puisque c’est là que tout se termine… ! »

La lumière avait brûlé dans la graine. L’émission de puissance astrale de la source elle-même était incomparable à l’éclair déchargé par les huit miroirs.

La lumière avait surgi.

Iska avait préparé son épée, la levant en même temps que la lumière sortait de la fleur de glace. Il n’y a pas eu une seconde, un instant, un moment de différence dans le timing.

+

Le flash de lumière était passé à côté d’Iska et s’était propagé loin derrière lui dans la nuit.

+

Hein ?

Ce n’était pas un tir direct. Il n’avait même pas effleuré ses vêtements. C’était comme si sa visée était ratée. Peut-être qu’elle avait raté la première fois exprès ? Peut-être que la prochaine fois serait le vrai coup ?

Il avait regardé dans les yeux d’Alice alors qu’elle tenait son bouclier de glace. C’est alors qu’il remarqua quelque chose. Il réalisa pourquoi il lui avait manqué.

Elle l’avait raté exprès ? Non.

La sorcière de la calamité glaciale avait essayé de le frapper. Elle avait voulu tirer.

Mais elle avait manqué son coup.

« … »

« Qu’est-ce qui t’arrive, Iska !? Pourquoi t’es-tu arrêté de courir !? » Alice, protégée par la fleur de glace, lui avait crié dessus quand elle avait réalisé qu’Iska s’était arrêté dans sa course.

Iska était silencieux. Il s’était arrêté juste avant que ses épées ne soient à portée de main d’elle.

Il lui avait fait face.

« Je vais tirer ! Si tu n’opposes pas de résistance, alors je vais… »

« Ça ne me touchera pas. »

« Quoi ? »

« Tu ne peux pas me voir clairement. Pas quand tes yeux sont comme ça. »

Les yeux de la Sorcière de la Calamité Glaciale… étaient inondés de larmes. Sa vision était floue, et elle ne pouvait que vaguement distinguer Iska. À un moment donné, ses yeux avaient gonflé et étaient devenus rouges.

Dans le souffle arctique, ses larmes s’étaient transformées en petits cristaux, mais elle ne pouvait s’empêcher de pleurer. Les larmes avaient coulé sur son visage depuis les coins de ses yeux comme une source.

« … Euh… Aaah… »

Le vent avait porté ses sanglots. La fleur de glace s’était détachée comme une ficelle qui se défait. Son pouvoir astral s’était épuisé, retournant dans le corps de son propriétaire.

« … Arrêtons, » dit Iska, en rengainant sa paire d’épées.

C’était suffisant. Ce n’était pas leur croisade. Ils savaient tous les deux que c’était vrai.

 

« Je vais le dire clairement : Je ne veux pas me battre contre toi alors que tu as oublié qui tu es, Alice. Ce n’est pas le moment d’engager la bataille. »

 

« … Argh… » Son visage s’était transformé en pierre. « C’est ce que je ressens aussi ! Mais je te l’ai déjà dit plus d’une fois : je ne peux pas pardonner à l’armée impériale ! »

« Je pense que c’est là que tu t’es trompé. Il n’y a pas que l’Empire qui complote. Les descendants de la Fondatrice ont pris Sisbell et ont fait appel aux forces impériales. Et l’un des descendants impliqués est ta sœur, la princesse aînée. »

« … Ma sœur… ? »

« C’est ce que Sisbell nous a dit — juste après que tu aies quitté la villa. »

Dès qu’Alice était partie, le chef de l’Hydra avait immédiatement lancé une attaque.

+

« Je viens de… réaliser… »

« Ma sœur Elletear est la traîtresse… Je suis sûre qu’elle est dans les coulisses, à essayer de trahir la reine ! »

+

« Dis-tu que tu ne crois pas non plus en ta sœur ? »

« Ce n’est pas ça ! Je… ne peux pas te croire — je ne peux pas te croire quand tu dis que Sisbell t’a dit ça ! » Alice avait fait de sa main un poing. « Je soupçonnais ma grande sœur d’être impliquée dans le coup d’État… mais j’ai vu Elletear sur le point de mourir alors qu’elle protégeait la reine ! »

« C’est suspect parce que… »

« Comment puis-je douter d’elle après l’avoir vue moi-même — ? »

« Écoute-moi ! »

« Eek !? » Un jappement s’était échappé des lèvres d’Alice.

C’était la première fois que quelqu’un la réprimandait.

Elle était sans voix, effrayée par cette sensation peu familière. Il n’y avait jamais eu une seule personne autre que la reine qui avait grondé la Princesse Aliceliese. Même la reine ne lui donnait qu’un léger avertissement.

C’était donc une première.

C’était la première fois qu’Alice voyait quelqu’un être en colère contre elle.

« … »

« Écoute, Alice. »

Elle avait les yeux d’une fille effrayée quand il s’était adressé à elle.

« Ta villa a été détruite par l’Hydra. Même les personnes habillées en soldats impériaux étaient leurs assassins agissant sous les ordres du chef de famille. »

« … Le chef de famille ? »

« Talisman le Tyran. Il améliore ses capacités physiques en utilisant le pouvoir astral des Vagues. J’en suis sûr. »

« … » Le silence d’Alice fut sa réponse.

Un sujet impérial qui connaissait les pouvoirs d’un sang pur, c’était une preuve que Talisman avait attaqué sa villa.

« … Même moi… » Alice avait rompu son silence en poussant un petit soupir. « Même moi… je ne pense pas que tu sois le genre de personne à mentir. Mais… »

« Mais ? »

« Je ne peux pas décider de ces choses toute seule ! Je ne peux pas éliminer la possibilité que tu aies examiné le Seigneur Talisman et son pouvoir astral avant que les forces impériales ne commencent leur raid. Si j’interrogeais le Seigneur Talisman, je sais déjà comment il répondrait ! »

+

« Le sujet impérial, Iska, vous a menti. »

« Ma chère Alice. Allez-vous vraiment croire à une histoire inventée de toutes pièces ? Lui faites-vous vraiment confiance plutôt qu’à votre propre famille ? »

+

Elle n’avait pas de preuve pour démentir ses affirmations.

La villa appartenant au Lou avait été essentiellement démolie.

***

Partie 3

Tout ce qui serait découvert sous ses débris serait des produits fabriqués dans l’Empire — armes, équipements, et tout. Cela ne ferait que renforcer l’idée que c’est l’armée impériale qui a attaqué, et non l’Hydra.

Bien sûr que ça arriverait.

La seule chose qui prouve que la famille Lou est attaquée est l’Illumination de Sisbell.

C’est pourquoi Sisbell avait été visée. Talisman était lui-même venu pour arrêter Iska. Il avait même utilisé Vichyssoise pour aplatir la villa.

« … Je… ne sais pas quoi faire… » Les larmes avaient commencé à couler dans les yeux d’Alice.

Elle ne pensait pas qu’Iska mentirait, mais elle avait vu par elle-même la quantité de destruction et de cruauté que l’armée impériale pouvait causer. Elle ne savait pas ce qui était vrai.

« Sisbell n’a pas été kidnappée ? Je ne peux pas croire la parole d’un sujet impérial qui n’a pas su la protéger. »

Il était presque impossible d’ébranler la confiance absolue de la population dans la Maison d’Hydra. Qui prendrait les paroles d’un soldat impérial pour la vérité, surtout quand la reine avait été mutilée par ses troupes ? Alice, elle aussi, avait du mal à lui faire confiance.

« Je… ne veux évidemment pas me battre contre toi en me sentant comme ça ! J’aimerais pouvoir trouver une excuse pour ne pas me battre contre toi. Mais il n’y a rien ! » Alice essuya ses yeux, séchant les larmes qui brouillaient sa vision, et regarda Iska à travers le souffle arctique.

« … Hein ? » Alice avait ouvert la bouche, abasourdie. « Iska, est-ce que c’est — !? »

« Qu… qu’est-ce que c’est ? » Iska avait remarqué quelque chose quand elle avait montré sa main.

Une infime partie de la lumière astrale autour de son poignet. C’était si faible, et il était si préoccupé par la situation qu’il ne l’avait pas réalisé.

Il a une lumière grise… Ce n’est pas celle d’Alice.

Alors qui a fait ça ?

Était-ce une sous-espèce de pouvoir astral dérivé de malédictions ?

 

Étonnamment, il ne ressentait aucune sensation de malaise, bien que ce soit sur sa peau. S’il avait ressenti une douleur, il l’aurait remarquée, même s’il était distrait.

 

« Ce n’est pas possible… » Alice, encore sous le choc, s’était approchée de lui en titubant. La lumière sur l’épaule d’Iska avait réagi et s’était transformée en quelque chose comme un papillon.

Un papillon de lumière.

« Je le savais ! C’est l’Affinitée ! Cela vient de Yumilecia… C’est le pouvoir astral d’une des filles de la villa. Lui as-tu fait quelque chose ? »

« Moi ? Je n’ai rien fait. Les servantes devraient être en sécurité maintenant. »

Yumilecia n’avait pas été blessée, même après avoir été attaquée par la sorcière. Les cinq filles avaient évacué le vieux château.

« Ce n’est pas ce que je voulais dire. Son pouvoir astral est utilisé pour délivrer des messages… »

« Hein ? »

« Elle peut toucher un messager pour lui confier sa note. Elle a dû te toucher. »

Il ne pouvait penser qu’à une seule fois — juste avant de quitter la villa, quand il avait promis de sauver Sisbell.

+

« Nous allons réessayer. Nous ferons revenir Sisbell, c’est sûr. »

Iska avait ramassé la lame et l’avait pressée dans la paume de la jeune fille, enroulant ses doigts autour d’elle.

« Si je ne peux pas le faire, vous pouvez prendre ma vie vous-même. Vous pouvez vous en prendre à moi avec ce couteau. »

+

Il avait touché sa main. Elle avait dû utiliser secrètement son pouvoir astral sur lui.

« … Iska. Je ne te ferai pas de mal, je te le promets. Viens plus près. »

Il avait hoché la tête en silence.

Le pouvoir astral avait disparu d’Alice. C’était sa façon de montrer qu’elle ne l’attaquerait pas s’il l’approchait.

« Nos préposés ne sont pas des serviteurs ordinaires. Toutes les cinq ne savent pas se battre, mais elles ont des pouvoirs astraux à utiliser en cas d’urgence. »

« C’est ça, cette histoire d’affinité ? »

« C’est exact. Il ne s’invoquera que s’il touche une personne précise. » Alice avait tendu la main. Le bout de ses doigts tremblait, peut-être à cause d’un conflit intérieur qu’Iska ne pouvait pas comprendre.

Alice avait touché le papillon.

+

« À Lady Alice, Lady Sisbell, Lady Elletear, ou Sa Majesté. »

+

C’était un message pour ses employeurs, qui se jouait une fois quand l’un des quatre membres des Lou le touchait.

+

« J’ai un rapport. En tant qu’un de vos humbles serviteurs, je promets à la famille royale que ce sont mes propres mots. »

« Ce raid impérial n’a pas été seulement orchestré par l’Empire. »

« Les cerveaux derrière le coup d’État sont de l’Hydra. »

+

Yumilecia n’avait pas été forcée de dire ça par l’armée impériale. Si elle avait été menacée pour faire une déclaration, ils auraient utilisé un enregistrement. Mais elle avait exposé son propre pouvoir astral à un soldat impérial pour laisser ce message.

Cela prouve… que la note était de sa propre volonté.

+

« Le chef de famille a attaqué et démoli le domaine avec des mages déguisés en soldats impériaux. Je m’excuse d’avoir permis l’enlèvement de Lady Sisbell. C’est de ma faute. »

« Les vrais soldats impériaux nous ont sauvés, inquiets pour la sécurité de Lady Sisbell. »

« S’il vous plaît, ayez à cœur d’accepter ces quatre-là… »

+

Un récit de première main des Lou. Cela ne tiendrait pas comme preuve dans une inquisition pour retirer Talisman de sa position de chef de famille.

Cependant… pour la princesse, ce témoignage de sa propre servante était plus que suffisant.

« … »

Après avoir accompli son devoir, le papillon s’était envolé, disparaissant sous le voile de la nuit. La Princesse Aliceliese ne pouvait que le regarder partir.

« … Je vois. » La force d’Alice semblait s’estomper, même dans sa voix. « Tu avais raison… jusqu’à la fin. C’est moi qui me suis fait avoir… »

Tout ça n’était qu’une mascarade.

Après que l’Hydra eut fait entrer l’armée impériale, Iska et ses compagnons avaient fait tout ce qu’ils pouvaient pour protéger sa chère sœur. Alice aurait dû diriger son besoin de vengeance vers l’Hydra.

Les deux n’avaient pas de raison de se battre. Même si les forces impériales qui attaquaient le palais étaient de vrais soldats, leur plan n’était pas associé au garçon en face d’elle. Alice avait finalement pu croire à tout cela.

« Je suis désolée ! Je suis tellement désolée… ! » Alice s’était effondrée sur la glace lisse, en sanglotant.

Comme un barrage qui éclatait, ses larmes qui s’étaient temporairement arrêtées avaient recommencé à couler. Alors qu’elle sanglotait, haletant pour respirer, sa voix était si faible qu’elle avait presque disparu.

« … Je… voulais juste protéger la Souveraineté et ma famille… Pourquoi ai-je… ai-je fait quelque chose de si misérable envers toi… ? » Alice pleurait.

Elle était sans défense. Elle ne pouvait pas voir clairement à travers les larmes.

Si le garçon était son ennemi, il aurait abattu son épée sur la sorcière. Cela aurait été simple. Elle aurait juste eu à accepter son sort.

« Lève-toi, Alice. »

Quand Iska avait prononcé son nom, le corps de la princesse avait sursauté.

« Il y a quelque chose que tu dois faire avant d’aller t’excuser auprès de tes ennemis. »

« … Hein ? »

« Que vas-tu faire maintenant que tu sais que ta sœur a été kidnappée ? Vas-tu l’abandonner ? » demanda Iska à la jeune fille qui levait les yeux vers lui.

Il avait continué à lui parler. « Un sujet impérial ne se soucie pas de ce qui arrive à la souveraineté ou à la reine. Mais je ne peux pas abandonner Sisbell, et j’ai l’intention de l’aider. »

« … »

« Vas-tu juste rester assise là ? Parce que je vais y aller avec ou sans toi. »

Il ne disait pas de gentillesses. Il ne lui avait même pas tendu la main.

Leur relation n’était pas comme ça.

« … Tu es impitoyable. » Un sourire d’autodérision éclaira un instant le visage d’Alice. Puis elle essuya ses larmes du bout du doigt et se leva d’elle-même, en titubant, mais en gardant sa dignité de princesse. « Bon sang ? Une fille pleure devant toi, et tu ne peux pas prendre la peine de lui dire un seul mot gentil ou de lui tendre une main secourable ? Les sujets impériaux sont si barbares. »

« Tu peux être déçue par moi, mais… »

« Merci. » Son souffle avait effleuré son cou.

Il n’avait aucune idée de ce qui s’était passé. Avant qu’Iska puisse rassembler ses pensées, les cheveux dorés d’Alice, doux comme de la soie, lui chatouillèrent le nez. Il avait senti la douce sensation de sa poitrine contre la sienne.

 

« Merci… de me considérer à nouveau comme ta rivale… Si tu me traites de la même manière, cela signifie que nous pouvons être égaux, non ? »

 

Ce n’était pas un câlin. Elle venait de se confier à lui et d’enrouler ses bras autour de son corps.

Oui. Il n’y avait aucune arrière-pensée. Elle n’essayait pas d’obtenir quelque chose de lui.

« … Alice ? »

« — »

Ils ne s’étaient touchés que quelques secondes.

Avant qu’Iska ait pu réaliser ce qui se passait, la charmante princesse sorcière s’était séparée de lui et avait détourné les yeux.

+

Le destin avait changé de cap.

+

Ils n’allaient pas répéter l’histoire entre l’acteur principal et la princesse — le destin de Salinger et Mira. Le destin leur faisait comprendre qu’ils étaient à un tournant.

C’est parce que… le couple d’il y a trente ans ne pouvait pas s’exprimer en dehors des combats. Leurs égos étaient trop grands, ce qui les empêchait de se rapprocher.

Ou peut-être que cela aurait été résolu avec du temps pour combler leur distance émotionnelle.

Mais pour Iska et Alice…

+

« Aimes-tu les pâtes ? »

« Iska, pourquoi aimes-tu ce peintre ? »

« En tant que rival, j’ai le droit de tout savoir sur toi ! »

+

Ils avaient interagi comme des humains, liés par leurs forces et leurs faiblesses et de bien d’autres façons. Iska, le Successeur de l’Acier Noir et Alice, la Sorcière de la Calamité Glaciale se connaissaient en dehors du champ de bataille.

Ils s’étaient rencontrés maintes et maintes fois, avec parfois des correspondances manquées, et ils ne pouvaient tout simplement pas s’éloigner, même s’ils essayaient.

Ils avaient un lien intime — plus proche que quiconque — qui les avait tout juste empêchés de répéter la même erreur.

« … Je vais encore m’excuser. Je suis désolée. » Alice s’était mordue la lèvre tandis que la glace fondait.

Le mur s’était dissous, et leur environnement avait progressivement retrouvé sa forme originale.

« J’en voulais aux forces impériales qui ont attaqué le palais. Je ne pardonnerai jamais au Saint Disciple qui a blessé la reine… Mais je ne reporterai pas ces sentiments sur toi. »

« Et Sisbell ? »

« Je vais m’attaquer à la Maison d’Hydra. Il y a peut-être des preuves… Je veux que tu restes avec les domestiques. La villa n’est pas sûre, alors ne t’en approches pas. » Alice s’était retournée pour regarder derrière elle.

Les sirènes hurlaient dans les rues à travers la nuit.

« Je pense que les médecins que j’ai demandés sont ici… Tu dois partir. Je ne veux pas qu’ils nous voient parler. »

« D’accord. »

« … Iska. »

« Hmm ? »

« Je suis contente d’être tombée amoureuse de toi. »

Un sourire inhibé se répandit sur ses lèvres… jusqu’à ce qu’Alice réalise ce qu’elle avait dit et sursaute.

« Je — je ne voulais pas dire ça comme ça. Je voulais dire que je suis contente que les choses se soient mises en place, donc on peut être rivaux ! P-pourquoi ta bouche est grande ouverte ? C’est un moment critique, tu sais ! »

« Et qui est à blâmer ? »

Il savait que ce n’était pas ce qu’elle voulait dire, bien sûr.

Alors pourquoi son cœur ne s’arrêterait-il pas de battre hors de sa poitrine ?

Ils étaient censés être ennemis. Elle était la sorcière avec laquelle il s’était battu jusqu’à présent…

 

— Pourquoi je me sens si troublé ? On aurait presque dit que… de la magie avait été jetée sur lui, comme s’il avait été ensorcelé.

 

« … Je me préparais parce que je pensais que c’était encore un de tes pièges. »

« C’est impoli. Pourquoi est-ce que j’essaierais de te séduire !? … Argh ! Va-t’en. Tu as échappé de peu à la mort, Iska. Nous réglerons les choses la prochaine fois. Garde ça en tête ! »

Alice avait fait tournoyer sa robe, lui avait tourné le dos et s’était mise à courir en essayant de cacher ses joues brûlantes.

« La prochaine fois, hein ? »

Cela arriverait un jour. Même si le destin déviait de sa route, leur intention de régler les choses ne changerait jamais. Iska et Alice pensaient la même chose.

Mais ça n’arriverait pas maintenant.

Un jour, le temps viendrait pour eux de s’affronter dans leur croisade.

Iska et Alice avaient couru dans leur direction respective, connaissant ce sentiment dans leur cœur.

+

Alice, la Sorcière de la Calamité Glaciale, s’était dirigée vers le palais où les flammes de la guerre s’attisaient encore.

Iska, le successeur de l’Acier noir, sprinta vers la campagne où ses amis l’attendaient.

+

Tous deux ne se doutaient pas… que des événements encore plus étranges se produisaient alors que la bataille se poursuivait au palais.

***

Épilogue 1 : Le plus sombre avant l’aube

Au moment où la revanche se déroulait entre Iska, le Successeur de l’Acier Noir, et Alice, la Sorcière de la Calamité Glaciale…

+

« Ne savez-vous pas ? Comme le soleil se cache pendant la nuit, la lune veille. »

Dans l’enceinte du palais… se trouvait une forêt où les coups de feu tirés par les forces impériales n’atteignaient pas. À la périphérie où le vent bruissait, un vieil homme en fauteuil roulant était éclairé par le clair de lune.

Son fauteuil roulant grinça alors qu’il avançait. « C’est étrange. Pourquoi une jeune femme emprisonnée sortirait-elle de prison au même moment qu’un raid impérial ? »

« … »

« Et pourquoi as-tu la plus jeune princesse sur votre dos ? »

Le chef des Zoa, Growley. Ce vieil homme costaud portait encore sur son épaule la blessure infligée par le Saint Disciple Sans Nom avant qu’il ne s’échappe de la Tour de la Lune.

« Maintenant, ma fille. Je crois que ton nom était Vichyssoise, n’est-ce pas ? »

« Uh-oh. Grillé. »

La rousse en manteau tirait la langue comme si tout cela était une blague. Sisbell, la plus jeune princesse de la Maison des Lou, était sur le dos, ne montrant aucun signe de réveil pendant leur conversation, presque comme si elle avait été droguée.

« Ça ne faisait pas partie du plan, papy. Je pensais que tu serais excité par le raid impérial. »

« En quelque sorte. » Derrière lui, les flammes faisaient rage sur le terrain du palais.

Il y avait des signes de retrait des troupes impériales, mais l’homme ne montrait aucun intérêt.

« Le Vice poursuit le Saint Disciple. En tant que chef de famille, je dois jouer mon rôle. »

« Oh ? Alors ça veut dire… »

« Pensais-tu pouvoir tromper mes yeux ? » lui avait-il lancé en riant. Il y avait probablement cinq mètres entre eux. Il désigna la rousse qui se tenait devant lui.

« N’est-ce pas ton maître qui a invité l’armée impériale ici ? » avait-il demandé. « Et vous étiez responsable du complot visant à tuer la reine. L’Hydra se déplace sous la surface. Vous ne vouliez pas vous montrer, alors j’ai fait semblant de ne pas le remarquer. Mais maintenant que vous essayez d’enlever la plus jeune princesse, c’est une preuve suffisante. Je suis content d’avoir suivi le vent du soir là où il m’a emmené. »

« Oh ? Vous avez la tête sur les épaules, grand-père, même dans votre vieillesse. »

Vichyssoise avait arqué les sourcils. Elle avait été vue en train de tenter d’amener Sisbell à la flèche solaire. Elle n’avait aucun moyen de se sortir de cette situation. Au contraire, elle aurait dû être nerveuse, au moins.

« Et la Maison des Zoa est-elle au courant ? »

« Les conjectures inutiles ne font qu’engendrer le chaos. Je savais qu’il fallait attendre que le moment soit venu. »

« Je vois. Alors vous avez flairé ce plan par vous-même. Je dois admettre que cela me donne une meilleure opinion de vous, mais l’ironie est que certaines choses dans le monde sont mieux laissées inconnues. »

« Aimes-tu ta forme mutante ? »

« … »

« J’ai entendu pendant l’inquisition. Tu t’es transformée en quelque chose d’inhumain quand tu as attaqué Sisbell dans le huitième état. »

À ce moment-là, Vichyssoise portait un manteau sombre. Ses pieds nus qui dépassaient de dessous étaient blancs et fascinants, mais clairement humains.

Le vieil homme n’avait toujours aucune idée du genre de monstre qu’elle pouvait devenir.

— Et si tu me le montrais ? Growley semblait la défier.

« Je pense que mon âge m’a rendu sceptique. Je ne peux pas croire les choses à moins de les voir de mes propres yeux. Bien sûr, ça ne me dérange pas que tu restes comme tu es, mais ne crois pas pouvoir m’échapper. »

« Pauvre grand-père. » La sorcière avait ricané. « Voulez-vous prendre votre retraite ? Je suis désolée de te dire que je suis occupée à livrer Sisbell. Alors je vais devoir vous donner quelqu’un d’autre à combattre. »

« Hmm ? »

« Une sorcière encore plus terrifiante que moi. »

Zoosh. Une rafale tiède s’était accrochée à sa peau. Les arbres bruissaient. Miasma, un zéphyr sinistre — dans l’ancienne tradition, on croyait que c’était un air nocif, impur et toxique. Il donnait la chair de poule à Growley.

« Quoi ? » Il s’était retourné.

« Ha-ha. Ha-ha. » Il entendit un gloussement séduisant provenant de quelqu’un — ou de plusieurs personnes — qui résonnait entre les arbres.

« Au revoir, grand-père. À jamais. » Vichyssoise avait bondi, avec Sisbell toujours sur son dos.

Elle s’était enfuie comme si elle ne portait pas un autre corps sur elle. Tout ce que le vieil homme pouvait faire était de la maudire dans son souffle. Il ne pouvait pas la suivre. L’endroit entier était balayé par un vent diabolique, résonnant de rires séduisants. Il ne pouvait s’empêcher de frissonner de partout.

Quelque chose allait arriver.

 

À plus de soixante-dix ans, le sang pur ressentait une étrange menace comme il n’en avait jamais connu auparavant.

 

« Présence extraterrestre — nommez-vous ! »

Il avait senti quelque chose bondir. De derrière lui ? Il avait forcé son fauteuil roulant à se tourner et avait regardé au-dessus. Le clair de lune qui brillait sur lui avait été bloqué.

Alors, la chose était au-dessus de lui ?

Il leva les yeux. Ça flottait dans l’air, comme pour bloquer la lune.

+

Conformisme : Étoile mutante divine, lle (Nom de code : Sujet de Test E).

+

Elle portait une robe noire de jais. Une lumière astrale noir corbeau s’étendait dans le ciel, bloquant la lumière de la lune. Il regardait sa silhouette terriblement envoûtante, mais ne pouvait pas distinguer qui elle était. En effet, sa peau était d’un noir de jais, comme si elle avait été occultée par l’ombre. Seuls ses yeux scintillaient comme des étoiles. Growley ne pouvait que retenir son souffle en la regardant, un monstre qui dépassait la connaissance humaine.

« … Êtes-vous… une sorcière ? »

Il ne parlait pas d’un mage astral, mais de la malice qui apporte la calamité au monde.

Oui. La plus jeune princesse, Sisbell, avait vu cela dans le passé, et après cela, elle avait perdu la capacité de faire un pas hors de sa chambre à cause de la peur. Ce monstre inconnu était…

« Oh, c’est malheureux. Il semble que la Voix ne veut toujours pas se comporter correctement. »

« … Quoi ? »

« Je suis loin de la perfection stellaire. Je ne suis pas habituée à ce pouvoir astral. »

Sa voix était dédoublée. La voix féminine qui captivait ceux qui l’entendaient était superposée à la voix d’un monstre incommensurable, créant une réverbération déroutante.

« Écoutez, le son joyeux. »

La sorcière noire flottait dans les airs, bloquant la lune et écartant ses deux bras. Elle ressemblait à la chanteuse d’une salle d’opéra.

+

« Entendez le requiem des étoiles. »

+

Plusieurs heures plus tard, le corps astral qui était passé par là n’avait réussi qu’à récupérer le fauteuil roulant de Growley.

+++

L’aube s’était levée. Tous les serviteurs et soldats avaient frissonné à la vue du bulletin affiché sur le palais.

Une personne était hors service :

— Reine Mirabella Lou Nebulis IIX : Vivante.

Trois avaient disparu :

— Maison de Lou, Princesse aînée Elletear : Capturée par l’armée impériale.

— Maison de Lou, Princesse cadette Sisbell : Capturée par l’armée impériale à la villa.

— Chef de la famille Zoa, Growley : MIA. Témoins recherchés.

***

Épilogue 2 : Une fille offrant des prières à dix milliards d’étoiles

Sa vision était blanche.

Le sol, le plafond et les murs avaient été peints dans un blanc stérile. Même le lit sur lequel elle était allongée était blanc.

« … Où se trouve cet endroit… ? Aïe. »

Dès qu’elle s’était levée, elle avait senti une douleur à l’arrière de son cuir chevelu. Elle avait hésité à tripoter la petite bosse sur sa tête. Quelque chose l’avait frappée, ce qui avait dû lui faire perdre conscience.

« Iska ? » Sa voix affaiblie résonnait vide dans la pièce. « … Capitaine Mismis ? Néné ? Jhin ? »

Où était l’unité impériale qui l’avait protégée ?

Elle avait fui pour échapper à l’armée privée du Seigneur Talisman dans la villa. Mais elle ne se souvient pas des événements qui avaient suivi.

« Ngh. Non ! » La plus jeune des princesses déglutit en scrutant à nouveau la pièce.

Il n’y avait pas de portes. Comment était-elle entrée dans cette pièce ? Par une sorte de pouvoir astral ? Ou y avait-il une porte cachée quelque part ?

« … » L’effroi avait commencé à envahir Sisbell.

Iska et le reste de l’unité impériale n’étaient pas là. Elle avait été jetée dans cette pièce seule, et il n’y avait même pas de porte pour en sortir.

Il y avait une chose qu’elle pouvait deviner à propos de la situation…

 

« … Est-ce que j’ai… été kidnappée… ? »

 

Elle essaya de retracer mentalement ses pas. Ils avaient affronté l’Hydra, ce qui signifie que c’était probablement la flèche solaire. Il ne serait pas étrange qu’il y ait une ou deux pièces cachées.

Mais que comptaient-ils faire maintenant qu’ils l’avaient capturée ? Elle aurait révélé avec l’Illumination que la Maison d’Hydra avait essayé de tuer la reine. Elle était donc une menace pour eux.

Était-ce une tentative pour la faire taire ? Non. Si c’était le cas, ils ne l’auraient pas enfermée dans cette pièce cachée. Était-elle un otage à utiliser contre la famille Lou ? Ou bien allaient-ils essayer de la gagner à leur cause et utiliser son pouvoir pour un de leurs plans ?

« Ce n’est pas drôle. Qui leur obéirait ? »

Tous ses cris avaient rebondi sur les murs. Même si elle savait que c’était en vain, Sisbell avait continué, en forçant sa voix. Elle le faisait pour s’encourager, pour s’empêcher de succomber à la peur qui était sur le point de l’envahir.

Je ne vais pas perdre. Tu dois être courageuse, Sisbell !

Ce n’est pas une première pour moi, tu te souviens ?

Elle avait vécu une expérience similaire dans le passé. Elle se souvenait de la peur qui l’avait écrasée après avoir été attrapée et menacée d’une mort atroce. Qu’avait-elle vraiment à craindre ? Comparé à ça, ce n’était rien.

« … » Sisbell plaça sa main sur sa poitrine et calma son cœur.

Souviens-toi. À l’époque, quelqu’un était venu l’aider. Un soldat impérial excentrique l’avait libérée de la prison impériale.

+

« Restez tranquille. Je vais vous laisser sortir maintenant. »

« Pourquoi me laissez-vous… m’échapper… ? »

+

À partir de ce moment, elle avait cru — et avait continué à croire — que l’Unité 907 ne l’abandonnerait jamais.

« … À quoi bon perdre la foi maintenant !? »

Elle serra l’ourlet de sa manche, en tremblant. Ses lèvres tremblaient.

« Puissances astrales qui guident cette planète, je vous en supplie. »

Elle avait prié les étoiles.

Si les prières avaient du pouvoir, elle en offrirait autant que nécessaire.

« Veuillez transmettre mon message à l’unité 907… ! »

***

Illustrations

Fin de tome.

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