Wortenia Senki – Tome 9 – Chapitre 5 – Partie 4

***

Chapitre 5 : Deux face d’une même pièce

Partie 4

Dans les régions méridionales du continent occidental existait un certain pays : c’était une cité-État formée autour d’un temple fait de marbre solennel. Et alors que les royaumes du sud et le Saint Empire Qwiltantia, l’une des trois grandes puissances du continent, se disputaient leurs frontières au fil des ans, ce pays s’accrochait à la vie. Peu importe la façon dont les frontières des pays environnants s’étaient déplacées, ce pays n’avait jamais changé. L’hégémonie au cœur du continent, l’Empire d’O’ltormea, avait attaqué les royaumes du sud dans son désir de prendre le contrôle des villes portuaires, mais même lui n’avait jamais pensé à attaquer ce pays.

Et donc, cette bête avait sommeillé sans être dérangée. Mais dès qu’elle se réveillait, cette bête montrait ses crocs contre le reste du continent, déchirant les autres royaumes en lambeaux.

Le nom de cette cité-État était Menestia, la ville sainte. La forteresse où le dieu de la lumière Meneos était vénéré, et la forteresse de l’Église de Meneos, la puissance religieuse qui s’était répandue sur tout le continent.

Dans un monde aussi déchiré par la guerre, l’autorité religieuse et le droit divin abstrait ne suffiraient pas à permettre à une organisation religieuse de se défendre. Ainsi, ce château de marbre blanc se dressait, protégé par de hauts remparts et de profonds fossés. Plus que tout, le regard vigilant de ses sentinelles et de ses gardes qualifiés assurait sa stabilité. Ils se tenaient debout, vêtus d’une épaisse armure et avec des lances acérées à la main.

Et alors qu’ils patrouillaient dans la ville entourant le temple, leurs yeux brillaient de désir. Ces soldats ne ressemblaient pas à l’image de l’homme pieux et miséricordieux au service d’un dieu. Et cela ne concernait pas que les soldats. Tous les habitants de ce pays étaient comme une meute de loups affamés. Se croyant graciés par leur dieu, c’étaient des imbéciles qui croyaient que toute action qu’ils entreprenaient était pardonnée et permise par la providence divine.

Ils invoquaient le nom de leur dieu, l’utilisant comme un outil pour réaliser leurs désirs.

Et assis au centre de la ville, dans les profondeurs du temple, se trouvait la personne la plus exaltée de cette cité, reposant sur un siège aussi luxueux que le trône d’un roi. Faisant tournoyer un verre dans sa main, il écoutait le rapport de son subordonné avec une expression amusée.

Il était vêtu d’un manteau blanc en soie lustrée, orné de fils d’or. Associée au bâton de fonction incrusté de pierres précieuses qu’il tenait à la main, la tenue de l’homme rendait son statut clair aux yeux de tous.

« Oh. Donc O’ltormea a retiré ses hommes de Xarooda ? »

« Oui, Votre Sainteté… Apparemment, Fort Notis a été renversé, et le chef de sa garnison, Moore, a été tué. », répondit le vieil homme en s’inclinant devant lui.

« Et leurs pertes ? »

« Selon nos espions, O’ltormea a offert le traité de paix au même temps que leurs troupes furent isolées. Ils ont évité d’être encerclés et éradiqués. Cependant, Helena Steiner et Ecclesia Marinelle ont mené un assaut contre eux, coûtant à l’Empire la vie de 10 000 soldats. »

À ces mots, les lèvres de l’homme s’étaient retroussées vers le haut. Son sourire n’était rien de moins que le rictus du diable. La plupart des hommes se figeraient de terreur à la simple vue de ce sourire. Cependant, l’expression vide du vieil homme n’avait pas bougé malgré ce rictus malicieux.

« Je vois, je vois… Dix mille. Ce n’est pas un coup fatal, étant donné la puissance nationale d’O’ltormea, mais… »

« Ils ont perdu Fort Notis et toutes leurs réserves sont réduites en cendres. »

« Quoi qu’il en soit, le retrait de leurs armées était un choix judicieux… Pour les deux pays. »

« Oui. »

« Le roi de Xarooda apparaît comme un homme obstiné. »

« Les rumeurs le présentaient comme un roi faible d’esprit, mais je ne m’attendais pas à ça. »

Aux mots du vieil homme, l’homme émit un sourire satisfait. C’était la preuve que l’homme agenouillé devant lui était à son service.

Alors que leur armée était sur le point d’être encerclée et anéantie, O’ltormea avait demandé un traité de paix. Et avant que les négociations ne commencent, O’ltormea avait réussi à retirer son armée au-delà de ses frontières.

Ce seul fait fit de Julianus Ier un roi stupide. En apparence, son territoire avait été ravagé de façon unilatérale par O’ltormea, et il les avait simplement laissés rentrer chez eux sans que Xarooda n’ait rien gagné. La plupart des souverains auraient au moins exigé des réparations de la part de l’Empire pour couvrir les pertes qu’ils avaient subies.

Mais c’était là que se trouvait le piège, le piège qu’O’ltormea avait tendu.

Peu de gens avaient réalisé qu’étant donné l’écart entre la puissance nationale d’O’ltormea et celle de Xarooda, les négociations n’avaient aucun sens. Toute promesse qu’O’ltormea pourrait être forcé de faire n’aurait aucun sens. Les pactes n’avaient un pouvoir contraignant que si leur rupture entraînait une sorte de sanction.

À titre de comparaison, la loi d’un pays pouvait être vue de la même manière. Les lois n’avaient de sens que lorsqu’elles avaient une extension physique capable de punir ceux qui les enfreignaient, par exemple la police. Ce n’était que lorsqu’il y avait une présence qui recherchait activement et jugeait les contrevenants que les gens commençaient vraiment à faire respecter la loi.

Les lois, en elles-mêmes, n’avaient pas beaucoup de sens, et on pouvait dire la même chose des accords verbaux et des négociations. Les négociations reposaient sur le respect par les deux parties de leur part de l’accord, mais que se passait-il si l’une des parties avait un avantage écrasant sur l’autre ?

Des parents et leurs enfants, des enseignants et des étudiants, un employeur et ses employés, une superpuissance par rapport à un pays plus faible. Ces exemples différaient par leur échelle, mais au fond, c’était la même chose. Et dans ce cas, O’ltormea dominait Xarooda en termes de puissance nationale.

O’ltormea pourrait conclure une sorte d’accord avec Xarooda dans ces négociations. Mais Xarooda avait-il la force d’obliger O’ltormea à l’honorer ? Les forts n’avaient aucune obligation de faire des promesses aux faibles. Si O’ltormea avait jugé la présence de Xarooda nécessaire pour une raison quelconque, ils auraient pu facilement négocier avec eux. Mais l’Empire ne se souciait pas de l’opinion de Xarooda à son sujet.

Alors que l’homme assis sur le trône faisait tourner son verre dans sa main, il réfléchissait à la situation.

C’est impossible, et Julianus le sait. Peu importe l’accord qu’ils concluront, Xarooda finira par être écrasé par la force pure.

Même s’ils pouvaient exiger de l’Empire qu’il leur verse une grosse somme en réparations sur une longue période, on pouvait se demander si O’ltormea paierait vraiment. Et la plupart des gens n’avaient pas compris cela. Ils avaient tendance à supposer naïvement qu’une promesse faite serait toujours respectée.

« Ils ont donc forcé O’ltormea à retirer son armée de Xarooda avant le début des négociations ? Bien vu. »

« Oui, Xarooda aurait du mal à tenir des conseils de guerre et à réorganiser ses forces avec cette armée toujours entre leurs mains, et le fait de retirer cette armée sera également perçu favorablement au sein du pays. »

« Vous dites qu’inspirer de l’espoir aux nobles pourrait les inciter à aider ? »

« Tant qu’à faire, c’est toujours mieux que d’avoir cette armée toujours sur leur territoire. »

Il était évidemment difficile de dire à quel point cela aiderait étant donné que de nombreux nobles étaient déjà dans la poche d’O’ltormea. Cependant, le fait qu’ils aient obtenu la retraite d’O’ltormea en premier lieu était un fait solide que Julianus pouvait utiliser comme une arme pour persuader la noblesse.

« Je suppose que du point de vue de Xarooda, ce développement est une lueur d’espoir. »

« Oui, si cette guerre avait continué comme prévu, la défaite ne leur aurait pas été épargnée. S’ils avaient réussi à encercler et à anéantir l’armée d’invasion, O’ltormea ne l’aurait pas accepté tranquillement. D’autant plus qu’il y avait une chance que cette attaque coûte la vie au commandant suprême de l’armée, Shardina. »

« Hm. Cela aurait été normalement une issue souhaitable pour Xarooda. »

Dans la plupart des cas, réclamer la tête d’un général mettrait fin à une guerre. Mais dans ce cas, cela ne ferait que servir de catalyseur à la prochaine guerre à venir.

« Étant donné la position de Xarooda, cela n’aurait pas été sage. Bien sûr, s’ils ne faisaient rien, le résultat aurait été le même, ils devaient donc essayer d’encercler l’armée d’invasion… »

« S’ils devaient réclamer la vie de sa fille bien-aimée, l’Empereur écarterait toutes les affaires internes pour faire de la conquête de Xarooda la priorité. »

« Oui. Il organiserait probablement un second front en quelques mois. Et Xarooda ne serait pas en mesure de s’y préparer à temps. Ils auraient pu penser à une sorte de contre-mesure pour cela, mais comme c’est l’Empire qui a proposé l’armistice, ils ont probablement estimé que leurs chances de victoire étaient plus grandes en acceptant plutôt qu’en s’en tenant à ce plan. »

« Donc ils ont choisi de gagner du temps afin d’obtenir une éventuelle victoire plutôt que d’insister sur la victoire immédiate… Pas mal. »

« Oui. Ce n’était pas une mauvaise idée, mais… »

« Plus le roi de Xarooda essaie désespérément de s’accrocher à la vie, plus cette guerre durera. Et c’est exactement ce que veut O’ltormea. »

« Oui. Depuis que cette guerre a commencé, les prix à travers le continent occidental sont montés en flèche. Mes espions rapportent que de nombreuses compagnies avec lesquelles ils sont impliqués ont fait des profits. Il est probable que cet armistice a été orchestré par quelqu’un agissant dans les coulisses. »

« Comme des vautours se rapprochant de la chair en décomposition. »

L’ironie dans le sourire de l’homme était frappante. Mais cette description était un moyen approprié de décrire ceux qui complotaient pour utiliser la guerre afin d’en tirer un profit pour eux-mêmes.

« Tout à fait exact, Votre Sainteté. »

Bien sûr, ils ne pouvaient pas envoyer un messager à Xarooda leur disant de ne plus résister, et même s’ils le faisaient, cela ne changerait rien. L’existence continue de Xarooda n’était pas si importante pour eux. Mais pour Julianus Ier, rien ne comptait plus que la survie de son royaume.

Après quelques instants d’un long silence, l’homme prit soudainement la parole.

« Avez-vous donc une sorte de plan ? »

« J’en ai un, Votre Sainteté. »

« Hoh. »

« Avez-vous entendu parler d’une certaine entreprise située dans la ville-citadelle d’Épire, la Compagnie Christof ? » demanda le vieil homme, ce à quoi l’homme secoua silencieusement la tête.

Bien sûr, le pape de l’Église de Meneos n’aurait pas entendu parler d’une petite entreprise située dans une province lointaine.

« Non. Qu’en est-il de cette société Christof ? »

« Nous pouvons utiliser la même méthode qu’eux pour tirer profit de cette guerre. »

Le sourcil du Pape tressaillit à l’explication du vieil homme.

« Sont-ils impliqués avec eux ? »

« Nous ne le savons pas encore, mais nous pensons qu’il y a un noble qui collabore avec eux. »

En entendant cela, le Pape comprit vite où le vieil homme voulait en venir.

« Je vois. Donc vous voulez secouer ce noble et voir ce qui se passe… »

« Oui. Nous allons faire des repérages pour voir s’il est de mèche avec eux, et s’il ne l’est pas… »

« Il devrait faire un bon pion. »

« Oui, Votre Sainteté. »

« Bien, bien. Allons-y et faisons-le », dit le Pape en frappant dans ses mains avec un sourire.

La seule chose que l’on pouvait alors entendre de cette salle du trône était le rire dément de son maître.

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

2 commentaires :

  1. merci pour le chapitre

  2. amateur_d_aeroplanes

    Très mauvais plan 😈

Laisser un commentaire