Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 4 – Chapitre 1 – Partie 1

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Acte 1

Partie 1

« Voici la prochaine, » déclara Félicia. « Informez l’honorable Seigneur Yuuto, patriarche du Clan du Loup. Je suis Douglas, patriarche du Clan des Cendres. »

L’automne était déjà bien entamé. La lumière du soleil s’était adoucie et l’air semblait plus froid sur la peau.

Dans le bureau du patriarche, Félicia lisait à haute voix à Yuuto le contenu des messages qui lui étaient adressés, comme elle le faisait toujours, d’une belle voix comme une clochette dorée.

Cependant, Yuuto avait eu l’impression que sa voix était moins fougueuse que d’habitude. Dernièrement, Yuuto avait été tellement occupé que cela lui avait fait tourner la tête. Cela signifiait que son adjointe devait aussi ressentir la même chose. Il était possible qu’elle commence à se sentir épuisée.

Yuuto ne se sentait pas bien de lui faire toujours lire des messages comme celui-ci, mais il ne pouvait pas lire l’écriture d’Yggdrasil, alors il n’y avait rien qu’il puisse faire pour l’instant.

« Ohh, le Clan des Cendres. Cela me ramène en arrière, » fit remarquer Yuuto avec un peu de surprise, en analysant enfin ses paroles.

Le Clan des Cendres s’était jadis joint à Botvid du Clan de la Griffe pour attaquer Iárnviðr. Ils avaient été les adversaires de Yuuto lors de sa première vraie bataille — et sa première grande victoire. Tout cela s’était passé il y a un an et demi, mais il s’en souvenait encore très bien.

Jusqu’à il y a un peu plus de deux ans, Yuuto Suoh était un garçon relativement normal qui fréquentait le lycée dans le Japon du XXIe siècle. Grâce à une combinaison de coïncidences, il s’était retrouvé transporté dans le monde déchiré par la guerre d’Yggdrasil, et que ce soit le destin ou une malédiction, il était maintenant le souverain du Clan du Loup.

Tandis que Yuuto se livrait à quelques réminiscences, la douce voix de Félicia continuait à lire le message.

« “Moi, Douglas, j’exprime mon humble requête pour que Seigneur Yuuto puisse échanger avec moi le Serment du Calice. Et, dans ce cas, je m’engage par la présente à offrir ma fille de sang, Dorothéa, afin de servir le Seigneur Yuuto dans son palais...”, » avait-elle lu.

« Argh, pas encore ! » s’exclama Yuuto, fatigué et renfrogné.

Il avait déjà reçu le même genre de lettres du Clan du Blé et du Clan du Chien des Montagnes, tous deux d’anciens clans subordonnés du Clan du Sabot.

Yuuto avait vaincu le souverain suprême d’Álfheimr, autrefois connu sous le nom de Yngfróði, le Seigneur de l’Abondance : le patriarche Yngvi du Clan du Sabot. Et peu de temps après, il avait aussi vaincu Steinþórr, patriarche du Clan de la Foudre, un guerrier hors pair connu sous le nom de Dólgþrasir, le Tigre Affamé de Batailles. Après ça, les autres clans voisins étaient apparemment tous impressionnés et effrayés par la force militaire de Yuuto.

Dans chaque cas, Yuuto était parti à la guerre qu’à contrecœur et pour se défendre, mais d’un point de vue plus éloigné, il était compréhensible qu’il puisse apparaître comme un nouveau dirigeant ambitieux désireux d’étendre son territoire et son influence.

Face à un tel adversaire, qu’ils ne pouvaient pas vaincre militairement, ces individus essayaient de se protéger le plus possible en déclarant leur intention de se soumettre à lui et d’entrer sous sa protection, plutôt que d’attendre qu’il les envahisse potentiellement.

« C’est exactement ce que je veux, du moins pour ce qui est d’obtenir plus de clans de mon côté et sous mon influence, mais..., » Yuuto s’était affaissé contre sa chaise, et avait fait un sourire fatigué face à l’ironie.

La partie la plus délicate de cette situation était de savoir comment traiter avec les « princesses », les filles de haut rang que les autres nations lui envoyaient. Elles devaient servir à la fois d’otages qui servaient de garantie physique de l’alliance et d’épouses ou de maîtresses potentielles qui favoriseraient des liens plus étroits entre lui et leur pays d’origine.

Certains diront peut-être qu’en tant qu’homme entouré de nobles filles parmi lesquelles il pouvait choisir, il avait eu la chance déraisonnable d’être choyé par sa situation. Mais Yuuto avait quelqu’un de spécial pour lui au Japon, son amie d’enfance Mitsuki Shimoya. Avec son attente courageuse et patiente de son retour, il n’avait jamais pu penser à la trahir.

« Pour l’instant, réponds poliment aux autres partis que j’aimerais échanger le Serment du Calice avec eux, mais que je refuse toute demande en mariage. Je te laisse le soin de trouver une bonne raison, » déclara Yuuto.

« Oui, Grand Frère, » déclara Félicia. « Je crois qu’avec le statut actuel du Clan du Loup, tu serais en mesure de faire avancer les négociations avec un clan plus petit et plus faible avec tes propres conditions, et cela, sans trop de difficultés. »

Hochant la tête, Félicia donna son opinion en notant les paroles de Yuuto sur un morceau de papier.

Et c’était vraiment comme elle le disait... Le Clan du Loup était maintenant beaucoup plus grand et puissant que lorsque Yuuto était devenu patriarche.

Ce n’était pas comme s’il faisait des demandes déraisonnables. S’il avait affaire à un petit clan, incapable de mobiliser même un millier de soldats, il ne devrait pas être difficile de les convaincre d’accepter l’alliance dans ces conditions.

« Eh bien... plus important encore, le plus gros problème en ce moment, c’est qu’on est devenus si gros. » Yuuto secoua la tête et soupira, laissant tomber son regard sur une feuille de papier étalée sur le bureau.

C’était une simple carte des terres entourant le Clan du Loup. Les techniques d’arpentage et de mesure étaient encore peu développées à Yggdrasil. Il y avait plus que probablement une assez grande différence entre cette carte et la géographie réelle, mais c’était quand même mieux que rien.

En tapant du doigt sur la carte, Yuuto marmonnait à lui-même. « Le problème le plus flagrant est la pénurie de personnel. »

En l’espace d’un an, le Clan du Loup avait étendu son territoire à près de trois fois sa taille antérieure. Il devait gouverner tout ce territoire nouvellement acquis, mais naturellement, cela signifiait qu’il devait nommer des fonctionnaires civils pour effectuer le travail quotidien localement dans chaque zone, ainsi que fournir des forces armées pour protéger la paix dans les villes locales et les défendre contre les bandits et les menaces étrangères.

Parce qu’une bonne partie de ce nouveau territoire se trouvait le long de la frontière avec le Clan de la Foudre, avec lequel il venait d’entrer en guerre, il donnait la priorité aux ressources là-bas, et à son tour ils commençaient à voir des effets secondaires négatifs graves ici à Iárnviðr.

En tout état de cause, le manque de main-d’œuvre avait fait que son administration n’était plus en mesure de gouverner sans heurts.

« Nous devons faire quelque chose à ce sujet..., » murmura Yuuto.

Il avait besoin de trouver des gens plus compétents, et vites. Pour Yuuto, c’était son plus grand dilemme non résolu.

Après avoir terminé son travail pendant la première moitié de la journée, Yuuto avait déjeuné sur la terrasse et, en regardant dans la grande cour, il avait vu que le marché de style bazar était en plein fonctionnement en ce moment.

Les marchands et colporteurs avaient dressé leurs tentes et leurs étals à l’intérieur desquelles diverses marchandises étaient étroitement placées les unes à cotés des autres. Ainsi, tout le lieu était rempli de voix vives et excitées.

En particulier, un magasin installé du côté nord de la cour semblait être en plein essor, avec une bande de marchands qui se précipitaient frénétiquement pour enchérir sur les marchandises qui s’y trouvaient.

« Je propose trente byggs d’argent ! »

« Alors j’enchéris à 40 byggs ! »

« Grrr... puis un barr ! »

« Un barr, vingt byggs ! »

« Un barr, trente byggs ! »

Apparemment, quoi que ce soit, c’était si populaire qu’il était vendu aux enchères. Les marchands avaient levé les mains l’une après l’autre, et à chaque seconde qui passait, le prix montait en flèche.

« C’est sûr que ça chauffe en bas. » Debout à côté de Yuuto, Sigrun avait parlé d’un ton désintéressé.

Cette fille aux cheveux argentés était la chef de l’unité de Múspell et également la chef de la garde personnelle de Yuuto. Elle était également la plus grande guerrière du Clan du Loup, responsable de la mort du héros Mundilfäri du Clan de la Griffe et du patriarche Yngvi du Clan du Sabot, tous deux des guerriers intrépides et sans rivaux à part entière.

Et peut-être à cause du climat plus froid de la fin de l’automne, elle portait aujourd’hui un manteau de fourrure à capuche. Le capuchon avait des oreilles de loup attachées à la capuche, et cela lui allait très bien.

« Ohhhhhhhhh !! » Tout d’un coup, un chœur de cris se répandit dans la foule des marchands comme une vague. Il semblait que le vainqueur avait été décidé.

Le concept de monnaie standardisée comme les pièces de monnaie n’étaient pas encore apparut dans Yggdrasil, de sorte qu’il était normal pour la plupart des commerçants de régler leurs paiements avec de l’argent.

« Bygg » et « Barr » étaient des unités de mesure de poids. Un Bygg équivaut au poids de 180 grains d’orge et un Barr équivaut à 60 byggs.

Yuuto avait déjà mis son smartphone, le LGN09 alias Laegjarn (166 grammes) sur la balance du commerçant, et il était monté à 20 byggs. Donc, cela signifie qu’un Barr pesait environ 500 grammes.

« Whoa, c’est un prix fou, » chuchota Yuuto à son grand étonnement. « Et c’est juste pour quelque chose comme ça... » Il avait tapé un ongle avec un tintement contre le verre se trouvant devant lui.

Soit dit en passant, le travail manuel moyen des roturiers recevait un salaire équivalent à environ deux byggs d’argent pour un mois de travail.

« Si tu veux mon avis, “Juste pour quelque chose comme ça” est une façon assez dure de l’estimer. Il nous a fallu beaucoup de travail pour en arriver là où nous pouvions faire “quelque chose comme ça”, tu sais, » assise en face de Yuuto, une fille aux cheveux roux avait gonflé ses joues en signe d’insatisfaction.

La fille s’appelait Ingrid. Comme Yuuto, elle n’était qu’au milieu de son adolescence, mais elle était une Einherjar avec la rune Ívaldi, l’Enfanteuse de Lames, et un génie pour produire les choses.

Étriers, roues hydrauliques, papier, et bien plus encore...

Lorsque Yuuto avait utilisé les informations obtenues à l’aide de son smartphone pour trouver diverses idées et inventions, il n’était pas exagéré de dire que c’était grâce à Ingrid chaque fois qu’il était capable de construire et produire chacun d’entre eux.

Si Yuuto était l’acteur vedette, le personnage principal qui avait publiquement reconstruit le petit et faible Clan du Loup et vaincu tous ses voisins hostiles, alors cette fille était son meilleur acteur de soutien, et le rôle principal en coulisses.

« En outre, ils devraient être en mesure de faire plus qu’assez de profit même s’ils les achètent à ce prix, » déclara Ingrid. « S’ils les emmènent à Glaðsheimr, la Capitale Impériale, les personnes de la famille impériale et de la classe supérieure seront prêtes à payer plusieurs fois ce prix. Après tout, dans tout Yggdrasil, Iárnviðr est le seul endroit où tu peux les trouver. Ce sont clairement les biens les plus rares au monde. »

Ingrid parlait avec confiance, gonflant sa poitrine de taille moyenne avec fierté.

On disait que le verre avait ses origines vers 3000 av. J.-C., et même à Yggdrasil, on en connaissait déjà l’existence.

Cependant, la façon commune de produire du verre à Yggdrasil était assez primitive. Après la construction d’un moule de coulée principalement en sable, le verre fondu était coulé directement dans le moule.

Les pièces de verre ainsi formées étaient principalement utilisées par les riches et les nobles comme objets d’art décoratifs de luxe, et rien de plus.

« Il devait également y avoir une méthode précoce de fabrication du verre appelée “verre sur noyau” qui s’est développé en Mésopotamie vers 1550 avant J.-C., bien que..., » Yuuto murmura cela à lui-même.

Yggdrasil était quelque part à la fin de l’âge du bronze sur le plan de civilisation et de technologie, donc les époques devraient théoriquement s’aligner, mais il semblait que la technique de fabrication du verre sur noyau était encore inconnue ici.

Bien sûr, ça ne disait pas grand-chose. À titre d’exemple, la fabrication de la soie était originaire de Chine vers 3000 av. J.-C., mais la technique n’avait atteint l’Occident qu’au VIe siècle après J.-C., soit 3600 ans plus tard.

C’était un monde sans téléphone ni Internet. Il n’était pas rare qu’une technique ou une invention utilisée depuis longtemps dans une région soit presque totalement inconnue dans une autre région depuis des centaines ou des milliers d’années.

Il avait été dit que les pièces de verre créées par la méthode de formation par noyau avaient autrefois été traitées comme des objets de valeur égale à celle de l’argent et de l’or. Et il y a quelques instants, ces marchands avaient en effet attribué autant de valeur à des objets en verre aussi simples que la coupe devant Yuuto maintenant.

 

 

« Tu parles d’un massacre, » murmura-t-il.

La technique de fabrication du verre que Yuuto avait introduite était le soufflage du verre, établi dans la seconde moitié du Ier siècle avant J.-C., 1 500 ans après la formation du noyau.

En attachant un morceau de verre fondu appelé « manchon initial » à une extrémité d’un mince tuyau de fer et en soufflant dedans, on pourrait faire prendre de l’expansion et former le verre comme on le voulait. C’était une technique encore utilisée au 21e siècle.

Grâce à l’avènement de cette méthode, il était maintenant possible de produire un plus grand volume de produits verriers et de le faire à moindre coût.

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4 commentaires :

  1. Merci pour le chapitre.

  2. Merci pour le chapitre !!

  3. Merci pour le chapitre !

  4. Merci pour le chap ^^

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