Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 4 – Chapitre 2

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Acte 2

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Acte 2

Partie 1

Le même soir, un rassemblement de personnalités assez importantes avait lieu dans une salle du palais à Iárnviðr.

Il y avait le commandant en second Jörgen, l’officier supérieur du Clan du Loup.

Félicia, l’adjudante de Yuuto et sa petite sœur.

Ingrid, chef de l’atelier de Mótsognir, qui le mois dernier s’était hissée au septième rang du clan.

Sigrun, capitaine de la garde personnelle de Yuuto, qui était également passé le mois dernier du quinzième au huitième rang, une promotion extraordinaire.

Les sœurs jumelles Albertina et Kristina qui n’étaient pas aussi hautes en grade. Mais elles étaient quand même encore hautes dans la hiérarchie en tant que princesses du Clan de la Griffe voisin.

Linéa, patriarche du Clan de la Corne voisin, qui avait choisi de rester à Iárnviðr après la Cérémonie du Calice des jumelles afin d’observer le style de gouvernement de Yuuto.

Et enfin...

« Pourquoi... Pourquoi ? Pourquoi Éphy est-elle ici... !? »

L’esclave Éphelia, qui était très nerveuse à l’idée qu’elle n’était pas à sa place tremblait et était au bord des larmes, était également là.

D’une certaine façon, sa réaction avait été parfaitement naturelle.

De son point de vue, toutes ces personnes étaient tellement au-dessus d’elle qu’elles pourraient aussi bien vivre dans un monde différent.

« D’après ce que j’ai entendu, Père a pris goût à toi l’autre jour. » Jörgen avait fait un grand sourire à Éphelia. « Si c’est le cas, tu as tout autant le droit d’être ici. »

Son visage féroce portait des cicatrices sur le front et les joues. Pour un enfant de seulement dix ans comme Éphelia, le sourire de Jörgen ne rendait pas son visage moins effrayant.

Linéa se tendit légèrement et fixa son regard sur Éphelia, la regardant de près. « Grand Frère... a pris goût à toi ? »

« Ah... argh..., » Éphelia était devenue encore plus pitoyable et effrayée, alors que son corps tremblait tellement qu’elle avait l’air d’avoir des convulsions.

Juste au moment où il semblait qu’elle avait dépassé sa limite mentale et qu’elle risquait de s’évanouir en raison du stress...

« Bon sang, » Ingrid poussa un soupir exaspéré, se grattant l’arrière de la tête d’une main, et utilisa l’autre pour hisser Éphelia par le col.

« Hwah!? »

« Calme-toi, d’accord ? » Ingrid avait placé Éphelia sur ses genoux et la serra dans ses bras. Ingrid avait une façon brutale et énergique de parler, mais c’était le genre de fille qui prenait soin des autres.

« C’est vrai, tu n’as pas à t’inquiéter. Tu vois ? » En tapotant Éphelia sur la tête, Félicia fredonna un air calme et doux.

« Ah... D’accord..., » Éphelia découvrit rapidement que les sentiments effrayants avaient mystérieusement disparu de son cœur et que ses frissons s’étaient arrêtés.

Le toucher de la peau humaine et le son des battements du cœur d’une personne étaient bien connus pour leurs effets calmants. Cela rappelait peut-être aussi le sentiment de l’étreinte de sa propre mère. Les effets du galldr de Félicia avaient sûrement aussi joué un rôle.

Malgré cela, la situation n’en était pas moins accablante pour Éphelia, et elle était maintenant douce comme un agneau, s’accrochant fermement à Ingrid.

Cela semblait tirer sur les cordes sensibles d’Ingrid, et une expression ravie la submergea alors qu’elle serrait encore plus fort Éphelia, chuchotant à elle-même.

« Ohh... les petits enfants sont vraiment si mignons. Un jour, lui et moi... »

« Nnn..., » le fait d’être serrée si fort était un peu douloureux, mais Éphelia pouvait aussi sentir l’affection qu’Ingrid lui témoignait et se trouvait incapable d’opposer une quelconque résistance. Elle avait fait un petit gémissement, mais rien de plus.

Quand la pièce s’était calmée, Jörgen s’était levé. Il commença par se tourner vers sa gauche et s’inclina devant Linéa, qui s’était assise à la tête de la table.

« Tante Linéa, je dois d’abord m’excuser et vous demandez pardon pour vous avoir si impudemment convoquée ici de mon plein gré, » déclara Jörgen.

« Non, ça ne me dérange pas du tout, » déclara-t-elle. « Le Clan du Loup et le Clan de la Corne sont une famille maintenant. Je suis reconnaissante d’avoir l’occasion d’interagir et d’approfondir mes liens avec mes nièces et mes neveux de cette façon. »

« C’est un grand soulagement que d’entendre cela, » après avoir salué encore une fois Linéa, Jörgen se tourna vers les autres filles assises et rencontra tour à tour chacune de leurs yeux, avant de déclarer d’un ton grave : « Il n’y a qu’une seule raison pour laquelle je vous ai tous appelés ici si tard dans la nuit. C’est au sujet de Père. »

« ... ! » Chaque personne assise à la table s’était tendue, et leur visage était devenu instantanément plus inquiet.

Dans le monde d’Yggdrasil, les relations formées par le Serment du Calice étaient spéciales. On ne pouvait pas choisir les parents dont vous étiez issus, mais ils pouvaient choisir le parent auquel ils avaient prêté serment. Et, parce que ce choix avait été fait de plein gré, on s’attendait à ce qu’ils soient totalement loyaux, corps et âme, envers leur parent assermenté ou leur frère ou sœur plus âgés.

Bien sûr, c’était juste le concept officiel. C’était la forme qu’il fallait donner aux choses, du point de vue de la société. Ce n’était pas comme si toutes les relations formées par le Serment du Calice étaient à la hauteur de cet idéal, il était assez courant pour le gain, la perte et l’effet de levier de jouer un rôle dans les affaires du calice, avant et après que les serments aient été échangés. Cependant, dans tous les cas, chaque personne présente à cette table avait une certaine loyauté et affection pour Yuuto.

Le fait qu’ils aient tous été délibérément réunis ici pour discuter de Yuuto avait été plus que suffisant pour qu’ils traitent cette affaire comme une affaire sérieuse.

« Père possède une grande variété de connaissances venant d’au-delà des cieux, et a fait preuve d’une grande ingéniosité tant dans les affaires d’État que militaire, mais il n’est ni arrogant ni hautain, » dit Jörgen. « C’est le genre de personne qui travaille continuellement à tempérer ses propres capacités par un travail acharné. De plus, il est tolérant et aimable par nature, et pourtant, quand la situation l’exige, il fait preuve d’une volonté résolue plus grande que celle de quiconque, et nous guide tous sur la bonne voie. Je dirais qu’il est sans défaut, qu’il est clairement né pour être un dirigeant. Personne ici ne nierait que la prospérité que nous connaissons aujourd’hui au sein du Clan du Loup est entièrement due au Père. »

Face à ces mots, tous les autres hochèrent la tête profondément.

Aucun d’entre eux n’aurait pu le nier, car presque tous étaient pleinement conscients que, si ce jeune homme n’était pas arrivé à Yggdrasil quand il l’avait fait, le Clan du Loup aurait depuis longtemps disparu de ce monde. (Éphelia et Albertina étaient les deux exceptions.)

« Le père ne montre aucun signe d’abus de son pouvoir et de son statut pour s’engager dans des réjouissances oisives et passe chaque jour à s’appliquer pleinement à ses tâches, » poursuivit Jörgen. « J’ai entendu dire que, l’autre jour, ces efforts ont une fois de plus porté leurs fruits. Sous la direction de Père, je n’ai aucun doute que le Clan du Loup poursuivra sûrement son chemin de croissance et de développement. Cependant, je suis aussi inquiet... personnellement, je me demande si Père ne travaille pas trop fort. »

Le front de Jörgen se plissa en sillons, et avec une expression grave, il continua.

« Cela fera bientôt un an et demi que Père est devenu patriarche. Le fait qu’il se pousse constamment pour le bien de notre clan et de son peuple me laisse profondément humble, mais tout cela sera pour rien s’il ruine sa santé à cause de cela. En fin de compte, nous, du Clan du Loup, ne pouvons exister sans lui. »

Les paroles de Jörgen n’étaient pas de la simple flatterie ou de l’humilité, mais ils exprimaient directement ses véritables sentiments.

Dans le cadre de son rôle de commandant en second, il avait servi en tant que patriarche par intérim en l’absence de Yuuto à de nombreuses reprises. S’il arrivait quelque chose à Yuuto, il était le premier dans la lignée de la succession.

Jörgen lui-même était une figure respectable qui avait gravi les échelons jusqu’à son poste actuel grâce à ses propres compétences et efforts. Il n’avait pas été sans ses propres aspirations de devenir un jour chef du clan.

Cependant, ayant vécu jusqu’à l’âge de quarante ans, il avait commencé à mieux comprendre ses propres forces et limites. Il n’était pas assez prétentieux pour penser qu’il remplacerait Yuuto de la même façon.

« Et donc, je suis d’avis que nous devrions faire en sorte que Père puisse se détendre et s’amuser de temps en temps, » poursuit l’homme. « Bien qu’il soit vrai que tout le monde est occupé à cause de notre manque actuel de personnel, en même temps, il n’y a pas de questions urgentes qui requièrent le commandement direct du Père. Rassurez-vous, je peux gérer les choses ici pendant quatre ou cinq jours. »

Jörgen frappa une main contre sa poitrine avec insistance.

En temps de guerre, on lui avait confié la tâche de rester derrière pour protéger et diriger la ville pendant que Yuuto s’en allait avec l’armée, et il s’acquittait donc seul de ses tâches administratives pendant des semaines, voire des mois. Il était persuadé qu’il pouvait tenir le coup sans problème pendant quelques jours.

Sigrun leva la main et prit la parole. « Je suis tout à fait d’accord pour que Père fasse une pause pour se reposer et se détendre, mais qu’est-ce que vous voulez que je fasse, exactement ? »

Sigrun n’avait aucune connaissance de la politique ou de l’administration.

Elle était plus que disposée à faire n’importe quoi pour rendre son père assermenté heureux, mais comme elle n’avait passé sa vie qu’à s’entraîner aux arts martiaux, elle ne voyait malheureusement pas comment elle pourrait être utile.

« Elle a raison, je veux voir Yuuu — je veux dire, Père, se reposer, mais si je devais m’occuper d’une partie de son travail, c’est... vous savez, je ne sais pas ce que je pourrais faire à ce sujet. » Ingrid, qui ne connaissait le travail qu’en tant qu’artisan à qui elle se consacrait, était également mal à l’aise.

Jörgen avait rejeté leurs préoccupations avec un rire chaleureux.

« Ha ha ha ha ha, vous n’avez pas à vous inquiéter pour ça. Comme je viens de le dire, je vais m’occuper de tout seul. J’aimerais que vous fassiez tous autre chose, » déclara Jörgen.

« Quelque chose d’autre, vous dites ? » répète Félicia avec interrogation.

« Père est un homme sérieux avec un sens aigu des responsabilités, » déclara Jörgen. « Tant qu’il sera ici à Iárnviðr, il se souviendra sûrement d’une tâche importante ou d’une autre, et ne se permettra pas de vraiment se reposer et d’oublier le travail. C’est pourquoi j’ai l’intention de lui faire faire un voyage à la base du mont Surtsey, pour qu’il s’y détende. Les feuilles d’automne devraient y être à leur plus belle époque de l’année. Et... Je suis sûr que Père s’amuserait encore plus s’il y avait aussi de belles fleurs. N’est-ce pas le cas ? »

À cette dernière ligne, Jörgen avait fait aux filles un regard significatif.

Jörgen avait l’air d’un homme coriace au visage abîmé, mais il n’était ni simple ni asocial. En fait, avec trois épouses et huit enfants, il était la personne la plus versée et la plus expérimentée en ce qui concerne les subtilités des relations entre hommes et femmes.

Jörgen s’arrêta un moment, regarda à nouveau chacune des filles à tour de rôle, puis porta le coup de grâce.

« Je pense que cette proposition fonctionnerait aussi en votre faveur. Normalement, le Père est toujours occupé par ses devoirs, mais lors d’un voyage dans un environnement nouveau et inconnu, il sera capable d’oublier ses responsabilités et de devenir beaucoup plus libre dans son cœur. Ne pensez-vous pas que ce serait l’occasion parfaite de devenir plus intime avec lui ? » demanda Jörgen.

En un instant, le regard de plusieurs des filles présentes dans cette pièce avait complètement changé.

En effet, elles étaient toutes devenues des louves.

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Partie 2

Entre-temps...

« Quoi ? » Il y avait eu un cri soudain venant du haut-parleur du smartphone.

« Hein ? Qu’est-ce qui ne va pas, Mitsuki ? » demanda Yuuto, légèrement paniqué.

La puissance du signal reçu par son téléphone avait été considérablement influencée par la phase actuelle de la lune. Ce n’était que quelques nuits après la nouvelle lune, et Yuuto avait donc gravi les marches de la Hliðskjálf, la tour sacrée du Clan du Loup, jusqu’à la pièce du sanctuaire, ou hörgr, à son sommet.

Du coin de l’œil, Yuuto pouvait voir un membre familier de la garde de son palais se tenir immobile et tranquille sur le côté. Apparemment, Félicia et Sigrun avaient été convoquées par Jörgen à une sorte de réunion, et cet homme les remplaçait.

Il faisait déjà bien tard dans la deuxième moitié de l’automne, et dans des endroits dans les montagnes comme Iárnviðr, les nuits étaient très froides. Yuuto se sentait coupable d’avoir fait en sorte que d’autres personnes le suivent dans ce froid pour quelque chose d’aussi égoïste.

« Ah, n-non, désolé, Yuu-kun. Il n’y a rien qui cloche. C’est juste que j’ai senti ce froid étrange me couler dans le dos. Je me demande ce que c’était ? » Mitsuki s’était calmée.

Yuuto pouvait facilement l’imaginer maintenant, la tête inclinée sur le côté, perplexe.

« Es-tu sûre que tu n’as pas attrapé un rhume ou un truc dans le genre ? » dit Yuuto en riant un peu. « Veille bien sur ta santé. Il fait déjà assez froid là-bas aussi, non ? »

« Hmm, je n’ai pas vraiment l’impression que c’est cela... Yuu-kun, fais attention aussi, d’accord ? »

« Ah, ça va aller. Je m’assure de m’habiller chaudement, » répondit Yuuto.

« Euh, ce n’est pas vraiment ce que je veux dire... fais juste attention. »

« C’est vrai, je sais. Je ferai attention. »

Il n’était pas sûr de ce à quoi il était censé faire attention, mais il l’avait quand même dit, acquiesçant de la tête.

Comme toujours, elle est si inquiète, Yuuto s’était dit avec un sourire ironique, mais en réalité, il avait en vérité fait tant de choses qui allaient l’inquiéter encore et encore, alors il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir pour cela.

Pourtant, cette fois au moins, il pensait que Mitsuki s’inquiétait pour rien.

« Ne t’inquiète pas pour moi, » déclara-t-il. « C’est vrai qu’on ne sait jamais ce qui va se passer ici, mais pour l’instant, c’est calme. »

« Argh... Je ne sais pas pourquoi, mais cela m’a rendue encore plus anxieuse, » la voix de Mitsuki, venant du haut-parleur, semblait troublée.

En effet, c’était exactement comme Yuuto l’avait dit : Iárnviðr, les choses étaient occupées et trépidantes, mais c’était paisible.

 

 

Cependant, il y avait eu aussi des incidents qui ne pouvaient se produire qu’en temps de paix.

L’intuition d’une femme était vraiment une chose redoutable.

Plusieurs jours s’étaient écoulés sans incident, et le mouton sans méfiance — Yuuto Suoh — s’était retrouvé au sommet d’un cheval.

Yuuto n’était pas encore assez habile pour monter seul, alors il était assis derrière Félicia. 

Le mont Surtsey, où ils se dirigeaient, n’était pas une région très développée, donc les routes n’étaient pas bien entretenues. La calèche qu’ils utilisaient normalement pour voyager aurait pris deux jours, mais en voyageant directement à cheval, ils pourraient y arriver avant le coucher du soleil aujourd’hui.

Il était extrêmement important de pouvoir réduire de deux jours le temps de déplacement lorsque les choses étaient aussi occupées comme elles l’étaient dernièrement.

« Pourtant, même si je suis très occupé, j’aurais vraiment dû prendre le temps de pratiquer l’équitation..., » Yuuto grogna en levant les yeux vers le ciel bleu et clair, temps rare pour cette fin d’automne.

Un souverain devait projeter une image de force physique à ses sujets à tout moment, quelle que soit la vraie vérité. Si la personne responsable était perçue comme faible, son règne ne serait pas aussi efficace.

L’opinion de Machiavelli sur le sujet, telle qu’énoncée dans Le Prince, était : « Un prince doit se méfier, strictement et avant tout, d’être méprisé ou dénigré. »

Yuuto trouvait pathétique que toutes les filles qui l’accompagnaient manipulassent très bien leurs chevaux, et pourtant il ne savait pas encore monter à cheval. Il avait estimé que c’était exactement le genre d’affichage honteux qui conduirait les gens à le mépriser.

Bien sûr, la vérité était que voyager avec un si grand groupe de belles jeunes filles avec lui, l’une d’elles assise avec lui sur son cheval, projetait une image d’une telle force que ses propres sujets tremblaient devant sa puissance, mais il n’avait aucun moyen de savoir cela.

Mais Yuuto et ses grognements furent immédiatement réprimandés par Félicia, ainsi que par Sigrun, qui était à leurs côtés.

« Oh, franchement, Grand Frère ! » déclara Félicia gaiement. « Ne nous inquiétons pas de telles choses aujourd’hui. »

« Elle a raison, Père, » Sigrun avait acquiescé. « Au moins pour la durée de ce voyage, oubli ces soucis formels et détends-toi. »

L’objectif déclaré de ce voyage était que le Yuuto, normalement surchargé de travail, ait la chance de se reposer et de se détendre.

Lorsqu’ils lui avaient proposé l’idée pour la première fois, Yuuto avait refusé en disant : « Je ne peux pas prendre des vacances pendant que tout le monde est si occupé. » Mais avec son commandant en second, l’assistant du second, le chef des anciens du clan et tous ses subordonnés de confiance d’Einherjar le suppliant de « faites une pause cette fois-ci », même un souverain invaincu dans la guerre comme Yuuto s’était trouvé forcé d’admettre sa défaite.

« Je suis vraiment un bâtard chanceux, d’avoir des sujets aussi loyaux et dévoués dans ma famille, » murmura Yuuto d’un soupir ironique, mais c’était une ironie teintée de vérité.

Maintenant qu’il avait l’occasion d’y réfléchir, depuis qu’il était devenu patriarche, c’était un flot continu de crises et d’incertitudes. Il avait passé chaque jour à travailler sans vraiment avoir eu la chance de prendre des vacances.

Le fil bien tendu se coupe facilement, comme le dit l’adage. Il devrait probablement y aller doucement et se détendre de temps en temps.

Yuuto se sentait un peu coupable d’avoir fait en sorte que ses subordonnés s’inquiètent tellement pour lui, et en même temps, il sentait une grande chaleur dans son cœur qu’ils pensaient tous tellement à lui.

« Eh bien, je suppose que je vais accepter leur gentillesse cette fois-ci et m’amuser. » Yuuto avait profité de l’agréable sensation du vent frais de l’automne contre son visage, et du paysage qui passait.

Voyager à cheval sur la route était très différent de l’expérience de l’équitation en calèche.

D’abord et avant tout, il y avait le mouvement du dos du cheval sous lui, l’impression qu’il était au sommet d’une chose vivante. Il sentait clairement non seulement les pas du cheval, mais aussi de petits mouvements comme le balancement de la tête ou l’ondulation de la queue. Ce genre de sensation aurait été impossible à vivre en calèche.

La hauteur de son point de vue était également radicalement différente. Le paysage environnant lui paraissait différent et nouveau.

En regardant tout cela, je me rends compte qu’une grande partie du « paysage naturel » du Japon est assez artificiel, pensa Yuuto.

Même les lieux appelés « parcs naturels » dans son pays étaient des endroits où les arbres étaient plantés en privilégiant la beauté visuelle, avec des cerisiers en fleurs au printemps et des feuilles d’érable colorées à l’automne.

La petite ville où Yuuto avait grandi était entourée de montagnes, mais tous les arbres étaient des cèdres japonais, plantés pour leur cycle de croissance rapide et leur facilité d’utilisation dans les zones résidentielles.

En comparaison, la nature d’Yggdrasil était totalement intacte. Il y avait des roches et des cailloux éparpillés partout, et la diversité de la vie végétale grandissait au hasard, d’une manière qui paraissait beaucoup moins belle que la nature du Japon.

Mais c’était vraiment naturel.

Pendant un bon moment, Yuuto se laissa simplement absorber par la majesté de ce paysage.

***

Partie 3

Le mont Surtsey était un volcan en activité, situé au sud-est d’Iárnviðr. Le groupe de Yuuto avait réussi à arriver à la villa du patriarche au pied de la montagne avant le coucher du soleil.

Bien qu’on l’appelait une villa, elle était bien loin de l’ampleur du palais d’Iárnviðr — rien de plus qu’une simple, quoique légèrement grande, cabane ronde en bois, entre deux petits bâtiments de même fabrication.

À l’intérieur, il n’y avait que quelques lits, un bureau et des peaux de loup gris sur le sol à la place de la moquette.

Selon Jörgen, il avait été construit par le troisième patriarche du Clan du Loup comme lieu de cure thermale, à l’époque où le Clan du Loup contrôlait la majeure partie du territoire du bassin de Bifröst.

Le prédécesseur de Yuuto, Fárbauti, s’était également rendu là-bas à plusieurs reprises.

Il y avait un petit village de chasseurs à proximité qui vivaient de la vente de la viande et des peaux de cerfs et de sangliers qu’ils chassaient. Ils avaient été informés de la venue de Yuuto, et les femmes du village étaient donc venues et elles avaient nettoyé l’endroit de fond en comble.

Pour Yuuto, c’était un endroit parfaitement confortable pour passer les deux prochains jours.

Dès que Yuuto était entré dans le bâtiment, il s’était dirigé droit vers le lit et s’était précipité, avant de s’écraser face contre le lit. « Ouf ! Je suis si fatigué... »

Monter à cheval et se faire tirer par l’un d’eux en étant dans une calèche étaient des expériences complètement différentes, bien qu’ils puissent avoir le cheval en commun. L’équitation était un sport officiel en soi, après tout. Dans le Japon actuel, il y avait des machines d’exercice électroniques qui simulaient l’équitation vendue dans le cadre de la perte de poids, en raison du fait qu’elles faisaient beaucoup travailler les muscles du corps pour maintenir son équilibre tout en faisant de l’équitation.

La raison pour laquelle Yuuto était allongé, face contre le lit, c’était que ses fesses lui faisaient mal après avoir fait un si long voyage à cheval.

Pourtant, il avait pris de fréquentes pauses et s’était assuré d’appliquer au préalable une pommade à base d’huile de cheval sur ses cuisses, ce qui lui avait heureusement épargné la douleur des cuisses irritées. Il s’agissait là d’une réalisation importante en soi.

Il venait ici pour un bain curatif dans les sources chaudes, donc ça n’aurait pas été drôle s’il était arrivé avec des cuisses irritées, incapable d’aller dans l’eau chaude.

Félicia avait rapidement ouvert leurs bagages et s’était approchée de lui avec une grande serviette en tissu. « Grand Frère, que dirais-tu d’entrer tout de suite dans les sources chaudes, pour guérir une partie de la fatigue de ton voyage ? »

Yuuto avait envie de dormir comme un rocher là où il était, mais il se sentait aussi mal à l’aise d’être trempé de sueur jusqu’à ses sous-vêtements.

« Oui, je pense que je vais le faire, » Yuuto avait forcé son corps fatigué à se relever.

Comme les filles étaient plus nombreuses que lui, il se sentait un peu mal d’utiliser les bains avant elles. Mais, se mettant à leur place, elles ne se sentaient pas vraiment à l’aise en tant que subordonnées avec l’idée d’aller avant leur patriarche, et même si elles le faisaient, elles ne pourraient sûrement pas prendre leur temps et s’amuser.

En tant que supérieur, la chose à faire dans cette situation serait de se dépêcher en allant se baigner rapidement, pour que les autres puissent utiliser les bains sans se soucier de rien.

« Alors, d’accord, » déclara-t-il. « J’espère que ça ne te dérange pas, mais je vais commencer. Vas-y, dis-le aux autres de ma part. »

Il voulait éviter à tout prix toute situation où lui et les filles se croiseraient dans les bains.

En tant qu’homme, ce n’était pas comme s’il n’avait jamais fantasmé sur ce genre de situation, mais le simple fait que Mitsuki le découvre ne lui avait pas seulement donné froid dans le dos, mais cela lui avait aussi donné des maux de ventre.

Certes, il y a environ deux mois, dans le palais du Clan de la Corne, il avait fini par devoir entrer dans le bain avec Félicia et Sigrun pour des raisons de sécurité alors qu’il se trouvait dans une nation étrangère. Mais il était sur le territoire du Clan du Loup en ce moment.

Yuuto avait pris la serviette de Félicia et l’avait déroulée rapidement avec un clin d’œil satisfaisant, avant de la mettre sur son épaule. Il s’était ensuite dirigé vers l’extérieur, vers les sources chaudes situées à l’arrière du bâtiment.

« Ahhh, voilà comment on apprécie la nature, » murmura-t-il en appréciant le paysage.

Il y avait un ruisseau de montagne clair et profond qui coulait avec une profondeur qui allait jusqu’aux genoux, et derrière lui s’étendait une étendue luxuriante d’arbres, avec certains d’entre eux qui présentaient des feuilles tachées d’un beau rouge.

Il y avait des rochers éparpillés le long de la rive de la rivière et, dans un secteur, il y avait une falaise, en dessous de laquelle Yuuto pouvait voir la vapeur blanche monter. Ce n’était pas si différent d’un bassin d’eau normal, mais ça devait être les sources chaudes. D’un côté, il y avait une petite structure en forme de pavillon, qui servait probablement à la fois d’abri contre les éléments et de vestiaire.

« Joli ! » Yuuto avait immédiatement pris goût à cet endroit, et malgré la fatigue qu’il ressentait, il avait trouvé que ses pas s’allégeaient en entrant dans le pavillon.

Avec excitation, il s’était rapidement déshabillé et avait mis sa main dans l’eau pour le tester. C’était peut-être un peu trop chaud à son goût, mais pas au point qu’il ne pouvait pas le supporter.

Dans le Japon moderne de Yuuto, les stations thermales et les hôtels affichaient la température de l’eau sur un écran. D’après son expérience de ces endroits, cette eau était probablement à environ 42 degrés Celsius. S’il entrait et qu’il laissait son corps s’y habituer, la température allait être excellente pour un bain d’eau chaude.

« Whoa, c’est chaud ! » Yuuto avait utilisé un seau qu’il avait trouvé dans le pavillon pour se laver la sueur avec de l’eau chaude, puis il avait marché lentement dans la piscine et s’était abaissé.

« Whewee, c’est le paradis..., » s’exclama Yuuto.

Il y avait un rocher de forme très pratique à proximité, alors Yuuto s’était appuyé contre lui et avait pris une grande respiration.

C’était comme si toute sa fatigue se dissipait dans l’eau chaude de la source.

Et contempler la majesté de la nature lui donnait un sentiment de paix. Il sentait son cœur s’alléger, libéré des pressions constantes de son devoir de patriarche.

Je suis vraiment content d’être venu ici, se dit Yuuto.

Et alors qu’il l’avait fait...

« Wooow, des sources chaudes, des sourccccess chaudeeees ! » s’exclama Albertina.

« Al, s’il te plaît, ne court pas comme une petite enfant, » déclara Kristina.

« N-Ne dis pas ça, Kris, je ne suis pas une enfant ! » s’exclama Albertina.

« Eh bien, voyons voir, la dernière fois que tu as fait pipi au lit, c’était..., » déclara Kristina.

« Awawawa, qu’est-ce que tu dis tout d’un coup ? Qu’est-ce que tu dis !? » s’écria Albertina.

« Et au fait, ce bruit de ruissellement que j’ai entendu tout à l’heure..., » déclara Kristina.

« C-Ce n’était pas moi, d’accord ? Je ne l’ai pas fait ! » s’écria Albertina.

« Oh, je parlais seulement du son du ruisseau. Mais tu as l’air un peu sur la défensive, là. Quelque chose t’est-il venu à l’esprit ? » demanda Kristina.

« N-non non non non non, rien ! Je ne me suis pas pissée dessus depuis une éternité ! » déclara Albertina.

« Je suppose que c’est vrai, même pour quelqu’un comme toi, Al. Tu n’es pas si bébé que ça, » déclara Kristina.

« Uh huh, c’est vrai, » déclara Albertina.

« Tu étais juste un peu nerveuse la première fois que tu as rencontré Père, non ? » demanda Kristina.

« Ne parle pas de ça quand il est juste devant nous ! » déclara Albertina.

Deux voix familières avaient sorti Yuuto de son état d’esprit rêveur et l’avaient ramené à la réalité.

Tandis qu’il se tournait frénétiquement vers les voix, il voyait les jeunes jumelles, badinant comme toujours l’une avec l’autre.

« Pourquoi êtes-vous venues ici toutes les deux ? » Yuuto éleva la voix pour les interroger, mais Kristina le regarda d’un air vide.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? On était juste à côté de toi tout ce temps, » déclara Kristina.

« Quoi, vraiment !? » Yuuto n’avait rien remarqué du tout.

Bien sûr, c’était parfaitement compréhensible. Toutes les deux étaient inégalées au sein du Clan du Loup pour leur art de dissimuler leur présence. Yuuto n’était pas meilleur qu’un amateur en ce qui concerne les arts martiaux, donc il n’avait aucun moyen de les percevoir.

« Oui, et nous avons eu un regard ample, approfondi et complet sur toi, » avait souri Kristina.

« Ouais, j’étais tellement surprise que le sien soit bien plus grand que celui de notre père ! » déclara Albertina.

« En effet, et considérant que celui de notre père est beaucoup plus grand que celui de l’homme moyen... Comme on s’y attendait du célèbre et infâme Loup, Hróðvitnir ! Tu dois me faire gémir de plaisir tous les soirs, » déclara Kristina.

« Ne pars pas comme ça en crachant des rumeurs nuisibles comme ça ! » Yuuto cria, et bien qu’il savait qu’il était déjà trop tard, il se couvrit instinctivement l’entrejambe de ses mains.

Son visage était insupportablement chaud. Même s’ils n’étaient que des enfants, être vus nus par quelqu’un du sexe opposé comme ça était embarrassant. Il s’était mis en colère dirigeant une seule main vers les deux jumelles.

« S-Sortez d’ici pour l’instant. Ce voyage est censé être pour que je puisse me détendre, alors laissez-moi au moins me baigner en paix pendant un moment. Tant que vous êtes là, je ne pourrais pas me détendre même si je le voulais, » déclara Yuuto.

« Ça ne suffit pas, » insista Kristina. « Après tout, nous sommes censées vous protéger. »

« Je n’en ai pas besoin. Il n’y a pas de bandits par ici, » Yuuto cracha les mots, devenant de plus en plus irrité.

Les sources chaudes étaient entourées dans trois de ses quatre directions par les bâtiments de la villa, et bloquées par un mur de roche sur la quatrième. Les bâtiments avaient été construits dans le but de défendre facilement le bain curatif personnel du patriarche. Et les guerrières vétéranes Einherjar de Yuuto étaient actuellement dans ces bâtiments. Ce n’était vraiment pas un endroit où les criminels pouvaient se faufiler.

C’était exactement ainsi que Jörgen lui avait recommandé l’endroit en disant : « Vous n’aurez pas peur d’être accosté par des bandits dans cet endroit. Vous pourrez profiter pleinement des sources chaudes sans aucun souci. »

« Il est vrai que je doute que des bandits nous attaquent ici, mais il y a des cerfs sauvages et des singes dans les bois qui viennent parfois ici, alors le commandant en second nous a dit de veiller à te protéger avec vigilance, Père, » déclara Kristina.

« Qu’est-ce que... !? » Les yeux de Yuuto s’étaient écarquillés. C’était la première fois qu’il en entendait parler. « Mais ce n’est pas comme si vous pouviez faire quoi que ce soit contre les animaux sauvages. » Yuuto avait saisi ce qui semblait être une opportunité. « Allez appeler Run ou quelqu’un d’autre à la place. »

Kristina n’était pas douée au combat, et bien qu’Albertina soit une maîtresse des techniques d’assassinat qui pouvait aller encore plus vite que Sigrun, elle n’avait pas la force pure nécessaire pour combattre les bêtes sauvages.

Utilisant cela comme excuse, il les envoyait chercher quelqu’un d’autre, puis il en profitait pour se dépêcher et remettre ses vêtements.

En réagissant à une situation aussi imprévue avec une telle rapidité d’esprit, il aurait aimé pouvoir dire qu’il avait été à la hauteur de sa réputation de stratège invaincu, mais il avait dû admettre que Kristina était un niveau au-dessus de lui, considérant que la petite diablesse avait soigneusement réussi à le mettre dans un tel piège dès le départ.

Pourtant, tout irait bien maintenant.

« Tu as raison. Et c’est pourquoi tout le monde devrait arriver d’un moment à l’autre, » déclara Kristina.

« Hein... ? » Yuuto était abasourdi. « Tout le... monde ? »

« C’est vrai. Regarde. » Avec un sourire diabolique, Kristina se retourna et montra du doigt.

« Quoi... quoi... » Le regard de Yuuto avait suivi le doigt, et il avait été stupéfait.

Il était tellement absorbé par sa dispute avec Kristina qu’il n’avait pas remarquée, mais toutes les autres filles s’approchaient maintenant, les serviettes à la main !

« Tu m’as piégé, n’est-ce pas, Kris !? » cria-t-il.

« Qu’est-ce que tu racontes ? » demanda Kristina.

« Argh, petite renarde intrigante ! » Yuuto avait crié d’exaspération après sa fille assermentée, qui n’avait fait que sourire calmement en guise de réponse.

On disait que le grand général carthaginois Hannibal avait utilisé des tactiques astucieuses pour encercler et anéantir une force ennemie beaucoup plus importante lors de la bataille de Cannae, envoyant une énorme onde de choc dans la République romaine de l’époque.

 

 

Et pendant la période Sengoku au Japon, pendant la bataille d’Okitanawate, le clan Shimazu avait utilisé une tactique militaire désormais célèbre appelée « le pêcheur et le bandit » pour simuler et encercler une force plusieurs fois plus grande que la leur, avant de les battre.

Sur le champ de bataille, l’encerclement de ses ennemis leur conférait une incroyable supériorité tactique. C’était assez pour apporter la victoire à une force numériquement beaucoup plus faible.

En revanche, en ce moment, Yuuto était un homme seul entouré de sept femmes.

La situation sur son champ de bataille était, de l’avis général, tout à fait désespéré.

***

Partie 4

« C’est vraiment le paradis, » déclara Félicia en soupirant de plaisir. Elle reposait son dos contre l’un des rochers, avec juste ses jambes trempant dans les sources.

Alors qu’elle expirait, ses gros seins se balançaient légèrement. Malgré leur taille, ils étaient assez fermes pour que ses mamelons saillants soient légèrement inclinés vers le haut. Et avec sa taille serrée, sa silhouette attirait les regards envieux de toutes les filles présentes.

« Oui, c’est l’endroit parfait pour que Père puisse se reposer, » Sigrun se tenait au centre de la piscine, sa silhouette nue et bien tonique était entièrement exposée. Sa silhouette était serrée et musclée, mais toujours féminine et souple, rappelant celle d’un gros chat prédateur.

Elle tenait encore une épée à la main, ce qui la faisait ressembler encore plus à une déesse mythique, avec un air de dignité sacrée en elle.

« O-O-Oui, c’est vraiment génial, ouais ! » La réponse d’Ingrid avait été de crier d’une voix disproportionnellement forte et criarde, alors que son visage était rouge comme une pomme mûre.

Tout comme Félicia, elle se reposait contre un rocher, les pieds dans l’eau, mais peut-être par embarras, elle se couvrait fermement avec sa serviette. Pourtant, avec la moitié supérieure de ses seins exposés, et la ligne de sa taille fine, les courbes féminines de son corps étaient encore évidentes à voir.

« C’est la première fois que je visite une source chaude, mais c’est vraiment bien. Ahh..., » Linéa se tenait contre un rocher, y appuyant ses bras, avec le bas du corps dans la source, et laissant échapper des soupirs de plaisir.

L’expression sur son visage rougi semblait érotique. L’image de son dos élancé et de son derrière bien formé gigotait sous les ondulations de la vapeur de l’eau.

« Wheee, le vent est si doux ! » Albertina gloussa en courant par ici et par là, le long de la rivière.

Elle était aussi complètement nue.

Au moins, elle semblait en bonne santé et pleine d’énergie.

Kristina soupira. « Franchement, Al, un de ces jours, tu dois apprendre la modestie en tant que femme. » Alors qu’elle suivait sa sœur des yeux, elle poussa un soupir exaspéré.

Kristina était occupée à ramasser de l’eau avec ses deux mains et à la laisser retomber, encore et encore. Les ondulations créées par cela avaient réussi à dissimuler sa forme nue d’une manière qui ressemblait presque à une illusion magique.

Le fait d’être presque capable de voir, mais pas tout à fait, avait un effet étrangement fascinant.

« E-Est-ce qu’une esclave comme Éphy peut vraiment être autorisée à être dans un endroit aussi incroyable que celui-ci ? » Éphelia était assise dans la source, les genoux serrés, et tremblait nerveusement.

Elle avait initialement prévu de rester dans le pavillon et de garder les vêtements de tout le monde, mais Félicia et Ingrid avaient insisté pour qu’elle y entre aussi, et elle n’avait pas pu refuser leur demande.

Yuuto, quant à lui, était assis le dos tourné vers les filles, prisonnier d’une spirale interne de regrets. « J’aurais dû m’enfuir quand j’en avais l’occasion. »

Il ne pouvait pas se lever et sortir du bassin nu avec toutes ces filles qui le regardaient, et il s’était retrouvé assis là, attendant une ouverture pour s’échapper.

Selon la sagesse commune, la retraite était l’aspect le plus difficile d’une bataille. Une fois qu’un général s’était rendu compte que la situation était trop désavantageuse, il devait être prêt à accepter certaines pertes et à battre en retraite immédiatement.

C’est ainsi que se déroulait la logique, mais les gens avaient tendance à perdre la capacité d’agir de façon rationnelle et sans émotion lorsqu’ils étaient confrontés à une situation de crise réelle.

En ce sens, Oda Nobunaga avait vraiment été une figure incroyable. Pendant le siège de Kanegasaki en 1570 apr. J.-C., Nobunaga avait senti le danger que ses forces pourraient être prises dans une attaque en tenaille, et malgré le succès de la bataille jusqu’à présent en sa faveur, il avait rapidement ordonné une retraite.

« Mais comment aurais-je pu prédire ça... ? » Yuuto continua à se plaindre doucement.

De retour à Iárnviðr, il s’était assuré d’expliquer les choses à tout le monde à plusieurs reprises, et après cela, il avait pu prendre des bains seul sans avoir à dire quoi que ce soit en particulier.

L’incident des bains dans la capitale du Clan de la Corne n’avait été qu’une exception dans des circonstances d’urgence, et Yuuto s’était assuré que ses petites sœurs et filles le comprennent.

Yuuto était pleinement conscient de ses propres lacunes. C’est exactement pour cela qu’il avait choisi de faire confiance aux autres, en comptant sur eux pour l’aider.

Cette confiance sincère avait profondément marqué ses subordonnés, leur inspirant une profonde loyauté et la volonté de faire quelque chose pour lui.

C’était, en effet, la qualité rare appartenant à un vrai dirigeant et souverain. Mais surtout dans des moments comme celui-ci, cela avait eu des effets secondaires négatifs.

Souvent, les forces et les faiblesses d’une personne étaient les deux faces d’une même médaille. Yuuto n’avait jamais eu d’obsession particulière pour son propre pouvoir ou son autorité, et il avait donc été terriblement négligé quand il s’agissait de ses propres alliés.

« Père ? Au lieu de t’enfermer dans un coin comme ça, pourquoi ne pas venir te détendre un peu plus ? » Kristina l’avait appelé.

« Tu crois que je peux faire ça maintenant !? » s’écria Yuuto.

« Tout va bien, Père. Je t’assure que le tien est un spécimen splendide et extraordinaire, donc tu n’as pas à t’en inquiéter, » déclara Kristina.

« Change de sujet ! En fait, je suis ici depuis assez longtemps déjà ! Je m’en vais ! » Yuuto cria en colère sans regarder dans la direction de Kristina, et il était sorti de l’eau. À ce moment-là, il était assez en colère pour qu’il ne puisse plus se soucier si elles le voyaient nu une fois.

Les filles étaient arrivées justes après qu’il se soit déshabillé et qu’il se soit mis à l’eau, avec un drôle de minutage qui lui avait rendu la tâche de s’échapper très difficile. Et les deux premières d’entre elles avaient été les jumelles, les expertes en actions furtives. Rien que cela avait suffi à Yuuto pour comprendre que ce fût planifié.

Donc, même s’il avait attendu que la tempête passe, pour ainsi dire, il était peu probable qu’elles lui en donnent l’occasion. Il était clair que rester ici ne ferait qu’empirer les choses.

Sigrun et Félicia s’étaient déplacées, avec une rapidité incroyable, pour se tenir devant le vestiaire et bloquer le chemin.

« S’il te plaît, attends, Père, » déclara rapidement Sigrun. « Je n’ai pas pu te laver le dos pendant ce temps au palais du Clan de la Corne, alors je te supplie de me donner une autre chance ! »

« C’est exact, Grand Frère, » déclara Félicia. « Tu as accordé ce vœu à l’aînée Linéa la dernière fois, mais il est bien trop froid de ne pas accorder ce même privilège à celles d’entre nous qui font partie de ton propre clan. Je suis assez attristée que tu donnes l’impression d’avoir mis de la distance entre nous. »

Ni l’une ni l’autre ne faisaient d’efforts pour se couvrir.

Yuuto s’était retrouvé à tourner la tête vers la droite par embarras. Mais quand il avait fait cela, les silhouettes des autres filles qui se baignaient encore étaient entrées dans son champ de vision, alors il avait été forcé de fermer les yeux, et il ne pouvait plus bouger. Il avait finalement réalisé, trop tard, qu’il était en échec et mat.

Yuuto avait baissé la tête. « ... Très bien, faites ce que vous voulez. »

À ce stade, tout ce qu’il pouvait faire était de dire ces mots.

***

Partie 5

« ... Qu’est-ce que c’est que cette situation !? » Yuuto était hors de l’eau, assis sur un rocher de forme pratique, et complètement désemparé.

Ses yeux étaient encore fermés, il n’avait donc pas une bonne idée de la situation, mais il pouvait voir que les filles étaient entassées autour de lui en entendant le bruit de leur respiration.

« C’est le résultat d’innombrables discussions que nous avons eues, en tirant une leçon de l’échec du bain du Clan de la Corne, sur la façon dont tout le monde pouvait montrer correctement son dévouement envers toi, Grand Frère, » déclara Félicia.

« Pourquoi cette petite chose est-elle si importante pour vous ? » cria Yuuto d’une voix aiguë.

Un dicton populaire disait que les hommes venaient de Mars et les femmes de Vénus. Même à l’ère moderne du XXIe siècle, ce qui se passait dans la tête des femmes restait un mystère total pour les hommes.

Et en effet, il en était de même pour Yuuto à ce moment-là. Rien n’avait de sens pour lui.

« L’appeler “une petite chose”, c’est trop, » le réprimanda Félicia. « Je ne peux pas te permettre de dire ça, Grand Frère. Chacune d’entre nous t’est reconnaissante du fond du cœur, et nous souhaitons exprimer ce sentiment en te lavant le dos, mais jusqu’à présent nous n’avons pas été capables de le faire. Nous ne pouvions pas laisser passer une occasion aussi rare. »

« D’ailleurs, nous avons déterminé nos positions équitablement en tirant au sort, » déclara Kristina, en tenant le bras gauche de Yuuto. Il pouvait dire par le ton de sa voix qu’elle aimait l’observer dans cette situation.

Albertina tenait son bras droit. Sigrun était à côté de sa jambe droite, et Ingrid était à côté de sa gauche, rougissant et murmurant, « Oh mon Dieu, oh mon Dieu, » à elle-même.

Linéa était juste devant lui, les deux genoux au sol et penchés sur lui avec une serviette.

Et sa fidèle adjudante Félicia avait, semble-t-il, tiré au sort le fait de s’occuper de son dos.

Yuuto s’était battu jusqu’au bout pour laisser son entrejambe en dehors de ça. La serviette enroulée autour de sa taille était son dernier acte de résistance contre elles. Jamais auparavant dans sa vie un seul morceau de tissu n’avait été aussi important pour lui.

D’ailleurs, Éphelia avait refusé le tirage au sort. Les subordonnés directs du patriarche, qui avaient échangé avec lui le Serment sacré du Calice, attendaient avec ferveur l’occasion de réaliser le désir qui leur avait été refusé pendant si longtemps. Elle avait trouvé l’idée d’une esclave comme elle qui participait trop impudente.

« Augh, qu’on en finisse, c’est tout ! Mais une fois que c’est fini, on rentre directement à la maison ! Compris !? » La déclaration de Yuuto avait été rejetée et avait suscité un peu de ressentiment. Il se sentait comme un morceau de viande sur la planche à découper.

La retenue avec laquelle Yuuto ne devait pas ouvrir les yeux était digne d’éloges.

C’était un homme de la campagne à l’ancienne. Le monde d’Yggdrasil n’était pas un monde où le choix de qui et si elle devait se marier était une question de liberté personnelle, comme au Japon du 21e siècle.

Tout comme ce qui s’était passé au Japon avant le boom économique de l’après-guerre, et comme Félicia l’avait vécu, la société d’Yggdrasil était froide envers les femmes qui ne pouvaient se marier.

Dans un monde avec ces valeurs, Yuuto s’était fermement engagé à ne pas regarder une femme nue célibataire, car il était incapable de prendre ses responsabilités à l’ancienne et de l’épouser.

Mais il ne pouvait pas non plus nier que le même attachement à ses valeurs lui avait coupé les moyens d’échapper à cette situation.

« Très bien, je vais commencer, Grand Frère. » Yuuto entendit la voix de Linéa, et il sentit une serviette mouillée commencer à frotter contre sa poitrine.

« Avec ta permission, Père ! »

« Eh bien, Père... »

« Commençons, Grand Frère. »

Il ressentait la même sensation en commençant par les bras et les jambes. Ça chatouillait un peu, mais ça faisait aussi du bien. Le fait d’avoir une autre personne lavant son corps était en fait une expérience intensément agréable. Et celles qui le lavaient étaient toutes des filles d’une beauté exceptionnelle.

 

 

Même s’il avait les yeux fermés, il ne pouvait s’empêcher d’y penser. Il sentait la zone entre ses jambes devenir plus chaude.

Ce n’était pas ce genre d’acte entre un homme et une femme, ce n’était rien de plus qu’une expression de la piété filiale des filles à leur Grand Frère et père juré. Yuuto s’était répété ça dans son esprit, mais — .

treinte.*

« Uwagh !? Mademoiselle F-Félicia, qu’est-ce que vous utilisez pour me laver le dos !? » Yuuto était si étonné qu’il parle à Félicia dans un langage poli.

Félicia répondit en chuchotant à son oreille, d’une voix pleine de sensualité. « C’est évident... Je te lave avec ma poitrine. »

« Q-Qu-Quoiii !? » s’écria Yuuto.

« Laver le dos de mon Grand Frère bien-aimé avec un simple outil ou un chiffon serait le summum de la grossièreté. Je dirais que te laver avec mon propre corps est la façon la plus fidèle et la plus pure d’exprimer ma dévotion envers toi ! » déclara Félicia.

« Il y a définitivement quelque chose qui ne va pas avec haaaaagh !? » Yuuto sentit soudain quelque chose de mouillé contre la plante de son pied gauche.

« R-R-R-Run ! Qu’est-ce que tu viens de faire ? » demanda Yuuto.

Qu’est-ce que c’était ? Yuuto n’avait pas la moindre idée. C’était une sensation qu’il n’avait jamais ressenti de sa vie.

« Je te léchais le pied, Père. Euh, ç-ça n’a pas fait mal, j’espère ? » demanda Run.

« T-Tu me lèches !? » s’écria Yuuto.

« Oui, j’avais peur qu’une soldate maladroite comme moi puisse abîmer ta précieuse peau, alors j’ai demandé conseil à Félicia, et elle m’a répondu que je devrais utiliser ma langue, » déclara Run.

« Félicia, quel genre de conseil donnes-tu à Run ? » demanda Yuuto.

« Kh... ! C-C-C-Comme prévu des deux personnes les plus proches de Grand Frère ! Je ne peux pas me permettre d’avoir peur dans cette situation ! » déclara Linéa.

« J’ai autant de gratitude envers Yuuto que vous toutes, et je ne vais pas perdre ! » cria Ingrid.

« Vous devriez tous les deux prendre l’habitude de la compétition et l’utiliser pour autre chose ! » déclara Yuuto.

Les cris désespérés de Yuuto n’avaient pas atteint leurs oreilles. Il avait commencé à ressentir des sensations chaudes et douces sur sa poitrine et sa jambe droite qui ne venait pas du tissu. Il ne voulait pas penser à ce que c’était, et n’avait vraiment plus la capacité d’y penser.

Il était déjà depuis longtemps dans les sources chaudes fumantes, et il commençait à s’évanouir. Sa situation actuelle ne l’aidait pas. En fait, cela ne faisait qu’empirer les choses.

« D’accord, je vais aussi essayer ! » s’exclama Albertina.

« Al, tu es encore trop jeune pour ça, alors utilisons ces chiffons de lin pour le frotter, d’accord ? » déclara Kristina calmement.

« Wôw, wôw, ça a l’air si incroyable, Maître ! » s’écria Éphy.

Le fait que les plus jeunes filles ne participaient pas à cette compétition arrivée ex-aequo était une consolation au moins, mais cela n’avait pas arrêté les autres.

« Ah... oh... merde..., » Yuuto avait l’impression que quelque chose était sorti de son nez. Mais, il n’avait plus la capacité de penser à ce que c’était.

Comme sa conscience commençait à s’estomper, il avait seulement senti la sensation que sa tête tournait, et le sentiment étrange de ne pas savoir de quel côté était en haut.

« Grand Frère !? »

« Père !? »

« Grand Frère !? »

« Y-Yuuto !? »

« Père !? »

« Maître !? »

Le son faible et lointain des voix des filles fut la dernière chose que Yuuto entendit avant qu’il perde enfin conscience.

***

Partie 6

« Nous sommes vraiment désolées ! Pardonnez-nous, s’il vous plaît. »

Quand Yuuto s’était réveillé, il était sur un lit à l’intérieur de la villa.

Il avait ouvert les yeux pour voir sept paires d’yeux inquiets qui le regardaient depuis le haut.

Après un moment de joie qu’il ait repris connaissance, les filles s’étaient toutes levées de son lit, s’étaient agenouillées et avaient commencé à s’excuser à profusion.

« Euh..., » Yuuto était encore étourdi et ne savait pas trop comment réagir.

Il secoua la tête, se vida l’esprit et essaya de comprendre la situation.

Il avait dû être transporté ici alors qu’il était inconscient. Il n’y avait pas d’autres hommes qui l’accompagnaient dans ce voyage, donc c’était les filles qui l’avaient fait.

Il portait des vêtements de nuit amples, et il était clair que les filles avaient dû l’habiller pour se retrouver ainsi. Elles auraient donc dû tout voir. C’était incroyablement embarrassant. Rien que d’y penser, son visage avait commencé à être chaud.

« G-Grand Frère !? T-Tu ne devrait pas..., » Félicia commença à se précipiter à ses côtés, mais Yuuto leva la main pour l’arrêter.

« Non, je vais bien, Félicia, » déclara Yuuto.

Pendant qu’il était dans les sources chaudes, la chaleur et la montée du sang vers sa tête s’étaient combinées à sa réaction agitée face aux corps nus des filles, et il n’avait pas été capable de penser clairement. Mais maintenant, il avait retrouvé un bon état d’esprit.

Avant toute chose, il y avait des questions à se poser.

« Alors, pourquoi avez-vous toutes fait ça ? Je suis presque sûr d’avoir dit que je voulais me baigner seule. N’est-ce pas ? » demanda-t-il.

« C’est-à-dire... qu’il y a des animaux sauvages qui s’approchent parfois des sources chaudes, alors j’ai pensé que j’avais besoin d’être là, juste au cas où..., » Sigrun commença à donner exactement la même défense que Kristina avait utilisée plus tôt.

Il est vrai que les carnivores comme les loups n’étaient pas les seuls animaux sauvages à se méfier, même les singes et les cerfs pouvaient être extrêmement dangereux.

Franchement, mon commandant en second a vraiment raté son coup en oubliant de m’avertir de quelque chose d’aussi important, se dit Yuuto en soupirant profondément.

Cela expliquait au moins les actions de son officier militaire. Yuuto avait ensuite tourné son regard vers les autres filles.

« Euh, c’est ce que j’ai dit dans les sources chaudes, mais nous te devons une énorme dette de gratitude, Grand Frère, » déclara Félicia, alors que ses yeux ne quittaient pas le sol. « Nous voulions que tu nous permettes de nous écouter et d’exprimer ce sentiment. Et comme tu rentreras un jour chez toi, nous voulions le faire maintenant, pendant que nous en avions l’occasion. »

Plusieurs autres filles acquiescèrent d’un signe de tête.

Yuuto était faible contre cette argumentation. Il savait que les filles rassemblées dans cette salle avaient un amour et un respect sincères pour lui. Et le sentiment de vouloir faire quelque chose pour les personnes les plus proches dans sa vie était aussi un sentiment qu’il comprenait. Y compris le fait que ces sentiments étaient d’autant plus forts qu’on savait qu’il n’y avait pas beaucoup de temps.

Lorsque sa défunte mère était tombée malade en phase terminale, Yuuto avait été plein de regrets. Il était en colère contre lui-même, se demandant pourquoi je n’ai pas pu être un fils plus dévoué ?

Il avait tant de dettes envers son frère aîné assermenté, mais il n’avait finalement réussi qu’à le rembourser dans la misère, un souvenir qui lui faisait encore mal au cœur.

« ... D’accord, c’est bon. C’est moi aussi ma faute, » Yuuto avait pris une grande respiration, et alors qu’il expirait, il relâcha la tension de son visage.

Jusqu’à présent, il avait toujours refusé que les filles s’occupent personnellement de lui. Bien sûr, la plus grande raison pour cela était son obligation envers Mitsuki, mais une grande partie de cela était aussi les sentiments de gêne et de honte qu’il portait avec leurs racines dans les valeurs et les mœurs du Japon d’aujourd’hui.

Cependant, dans ce monde d’Yggdrasil, avec une culture qui mettait davantage l’accent sur les liens familiaux formés par le calice que sur les liens du sang et exigeait une loyauté et un service total de la part du cœur, l’attitude de Yuuto envers les filles était peut-être vraiment trop distante et réservée.

Son entêtement n’avait fait que les pousser à vouloir le servir encore plus, invitant le genre d’incident qui venait de se produire, là où elles étaient allées trop loin.

« Quand vous êtes à Rome, faites comme les Romains, » disait le proverbe. Il fallait peut-être que tout le monde se défoule un peu de temps en temps.

Dans tous les cas, pour la sécurité de Yuuto.

« D’accord, c’est bon, » déclara-t-il. « Pour le reste de ce voyage, je vous laisserai me servir comme vous le voulez. Mais vous allez porter des vêtements ! Et on ne peut pas non plus être trop collantes ! D’accord !? »

« M-Merci beaucoup !! » Toutes les filles criaient leurs remerciements à l’unisson, leur visage s’illuminait d’une joie rayonnante.

Est-ce vraiment quelque chose dont on peut être heureux comme ça ? Yuuto pensait ça avec ironie, mais il se sentait aussi coupable de les avoir rejetées pendant si longtemps jusqu’à maintenant.

Il avait parlé avec tant d’insistance et pensait à elles comme à sa famille, mais peut-être qu’à un certain niveau, il avait gardé une certaine distance entre lui et elles.

Après cela, les filles s’occupèrent généreusement de tous les besoins de Yuuto (avec modération), et Yuuto passa le reste de ses vacances en tout confort.

Il était parti pour son voyage de retour à Iárnviðr avec son corps reposé et son esprit rafraîchi.

***

Partie 7

Après avoir accompli sa mission de cinq jours en tant que patriarche par intérim, Jörgen était maintenant en train de descendre tranquillement la rue vers sa demeure.

Le commandant en second du Clan du Loup, Jörgen, s’arrêta soudain, se retourna et cria dans l’obscurité derrière lui. « Avez-vous besoin de quelque chose de ma part ? »

Dans l’obscurité de cette nuit, la seule lumière dont il fallait parler venait de la lune dans le ciel et de la petite torche qu’il tenait. Jörgen ne pouvait presque rien voir à cinq Elles devant lui. (Une Elle était une ancienne forme de mesure en Yggdrasil égale à environ 50 centimètres.) Malgré cela, les yeux de l’ancien combattant étaient fermement fixés sur un point devant lui dans l’obscurité.

« J’étais presque sûre d’avoir moi aussi effacé ma présence. Vraiment, vous êtes un homme redoutable, commandant en second ! ♪ »

Avec ces derniers mots sur un ton chantant, la propriétaire de la voix s’était glissée hors de l’obscurité et dans le champ de vision de Jörgen. C’était une très jeune fille, qui aurait normalement semblé déplacée sur une route sombre la nuit. Mais on ne peut pas juger par les apparences seules.

Malgré son âge, c’était une personne d’une grande compétence et d’un grand potentiel, et l’autre jour, elle avait échangé le Serment du Calice directement avec le patriarche Yuuto, devenant ainsi sa fille assermentée. Elle s’appelait Kristina, se souvient Jörgen.

« Je pourrais dire la même chose de vous, vous avez passé les deux dernières années à peaufiner votre capacité à vous fondre dans l’ombre, n’est-ce pas ? » Le coin de la bouche de Jörgen s’était relevé en un sourire.

Le Clan du Loup et le Clan de la Griffe avaient déjà été des ennemis mutuels, et Kristina avait tenté d’infiltrer le palais d’Iárnviðr plus d’une fois. Chaque fois, ce qui l’avait forcée à abandonner et à revenir en arrière, c’était la présence de Jörgen et Skáviðr, les deux vétérans combattants du clan.

« Donc, vous êtes aussi au courant de ça, » dit Kristina. « Au moins, j’étais sûre que je n’avais jamais été vraiment repérée... »

« Vous ne l’étiez pas, ce qui était vraiment impressionnant. Je viens juste d’apprendre que c’était vous. Je me souviens après tout de cette sensation déstabilisante qui rampait sur la peau, » Jörgen avait remonté sa manche pour révéler la chair de poule sur son bras.

L’intuition pure d’un guerrier qui avait survécu à une bataille après l’autre, marchant sur le fil du rasoir, n’était pas quelque chose que l’on pouvait expliquer avec logique. Peu importe avec quel point l’adversaire pouvait cacher son intention de tuer, ou sa présence, cet homme pouvait encore ressentir quelque chose. Sa peau avait réagi.

Jörgen n’avait pas sur lui de rune, mais il avait un instinct bien aiguisé qui n’était pas moins extraordinaire que celui d’un Einherjar. L’expérience accumulée pouvait parfois s’avérer plus puissante que la capacité brute.

« Eh bien, ce serait certainement très pratique pour nous si vous utilisiez cette technique pour le bien du Père, » déclara Jörgen.

« Bien sûr ! C’est bien ce que je vais faire. N’est-ce pas évident ? Je suis sa fille maintenant, vous savez » déclara Kristina.

« Je sais qu’il ne faut pas croire les paroles d’une renarde, » répliqua Jörgen.

« Bonté divine. J’ai été très honnête, » Kristina soupira, l’air terriblement triste.

Jörgen n’y prêta pas attention et la fixa d’une pression encore plus forte, comme si elle essayait d’extraire ses vrais sentiments. « Alors, je le redemande : Aviez-vous besoin de quelque chose de ma part ? »

« Non ! Rien de vraiment important, » répondit Kristina. « Je voulais juste venir vous remercier d’avoir agi si vite. »

« Non, non, c’est moi qui devrais vous remercier. Vous avez fait une grande chose en m’informant, » répondit Jörgen.

« Oh, mais qu’est-ce que vous voulez dire ? Je n’ai rien fait de plus que de vous poser une question ou deux, par souci pour mon père » répondit Kristina.

« Ahh ! Est-ce ce que vous avez fait, n’est-ce pas ? » demanda Jörgen.

« En effet, c’est bien ça, » Kristina gloussa de façon suggestive.

Elle s’était rendue chez Jörgen, prétendant recueillir des informations pour les recherches de Yuuto.

« Père est à la recherche d’informations sur les célèbres manieurs de la magie seiðr. Savez-vous quelque chose sur eux ? » C’est ainsi qu’elle l’avait formulé. Et elle avait prévu de rapporter tout ce qu’elle avait appris à Yuuto.

Quelle fille attentionnée et dévouée je suis à mon père, aurait-elle dû penser.

Et, bien sûr, quelles que soient les conclusions que Jörgen puisse en tirer après avoir entendu sa question, et, quelles que soient les actions qu’il puisse entreprendre, elles étaient toutes dans son plan.

« Toute cette affaire est un casse-tête, » déclara Jörgen. « Il a d’abord demandé à l’impérial goði Alexis s’il existait une technique pour traverser les mondes, et il a collectionné avec ferveur de vieilles légendes et des rumeurs de tout le pays. Et maintenant, il enquête sur les manieurs de seiðr. Il semble que Père ait enfin commencé à concentrer tous ses efforts pour retourner dans son royaume au-delà des cieux. »

Jörgen secoua la tête, alors que son visage indiquait qu’il souffrait.

Il n’avait pas l’intention de blâmer Yuuto ou de le traiter d’irresponsable. Le jeune homme n’avait jamais eu l’intention de mettre les pieds dans ce monde en premier lieu, et avait été appelé ici contre sa volonté. Son désir de retourner dans son pays natal était aussi naturel et juste pour lui que pour tout être humain.

Il n’avait pas non plus aspiré au trône de patriarche. Au lieu de cela, le patriarche précédent l’avait pratiquement forcé à occuper ce poste. Et malgré cela, le jeune homme avait sauvé le Clan du Loup d’une crise après l’autre, et les avait aidés à grandir et à prospérer à nouveau.

Dans des circonstances normales, face à une telle dette de gratitude, la bonne chose à faire serait que tout le Clan du Loup s’unisse pour l’aider à chercher un moyen de rentrer chez lui, et qu’il reparte avec un adieu affectueux.

« C’est comme je l’ai dit lors de notre précédente rencontre, au final, nous, du Clan du Loup, ne sommes rien sans Père, » pleura Jörgen. « Personne ne peut prendre sa place. »

Maintenant que le Clan de la Griffe et le Clan de la Corne étaient officiellement au service du Clan du Loup, les Clans du Blé et du Chien des Montagnes tentaient également d’entrer sous leur protection. Mais ils ne s’engageaient pas vraiment au service du Clan du Loup —, mais seulement au service de Yuuto, une figure aussi puissante et charismatique qu’écrasante.

Jörgen pensait qu’il n’avait pas du tout ce qu’il fallait pour maintenir ces mêmes relations internationales s’il succédait à Yuuto. Et le raisonnement de Jörgen s’était déjà avéré juste.

Ce jeune homme aux cheveux noirs, connu sous le nom de Yuuto Suoh, était pour le Clan du Loup une figure beaucoup plus importante que celle dont Yuuto lui-même était au courant. En effet, il était trop grand.

« Nous devons faire en sorte que Père renonce à partir, quoi qu’il arrive. » Jörgen s’était exprimé avec détermination et volonté.

Personnellement, il sympathisait avec Yuuto et se sentait coupable, mais en tant que fonctionnaire qui pensait à la sécurité et à la prospérité du Clan du Loup, c’était la seule conclusion à laquelle il pouvait arriver.

Cependant, Yuuto était l’autorité suprême au sein du clan, donc naturellement l’usage de la force était hors de question.

Cela laissait la persuasion, mais bien que Yuuto puisse paraître doux, une fois qu’il avait décidé quelque chose, il s’entêtait à aller jusqu’au bout, avec une volonté indomptable.

Dans l’état actuel des choses, même si tout le monde se rassemblait et le suppliait de rester ici, cela ne ferait rien d’autre que de l’énerver. Il n’y avait aucune chance qu’il cède.

Du moins, pas encore.

« Dans la mesure du possible, j’espérais que l’une d’entre vous aurait profité de l’occasion pour faire plus ample connaissance avec lui, » déclara Jörgen. « Je ne sais pas si je devrais être plus déçu par mes sœurs de clan, qui ne peuvent même pas séduire un homme célibataire malgré l’occasion parfaite qui leur était donnée, ou si je devrais louer la fidélité inébranlable du Père, qui a su se retenir en dépit de tant de belles femmes qui l’entouraient. C’est vexant de toute façon. »

Jörgen soupira, avec un regard dur sur son visage balafré.

Au retour de Yuuto, il n’y avait aucun sentiment que lui et les filles partageaient le genre de tension maladroite, romantique et douce qui était unique à un couple nouvellement intime.

Même sans avoir voyagé avec eux, Jörgen avait tout de suite su qu’aucun jumelage de ce genre ne s’était produit lors de ce voyage.

« Hehe hehe, ça me fait me souvenir de quelque chose. On dit qu’il y a une rumeur transmise des temps anciens selon laquelle ceux qui visitent les sources d’eau chaude seront bénis avec des enfants, » Kristina avait fait à Jörgen un regard suggestif et omniscient.

Jörgen avait répondu avec un large sourire satisfait de lui-même. « Alors, vous avez des oreilles pointues, petite renarde. Oui, j’avais pensé que si Père concevait un enfant, cela ferait pencher la balance de son cœur un peu plus en notre faveur. Eh bien, il semble qu’il y ait eu au moins quelques petits progrès cette fois-ci, alors je suppose qu’il va falloir que je sois satisfait pour l’instant. Nous avons encore le temps. Nous pouvons créer autant d’opportunités que nécessaire. »

« Oh, impressionnant. Comme on pouvait s’y attendre de la part du commandant en second du Clan du Loup, vous avez un sacré don pour ce genre de complot, » déclara Kristina.

« Mais je ne suis rien comparé à votre père biologique, » déclara Jörgen.

Pendant la longue ascension de Jörgen jusqu’à son poste actuel, il avait survécu à de multiples luttes de pouvoir politiques internes.

On ne peut pas influencer les gens par seulement une approche énergique.

Le visage effrayant et meurtri de Jörgen démentait son vrai talent : il excellait dans la politique détournée, gérant des intérêts divergents et préparant le terrain pour que les plans avancent sans heurts. Son statut de commandant en second n’était pas une coïncidence.

Bien qu’il ait toujours eu tendance à se concentrer sur la coopération et les affaires intérieures, sa capacité de voir les choses d’un point de vue plus large était limitée.

« J’ai quand même été un peu surpris par vous, » ajouta Jörgen. « Le Clan de la Griffe ne sera-t-il pas plus à l’aise si Père quittait ce monde ? »

« Je suis maintenant une enfant directe subordonnée du patriarche du Clan du Loup, vous savez. Mais, d’accord, si je m’efforçais de parler en tant que fille du Patriarche du Clan de la Griffe Botvid, je dirais ceci : Plutôt que d’essayer bêtement de saper le Clan du Loup et de lui voler sa richesse, il serait plus prudent et beaucoup plus rentable de lui rester fidèle et de recevoir une part de sa prospérité. Voilà à quel point Père est puissant et grand, » répliqua Kristina.

« ... Hm, je vois, » répondit Jörgen.

Je pensais que la petite renarde ne révélait toujours pas toutes ses intentions, mais on dirait qu’elle croyait ce qu’elle disait tout à l’heure, se dit Jörgen.

Après la grande défaite du Clan de la Griffe au siège d’Iárnviðr et la campagne de représailles du Clan du Loup après l’accession de Yuuto au poste de patriarche, le Clan de la Griffe avait perdu beaucoup de son territoire et de ses soldats. Peut-être la situation intérieure y était-elle encore pire que ne le croyait le Clan du Loup.

« C’est quand même impressionnant d’avoir une telle perspicacité pour quelqu’un d’aussi jeune, » déclara Jörgen. « Je crains pour l’avenir. »

« Bonté divine, dois-je me répéter ? Je suis une subordonnée directe du patriarche du Clan du Loup. J’aimerais que vous disiez que vous avez de grands espoirs pour moi, » Kristina avait gonflé ses joues dans un spectacle d’irritation enfantine.

D’après sa personnalité, c’était clairement un jeu d’acteur.

Jörgen avait souri, puis répondit par un long soupir affecté. « De mon point de vue, j’ai l’impression qu’on nourrit un serpent dans notre sein. »

« Quelle cruauté ! D’abord je suis une renarde, et maintenant vous me comparez à un serpent ? Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je suis toujours une fille avec des sentiments... »

« Vous devriez prendre ça comme un compliment sur le fait que je pense que vous êtes trop intelligente et dangereuse pour vous ignorer. Eh bien, au moins sur le point de ne pas vouloir perdre notre maître et bienfaiteur, il semble que le Clan du Loup et le Clan de la Griffe partagent un intérêt commun. Un apprentissage qui a de la valeur en soi. » Il hocha la tête profondément, puis fit un large sourire. « J’espère que c’est le début d’une amitié durable. Ha ha ha ha ha ! »

À la lumière d’une petite torche dans l’obscurité, les épaules de Jörgen tremblèrent de son rire joyeux et éclatant.

Il avait confirmé que, du moins pour l’instant, la petite renarde rusée au milieu d’eux s’efforcerait de faire profiter le Clan de la Griffe en travaillant loyalement pour le Clan du Loup.

C’était une bonne nouvelle pour lui, et il avait fait disparaître un poids énorme de son esprit.

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