Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 3 – Chapitre 7 – Partie 2

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Acte 7

Partie 2

« Hein ? Quoiiiiiiiiii !? » Yuuto avait crié hystériquement cette fois-ci, oubliant complètement la situation formelle dans laquelle il se trouvait.

Qu’est-ce qu’il raconte, ce vieux schnock ? Il ne l’avait pas dit à haute voix, mais pendant un moment, Yuuto avait cru que le vieil homme aurait peut-être fini par devenir sénile.

« Q-Qu’est-ce que tu racontes, Père ? » cria-t-il. « Je te l’ai déjà dit, je vais retourner dans le monde d’où je viens. Quand j’ai accepté ton offre d’échanger le Serment du Calice, je me suis bien assuré que tu le comprenais ! »

« C’est... c’est vrai, tu l’as fait. Je suis désolé, mais j’ai besoin que tu me laisses revenir sur cet accord. Pour l’instant, tu es le seul à pouvoir protéger le Clan du Loup. »

« Qu’est-ce que tu racontes !? Tu as déjà quelqu’un ! Grand Frère Loptr est déjà un successeur parfait ! » cria Yuuto à son patriarche.

Mais le vieux patriarche ferma les yeux et secoua la tête en silence. « C’est vrai que Loptr est un homme de grand talent. Il ferait un bien meilleur patriarche que quelqu’un comme moi. Malgré tout, il n’a toujours pas assez de force pour protéger et guider le Clan du Loup tel qu’il est aujourd’hui. »

« C-Ce n’est pas vrai ! Regarde cette dernière bataille ! Grand Frère Loptr a tant fait, et —, » commença Yuuto.

« Hehe... Hahahaha... » La protestation de Yuuto avait été interrompue par un rire soudain et creux venant de juste à côté de lui.

Tandis que Yuuto se tournait instinctivement dans cette direction, il se figea.

Ce qu’il voyait n’était pas la forme familière, douce et joyeuse du rire de son frère aîné assermenté. C’était un homme au visage tordu dans un ricanement sombre débordant de folie.

« Tu peux maintenant arrêter de jouer la comédie, Yuuto, » déclara Loptr.

« Jouer... ? Grand Frère, qu’est-ce que tu es... ? » demanda Yuuto.

« Tu es toi-même contre le fait de devenir patriarche, mais quand Père t’aura assez supplié, tu accepteras à contrecœur. C’est ainsi que cela se passera, n’est-ce pas ? » Loptr ricana. « Agis-tu ainsi afin d’éviter que je te déteste ? Je suis sûr que tu avais prévu de faire bon usage de moi en tant que commandant en second. Alors est-ce peut-être pour ça ? »

« Franchement, de quoi parles-tu, Grand Frère !? » La voix de Yuuto devint criarde quand il commença à paniquer pour de bon.

Loptr avait l’air d’avoir mal compris la situation. De plus, c’était une accusation qui n’avait absolument aucun sens pour Yuuto.

Comment les choses ont-elles soudainement pris une tournure aussi scandaleuse ? Il ne l’avait pas du tout compris.

« Attends, Loptr, » dit Fárbauti, alarmé. « Ce n’était rien de plus que ma propre idée égoïste, alors... »

« Ce n’est rien, Père, vous n’avez pas à le cacher, » déclara Loptr. « Honnêtement... tu m’as vraiment fait un sacré numéro, Yuuto. On dirait que tu as réussi à cajoler pleinement Père pendant que j’avais le dos tourné. J’aurais dû réaliser ce que tu faisais bien plus tôt. Oui, c’est vrai, comme quand tu as décidé d’échanger le Serment du Calice directement avec le Père, sans même m’en parler ! »

« Non, non ! Je ne veux vraiment pas du tout devenir patriarche ! » déclara Yuuto.

« Toi... si tu n’avais pas ce smartphone, ou peu importe son nom, tu ne pourrais rien faire ! » s’écria Loptr.

Loptr était rempli de suspicion et les tentatives de Yuuto pour se défendre n’atteignirent plus son cœur.

« C’est vrai, même avec ce truc, tu n’étais rien de plus qu’un bon à rien sans mon aide ! Dire que j’avais tellement confiance en toi que j’étais prêt à faire de toi mon bras droit, et même à te laisser avoir ma petite sœur, alors que pendant tout ce temps, tu étais un traître ingrat ! Ça me fait de la peine de le dire, mais je n’arrive pas à croire que j’ai été aussi bête. Ha ha ha ha ha ! Un imbécile..., tout simplement, un bouffon absolu ! Ha ha ha ha ha ! Ha ha ha ha ha ! AHAHAHAHAHAHAHAHAHA !! »

Loptr avait poursuivi son rire dément, levant les yeux vers le plafond avec une main sur son visage. C’était un rire débordant de haine, comme une malédiction, et le bruit de ce rire allait entraver et tourmenter le cœur de Yuuto pendant de nombreux jours à venir.

Pendant plusieurs instants, Loptr avait simplement continué à rire... Et puis...

« Keh-heh-heh-heh, devenir patriarche a été mon rêve depuis que je suis tout petit. Depuis si longtemps, j’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour réaliser ce rêve. Juste un peu plus... c’était juste un peu plus... juste au moment où ma main allait l’attraper, Yuuto... toi... toi... toi... toi... C’EST TOI QUI ME L’AS VOLÉEEEEE !! »

D’un cri assourdissant, Loptr dégaina la nouvelle épée à sa taille. C’était l’épée dans laquelle Yuuto avait versé son cœur et son âme, son sang, sa sueur et ses larmes dans sa forge, le cadeau qui était le symbole de leur amitié.

Avec ses yeux injectés de sang en raison de la haine, sans la moindre hésitation, Loptr frappa avec l’arme — .

« Khh ! Gah... ! » La lame trancha une ligne horizontale profondément dans la poitrine de Fárbauti, qui avait rapidement poussé Yuuto hors du chemin.

« ... Hein ? Pè... re... ? » Les mots s’étaient échappés des lèvres de Loptr dans un murmure râpeux.

Son expression était vide, comme s’il était complètement incapable de comprendre ce qui se passait.

Cependant, l’instant d’après, du sang frais s’était répandu sur son visage, et la chaleur de la vie de sa victime l’avait forcé à comprendre ce qu’il venait de faire.

 

 

« U-uwaaaaahhhh !! » Le visage de Loptr était gelé de terreur, et il secoua la tête de gauche à droite, faisant un pas en arrière, puis un autre.

« Ahhhhhhhhhhhh !! »

Loptr avait poussé un hurlement perçant à pleins poumons, puis il avait tourné le dos au corps du vieux patriarche qui tombait avant de se mettre à courir.

Tandis que quelques personnes paniquées essayaient de se mettre en travers de son chemin, il les avait violemment attaquées avec l’épée, sans aucune forme ou technique, les coupant, et avait couru hors de la salle d’audience à toute allure.

« F-Frère ? » Félicia se tenait sur place, hébétée.

Il semblerait qu’elle n’arrivait pas non plus à comprendre ce qui se passait. C’était censé être une occasion heureuse, une célébration de la victoire d’hier. Ce devait être une journée mémorable, où son frère de sang et son nouveau frère assermenté seraient tous deux reconnus pour leurs vaillants efforts.

Qu’est-ce qui a fait que les choses s’étaient passées ainsi ? C’est le Mánagarmr, Skáviðr, qui avait pu se rétablir le plus rapidement et donner des ordres rapidement. Il avait lâché ses ordres d’une voix forte.

« Ne laissez pas le tueur s’échapper ! Poursuivez-le ! Poursuivez-le ! Que ceux qui ont les compétences appropriées s’occupent du Maître immédiatement. Vite ! » cria Skáviðr.

Les pieds de Sigrun avaient commencé à avancer après avoir effectué un coup de pied dans le sol avant de sortir de la pièce, comme si les paroles mêmes de Skáviðr l’avaient mise en mouvement.

Certains l’avaient suivie, d’autres avaient commencé à prodiguer les premiers soins au patriarche, d’autres encore étaient allés passer le mot et appeler à l’aide. Tout le monde s’était précipité pour faire ce qu’il pouvait.

« Pourquoi... ? Pourquoi est-ce arrivé... ? » Yuuto vacilla. « Nous gagnons la bataille, Grand Frère Loptr devient patriarche, et je rentre chez moi dans mon monde. Tout devait s’arranger, alors pourquoi... ? »

Yuuto était resté immobile et abasourdi au centre de l’agitation de la salle. Tout comme Félicia, son esprit n’avait pas encore tout à fait compris la réalité de ce qui se passait. Le frère aîné assermenté qu’il aimait et respectait avait essayé de le tuer, et son père assermenté l’avait protégé et avait été blessé à sa place. Pourquoi une telle chose s’était-elle produite ?

« Étais-je... ? Étais-je le seul à blâmer, Grand Frère... ? » murmura Yuuto.

Les yeux de Yuuto se dirigèrent vers l’entrée du hall à la recherche de la silhouette de Loptr, bien qu’il soit déjà parti depuis longtemps.

Dans sa tête, les dernières paroles que Loptr lui avait dites se répétaient à l’infini.

« Argh... Y-Yuuto..., » la voix étouffée et rauque de Fárbauti avait ramené Yuuto à la raison.

« P-Père !? E-Est-ce que ça va !? » demanda Yuuto.

Dieu merci. Père n’est pas mort. Dans ce cas, on peut arranger ça d’une façon ou d’une autre, pensa Yuuto.

Avec cet espoir désespéré en tête, Yuuto s’était retourné.

« Ah... aaaaaahh..., » le corps de Yuuto avait tremblé de façon incontrôlable à la vue choquante du visage de son patriarche mourant.

Malgré les vaines tentatives de premiers secours des personnes présentes autour de Fárbauti, le visage du vieil homme avait perdu toute couleur et la mare de sang sous lui devenait de plus en plus grande.

« Y-Yuuto. Ce n’était pas ta faute. S’il te plaît, ne blâme pas non plus Loptr pour ça. Tout est... tout est à cause de ma propre faiblesse. Je n’ai pas vu l’obscurité grandir dans le cœur de l’un de mes enfants. » Le patriarche toussa, le sang coulant de sa bouche.

« Père, ne parle plus ! » Yuuto s’était précipité aux côtés de son père assermenté.

Il n’était pas clair si Fárbauti avait entendu la voix de Yuuto ou non, mais le vieux patriarche leva la main droite. « Prends... prends ma main... »

« C-Comme ça !? Comme ça, Père !? » Yuuto serra la main offerte contre la sienne avec ses deux mains.

Elle était déjà trop froide pour être la main d’une personne vivante. Et chaque seconde, Yuuto sentait qu’elle devenait de plus en plus froide, et il désespérait.

« Y-Yuuto, je t’ai causé tant d’ennuis, et je sais... » toux, toux. « ... Je sais que je n’ai pas le droit de te le demander, mais je dois te demander... de prendre soin du Clan du Loup, » toux, toux. « E-Et puis... une fois que tu auras sauvé le Clan du Loup du danger, le jour viendra où tu devras quitter ce monde... Je veux que tu fasses de Loptr le prochain patriarche. »

La tête du patriarche tomba par terre comme s’il avait finalement épuisé le reste de ses forces.

La force s’était ainsi estompée de la main serrée dans les doigts de Yuuto. C’était comme s’il pouvait sentir la vie de l’homme disparaître.

« Père ? Ne meurs pas ! Ne meurs pas comme ça !! » Yuuto ne pouvait rien faire de plus que pleurer comme un enfant.

Les personnes qui tentaient d’administrer les premiers soins s’arrêtèrent, et avec des regards douloureux, ils secouèrent la tête.

« C’est... c’est ma faute, » sanglota Yuuto. « Qui se soucie du Gleipsieg ? Pourquoi suis-je devenu si vaniteux ? Grand Frère était si troublé, et je ne l’ai même pas remarqué ! Il a travaillé si longtemps et si fermement pour poursuivre son rêve ! Et je... Je le lui ai volé. »

Des sentiments de culpabilité et de reproche quant à lui-même avaient déchiré le cœur de Yuuto comme une violente tempête.

Il devait y avoir un moyen. Une façon de créer un avenir dans lequel Fárbauti se retirait paisiblement, Loptr prenait sa place, et Yuuto se tenait à côté de lui, le félicitant.

Si seulement Yuuto ne s’était pas empli de vanité et n’avait pas agi aussi égoïstement, si seulement il avait pensé aux choses du point de vue des autres, s’il avait seulement considéré les sentiments de son Grand Frère juré, rien de tout cela ne serait arrivé. Telles étaient les pensées qui lui traversaient l’esprit.

Si l’on considérait la situation d’un point de vue objectif, demander à un garçon de 14 ans d’être aussi compétent et capable de comprendre les autres serait beaucoup trop dur. Cependant, Yuuto ne doutait pas de ses propres conclusions.

« C’est comme disait Grand Frère, » déclara amèrement Yuuto. « Pourquoi ai-je agi comme si j’étais intelligent, alors qu’en réalité, je n’ai fait que tricher en utilisant des connaissances empruntées !? À la fin, je n’ai pas compris ce qui était le plus important ! Père s’est même donné la peine de me prévenir. Même moi, j’ai perdu le contrôle de moi-même quand j’avais l’impression d’être poussé dans un coin. Mais j’ai rejeté ce que Père disait, disant que c’était stupide et dégoûtant... »

Yuuto avait frappé le sol avec ses poings, encore et encore. Ses articulations avaient commencé à saigner, mais il n’y avait pas prêté attention.

« Sans le smartphone, je ne suis qu’un gamin stupide ! Je suis un gamin stupide qui ne comprend pas les sentiments des autres ! Grand Frère était bien plus apte à être le patriarche que quelqu’un comme moi ! »

Protéger sa famille à tout prix. C’était l’idéal personnel de Yuuto, sa conviction. Et malgré cela, à cause de lui, la vie de son Père et de son Grand Frère avait été ruinée.

Il n’était pas différent de son vrai père, l’homme sans valeur qui avait abandonné la mère de Yuuto.

« Je ne vaux rien, je ne vaux rien, je ne vaux rien, AAAHHHHHHHHHHHHHHHHHH !! »

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3 commentaires :

  1. Merci pour le chapitre.

  2. Ouah! Quel force! Ce retournement de situation.
    Merci pour le chapitre.

  3. L'amateur d'aéroplanes

    Lopr s’est tourné vers le côté obscur de la Force…

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