Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 2 – Chapitre 1 – Partie 4

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Acte 1

Partie 4

« Arghhhh, ce genre de choses est tellement oppressant ! » avait gémi Yuuto.

Dans la petite salle privée sur le côté de la grande salle des rituels, Yuuto avait demandé à Félicia de l’aider à s’habiller.

« Et maintenant, moi aussi, toute cette merde me pèse littéralement…, » protesta Yuuto.

Normalement, Yuuto renonçait aux vêtements et accessoires ornementaux, préférant une tenue légère entièrement noire qui mettait l’accent sur la facilité de mouvement, mais l’étiquette cérémonielle d’aujourd’hui n’allait pas le laisser s’en tirer ainsi.

Sa tenue lui avait fait penser à un pharaon égyptien, avec un tour de cou extravagant et doré, un bracelet doré incrusté de joyaux, et une autre chose cinglante attachée à sa tête.

« Tee hee », déclara Félicia en riant doucement. « C’est seulement pour la durée de la cérémonie, alors sois un peu patient. »

Elle s’était agenouillée sur le sol. Elle s’était penchée et enroulait soigneusement une sorte de ceinture autour de la taille de Yuuto, qui était recouverte d’ornements dorés encore plus brillants. À ses côtés se trouve un fourreau d’or avec des gravures complexes et une épée absolument luxueuse, incrustée par endroits de joyaux.

Quand il vivait encore au 21e siècle, s’il avait vu une épée comme ça, il aurait probablement pensé, Whoaaaa, si coooool ! et se serait excité comme un garçon normal. Mais là, quand il l’avait regardée, tout ce qui lui était venu à l’esprit, Arg, c’est que si vous équipiez quelque chose comme ça, ce serait difficile de marcher.

L’idée lui avait fait baisser un peu le moral, alors il avait tourné son regard pour regarder par la fenêtre. Les rues et les maisons de Fólkvangr s’étendaient en dessous de lui.

Tout comme pour le Clan du Loup, le hörgr, ou sanctuaire, où le Clan de la Corne effectuait divers rites sacrés avait été construit dans leur Hliðskjálf. Pour Yuuto, la tour sacrée du Clan du Loup avait un peu la forme d’une tour de kagami mochi empilé, mais la Hliðskjálf du Clan de la Corne ressemblait davantage à une pyramide. Sa hauteur réelle était plus importante que celle du Clan du Loup. Peut-être que les détails de ce genre variaient d’un pays à l’autre.

« Même s’ils font tous les deux partie d’Yggdrasil, nos villes et nos terres sont différentes, hein ? » déclara Yuuto, surtout pour lui-même. C’était une prise de conscience un peu tardive, mais il venait juste de commencer à s’en rendre compte.

Iárnviðr était située plus haut dans le bassin montagneux, et il y avait une source abondante de bois à proximité, de sorte que les gens du peuple avaient des maisons et des bâtiments faits principalement de bois. Pendant ce temps, le paysage urbain de Fólkvangr était taché d’un rouge brunâtre, et il n’y avait même pas encore de crépuscule.

Dans les environs de Fólkvangr, les sédiments qui descendaient le long de la rivière Körmt s’étaient lentement accumulés au fil du temps, formant ce qu’on appelle une plaine alluviale. C’était une terre fertile, bien adaptée à l’agriculture, mais dépourvue de bois ou de bonnes pierres. Par conséquent, la plupart des maisons des roturiers avaient été construites avec des briques de boue cuite séchée au soleil.

 

 

« Si tu prenais Grande Soeur Linéa en tant qu’épouse, cette ville deviendrait la tienne, n’est-ce pas, Grand Frère ? » demanda Félicia avec nonchalance.

« Félicia, tu sais qu’il n’y a aucune chance que je puisse faire ça », répondit Yuuto, exaspéré.

Pour Félicia, qui connaissait toute la vérité derrière sa situation, et qui venait à peine de venir en aide à Yuuto quand il s’était battu pour donner une réponse à Linéa, de dire quelque chose comme ça, était un peu plus que ce qu’il voulait entendre en ce moment.

Félicia avait de toute façon continué, ignorant apparemment son ton. « Que l’on regarde ces décorations extravagantes, ou les vastes champs de blé doré à l’extérieur de la capitale, il est facile de voir qu’il s’agit d’un pays riche. Si tu devenais le patriarche de cette terre, chaque jour on te servirait plus de nourriture délicieuse que tu ne pourrais jamais manger, et de belles jeunes filles de tout le pays se rassembleraient juste pour t’attendre. N’importe qui serait jaloux d’une telle vie ; tu en profiterais aussi sûrement. »

« Je ne suis pas comme ça, d’accord ? » déclara Yuuto.

Du point de vue d’un jeune homme normal, l’idée d’être populaire auprès des femmes et d’être écouté par les gens autour de lui était loin d’être inintéressante. Mais si tout cela ne venait que de l’argent ou du pouvoir politique, cela lui paraissait creux. En ce qui concerne la nourriture, le Japon du 21e siècle était au milieu d’un âge d’abondance, il l’avait déjà expérimenté.

« En ce moment, le Clan du Sabot a perdu son patriarche et son plus grand guerrier, tombant dans un état de désarroi total. Ce serait maintenant l’occasion parfaite de les envahir, » avait dit Félicia. « Avec cette terre comme base et forteresse, je pense que le chemin vers le souverain suprême de tout Álfheimr te serait ouvert... »

« Et j’ai dit que je ne veux rien avoir à faire avec le fait de devenir quelque chose comme ça ! Même avec le Clan du Loup, c’est trop pour moi. En fait, qu’est-ce qui t’arrive en ce moment ? Tu sais qu’il n’y a aucune chance que je sois d’accord avec ça ! C’est comme si tu étais juste... Non, je suis désolé, Félicia. Tu as raison, bien sûr. Quelque chose comme ça serait un rêve devenu réalité pour le Clan du Loup, n’est-ce pas ? » demanda Yuuto.

Félicia était la petite sœur assermentée de Yuuto et son adjudant, mais avant cela, elle était une membre du Clan du Loup et l’un de leurs officiers supérieurs, qui devait toujours penser à l’avenir du clan. Pour le dire franchement, il était naturel pour elle de penser aux besoins du clan avant les convenances personnelles de Yuuto.

En y réfléchissant, cela signifiait que Yuuto était clairement un échec en tant que patriarche pour ne penser qu’à ses propres désirs au lieu de la vaste richesse qu’il pourrait être en mesure d’obtenir pour le Clan du Loup.

« Eh, ah, oui, oui, certainement », bégayait Félicia. « Mais est-ce trop demander à la fin  ? Je savais que c’était le cas, mais la perspective d’obtenir les terres du Clan de la Corne pour le Clan du Loup m’a fait devenir un peu avide ».

« Aïe !? Trop serré, trop serré ! » Yuuto avait gémi.

« Oh !! Je suis désolée ! » Bouleversée, Félicia desserra la ceinture qu’elle avait trop serrée. Elle était habituellement si calme et prudente dans tout ce qu’elle faisait. L’erreur n’était pas dans son genre.

« ... Alors, pourquoi as-tu vraiment dit tout ça ? » demanda Yuuto.

« Euh ? Hum ! Comme je l’ai dit, je suis devenue gourmande, et…, » répondit Félicia.

« Oui, c’est un mensonge. » Yuuto secoua la tête. « Tu ne peux pas me tromper. Après tout, ces deux dernières années, à part quand nous sommes au lit, nous avons passé presque tout notre temps ensemble. »

L’excuse de Félicia au sujet de la cupidité était clairement quelque chose qu’elle avait trouvé après coup. Et contrairement à son comportement insouciant habituel, il pouvait dire d’après le ton de sa voix qu’elle était bouleversée. Et puis il y avait eu l’erreur avec la ceinture. Il serait vraiment un échec en tant que commandant s’il n’avait pas remarqué tous ces indices.

Félicia n’avait rien dit, surprise dans son mensonge.

Les bras encore enroulés autour de la taille de Yuuto alors qu’elle nouait la ceinture, son visage était derrière lui et il ne pouvait pas voir son expression. Après un certain temps, il pensait qu’il pouvait sentir sa poignée se resserrer légèrement contre la ceinture.

« Avec ça, je peux rentrer chez moi sans soucis, » déclara Félicia.

« Qu’est-ce que tu as dit ? » Yuuto avait soudain eu l’impression qu’une griffe avait saisi son cœur. C’étaient exactement les mêmes mots à ce qu’il pensait beaucoup ces jours-ci.

« Alors, c’est ce que tu as pensé, » demanda Félicia.

« ... Alors, tu l’as réalisée, » répondit Yuuto.

« Bien sûr que je l’ai réalisé », dit Félicia avec un léger sourire. « Après tout, ces deux dernières années, à part quand nous sommes au lit, nous avons passé presque tout notre temps ensemble. J’ai commencé à devenir de plus en plus sûre de cette idée quand tu as réussi à capturer Grande Sœur Linéa... mais j’en suis devenue certaine au cours de ta conversation avec Alexis. »

Cette fois, c’était au tour de Yuuto de garder le silence. Il semble qu’il n’y avait absolument rien qu’il pouvait cacher à son adjudant.

Depuis deux ans, Yuuto voulait désespérément rentrer chez lui. Mais, dès son arrivée à Yggdrasil, le Clan du Loup qui l’avait adopté n’avait cessé d’être en guerre. Jusqu’à tout récemment, vivre pour voir un autre jour devait être sa priorité absolue, et la recherche d’un moyen de rentrer chez lui avait inévitablement été mise de côté.

Puis il y avait sa famille. Bien sûr, ce n’était qu’une construction sociale créée en jurant sur un calice sacré, mais, quelle qu’en soit la raison, il avait formé des liens familiaux. Laisser sa famille derrière lui jusqu’à une mort certaine alors qu’il s’était échappé seul et était maintenant en sécurité était quelque chose dont il savait qu’il se serait senti coupable.

Mais maintenant, le Clan du Loup était devenu beaucoup plus grand et puissant qu’il y a deux ans, et ses deux clans ennemis de longues dates, la Corne et la Griffe, étaient devenues des familles assermentées par le Serment du Calice.

Alors que la menace récente du danger commençait à s’estomper, Yuuto était conscient du fait qu’il pensait à chercher un moyen de rentrer chez lui. Ce dont il n’avait jamais rêvé, c’était que quelqu’un d’autre remarquerait ce secret caché dans son cœur.

« Maintenant qu’il n’y a plus rien pour te retenir ici, j’ai ressenti ce terrible malaise, Grand Frère, » déclara Félicia. « Comme si, si tu revenais à Iárnviðr, tu pourrais soudainement disparaître, et je... S’il te plaît, pardonne-moi. Même si tout est de ma faute, je t’ai dit des choses si impertinentes. Même si je n’en ai pas le droit. Vraiment, je ne sais pas pourquoi... »

Sa voix était remplie de regrets et elle semblait vraiment perplexe face à ses propres émotions. Il est vrai que Félicia avait toujours maintenu un niveau de sang-froid d’adulte, soutenant Yuuto dans ses moments de faiblesse. C’était très différent pour elle de perdre le contrôle d’elle-même à cause de ses émotions comme ça, et cela l’avait probablement beaucoup dérangée.

« Désolé », s’excusa Yuuto en tapotant sur la tête de Félicia.

« Tu n’as pas à t’excuser auprès de moi, Grand Frère ! J’étais simplement égoïste. J’ai perdu le contrôle de moi-même et j’ai agi honteusement envers toi. »

« Même ainsi, je suis désolé, » répondit Yuuto.

« Comme je l’ai dit, tu as — Arg ! Qu’est-ce que tu fais ? »

Yuuto avait réduit au silence l’argument de Félicia en caressant le haut de ses cheveux.

Il s’excusait parce que c’était lui qui l’avait forcée à se sentir ainsi. Elle l’avait dit elle-même : Elle en était devenue certaine au cours de sa conversation avec Alexis. Elle était probablement déjà au courant du changement dans son attitude, et cette conversation avait dû aggraver les choses pour elle.

Elle avait également montré à quel point elle avait secrètement voulu que Yuuto reste à Yggdrasil. C’était Félicia qui l’avait convoqué ici par accident. Elle avait réfréné son désir qu’il reste malgré la culpabilité qu’elle ressentait de l’avoir amené ici... ou peut-être à cause de cela.

« Je suis trop insensible, n’est-ce pas ? » déclara Yuuto doucement. « J’ai trop dépendu de toi, Félicia. »

Il sentait à nouveau à quel point il était immature.

Pendant ces deux années, la personne qui avait été la plus proche de lui, qui l’avait constamment soutenu, était Félicia. Bien sûr qu’ils agissaient pour prendre soin l’un de l’autre. Ce serait bizarre s’ils ne l’avaient pas fait. Yuuto pensait à elle comme si elle était sa vraie sœur.

Et pendant tout ce temps, il lui demandait de l’aider à chercher une méthode pour rentrer chez lui. Même lui, il pensait qu’il était un type assez terrible pour avoir ça.

« A-Arrrêtt  ! Attends un instant, Grand Frère ! » Félicia avait soudainement crié d’une manière qui lui donnait l’air calme par rapport à son manque de sang-froid précédent.

« Euh !? » Yuuto n’avait pas eu le temps de réagir.

Félicia se leva brusquement et se pencha de près, amenant son joli visage jusqu’à son nez. « V-Vraiment, ça me rend très h-heureuse quand tu comptes sur moi ! Fais comme d’habitude et dis-moi tout ce dont tu pourrais avoir besoin ! »

« E-Eh bien, m-mais... »

« S’il te plaît, oublie tout ce qui vient de se passer. Moi, Félicia, j’ai fait la plus grande gaffe de ma vie. À partir de maintenant, je donnerai tout ce que je suis pour me consacrer aux besoins du cœur de Grand Frère sans être retenu par le mien, alors laisse-moi te servir ! S’il te plaît ! » déclara-t-elle.

« O-Okay. » Yuuto ne pouvait que hocher la tête en accord, déconcerté par l’air de servitude presque menaçant de Félicia.

Yuuto avait commencé à penser qu’à l’avenir, il devrait s’efforcer d’être plus attentif aux émotions de Félicia, tout en s’abstenant de trop compter sur son soutien. Mais il semblerait que ce n’était pas ce qu’elle voulait.

La dure réalité de la situation lui était aussi venue à l’esprit : le fait que, sans son soutien, il n’y avait aucune chance que quelqu’un d’aussi inexpérimenté et ignorant d’Yggdrasil que Yuuto puisse faire quelque chose.

Yuuto avait souri avec un sourire ironique. « Bon, d’accord, je vais te causer plus d’ennuis à partir de maintenant, mais merci, Félicia. Je compte sur toi. Tu es... tu sais. Tu es après tout ma confidente la plus digne de confiance. »

Immédiatement après l’avoir dit, il avait senti son visage se réchauffer. Quand il exprimait ses sentiments à une personne, il était toujours devenu comme ça. L’embarras s’était mis en travers du chemin. Mais il avait quand même réussi à dire ce qu’il ressentait vraiment.

Un confident était quelqu’un avec qui vous pouviez être honnête et ouvert sur n’importe quoi, demander des conseils sur n’importe quoi, et leur faire confiance pour faire la même chose. Sigrun était loyale à coup sûr, ni plus ni moins que Félicia, mais en tant que source de conseils privés, il n’y avait personne de plus grand que Félicia.

Après tout, c’était vrai. En dehors du moment où ils étaient au lit, ils avaient passé pratiquement l’intégralité de ces deux ans ensemble.

« Eh !?? Oh... »

Félicia avait cligné des yeux un instant, comme si elle n’avait pas compris ce qu’elle avait entendu, puis elle avait souri. Ce n’était pas son sourire habituel, mature et composé, mais légèrement ludique, auquel Yuuto était habitué. C’était le sourire joyeux et pur, plus adapté à une fille de son âge, comme une fleur brillante qui s’épanouissait soudainement.

« O.. Oui !! S’il te plaît, laisse-moi m’occuper de tout ! Moi, Félicia, j’arrêterai absolument et sans faute ce mariage avec Grande Soeur Linéa ! »

Félicia était encore plus différente d’elle-même, débordante d’enthousiasme et criant d’une voix vive, presque hystérique. Il semblerait que les paroles de Yuuto l’aient rendue très heureuse.

Maintenant qu’il y avait réfléchi, Yuuto s’était rendu compte qu’il avait déjà remercié Félicia plusieurs fois auparavant, mais il ne lui avait jamais vraiment dit à quel point il lui faisait confiance.

Rien que de penser à ces choses dans mon cœur ne suffira pas. Je dois m’assurer de les dire correctement, ou je le regretterai, s’était dit Yuuto avec une conviction renouvelée.

Il avait déjà vécu le pire exemple de cela. Il était devenu plus qu’un ami d’enfance et moins qu’un petit ami avec Mitsuki, et pendant qu’il traînait les pieds, il avait été envoyé dans ce pays lointain avant même d’avoir eu l’occasion de se confesser. Tant pis pour apprendre de ses erreurs.

« ... Ça me rappelle que je dois trouver un moyen d’expliquer ça à Mitsuki. » Yuuto se souvient d’un autre problème déprimant entre ses mains, et il était déjà déprimé.

Dans tous les cas, c’était un problème qu’il devait régler seul.

Était-il son destin d’avoir des problèmes avec les femmes ? Yuuto avait sérieusement commencé à envisager la possibilité.

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Un commentaire :

  1. Merci pour le chapitre.

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