Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 1 – Chapitre 5

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Acte 5

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Acte 5

Partie 1

À l’origine, le Clan du Sabot était une ramification du Clan du Sanglier, un clan qui avait jusqu’à il y a peu, exercé une grande influence à Álfheim, mais alors ils étaient devenus un minuscule clan en s’isolant dans la partie la plus à l’ouest d’Álfheim... qui était d’ailleurs la pointe la plus occidentale d’Yggdrasil lui-même.

Après cela, l’actuel souverain patriarche du Clan du Sabot, Yngvi, avait suivi son ascension vers sa position en avalant tous les clans qui entouraient la famille principale du Clan du Sanglier, transformant ainsi le Clan du Sabot en l’un des dix meilleurs clans sur la centaine présente sur la surface d’Yggdrasil.

Yngvi, l’homme qui avait ressuscité le Clan du Sabot, avait eu 36 ans cette année. Son corps débordait encore de la force de la jeunesse, mais il était aussi enveloppé dans l’entêtement et la ruse que son expérience apportait. Son corps et son esprit étaient clairement à leurs apogées, ce qui avait stimulé encore plus loin son désir de puissance. Même s’il gagnait tout le territoire qu’il pouvait acquérir à sa portée, cela ne ferait qu’encore plus amplifier son ambition.

S’il s’emparait du territoire fertile du Clan de la Corne autour du bassin du Körmt, il ne faisait aucun doute que l’influence du Clan du Sabot allait croître de façon exponentielle et que le chemin vers l’Empereur Divin et d’Ásgarðr s’ouvrirait pour eux.

Le Clan du Sabot avait attendu une occasion propice depuis quelque temps déjà. Puis, ils avaient appris que le Clan de la Corne et le Clan du Loup se battaient, mais qu’en plus, le Clan du Loup avait écrasé l’armée du Clan de la Corne.

En plus de cela, ils avaient appris par l’intermédiaire de leurs espions que la souveraine du Clan de la Corne était retenue prisonnière par le Clan du Loup, et que même le commandant en second avait pris congé pour aller inspecter l’état actuel de sa souveraine. Cela avait créé une circonstance opportune unique dans une vie.

En vérité, ce que le Clan de la Corne offrait maintenant ne pouvait guère s’appeler de la résistance, et le Clan du Sabot avait rapidement vaincu trois forteresses. Yngvi avait trouvé tout cela plutôt décevant et insatisfaisant. Pourtant, il n’avait pas perdu son temps en des lamentations. Il était simplement passé à l’attaque de la capitale du Clan de la Corne, Fólkvangr.

« Heh heh heh! » ricana-t-il. « Cela doit signifier que les cieux me préparent à être le Souverain Suprême. »

Ce qu’il disait était arrogant, franc et simple. Normalement, les insécurités pour ceux qui sont au sommet leur faisaient dévaler la pente, mais comme le chef du Clan du Sabot était plein de confiance, les gens au-dessous de lui ne ressentaient aucune peur ou trépidation. Ne pas avoir le moindre manque de confiance était un autre type de compétence de commandement.

En refrénant son désir de prendre et de saisir, Yngvi avait ordonné à ses soldats de faire une pause. « Nous allons camper ici pour ce soir. Cependant, ne baissez surtout pas votre garde. »

Aussi fier qu’il soit, Yngvi était un général ayant une longue histoire de service militaire. Il savait au plus profond de son être que la moindre négligence sur le champ de bataille pouvait signifier la mort. Il ne serait pas assez fou pour continuer à marcher par orgueil alors que ses soldats étaient épuisés. Après tout, il aurait besoin des services des enfants et des petits-enfants de ses soldats. Il ne serait pas bon de les faire mourir en vain.

Décidant de leur prochain mouvement dans une tente qui avait été érigée, Yngvi réalisa soudainement qu’il y avait une activité chez les troupes de l’arrière.

« Hm ? » murmura-t-il. « Quoi... ? »

À peine avait-il commencé à se demander ce qui se passait que...

Bwooooooo !!! Bwooooooo !!!

Un bruit à se crever les tympans retentit dans toute la zone. C’était le bruit provoqué par une attaque ennemie.

« Bien, bien !! Je n’aurais pas pensé qu’ils oseraient lancer la première attaque ! » Les coins de la bouche de Yngvi se contractèrent en un rictus alors qu’il se levait. Il s’attendait à ce que le Clan de la Corne s’enfermerait comme une tortue dans sa carapace et qu’il ne voudrait surtout pas en sortir.

Mais c’était exactement ce que Yngvi espérait. Un siège aurait pris beaucoup trop de temps.

Comme il était en possession d’un territoire aussi vaste, la terre du Clan du Sabot avait des frontières avec bien plus de pays que les terres du Clan de la Corne. Il deviendra de plus en plus dangereux pour le Clan du Sabot de concentrer ses soldats uniquement sur le Clan de la Corne. Et si Yngvi, le souverain, restait trop longtemps loin de son pays, trop de choses seraient laissées inachevées. Donc, s’ils pouvaient tout régler sur le champ de bataille en une fois, ce serait une raison de grande célébration pour lui.

« Eh bien ! Maintenant, finissons-en rapidement avec eux, » dit-il avec confiance, debout pour examiner l’ennemi qu’il était sur le point de détruire.

Mais même cette arrogance avait été emportée aussi rapidement qu’une plume par le vent.

La tente d’Yngvi était située sur une haute colline à partir de laquelle il pouvait surveiller toute son armée. Un spectacle incroyable se déroulait maintenant au-dessous de lui, éclairé par des torches et le clair de lune.

« Q-Qu’est-ce que c’est !? » s’exclama Yngvi.

À en juger par le symbole qu’ils portaient, les soldats semblaient être membres du Clan du Loup. Ils étaient venus aider leurs proches du Clan de la Corne et ils s’étaient joints à la bataille. C’était bien. Tout se déroulait selon son plan.

Leurs nombres étaient encore plus faibles que ce à quoi il s’attendait. Il y avait probablement seulement une centaine de soldats dans cette troupe. Ce n’était absolument pas suffisant pour affronter l’armée du Clan du Sabot qui comptait environ 10 000 hommes.

Pourtant, toutes les cents membres du Clan du Loup étaient à cheval.

Et contre cette centaine de cavaliers, les troupes du Clan du Sabot avaient été incapables de riposter efficacement. Totalement surpassés par leur adversaire, ils réussissaient à peine à se battre et tombaient rapidement dans la panique, alors que des cris de douleur et d’angoisse s’élevaient du champ de bataille et que le camp lui-même tombait dans le chaos.

« Leurs troupes sont à cheval !? Des imbéciles ! Comment comptent-ils se battre !? » cria Yngvi.

Se battre à cheval demandait d’effectuer une longue période de formation. Au moins cinq ou dix ans. Peu importe le clan, être capable de trouver des individus qui pouvaient monter à cheval était difficile..., ils étaient une denrée rare.

Le Clan du Sabot était l’un des Grands Clans. Il y en avait un petit nombre qui pouvait monter à cheval. Yngvi lui-même était chevronné, et il était même parmi les meilleurs de son clan.

Pourtant, même avec ses compétences, il ne songerait jamais à se battre à cheval. Avec le peu de soutien offert au niveau de jambes, il y avait l’angoisse que le combat à cheval conduirait inévitablement à être mis à terre par son cheval puis abattu. Combattre avec l’ennemi à cheval était un jeu de hasard.

Ou c’était comme ça que cela aurait dû être.

Les troupes qui avaient lancé l’attaque de nuit tiraient flèche après flèche depuis des carquois attachés sur leurs dos, tandis que d’autres soldats frappaient à la vitesse de l’éclair avec des lances qu’ils tenaient fermement dans leurs mains, faisant rage avec une telle ferveur sans jamais perdre leur équilibre.

Ils utilisaient amplement la centaine de personnes à leur disposition, comme s’ils avaient été formés pendant des années pour cette attaque. Parmi eux se trouvait une femme assez jeune pour qu’on puisse l’appeler à la place une jeune fille.

C’était comme dans un cauchemar.

Yngvi s’était pincé dans sa cuisse, et avait bel et bien senti une poussée de douleur. Ce n’était pas un rêve, c’était la réalité.

« Cela... ne peut pas être possible ! » *Clack !* il avait giflé avec forces ses deux joues, essayant de revenir à la réalité.

C’était le champ de bataille, et en ce moment, ils étaient attaqués par l’ennemi. Et lui, en tant que commandant, ne pouvait perdre la tête maintenant.

« Calmez-vous tous ! » beugla-t-il. « Aussi inattendu que cela puisse être, l’ennemi n’est présent qu’en un petit nombre. Si nous restons calmes, nous pouvons les vaincre ! Messagers ! Informer les lignes de front ! Dépêchez-vous ! »

Yngvi avait crié si fort que sa voix avait semblé se casser, et ceux proches de lui s’étaient remis au garde-à-vous. Plusieurs de ses hommes s’étaient précipités vers les lignes de front en panique.

Quoi qu’il en soit, Yngvi était encore le héros qui avait uni le gigantesque Clan du Sabot. Les généraux ordinaires, se précipitant dans la confusion, ne feraient qu’aggraver la situation.

Il s’était rapidement ressaisi et s’était orienté vers la situation.

C’était facile à mettre en mots, mais la situation était chaotique, changeant d’instant en instant, et avec une erreur de calcul capable de transformer le cours de la bataille qui pouvait faire changer de la victoire à la défaite, il était très difficile de rester calme.

Plus que tout, la raison pour laquelle il avait été capable d’étouffer facilement le chaos sur les lignes de front était le respect et la confiance qu’il avait mérités grâce à ses nombreuses réalisations militaires, ainsi que sa volonté d’exécuter quiconque aurait poussé ses opérations militaires dans le désarroi.

Cependant, le général ennemi était assez capable. Dès qu’il avait vu que le Clan du Sabot s’était ressaisi, il avait ordonné une retraite. Ils s’étaient retirés soudainement et en douceur, sans soupçon de doute ou de confusion.

Alors qu’ils s’étaient préparés avec une contre-attaque, les soldats du Clan du Sabot étaient plus qu’un peu déçus.

« Ne les laissez pas s’enfuir ! »

« Attrapez-les ! »

« Faites-les tomber de leurs chevaux ! »

Naturellement, avec leurs cris de colère, les soldats du Clan du Sabot cherchaient à les poursuivre. Mais bien sûr, l’ennemi était à cheval alors ce n’est pas réalisable. Comme pour afficher clairement qu’il était impossible de les rattraper, ils s’éloignèrent lentement, jusqu’à ce que le Clan du Sabot les perde de vue dans l’obscurité de la nuit.

Après avoir tourmenté leurs forces, l’ennemi s’était échappé sans même avoir vu l’un de ses soldats se faire abattre. Il ne pourrait y avoir aucune plus grande disgrâce pour les soldats du Clan du Sabot.

Mais pour le Clan du Sabot, ce n’était que le début du cauchemar.

***

Partie 2

À peu près au même moment, une unité du Clan de la Corne avec à sa tête Linéa avait atteint la capitale du Clan de la Corne en toute sécurité, prête pour la bataille.

Cela faisait deux mois que Linéa n’était pas allée dans son bureau, mais elle n’avait pas le temps pour le sentimentalisme. Elle avait continuellement chassé tous ceux qui étaient venus lui rendre visite. Finalement, quand elle avait donné la plupart de ses instructions, son corps avait été saisi par une grande fatigue.

« Ces choses appelées étrier sont incroyables, » murmura Linéa, se penchant en arrière dans sa chaise.

Linéa ne possédait pas une très bonne compétence en équitation. Mais elle avait toujours été capable de parfaitement contrôler son cheval tout en le faisant avancer au trot, sans avoir besoin de faire passer sa monture sur une allure de galop.

De toute évidence, un cheval et son cavalier avaient chacun leurs propres volontés. Ce qui signifiait que, parfois, on agirait de manière imprévisible vis-à-vis de l’autre. Par exemple, même un frisson pourrait jeter le cheval dans un état de confusion. Dans ce cas, le cavalier perdrait probablement son équilibre et tomberait. Et en essayant comme il pourrait de rétablir leur posture, il n’y aurait rien à attraper sur le cheval pour s’aider.

C’est pourquoi le fait d’avoir ces étriers fournissait une certaine forme d’assurance pour tout changement qui pourrait survenir. Même au niveau de compétence de Linéa, elle pouvait galoper sur un cheval. Pour cette raison, les voyages qui prendraient normalement quatre jours en chariot avaient été raccourcis de deux jours. Cette différence représentait quelque chose d’énorme.

Au retour de Linéa, l’absence à la fois de la matriarche souveraine du Clan de la Corne et de son commandant en second avait conduit à un désaccord interne. Ce conflit était lié au fait de savoir si le clan devait se rendre face aux envahisseurs ou riposter. Si elle était arrivée même un jour plus tard, la scission entre les deux factions aurait complètement divisé le clan. La raison pour laquelle elle l’avait fait à temps était grâce à ces étriers.

Plus important encore, avec les étriers, il faudrait seulement un peu d’entraînement pour que les soldats apprennent à se battre avec des armes à cheval. Quand cela lui avait été signalé, elle avait réalisé qu’elle n’avait jamais envisagé cette possibilité. Ou plutôt, il serait juste de dire que ce n’était pas quelque chose qu’elle avait eu l’occasion de considérer, car la pensée de se battre avec des armes au sommet d’un animal si instable défiait tout bon sens.

Pour être sûr, ce n’était pas une question d’incompétence ou d’esprit borné. Les principaux soldats du Clan du Loup, Sigrun et le commandant en second Jurgen avaient beaucoup plus d’expérience à cheval qu’elle, ainsi que plus d’expérience avec les tactiques militaires. La même chose était vraie pour le héros du Clan du Sabot, Yngvi. Et même ainsi, ce n’était pas quelque chose qu’ils avaient même envisagé, pensant que c’était irréalisable.

Ce n’était pas une surprise, car l’étrier ne serait pas développé avant le quatrième siècle avant J-C, ce qui signifiait qu’ils voyaient un objet de près de deux millénaires dans le futur ! Pour Yuuto, il avait été complètement incapable de monter à cheval à un moment donné et il s’était demandé simplement si une selle et des étriers pouvaient le rendre plus facile pour lui, mais c’était une technologie tellement avancée pour cette époque que cela pourrait aussi bien être une tricherie.

« Pour commencer, il arrive avec ces longues lances, et maintenant ces étriers... Grand Frère Yuuto est vraiment un dieu de la guerre ressuscité, » murmura Linéa.

« Ce n’est nullement exagéré. Ce conseil de guerre qu’il a menée m’a donné des frissons. Haha ! » Le sous-commandant du Clan de la Corne, Rasmas, avait ri après ça. Comme si le fait de déclarer ses mots lui avait fait se rappeler de la scène, son corps avait instinctivement eu un petit frisson. « Pour le dire franchement, j’ai ressenti une telle indignation à la pensée que tu serais en aval d’un tel chiot, Princesse, mais il pourrait tout à fait être plus comparable à un lion... J’étais si aveugle. »

« Je suis surprise que tu admettes ça, Rasmas, » déclara Linéa. « Pourtant, cette bataille semblait si désespérée, et maintenant, il semble que nous pourrions gagner. ».

« Gagnons, peu importe comment. Nous ne devons pas nous laisser piétiner par le Clan du Sabot, » répliqua Rasmas.

« Oui, tu as raison ! » déclara Linéa, en faisant un signe de tête décidé.

Elle ne pouvait s’empêcher de penser que c’était sa propre faiblesse qui avait permis cette crise. Même après avoir assumé le rôle de général, elle n’avait jamais pu faire disparaître le doute constant quant à la possibilité qu’elle ne puisse pas gagner cette bataille. Mais elle n’avait pas de temps pour y penser maintenant. Tout ce qu’elle pouvait faire désormais était de donner tout ce qu’elle avait à ce qu’elle pouvait changer.

« Princesse, en cas de victoire dans cette bataille, j’ai une proposition, » déclara Rasmas d’un ton très formel.

« Pourquoi es-tu si formel ? » demanda Linéa. « Et c’est un peu hâtif de parler d’après victoire avant même que nous ayons gagné. »

Cette bataille était vraiment pour le destin et l’avenir du Clan de la Corne.

Ce n’était pas le moment pour les pensées oisives, c’était le moment de se consacrer corps et âme à la victoire. Sur les champs de bataille, le moindre manque de force mentale signifiait la différence entre gagner et perdre, ou plus importants, la vie et la mort.

Elle pensait que quelque chose comme ça aurait dû être bien plus évident pour un soldat comme Rasmas ayant un long passé militaire que pour quelqu’un de jeune comme elle.

Mais à la seconde où elle avait entendu la proposition de Rasmas, toutes ses pensées avaient été balayées. En fait, même si ça n’aurait pas dû être ainsi, pendant longtemps, l’esprit de Linéa s’était vidé de toutes pensées.

***

Partie 3

« Linéa, je suis désolé de vous avoir fait attendre, » déclara Yuuto.

Les principales troupes des forces du Clan du Loup sous le commandement d’Yuuto étaient arrivées à Fólkvangr après tout au plus quatre jours. C’était juste à temps pour servir de renforts aux troupes anxieuses du Clan de la Corne qui pouvaient entendre le Clan du Sabot à leur porte. Néanmoins, la vitesse de déplacements des soldats était limitée par l’unité la plus lente de l’armée. Pour le Clan du Loup qui se concentrait sur l’infanterie, ils étaient tout compte fait arrivés encore assez rapidement.

Les troupes du Clan du Loup avaient complètement écrasé les troupes du Clan de la Corne lors de leur dernière bataille, alors le Clan de la Corne connaissait mieux la puissance du Clan du Loup que n’importe quel autre clan d’Yggdrasil.

Les citoyens du Clan de la Corne regardaient maintenant avec une grande foi les soldats du Clan du Loup, qui s’étaient rassemblés au centre de la ville.

« Où est maintenant l’ennemi ? » Yuuto avait demandé cela à Linéa après être sauté de son char.

Il était venu la chercher.

En rencontrant le regard d’Yuuto, le visage de Linéa avait rougi si vite qu’il semblerait presque entendre le sang qui se précipitait dans son visage. « Hein !? Quoi !? »

« Hm ? Qu’est-ce qui ne va pas ? Avez-vous contracté un rhume ? Je ne voulais rien dire, mais vous avez l’air un peu souffrante, » déclara Yuuto.

« N-NNN-Non ! Puisque nous sommes sur le point d’entrer dans la bataille, je suis juste excitée, c’est tout ! C’est seulement à cause de ça ! » répondit Linéa.

« Holà ! Vous êtes bien trop remontée quant à ça. Si le commandant suprême du Clan de la Corne n’est pas plus pondéré, peut-il vraiment faire son travail ? » déclara Yuuto d’une voix surprise, alors que son visage indiquait un certain malaise.

Un commandant suprême était responsable de la vie de toute une armée. La moindre erreur de calcul pourrait signifier la différence entre la vie et la mort pour beaucoup d’individus.

Dans ces moments-là, le général d’une armée amie avait besoin d’instaurer le bon état d’esprit à son allié.

« Ah, bon sang ! C’est parce que Rasmas m’a dit quelque chose de bizarre, » murmura Linéa. « Je suis tellement inquiète que je ne peux pas vous regarder dans les yeux, Grand Frère ! »

« Hein !? Avez-vous dit quelque chose ? » demanda Yuuto.

« Non ! Rien du tout ! » répondit Linéa.

« Je vois. Alors ? » demanda Yuuto.

« Oui ? Que voulez-vous dire par “Alors” ? » demanda-t-elle à son tour.

À la stupéfaction de Linéa, Yuuto se grattait le visage en signe de vexation. « Je vous ai demandé quelque chose ! Où est maintenant l’ennemi ? »

Bien qu’Yuuto soit normalement gentil avec n’importe quelle fille qu’il se devait de protéger, en ce moment, au bord de la bataille, il avait épuisé sa patience. Il ne pouvait pas s’empêcher de lui parler d’une voix un peu rude.

Linéa avait repris ses esprits en transmettant les informations demandées. « Je... Je suis désolée ! Selon les estimations de ce que nos éclaireurs nous ont rapporté, ils avancent alors qu’ils se situent à moins d’une demi-journée de marche de nous. »

« Une demi-journée, hein !? Ouf, nous sommes vraiment arrivés à temps, » déclara-t-il.

À côté d’Yuuto, son adjuvant Félicia avait également poussé un soupir de soulagement. « C’est vraiment le cas. Si la capitale avait été prise avant notre arrivée, ce serait la pire situation imaginable, alors je suis vraiment soulagée. »

Cependant, quand elle tourna son regard vers Linéa, elle poussa un lourd soupir chargé d’émotions.

« Eh bien ! Je suppose que, même dans un tel cas, Grand Frère avait déjà techniquement conquis cette ville, » déclara Félicia. « Cela pourrait parfaitement être une autre facette de ta nature incroyable, mais de penser que tu ne ferais pas de discrimination contre une autre nation, Grand Frère... »

« Non, non, c’est différent de ces forts que j’ai capturés avant, » déclara Yuuto. « Dans tous les cas, prendre une cité de cette taille serait difficile. »

« Hehe ! Grand Frère, tu pourrais probablement la prendre sans même aller au combat, » Félicia avait ri d’une manière très suggestive, ce qui fit qu’Yuuto se demanda quand elle cesserait finalement de le surestimer.

Il n’avait pas réalisé la véritable signification derrière les paroles de Félicia.

Quoi qu’il en soit, blâmer quelqu’un en ce moment semblait trop sévère. Yuuto se souciait uniquement de savoir s’il pouvait ou non gagner la bataille. Il y avait beaucoup de choses qui devaient être faites pour le permettre.

Et la question en ce moment était...

« D’accord... commençons par manger ! » Yuuto s’adressa aux autres d’une voix aiguë, s’installant sur place en s’asseyant les jambes croisées. « Ceux qui le désirent peuvent boire un verre d’alcool. »

Son adjointe, Félicia, avait commencé à émettre des ordres à ceux qui se tenaient à proximité afin de faire préparer la nourriture. Mais les yeux de Linéa s’écarquillèrent largement sous le choc.

« Hé ! Pour commencer, de la nourriture et maintenant de l’alcool ! Comment pouvez-vous être si décontracté !? Grand Frère, le Clan du Sabot est presque là ! » s’écria Linéa. « Nous sommes dans tous les cas désavantagés en nombre, nous devons donc nous dépêcher de trouver une position avantageuse et mettre nos soldats en position. »

« “Attendez tranquillement ceux au lointain, attendez-les alors qu’il se fatigue tout en restant dans le confort, attendez les affamés avec le ventre plein. Voilà la maîtrise de la force.”, Linéa, » déclara Yuuto.

« Hein !? Q-Qu’est-ce que ça veut dire ? » La bouche de Linéa était grande ouverte face au difficile dicton mémorisé par Yuuto.

C’était comme si elle comprenait à peine son sens.

« C’est un verset des paroles d’un manuel de guerre de Sun Tzu, qui ont longtemps été louées et qui sont restées pertinentes pendant plus de 2 500 ans, » répondit Yuuto. « Nous campons dans un endroit avantageux et attendons que l’ennemi arrive de loin, nous nous reposons et attendons nos ennemis épuisés, et nous mangeons au contenu de notre cœur afin d’attendre nos ennemis affamés. C’est ainsi que nous maîtrisons la force. »

Yuuto déclarait cela avec autorité comme s’il comprenait parfaitement de quoi il parlait, même s’il ne faisait que répéter le manuel de guerre de Sun Tzu. Yuuto avait estimé que les implications de ces mots étaient plutôt évidentes. Il devait rendre hommage à Sun Tzu pour le livre qu’il avait écrit.

En tout cas, les mots de l’homme correspondent parfaitement à la situation actuelle du Clan du Loup.

« Ils viennent de loin, ils sont fatigués et ils n’ont pas mangé, » expliqua Yuuto. « Il n’y a aucune chance qu’ils puissent faire un étalage de leur force dans une telle situation. Alors... commençons à manger ! » Yuuto échangea des regards amusés avec Linéa, les coins de sa bouche se tordant vers le haut.

« Je... Je vois. Cela vous ressemble tellement, Grand Frère. De penser que vous seriez si familier avec un tel manuel de guerre si ancien ! » Linéa interjeta encore et encore, exprimant apparemment son admiration sincère.

En dépit de tous les problèmes qu’Yuuto lui avait occasionnés, le réconfort qu’il avait apporté maintenant était équivalent de lui avoir fourni 100 000 soldats. Elle avait répété ses paroles jusqu’à ce qu’elles rentrent en elle, les gravant ainsi dans son cœur.

« Euh ! Mais nous sommes supposés faire notre camp quelque part sur une position avantageuse, non ? » demanda-t-elle. « Si nous prenons une trop longue pause, ne manquerons-nous pas de temps ? »

« Sun Tzu a également dit qu’en faisant usage de détours, nous pouvons toujours avoir une certaine forme d’avantages. Nous avons déjà prévu pour cela, » répondit Yuuto.

« C-C’est vrai ! » Les joues de Linéa se mirent aussi tôt à rougir, alors que sa voix tremblait en raison de l’émotion. Elle s’était maintenant assise par terre. Ses yeux alors qu’elle regardait Yuuto débordaient d’adoration. C’était pourquoi elle ne l’avait pas réalisé.

Yuuto débordait d’une confiance superficielle, mais son poing était serré en raison de l’inquiétude. « Run... ne meurt pas, » murmura-t-il si faiblement afin que Linéa ne puisse pas l’entendre.

En tant que patriarche souverain, il avait envoyé son guerrier le plus fort parce qu’elle était la meilleure pour cette mission. Il avait refusé de voir cela comme une erreur à ce moment de l’histoire. Mais dans ce monde, Sigrun était une amie précieuse pour Yuuto. Le cœur d’Yuuto avait été déchiré par la perspective qu’il puisse l’envoyer à une mort certaine.

Une voix ferme et douce vint chatouiller le lobe de l’oreille d’Yuuto. « Grand Frère, Run ira bien. Elle peut faire face à cela. »

Même si Félicia n’aurait pas pu entendre ses murmures, il semblait que ses angoisses l’avaient atteinte, et tout de suite après ça, des larmes apparurent dans les yeux d’Yuuto, prêtes à se répandre. Cet adjudant de classe supérieure ne semblait pas être quelqu’un face à qui il pouvait efficacement garder ses secrets.

Se levant soudainement, il posa ses lèvres près de l’oreille de Félicia. « Je... suis celui qui a décidé que de se battre serait la meilleure option. Je pense toujours que, pour le Clan du Loup, c’était sans aucun doute le meilleur choix. Mais... si nous nous rendions et donnions notre terre, au moins tout le monde échapperait à la mort. »

En tant que celui qui avait décidé qu’ils allaient au combat, il savait qu’il était la dernière personne à pouvoir dire quelque chose comme ça. Ses propres mots lui avaient donné envie de vomir. Mais même ainsi, le doute rongeait son cœur.

Même s’ils devenaient des esclaves forcés à travailler dur, ou étaient taxés de plus en plus impitoyablement, leurs vies devenant de véritables calvaires, cela serait très certainement préférable que la mort, pensa-t-il. Afin de protéger les citoyens du Clan du Loup, il avait envoyé certains de ces citoyens à une mort certaine. N’était-il pas en train d’envoyer mourir des individus sur un coup de tête ?

Chaque fois qu’ils étaient allés au-devant d’une bataille, il s’agissait des incohérences qui surgissaient dans son esprit.

« Grand Frère. Je ne désire pas la “vie paisible” d’une esclave, » déclara Félicia, les yeux pleins de détermination. « Tout le monde ici ressent la même chose. Qui dans le monde souhaiterait que leurs épouses, leurs parents et leurs grands-parents, leurs frères et sœurs ou leurs enfants souffrent de telles douloureuses expériences ? Tous ceux qui se sont rassemblés ici l’ont fait afin de protéger leur famille ! »

« Tout le monde ressent... la même chose que moi ? » répéta-t-il.

Cela ne peut pas être..., la voix de la raison avait fait écho dans un coin de l’esprit d’Yuuto.

Peu importe combien c’était difficile, il devrait y avoir quelqu’un qui pensait que toute solution de remplacement était préférable à la mort.

Mais même ainsi, il voulait que quelqu’un reconnaisse ses choix. Et que cette même personne lui dise qu’il ne se trompait pas.

Le fait de tenter de protéger quelqu’un augmentait la probabilité de mourir. Afin de prendre une décision pondérée, il devrait d’abord dissiper tous ses doutes.

« Oui ! Tu es notre souverain ! » déclara Félicia. « Si tu nous dis que le blanc est noir, alors nous le prétendrons nous-mêmes, si tu nous dis de nous battre, alors nous nous battrons, si tu nous dis de mourir, alors nous mourrons. Oui, pour nous, tu es absolu ! Il y a longtemps, quand nous avons partagé le Calice avec toi, nous t’avons ainsi confié nos vies. Donc, s’il te plaît... utilise-nous comme bon te semble ! »

« ... Bon sang ! Être le souverain est après tout un travail sérieux, » s’exclama Yuuto.

Il était libre de faire n’importe quoi. Il serait pardonné pour tout. Mais être un souverain était un lourd fardeau. Celui qui avait dit que la liberté et le devoir allaient de paire avait bien dit que les choses étaient ainsi.

***

Partie 4

Bwoooooo ! Bwooooooo !!

« Hein !? Encore !? » Yngvi presta sur la corne de guerre. Il devenait malade de l’entendre sonner attaque après attaque, jour après jour. Il ne pouvait pas dormir comme ça.

Dès l’attaque initiale, pendant trois jours et trois nuits, Yngvi et le Clan du Sabot avaient subi des attaques intermittentes de la part des troupes à cheval.

Il s’agissait toujours de la nuit quand ils décidaient d’attaquer vraiment. Ils se glissaient dans l’obscurité et lançaient leur assaut.

Il semblerait que l’ennemi savait qu’une alerte était en train d’être sonnée, donc ils n’avaient pas eu l’occasion de se précipiter en profondeur dans la formation comme ils l’avaient fait la première fois.

Ils étaient arrivés dans le camp tout en soulevant un nuage de poussière, et dès qu’ils avaient su que l’ennemi était là, ils avaient lâché une volée de flèches, puis ils s’étaient retournés avant de se retirer.

Cette fois, c’était la même chose. Au moment où Yngvi arrivait afin de poser les yeux sur eux, ils avaient déjà commencé leur retraite, et peu de temps après ça, ils avaient disparu dans l’obscurité.

« Lâches ! Chaque fois, vous tournez les talons et fuyez ! » rugit Yngvi. « Ne pouvez-vous pas vous battre de front !? »

Alors qu’il sombrait dans la colère, Yngvi avait donné dans un coup de pied dans un tronc d’arbre qui se trouvait à proximité. Alors qu’il était incapable de réprimer sa rage, il tapait du pied.

Afin de faire face aux attaques-surprises constantes, ils avaient, pendant deux jours, maintenu une formation de combat dans laquelle les troupes du Clan du Sabot faisaient un cercle autour de Yngvi, ou ce que l’on pourrait appeler aujourd’hui dans le Japon, la formation de batailles du « carré et du cercle ».

Grâce à cette formation, les pertes avaient été drastiquement réduites, mais le moral du Clan du Sabot avait considérablement diminué. Vivant dans une peur et une tension constantes, ne sachant jamais quand ils pourraient être attaqués, ne pouvant jamais baisser la garde, incapable de faire une contre-attaque, et ne sachant jamais quand cesseraient ces attaques... cela suffisait pour épuiser le cœur le plus vaillant.

Cela étant dit, ils savaient déjà que l’ennemi approchait. Ils ne pouvaient pas baisser la garde maintenant. Et il était évident que s’ils hésitaient, l’ennemi verrait cela comme une opportunité et lancerait une attaque.

Ils avaient envoyé des éclaireurs afin de patrouiller, mais dans l’obscurité de la nuit, repérer l’ennemi était difficile. Et plus que tout, l’ennemi était rapide.

Il était vrai que, du fait d’être facilement visible à la lumière du jour, l’ennemi n’attaquerait pas durant cette période. Mais les soldats du Clan du Sabot étaient si fatigués en raison des attaques nocturnes qu’ils durent faire de nombreuses pauses. La formation de bataille « du carré et du cercle » qui avait si bien marché contre l’ennemi n’était pas bien adaptée pour les déplacements. La vitesse de marche du Clan du Sabot avait sensiblement baissé.

C’était tout simplement la situation qu’Yuuto visait à obtenir. Les forces du Clan du Sabot, qui comptaient une dizaine de milliers de personnes, étaient ridiculisées par une centaine de cavaliers.

« Enfin l’aube, je vois, » Yngvi regarda d’un air somnolent le ciel de l’est, maintenant teint d’un pourpre pâle.

Leurs plans prévus initialement avaient été longtemps retardés, mais ils allaient finalement atteindre Fólkvangr avant midi. Même s’ils attaquaient la forteresse du Clan de la Corne et mettaient un terme à ces agaçantes attaques à cheval qui les harcelaient depuis des jours, ils ne pouvaient toujours pas y aller en douceur.

La rage que Yngvi avait ressentie jusqu’à ce moment-là était comme une torture sans fin. Après avoir effectué des vœux à lui-même dans les profondeurs de son cœur, Yngvi retourna dans sa tente et ferma les yeux.

Après avoir passé la nuit à surveiller la venue de la prochaine attaque, il n’avait pas dormi. Les soldats ne pouvaient pas faire une démonstration de leur puissance s’il manquait de sommeil. S’attendre à une perfection quant au fonctionnement de son corps était une habitude connue de Yngvi.

Épuisé, le sommeil était très rapidement venu à lui.

Bwoooooo ! Bwooooooo !!

Le son retentissant des cornes de guerre le réveilla une fois de plus.

Au cours de ces trois derniers jours, les attaques n’étaient produites que la nuit, donc ils avaient été négligents.

Mais l’ennemi n’agissait pas comme il aurait pu s’y attendre. Il était irrité de sa propre naïveté.

Yngvi hurla, stimulé par cette irritation. « Où sont-ils cette fois-ci !? »

« Ils viennent de Fólkvangr ! Cette fois-ci, ce ne sont pas les troupes à cheval ! Une première estimation du nombre de soldats ennemis indique qu’ils sont au moins 3000. Nous pensons que cela peut être l’armée principale de l’ennemi ! »

« Ah ! Passons vers une formation resserrée. Agissez le plus rapidement possible ! » Yngvi avait déclaré ses instructions avec une certaine panique dans sa voix.

La formation du « carré et du cercle » avait été très efficace contre les attaques surprises venant de toutes les directions, mais elle était très faible contre une attaque venant d’une seule direction. S’ils se battaient avec un tel arrangement de troupes, ils subiraient d’importantes pertes.

Les soldats du Clan du Sabot étaient hautement qualifiés, et leurs officiers avaient été sélectionnés parmi les meilleurs et placés selon leurs forces. En des circonstances normales, ils auraient fait préparer leurs soldats en un clin d’œil.

Mais, avec l’état mental actuel des troupes du Clan du Sabot qui était aussi tendu, au moment pile où ils avaient prévu de se reposer à l’aube, ils avaient finalement été bousculés. Ils étaient fatigués de ne pas pouvoir dormir suffisamment, et ce fut le dernier coup porté à leur moral déjà très bas.

La réorganisation de la formation de batailles avait pris trop de temps et, dans l’intervalle, l’armée ennemie avait chargé leur camp dans un nuage de poussière.

De cette manière, le rideau se leva sur la bataille entre le Clan du Sabot et les armées conjointes du Clan du Loup et du Clan de la Corne.

Les cris de guerre et les cris résonnaient sans cesse des deux côtés.

Les deux parties s’étaient battues avec une soif de sang qui avait envahi le champ de bataille, comme s’il s’agissait de la manifestation de leurs cœurs blessés. Le champ de bataille débordait de signes annonciateurs de la mort, à tel point que l’on pouvait le ressentir dans leur chair.

Les armées conjointes du Clan du Loup et du Clan de la Corne avaient organisé leurs troupes en formation triangulaire, les troupes du Clan du Loup servant de garde centrale et les troupes du Clan de la Corne qui se plaçait sur les flancs droit et gauche. C’était une formation ressemblant à une écaille de poisson, parfaite pour mettre quelques troupes à l’avant afin de percer.

« D’accord, continuez ! » À l’avant même du triangle, Yuuto menait l’attaque du haut de son char. Avec un grand cri, il avait encouragé ses troupes à l’avant, craignant que leur résolution ne se brise à tout moment.

Probablement grâce aux efforts de Sigrun, les soldats du Clan du Sabot étaient prêts à fuir, et avec cette attaque, beaucoup d’entre eux étaient incapables de faire face. Avec la vigueur de leur assaut, ils avaient traversé les forces ennemies.

Une bataille était principalement gagnée par des nombres. Cela impliquait que se battre face à face en résultait une défaite de plein fouet. Mais la stratégie employée par Yuuto causait une perturbation.

Sun Tzu avait dit que c’était une façon de faire pour qu’une petite force puisse renverser une plus grande. « Si l’ennemi prend ses aises, vous pouvez le harceler, s’il est bien nourri, vous pouvez l’affamer, s’il campe tranquillement, vous pouvez le forcer à se déplacer. »

Ceci se superposait à ce qu’Yuuto avait dit à Linéa à Fólkvangr. « Attendez tranquillement ceux au loin, attendez-les alors qu’ils se fatiguent tout en restant dans le confort, attendez les affamés avec le ventre plein. Voilà la maîtrise de la force. » Cela avait été un point de vue important tenu par Sun Tzu.

Alors qu’ils n’avaient pas pu affamer les troupes, deux sur trois n’étaient pas mauvais. Même s’il y avait encore beaucoup de troupes ennemies, il n’y en avait pas autant qu’il y en avait avant.

Les forces du Clan du Loup avaient facilement diminué le nombre de soldats du Clan du Sabot, leur tirant dessus et les abattants au corps à corps. Alors qu’Yuuto commençait à sentir que c’était devenu un massacre unilatéral, et cette victoire était assurée...

« Grand Frère ! Le général du Clan du Sabot a repris le contrôle de ses troupes ! » lui déclara Félicia.

« Zut ! Déjà ? Je ne devrais pas en attendre moins de l’homme qui a construit une si grande nation en une génération. » Yuuto fit claquer sa langue.

Il avait prévu pour eux d’avancer avec leur élan initial et de dégager les forces ennemies, en mettant à terre les généraux dans le processus, mais il semblerait que les choses n’allaient pas se dérouler comme prévu. L’ennemi s’était ressaisi plus vite qu’il ne l’avait anticipé.

En un clin d’œil, la ferveur du Clan du Loup s’était émoussée. Yuuto, ayant pris le commandement, réalisa que le côté du Clan du Sabot avait la puissance de facilement les repousser.

« D’une certaine manière, il semble que nous ne serons pas en mesure de résoudre cela par des moyens ordinaires, » sentant une bataille difficile se profiler, Yuuto mordit durement sa lèvre.

***

Partie 5

D’un autre côté, en grinçant des dents, Yngvi ressentait la même chose.

Dans le chaos du début de la bataille, ils avaient pu réduire au maximum les pertes de leur côté, et il avait rassemblé ses troupes et lancé une contre-attaque, mais il ne ressentait plus que la victoire lui soit assurée. Il n’aurait jamais imaginé qu’il puisse être constamment assailli par une si petite armée !

Cette situation était probablement due à la fatigue des jours sans sommeil et à la baisse du moral. Mais plus important encore que cela...

« C’est quoi ces lances !? » cria Yngvi.

Tout comme ils l’avaient fait lorsqu’ils combattirent le Clan de la Corne, le Clan du Loup brandissait des lances en formations serrées qui doublaient leur portée d’attaques. Les attaques du Clan du Sabot ne pouvaient pas atteindre l’ennemi, et le Clan du Loup pouvait encore lancer une contre-attaque unilatérale.

Si cela n’avait été qu’une simple bataille où les soldats brandissant des lances ne pouvaient que poignarder leur opposant, il serait facile d’esquiver l’attaque et d’aller les tuer au corps à corps. Mais comme il y avait trop de lances rassemblées, il n’y avait pas d’ouvertures pour passer à l’attaque, et aucun moyen d’échapper aux contre-attaques. Et ce n’est pas tout, ils avaient facilement réussi à percer à travers les boucliers de bronze du Clan du Sabot. Ces boucliers ne pouvaient pas arrêter les attaques de lance. C’était, en vérité, la chose la plus frustrante de toutes.

« Se pourrait-il qu’elle soit fabriquée en fer !? » se demandait Yngvi.

Comme il s’agissait de l’âge du bronze, ces personnes-là ne savaient pas encore comment affiner correctement le fer. Pourtant, cela ne signifiait pas qu’ils ne savaient pas ce qu’était le fer. Ils avaient trouvé du fer dans les météorites, qui étaient elles-mêmes rares, mais qui contenaient souvent de grandes quantités de métal. Sur Yggdrasil, ce métal qui tombait du ciel et qui était infiniment plus robuste que le bronze avait été longtemps prisé comme bijoux ou pour sa valeur marchande.

« Mais ils ne pourraient pas en avoir autant..., » il était en train de réfléchir frénétiquement à la situation. « Ont-ils trouvé un moyen de fabriquer du fer !? »

Même si c’était difficile à le croire, il s’agissait de la seule conclusion qu’il pouvait trouver. Le fer était normalement un matériau rare qui ne pouvait être trouvé qu’en le récupérant dans les météorites. Même un grand clan comme le Clan du Sabot en avait très peu. Il ne pouvait pas imaginer un clan appauvri des montagnes possédant une si grande quantité.

« Huhoho ! J’avais entendu ces marmots du Clan du Loup qui débitaient à propos de ces trucs étranges. Il semble que c’était vrai. Fascinant ! Vraiment fascinant ! » Yngvi ne pouvait pas réprimer le rire qui avait jailli telle une explosion.

C’était sûrement à cause de ces armes que le Clan du Loup possédait la puissance lui permettant de s’opposer et de détruire le Clan de la Corne et le Clan de la Griffe.

« Hé hé, j’ai vraiment de la chance. Ceci signifie sûrement que les cieux se sont alliés avec moi, » continua Yngvi.

Avec des matériaux aussi impressionnants, le Clan du Loup pourrait tuer d’autres clans dérisoires. Le cœur de Yngvi avait gonflé avec un respect non compromettant.

Si le Clan du Sabot était équipé d’armes en fer, elles deviendraient encore plus puissantes et la force militaire suprême d’Yggdrasil serait encore plus menaçante.

« Une telle force pourrait changer la face du monde, » dit-il avec respect et admiration.

Avec l’expérience de centaines de batailles derrière lui, les mots de Yngvi étaient précis dans leur clairvoyance.

Si l’on examine l’histoire ancienne de l’Est, ceux qui avaient eu cet avantage avaient été les Hittites qui avaient réussi à raffiner le fer plus tôt que les autres. Ainsi, ils étaient devenus un pays qui avait établi une hégémonie et tenu le monde de l’âge du bronze à leur portée.

« Maintenant, que ferons-nous ? » Yngvi se lécha les lèvres et tourna de nouveau les yeux pour observer le champ de bataille.

Certes, avec les longues lances en fer, le Clan du Loup était une menace. Bien que leur nombre soit inférieur à 2 000, les guerriers les plus prestigieux de l’armée du Clan du Sabot qui avaient réprimé Álfheim ne seraient pas de taille face à ça. Il y avait une réelle possibilité que si le Clan du Sabot les attaquait de front, les hommes du Clan du Loup puissent décimer cette armée de 10 000 hommes.

Cela étant dit, c’était seulement s’ils les attaquaient de front.

« Hmph ! Ils ont perdu ! » cria Yngvi.

C’était sûr, ces longues lances étaient effrayantes en face à face. Il pensait que, une fois rentrés chez eux, ils allaient concevoir une troupe en utilisant des armes similaires. Cependant, avec cette formation de combat rapprochée et une longueur considérable, il ne semblait pas du tout que des virages serrés fonctionneraient bien pour eux. S’ils se battaient contre leurs ennemis selon le bon angle, cela pourrait être gênant pour leurs opposants.

En d’autres termes, s’ils lançaient une attaque depuis le côté, les forces ennemies ne seraient pas en mesure d’effectuer une contre-attaque décente.

En plus de cela, le Clan du Sabot avait ses cinq cents chars bien-aimés. Si l’on tenait compte uniquement des chiffres pour calculer le pouvoir militaire, le Clan du Sabot, qui avait massacré de nombreux ennemis, aurait obtenu une victoire rapide.

« Hehe haha ! Cette parcelle de terre plate que ces fous ont choisie sera leur chute, » déclara-t-il.

Les grandes roues sur les chars limitaient sévèrement leurs mouvements.

La seule faiblesse du char était le terrain sur lequel il pouvait être utilisé, mais cela ne serait pas un problème ici.

Un général aussi expérimenté qu’Yngvi en savait assez pour envoyer un espion faire une enquête préliminaire sur le territoire du Clan de la Corne afin qu’ils puissent planifier l’itinéraire qui montrerait le mieux la puissance de leurs chars.

Se promenant sur son char préféré, Yngvi avait ri sans peur. « Je terminerai cette bataille de mes propres mains ! »

***

Alors que leur souverain patriarche se dirigeait vers le front, les soldats du Clan de la Corne laissèrent échapper un cri de guerre.

« Incroyable ! Nous pouvons gagner cette bataille ! » s’exclama Linéa, alors que les troupes du Clan du Loup franchissaient l’avant-garde avec une avance constante.

Ses propres troupes avaient autrefois beaucoup souffert alors qu’elles étaient à la merci des lanciers. Si quelqu’un connaissait la menace qu’ils représentaient, c’était bien elle.

C’était exactement pourquoi elle savait que son clan n’avait aucun allié plus fiable qu’eux.

« Attaque venant du côté gauche de l’ennemi ! » s’écria-t-elle. « Les voilà ! »

Son corps avait tremblé.

Linéa avait récemment connu une série incessante de défaites. Elle se disait que ce n’était pas le moment de s’inquiéter de savoir si elle était digne de commander ses troupes, et elle fit de son mieux pour surmonter ses doutes.

Avant que la bataille ne commence, Yuuto avait dit à Linéa que l’unité des longues lances était faible face à une attaque latérale. Cela faisait si peu de temps qu’elle était devenue sa subordonnée, alors les choses que son frère aîné avait partagées avec elle avaient laissé une profonde impression sur son cœur. Elle voulait être à la hauteur de ses attentes. En effet, elle avait fait le vœu de le faire.

« Uwah ! »

Mais tous ces sentiments avaient soufflé comme de la poussière dans le vent quand elle avait vu l’ampleur des forces ennemies. Linéa avait beaucoup d’expérience sur le champ de bataille. Même quand elle avait affronté l’unité des lances longues, son cœur avait brûlé de haine, mais n’avait jamais été paralysé par la peur.

Un grand nombre de chevaux, chacun plusieurs fois plus grand qu’un humain, avançait, et leurs mouvements faisaient même trembler la terre. Leur taille écrasante avait provoqué une véritable vague de terreur.

Il semblait que ses propres soldats ressentaient la même chose. Ils étaient tous en train de perdre leur sang-froid en voyant l’unité de chars approcher d’eux dans un nuage de poussière.

« Tenez votre position et résistez ! Si nous pouvons les retenir, la victoire sera nôtre ! » Linéa cria de toutes ses forces, mais ses mots n’atteignirent pas ses soldats.

Les soldats du Clan de la Corne étaient tombés dans un état de panique. Ils avaient perdu avant même que la bataille ne commence.

« Uwaaaaaagh!! »

« Eeeeeek!! »

Au moment où les deux armées s’étaient affrontées, des cris avaient pu être entendus depuis la ligne de front.

L’unité des chars avait très facilement et sans résistance brisée la ligne de front et avait fendu les forces du Clan de la Corne en deux.

Au centre de l’avant-garde, ce qui ressemblait à un géant se tenait là, choquant tous ceux qui le regardaient par sa terrifiante présence. Il balayait autour de lui sans retenue une lance géante tel un démon en colère. Il fauchait les troupes du Clan de la Corne avec ses attaques vicieuses. Comme s’ils agissaient en réponse à ça, les soldats du Clan du Sabot lancèrent des cris de guerre qui semblaient secouer le sol. Ils essayaient sûrement de se remonter le moral.

« Il-Il n’y a aucune chance que nous puissions gagner contre eux ! » Linéa grinçait des dents en raison de son désespoir.

Plus que sa propre mort, Linéa craignait de ne pouvoir protéger tout le monde. Bien qu’elle ait fait tout ce qui était en son pouvoir, la dure vérité avait été mise à nu pour que tout le monde puisse la voir. Elle savait désormais qu’elle était réellement impuissante. Voilà sa vérité. Ses subordonnés bien-aimés étaient transformés en cadavres, les uns après les autres.

« Sauvez-les... s’il vous plaît, sauvez-les tous, Grand Frère ! » plaida-t-elle en l’air.

***

« Ils continuent toujours !? » Yuuto se mordit la lèvre, fixant l’impasse avec un regard sombre clairement visible dans ses yeux.

L’ennemi n’était pas un imbécile. Afin d’éviter d’affronter les longues lances, la ligne de front ennemie s’était positionnée sur la défensive, tout en lançant des volées de flèches depuis leur arrière.

Peu à peu, les soldats du Clan du Loup commençaient à subir des pertes. Il était clair que, même s’ils avaient causé beaucoup plus de pertes à l’ennemi, s’ils continuaient à subir des dommages comme maintenant, ils seraient désavantagés par le nombre de troupes restantes.

« Grand Frère, les troupes du Clan de la Corne sur notre flanc gauche sont attaquées par des chars ! » annonça Félicia.

« Il semble qu’ils aient compris notre point faible ! » se plaignit Yuuto.

Il s’agissait de la première fois que le Clan du Sabot faisait l’expérience des tactiques spécialisées de l’ennemi. Et dans ce court laps de temps, ils avaient vu à travers le point faible des troupes équipées de longues lances et avaient changé leur stratégie en conséquence. La capacité de parvenir à une telle conclusion au milieu de tout ce chaos et de lancer une contre-attaque si tôt après le début du combat était vraiment admirable.

Yuuto ne pouvait pas s’empêcher de considérer le général ennemi comme étant quelqu’un d’exceptionnel. Il s’agissait vraiment d’un adversaire gênant contre qui il était difficile de se battre.

« Mais dans ce jeu de tactique... On dirait que je suis le vainqueur... Eh bien... cependant dans mon cas, j’ai triché, » déclara Yuuto, les coins de sa bouche se contractèrent en un sourire.

Une autre partie du passage qu’il avait lu dans les écrits de Sun Tzu lui était venue à l’esprit. « En leur offrant des avantages, on peut amener l’ennemi à s’approcher de lui-même. »

En d’autres termes, vous pourriez faire en sorte que l’ennemi vous approche d’eux-mêmes, exactement selon vos plans, aussi longtemps que vous les trompez en leur faisant croire qu’ils ont quelque chose à y gagner.

Après avoir affronté la menace provoquée par les troupes à longues lances, l’ennemi devrait certainement comprendre leur point faible, et ensuite d’aller les attaquer comme ils le faisaient maintenant. Ils l’avaient fait avec l’unité la plus forte dans cette période, les chars.

Donc, ce serait le moment et l’endroit idéal pour mettre en place un piège.

En temps de guerre, abaisser le moral de l’ennemi était essentiel. Il faudrait briser ce à quoi l’ennemi avait mis sa confiance jusqu’à ce que plus rien ne reste. Les attaques psychologiques étaient d’une grande importance.

Si un ennemi perdait son dernier rayon d’espoir, même une armée d’une dizaine de milliers d’hommes serait simplement une foule géante sans réelle force. Et si cela arrivait, cette foule ne serait plus un ennemi capable d’affronter le Clan du Loup.

C’est à toi de jouer, Run, Pensa Yuuto. Détruis-les !

***

Partie 6

Hmm, alors ils ont finalement sorti les chars, Mordant dans une miche de pain, Sigrun surveillait le champ de bataille depuis une forêt un peu plus loin.

L’unité Múspell, dirigée par Sigrun, était restée cachée dans la forêt à quelques pas de Fólkvangr afin de se reposer pour le prochain jour... ou nuit... de bataille.

Tout comme le Clan du Sabot qui avait été régulièrement poussé à l’épuisement par des attaques surprises, l’unité Múspell avait dû attaquer une armée ayant une force écrasante, et cela attaque après attaque, jour et nuit. Cela les avait donc également affectés.

Si leur cachette avait été découverte et qu’ils se retrouvaient entourés, les choses seraient finies pour eux. Il leur fallait être attentifs à tout moment, et pas seulement pendant la bataille.

De plus, cette stratégie reposait fortement sur la vitesse, et ils devaient donc être prêts à agir en un instant. Les rations qu’ils avaient emportées avec eux avaient été rapidement épuisées, alors ils avaient survécu grâce aux aliments achetés localement. Yuuto du Clan du Loup avait prévenu que le pillage était inacceptable, donc des pépites d’argent devaient être utilisées afin de pouvoir faire des échanges pour de la nourriture.

Comme le Clan de la Corne bénéficiait des terres fertiles le long du bassin de la rivière Körmt, ils s’attendaient à pouvoir trouver de la nourriture le long des berges de la rivière, mais comme ils ne connaissaient pas les terres, trouver des villages s’avérait difficile. Comme ils avaient à peine pris quelque chose qui ressemblait à une véritable pause, l’unité Múspell était encore plus épuisée que les troupes du Clan du Sabot.

« Ohh, on dirait qu’ils ont compris, » s’exclama Sigrun, avec un peu d’admiration.

Si un ennemi devait être acclamé pour sa force ou sa ruse, alors elle leur afficherait le respect approprié. C’était la façon dont un vrai soldat comme Sigrun voyait les choses.

L’unité des chars se déplaçait autour du théâtre principal du champ de bataille plutôt qu’à travers lui. La raison en était claire. C’était pour qu’ils puissent surpasser les fantassins et pouvoir effectuer une attaque latérale contre l’unité aux lances longues.

Même à la suite de l’attaque-surprise de Sigrun, les soldats avaient pu rapidement se calmer. Pour cette raison, leur premier plan pour tirer parti du chaos et brûler les approvisionnements ennemis avait été impossible à se concrétiser.

Peut-être était-ce le résultat de son expérience, mais le général qui dirigeait le Clan du Sabot était étonnamment doué pour faire face à ces situations inattendues. Les soldats avaient sûrement une grande confiance en lui. Il ne suffisait pas de donner des ordres aux soldats dans un tel état de confusion pour les ramener à la raison. Si elles n’étaient pas ordonnées par quelqu’un avec la dignité et le charisme appropriés, cela ne fonctionnerait pas.

Tout ce que Sigrun pouvait faire à la fin était de faire claquer sa langue avec étonnement. « Penser que je serais capable de mener si facilement un grand général comme ça par le bout du nez. »

Un rire légèrement méprisant s’échappa de ses lèvres.

Naturellement, il n’y avait pas le temps nécessaire pour qu’Yuuto puisse préparer un plan détaillant chaque minute pour cette bataille particulière. Elle avait d’avance entendu les détails d’Yuuto : la faiblesse de l’unité aux lances longues, le fait que l’ennemi enverrait probablement une unité détachée pour lancer une attaque latérale afin de profiter de cette faiblesse, et la manière de faire face à un tel résultat.

« D’accord ! C’est finalement mon tour ! » s’exclama-t-elle.

À peu près au même moment où l’unité des chars affrontait les troupes du Clan de la Corne, de la fumée s’éleva de l’unité principale du Clan du Loup. C’était le signal indiquant que l’unité Múspell devait charger.

Sigrun se retourna et exhorta les soldats qui s’étaient battus pendant trois jours et trois nuits à charger. « Maintenant, tout le monde, préparez-vous pour la dernière charge ! »

Tous leurs visages étaient couverts de l’ombre de l’épuisement, mais en un clin d’œil, un puissant esprit combatif était soudainement apparu dans leurs yeux. Un effort gaspillé pouvait faire doubler la fatigue, mais voir de bons résultats pouvait vous donner une vigueur qui balayait la fatigue. Les efforts de l’unité Múspell avaient porté ses fruits et leur moral n’avait jamais été aussi élevé.

Le cœur de Sigrun s’était enflammé en voyant à quel point ils étaient tous fiables. « La victoire dépend de ce que nous faisons, ici et maintenant ! Montrons aux troupes du Clan du Sabot la terreur de notre assaut, et les véritables bénéfices du Valhalla ! »

« Ouaiiiiiiiissssss, Mèèèèèèrrreeeee !! »

Sigrun leva la lance qu’elle tenait dans les airs, et les soldats laissèrent échapper des cris de guerre qui firent trembler l’air.

Au sein de Sigrun, le Dévoreur de la Lune, Hati, avait répondu à son cri de guerre, et maintenant, Sigrun affichait un sourire féroce, tout comme un loup affamé.

Certes, elle était une guerrière dont le seul talent à offrir à son maître était ses capacités martiales. En temps de paix, elle ne pouvait pas vraiment l’aider, et elle le déplorait amèrement. Mais c’était précisément à cause de ça que maintenant plus que jamais que c’était l’occasion parfaite pour le servir.

« À toute l’unité Múspell, à l’attaque ! » ordonna-t-elle. Et alors qu’elle faisait ça, elle donna un coup de pied à son cheval favori pour le faire avancer.

Ses subordonnés l’avaient immédiatement suivie. La meute chaotique des féroces troupes du Clan du Loup avait jailli de la forêt et ils gagnèrent rapidement l’arrière de l’unité des chars.

***

Partie 7

« Arg ! Encore eux ! » Yngvi cracha de dégoût.

Juste au moment où le Clan du Sabot avait lancé son attaque-surprise, ils avaient eux-mêmes été confrontés à une autre attaque-surprise. Ils avaient fini par être pris dans quelque chose appelés un mouvement de tenaille. L’ampleur de cette disgrâce continuait de traverser son corps.

Ils avaient été complètement pris par surprise par l’ennemi. La haine qu’il ressentait emplissait tout son corps.

« Lieutenant ! Bloquez l’avancée des troupes du Clan de la Corne ! Je vais m’occuper de ces mecs là-bas ! » Laissant quelques soldats supervisés par son lieutenant, Yngvi lâcha son ordre avant de faire tourner son char pour faire face aux soldats à cheval.

Les forces du Clan de la Corne, qui avaient mené la charge initiale, avaient depuis longtemps perdu leur esprit combatif. Ils n’étaient plus une menace.

« Ici et maintenant, je vais libéré toute la rage que j’ai accumulée sur vous, imbéciles ! »

Ces ennemis avaient refusé de se battre de front, chaque fois choisissant simplement de fuir. S’ils venaient pour la tuerie, alors c’était tout simplement l’occasion favorable qu’il avait souhaitée depuis trois jours.

Les troupes avec les longues lances étaient encore une menace, mais avec la mobilité des chars, les choses allaient sûrement bien se dérouler. À l’heure actuelle, l’instinct né de ses années d’expérience militaire lui avait indiqué que la véritable menace qu’il devait vaincre n’était autre que cette unité de soldats à cheval.

Et pourtant, ce qui s’était déroulé ici aurait toujours été incroyable pour Yngvi s’il ne l’avait pas vu de ses propres yeux.

Les troupes à cheval passèrent devant lui, allant deux fois plus vite que les chars, avant d’arriver sur leur côté. Augmentées par la vitesse à laquelle ils se déplaçaient, leurs lances heurtèrent les roues des chars les unes après les autres.

Les chars étaient constitués d’un chariot de bois sur qui se tenaient tout au plus deux hommes massifs et qui étaient soutenus par deux roues. Il pouvait supporter une telle charge frontale. Mais en heurtant directement les roues des chariots depuis les côtés, les cavaliers avaient neutralisé leurs mouvements, puis avaient perturbé l’équilibre des chars qui avaient fini par se voir renverser les uns après les autres sur leurs flancs.

« Argg ! » cria Yngvi.

« Ahh ! »

« Ohhh ! »

Les soldats éjectés de nombreux chars avaient été transpercés par des lances ou écrasés par des chevaux venant en sens inverse. Inutile de dire que le char était l’arme la plus puissante sur Yggdrasil. Le simple fait de regarder les gains énormes apportés au cours de la bataille quand ils avaient attaqué les troupes du Clan de la Corne montrait que c’était une évidence.

Mais c’était limité à cette seule époque. Dans un autre millier d’années, le char régnerait jusqu’à ce qu’il soit chassé du théâtre mondial des champs de bataille par l’apparition de cavaliers. Sur le plan de la main-d’œuvre et des capacités, les forces militaires du Clan du Sabot avaient eu le dessus, car elles avaient les chars et pouvaient se déplacer plus rapidement. D’un autre côté, depuis sa création, l’unité Múspell s’était entraînée spécifiquement afin de combattre les chars. C’était ce développement qui avait fait que la différence dans les capacités offensives était plutôt unilatérale.

L’unité de chars du Clan du Sabot, qui s’était vantée d’être imbattable sur tout Álfheim, avait toujours mené une bataille unilatérale alors qu’aucun ennemi ne pouvait lancer une contre-attaque efficace contre eux. Bien que beaucoup pouvaient s’y opposer, les chars avaient toujours eu la mobilité et la vitesse de leur côté.

Voici donc la raison pour laquelle cette situation inattendue les avait tellement paralysés.

L’un des cavaliers du Clan du Loup interpella Yngvi, qui avait pris position au centre de ses chars. « Si vous portez une telle tenue, alors vous devez être l’un de leurs généraux ! Eh bien ! Votre tête m’appartient et je viens la réclamer ! » Il avait préparé sa lance pour le combat avant de charger Yngvi.

« Mon Dieu ! Quelle surprise..., » murmura Yngvi.

Quand quelqu’un d’aussi expérimenté qu’Yngvi voyait une personne prête à se battre avec son arme, il pouvait avoir une idée de ce que cet individu était capable de faire. On avait l’impression que cette personne était un combattant talentueux, mais à la fin, rien de plus et rien de moins. Il ne pouvait toujours pas comprendre comment il pouvait rester sur son cheval tout en balançant sa lance autour de lui.

« Prends ça ! » La lance du cavalier visait les roues du char d’Yngvi. Il frappa à ce moment-là.

Mais Yngvi avait déjà été témoin de cette attaque avant ça.

Clang !

La lance d’Yngvi repoussa la lance du cavalier loin des roues de son char.

S’il savait d’où venait l’attaque, un tel exploit était facile pour lui.

« Gamin capricieux ! » s’exclama-t-il. « Reconnais ton supérieur ! Les morveux comme toi ne seront jamais un adversaire valable pour un Einherjar tel que moi ! Je porte Gullinbursti, le Sanglier d’Or Qui Tire Le Char ! »

Yngvi avait alors mis tout ce qu’il avait dans les deux bras, balançant avec puissance sa lance. Avec la masse de cette attaque, il propulsa la lance du cavalier dans le ciel. Cette force physique anormale était le pouvoir accordé par Gullinbursti. Puis Yngvi avait enchaîné avec une nouvelle attaque afin de trancher la gorge du cavalier.

« Argh ! »

Une voix faible émanait de lui alors que le sang jaillissait de son cou, et l’homme tomba mollement sur le sol. Le cheval, ayant perdu son maître, avait commencé à regarder autour de lui en pleine panique.

« Christophe ! Salaud ! » À ce moment-là, une jeune fille avait pointé son regard vers Yngvi, enragée qu’il ait tué le subalterne avec lequel elle s’était entraînée depuis si longtemps.

Il s’agissait d’une beauté, avec des cheveux argentés qui attiraient l’œil et qui s’étendaient derrière elle. Elle n’était clairement pas faite pour le champ de bataille. Mais ses yeux étaient différents de ceux des femmes dans les pièces du fond de son palais. Ce n’étaient pas les yeux d’une femme. Il s’agissait des yeux d’un animal féroce qui, si l’on s’approchait d’elle en étant mal préparé, vous tuerait à coup sûr.

Pendant les attaques nocturnes, Yngvi n’avait pas été capable de distinguer les visages de loin, seulement les yeux, mais la façon dont ces yeux et ces cheveux argentés luisaient au clair de lune lui avait laissé une telle impression. Il avait été témoin des flèches qu’elle avait décochées, terrassant plusieurs de ses subordonnés. Cette fois-ci, il pouvait clairement voir sa férocité sur un champ de bataille. Elle était clairement plus forte que tous les autres soldats.

« Petite fille ! » s’exclama-t-il. « Donc tu es la responsable de cette unité ! »

« Très certainement ! Je suis l’Einherjar de Hati, le Dévoreur de la Lune ! Je suis le Mánagarmr, Sigrun ! Je vois que vous êtes vous aussi un guerrier d’élite. Alors, donnez-moi votre nom ! » déclara Sigrun.

« Un chien de montagne comme toi aurait dû entendre mon nom il y a longtemps, » répliqua Yngvi. « Je suis le souverain patriarche du Clan du Sabot et le souverain suprême de tout Álfheim, Yngvi ! »

« Ohhh, alors, avec votre mort, nous aurons gagné cette bataille ! » répondit Sigrun.

« Oublie ça ! Sans toi pour les commander, tes troupes à cheval tomberont rapidement dans le chaos ! Je vais arracher cette tête de tes épaules ! » cria-t-il d’une voix retentissante.

« Intéressant. Prenez-là, si vous pensez pouvoir le faire ! » elle avait crié tout aussi férocement.

Sigrun avait chargé. En se croisant, Sigrun avait pointé sa lance sur le haut de l’épaule de Yngvi et avait frappé. Contrairement au cavalier de plus tôt, elle était beaucoup plus rapide. Sa vitesse était si rapide que c’était clairement une attaque qu’on aurait pu appeler divine.

Cependant, il s’agissait de Yngvi, le héros du Clan du Sabot qui avait battu de ses propres mains plus d’une centaine de combattants ennemis. Il pouvait facilement voir le mouvement de la lance. Un son aigu avait retenti lorsque les deux lances s’étaient affrontées.

Celui qui avait été poussé par la force fut cette fois-ci Yngvi. Il avait frappé avec son dos les parois de son char.

Cela avait été décidé non par une différence de force physique brute, mais par une différence de vitesse. Il y avait une différence majeure dans la vitesse d’un cheval qui portait seulement une femme de petite taille contre la vitesse de deux chevaux destinés à tirer un char avec deux grands hommes à l’intérieur. Cette vitesse avait affecté l’élan et l’impact de leurs attaques.

Ayant dépassé le char d’Yngvi, Sigrun avait tiré sur les rênes de son cheval. Peut-être en état de choc, les pattes avant de son cheval s’étaient levées.

« Qu’est-ce que c’est !? » Yngvi ne pouvait que voir ce qui se déroulait devant lui comme de la magie noire. Avec son cheval dans cette posture, et alors même qu’elle tenait son arme sans la laisser tomber, comment pouvait-elle ne pas tomber ?

Ce qui l’avait surpris encore plus, c’était que cette fois-ci, elle avait tiré la bride vers la droite et, en un instant, s’était retournée pour poursuivre le char de Yngvi.

Il était captivé par sa capacité à manier le cheval. S’ils n’avaient pas été dans le genre de situation qu’ils étaient, il l’aurait facilement invitée à devenir sa subordonnée.

Mais dans tous les cas, c’était le champ de bataille et ce n’était pas le moment pour avoir de telles pensées frivoles.

Saisissant le bord de son char, il se releva, attrapa sa lance et la prépara à la hâte.

Le char sur lequel il était monté était encore au milieu d’un virage. Il avait trouvé que la mobilité des chars était si fiable jusque-là, mais maintenant, voyant l’harmonie entre le cheval et le cavalier devant lui, il ne pouvait s’empêcher de se sentir lent en comparaison.

« Préparez-vous ! » cria-t-elle.

« Ce n’est rien ! » rugit-il en retour.

Après avoir été une nouvelle fois attaqué par la lance, Yngvi se soutint en posant une jambe sur la paroi du char, abaissant son centre de gravité, puis il répliqua à cette attaque.

Les yeux de Sigrun semblaient indiquer qu’elle était choquée. Elle ne s’attendait probablement pas à ce qu’il empêche un coup si critique.

« Hmm ! Cette force, cette coloration... cela doit signifier que votre arme est faite de fer ? » demanda Sigrun.

« Pfff ! Tu n’es pas la seule à avoir une arme en fer ! » répliqua Yngvi.

Pour être sûr, le fer était un métal qui était rare, et avait donc cinq fois la valeur de l’or. Mais en tant que quelqu’un qui était devenu le souverain d’un clan majeur comme le Clan du Sabot, il était naturel que Yngvi soit entré en possession de certaines armes pour son propre usage. Cette lance avait été avec lui pendant dix ans, protégeant sa vie et servant de partenaire de confiance au cœur de la bataille.

Après cela, les deux guerriers arrêtèrent leurs chevaux et continuèrent l’échange de coups à la vitesse de l’éclair.

En raison de la férocité de leur combat, les soldats proches des deux troupes n’oseraient pas approcher pour aider. N’importe qui qui ne pourrait pas entrer habilement dans la lutte serait probablement balayé sous l’assaut de coups, et il était probable qu’il mourrait d’une mort futile parmi la fureur des attaques.

C’était devenu une telle lutte pendant très longtemps, leur bataille se terminant sans cesse par ce qui semblait être un match nul, leur faisant perdre l’équilibre.

Leur vitesse était presque égale. Mais il y avait une différence regrettable dans leur force physique.

En général, avoir une hauteur supérieure dans la bataille était avantageux. Naturellement, attaquer de plus haut donnait plus de force aux attaques. En prenant en compte tout cela, c’était Sigrun qui était désavantagée.

Au fil du temps, le désavantage unilatéral de Sigrun était devenu de plus en plus apparent. Quand elle s’était déplacée pour attaquer, elle avait dû balancer sa lance vers le haut dans un arc de cercle. Yngvi avait esquivé la plupart de ses charges jusqu’à ce moment-là, la laissant poignarder l’air avant de riposter. Elle avait du mal à compenser et à garder sa posture en arrêtant les attaques ennemies. Elle avait été repoussée en arrière, perdant l’équilibre.

Yngvi n’avait aucune intention de laisser cette opportunité lui échapper. Il avait donc donné pour pouvoir effectuer ce coup final, utilisant cette occasion pour effectuer une attaque de balayage sans compromis.

« Haah!! »

« Arg! Quoi !? »

Sigrun utilisa sa vitesse divine pour réagir et tourna sa lance verticalement, bloquant son attaque. Cependant, elle était trop légère et donc, son corps avait été projeté dans les airs.

À ce moment-là, Sigrun avait lâché sa lance et avait essayé de rouler alors qu’elle avait frappé le sol afin de diffuser l’impact produit pour avoir été jeté en bas de son cheval. Ce n’était pas quelque chose qu’elle avait dû réfléchir pour le réaliser. Jeune comme elle était, elle suivait simplement l’intuition qu’elle avait développée à partir de tant d’expérience sur les champs de bataille.

« Tch ! »

Utilisant l’élan obtenu, Sigrun avait rapidement récupéré une posture debout. Elle avait pratiqué des chutes plusieurs fois, mais cela ne voulait pas dire qu’elle n’avait pas subit l’impact. Son visage était tordu par la douleur. Si elle avait atterri sur son dos, il n’y avait aucun doute que les blessures auraient été si graves qu’elle n’aurait pas pu bouger pendant un certain temps. Pourtant, il était évident qu’elle s’était retrouvée dans une situation des plus désavantageuses.

« Je suppose que cela signifie que je gagne, » les coins de la bouche de Yngvi se tendirent vers le haut alors qu’il tournait une fois de plus la pointe de sa lance vers Sigrun.

Une partie de ses capacités était de pouvoir calculer les attaques et les défenses sur la base d’une estimation rapide de ses forces par rapport aux faiblesses de l’ennemi. C’était quelque chose qu’il avait perfectionné au cours des vingt années qu’il avait passées sur les champs de bataille.

« Tu as vraiment beaucoup de talent, petite fille... non, héros du Loup Sigrun, » continua Yngvi. « Si tu étais née cinq ans plus tôt, le résultat de notre conflit aurait probablement été contraire. »

Pour Yngvi, c’était le compliment le plus élevé possible. Après tout, aussi arrogant qu’il fût, il laissait entendre que Sigrun avait la capacité d’être encore plus grande que lui.

Ceux qui avaient de la force devraient mener, et ceux qui n’en avaient pas devraient suivre. C’était la survie du plus fort et la loi primaire de ce monde, Yggdrasil. Le système de clan lui-même fonctionnait sur le même principe. Yngvi était un parfait exemple de tout ceci.

Dans son royaume, il avait traité les faibles comme des esclaves sans valeur. Ils devaient travailler jusqu’à la mort sans que cela le dérange le moins du monde, et il ne les considérait même pas comme des humains. Mais, dans le cas contraire, s’il était confronté à une personne forte, et cela même si elle était son ennemie, il lui montrerait du respect.

Sigrun regarda Yngvi tout en restant silencieuse. Ses yeux affirmaient que, même si la situation était désastreuse, elle n’avait pas perdu son esprit combatif.

Yngvi s’était également ressaisi. Bien que les deux opposants soient forts, Yngvi avait l’avantage de l’expérience. Et la différence entre être à pied ou dans un char était importante.

Et plus que toute autre chose, la portée d’attaque était vitale dans une bataille. Et sans sa lance, tout ce qu’elle avait sur elle était une épée à sa ceinture. Ainsi, le fait d’essayer d’atteindre Yngvi, qui était dans son char, serait difficile. Il y avait seulement une chance sur dix mille qu’il pourrait perdre. Mais il savait en raison des années d’expérience qu’il avait, que peu importe comment il pouvait respecter un adversaire, il ne pouvait faire preuve d’aucune négligence. Un sanglier blessé deviendrait seulement encore plus vicieux.

« C’est la première fois depuis longtemps que j’ai eu une bataille si passionnante, » cria-t-il. « Puissions-nous nous revoir au Valhalla ! »

Yngvi chargeait vers Sigrun avec son char.

Même s’il sentait qu’il ne pouvait pas se résoudre à écraser une telle guerrière, il savait aussi que c’était l’étiquette d’un soldat d’en sortir une autre de sa misère. Yngvi enfonça sa lance de toutes ses forces dans le cœur de Sigrun.

« Quoi !? » Dans la seconde suivante, il lui arriva quelque chose qui s’était déjà produit plusieurs fois dans cette campagne... un spectacle qui se déroulait devant lui qui lui faisait douter de ce qu’il voyait...

La lance d’Yngvi était une arme invincible qui lui avait valu la victoire dans de nombreuses batailles, détruisant de nombreuses armes et lui assurant sa gloire. Les soldats du Clan du Sabot croyaient sincèrement que les cieux eux-mêmes avaient accordé à Yngvi cette lance.

La pointe de cette arme rare raffinée en fer météorique tomba, coupée comme si elle n’était que du beurre.

La fille devant lui tenait une arme étrange qui brillait de la même couleur argentée que ses cheveux. C’était une arme que Yngvi n’avait jamais vue dans sa longue carrière militaire. C’était une épée, mais c’était une épée à un seul tranchant. La lame elle-même avait une courbure douce et présentait un motif étrange et magnifique sur toute sa longueur, comme des vagues de lignes blanches. Non seulement cela : peu importe le nombre de fois que la lame avait pu être utilisée, il n’y avait même pas un soupçon de fêlure dedans.

« Haaa ! » Avec un cri aigu, Sigrun avait décollé du sol et avait sauté dans les airs. Elle tenait avec force cette arme mystérieuse et belle au-dessus de sa tête, puis l’avait déplacée vers le bas.

« Argggg!! » Yngvi avait immédiatement atteint son épée sanglée à ses côtés afin d’arrêter le coup. Bien qu’il avait toujours préféré combattre avec sa lance jusqu’à maintenant, cette épée était aussi une lame rare faite de fer météorique raffiné.

Même cela ne suffisait pas pour arrêter la lame de son ennemi, et avec une grande force, cela s’était faufilé à travers son épée et avait tranché dans le haut de son épaule.

Avec une entaille, le son horrible de la chair étant coupé avait atteint ses oreilles.

« Je vais vous retourner vos mots déclarés plus tôt, héros du Clan du Sabot, » dit-elle. « Si je n’avais pas eu Père, le résultat de notre duel aurait été le contraire. »

Tenant toujours son épée en hauteur, Sigrun avait atterri sur un genou au moment où elle avait touché le sol. Le flash dans son esprit était le moment où, en dépit d’avoir clairement l’avantage en étant sur son cheval rapide, elle avait été battue et envoyée au sol. C’était vexant, mais à ce moment-là, elle avait perdu la bataille en tant que combattant. Ce qui avait finalement inversé le cours de leur duel était simplement la différence de qualité de leurs armes.

« Ahhhhh ! Notre souverain est tombé ! » cria un soldat.

« Ce n’est pas possible ! Notre souverain !? Impossible qu’il ait été vaincu par cette petite fille ! »

« Retraite ! Sans notre souverain, nous ne pouvons pas gagner ! »

« Ehhhaaaaaahh!! »

Les soldats du Clan du Sabot avaient émis des cris de deuil. Ils avaient été jetés dans le chaos complet à la mort de leur souverain, qui avait été loué comme étant le plus fort.

Les autres chars du Clan du Sabot se retournèrent en pleine panique et ils fuirent.

Yngvi avait vraiment été le grand homme responsable du maintien en place du Clan du Sabot. Les paroles du souverain avaient été loi : « Suivez le souverain, et la victoire sera vôtre. » On pourrait dire que ce qui avait attiré les membres du Clan du Sabot était une dévotion presque religieuse.

En d’autres termes : il avait été la source de leur structure ferme pendant la bataille, mais maintenant qu’il était parti, leur structure était devenue plutôt fragile.

« Ngh... Outch ! » Sigrun chancela quand elle essaya de se lever, plissant le visage en raison de la douleur aiguë provenant de son pied gauche. Quand elle était tombée du cheval, son pied avait été pris dans la sangle, et elle l’avait tordu.

Sigrun avait tout de suite vu qu’Yngvi était tombé de son char à la suite de cette attaque. Jetant un coup d’œil autour d’elle, elle le trouva rapidement.

Traînant sa jambe, elle s’approcha de lui et regarda dans son visage.

*Toux* « C-C’est quoi cette arme ? » D’une manière ou d’une autre, Yngvi n’avait pas encore rendu son dernier souffle. La rune de Gullinbursti, le Sanglier d’Or Qui Tire Le Char, devait lui avoir donné une étrange force physique.

Cependant, sa poitrine était teinte en rouge par la présence de beaucoup de sang, et l’ombre de la mort éclipsait son visage. Tout le monde pouvait clairement dire qu’il ne vivrait plus longtemps.

Avant d’aller au combat, le plan aurait pu être de le prendre vivant, mais à la fin, Sigrun n’avait pas eu ce luxe, et ainsi elle avait dû faire le choix de le condamner à l’exécution publique.

Sigrun parla, poussant l’arme qu’elle tenait devant Yngvi. « Apparemment, ça s’appelle un nihonto [1]. Bien que Père ait peur que ce ne soit pas quelque chose au même niveau de ce que son vrai père était capable de faire. »

Dans la zone entre deux chaînes de montagnes qui formaient le territoire du Clan du Loup, ils avaient pu trouver dans le sol du sable de fer de haute qualité. Ils avaient ensuite affiné le sable de fer dans un four de style Tatara, une méthode de raffinement spécifique au Japon, puis ils avaient utilisé l’acier résultant, le tempérant et l’affinant encore et encore en une lame si fine qu’elle pourrait couper le fer entre de bonnes mains.

Avant même qu’il ait été assez vieux pour savoir ce qui se passait, Yuuto avait regardé son père au travail. Toute l’opération avait été gravée à l’intérieur de ses rétines. Il avait étudié le four de style Tatara encore et encore. Ces expériences lui avaient été énormément profitables dans ce contexte.

C’était quelque chose que lui et Ingrid, le maître de la forge, avaient passé une demi-année à travailler, donnant tout pour le créer.

« Donc tu es... en train de me dire qu’il y a des armes encore meilleures... que ça ? » demanda Yngvi en haletant. « Ce monde est si... *toux*... si vaste. J’aurais aimé en avoir moi-même... *toux*... mais il ne semble pas que cela se produira maintenant. Mais... si je dois mourir par les mains d’une guerrière comme toi... alors... je... suis... satisfait... ! »

« Je ressens également beaucoup de fierté d’avoir pu croiser ma lame avec quelqu’un comme vous. Nous nous reverrons au Valhalla, » répondit Sigrun.

« Hmph ! » Yngvi avait donné un sourire satisfait et avait définitivement fermé ses yeux.

Ce furent les dernières paroles de l’homme puissant qui avait commandé les habitants d’Alheim.

Sigrun enfonça sa lame dans le sol puis baissa doucement la tête. Elle exprimait ses condoléances pour la mort d’un guerrier.

Après une période de prière silencieuse, Sigrun avait de nouveau soulevé la lame et l’avait poussée vers les cieux.

Le souverain du Clan du Sabot, Yngvi, avait été tué par Sigrun du Clan du Loup !

Notes

  • 1 La dénomination nihonto (日本刀, « sabre japonais ») décrit l’ensemble des armes blanches fabriquées selon une technique japonaise particulière. Cette appellation comprend le très célèbre katana (ou shinken s’il est de facture moderne), mais aussi le tachi, le wakizashi, le tantō, les épées montées sur manches long tels que le naginata, le nagamaki ainsi que les pointes de lances comme le yari.

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