Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 1 – Chapitre 5 – Partie 3

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Acte 5

Partie 3

« Linéa, je suis désolé de vous avoir fait attendre, » déclara Yuuto.

Les principales troupes des forces du Clan du Loup sous le commandement d’Yuuto étaient arrivées à Fólkvangr après tout au plus quatre jours. C’était juste à temps pour servir de renforts aux troupes anxieuses du Clan de la Corne qui pouvaient entendre le Clan du Sabot à leur porte. Néanmoins, la vitesse de déplacements des soldats était limitée par l’unité la plus lente de l’armée. Pour le Clan du Loup qui se concentrait sur l’infanterie, ils étaient tout compte fait arrivés encore assez rapidement.

Les troupes du Clan du Loup avaient complètement écrasé les troupes du Clan de la Corne lors de leur dernière bataille, alors le Clan de la Corne connaissait mieux la puissance du Clan du Loup que n’importe quel autre clan d’Yggdrasil.

Les citoyens du Clan de la Corne regardaient maintenant avec une grande foi les soldats du Clan du Loup, qui s’étaient rassemblés au centre de la ville.

« Où est maintenant l’ennemi ? » Yuuto avait demandé cela à Linéa après être sauté de son char.

Il était venu la chercher.

En rencontrant le regard d’Yuuto, le visage de Linéa avait rougi si vite qu’il semblerait presque entendre le sang qui se précipitait dans son visage. « Hein !? Quoi !? »

« Hm ? Qu’est-ce qui ne va pas ? Avez-vous contracté un rhume ? Je ne voulais rien dire, mais vous avez l’air un peu souffrante, » déclara Yuuto.

« N-NNN-Non ! Puisque nous sommes sur le point d’entrer dans la bataille, je suis juste excitée, c’est tout ! C’est seulement à cause de ça ! » répondit Linéa.

« Holà ! Vous êtes bien trop remontée quant à ça. Si le commandant suprême du Clan de la Corne n’est pas plus pondéré, peut-il vraiment faire son travail ? » déclara Yuuto d’une voix surprise, alors que son visage indiquait un certain malaise.

Un commandant suprême était responsable de la vie de toute une armée. La moindre erreur de calcul pourrait signifier la différence entre la vie et la mort pour beaucoup d’individus.

Dans ces moments-là, le général d’une armée amie avait besoin d’instaurer le bon état d’esprit à son allié.

« Ah, bon sang ! C’est parce que Rasmas m’a dit quelque chose de bizarre, » murmura Linéa. « Je suis tellement inquiète que je ne peux pas vous regarder dans les yeux, Grand Frère ! »

« Hein !? Avez-vous dit quelque chose ? » demanda Yuuto.

« Non ! Rien du tout ! » répondit Linéa.

« Je vois. Alors ? » demanda Yuuto.

« Oui ? Que voulez-vous dire par “Alors” ? » demanda-t-elle à son tour.

À la stupéfaction de Linéa, Yuuto se grattait le visage en signe de vexation. « Je vous ai demandé quelque chose ! Où est maintenant l’ennemi ? »

Bien qu’Yuuto soit normalement gentil avec n’importe quelle fille qu’il se devait de protéger, en ce moment, au bord de la bataille, il avait épuisé sa patience. Il ne pouvait pas s’empêcher de lui parler d’une voix un peu rude.

Linéa avait repris ses esprits en transmettant les informations demandées. « Je... Je suis désolée ! Selon les estimations de ce que nos éclaireurs nous ont rapporté, ils avancent alors qu’ils se situent à moins d’une demi-journée de marche de nous. »

« Une demi-journée, hein !? Ouf, nous sommes vraiment arrivés à temps, » déclara-t-il.

À côté d’Yuuto, son adjuvant Félicia avait également poussé un soupir de soulagement. « C’est vraiment le cas. Si la capitale avait été prise avant notre arrivée, ce serait la pire situation imaginable, alors je suis vraiment soulagée. »

Cependant, quand elle tourna son regard vers Linéa, elle poussa un lourd soupir chargé d’émotions.

« Eh bien ! Je suppose que, même dans un tel cas, Grand Frère avait déjà techniquement conquis cette ville, » déclara Félicia. « Cela pourrait parfaitement être une autre facette de ta nature incroyable, mais de penser que tu ne ferais pas de discrimination contre une autre nation, Grand Frère... »

« Non, non, c’est différent de ces forts que j’ai capturés avant, » déclara Yuuto. « Dans tous les cas, prendre une cité de cette taille serait difficile. »

« Hehe ! Grand Frère, tu pourrais probablement la prendre sans même aller au combat, » Félicia avait ri d’une manière très suggestive, ce qui fit qu’Yuuto se demanda quand elle cesserait finalement de le surestimer.

Il n’avait pas réalisé la véritable signification derrière les paroles de Félicia.

Quoi qu’il en soit, blâmer quelqu’un en ce moment semblait trop sévère. Yuuto se souciait uniquement de savoir s’il pouvait ou non gagner la bataille. Il y avait beaucoup de choses qui devaient être faites pour le permettre.

Et la question en ce moment était...

« D’accord... commençons par manger ! » Yuuto s’adressa aux autres d’une voix aiguë, s’installant sur place en s’asseyant les jambes croisées. « Ceux qui le désirent peuvent boire un verre d’alcool. »

Son adjointe, Félicia, avait commencé à émettre des ordres à ceux qui se tenaient à proximité afin de faire préparer la nourriture. Mais les yeux de Linéa s’écarquillèrent largement sous le choc.

« Hé ! Pour commencer, de la nourriture et maintenant de l’alcool ! Comment pouvez-vous être si décontracté !? Grand Frère, le Clan du Sabot est presque là ! » s’écria Linéa. « Nous sommes dans tous les cas désavantagés en nombre, nous devons donc nous dépêcher de trouver une position avantageuse et mettre nos soldats en position. »

« “Attendez tranquillement ceux au lointain, attendez-les alors qu’il se fatigue tout en restant dans le confort, attendez les affamés avec le ventre plein. Voilà la maîtrise de la force.”, Linéa, » déclara Yuuto.

« Hein !? Q-Qu’est-ce que ça veut dire ? » La bouche de Linéa était grande ouverte face au difficile dicton mémorisé par Yuuto.

C’était comme si elle comprenait à peine son sens.

« C’est un verset des paroles d’un manuel de guerre de Sun Tzu, qui ont longtemps été louées et qui sont restées pertinentes pendant plus de 2 500 ans, » répondit Yuuto. « Nous campons dans un endroit avantageux et attendons que l’ennemi arrive de loin, nous nous reposons et attendons nos ennemis épuisés, et nous mangeons au contenu de notre cœur afin d’attendre nos ennemis affamés. C’est ainsi que nous maîtrisons la force. »

Yuuto déclarait cela avec autorité comme s’il comprenait parfaitement de quoi il parlait, même s’il ne faisait que répéter le manuel de guerre de Sun Tzu. Yuuto avait estimé que les implications de ces mots étaient plutôt évidentes. Il devait rendre hommage à Sun Tzu pour le livre qu’il avait écrit.

En tout cas, les mots de l’homme correspondent parfaitement à la situation actuelle du Clan du Loup.

« Ils viennent de loin, ils sont fatigués et ils n’ont pas mangé, » expliqua Yuuto. « Il n’y a aucune chance qu’ils puissent faire un étalage de leur force dans une telle situation. Alors... commençons à manger ! » Yuuto échangea des regards amusés avec Linéa, les coins de sa bouche se tordant vers le haut.

« Je... Je vois. Cela vous ressemble tellement, Grand Frère. De penser que vous seriez si familier avec un tel manuel de guerre si ancien ! » Linéa interjeta encore et encore, exprimant apparemment son admiration sincère.

En dépit de tous les problèmes qu’Yuuto lui avait occasionnés, le réconfort qu’il avait apporté maintenant était équivalent de lui avoir fourni 100 000 soldats. Elle avait répété ses paroles jusqu’à ce qu’elles rentrent en elle, les gravant ainsi dans son cœur.

« Euh ! Mais nous sommes supposés faire notre camp quelque part sur une position avantageuse, non ? » demanda-t-elle. « Si nous prenons une trop longue pause, ne manquerons-nous pas de temps ? »

« Sun Tzu a également dit qu’en faisant usage de détours, nous pouvons toujours avoir une certaine forme d’avantages. Nous avons déjà prévu pour cela, » répondit Yuuto.

« C-C’est vrai ! » Les joues de Linéa se mirent aussi tôt à rougir, alors que sa voix tremblait en raison de l’émotion. Elle s’était maintenant assise par terre. Ses yeux alors qu’elle regardait Yuuto débordaient d’adoration. C’était pourquoi elle ne l’avait pas réalisé.

Yuuto débordait d’une confiance superficielle, mais son poing était serré en raison de l’inquiétude. « Run... ne meurt pas, » murmura-t-il si faiblement afin que Linéa ne puisse pas l’entendre.

En tant que patriarche souverain, il avait envoyé son guerrier le plus fort parce qu’elle était la meilleure pour cette mission. Il avait refusé de voir cela comme une erreur à ce moment de l’histoire. Mais dans ce monde, Sigrun était une amie précieuse pour Yuuto. Le cœur d’Yuuto avait été déchiré par la perspective qu’il puisse l’envoyer à une mort certaine.

Une voix ferme et douce vint chatouiller le lobe de l’oreille d’Yuuto. « Grand Frère, Run ira bien. Elle peut faire face à cela. »

Même si Félicia n’aurait pas pu entendre ses murmures, il semblait que ses angoisses l’avaient atteinte, et tout de suite après ça, des larmes apparurent dans les yeux d’Yuuto, prêtes à se répandre. Cet adjudant de classe supérieure ne semblait pas être quelqu’un face à qui il pouvait efficacement garder ses secrets.

Se levant soudainement, il posa ses lèvres près de l’oreille de Félicia. « Je... suis celui qui a décidé que de se battre serait la meilleure option. Je pense toujours que, pour le Clan du Loup, c’était sans aucun doute le meilleur choix. Mais... si nous nous rendions et donnions notre terre, au moins tout le monde échapperait à la mort. »

En tant que celui qui avait décidé qu’ils allaient au combat, il savait qu’il était la dernière personne à pouvoir dire quelque chose comme ça. Ses propres mots lui avaient donné envie de vomir. Mais même ainsi, le doute rongeait son cœur.

Même s’ils devenaient des esclaves forcés à travailler dur, ou étaient taxés de plus en plus impitoyablement, leurs vies devenant de véritables calvaires, cela serait très certainement préférable que la mort, pensa-t-il. Afin de protéger les citoyens du Clan du Loup, il avait envoyé certains de ces citoyens à une mort certaine. N’était-il pas en train d’envoyer mourir des individus sur un coup de tête ?

Chaque fois qu’ils étaient allés au-devant d’une bataille, il s’agissait des incohérences qui surgissaient dans son esprit.

« Grand Frère. Je ne désire pas la “vie paisible” d’une esclave, » déclara Félicia, les yeux pleins de détermination. « Tout le monde ici ressent la même chose. Qui dans le monde souhaiterait que leurs épouses, leurs parents et leurs grands-parents, leurs frères et sœurs ou leurs enfants souffrent de telles douloureuses expériences ? Tous ceux qui se sont rassemblés ici l’ont fait afin de protéger leur famille ! »

« Tout le monde ressent... la même chose que moi ? » répéta-t-il.

Cela ne peut pas être..., la voix de la raison avait fait écho dans un coin de l’esprit d’Yuuto.

Peu importe combien c’était difficile, il devrait y avoir quelqu’un qui pensait que toute solution de remplacement était préférable à la mort.

Mais même ainsi, il voulait que quelqu’un reconnaisse ses choix. Et que cette même personne lui dise qu’il ne se trompait pas.

Le fait de tenter de protéger quelqu’un augmentait la probabilité de mourir. Afin de prendre une décision pondérée, il devrait d’abord dissiper tous ses doutes.

« Oui ! Tu es notre souverain ! » déclara Félicia. « Si tu nous dis que le blanc est noir, alors nous le prétendrons nous-mêmes, si tu nous dis de nous battre, alors nous nous battrons, si tu nous dis de mourir, alors nous mourrons. Oui, pour nous, tu es absolu ! Il y a longtemps, quand nous avons partagé le Calice avec toi, nous t’avons ainsi confié nos vies. Donc, s’il te plaît... utilise-nous comme bon te semble ! »

« ... Bon sang ! Être le souverain est après tout un travail sérieux, » s’exclama Yuuto.

Il était libre de faire n’importe quoi. Il serait pardonné pour tout. Mais être un souverain était un lourd fardeau. Celui qui avait dit que la liberté et le devoir allaient de paire avait bien dit que les choses étaient ainsi.

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Un commentaire :

  1. amateur_d_aeroplanes

    Merci pour le chapitre.

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