Chapitre 2 : Le sort de deux nations
Partie 1
— 9e mois de l’année 1546 du Calendrier Continental — dans la Capitale Princière de Van
La cité de Van, qui était la capitale princière de la Principauté d’Amidonia, était entourée par de hautes murailles, et son architecture ne présentait aucun excès ou ornement quelconques. Pour le dire d’une manière élogieuse, il présentait ce qu’on pouvait appeler comme étant austère et brut de forme. Mais avec des termes moins favorables, alors on pourrait dire qu’il s’agit là de quelque chose de monotone et terne. Et ce paysage peu raffiné de cette ville ressemblait beaucoup à sa population.
Il y a deux règnes, ce pays, qui avait perdu des terres lors d’une guerre avec Elfrieden, avait fait de la vengeance envers ce royaume leur politique nationale. Ce qu’ils avaient dès lors apprécié au-dessus de tout était la philosophie guerrière. De leurs hommes, ils avaient exigé de l’austérité. De leurs femmes, ils avaient demandé de la servilité envers ces hommes, ainsi qu’une grande modestie féminine. De ce fait, il n’y avait pas d’hommes qui riaient dans les rues et qu’aucune femme ne se promenait dans des tenues à la mode.
Voici la nature profonde de la "ville tranquille" de Van, mais récemment il y avait eu un étrange engourdissement dans l’air. Ceci avait commencé lorsque leur pays voisin, le Royaume ennemi d’Elfrieden, avait subi un changement soudain de roi.
En l’an de grâce 1546 du Calendrier Continental, le Roi Albert d’Elfrieden avait abdiqué de son trône.
Albert, l’ancien roi, était un souverain médiocre, mais en raison de sa nature douce, il était respecté par ses vassaux et le peuple. Cependant, en raison de cette douceur, il n’avait jamais mis en œuvre les politiques draconiennes qui auraient déraciné la corruption de ses abjects vassaux. Grâce à cela et à une variété d’autres causes qui se chevauchaient, le royaume était tombé dans un lent déclin.
Cet Albert avait donné son trône à un héros qu’il avait invoqué en provenance d’un autre monde. Ce héros était connu sous le nom de Souma Kazuya.
En même temps qu’Albert avait confié le trône à Souma, il avait également arrangé des fiançailles avec sa fille unique Liscia, avec le nouveau roi, assurant ainsi la prise de pouvoir de Souma. Ce Souma, auquel le trône avait été transféré, n’avait pas encore été formellement couronné, mais il était en effet le roi et s’était engagé dans une série de réformes politiques de grande envergure.
Avec ce changement soudain de roi, il y avait eu ceux qui au départ, avaient soupçonné une usurpation du trône, mais, avec le soutien de Liscia, il avait réparé les torts causés par ses vassaux, rassemblé du nouveau personnel, amélioré grandement la situation de la sécurité alimentaire alors que nous étions en période de pénurie et fait installé un réseau de transport à l’échelle nationale afin d’augmenter la capacité de transports dans tout le pays.
Avec la mise en œuvre régulière de ses politiques et plus encore, Souma avait acquis le soutien de la population. Pour un héros, il était plutôt quelconque, mais en tant que roi, il était magnifique. Il s’agissait là de l’appréciation que le peuple avait de lui.
*
Cependant, le règne de Souma ne naviguait pas en douceur sur tous les aspects.
Tout d’abord, les trois ducs qui contrôlaient les forces terrestres, aériennes et maritimes d’Elfrieden (il y avait aussi une autre force que ces trois-là, l’Armée Interdite, qui servait directement le roi) n’avaient toujours pas juré fidélité à Souma.
Le Général de l’Armée terrestre, Georg Carmine était un homme-bête de type lion.
L’Amirale de la Marine, Excel Walter, était quant à elle une femme-serpent des mers.
Et pour finir, le Général des Forces Aériennes, Castor Vargas, était un dragonewt, un mélange entre un homme et un dragon.
Depuis le changement de rois, ces trois personnes avaient rapatrié leurs armées et s’étaient retirées sur leur propre territoire.
Parce que tout cela avait eu lieu dans un autre pays, leurs intentions exactes restaient inconnues, mais il était clair que leurs relations avec Souma étaient tendues. En particulier, il y avait des rumeurs selon lesquelles le général de l’armée, Georg Carmine, avait rassemblé encore plus de troupes sur son territoire, rendant claire sa position de contestation vis-à-vis de Souma. En outre, les nobles qui avaient été accusés par Souma de corruption s’étaient retournés contre Souma.
Ceux qui avaient commis des actes répréhensibles sérieux et avaient été dépouillés de leurs titres avaient vu leurs terres et leurs biens saisis. Ceux dont les crimes étaient encore plus graves devaient être emprisonnés ou punis encore plus sévèrement.
Les nobles corrompus n’étaient pas contents de ces répercussions et avaient tenté de prendre leurs biens et de fuir le pays. Cependant, les frontières avaient déjà été scellées et, sans autre choix possible, ils s’étaient rassemblés chez Georg Carmine, qui était en opposition clair face à Souma.
*
Ainsi, avec la discorde entre Souma et les trois ducs qui remontait à la surface, les citoyens d’Amidonia étaient pleins d’entrains. Il y avait des rumeurs tout à fait plausibles selon lesquelles le roi Souma avait commencé à rassembler des troupes afin de neutraliser les trois ducs qui ne reculaient pas de leur position de rebelle. Le royaume connaissait un conflit entre le roi et ses vassaux.
Il s’agissait d’une situation où la Principauté d’Amidonia avait l’eau à la bouche. Ceci semblait être une chance inattendue de pouvoir poursuivre leurs objectifs nationaux, de ‘récupérer nos terres volées’ et de ‘se venger de ce royaume’.
En raison de ces faits, non seulement parmi les soldats, mais aussi dans la population en général, le consensus présent était le suivant : « C’est le moment parfait pour envahir le royaume ! »
Dans cet état militariste, l’armée venait en premier et le bien-être de la population en second. La priorité avait été accordée à l’armée lorsque l’argent avait été distribué, ce qui signifiait que la population n’était pas du tout devenue plus prospère. Bien sûr, il y avait eu beaucoup de mécontentements, mais la population avait accepté, car pour eux, « toutes nos souffrances sont entièrement de la faute du Royaume d’Elfrieden, qui a volé nos terres. »
Plutôt que de diriger leur colère vers les politiciens ou l’armée, ils l’avaient plutôt dirigée vers le Royaume d’Elfrieden. Peu importe combien ils étaient mal gouvernés, c’était toujours de la faute de ce royaume. Du point de vue d’un homme d’État, il ne pouvait y avoir de situation plus idéale.
En outre, cette croyance selon laquelle ‘ce royaume est responsable de toutes nos difficultés’ avait conduit naturellement à croire que ‘nos vies deviendront meilleures si nous pouvons vaincre le royaume ennemi’. C’était précisément la raison pour laquelle, compte tenu de cette opportunité, apparemment idéale, il y avait eu une poussée croissante visant à lancer l’invasion du royaume. Après avoir eu vent de cette poussée, des mots audacieux pouvaient être entendus dans chaque coin de rue.
« Enfin, le temps est venu pour nous de nous battre contre ce royaume ! »
« C’est vrai ! Nous n’attendrons pas plus longtemps ! »
« Le vaillant et viril Seigneur Gaius ne perdra jamais face à ce gamin ! »
« Une guerre, hein... !? »
Alors que beaucoup de personnages parlaient de la guerre, il y avait aussi ceux qui se sentaient incertains sur la guerre qui semblait se rapprocher à vue d’œil. Ils craignaient qu’eux-mêmes, leurs foyers ou leurs familles ne soient pris au piège.
Cependant, en ce moment, l’opinion publique de ce pays ne leur permettrait pas d’exprimer leurs inquiétudes. Ils n’avaient d’autre choix que de refréner leur anxiété, se confiant au courant guerrier.
Une personne regardait silencieusement les personnes depuis l’ombre d’une allée.
Cette personne portait une robe de couleur ocre, un capuchon couvrait entièrement sa tête, de sorte qu’il n’était pas possible de voir son expression. Cependant, vous pouviez dire qu’elle était de petite carrure et qu’elle faisait moins de 160 cm de haut. La personne avait alors soupiré en réaction à la manière dont la population agissait, puis s’était mise à marcher à vive allure.
La personne se dirigeait vers un magasin. En raison de la marchandise visible dans la vitrine, on pouvait penser qu’il vendait des vêtements pour hommes. Sur un panneau à l’avant, l’on pouvait lire « Le Cerf d’Argent ».
La personne entra dans le magasin, et à l’instant où elle enleva son capuchon, deux tresses jumelles purent être vues. La capuche avait caché le visage adorable d’une jeune fille.
Ensuite, un homme d’âge mûr avec des cheveux grisonnants qui était habillé tel un barman avait émergé depuis l’arrière du magasin. Cet homme avait un comportement de gentleman et, après avoir vu la jeune fille, il l’avait accueilli avec un « Je vous souhaite la bienvenue. »
« Qu’avez-vous pensé, Dame Roroa ? » Rajouta-t-il. « À propos des choses que vous avez vues dans la ville ? »
« Il n’existe pas deux manières différentes, Sébastien... c’est terrible, » répondit la jeune fille.
La fille qui s’adressait au propriétaire de ce magasin en argot marchand était la première princesse d’Amidonia, Roroa Amidonia.
« Presque tout le monde cherche la guerre, » continua-t-elle. « Ils pensent que ce roi Souma est jeune et ne peut garder son peuple dans la bonne voie. Ils n’ont même pas pensé une seconde que mon vieux père pourrait perdre... »
« Après tout, Lord Gaius est fort et viril, » déclara le propriétaire du magasin.
« Il a l’air rude, c’est tout, » déclara la princesse. « Même s’il est fort, ce n’est qu’un homme. »
Même s’ils étaient père et fille, Roroa était impitoyable dans ses critiques. Entre Roroa, qui avait un grand sens de l’économie et qui voulait utiliser l’argent qu’elle avait gagné afin de reconstruire le pays, et Gaius, le militariste qui voulait mettre tous ses fonds dans du matériel militaire, il y avait une large division quant à leur manière de penser.
Il était triste de voir un tel fossé entre le parent et l’enfant, mais Roroa, en tant que première princesse de ce pays, se trouvait dans une position où elle devait faire plus que simplement déplorer ce fait. En tant que personne qui se trouvait au-dessus des autres, elle devait agir pour se préparer à toute éventualité.
Peut-être par égard pour elle, Sébastien avait demandé d’un ton amical, « Alors, Dame Roroa, comment voyez-vous la nature de Souma ? »
« Je ne sais pas, » répondit-elle. « Les choses que j’entends en provenance de lui... ce ne sont pas ses réalisations personnelles, ce sont les accomplissements de ses subordonnés. C’est pourquoi il est tellement difficile à comprendre. Bien qu’il semble être un roi qui a su bien écouter ses vassaux. »
Avec ces mots, Roroa mit ses mains sur ses hanches, avant de faire un gémissement.
« Si nous menons une guerre face à quelqu’un, si on ne peut pas le comprendre correctement, alors c’est dangereux... Et cela ne change pas simplement parce que le roi et les trois ducs ne s’entendent pas. Qu’il s’agisse du territoire, de la puissance ou de la population, le royaume nous est largement supérieur. Et, bien sûr, il y a aussi le nombre de soldats qui va avec. Nous avons beaucoup de ressources minières, donc la qualité de notre équipement est bonne, mais... c’est bien la seule chose que nous avons de notre côté. »
Avec Roroa faisant cette évaluation pessimiste, Sébastien demanda, « Dame Roroa, croyez-vous que ce pays perdra ? »
« Je vous l’ai déjà dit, je ne sais pas, » répondit-elle. « La guerre n’est pas mon domaine d’expertise. Pourtant, ce que je sais, c’est que si nous perdons, ce sera vraiment très mauvais pour nous. Ce n’est pas seulement du royaume que nous devons nous inquiéter. Il y a la théocratie irritante du nord, l’état papal de Lunaria, et il ne faut pas oublier qu’il y a aussi la République de Turgis, qui cherche une occasion pour s’avancer plus au nord. Nous avons une alliance avec l’État mercenaire de Zem à l’ouest, mais je ne suis pas sûr qu’ils nous aideront grandement si nous finissons le dos au mur. »
L’État Papal de Lunaria était le siège de l’Orthodoxie Lunaire, une religion qui se tenait, à côté du culte de la Matriarche Dragon, comme l’une des deux plus grandes religions de ce continent. Ce pays était régi par le Pape de l’Orthodoxie Lunaire, qui était à la fois une autorité temporelle et religieuse, et ils avaient un système de valeurs nettement différent des autres pays. Il existait beaucoup d’adeptes de l’Orthodoxie Lunaire dans la Principauté d’Amidonia, et après certaines actions, il était possible que l’État puisse renverser leur principauté.
La République de Turgis au sud était une terre emplie d’un froid glacial. Au cours de leur long hiver, leurs terres étaient enterrées sous des tonnes de neige et leurs mers enfermées dans de la glace. Pour cette raison, dans leur quête de terres non gelées et d’un port dans des eaux chaudes, ils surveillaient toujours le nord afin de trouver la moindre possibilité d’expansion.
L’État mercenaire de Zem était un pays unique. Il avait annoncé qu’il était d’une neutralité éternelle, mais avait obtenu des garanties de sécurité mutuelle en envoyant leurs mercenaires dans chacune des nations. Ils avaient expédié des mercenaires à la principauté ainsi que dans tous les autres pays, mais... ces mercenaires étaient uniquement motivés par le profit. Si leur pays se trouvait dans une mauvaise situation, il n’y avait aucun moyen de savoir jusqu’à quand les mercenaires prendraient part aux combats.
Si le pire devait se produire, et qu’ils devaient perdre au cours de cette guerre, comment ces trois pays réagiraient-ils ?
C’était ce qui inquiétait Roroa.
« En ce moment, les émotions qui sont présentes dans ce pays sont vraiment les pires possible, » Déclara Roroa en faisant un soupir. « Il n’y a personne qui réfléchit à ce qui se passera si nous perdons. Bien que, dans le pire des cas, nous puissions être envahis par trois de nos voisins en même temps. »
Elle avait alors réfléchi un peu avant de parler. « C’est pourquoi je vais faire ce que je dois faire. Même si cela veut dire que je dois me séparer de mon vieux père, je dois être prête si les choses vont vers le sud... »
Alors qu’elle disait ça, elle l’expliquait en affichant un large sourire. « Alors, voilà, Sébastien. Aider une femme à sortir, cela vous va ? »
« Je suppose que je vais devoir le faire, n’est-ce pas ? » Répondit Sébastien avec un haussement d’épaules, comme s’il essayait de dire qu’on profitait de lui. C’était l’apparence qu’il essayait de projeter, mais il s’était déjà résolu depuis longtemps à jeter son destin dans les mains de cette fille. Parfois, les actes de Roroa trahissaient sa jeunesse, mais elle avait un certain charme qui attirait les gens auprès d’elle.
Parfois, je pense que c’est dommage qu’elle soit née en tant que femme. Pensa-t-il.
Si Roroa avait pu prendre le trône, est-ce que ce pays pourrait devenir un endroit plus confortable pour vivre ? Sébastien ne pouvait s’empêcher de se demander cela.
Quant à Roroa elle-même, elle avait déjà été amenée à penser à la prochaine chose à faire.
« Eh bien ! Maintenant que c’est réglé, nous sommes encore à court de mains, » dit-elle. « Je pense que j’aimerais passer un peu plus de temps à trouver des collaborateurs. »
« ... Et vous avez une envie sur quelqu’un en particulier ? » Demanda Sébastien, ayant senti quelque chose dans la manière dont Roroa avait parlé, et elle lui avait fait un rire malicieux en retour.
*
Quelques jours plus tard...
Dans le château de la capitale princière, Van, le souverain, le Prince d’Amidonia, Gaius VIII avait réuni tous les principaux chefs militaires de la nation dans la salle d’audience. Gaius s’était levé de son trône, s’adressant aux commandants assemblés. « Le temps est venu ! Commençons dès maintenant à ressembler nos forces à la frontière méridionale que nous avons avec Elfrieden ! »
Il s’agissait de la déclaration qui annonçait la guerre avec le Royaume d’Elfrieden.
Gaius avait reçu des informations selon lesquelles le fossé entre Souma Kazuya et l’un des trois ducs, Georg Carmine, était devenu infranchissable et que c’était seulement une question de temps avant que les deux s’affrontent. Bientôt, le royaume se trouverait dans le chaos le plus total. Dans ce chaos, ils récupéreraient les terres qui leur avaient été volées il y a cinquante ans.
« En même temps que Georg lancera sa rébellion, nous commencerons notre invasion d’Elfrieden ! » Annonça-t-il. « Notre objectif est la région productrice de céréales dans le sud ! C’est le moment idéal de reprendre les terres volées à nos ancêtres ! »
« « Hurrah ! » » Les commandants réunis poussèrent des acclamations.
Enfin, le temps était venu de se venger de leurs pertes passées face au Royaume d’Elfrieden. Ces commandants, qui étaient des hommes militaires dans l’âme, ne pouvaient pas s’empêcher de sentir leur sang bouillir en eux. Dans cet environnement...
« S’il vous plaît, Votre Altesse, attendez ! »
... un seul homme parlait afin de s’y opposer, marchant vers l’avant avant de s’agenouiller devant son souverain.
Il s’agissait du jeune Ministre des Finances, Colbert Gatsby.
Avec son sens rare de l’économie, il était chargé du poste de Ministre des Finances malgré qu’il ne s’agisse que d’un jeune homme de moins de vingt ans.
Alors que le talent de Roroa était consacré à récupérer et dépenser de l’argent afin de faire bouger l’économie, Colbert s’était spécialisé dans l’élimination des dépenses inutiles et libérant ainsi des fonds de cette façon. Bien qu’ils adoptaient des approches différentes, ces deux-là avaient travaillé ensemble afin de réduire ce qui avait nécessité d’être coupé et aussi de dépenser là où les investissements étaient nécessaires. C’étaient ces deux-là qui avaient pu maintenir l’économie du pays en vie.
« Oh, c’est toi, Colbert. » Gaius le regardait sévèrement. Il était manifestement mécontent.
Alors que Gaius, un homme que même les généraux qui avaient survécu à de nombreuses batailles craignaient la colère, tourna ce regard sur Colbert, un simple bureaucrate, il était normal que Colbert commençât à trembler. Pourtant, il avait pris son courage à deux mains afin d’offrir son conseil.
« Je le dis avec tout le respect que je vous dois, Votre Altesse, » réussit-il à dire. « Veuillez reconsidérer l’invasion d’Elfrieden ! La population de notre pays souffre d’une crise alimentaire et d’une faible économie ! Si nous commençons une guerre maintenant, notre peuple va mourir de faim ! »
« Je sais déjà ça, » répliqua le prince, sèchement, « C’est pourquoi la capture de la région productrice de céréales est si urgente. »
« Les guerres exigent une énorme dépense de la part de l’État ! » Protesta Colbert. « Si vous avez beaucoup de marge de manœuvre dans le budget, vous devriez pouvoir importer de la nourriture de l’étranger ! Plutôt que de lutter lors d’une guerre, alors même que nous ne savons pas si nous allons gagner ou perdre, et que, même si nous gagnons, nous n’avons aucune garantie que nos efforts seront payants, n’est-ce pas le moment où nous devrions construire notre force et... »
« Silence ! » Rugit Gaius.
Il s’était tourné vers le bureaucrate et lui avait donné un coup de pied assez fort pour envoyer l’homme voler dans les airs.
« Arggg... » (Colbert)
Alors qu’il regardait Colbert étendu dans le sol, Gaius affichait un regard empli de rage.
« Vous les ministres des Affaires intérieures dites toujours la même chose ! Travailler sur les affaires intérieures, c’est tout ce que j’ai entendu de vous ! Non ce n’est pas le moment idéal pour ça ! Regardez où cela nous a menés ! Il est facile de voir à quel point notre pays est épuisé ! Pourtant, contrairement à nous, ce royaume, malgré une stagnation sous le fou qu’était leur dernier roi, a commencé à se rétablir avec ce nouveau roi qui est arrivé sur le trône ! » (Gaius)
« C’est parce que... le nouveau roi, Souma, a travaillé durement afin d’enrichir son pays... » (Colbert)
« Qu’est-ce que tu me sors là !? » Gaius frappa à nouveau Colbert, le faisant rouler à nouveau sur le sol.
Peut-être avait-il eu sa bouche entaillée, car après ça, il y avait du sang qui coulait des lèvres de Colbert. Mais même dans une telle situation, Colbert ne s’arrêta pas de parler. « Votre Altesse... le nombre de soldats présent dans les rangs de l’armée d’Amidonia est environ la moitié de ceux de l’armée d’Elfrieden. Il s’agit donc... d’un plan bien trop imprudent ! »
« Je n’ai pas besoin d’un faible serviteur civil pour me dire ça. » Rugis le prince. « C’est précisément pour cette raison qu’avec le roi et les trois ducs en plein conflit, nous avons l’occasion rêvée ! »
« Même ainsi, on ne sait pas combien de temps cela durera, » Protesta Colbert.
« Hahaha! Il n’est pas nécessaire de s’inquiéter de ça. Le grand Georg Carmine lancera la révolte. Ce jeune freluquet de roi n’aura pas le temps de le subjuguer, j’en suis certain. Les guerres civiles durent toujours très longtemps. Et ce serait la même chose même si Georg gagnait cette guerre. Si un traître tel que lui s’élève au sommet, il n’y a aucune chance que le pays reste uni ! » (Gaius)
Colbert se mordit les lèvres de frustration. Est-ce la raison pour laquelle Son Altesse agit si hardiment ?
Parce qu’il s’agissait de Georg Carmine, l’un des trois ducs et qu’il était très célèbre pour être un féroce général, qui levait le drapeau de la rébellion contre Souma. C’était ce qui poussait probablement Gaius à agir ainsi.
La vérité était qu’il n’y avait aucune garantie qu’une opportunité comme celle-ci reviendrait. Gaius avait déjà 50 ans, il n’était clairement pas un jeune homme. Il ne voulait pas laisser passer cette chance idéale alors qu’il était encore apte à se tenir à la tête d’une armée et à donner des ordres.
Toutefois... c’est bien trop optimiste pour penser de cette façon ! Colbert pensa ainsi.
« S’il vous plaît, Votre Altesse, veuillez m’écouter. » Déclara-t-il. « Si vous envahissez Elfrieden, notre pays sera exposé aux critiques de tous les autres pays ! Nous avons signé la Déclaration faite par l’Empire afin d’avoir un Front Commun de l’Humanité Contre la Race Démoniaque ! »
« ... La Déclaration de l’Humanité, n’est-ce pas ? » Actuellement, pour la première fois, Gaius avait un regard tendu sur le visage.
Dirigée par l’Empire Gran Chaos, la Déclaration du Front Commun de l’Humanité Contre la Race Démoniaque (également connue sous le nom de Déclaration de l’Humanité) faisait référence à une déclaration et un traité international soutenu par l’empire le plus grand et le plus puissant du continent. Il déclarait que, compte tenu de l’expansion du Domaine du Seigneur-Démon, tous les conflits entre les hommes allaient devoir cesser. Et, afin d’éviter que les monstres et les démons ne progressent vers le sud, toute l’humanité devait travailler uni et coopérer entre eux.
Les points essentiels de la Déclaration de l’Humanité avaient été déclarés dans ces trois articles :
*
Premièrement, l’acquisition du territoire par la force pour les nations de l’humanité serait considérée comme irrecevable.
Deuxièmement, le droit de tous les peuples à l’égalité et à l’autodétermination devra être respecté.
Troisièmement, les pays qui sont éloignés du Domaine du Seigneur-Démon fourniront un soutien aux nations qui se trouvent sur le front, et qui agissent comme un mur protecteur.
*
Le second article avait été adopté pour protéger les races minoritaires de chaque pays. Étant donné que l’acquisition du territoire par la force était irrecevable, certains pays auraient autrement expulsé ou opprimé leurs races minoritaires pour tenter de saisir leur patrimoine pour se l’approprier pour eux-mêmes. C’était une disposition supplémentaire qui à cet égard avait été ajoutée par précaution.
En outre, bien que non explicitement décrit dans le texte, si un pays violait ces trois articles, l’Empire, en tant que chef du pacte, interviendrait militairement.
Pour le dire simplement, cette Déclaration de l’Humanité était un traité de sécurité dans lequel les pays abandonnaient le droit d’envahir d’autres nations en échange de la protection de l’Empire.
Colbert plaida. « Si nous envahissons Elfrieden, nous pouvons nous attendre à une intervention de l’Empire face à nous ! Votre Altesse, je vous en prie, reconsidérez votre position ! »
« Toi, bâtard ! » Avait dit Gaius alors qu’il posa sa main sur la poignée de son arme se trouvant à la hanche.
Alors que tous les participants étaient sûrs que l’homme allait être tué, quelqu’un s’interposa entre Gaius et Colbert.
« Sire Colbert, il ne faut pas s’inquiéter de ça. » Celui qui s’était interposé entre les deux était le prince héritier, Julius Amidonia. Ses yeux froids, qui ne trahissaient aucune émotion, furent fixés sur Colbert. « C’est parce qu’Elfrieden n’a jamais signé la Déclaration de l’Humanité. »
« Julius... Sire, » dit Colbert, « C’est un argument très fallacieux ! Nous acceptons la protection en vertu de la Déclaration de l’Humanité, tout en attaquant un pays qui ne l’a pas encore ratifié. Si nous faisons cela, ce serait comme jeter de la boue sur l’Empire ! »
« Cependant, dans la diplomatie, seuls les traités qui ont été signés sont importants, » déclara froidement Julius. « Tout cela a été provoqué par la stupide folie d’Elfrieden en ne soutenant pas les idéaux sublimes de l’Empire. Ainsi, l’Empire ne trouve aucune faute nous concernant. »
« Mais... » (Colbert)
« C’est assez ! » Gaius retira sa main de la poignée de son épée, se tournant vers les commandants rassemblés devant lui. « Par la présente, je retire le poste de Ministre des Finances à Colbert. »
« Votre Altesse ! » Cria Colbert.
« Colbert, pour le moment, je vous place en résidence surveillée, » déclara le prince. « Vous devez regarder la suite depuis le bas côté. Regardez-nous, réclamant la terre de nos ancêtres. »
Avec ces mots, Gaius avait fait sortir ses commandants hors de la salle d’audience sans même avoir un autre regard sur Colbert. Colbert était resté là pendant un moment, se mordant les lèvres, mais finalement il avait frappé la moquette de colère, se leva avant de se retrouver nez à nez avec Julius, qui était resté derrière.
« Julius ! Est-ce vraiment... vraiment la seule voie possible !? » Demanda-t-il.
Colbert parlait plus franchement, contrairement à ce qu’il avait fait avec Gaius. En partie parce qu’ils avaient environ le même âge, malgré leur position de prince et de vassal, Julius et Colbert étaient assez proches pour être appelés des amis.
D’un ton froid, Julius déclara à Colbert, « Il a raison, il s’agit là d’une chance unique dans notre vie. En plus de Georg Carmine, il existe de nombreux nobles qui ont des liens secrets avec notre pays. Si nous nous coordonnons avec eux, nous devrions pouvoir récupérer des terres dans le sud pour nourrir notre peuple. »
« Mais, si nous perdons, cela pourrait signifier la mort de notre pays. » Répondit Colbert.
« Certes ! Mais d’autre part, si nous manquons cette chance, nous ne pourrons peut-être jamais récupérer nos terres. Si, comme vous l’avez dit, le nouveau roi travaille à enrichir son pays, cela ne signifie-t-il pas que l’écart ne fera que s’élargir si nous laissons passer cette chance ? » (Julius)
Il était clair que Julius regardait la situation avec des yeux plus calmes et plus rationnels que Gaius. Même ainsi, sa décision était restée inchangée.
« Il s’agit là d’un très vieux souhait de la Famille Princière d’Amidonia qui est de réclamer les terres que nous avons perdues et d’ainsi nous venger, » avait continué Julius. « Non, ce n’est pas seulement la Famille Princière : les soldats et la population en général le souhaitent ainsi. »
« C’est... » (Colbert)
C’est simplement parce que vous ne leur avez montré aucune autre option possible ! Colbert voulait le dire, mais... il ne pouvait pas le faire. Le faire serait de dépasser ses limites en tant que simple vassal.
Alors que Colbert regardait vers le sol, en perte de mots, Julius posa une main sur son épaule.
« S’il te plaît, Colbert, reste tranquille pour l’instant. Je connais très bien tes capacités. Pour mon propre intérêt, en tant que celui qui gouvernera un jour cette terre, je préfère ne pas te perdre à la suite d’une petite crise de mon père. » (Julius)
« Julius... » (Colbert)
Colbert le regarda avec des yeux écarquillés, mais Julius n’avait pas affiché la moindre émotion.
*
Quelques heures plus tard, alors qu’un Colbert effondré faisait traîner ses pieds dans les couloirs du château princier, une jeune fille avec un adorable visage tapota sa tête depuis derrière l’un des piliers de marbre.
« Je suis ici, Monsieur Colbert. Qu’est-ce que t’es arrivé pour que tu sois si lugubre ? » (Roroa)
« Princesse !? Hum et bien... » (Colbert)
Celle qui était sortie de derrière le pilier était Roroa Amidonia, la première princesse de ce pays. Colbert avait paniqué un peu alors qu’il se rendait compte qu’il avait laissé Roroa le voir être déprimé.
Roroa avait eu un bon sens de l’économie et cela dès son plus jeune âge et, alors qu’elle grandissait, elle alla s’entretenir avec les propriétaires de grandes entreprises et les bureaucrates du ministère des Finances de plus en plus souvent. Pour Colbert, qui était avant ça le Ministre des Finances, Roroa était une compatriote qui comprenait les principes de l’économie. Elle était aussi quelque chose qui ressemblait à une méchante petite sœur.
« Regarde ton visage... n’aurais-tu pas essayé de parler à ma place à mon vieux père ? » Roroa demanda avec un ton plein d’excuses, en regardant les bleus se trouvant sur le visage de Colbert.
« Hein !? Ha, non... C’est... » (Colbert)
« Tu n’as pas besoin de me le cacher. » Dit-elle. « Je suis désolé pour l’attitude de mon idiot de père. Mon Dieu... S’il frappe sur les vassaux qui essayent de lui donner de solides conseils, il dirige ce pays directement sur la route de la ruine. Honnêtement, à quoi pense-t-il ? »
Tout en disant des choses que les autres n’auraient jamais faites, étant bien trop terrifiés, Roroa avait affiché une grande démonstration de combien elle était en colère à propos de son père. Colbert était content de voir Roroa qui agissait ainsi vis-à-vis de lui.
« Merci beaucoup princesse. » Dit-il. « Je vais bien. »
« Vraiment ? Eh bien ! Dans ce cas, tiens-toi prêt. » (Roroa)
« Hein... !? À propos de quoi dois-je me tenir prêt ? » (Colbert)
Roroa lui serra la main avec un rire. « Le vieil homme vous a donné tout le temps libre dont vous avez besoin, donc vous n’avez rien à faire, n’est-ce pas ? Eh bien, dans ce cas, peut-être que tu peux m’aider avec ce que je prépare. J’ai déjà parlé à tous les bureaucrates qui semblaient bien disposés vis-à-vis de ça, mais après tout, je pourrais encore utiliser plus de personnes afin de m’aider. »
« Hein !? Hé, princesse ? Au juste, qu’avez-vous planifié de faire ? » (Colbert)
« Mais c’est évident. » Répliqua-t-elle. « Nous allons tous disparaître ensemble. Sébastien évalue les différents chemins, mais pour l’instant, je pense que nous allons rester chez l’oncle Herman à Nelva. »
« Hein !? Quoiiiii !? » S’exclama-t-il.
Roroa l’attrapa par la manche et s’en alla rapidement, traînant ainsi Colbert derrière elle.
*
Quelques jours plus tard, en même temps que Gaius VIII et Julius quittaient la ville de Van, il y eut un incident où la princesse Roroa et un certain nombre de bureaucrates disparurent sans laisser de traces.
Il s’agissait d’un incident qui aurait dû provoquer un gros remue-méninges, mais le départ de Roroa avait été couvert, et ainsi ni Gaius ni Julius ne l’avaient jamais remarqué.
Merci ! ça annonce du lourd pour la suite =)
merci pour le chapitre, tous sa promet quelques rebondissement
Merci pour le chapitre.
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