
Bienvenue au Japon, Mademoiselle l’Elfe – Tome 7
Table des matières
- Chapitre 7 : Les débuts de Shirley : Partie 1
- Chapitre 7 : Les débuts de Shirley : Partie 2
- Chapitre 7 : Les débuts de Shirley : Partie 3
- Chapitre 7 : Les débuts de Shirley : Partie 4
- Chapitre 7 : Les débuts de Shirley : Partie 5
- Chapitre 8 : Alerte au typhon : Partie 1
- Chapitre 8 : Alerte au typhon : Partie 2
- Chapitre 8 : Alerte au typhon : Partie 3
- Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage : Partie 1
- Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage : Partie 2
- Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage : Partie 3
- Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage : Partie 4
- Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage : Partie 5
- Chapitre 10 : Vers la piscine à vagues : Partie 1
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Chapitre 1 : Les débuts de Shirley
Partie 1
Tout le monde rêve quand il s’endort. Lorsqu’on se réveille dans son lit, on garde un vague souvenir de son rêve et on peut se dire que c’était étrange. On ne peut chercher ses rêves que dans ses souvenirs passés. Mais si quelqu’un était vraiment capable de voir ses rêves de ses propres yeux, il pourrait peut-être voir un spectacle comme celui-ci.
Il faisait sombre tout autour de moi. La vue était floue, et le son était brouillé. Lorsque j’avais voulu toucher les objets qui flottaient autour de moi, mes doigts étaient passés au travers et j’avais ressenti une sensation de glissement. Alors que je considérais cet endroit étrange, j’avais remarqué une femme qui marchait devant moi, ses cheveux noirs se balançaient et semblaient se fondre dans l’ombre. Elle s’était retournée pour me faire face.
Il s’agissait de l’être légendaire connu sous le nom d’Arkdragon, Wridra. C’était un individu assez étrange, j’avais entendu dire qu’elle était âgée de milliers d’années, et bien que je pouvais parfois ressentir sa grande majesté, il y avait aussi des moments où je ne la ressentais pas du tout.
En silence, elle avait entrouvert ses lèvres cramoisies pour me parler, mais je ne comprenais pas ce qu’elle disait. C’était comme si sa voix était diffusée avant de pouvoir m’atteindre.
Réalisant que je ne pouvais pas l’entendre, Wridra avait souri faiblement, puis avait pointé du doigt. J’avais suivi son doigt des yeux, puis j’avais remarqué que je tenais une main beaucoup plus pâle que la mienne.
Elle appartenait à l’elfe féérique, Mariabelle. Elle était aussi assez étrange. J’avais regardé de mon côté pour trouver son oreille, en forme de pointe de lance, et ses yeux de la couleur de l’améthyste avaient rencontré les miens. Il y avait une lumière de sagesse qui brillait dans ses yeux, leur beauté éclatant même dans l’obscurité. Peut-être était-ce dû au fait que la moitié de son être était connectée au royaume des fées. Mariabelle avait tiré sur ma manche, puis avait approché ses lèvres vives de mon oreille.
« J’ai entendu dire que cet endroit s’appelle le royaume des ombres. Les bassins de ténèbres que Wridra contrôle sont reliés à des mondes étranges. » Ses chuchotements donnaient l’impression que nous étions sous l’eau, ce qui les rendait difficiles à déchiffrer. Je n’avais pas pu m’empêcher de répondre par une question en entendant un terme peu familier.
« Le royaume des ombres ? »
« Oui, c’est comme ça qu’on l’appelle. Ton monde est né avec les mots “Que la lumière soit” selon la mythologie, non ? Mais peut-être que le royaume des ombres existait avant cela. Hé, tu te souviens quand nous avons combattu un être de ce monde ? »
Je l’avais regardé fixement pendant un moment en réponse à la question de Marie. Quand nous sommes-nous connectés et avons-nous combattu quelque chose dans ce monde ? J’avais scruté l’obscurité autour de nous et j’avais réfléchi à la question, et la sensation autour de moi m’avait semblé familière.
Puis, je m’étais souvenu des résidents du royaume des ombres qui étaient soudainement apparues lorsque j’avais combattu Shirley, le maître des lieux. Ils m’avaient fixé de leurs gros globes oculaires dorés, en balançant les griffes acérées de leurs deux mains vers moi. Lorsque j’avais regardé autour de moi, j’avais eu l’impression que ces créatures étaient tapies dans l’ombre.
« Wridra appelle cela “le monde de l’autre côté”. Elle dit aussi que c’est un endroit vide. Mais il n’y a pas de quoi avoir peur. Nous devons juste continuer à avancer, comme des enfants marchant dans la rue la nuit. Allons-y. »
Sur ce, elle m’avait tiré par la main. Wridra et Shirley nous attendaient devant, et bien que je ne puisse voir que leurs silhouettes floues, je pouvais dire qu’elles discutaient de quelque chose. Pour le maître d’étage et l’Arkdragon, ce n’était rien d’autre qu’un spectacle familier.
Les mots « monde de l’autre côté » que Mariabelle avait mentionnés avaient attiré mon attention. J’avais la capacité de voyager entre les sanctuaires en empruntant le pouvoir du dieu du voyage. La vue que je voyais en transit ressemblait elle aussi à un « monde de l’autre côté », et je m’étais demandé si cet endroit avait quelque chose à voir avec cela.
« Viens. Ne m’oblige pas à te laisser seul dans cette obscurité. » Mariabelle m’avait poussé à avancer. Je m’étais excusé et j’avais accéléré le pas. Quel que soit cet endroit, ça dépassait largement mon entendement. Dès que nous aurions quitté cette terre, elle reviendrait sûrement à un état sans son ni lumière, avec seulement une faible chaleur.
Lorsque nous avions rattrapé les autres, Wridra s’était retournée, les mains sur les hanches, semblant mécontente de notre retard. Elle s’était ensuite détournée à nouveau, sa grande queue nous faisant face alors qu’elle continuait son chemin.
« … Allez-y, vous devriez pouvoir entendre ma voix. »
Il semblerait que nous approchions de notre destination. Wridra fit un geste de la main, et les ombres qui s’étaient amassées autour d’elle s’amenuisèrent. Après un léger délai, sa voix emplie d’ennui parvint enfin à mes oreilles.
J’étais décontenancé. La lumière vive du soleil m’était tombée dessus brusquement. J’avais plissé les yeux devant la lumière, mettant une main devant moi pour faire de l’ombre pendant que je m’adaptais à la luminosité. Les rues à demi enterrées dans le sable étaient apparues progressivement, et au-delà, des rangées de bâtiments couleur sable.
Il semblerait que nous soyons arrivés dans le pays d’Arilai. Il aurait normalement fallu des jours pour arriver ici depuis le deuxième étage, mais cela n’avait pris que quelques heures avec l’aide de l’Arkdragon. Ses pouvoirs étaient très pratiques.
Le centre d’Arilai avait été développé autour d’une montagne en pente douce. J’avais remarqué que notre compagnon regardait le paysage avec grand intérêt, et nous avions ralenti notre rythme.
La femme avait des cheveux brillants, couleur miel, et était parée d’une tenue qui semblait plus facile à manœuvrer que sa robe habituelle. Mais j’avais l’impression que sa tenue n’affectait pas vraiment sa facilité à marcher dans les sables, compte tenu de sa forme spectrale. Peut-être avait-elle simplement envie de s’habiller ainsi.
« Hé, Shirley. C’est le pays désertique d’Arilai. En y réfléchissant, je ne l’ai jamais regardé tranquillement comme ça avant. » La dernière fois, nous l’avions invitée au manoir des Roses noires pour effrayer ensemble le candidat héros, Zarish. J’avais imaginé à quel point cela avait dû être horrible de recevoir une telle invitation, mais Shirley s’était alors tournée vers moi, son sourire s’élargissant.
Shirley n’était pas humaine, et elle vivait au deuxième étage de l’ancien labyrinthe. C’était étrange de la voir enveloppée dans la lumière vive du soleil avec le paysage urbain d’Arilai derrière elle, sans parler de l’ombre brumeuse que l’on pouvait voir à ses pieds.
Peut-être était-ce dû à tout le sable dans l’air, mais le ciel bleu avait une teinte blanchâtre, et le vent était complètement sec maintenant que la saison des pluies était terminée. Shirley passa un doigt dans ses cheveux rebelles et les plaça derrière son oreille.
Il était difficile de croire que sa véritable forme était en fait celle d’un fantôme, puisque son corps n’était pas dans son état semi-transparent habituel grâce à l’aide de l’Arkdragon. Cela n’affectait que son apparence extérieure, car la plupart des gens ne pouvaient pas le voir. Et ils n’auraient évidemment pas su qu’elle était un maître d’étage.
Juste à ce moment-là, je m’étais souvenu de quelque chose. J’avais fouillé dans mon sac et j’avais trouvé ce que je cherchais.
« Shirley, laisse-moi te montrer quelque chose. » Shirley s’était approchée avec une expression emplie de curiosités, et je lui avais montré un morceau de parchemin.
J’avais souri alors que ses yeux bleu ciel s’écarquillaient, puis j’avais soigneusement défait la reliure et étalé le parchemin pour révéler les mots « Jusqu’à quatre membres étrangers peuvent participer au raid. » C’était le permis pour entrer dans le labyrinthe antique, et nous atteindrions la limite maximale de quatre membres avec l’inclusion de Shirley.
« Écoute, le fait que tu te joignes à notre groupe a été officiellement approuvé par Arilai. J’ai entendu dire que le raid sur le labyrinthe antique est de nouveau ouvert, alors nous devrions aller présenter nos respects à tous ceux avec qui nous allons travailler. »
En réponse, Shirley plaça ses mains sur sa propre poitrine, puis elle fit un geste de gémissement pour une raison inconnue. Elle commença ensuite à s’occuper de ses cheveux… Attends, est-elle nerveuse ? Une maîtresse d’étage qui a peur de parler aux gens ?
« Oh, tu n’es pas douée pour rencontrer de nouvelles personnes ? Mais tu n’as pas paniqué quand tu nous as rencontrées, Marie et moi, » avais-je noté avec confusion, mais Shirley avait encore gémi et s’était éloignée de nous de deux pas. Elle avait expliqué en faisant des gestes avec ses mains et ses doigts, mais… selon elle, elle n’avait pas peur de nous parce que nous étions mignons et petits. Il était difficile de croire qu’elle était un terrifiant maître d’étage.
« Il n’y a pas besoin de s’inquiéter autant. » Je le lui avais conseillé, mais il semblerait que Shirley était en panique, faisant tourner ses cheveux avec son doigt et regardant le ciel. Alors que j’essayais de comprendre quel était le problème, Marie avait tiré sur ma manche à côté de moi.
« Shirley ne portait-elle pas une sorte de voile semi-transparent sur son visage quand on l’a rencontrée ? »
« Hm, maintenant que tu le dis… Peut-être qu’elle le portait parce qu’elle est timide. » Shirley avait cligné des yeux. Elle avait ensuite sorti un morceau de tissu brodé, et je l’avais regardée l’enrouler autour de ses yeux.
Attends, pourquoi elle a mis ça ? Cette broderie lui va bien, mais n’a-t-elle pas envie de regarder les gens dans les yeux à ce point ? Marie et moi avions beaucoup de questions, mais pendant ce temps, Shirley prenait une jolie pose victorieuse comme si tout allait bien maintenant.
J’avais pensé qu’elle ne ferait que se démarquer davantage, mais j’avais ravalé mes mots et je m’étais dit que ce n’était pas trop étrange pour un fantôme de se couvrir les yeux et de laisser faire. La mélancolie de Shirley semblait avoir été résolue. Je ne voulais pas la gâcher ou faire retomber son humeur.
Nous nous étions promenés dans l’enceinte du château d’Arilai pendant un certain temps, puis nous étions arrivés dans une zone bien entretenue. Diverses installations de stockage d’eau étaient visibles un peu partout, l’eau s’écoulant vers le bas par des voies d’eau. Les tissus colorés, les épices et les feuilles de thé alignés sur les devantures des magasins semblaient avoir un air de raffinement.
C’était dans cette zone que vivait la classe supérieure, qui avait le privilège d’entendre le bruit agréable de l’eau courante en se promenant dans les locaux. Mais il fallait être reconnu par le gouvernement comme une personne d’importance pour obtenir ce privilège, et cela impliquait de participer à des raids sur d’anciens labyrinthes, donc je n’avais pas particulièrement envie de vivre ici.
Alors que j’expliquais cela, Marie s’était soudainement mêlée à la conversation.
« Oh, mais c’est comme ça dans tous les pays. Les endroits agréables à vivre ont une grande valeur, et nous avons aussi fait des raids dans les anciens labyrinthes. Nous avons même battu les maîtres des étages deux fois. » Eh bien, Shirley avait perdu le combat au deuxième étage… J’avais failli le faire remarquer, mais une idée m’était venue.
Peut-être que Marie voulait vivre dans un beau manoir ou autre. Je m’étais souvenu de la fois où Zera et Puseri nous avaient laissés utiliser le leur. Il me semblait que Marie commençait à s’habituer au luxe.
« Mais nous n’avons pas accepté une mission de rang S, donc je ne pense pas que nous aurons beaucoup de crédit. »
« Peut-être aurions-nous dû l’accepter, » murmura-t-elle en fronçant les sourcils, et je sentis une perle de sueur rouler sur mon visage. Nous voulions explorer l’ancien labyrinthe, mais nous ne voulions pas nous lancer dans un travail sérieux, alors nous venions de refuser la mission de la famille royale l’autre jour. De toute façon, j’avais un travail à plein temps, il m’aurait été difficile de participer à une quelconque mission officielle.
***
Partie 2
La raison pour laquelle nous nous étions dirigés vers l’installation où les équipes de raid s’étaient rassemblées était simplement pour les saluer comme je l’avais mentionné plus tôt. On ne sait jamais quand quelque chose d’inattendu peut arriver dans le labyrinthe, alors j’avais pensé que ce serait une bonne idée d’être en bons termes avec eux.
Ainsi, nous avions traversé le quartier huppé et passé la zone sécurisée, et nous avions vu un grand bâtiment au loin. Nous étions arrivés à un lieu de rencontres sociales entre aristocrates connu sous le nom de Royal Arilai.
Un serviteur avait ouvert les portes pour que nous puissions entrer, et l’intérieur chic avec un haut plafond nous attendait. Il était construit avec une abondance de verre coûteux, mais l’endroit n’était que modérément lumineux grâce aux rideaux qui filtraient le soleil. Les yeux de Marie s’étaient illuminés à cette vue.
« Oh, oh, c’est donc à ça que ressemble la vie des gens riches ! On va enfin pouvoir visiter des endroits incroyables comme celui-ci, hein ? »
Pour être honnête, je ne comprenais pas ce qu’il y avait de si étonnant. Je veux dire, je pouvais bien sûr dire que tout était évidemment cher. Mais j’avais l’impression que je me ferais engueuler si je touchais à quoi que ce soit, donc l’endroit me mettait mal à l’aise, si ce n’est plus. Je l’avais dit à Marie, et elle avait fait une grimace, puis elle avait montré les choses autour de nous et avait commencé à expliquer.
« Tu ne comprends peut-être pas ce monde, puisque tu n’as fait que voyager tout le temps. Jette un coup d’œil à ça, là-bas. Tu vois ces épées alignées dans ce coin ? Cette zone est destinée à l’entraînement et aux tests de tes compétences. Cette zone est pour la pratique de la danse, et ça ressemble à la bibliothèque. Je suis sûre qu’il y a des livres très précieux là aussi. Nnh, j’aimerais bien y aller tout de suite et voir ce qu’ils ont ! » Marie parlait beaucoup plus vite que d’habitude, et ses yeux étaient brillants d’excitation. On aurait dit qu’elle exprimait simplement son grand intérêt plutôt que de me donner une explication, et je n’avais pu que répondre par un « D-D’accord » hésitant. Elle devait vraiment avoir envie de venir ici.
J’avais l’impression d’avoir maintenant une assez bonne idée de ce qu’était cet endroit. C’était un lieu de répit pour les personnes de haut rang social, et il servait également de lieu de divertissement. En voyant tous ces gens bien habillés discuter agréablement ensemble, je m’étais à nouveau rappelé à quel point je ne me sentais pas à ma place.
À ce moment-là, j’avais senti quelqu’un me taper sur l’épaule.
« Vous semblez toujours vous amuser où que vous alliez. » Je m’étais retourné pour trouver un grand homme qui me souriait. Cet homme bien bâti, aux cheveux noirs, était le chef de l’équipe Pierre de Sang, Zera. Il était généralement une personne amicale, et il s’était battu héroïquement avec l’instinct d’un animal sauvage lorsque nous avions fait équipe dans le labyrinthe antique.
« Oh, bonjour, Zera. Je suis désolé si nous avons été bruyants. »
« Je pensais avoir reconnu vos visages familiers, mais je vois que vous avez un nouveau membre de l’équipe. Oh, pas besoin d’avoir peur. J’ai peut-être l’air de ça, mais je suis en fait un gentleman, vraiment, » Zera s’était empressé d’expliquer ça quand il avait vu que Shirley s’était immédiatement cachée derrière moi. Une femme aux cheveux rouges flamboyants lui avait lancé un regard exaspéré de derrière lui.
« Toi ? Un gentleman ? Je t’en prie. »
« Doula, s’il te plaît, ne me regarde pas comme si j’étais complètement désespéré. D’ailleurs, n’étais-tu pas en train de te plaindre du fait que ces endroits huppés te mettent mal à l’aise ? »
« Oui, je les déteste. Mais on m’a appris à y faire face, et ma mère m’a déjà amenée ici de nombreuses fois. Je ne voudrais jamais revivre ça. » Il semblerait qu’on lui ait rappelé une sorte de traumatisme passé. La femme à l’air mécontent était Doula, la chef de l’équipe Andalousite. Nous étions en bons termes avec elle depuis que nous l’avions sauvée lors d’une mission. Marie s’était également rapprochée d’eux deux, même si elle était autrefois connue pour sa haine des humains.
« Puisque vous êtes là tous les deux, cela signifie que vous avez accepté la mission de rang S ? » demanda Marie avec un sourire agréable.
« Oui, nous sommes dans le même bateau que vous. Faisons de notre mieux et… »
« Oh, mais nous ne l’avons pas accepté, » déclara Marie, et la main de Zera s’était figée en l’air, alors qu’il voulait lui serrer la main. Son visage s’était crispé, son sourire s’était également figé et il avait jeté un coup d’œil entre Marie et Doula, comme s’il se demandait : « Alors pourquoi êtes-vous ici ? » Il avait dû penser que j’étais le plus facile à aborder, car il avait mis ses bras autour de mes épaules.
« Hmm ? Kazuhiho ? Pourquoi n’avez-vous pas accepté la mission après nous avoir invités à la faire ? Hm ? »
« Eh bien, j’en ai parlé avec Marie, et… » Ce n’était pas comme si je pouvais lui dire que j’avais du travail. J’avais fait une tentative maladroite d’explication, mais il ne m’avait pas du tout cru. Je regardai autour de moi, impuissant, mais Marie s’était éloignée vers le fond de la pièce et j’étais un peu choqué d’avoir été abandonné. Marie s’était retournée, peut-être pour m’aider à sortir de cette situation embarrassante.
« Tout le monde est déjà rassemblé. Vous ne voudriez pas vous faire gronder pour votre retard, n’est-ce pas ? »
« Oh, bon point. Très bien, Kazuhiho, je veux te parler plus tard de tout ça. » Avec ça, j’avais été libéré.
Le raid au troisième étage de l’ancien labyrinthe était sur le point de commencer, il n’y avait donc pas de temps à perdre. J’avais rapidement suivi les autres.
Un guide nous avait conduits dans une salle où une foule de personnes était déjà rassemblée. Il y avait un total de quarante-trois membres, dont l’équipe Diamant, l’équipe Pierre de sang, l’équipe Andalousite et notre équipe Améthyste.
Une elfe noire familière avait fait un signe de la main alors que nous nous dirigions vers nos sièges, et je lui avais fait un petit signe de la main en lui signalant « On en reparlera plus tard. » Eve semblait bien se porter, comme d’habitude.
J’avais tiré une chaise d’une table circulaire, et Marie avait murmuré ses remerciements en s’asseyant. J’avais pris place à côté d’elle, et quelqu’un d’autre était passé pour distribuer du thé. J’avais balayé la pièce du regard en prenant une gorgée.
Les hommes dans la salle avaient des regards étranges pour une réunion qui était censée nous unir. Ils n’étaient pas menaçants ou quoi que ce soit, mais il y avait un air d’agitation quand ils regardaient autour d’eux. Je m’étais demandé pourquoi, puis j’avais suivi leurs regards et j’avais trouvé la réponse.
L’équipe Diamant, également connue sous le nom des fleurs du champ de bataille, ainsi que la plupart de notre équipe, étaient composées de femmes. Cela signifie qu’environ un tiers des membres ici étaient des femmes, et de belles femmes en plus. Ceux qui n’étaient pas habitués à leur présence ne pouvaient s’empêcher d’être distraits. C’est sans doute pour cela que certains d’entre eux se recoiffaient ou affichaient leur meilleur visage masculin. Je comprenais ce qu’ils ressentaient, mais c’était aussi un peu triste à voir.
Le bourdonnement dans la pièce avait été rapidement calmé par le son de deux claquements forts. J’avais levé les yeux vers l’estrade, et là se tenait Hakam, le chef du raid dans l’ancien labyrinthe. Cet homme bien habillé, bronzé par le soleil, avait l’air d’avoir l’autorité d’un chef militaire.
« Je vous remercie tous d’être venus ici aujourd’hui. J’aimerais commencer le raid au troisième étage avec vous tous, mais il y a quelque chose que je dois dire avant. Sur les huit personnes qui avaient perdu connaissance lors du raid au deuxième étage, cinq d’entre elles se sont réveillées. »
Beaucoup étaient tombés pendant le raid au deuxième étage. Ils s’étaient réveillés en faucheurs après avoir été vidés de leur âme, et Marie et moi avions vaincu trois d’entre eux. Nous ne pouvions pas penser à un moyen de les sauver sur le moment, mais je m’étais parfois demandé si nous n’avions pas vraiment d’autre choix.
C’était un soulagement de savoir que les autres avaient retrouvé leurs âmes. C’était, bien sûr, grâce à l’aide de Shirley. Je l’avais regardée de profil avec le voile sur les yeux, mais son expression n’avait pas changé. Elle n’avait pas beaucoup d’émotion quand il s’agissait de la mort, malgré sa belle apparence, ce qui faisait probablement partie de sa nature de dieu de la mort.
Certains avaient répondu à la nouvelle par des applaudissements réservés. Ils semblaient célébrer ceux qui étaient rentrés et prier pour ceux qui ne l’étaient pas.
Hakam avait regardé la foule une fois qu’elle s’était calmée. Puis son regard acéré s’était posé sur moi pour une raison inconnue. Je m’étais demandé si j’avais fait quelque chose pour mériter son regard.
« Je vais maintenant parler du troisième étage, mais juste pour que vous soyez tous au courant : ce garçon-là ne s’est pas inscrit pour la mission. Il s’est inscrit juste pour s’amuser. Maintenant, certains d’entre vous peuvent être confus par cela. Je le suis aussi. Son équipe se trouvait juste ici pendant ce temps, donc s’ils laissent échapper des informations confidentielles, vous n’avez pas besoin de venir me les rapporter. Je préfère ne pas le savoir. » Il y avait eu un éclat de rire, et j’avais eu droit à des commentaires taquins comme « Je n’y peux rien si tu es ici pour t’amuser ! » Marie et moi avions rougi.
Je veux dire, nos actions devaient vraiment être inexplicables d’un point de vue extérieur. Personne ne voulait faire un raid au troisième étage, mais on le faisait pour le plaisir. Je devais quand même remercier Hakam et Aja d’avoir accepté notre demande. J’avais regardé Aja le magicien, et j’avais vu qu’il riait joyeusement près de la fenêtre. J’avais entendu dire qu’il avait pris quelques disciples depuis la dernière fois que je l’avais vu, et qu’ils passaient leurs journées à analyser et à faire des recherches sur l’utilisation des pierres magiques.
Hakam s’était à nouveau raclé la gorge, dirigeant l’attention de tous vers lui.
« Nous avons réduit le nombre de soldats de soixante-dix pour cent par rapport au dernier raid. Je suis sûr que cela a soulevé quelques inquiétudes pour certains d’entre vous. Si vous souhaitez vous retirer par crainte pour votre vie, c’est votre seule chance. Mais je n’ai rassemblé ici aujourd’hui que ceux en qui j’ai confiance. Je crois que c’est mon atout le plus important. Écoutez ceci, guerriers d’Arilai : vous tous, les combattants les plus distingués de ce pays, allez vous unir pour ne faire qu’un. Je suis impatient de relever le défi de ce prochain raid avec votre force combinée à mes côtés. Allez-y et déchaînez votre puissance jusqu’au bout de votre cœur. »
Avec cela, Hakam avait regardé la foule avec des yeux brûlants de passion. Puis, comme le bois de chauffage au moment où les braises étaient jetées dessus, leurs esprits aussi s’étaient enflammés. Ils croyaient tous qu’une réduction du nombre de soldats ne signifiait pas nécessairement que leurs prouesses au combat seraient également réduites.
À l’inverse, je n’avais pas pu m’empêcher de tourner mes yeux vers le bas.
Selon les rumeurs, l’équipe d’éclaireurs spécialisée dans l’espionnage avait été anéantie. Cette équipe était composée des plus habiles de la famille royale, ce qui en disait long sur la difficulté du troisième étage. Le danger que je sentais instinctivement avait gardé mon esprit calme.
Alors que je me demandais si nous aurions vraiment dû être là, j’avais remarqué que quelqu’un s’était rapproché de moi avec désinvolture. Les yeux en amande de Wridra s’étaient tournés vers moi, et elle avait murmuré à mon oreille.
***
Partie 3
« Kitase, que penses-tu de ce raid au troisième étage ? » J’avais jeté un coup d’œil à mon côté et j’avais pu voir ses yeux sombres se rétrécir dans un sourire amusé. L’expression de l’Arkdragon me disait qu’elle en savait peut-être beaucoup plus qu’elle ne le laissait entendre, mais je savais aussi qu’elle n’allait probablement pas me donner les réponses. La question était de savoir comment je pouvais lui soutirer des informations.
J’avais réfléchi à ma réponse pendant un certain temps, puis j’avais ouvert la bouche pour parler.
« Le but n’est pas de récupérer des pierres magiques ou un trésor, mais il y a quelque chose au troisième étage qui pourrait être une menace pour Arilai. Et ils n’ont plus beaucoup de temps. Je pense que les soi-disant rebelles ont quelque chose à voir avec ça, » avais-je dit pour évaluer sa réaction. Wridra avait fait un bruit montrant sa surprise, puis s’était éloignée de moi sans rien dire. Cela me disait que ma supposition était correcte, même si elle ne l’avait pas dit ouvertement.
Cela expliquait pourquoi la famille royale avait émis directement une mission de rang S. J’avais l’impression que les pièces du puzzle s’assemblaient enfin, et j’avais ressenti une immense gratitude envers Wridra pour avoir confirmé mes soupçons.
Ce n’est pas comme si j’avais lancé une hypothèse complètement folle.
Les membres de l’équipe de raid avaient été réduits à trente pour cent. Nous n’avions pas gagné grand-chose en nettoyant le deuxième étage, mais le raid continuait. En fait, les choses évoluaient maintenant à un rythme accéléré. Sans parler du fait que les guerriers d’élite de la famille royale avaient été envoyés pour une simple mission de reconnaissance.
Compte tenu de tout cela, ma conclusion était à peu près la seule plausible. Bien que, ce n’était pas une raison pour être soulagé en aucune façon.
Mais j’avais toujours une question : si Arilai était confronté à une telle menace, pourquoi n’avaient-ils pas tout fait pour rassembler leurs forces pour faire face à la situation ? Il me semblait qu’il y avait une menace horrible en dehors des rebelles et du labyrinthe ancien à laquelle ils se préparaient.
J’avais eu des sueurs froides à cette idée, mais j’avais ensuite entendu quelque chose d’inattendu.
« Tout le monde, j’aimerais vous présenter un puissant allié… Le meilleur des guerriers d’Arilai. »
Un allié puissant ? Nous avions déjà l’équipe Diamant ici, et je ne pouvais pas penser à quelqu’un de plus compétent qu’eux. Alors que j’étais pris par surprise, j’avais vu quelqu’un se frayer un chemin sur la plate-forme.
La foule s’était mise à bourdonner lorsqu’elle avait réalisé qu’il s’agissait d’un homme dont le niveau était estimé à 120. Il y avait des mèches blanches dans ses cheveux et des traits animaliers sur son visage qui ne semblaient pas correspondre à son âge. Il sourit.
« Hé, les morveux. Je doute que quiconque ici n’ait pas entendu parler de moi, mais je suis Gaston, le seul participant de l’équipe Ruby. Quoi que vous fassiez, ne me demandez pas mon âge ou si j’ai une petite amie ou non. » Dans le silence, j’avais cru entendre quelqu’un dire : « Tu n’as pas de petite amie ? »
Il avait l’air d’un de ces types agressifs et autoritaires. Je pensais que c’était un vieil homme à l’air féroce quand je l’avais vu de loin à l’oasis, et l’entendre parler ne changeait pas du tout cette impression.
Le vieux Gaston avait alors dit quelque chose d’étrange.
« Selon la prophétie, c’est dans cet ancien labyrinthe que je mourrai. C’est pourquoi je laisse les membres de mon équipe bien-aimée derrière moi. Mec, je ne peux pas attendre. Je vais enfin pouvoir rencontrer le faucheur en personne ! » Il avait ouvert la bouche en grand et avait ri. Je pouvais entendre les autres déglutir à cause de son intensité pure. Il y avait quelque chose d’étrangement puissant dans sa seule présence. Shirley s’était montrée du doigt, comme pour demander : « Est-ce qu’il parle de moi ? » J’avais secoué la tête.
Après avoir passé en revue les stratégies et les formations d’équipe, Hakam avait fait sortir le groupe de la salle de réunion. Le raid allait bientôt commencer, et nous mettrions les pieds dans l’ancien labyrinthe le lendemain de notre départ.
Pour l’anecdote, nous étions techniquement considérés comme des étrangers pour cette mission, nous avions donc été autorisés à les rencontrer sur le site. Je voulais garder secrète la capacité de Wridra à voyager sur de longues distances, donc c’était pratique pour nous.
C’est ainsi que le commando de quarante-quatre membres avait été formé.
§
Cette bibliothèque est vraiment lumineuse… C’est ce que je pensais en regardant l’installation pleine de verre coûteux. Les bibliothèques bloquaient généralement le soleil pour éviter que les pages ne s’abîment, mais il semblerait que cet endroit ait été construit différemment.
Il y avait de nombreuses grandes fenêtres partout, et les rideaux qui ondulaient doucement au soleil étaient ornés de broderies complexes. Il va sans dire que c’était l’endroit idéal pour passer un après-midi élégant à lire un livre. N’importe quel amateur de livres aurait sûrement été ravi de passer son temps ici.
« Wôw, c’est si joli. Allons voir quel genre de livres nous pouvons trouver ici à Royal Arilai. »
Sur ce, Marie s’était enfoncée dans la pièce sans hésiter. Je m’étais retourné et j’avais vu Wridra et Shirley commander du thé à un domestique, en agitant la main comme si elles nous disaient de nous amuser. Je m’étais demandé si un fantôme pouvait même boire du thé alors que je suivais Marie.
La réceptionniste avait vérifié ma preuve d’adhésion dès que j’étais entré dans la pièce, puis m’avait tranquillement accueilli à l’intérieur. Aja nous avait heureusement donné ces cartes plus tôt, nous permettant d’utiliser ces installations restreintes. Je m’étais rappelé comment le vieil homme nous regardait comme si nous étions ses petits-enfants. Lorsque j’avais rattrapé Marie, elle vérifiait les dos de certains livres un par un.
« Écoute, ils sont tous très vieux, mais ils sont bien entretenus. C’est dommage qu’ils ne soient pas très pratiques. » J’avais regardé les livres qu’elle désignait du geste et j’avais vu que la plupart d’entre eux traitaient de sujets relatifs au développement du pays, comme l’escrime, la construction, la tactique, l’histoire et le commerce. Il semblait qu’il n’y avait pas grand-chose ici qui aurait été utile pour une sorcière spirituelle comme Marie. Elle aurait probablement débordé d’enthousiasme s’il y avait eu des livres d’images comme dans ma bibliothèque locale.
Marie avait tourné ses yeux violets pâles vers les fenêtres. En voyant une femme qui sirotait du thé en lisant un livre, les yeux de Marie s’étaient illuminés.
« Boire du thé en lisant semble être une pratique merveilleuse. Nous devrions apprendre d’elle. » J’avais souri alors qu’elle s’affairait à choisir des livres, puis j’avais décidé de l’aider dans sa sélection. Les livres qu’elle m’avait tendus portaient sur l’agriculture et l’architecture. Je m’étais souvenu des graines de citrouille que nous avions plantées, et j’avais senti une main sur mon épaule.
« Vous voilà. Je vous ai cherché partout. Pourquoi choisissez-vous des livres ? » Je m’étais retourné et j’avais vu une femme à la peau sombre qui se tenait là. La femme aux longues oreilles était manifestement une elfe noire, ainsi qu’un membre de l’équipe Diamant.
« Oh, Eve. Je ne savais pas que tu t’intéressais aussi aux bibliothèques. »
« Je ne suis pas intéressée. Penses-tu vraiment que j’ai un quelconque intérêt pour un endroit comme celui-ci ? Argh, Marie, pourquoi lis-tu des livres sur l’architecture ? Tu me fais un peu peur, pour être honnête. »
« Ne dis pas ça quand tu n’en as jamais lu toi-même. En tant qu’elfe, tu vas vivre une longue vie. Pourquoi n’étudies-tu pas et n’apprends-tu pas une chose ou deux ? C’est important d’avoir des hobbies, tu sais. »
D-D’accord… Marie était un peu trop à fond dans ses hobbies et baignait dans la culture otaku, mais j’avais décidé de me taire. Je ne voulais pas qu’elle me regarde fixement.
Marie se tenait debout avec une montagne de livres dans son dos, et Eve était en train de se dérober à l’un de ses regards. Le visage de l’elfe noire devint alors suffisant pour une raison quelconque, et elle se désigna elle-même d’un pouce.
« Mon esprit et mon corps le rejettent automatiquement, alors rien à faire. » En d’autres termes, elle n’avait tout simplement pas envie d’étudier. Bien que ce ne soit pas une surprise. Je pensais qu’elle était un peu comme Zera dans ce sens, mais j’avais gardé le silence.
Marie avait laissé échapper un soupir exaspéré, puis avait tourné ses yeux violets vers Eve.
« Tu as dit que tu nous cherchais. Pourquoi ? »
« Eh bien, nous sommes sur le point de nous rendre à l’oasis, non ? Je n’ai pas envie de marcher jusqu’ici, alors j’espérais que vous pourriez y conduire rapidement mon équipe. »
« Attends, qui t’a parlé de ça ? » avais-je demandé sans réfléchir, et Marie avait rapidement mis sa main sur ma bouche. Il était trop tard. Eve venait de lancer une supposition, mais un sourire s’était répandu sur son visage lorsque ses soupçons avaient été confirmés. Elle nous avait fait signe d’un doigt, et nous l’avions suivie jusqu’à une fenêtre proche. Il semblerait qu’elle était sur le point de nous arracher nos secrets.
J’avais senti Marie me pincer les fesses par-derrière pour me réprimander de mon lapsus. Mais ça n’avait fait que me chatouiller, et quand je lui avais demandé de s’excuser, elle avait juste froncé les sourcils avec une expression mignonne.
Eve avait posé son menton dans sa main sur la table circulaire, puis avait rapproché son visage, comme pour exiger des réponses. Ce que je n’arrivais pas à comprendre, c’est comment elle avait deviné notre secret par simple instinct ? Elle aurait dû avoir besoin de quelques indices pour arriver à cette conclusion.
« Eve, comment as-tu su que nous avions un moyen de voyager ? »
« Eh bien, tout le monde était occupé à se préparer, mais l’équipe Améthyste était la seule qui se contentait de se détendre, alors j’ai pensé que c’était suspect. Je comprendrais si c’était juste Wridra, mais vous deux semblez plus prudents sur ce genre de choses. Alors j’ai pensé, pour quoi ne pas demander ? »
Ça me paraissait logique. J’avais hoché la tête. Je n’avais jamais pensé que le fait que nous choisissions des livres lui avait mis la puce à l’oreille. En y réfléchissant, elle avait la classe unique de ninja, alors peut-être était-elle particulièrement douée pour recueillir des informations. Ou peut-être que c’était juste l’intuition d’une femme.
J’avais jeté un coup d’œil à Marie, qui avait haussé les épaules comme pour dire : « Fais comme tu veux ». Je m’étais demandé si nous aurions dû révéler tout cela, mais Eve avait veillé à protéger notre secret au Manoir des Roses Noires. Elle connaissait déjà notre capacité à voyager entre ce monde et le Japon, alors je m’étais dit que cela n’aurait pas été un gros problème de lui parler de notre moyen de transport.
« Peux-tu garder un secret, Eve ? »
« Bien sûr ! Je ne briserais jamais une promesse faite à un ami, » avait-elle répondu avec assurance, et j’avais décidé de lui faire confiance. J’avais demandé à Marie de bloquer le son qui s’échappait de notre cercle, puis j’avais levé trois doigts vers Eve. Ses yeux bleus la fixaient avec un grand intérêt.
« Nous avons trois méthodes de voyage. Il y a ma compétence de voyage longue distance : Trayn, le guide du voyageur, dont je t’ai déjà parlé. Nous pouvons aussi voler dans le ciel avec la Pierre magique, et enfin, nous avons la magie de Wridra. »
« Attends, quoi ? Comment ça, tu peux voler avec une pierre magique ? Puis-je aussi la monter ? » Elle avait rapproché son visage d’un air excité, mais je lui avais demandé de me laisser finir.
***
Partie 4
Je ne pouvais qu’emmener Marie avec moi avec ma compétence de voyage longue distance, et c’était limité aux endroits où il y avait un sanctuaire dédié au dieu du voyage. De plus, il était limité à une utilisation par jour. La pierre magique nécessitait que Marie ou moi-même la chevauchions, et nous ne pouvions emmener qu’un passager supplémentaire au maximum. Cela signifie qu’aucune des deux méthodes n’était adaptée pour emmener l’équipe Diamant avec nous.
La magie de Wridra aurait pu résoudre ce problème, mais nous voulions garder cette méthode secrète autant que possible. C’était une compétence bien trop pratique, et nous voulions absolument éviter toute attention indésirable.
« Eh bien, ça ne va pas marcher. Vous êtes déjà le centre d’attention. Vous avez nettoyé le deuxième étage, et tous les aristocrates se battent entre eux pour vous avoir sous leur contrôle, » dit Eve.
« Oui, c’est pourquoi nous sommes restés chez Puseri et Zera. Comme tu l’as dit, ce serait un problème si les gens découvraient nos méthodes de voyage avec tout ce qui se passe, » ajouta Marie. Nous avions tous gémi en même temps. Si l’équipe Diamant arrivait aussi à l’oasis en un instant, beaucoup de gens commenceraient à poser des questions. Une compétence de transport de groupe était vraiment précieuse. Elle pouvait renverser le cours d’une bataille si elle était utilisée pour envoyer des soldats sur un champ de bataille, et elle serait recherchée comme moyen d’évasion dans l’ancien labyrinthe. »
« Hmm, d’accord. Alors, je vais laisser tomber. Mon équipe serait contrariée si je suis la seule à y aller sans effort et que je les laisse toutes derrière moi. Mais à propos de ce voyage à la plage dont vous avez parlé avant… ? Ne pouvez-vous pas utiliser cette magie pour m’emmener avec vous ? »
Elle avait raison. Nous avions déjà refusé sa demande une fois, mais cela aurait été possible avec cette méthode. Même Wridra n’était peut-être pas capable de voler dans des terres inconnues, mais nous pouvions arriver sur le site avec mes compétences, puis aller la chercher à partir de là. Nous devions d’abord nous occuper du troisième étage de l’ancien labyrinthe et des rebelles, mais nous pourrions probablement emmener Eve avec nous par la suite.
Marie avait également hoché la tête avec un regard qui disait qu’elle était impressionnée à contrecœur.
« Tu es vraiment doué pour être rusé quand ça t’arrange, n’est-ce pas ? Bien, autant avoir un objectif amusant à atteindre pendant cette mission. »
« Yay ! Merci, Marie. Je suis si heureuse que tu sois ma première amie elfe. Je t’aime ! » Eve avait serré Marie dans ses bras, qui avait cligné des yeux avec un air surpris. Je ne pouvais pas m’empêcher d’être heureux de les voir s’entendre comme ça, même si Marie criait quand Eve avait joyeusement pressé ses lèvres contre sa joue pour l’embrasser.
Après un certain temps, nous avions dit au revoir à Eve pour l’instant. C’est à peu près à ce moment que les fières élites d’Arilai étaient parties pour leur mission.
§
La zone autour des portes était particulièrement animée, les instruments des prêtres résonnant bruyamment. Ils étaient une bénédiction pour soutenir ceux qui partaient pour l’ancien labyrinthe.
Non seulement il y avait des prêtres qui vénéraient le dieu de la terre, mais d’innombrables fleurs étaient dispersées depuis le deuxième étage des bâtiments environnants en guise de bénédiction pour Puseri du clan de la Rose Noire. Les familles royales d’antan étaient toujours appréciées à ce jour, et le leader de la nouvelle équipe Diamant avait souri aux citoyens qui montraient leur soutien. Bien qu’intérieurement, elle pouvait ou non être en colère contre une certaine elfe noire qui perdait son temps à faire on ne sait quoi.
La foule qui poussait en avant ne faisait qu’ajouter à la clameur, et elle dirigeait ses regards passionnés vers les guerriers qui partaient, comme s’ils étaient la prochaine génération de héros. L’équipe de raid avait été une grande aubaine pour l’économie du pays d’Arilai. Les gens avaient souhaité leur retour triomphal et n’avaient pas retenu leurs mots de soutien. Cependant, parmi eux, il y avait quelqu’un qui regardait avec une intention différente de celle du reste du peuple.
Celui qui se tenait au balcon du château royal et jetait un regard froid en contrebas était un membre important de la famille royale. Il y avait une nuance de résignation et de mépris dans les yeux du jeune homme, et ceux qui l’entouraient fixaient le groupe du raid avec des expressions similaires.
L’homme qui se tenait à leur tête avait ouvert la bouche pour parler.
« Hmph… Savez-vous combien de membres de ce groupe de raid reviendront en vie ? »
« Lord Wallace, je ne… »
« Ils vont tous mourir d’ici quelques jours. Mon père s’est laissé berner par les promesses vides d’Hakam, mais cela me fait mal de penser qu’ils finiront bientôt tous comme des cadavres. »
Dehors, les gens continuaient à donner leurs mots de bénédiction. Les pétales de fleurs ajoutaient de belles couleurs à la scène alors qu’ils étaient dispersés dans le ciel, et malgré les sourires joyeux des soldats en partance, la royauté les regardait comme s’ils étaient déjà morts.
Le petit groupe de raid avait été le sujet de conversation de tout le pays. Tout le monde voulait savoir pourquoi sa taille avait été réduite à un tiers seulement de la précédente. La théorie populaire était qu’ils prévoyaient d’envoyer les élites pour ouvrir la voie, puis d’envoyer des renforts plus tard, comme la dernière fois. Envoyer une trop grande unité en une seule fois signifiait que la plupart des soldats n’auraient pas eu grand chose à faire au début. Il était donc plus efficace d’envoyer des unités supplémentaires plus tard, selon les besoins. Telle était la principale rumeur qui circulait ces derniers temps.
Cependant, certaines personnes connaissaient la vérité. Ce petit groupe devait conquérir le troisième étage par lui-même. Ils savaient qu’ils ne reviendraient pas vivants.
« En fait, j’ai de la peine pour eux. Ils sont considérés comme remplaçables, » dit le membre de la famille royale avant de tourner le dos. Le reste de la famille royale était réuni juste au-delà, et il les avait salués avant de concentrer son attention sur la grande carte sur la table.
De nombreuses pièces apparemment faites à la main étaient visibles sur la carte, et les personnes rassemblées donnaient leur avis les unes aux autres.
Avec le raid sur l’ancien labyrinthe en cours, une autre bataille était sur le point de commencer ici.
§
J’avais levé les yeux au son d’un gazouillis et je les aivais protégés du soleil alors qu’un oiseau volait au-dessus de ma tête.
Nous avions pris notre temps pour nous préparer. Je me sentais mal d’avoir eu la vie si facile, mais nous devions juste attendre les autres dans le hall du deuxième étage. J’avais entendu dire qu’ils arriveraient tard dans la nuit, donc nous aurions probablement déjà dormi. Le raid proprement dit ne commencerait pas avant demain matin, donc cela n’aurait pas été un problème si nous devions nous regrouper tard.
Apparemment, notre base d’opérations devait se trouver devant la porte menant au troisième étage. C’était un peu loin du deuxième étage, et ils utiliseraient un chemin qui fait le tour du hall, donc ils ne devraient pas être trop bruyants. Mais honnêtement, j’étais la personne la plus bruyante de la forêt alors que je martelais quelques pieux avec un bruit métallique. Le bruit avait continué, et quelques oiseaux avaient volé de loin pour voir ce qui se passait.
Il restait du temps, mais pas assez pour le gaspiller. Je voulais profiter de cette occasion pour vérifier les outils que nous avions achetés en ville et monter la tente instantanée. Puisque Wridra nous transportait jusqu’ici, j’avais fait des folies pour acheter des objets qui nous permettraient de passer notre temps en toute tranquillité.
Marie lisait un livre à l’ombre, mais il semblait qu’elle avait trouvé un bon endroit pour s’arrêter, alors elle s’était levée et s’était étirée. Elle avait brossé les feuilles de son derrière et m’avait regardé.
« Alors, pourquoi as-tu fini par acheter une si grande tente ? »
« Eh bien, nous allons partir en mission avec un groupe de personnes, mais nous ne voulons pas que les autres nous voient dormir. J’ai donc pensé que ce serait mieux si nous revenions ici pour nous reposer. Shirley pourra gérer sa forêt comme d’habitude, et nous pourrons nous reposer tranquillement. » Tant que nous avions notre compagnon fiable, Wridra, nous pouvions revenir ici quand nous le voulions. Si nous nous assurions un endroit confortable pour dormir, cela faciliterait sûrement la suite de notre mission. J’avais expliqué cela à Marie, qui avait l’air plutôt surprise et impressionnée.
« Maintenant que tu le dis, nous n’aurions pas non plus à transporter le pot. Ok, alors je vais aussi aider. »
« Oh, c’est bon, il n’y a pas trop de travail. J’ai déjà fini de monter le toit et les poteaux de soutien, » avais-je dit, mais j’avais noté intérieurement combien il était difficile de monter une tente. J’avais redressé les poteaux, fixé les fondations, puis placé un grand morceau de tissu par-dessus. Je me rendais douloureusement compte de la raison pour laquelle les gens faisaient généralement cela en groupe.
Après avoir fixé l’extérieur avec quelques cordes et étendu un tissu épais sur le sol, le processus était à peu près terminé. La tente d’un blanc laiteux étant montée, j’avais poussé le rideau de l’entrée pour vérifier si l’on pouvait y rester.
« Je pense que ça devrait le faire. Marie, tu peux entrer maintenant. » Elle pensait peut-être qu’elle allait s’effondrer sur nous. Marie était entrée dans la tente avec précaution, regardant la pièce circulaire avec circonspection. Une expression de satisfaction s’était ensuite imposée à elle après avoir observé l’intérieur spacieux.
« Oh, c’est sympa. Il y a plus de brise que je ne le pensais. C’est en fait assez confortable ici. »
« J’en ai acheté une qui est un peu plus cher. C’est bien d’avoir de l’argent pour des moments comme ceux-là. » Je trouvais inutile de m’attarder sur l’argent dans le monde des rêves. Pourtant, il était très avantageux de pouvoir acheter les choses dont on avait besoin quand on le voulait.
J’avais montré mes paumes à Marie, et elle avait fait le même geste. Au moment où nous nous frappions les mains pour nous congratuler, le rideau s’était ouvert et une voix familière nous avait appelés.
« Que faites-vous tous les deux là-dedans ? Il y a quelque chose dont je veux discuter. Cessez vos bêtises et venez ici. »
« Oh ? » avions-nous dit, l’air bête, les mains pressées l’une contre l’autre.
§
Wridra nous avait guidés vers un terrain vague de l’autre côté de la rivière. Curieusement, il n’y avait pas beaucoup de mauvaises herbes qui y poussaient, et c’était bien entretenu comme un terrain de sport. Il y avait un arbre isolé avec une table et une chaise sous celui-ci, ce qui semblait quelque peu déplacé.
« Huh, je pensais qu’il y avait des bois par ici. »
« J’ai demandé à Shirley de les enlever du chemin. Il va falloir penser à la disposition maintenant, après tout. Hé, Shirley ! »
Hm ? La disposition ?
Wridra nous avait conduits à une table circulaire et j’avais pris un siège. La table en métal avec des trous en forme de treillis semblait convenir à un jardin occidental. Je m’étais rendu compte que j’étais distrait et j’avais décidé de sortir nos repas de mon sac. Je n’avais pas beaucoup de temps pour cuisiner ces derniers temps, alors j’avais apporté de simples sandwichs aujourd’hui.
Les ingrédients, tels que les œufs, les tomates et le bacon, étaient tous pris en sandwich entre des tranches de pain blanc et offraient un repas vibrant et coloré à l’ombre des arbres. Une fois que le thé avait été distribué, il était temps de prendre un déjeuner tardif et de commencer une réunion.
« Om nom, délicieux… Mmf, ce sandwich au thon est mon préféré. La saveur qui fond dans la bouche est tout simplement à tomber par terre. Je ne peux m’empêcher d’apprécier sa pureté, » déclara Wridra.
« Tu manges toujours la même chose, Wridra. Le thon mayo était aussi ton type de boulette de riz préféré, » avais-je répondu.
« Je n’y peux rien tant c’est délectable. En tout cas, nous allons convenir que tous les sandwichs au thon m’appartiennent et commencer notre discussion. » Elle avait revendiqué les droits sur tout le thon et mayonnaise, tout naturellement. Marie avait ignoré la revendication de Wridra et avait pris un des sandwichs au thon, prenant une gorgée de son thé.
***
Partie 5
« Quel est le plan que tu as mentionné plus tôt ? Tu n’as pas l’intention de construire une maison ici, n’est-ce pas ? »
« Cela pose-t-il un problème ? J’ai des archives de jardins et de bâtiments avec des éléments japonais et occidentaux grâce à ma magie de projection. Vous voyez ? Regardez. »
Wridra avait fait apparaître dans l’air des images de Yamamoto-tei, l’une après l’autre. Marie et moi regardions, bouche bée, tandis que Shirley n’était pas du tout surprise. En y réfléchissant, ce champ vide avait à peu près la même taille que le manoir… Un coup de vent était passé, et nous avions finalement repris nos esprits.
« Mais nous aurions besoin de beaucoup de matériel et de main-d’œuvre, n’est-ce pas ? »
« Qu’est-ce que tu dis ? Avec Shirley et moi ici, il n’y a pratiquement rien que nous ne puissions faire. Après tout, c’est pour cela que nous sommes allés voir le jardin en personne. » Wridra m’avait regardé comme si elle demandait : « Est-ce que je me trompe ? », mais je ne savais rien de tout cela.
En voyant Shirley hocher la tête, j’avais enfin compris qu’elles voulaient vraiment construire cette maison. Je m’étais calmé en buvant une gorgée de thé, puis j’avais pris une profonde respiration. J’avais éparpillé quelques miettes de pain pour les oiseaux qui se rassemblaient, puis je m’étais tourné vers Wridra. Je pouvais sentir mon cœur battre dans ma poitrine.
« Alors, on construit vraiment une maison ? Et combien de temps penses-tu que cela prendra, Wridra ? »
« Nous devrons d’abord décider de la disposition des lieux. Pour une maison d’un étage relativement simple, il ne devrait pas falloir plus de quelques jours pour en construire la structure globale, » dit Wridra en se penchant plus près de moi. Marie s’était également penchée vers moi alors que la réalité de la situation commençait à se faire sentir, et j’avais eu l’impression que nous avions une sorte de réunion secrète.
Shirley avait raté l’occasion de rejoindre notre petit cercle, alors Marie et moi l’avions prise par la main et l’avions rapprochée de nous. Et ainsi, elle était la seule à avoir un grand sourire sur le visage lorsque notre réunion avait officiellement commencé.
« En fait, ça fait longtemps que je rêve de vivre dans une maison à un étage. Si on doit faire ça, je veux que ce soit parfait. Est-ce que ça convient à tout le monde ? » avais-je dit.
« Oh, wôw, c’est excitant. Je préfère quelque chose de simple et chaleureux à quelque chose de tape-à-l’œil. Ce serait bien s’il y avait aussi un endroit pour lire des livres, » répondit Marie. Wridra avait gloussé, puis avait pointé ses paumes vers la table. Le plan d’une maison avait alors été projeté dans l’air.
La vraie surprise était encore à venir. Des particules sombres avaient été expulsées du bout de ses doigts, prenant la forme de piliers et de meubles sur le plan et formant un bâtiment tridimensionnel miniature. Nous avions tous laissé sortir notre voix pour exprimer notre étonnement devant ses capacités. C’était comme voir une imprimante 3D magique au travail.
« Haha, ce sera la mise en page pour notre référence. Nous allons mettre en œuvre vos idées ici. Je suppose qu’il n’y a pas d’objections ? »
« Non, non, pas du tout. Nous aurons besoin d’un bain aussi. Un bain propre ! » dit Marie.
« Bien sûr, je n’ai pas non plus d’objection non plus. Je suis impatient. Créer des choses est ta spécialité, Wridra, mais je ne pensais pas que nous aurions l’occasion de voir quelque chose à une telle échelle. » En entendant nos compliments honnêtes, la bouche de Wridra s’était courbée en un sourire confiant.
C’était vraiment agréable d’avoir une amie Arkdragon. Dire que nous aurions notre propre maison au deuxième étage du labyrinthe alors que nous étions restés chez les autres jusqu’à présent. Je m’étais dit que nous pourrions utiliser la tente que nous avions montée plus tôt en attendant que la maison soit terminée.
« D’accord, si nous faisons ça, allons-y à fond. Nous ne la ferons pas inutilement grande, et nous ne voulons évidemment pas qu’elle soit trop petite. Faisons une maison avec une belle vue et dans laquelle il sera agréable de vivre. »
Nous avions tous mis nos mains ensemble, Shirley ayant mis la sienne en dernier avec précaution. Notre « Yeah ! » avait résonné dans la forêt, et les oiseaux qui picoraient leurs miettes de pain s’étaient retournés, surpris.
Le choix de l’aménagement avait été beaucoup plus difficile que prévu.
Nous avions chacun partagé nos opinions en nous basant sur la miniature que Wridra avait réalisée. Nous avions commencé à placer les choses par ordre d’importance, mais l’aspect s’était dégradé au fur et à mesure que nous avions ajouté des salles et des pièces individuelles. Des couloirs étranges et des espaces inutiles avaient commencé à être ajoutés à la conception, et Wridra avait dû refaire le plan à chaque fois. Marie avait fixé la miniature en fronçant les sourcils, puis avait marmonné.
« Hmm, on peut vraiment voir à quel point ces bâtiments sont bien conçus quand on les regarde comme ça. »
« Mon admiration pour ces architectes grandit au fur et à mesure que nous essayons de faire le nôtre. Les Japonais sont rompus à l’art d’utiliser au mieux les petits espaces. Mais cet endroit a été fait pour accueillir un grand nombre d’invités, il n’est donc pas forcément adapté pour y vivre. » Je ne m’attendais pas à ce que nous ayons du mal avec une architecture comme celle-ci.
Je ne pouvais pas compter combien de fois nous avions recommencé à zéro. Avant de m’en rendre compte, Shirley s’était déjà endormie. Un petit oiseau était posé sur sa tête, s’endormant également.
Nous aurions pu aller au Japon pour voir d’autres maisons modèles, mais je ne pouvais pas imaginer qu’aucune d’entre elles n’aurait un design adapté à cette forêt. En ce sens, Yamamoto-tei était vraiment le bâtiment idéal. Nous nous étions complètement heurtés à un mur, et Wridra s’était gratté la tête en signe de frustration.
Il faudrait du temps à des amateurs comme nous pour terminer la mise en place de ça. Mais il devait y avoir quelque chose que nous pouvions faire. Si seulement il y avait un moyen, même pour les amateurs, d’élaborer une maquette…
« Oh, je sais. Pourquoi ne pas demander aux esprits de Marie de construire les plans pour nous ? Nous ne pouvons pas nous empêcher de regarder l’image globale avec les miniatures, et nous ne sommes pas des architectes professionnels. Ce serait peut-être plus facile si nous voyions le bâtiment à l’échelle réelle, » avais-je suggéré.
« Oh, c’est une bonne idée. Nous avons déjà appris le concept des piliers. Nous pouvons faire quelque chose comme une maison, mais ne vous attendez pas à ce que ce soit trop solide. Cela m’aidera également à améliorer mes compétences dans le processus. »
« Alors je vais aussi donner un coup de main. La sorcellerie spirituelle de Marie n’est peut-être pas encore suffisante. J’apporterai mon soutien pour les parties les plus complexes, » dit Wridra. Peut-être pensait-elle que ce petit exercice l’aiderait à rester éveillée. Elles se levèrent toutes les deux de leurs sièges, puis commencèrent à travailler avec les esprits de pierre tout en regardant en arrière et en avant entre la miniature et le champ.
Pendant notre séjour dans l’ancien labyrinthe, nous avions rapidement adapté la structure tridimensionnelle des murs à notre stratégie de combat. Marie s’était entraînée à la sorcellerie des esprits depuis, et elle avait été capable de mettre en place le plan de la maison en un rien de temps. Je ne pouvais qu’applaudir, et voir les esprits de pierre changer sous mes yeux me donnait l’impression d’être dans un livre d’images. J’avais tendu la main vers l’un des murs de pierre pour constater qu’il était vraiment solide au toucher. Les murs étaient trop épais, et le plafond ne pouvait pas être maintenu en place à cause de son poids. Mais c’était vraiment plus facile à comprendre que le plan que nous avions utilisé.
« Marie, je suis impressionné. Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de personnes sur le continent qui pourraient construire ceci avec une telle précision. »
« Ahem. Je te ferais savoir que je suis en fait assez talentueuse, » répondit Marie. Eh bien, je savais à quel point elle était talentueuse depuis le jour où je l’avais rencontrée.
Une fois les piliers de soutien et les murs construits, nous étions tous entrés par l’entrée. Je m’étais amusé à observer le processus d’ajout de fenêtres pour éclairer l’endroit et à modifier la disposition au fur et à mesure.
« Gardons la salle de réception à côté de l’entrée telle quelle. Il y a beaucoup de soleil qui entre ici, donc ça devrait être un endroit agréable pour lire quelques livres. »
« Pas d’objection. Nous pourrions même la rendre plus spacieuse en combinant cette pièce avec l’espace à l’arrière. Nous devrions peut-être agrandir le terrain. Ce n’est pas comme si nous devions payer pour le terrain. »
Certains des murs s’étaient effondrés, et la salle de six tatamis avait été doublée pour passer à douze. Entre-temps, la taille du terrain s’était agrandie, ajoutant beaucoup d’espace à droite de l’entrée pour la salle de réception et un autre espace spacieux à gauche de celle-ci. Il y avait des jardins de chaque côté de la salle, et on pouvait ajouter des portes en moustiquaire shoji comme séparateurs d’où l’on pouvait avoir une belle vue.
« Ouais, c’est sympa. J’ai toujours rêvé d’une vue comme celle-ci. Ce sera encore mieux avec une grande salle de bains et une aire de repos au bout du jardin, » avais-je dit.
« Je sais ! J’ai entendu dire qu’il y avait un bain en plein air à notre destination à Izu. Nous pourrions attendre la fin de notre voyage pour décider de l’aménagement final. » Wridra hocha la tête en accord avec le commentaire de Marie.
Peut-être que cette maison se rapprocherait de son achèvement au fil de nos visites au Japon et de nos excursions. Nous avions déjà eu du mal avec les plans bâclés, mais nous ne nous préoccupions plus des petits détails. Nous avions réorganisé le plan à la volée, il était donc évident qu’il ne serait pas parfait. En fait, j’avais l’impression que ces petites imperfections étaient ce qui lui donnait une saveur unique qui nous convenait bien.
Le temps passe vite quand on fait ce qu’on aime. Nous avions fini de travailler sur les chambres d’hôtes, le hall principal, et le plan général approximatif pour aujourd’hui. Cependant, tout cela pouvait changer une fois que nous serions à l’auberge d’Izu.
Nous avions tous pris place dans la véranda improvisée et avions regardé le jardin vide. Nous avions visité Yamamoto-tei récemment. Le spectacle que nous avions vu alors était encore frais dans nos esprits. Il me suffisait de fermer les yeux pour voir le magnifique jardin verdoyant. Je ne pouvais m’empêcher de penser que notre jardin ressemblerait à celui-ci un jour, et que les choses deviendraient encore plus excitantes au fur et à mesure que notre exploitation agricole prendrait forme.
« Oh, je ne peux pas attendre ! » Wridra avait un énorme sourire sur le visage en s’allongeant sur le dos. Le reste d’entre nous avait également souri en s’allongeant sur le dos, puis on avait remarqué que le soleil commençait à se coucher. Peut-être qu’un jour, nous préparerions notre literie par une soirée comme celle-ci et cuisinerions un repas dans la cuisine. Marie s’étira, ses yeux se rétrécissant joyeusement comme si elle imaginait la même chose.
« Cela vous fait vraiment voir que le monde n’est pas qu’une question d’argent. J’apprécie tellement les moments comme celui-ci. » Je comprenais son sentiment, mais je ne pouvais pas imaginer combien d’argent il aurait fallu dépenser pour avoir un tel endroit au Japon. Et pourtant, il était vrai que je me sentais satisfait. Nous avions ri ensemble, puis nous nous étions dirigés vers la tente que nous avions plantée plus tôt. J’avais du travail demain, et une fois que j’aurais fini, le raid au troisième étage commencerait.
Les choses étaient de plus en plus occupées avec l’Obon qui approchait. Avec mes rêves, même le Japon se transformait en un lieu de loisirs, alors je me sentais un peu mal de m’amuser autant tout le temps.
Quant à savoir si c’était confortable ou non de dormir dans la tente, j’avais complètement oublié que je pouvais dormir n’importe où, n’importe quand.
***
Chapitre 8 : Alerte au typhon
Partie 1
C’était peut-être vrai pour n’importe quel ménage, mais nous regardions habituellement les nouvelles et la météo le matin. C’était l’un de ces matins-là, et nous écoutions le présentateur télévisé en rangeant la vaisselle. J’avais remarqué que les fenêtres claquaient, peut-être parce que le vent était particulièrement fort aujourd’hui.
Mariabelle fixait la télévision d’un air sérieux. Elle serrait le dossier de sa chaise, les oreilles dressées, et écoutait la voix du présentateur. Quand je m’étais mis à côté d’elle, ses yeux violets m’avaient regardé.
« Le temps semble particulièrement mauvais aujourd’hui. Pourquoi les humains vont-ils au travail même les jours comme celui-ci ? C’est vraiment incroyable. »
« Oh, ça sera là à midi, hein ? C’est plus tôt que prévu, » avais-je dit nonchalamment. J’aurais été heureux que nous ayons un jour de congé, mais malheureusement, je n’avais pas été prévenu. Mon patron aurait peut-être fini par nous dire de rentrer plus tôt chez nous à ce rythme, mais je rentrais toujours chez moi à heures fixes, alors les choses n’auraient pas été différentes.
Wridra avait entendu notre conversation depuis le siège d’en face et avait plié le journal qu’elle tenait dans ses mains. Elle portait des lunettes ces derniers temps, peut-être parce qu’elle aimait ce look. L’Arkdragon n’en aurait certainement pas besoin pour corriger sa vision.
« Hm, c’est ce qu’on appelle un “typhon”. Il pleut assez souvent ici, et il n’est pas inhabituel que les pays insulaires proches de la mer aient parfois du mauvais temps. » Toutes les chaînes parlaient de l’arrivée du typhon. Un tiers de l’écran affichait un message avertissant de son approche, avec des lettres géantes qui disaient « Typhon géant en approche ! » « La région de Kanto a été touchée ! » « Attention aux fortes rafales ! » Je ne pouvais pas blâmer Marie d’avoir peur, n’en ayant jamais connu auparavant. Elle s’était serrée contre le dossier, se concentrant sur la voix du journaliste.
J’étais inquiet de ne pas pouvoir être avec elle pour son premier typhon. Heureusement, Wridra serait présente. Elle était comme une grande sœur sur laquelle on peut compter, alors je me sentais beaucoup mieux avec elle dans les parages.
« Regarde, ça dit de se méfier. Les typhons sont-ils vraiment si effrayants ? »
« Eh bien, le Japon est proche de l’océan. Cela signifie que les gros typhons se forment souvent à partir d’air chaud. Ils sont connus pour leurs vents violents et pluvieux, et selon la région et l’échelle, il arrive que l’on ne puisse même pas se tenir debout. » Soit dit en passant, les pays de ce côté-ci de l’océan Pacifique les appelaient typhons, en Amérique, on les appelait ouragans, et dans l’océan Indien, on les appelait cyclones. Ils avaient donc en fait trois noms différents, selon la région.
Marie ouvrit grand les yeux. Une image terrifiante était diffusée à la télévision, avec des parapluies qui s’envolaient et des arbres déracinés par le vent puissant.
Même Marie, habituellement calme, avait pâli en voyant les dégâts qui s’affichaient sur l’écran. Je ne voulais pas trop l’effrayer, mais c’était un gros coup, alors je devais m’assurer qu’elle reste à l’intérieur.
« Si tu dois faire des courses, tu devras les faire avant midi. Nous avons des ingrédients pour le déjeuner, mais pas assez pour le dîner. Mais j’achèterai quelque chose sur le chemin du retour, alors ne t’inquiète pas pour ça. »
« O-Okay. Je vais rester à la maison et lire quelques livres. Sois prudent là-bas, d’accord ? Appelle-moi si quelque chose arrive. » C’était elle qui s’inquiétait pour moi. Mais j’étais habitué aux typhons, et je ne serais qu’un peu mouillé, alors je n’étais pas trop inquiet. J’avais tapoté ses cheveux soyeux en signe de gratitude, et elle avait souri, semblant apprécier.
J’avais fini par enfiler mon costume, Marie m’avait souhaité une bonne journée, et j’étais parti au travail.
Je suis inquiet. J’espère qu’elle va s’en sortir. Je devrais aller la voir plus tard. Ces pensées troublantes traversaient mon esprit alors que je marchais dans le vent puissant. Le ciel au-dessus de moi était complètement noir, et ce n’était pas du tout comme mes matins habituels.
§
Wridra était habituée aux changements de climat.
Ayant vécu si longtemps, elle comprenait mieux que quiconque le pouvoir de la nature. Elle avait vu des gens et des animaux périr sous sa force imparable et savait comment y faire face. À ses yeux, les immeubles d’habitation de Koto Ward étaient aussi sûrs que possible. La zone était bien préparée pour une inondation, et même si des objets étaient projetés en l’air par une rafale, ils ne seraient pas arrivés jusqu’ici.
Cependant, l’elfe assise à la table était vraiment agitée et nerveuse. Il était encore dix heures et peu de temps s’était écoulé depuis que Marie avait commencé à lire son livre. Son attention était tellement attirée par la vue au-delà de la fenêtre qu’elle n’avait pas beaucoup avancé.
Beaucoup considéraient sa maison, la forêt elfique, comme un lieu mystique. Les elfes étaient protégés par la bénédiction des esprits, et ils conféraient à ces derniers des pouvoirs qui leur permettaient d’atteindre une paix supérieure à celle que l’on peut trouver dans un village humain.
Même si Marie avait vécu une centaine d’années, cela ne faisait que quelques années qu’elle avait quitté son village. Sans compter que la région d’Alexei était particulièrement stable en termes de météo. Marie était considérée comme jeune parmi les elfes, et elle n’avait manifestement jamais connu un changement de temps aussi spectaculaire auparavant.
Le ciel s’assombrissait à mesure que le temps passait, et elle s’inquiétait en voyant les nuages devenir de plus en plus denses. Wridra ferma le magazine de voyage d’Izu qu’elle lisait et s’adressa à Marie.
« Le Japon est parfaitement préparé en cas de tremblement de terre ou d’inondation. Ces bâtiments semblent assez stables. Je doute que quelque chose se produise. »
« Oui, je suis sûre que c’est vrai, mais… ne sachant pas ce qui pourrait arriver, je ne peux m’empêcher de me sentir nerveuse. J’ai du mal à rester tranquille. » Wridra avait réfléchi pendant un moment. Il semblait que les typhons étaient assez courants, et même Marie comprenait que ça ne servait à rien d’avoir peur. Mais les espèces proches des esprits s’agitaient lorsqu’elles ne pouvaient pas comprendre les choses avec leurs cinq sens.
Les téléviseurs étaient très pratiques, et l’idée d’observer à distance l’endroit où frappait un typhon était un concept que les habitants du monde des rêves n’auraient jamais pu imaginer. Mais le fait de ne pas pouvoir le voir en personne ne faisait qu’amplifier l’anxiété de Marie, qui avait du mal à avancer dans son livre.
Ainsi, Wridra pensait secrètement qu’il aurait été préférable de l’emmener dehors. Comme Marie ne pouvait pas voir les esprits, il aurait été plus facile pour elle de l’accepter en allant dehors plutôt que de regarder des images. Sinon, elle aurait simplement supposé que c’était quelque chose d’effrayant sans le comprendre.
« Kitase est vraiment surprotecteur avec elle, » pensa l’Arkdragon et laissa échapper un soupir.
« Alors que dirais-tu de te préparer au typhon avec moi ? Par exemple, nous pourrions acheter les ingrédients pour le dîner de ce soir à sa place. »
« Mais il a dit qu’il récupérera… »
« Hm. J’ai le sentiment que le temps va empirer, et que le retour de Kitase sera assez tardif. J’ai entendu dire que ces trains sont assez vulnérables à la pluie et au vent. » Marie se retourna, les yeux écarquillés, et cessa d’essayer de lire son roman. Elle avait réalisé que Kazuhiro pouvait être en plus grand danger qu’elle. Wridra regretta d’avoir mentionné Kitase et s’adressa à la timide petite elfe.
« Même s’il finit par rentrer plus tôt, les restes peuvent être utilisés pour le repas de demain. Tu ne seras pas en danger avec moi. » Marie avait cligné des yeux et avait réfléchi.
L’intuition de Wridra était juste la plupart du temps. En fait, elle ne s’était jamais trompée jusqu’à présent. Elle avait dû se dire qu’il serait préférable d’aller faire du shopping avant l’arrivée du typhon.
Il y avait un portefeuille à la maison, juste au cas où. Marie avait regardé l’horloge sur le mur, se rappelant qu’on lui avait dit de faire les courses avant midi si elle voulait y aller.
Elle avait encore peur des fenêtres tremblantes, mais elle avait fait un petit signe de tête.
Marie avait enfilé un capris et un imperméable, puis elle était sortie et avait fermé la porte d’entrée derrière elle. Elle avait été déçue de voir que son amie portait son pantalon et sa chemise habituels, contrairement à sa propre tenue, tout à fait appropriée au temps.
« Wridra, tu sembles sous-estimer les typhons. Les vents sont si forts qu’ils peuvent arracher les toits des bâtiments ! » Alors même qu’elle réprimandait l’Arkdragon, Marie s’accrochait fermement à la chemise de Wridra et la regardait avec une expression inquiète. Elle avait un regard d’enfant dans les yeux que Wridra trouvait tout à fait adorable.
« Pourquoi souris-tu ? Hé, ne me tape pas la tête comme un enfant, » protesta Marie.
« Hah, hah, mon corps a bougé de sa propre volonté. Ne t’inquiète pas, j’ai apporté un parapluie. Je suis venue toute préparée, » dit Wridra en montrant son parapluie en plastique. Marie semblait satisfaite et se détourna. L’elfe tendit alors la main vers l’air vide à côté d’elle. Elle avait essayé de tenir la main de Kazuhiro, absent, par habitude.
Wridra avait saisi l’autre main de Marie avant qu’elle ne puisse faire une grimace. On aurait dit qu’elle voulait dire quelque chose, mais son sentiment de mécontentement avait semblé se dissiper lorsque l’Arkdragon avait serré sa main à plusieurs reprises. Marie avait serré la sienne en réponse, comme pour montrer qu’elle allait bien.
« D’accord, alors allons-y. Pour commencer, nous devrons appuyer sur le bouton de l’ascenseur avec précision. Si nous appuyons sur le mauvais, nous serons très embarrassées. »
« Hm, je souhaite également appuyer dessus. Ces boutons sont assez agréables à presser pour une raison inconnue. Sans compter qu’ils s’allument ! » Marie n’avait pas pu s’empêcher de sourire à cette explication trop dramatique. Alors qu’elles avaient des conversations aussi idiotes, Marie se surprenait à commencer à s’amuser.
Il y avait beaucoup d’humidité dans le vent rugissant. Lorsque Marie était sortie de l’ascenseur, elle avait levé les yeux vers le ciel sombre et avait senti l’air. Elle avait alors réalisé que la pluie approchait.
« Dépêchons-nous, les nuages de pluie sont beaucoup plus proches que ce qui était annoncé dans les rapports. » Les deux femmes se dirigèrent vers le supermarché à travers le ciel sombre et un sentiment de malaise, avec le vent dans le dos et l’imperméable de Marie qui battait au vent. Alors qu’elles progressaient régulièrement le long du lit de la rivière, elles étaient tombées sur un spectacle complètement différent de l’habitude.
« Wôw, l’eau de la rivière est si haute. Il doit vraiment pleuvoir fort en amont. »
« Hm, c’est beaucoup plus fort que d’habitude. Le système de contrôle des inondations est assez impressionnant. » Elles pouvaient entendre la rivière rugir bruyamment alors qu’elles marchaient sur le chemin qui la bordait. L’eau était beaucoup plus haute que d’habitude, et il aurait été assez dangereux qu’elles glissent et tombent. Cependant, une rivière qui s’agitait de façon aussi sauvage attirait les regards, qu’elles le veuillent ou non. Sa masse intimidante fascinait aussi bien les humains que les elfes. À ce moment-là, des nuages noirs avaient été aperçus au loin.
« Attends, est-ce que c’était…, » Marie avait glapi en entendant le tonnerre qui avait suivi, serrant involontairement la main de Wridra. Bien sûr, elle avait vu des éclairs à plusieurs reprises durant sa jeunesse. Cependant, c’était la première fois qu’elle était confrontée à un tonnerre provenant de nuages aussi épais. Les cieux grondèrent encore un peu, puis virent un éclair de lumière.
« Kya ! » Marie s’accrocha cette fois au bras de Wridra, puis se rendit compte du changement d’environnement en essayant de se calmer.
***
Partie 2
Le vent devenait beaucoup plus fort qu’il ne l’avait été quand elles avaient quitté l’appartement. Il les poussait par l’arrière et l’odeur de la pluie était plus forte qu’avant. Marie avait senti ses genoux faiblir alors qu’il la poussait vers la rivière. « Hm, » se dit Wridra en regardant.
La chose la plus facile à faire maintenant aurait été de prendre Marie par la main et de la ramener chez elle. Mais Wridra avait reconnu que sa façon de penser avait changé au fil du temps passée dans ce monde. Elle avait donc pensé au visage de Kitase, qui s’était accroupi et elle avait fixé les yeux de Marie. Elle avait alors parlé d’une manière lente et douce comme il l’aurait fait.
« J’ai entendu dire que les typhons sont quelque chose que l’on peut réellement apprécier tant que l’on se prépare correctement. »
« Qu-Qu’est-ce que tu veux dire ? »
« Hm, par exemple… Tu fais des provisions de bonbons, tu prépares un film digne d’un typhon et tu le regardes avec moi. Qu’est-ce que tu en penses ? »
Un changement s’opéra dans les yeux de Marie, qui étaient emplis de peur il y a quelques instants. Elle avait peut-être imaginé ce que ce serait de discuter de ce qu’elle avait aimé dans le film tout en mangeant de délicieuses collations. Bien que le typhon l’effraye toujours, elle avait senti que ce ne serait pas si terrifiant de passer son temps comme ça.
« Tu es plus compétente que moi en matière de cinéma. J’aimerais regarder quelque chose qui corresponde à ce temps clément. »
« Oh, d-d’accord. Et aussi, il y a un plat que j’ai toujours voulu faire. Je pense que ce serait parfait pour regarder un film, mais… peut-être que ce ne serait pas une bonne idée de dépenser de l’argent inutilement ? » Kitase aurait sûrement secoué la tête à ce sujet. Wridra sourit, réalisant que l’attitude facile de cet homme avait affecté sa propre personnalité. Elle devait admettre que cela lui convenait tout à fait.
« Haha, haha, j’ai hâte d’y être. Tu devrais t’entraîner à cuisiner lorsque tu regarderas des films avec Kitase. Je suis sûre qu’il sera ravi si tu le fais. » Les vents rugissants étaient encore assez terrifiants. Pourtant, l’elfe sourit joyeusement et serra la main de la dragonne, puis commença à avancer. Il était difficile de croire qu’elle était trop effrayée pour faire un autre pas en avant il n’y a pas si longtemps.
Et ainsi, les deux files avaient affronté leur premier typhon ensemble.
Le vent soufflait de toutes parts, faisant voler bruyamment leur sac en plastique. Cependant, la grande femme qui tenait le sac semblait indifférente et regardait autour d’elle tandis que ses cheveux dansaient dans le vent.
Les arbres du parc se balançaient de façon spectaculaire, éparpillant leurs feuilles dans les rues. Marie, qui se faisait conduire par la main, commençait à avoir du mal à marcher contre le vent violent sans s’en détourner.
Quelque chose avait éclaboussé sa joue, puis une autre, et avant qu’elle ne le sache, des gouttes de pluie avaient commencé à tomber partout. Le bruit du vent s’était rapidement transformé en quelque chose de lourd et de solide, et les yeux de Marie s’étaient ouverts en grand.
« Ah ! Il pleut ! Ça tombe fort, on devrait se dépêcher ! »
« Oui, c’est une sacrée averse. Si je lâche ta main, tu risques de t’envoler, petite elfe. J’aimerais voir si tu peux vraiment voler sur ces toits. »
« Oh, arrête ! » Marie avait entouré Wridra de ses bras par-derrière. L’Arkdragonne fut prise au dépourvu par cela, mais se retrouva à se sentir plutôt ravie. Les nuages denses qui volaient au-dessus de leur tête s’écoulaient aussi rapidement que la rivière qu’elles avaient vue plus tôt. Mais alors que les gouttes de pluie tombaient sur leurs vêtements et sur leur peau, elles s’amusaient bien plus qu’elles ne l’avaient jamais fait sous la pluie auparavant.
Le son vif des rires endiablés et des cris aigus semblait détourner le bruit du torrent pluvieux. Leurs voix résonnaient sur tout le chemin du retour.
Marie retira ses vêtements trempés de sa peau, puis elle fit une tête plutôt mécontente. Même dans la cabine d’essayage sombre et non éclairée, le bruit de la pluie pouvait encore être entendu.
« L’imperméable n’était pas de taille face à un typhon. Il était inutile d’en porter un. »
Ses vêtements étaient complètement mouillés. Il avait été difficile de se déshabiller tout de suite, et elle s’était plainte tout le temps en luttant pour les enlever. Elle frissonna au contact de l’air frais et de l’eau qui ruisselait dans ses cheveux et dans son dos.
Quand elle jeta un coup d’œil dans la salle de bain, elle vit que Wridra tournait le bouton de la douche. L’eau chaude commença à jaillir, remplissant la salle de bain de vapeur.
« Quel luxe que de pouvoir distribuer de l’eau chaude immédiatement ! »
« Wridra, tu devrais arrêter de l’apprécier et te déshabiller. Nous n’avons pas le temps de prendre une douche à tour de rôle alors que nous sommes toutes les deux trempées. Dépêchons-nous et entrons. »
Wridra hocha la tête, puis retira sa chemise et son pantalon d’un seul coup. Peut-être avait-elle prévu le coup et choisi de porter des vêtements faciles à enlever ? Alors que Wridra se tenait là, avec son corps séduisant exposé sans la moindre pudeur, Marie s’était aperçue que c’était elle qui était gênée pour une raison ou une autre. Sa bouche s’était ouverte avant de se fermer à la chaîne pendant un moment, puis elle avait émis une plainte.
« Tu devrais apprendre à être un peu plus modeste. Tu devras te changer correctement dans les vestiaires quand nous irons à Izu, tu sais ? »
« Hm ? Mais nous pouvons simplement nous habiller dans la voiture. Agh, fais comme tu veux. Je préférerais ne pas avoir affaire à une petite elfe et un humain acariâtres. J’utiliserai le soi-disant vestiaire si tu insistes. » Wridra savait déjà qu’il n’y avait pas à discuter quand Marie fronçait les sourcils et faisait cette moue mécontente. Elle avait agité ses mains dans un geste de reddition, et Marie avait semblé satisfaite.
La pluie continuait de s’abattre sur Koto Ward à l’extérieur, mais la douche chaude semblait atténuer un peu sa frayeur. « Tu as failli être emporté par le vent sur les toits, petite elfe, » taquina Wridra dans la salle de bain remplie de vapeur. Dans le salon, le DVD qu’elles avaient loué les attendait. Marie était impatiente de le regarder, et elle avait l’impression que sa peur des typhons sera complètement oubliée à ce rythme.
Juste à ce moment-là, de l’eau chaude avait été projetée sur elle, et elle avait éclaté de rire pour une raison quelconque. Peut-être était-ce à cause de la joie qu’elle avait vue sur le visage de Wridra.
Il y a un proverbe qui dit : « Danger passé, Dieu oublié. » Le typhon qui avait semé la peur dans le cœur de Marie changeait de forme à l’intérieur d’elle. Bien que ce soit toujours une journée effrayante dans l’ensemble, elle comprenait maintenant que ce n’était pas aussi terrible qu’elle l’avait pensé, tant qu’elle était préparée.
Lorsque le typhon était pleinement arrivé dans la zone, il avait répandu d’énormes perles de pluie et des vents de tempête tout autour de Koto Ward. Les fenêtres de la pièce avaient tremblé et grincé terriblement. Cependant, il semblait que le typhon s’éloignait de la résidence d’une certaine elfe, peut-être à cause des voix joyeuses qui résonnaient dans la salle de bain.
Quelque temps plus tard, Wridra avait sorti le DVD du sac pour y découvrir l’image d’un dinosaure montrant ses crocs. Le film qu’elles avaient choisi de regarder pendant le typhon portait sur les créatures anciennes connues sous le nom de dinosaures. Marie s’était demandé si elle pouvait utiliser la carte de membre de Kitase, et elle avait été soulagée lorsque l’employé du magasin de location n’avait rien dit à ce sujet.
« C’était plutôt amusant de ne pas avoir d’autres clients dans le coin à cause du typhon, » dit Marie en ouvrant le réfrigérateur pour prendre du jus. Elle avait déjà enfilé son pyjama à demi manches et une serviette de bain pendait sur son épaule.
« En effet, la ville avait l’air complètement différente aujourd’hui. Les volets étaient baissés un peu partout. Cela me rappelait le pays de l’autre côté… Ah, ce jus est pour moi ? Hm, tu feras une bonne épouse un jour, Marie. » Wridra sourit joyeusement en acceptant le verre de jus de pêche que Marie lui tendit.
Il n’y avait rien de mieux qu’un verre de jus de pêche bien frais après une douche chaude pour se laver de la pluie. La texture épaisse, l’arrière-goût rafraîchissant et la douceur fruitée étaient un pur bonheur lorsqu’elle le buvait.
« Simplement paradisiaque. Hm, tu sembles maintenant avoir une connaissance approfondie des boissons de ce pays. Ne me dis pas que tu as essayé différentes boissons tous les jours. » Les épaules de Marie se contractèrent, mais elle ne se retourna pas d’où elle se tenait dans la cuisine. À en juger par la façon dont ses longues oreilles se balançaient, la supposition de Wridra était probablement correcte.
Elle avait pris une autre gorgée de sa boisson rafraîchissante, puis regarda par la fenêtre. La pluie qui éclaboussait la vitre devint de plus en plus forte et gronda bruyamment.
***
Partie 3
Il était compréhensible qu’un enfant le trouve intimidant. Mais s’il restait simplement dans sa chambre, sa peur ne serait jamais résolue. Kitase était surprotecteur dans ce sens, mais s’il avait été en vie aussi longtemps que Wridra, il aurait également pu adopter son processus de pensée.
Wridra considérait à quel point elle avait été influencée par lui. Au début, elle était si fatiguée de s’occuper de ses petits, mais maintenant, elle ne pouvait plus s’en passer. C’était en partie la raison pour laquelle elle envoyait de moins en moins souvent son double au Japon. Mais il était difficile pour elle d’arrêter complètement les visites. Après tout, elle aimait Mariabelle et Kitase comme s’ils étaient ses propres enfants. Peut-être qu’un jour, elle les laisserait jouer avec sa propre progéniture. Si ce jour devait arriver, le manoir qu’ils construisaient au deuxième étage du labyrinthe serait l’endroit idéal pour le faire.
« Hah, hah, on dit que les enfants ont tendance à ressembler à leurs parents. Je ne m’attendais pas à devenir plus humaine à la place. » Elle ne pouvait plus empêcher son sourire de s’étendre. Wridra n’avait jamais imaginé qu’elle deviendrait le type de parent adorateur, mais il n’y avait pas grand-chose qu’elle pouvait faire maintenant qu’elle l’était. Elle continuerait à profiter de la vie et à les regarder grandir. Alors que ces pensées occupaient son esprit, une douce odeur avait rempli l’air. Cela ressemblait à des pommes de terre rôties, et cela semblait provenir de ce que Marie était en train de cuisiner. Mais quelle pouvait être cette odeur séduisante ?
Elle se leva et jeta un coup d’œil par-dessus l’épaule de Marie pour découvrir la nourriture appétissante qui se trouvait devant elle.
« Ah, un plat frit. Ça sent très bon. Je vais en goûter un morceau… »
« Quand as-tu l’intention de changer de serviette de bain ? Il est interdit de se promener en ne portant qu’une serviette de bain dans cette maison. Tu ferais mieux de t’habiller, ou pas de film et d’encas pour toi. »
« Non, attends ! Je vais m’habiller, donne-moi juste un instant ! » Il était difficile de croire que Marie avait été effrayée par le typhon qui s’était abattu sur elle plus tôt dans la journée. Wridra avait failli dire cela à voix haute, mais au lieu de cela, elle s’était précipitée à grandes enjambées de peur de se faire confisquer les collations.
Marie saupoudra de sel les pommes de terre fraîchement frites. Et ainsi, le plat parfait pour regarder des films était complet… celui que l’on appelait communément « frites ».
Cependant, il était essentiel de ne pas sous-estimer cet aliment en raison de sa simplicité. Il fallait enlever l’amidon en trempant les pommes de terre dans l’eau, puis les essuyer et les frire deux fois à feu doux et à feu vif. Les dents des filles s’étaient enfoncées dans l’extérieur croustillant des frites et dans leur intérieur chaud et doux. Elles avaient souri en goûtant la saveur simple, mais délicieuse sur leurs langues.
« Ah, c’est excellent ! Vraiment le casse-croûte parfait pour regarder des films. Non seulement tu es une beauté, mais tu sais aussi cuisiner. Tu feras une excellente épouse. »
« Héhé, je me suis entraînée tous les jours, tu sais. S’il y a bien une chose pour laquelle Kazuhiro-san est doué, c’est la cuisine. Je ne peux pas me permettre de perdre face à lui en tant que femme. » Hmm, elle ne nie même pas être appelée une épouse… pensa Wridra. Elle voulait le faire remarquer, mais décida que le risque de se voir retirer ses frites n’en valait pas la peine.
Et c’est ainsi que le film de dinosaures avait commencé avec le bruit du typhon en arrière-plan. Pour l’anecdote, elles avaient choisi ce film par curiosité, puisque les dinosaures n’existaient pas dans leur monde.
« Maintenant que j’y pense, ils sont similaires aux Koopahs qui sont apparus à l’oasis. »
« Oh, oh, regarde-moi ça ! Si grand. » C’était beaucoup plus réaliste que ce à quoi elles s’attendaient, et il y avait une variété étonnamment large d’espèces. Il semblait qu’elles étaient largement séparées entre les carnivores et les herbivores.
« Les humains sont assez audacieux pour utiliser ces créatures à des fins lucratives. Oh, cet herbivore a un si long cou. Ses yeux de fouine sont adorables. »
« Ils semblent être différents des dragons. Ils ont l’air super, cependant. J’apprécie tous les carnivores puissants aux crocs acérés. » Les deux femmes se regardèrent avec étonnement en mâchonnant leurs frites.
L’intrigue du film était assez simple. Les humains avaient ressuscité des dinosaures afin de les utiliser pour gagner de l’argent, mais un accident les avait rendus incontrôlables, provoquant une panique générale.
Elles avaient loué la vidéo par pure curiosité pour les dinosaures, mais il est devenu évident que l’histoire était parfaite à regarder pendant un typhon. Alors que les hommes du film criaient avec impuissance, un puissant torrent arrivait dans le quartier de Koto.
La pluie battante à l’extérieur leur donnait l’impression d’être vraiment dans le film, amplifiant leur tension et leur peur. Elles avaient l’impression qu’il était impossible d’échapper aux créatures terrifiantes, même en courant. Ce sentiment d’horreur faisait partie du plaisir, mais comme elle n’avait pas encore développé une grande tolérance pour ce genre de divertissement, Marie s’était simplement figée sur place avec des frites encore dans sa main.
Le prédateur colossal avait regardé l’un des personnages de ses yeux horribles et affamés. Tout être confronté à une telle créature était rendu complètement impuissant. Et ainsi, une autre victime était tombée.
« Je n’aime pas ça. Où sont passés tous les mignons herbivores ? »
« Hm, celui-ci est assez puissant. Peut-être même plus fort qu’un Koopah avancé. » L’homme à l’écran avait finalement trouvé la lampe qu’il avait fait tomber, et il l’avait allumée pour trouver du réconfort dans la lumière.
Cependant, la lumière avait révélé l’œil géant d’un reptile, et la façon dont ses pupilles s’étaient dilatées avait fait naître la peur dans le cœur des spectateurs. C’était le côté effrayant de ces films à suspense. Ils avaient toujours une façon de bercer le spectateur dans un faux sentiment de sécurité avant la frayeur. Bien que simple, cette méthode était très efficace.
« Eeeeeek ! » Wridra ne savait pas comment réagir lorsque Marie l’entoura de ses bras en réaction.
L’Arkdragon réalisa qu’elle pouvait murmurer quelque chose d’effrayant à l’oreille de l’elfe pour obtenir une réaction encore plus forte de sa part. L’idée était terriblement tentante. En même temps, elle était impressionnée que Kitase ait été capable de résister à une telle réaction pendant tout ce temps.
Marie s’accrocha à Wridra de toutes ses forces, tremblant au son de la pluie qui claquait contre les fenêtres. Maintenant qu’elle était à la place de Kitase, elle était étonnée qu’il puisse supporter la sensation du cœur battant et des seins de Marie pressés contre lui. On ne pouvait nier qu’il avait beaucoup de retenue.
« Hm, je te suggère de ne jamais regarder de films avec un autre homme. »
« Hein ? Qu’est-ce que tu… Oh non ! Il court après la voiture ! » Marie semblait plutôt angoissée, mais ce film était considéré comme l’un des films à suspense les plus gentils. Après tout, les bonnes personnes avaient survécu à la fin, et après le point culminant de l’histoire, la nuit d’horreur avait pris fin et le spectateur avait été récompensé par la vue d’un beau ciel bleu. Marie poussa un soupir de soulagement.
Puis, Wridra remarqua quelque chose.
Elle avait poussé l’épaule de l’elfe, puis elle fit un geste vers la fenêtre. On pouvait voir la lumière du soleil à l’extérieur. Après le passage d’une violente tempête, une vue fascinante était toujours laissée dans son sillage. Un beau ciel bleu et clair, à perte de vue.
« Wow… Ça s’est éclairci tout de suite. » En voyant l’expression de stupéfaction sur le visage de Marie, Wridra ne put s’empêcher d’éclater de rire. Elle avait ensuite ouvert complètement la fenêtre, laissant entrer une bouffée d’air frais. Les deux femmes prirent béatement de profondes respirations, leurs cheveux à moitié séchés ondulant dans le vent rafraîchissant.
« Mm, ça fait du bien ! »
« Hah, hah, tout à fait sensationnel. C’est donc à ça que ressemble le sillage d’un typhon. Je dois dire que je pourrais m’habituer à cette sensation. »
Il était difficile de croire que Marie était trop figée par la peur pour faire un seul pas en avant. « Ouais ! » Elle acquiesça aux paroles de la dragonne, ses yeux violets s’illuminent d’étonnement. Alors que le générique défilait derrière elle, elle fixa le ciel bleu.
À ce moment-là, elle avait eu le sentiment que la prochaine fois qu’un typhon arrivera, elle l’attendrait avec un cœur plein d’anticipation et d’émerveillement.
Les deux femmes se tenaient épaule contre épaule, profitant ensemble de la vue du ciel d’été.
§
Mariabelle était en train de lire lorsqu’elle entendit la porte d’entrée s’ouvrir, et elle se leva aussitôt de sa chaise. C’était, bien sûr, Kitase qui était apparu en costume et arborait une allure pleine d’excuses, si rare pour lui.
« Désolé d’être en retard, Marie. Le train a été retardé à cause des vents violents, et je n’ai pas pu acheter de nourriture pour le dîner. Attends, qu’est-ce qui sent si bon ? » Marie avait pris son sac avec une expression joyeuse, et Kitase avait desserré sa cravate en reniflant l’air, confus. La pièce était remplie d’une odeur d’épices et d’assaisonnement. Il ne put cacher sa surprise lorsqu’il vit ce qui se trouvait dans la cuisine.
« Wôw, tu as fait du curry ? C’est incroyable. Moi aussi, j’avais faim. »
« Héhé, je pensais bien que tu rentrerais tard. Maintenant, prends un siège une fois que tu t’es changé. Nous avons la descente au troisième étage qui arrive ce soir, tu sais. » Wridra avait observé les deux individus du coin de l’œil en lisant un magazine, et elle les avait trouvés réconfortants pour une raison inconnue. Elle ne pouvait pas s’en empêcher après avoir vu les efforts de Marie pour agir comme si elle n’avait pas eu peur du typhon. Sans compter que l’expression de son visage indiquait qu’elle était impatiente de lui faire goûter son curry.
Wridra prit une gorgée de son café et cacha son sourire pour que les autres ne le voient pas. Il semblerait que le typhon et la journée de travail de Kitase se soient terminés sans incident.
***
Chapitre 9 : Début du raid au troisième étage
Partie 1
La porte séparant le deuxième et le troisième étage s’étendait loin au-dessus de la tête, et des motifs simples en forme de treillis y étaient gravés. La gemme géante enchâssée en son centre émettait une lueur de platine, et il semblait avoir un mécanisme qui déverrouillait la porte une fois que le maître du deuxième étage était vaincu.
Des bruits sourds et lourds retentirent lorsque la porte s’ouvrit, et la poussière qui s’était accumulée pendant des centaines - non, des milliers d’années, fut remuée par le mouvement. Elle tomba comme une pluie de neige noire, révélant aux soldats l’escalier menant au troisième étage.
La quarantaine de personnes réunies là étaient entièrement armées, et chacune d’entre elles avait franchi la porte sans qu’aucun mot ne soit échangé. Parmi ces membres qui s’apprêtaient à affronter les épreuves inimaginables qui les attendaient, l’homme musclé connu sous le nom de Zera marmonnait pour lui-même,
« Ils ont dormi ici, n’est-ce pas ? »
« Chut ! Ne vois-tu pas que Sire Hakam est de mauvaise humeur ? »
Le raid au troisième étage était officiellement en cours, mais les recrues très attendues de l’équipe Améthyste, qui avaient déclaré qu’elles se joindraient à eux juste pour le plaisir, étaient absentes. Le chef du raid, Hakam, était resté silencieux avec un regard aigre sur son visage. Bien que leur absence soit due au fait qu’ils avaient été retardés par le typhon géant sur le chemin du retour, expliquer les circonstances météorologiques dans un autre monde ne ferait qu’engendrer la confusion.
Trente minutes plus tard, Kazuhiho et son groupe arrivèrent enfin sur les lieux et ils se rendirent directement au quartier général pour s’incliner profondément en signe d’excuse, comme s’ils s’adressaient à un supérieur au travail. Bien que Kazuhiho ait exécuté une révérence parfaitement respectueuse qui utilisait pleinement son expérience d’adulte actif, Hakam avait donné une réponse simple.
« Je suppose que vous ne faites ça que pour vous amuser, après tout. » Le jeune homme avait l’estomac retourné par le stress, même s’il était dans son rêve.
Pourtant, il avait ses propres circonstances, et il n’avait pas pu éviter le fait que la météo et ses obligations professionnelles l’avaient mis en retard. C’était exactement la raison pour laquelle il avait refusé l’invitation à participer à titre officiel, mais il était peu probable qu’il soit compris.
Et même si Marie avait clairement fait savoir qu’elle était profondément désolée, elle avait habilement utilisé des mots comme « Parce qu’il était en retard… » pour éviter de nuire à la réputation de la Guilde des Sorciers et à la sienne.
Malgré le déshonneur de devoir s’excuser et s’expliquer, l’équipe Améthyste avait également commencé à participer au raid.
Après s’être inclinés plusieurs fois, ils se dirigèrent finalement vers l’escalier menant droit devant. Kazuhiho se fit rabrouer par Marie tout au long du chemin, mais il semblait que l’humanité était à la merci de la météo, comme cela avait toujours été le cas.
§
Il était enfin temps que le raid sur le troisième étage commence.
Bien que nous ayons déjà reçu une réprimande le premier jour, il n’y avait pas de raison de s’inquiéter de cela maintenant. Nous aurions tout le temps de nous racheter, et c’est ce que Hakam voudrait que nous fassions.
Nos chaussures avaient claqué contre le sol en descendant l’escalier, et nous avions rapidement remarqué un changement dans le décor. Les murs étaient assez simples au début, mais les esprits de lumière qui flottaient autour de Marie avaient révélé les gravures gothiques sur les niveaux inférieurs. Les piliers et les murs étaient couverts de motifs complexes, et il était clair qu’on y avait consacré beaucoup plus de temps qu’aux autres étages.
« Les labyrinthes anciens ne sont vraiment pas comme les autres. Ils génèrent de précieuses pierres magiques, et les livres qui y sont stockés sont anciens et extrêmement précieux, » dit Marie d’un ton fasciné. Les motifs sur les murs avaient finalement été remplacés par des œuvres d’art murales. J’avais remarqué l’illustration d’un globe oculaire géant, et lorsque Marie avait dirigé l’esprit de lumière loin du mur, la lumière avait révélé l’image entière.
« Hmm, est-ce un monstre ? Ça ressemblait à un Koopah du premier étage, mais je me demande pourquoi ils sont reliés à ces cordes. Peut-être que c’était des animaux de compagnie ? »
« Je suis sûre qu’il y a quelque chose à cela. Ces types d’art mural ont tendance à représenter les structures et les rangs de la société, ou comment la vie était à cette époque. » L’illustration était faite de couleurs variées, et l’art mural semblait nous regarder et faire une grimace tandis que les esprits de lumière flottaient autour. J’avais tendu la main et j’avais découvert qu’elle était lisse et glissante au toucher.
Nous devions nous dépêcher pour rattraper le reste des équipes de raid, mais j’avais l’impression que ce serait du gâchis si nous passions devant cet art mural sans prendre le temps de l’apprécier. Pour nous, découvrir d’autres cultures comme celle-ci faisait partie du plaisir.
Plutôt que le contenu de l’œuvre en soi, je voulais ressentir l’intention de l’artiste qui l’avait réalisée. Comment pensait-il, et pourquoi avait-il laissé ces œuvres derrière lui ? En touchant le mur, j’avais posé une question à voix haute à un autre membre de l’équipe Améthyste.
« Shirley, sais-tu quelque chose sur le troisième étage ? » Elle secoua la tête en signe de regret. Ses cheveux blonds éclatants étaient attachés en arrière, et sa posture avec son dos droit ainsi que ses vêtements lui donnaient une apparence raffinée. À en juger par le fait qu’elle n’avait toujours pas couvert ses yeux, les autres membres de l’équipe du raid n’étaient pas encore tout près.
Si le maître du deuxième étage ne connaissait pas le troisième, peut-être les anciens l’avaient-ils liée d’une manière ou d’une autre pour qu’elle ne protège que le deuxième étage. Marie leva les yeux vers l’art mural pendant que nous continuions à marcher, puis elle parla.
« Regardez, il y a de plus en plus de monstres humanoïdes maintenant. Certains d’entre eux ont plusieurs yeux ou bras, mais… Oh, il y a même un dragon là-bas. Sa couleur noire me rappelle un peu Wridra. »
« C’est presque comme une encyclopédie des monstres. Géants, démons, personnes ailées, spectres et anges ? C’est étrange. Pourquoi des entités du royaume divin traînent-elles avec des monstres ? »
Wridra s’était retournée en entendant son nom mentionné. Comme d’habitude, elle était vêtue d’une armure noire qui avait la forme d’une robe. Elle ne sourit que faiblement en nous regardant, et ne semblait pas avoir l’intention de nous expliquer quoi que ce soit sur l’art mural.
Notre intérêt et notre curiosité s’étaient accrus à mesure que la mosaïque murale devenait de plus en plus complexe. Je savais que nous devions nous dépêcher, mais Marie et moi ne pouvions détacher nos yeux de l’art tout en continuant notre descente.
Les esprits de lumière avaient dansé dans quatre directions, révélant la vue d’ensemble du mur.
« Oh, il y a moins de monstres maintenant, mais ils deviennent plus gros à la place. Peut-être que le gros a mangé les autres ? »
« Hmm, peut-être que celui-là est humain ? On dirait qu’ils forment une petite colonie ici. Regarde par là, Marie. Ce dessin au-dessus de la ville… C’est presque comme Eden. » Marie avait laissé échapper un petit souffle, ses yeux s’étaient écarquillés.
La mosaïque représentait un être divin descendant des cieux. Peut-être que c’était censé être un dieu. Le concept de l’Eden était profondément ancré dans les esprits, ainsi que l’idée qu’il conduirait les âmes des courageux vers une terre de répit. L’équipe de Doula appartenait à une église avec de telles croyances, et il y avait des théories selon lesquelles ils empruntaient la force des dieux pour diriger le peuple.
Mais quelque chose semblait déranger la jeune fille elfe.
« C’est étrange. L’art se concentrait principalement sur les monstres jusqu’à présent, mais un dieu et Eden apparaissent soudainement ? Et ils ne sont pas représentés en opposition avec les monstres. En fait, ils sont traités comme s’ils étaient égaux. »
J’avais regardé son profil et fait un « Hein » sans engagement.
J’avais bien compris où elle voulait en venir. Jusqu’à présent, les monstres étaient illustrés comme s’ils faisaient partie d’une encyclopédie, mais on y voyait soudain l’apparition d’un dieu et le mode de vie des gens. Marie et moi, nous nous étions creusé la tête pour essayer de comprendre pourquoi.
« Mais cela montre que le concept d’Eden existe depuis les temps anciens, » avais-je noté.
« Je trouve cela étrange en soi. Parce que, par exemple, tes compétences empruntent le pouvoir des dieux, non ? »
En effet. Trayn, le guide du voyageur, fait référence au dieu qui veille sur les voyageurs. On dit qu’il n’est lié par rien, et j’emprunterais son territoire pour voyager sur de longues distances. J’avais hoché la tête en réponse à la question de Marie, et elle avait hoché la tête en retour.
« Oui, le dieu du voyage est un dieu particulièrement inconstant et difficile. Il n’accorde pas souvent son pouvoir aux autres, si bien que beaucoup de gens ne connaissent même pas son existence. On ne comprend toujours pas pourquoi il choisit de conférer ses pouvoirs aux gens. Mais à en juger par ce qu’il y a sur ce mur… » L’histoire s’était poursuivie alors que nous continuions à descendre les escaliers. Les humains étant de plus en plus nombreux, les forces des dieux avaient également augmenté, et le conflit s’était divisé en plusieurs factions. D’un côté, les dieux menant les humains, et de l’autre, les monstres.
Nous avions finalement compris l’intention de l’artiste. L’art mural était censé représenter la guerre antique. Les monstres se dévoraient et se frappaient mutuellement pour étendre leurs territoires. De là, les nouveaux êtres connus sous le nom de dieux s’étaient levés pour diriger le peuple.
L’art mural se terminait par une illustration de la Guerre des Démons, la bataille entre les démons et les dieux qui avait été racontée à travers les générations jusqu’à aujourd’hui. La couleur principale était un bleu vif, et je pouvais dire qu’elle avait dû être dessinée par un artiste de renom. Émues par l’énergie pure qui débordait de ce spectacle, Marie et moi, nous nous étions contentés de nous regarder en nous tenant la main.
« Et puis l’âge sombre, l’âge de la nuit, s’est finalement transformé en âge de l’humanité. » Marie n’avait pas répondu, toujours aussi fascinée par la mosaïque murale. Mais il y avait une chance que rien de tout cela ne soit vrai. Cet art avait été créé par un ancien, et non par quelqu’un de l’Âge des Démons ou de l’Âge de la Nuit.
Les dernières gravures étaient les mêmes mots que nous avions lus au premier étage.
La flèche libérée par l’étoile du matin a vaincu les démons.
Le tir arrivera jusqu’à l’étoile fixe avec une puissance qui n’appartient pas à ce monde.
Même les pensées du démon ont été effacées en un instant, et il finira par retourner dans le monde.
Car l’étoile du matin est la chose même qui l’a fait naître.
Au-delà de l’atmosphère, une étoile du matin était tombée des cieux pour être absorbée par l’origine des monstres. Toutes les créatures avaient levé les yeux pour voir ce spectacle, et l’âge de la nuit avait pris fin.
Qu’est-ce qui leur a traversé l’esprit en regardant la même vue après tous les conflits, les batailles et les destructions ? Cette image finale devait avoir été ce que l’artiste voulait le plus dessiner. Les couleurs utilisées en témoignaient, et Marie était étourdie par sa brillance lorsqu’elle parlait.
« Les couleurs sont si mystiques… »
« Ça vous attire vraiment, n’est-ce pas ? Même si c’est un monde bien antérieur à notre époque. » Elle acquiesça.
À ce moment-là, il nous a semblé pouvoir ressentir un souffle d’air venu des temps anciens.
***
Partie 2
Pendant ce temps, il y avait quelqu’un qui surveillait attentivement les environs.
Son corps était couvert d’écailles, et ses yeux étaient ceux d’un reptile.
D’après les quelques informations rapportées par l’équipe d’éclaireurs, il y avait un ennemi problématique quelque part au troisième étage. Cet ennemi avait la capacité particulière de changer les chemins dans l’ancien labyrinthe — un pouvoir qui ferait pâlir de peur toute personne ayant l’expérience du labyrinthe.
Celui qui perd son chemin de retraite devient faible et vulnérable. Par exemple, si quelqu’un se blessait, il serait toujours considéré comme relativement bien portant. C’est parce qu’elle connaît les conditions pour revenir en vie. Mais si elle perdait son chemin de fuite, tout serait jeté par la fenêtre, et elle devrait lutter pour contenir sa terreur. Il n’y a rien de plus horrible qu’une situation dans laquelle on n’a pas d’autre choix que d’aller de l’avant.
Il s’appelle Egriny. Les monstres portant un nom comme le sien étaient spéciaux. Ils avaient droit à une capacité unique grâce à leur puissance impressionnante, et ils étaient assez forts pour combattre d’innombrables envahisseurs à eux seuls. Dans son cas, il s’agirait plutôt d’une dévastation unilatérale que d’un combat.
Après s’être réveillé de son long sommeil, la première chose qu’il fit fut d’anéantir tout le groupe d’éclaireurs. Le spectacle des humains terrifiés qui tentaient désespérément de fuir et qui couraient en rond était assez ridicule. Cependant, Egriny ne ressentait aucune satisfaction à s’occuper d’eux. C’était simplement un travail.
Ses seules tâches consistaient à empêcher tout envahisseur de quitter cet endroit vivant et à le transformer en nourriture pour l’ancien labyrinthe lui-même.
Après tout, cet ancien labyrinthe était assez spécial, et il nécessitait des quantités massives d’énergie maintenant qu’il était à nouveau actif. Il avait entendu dire qu’il y avait eu beaucoup de morts l’autre jour, et qu’ils se rapprochaient du nombre cible.
Lorsque les humains étaient apparus sans avoir appris leur leçon, Egriny s’était demandé pourquoi ils se présentaient juste pour alimenter le labyrinthe, et il avait relevé les coins de sa bouche en un sourire étrange. Il s’était dit que ça ne servait à rien d’essayer de comprendre leurs pensées.
Et maintenant, il accomplissait à nouveau son devoir. Il était en train de fermer la porte géante et de prendre des dispositions pour qu’elle ne s’ouvre pas sans son autorisation.
Cependant, les anciens labyrinthes ne pouvaient pas piéger complètement les envahisseurs à l’intérieur. Un labyrinthe sans entrée ni sortie ne serait pas un labyrinthe. C’est pourquoi il y avait toujours une sorte de route avec un passage menant tout au long du chemin. Mais à cause de son interférence, le labyrinthe était devenu encore plus terrible qu’avant.
Ceux qui avaient emprunté ce chemin étaient morts, un par un. Et une fois qu’ils avaient tous péri, cette porte s’ouvrit enfin… pour accueillir la prochaine victime.
Cependant, il y avait une chose qu’il n’avait pas prise en compte.
C’était Kazuhiho et son groupe, qui avaient dormi et étaient arrivés en retard.
Les quatre fixaient Egriny d’un regard vide, et il réfléchissait. Il devait rapidement décider s’il était préférable pour lui de les éliminer maintenant ou de battre en retraite.
Le combat direct n’était pas son point fort, mais il était suffisamment fort pour atteindre le niveau 90. Sa vitalité pouvait être vue comme étant infinie comparée à celle d’un humain, et avec son corps amélioré par une magie avancée, il pouvait se déplacer si rapidement que l’œil humain ne pouvait pas le suivre.
La longue langue d’Egriny se déploya et se balança tandis qu’il faisait un pas de plus. Depuis qu’il avait goûté aux humains récemment, il avait du mal à contrôler son envie de dévorer.
Il ressemblait à un lézard de huit mètres de haut. Il traversa le mur en silence avant d’atterrir sur le sol. Il n’avait besoin que de quelques pas supplémentaires pour atteindre sa vitesse maximale, se déplaçant si rapidement qu’il laissait le son derrière lui. L’expression surprise du jeune garçon s’était immédiatement rapprochée, et il lui avait foncé dessus avec une puissance qui l’avait réduit en morceaux de viande volant dans toutes les directions… ou du moins c’est ce qu’il pensait.
Confus, Egriny s’était retourné pour trouver le garçon mettant une main sur sa poitrine et laissant échapper un soupir de soulagement. Il semblait qu’il avait manqué son coup. C’était compréhensible, vu que son corps n’était pas encore au mieux de sa forme après un long sommeil. Néanmoins, rater la cible sur cet enfant à l’air endormi était assez choquant.
Le garçon avait ensuite esquivé sa deuxième et sa troisième attaque, le laissant complètement abasourdi. Mais ses yeux étaient comme ceux d’un lézard, ils ne montraient donc pas beaucoup d’émotion.
Puis, la situation avait soudainement changé comme s’il était dans un cauchemar. Egriny pensait être passé à côté de sa cible, mais le garçon était apparu à l’endroit même où il s’était arrêté, brandissant une arme à l’allure impressionnante.
Pourtant, le garçon n’avait pas réussi à porter un seul coup, et même s’il l’avait fait, cela n’aurait eu aucun effet sur l’extérieur épais d’Egriny. Plus surprenante était l’agilité du garçon qui lui permettait de se rattraper instantanément.
Était-ce un rêve, un cauchemar ou une illusion ?
Au fil du temps, la précision du garçon avait augmenté à un rythme alarmant.
Il parlait à une elfe qui semblait être une sorcière, et ses mouvements d’évitement et d’attaque devenaient de plus en plus logiques chaque fois qu’ils échangeaient des mots. Plus troublant encore, il remarqua que le garçon attaquait sa source de magie d’amélioration. Il était clair que les attaques étaient destinées à ouvrir l’armure qui couvrait ses yeux et son dos, et Egriny avait été obligé de battre en retraite. Plus le combat se prolongeait, plus un sentiment inquiétant grandissait en lui, comme s’il avait mis le pied dans un marécage profond. Sans compter qu’il y avait quelque chose d’étrange avec les membres du groupe aux cheveux noirs et blonds du garçon. Elles ne faisaient rien pour aider le combat, mais Egriny les voyait à travers ses yeux spéciaux et trouvait que leurs contours étaient flous.
C’était probablement pour le mieux qu’il avait décidé de ne pas s’engager plus avant avec eux. Cependant, il aurait dû arriver à cette conclusion plus tôt.
Dès qu’il avait escaladé le mur, aucun humain n’aurait pu l’attraper. Mais son cauchemar n’était pas encore terminé. Le garçon était apparu soudainement dans le coin de sa vision, puis avait attaqué son bras qu’il utilisait pour s’agripper au mur. Il n’arrivait pas à croire ce qui se passait, vu qu’il avait grimpé cinquante mètres sur le mur en un instant.
Et ce n’est pas tout, le garçon avait créé une créature volante inconnue à partir d’une pierre magique, attaquant sans relâche Egriny depuis sa position. L’humain n’abandonnait pas, même s’il courait beaucoup.
Avant qu’il ne s’en rende compte, son extérieur endurci avait été terriblement endommagé, et il ne pouvait plus donner de force à ses membres.
Il ne comprenait pas pourquoi il était battu à ce point par quelqu’un qui semblait d’un niveau bien inférieur au sien. L’elfe lui envoyait de temps en temps de la magie par le bas, mais il l’esquivait chaque fois. Il semblait qu’il pouvait l’ignorer pour le moment.
Fwoooooom !
Puis, il avait entendu ce son désagréable. L’épée du garçon émettait un bruit de grincement qui lui fit imaginer l’image d’un météore volant. Quelle était cette chose ? Mais c’était aussi une opportunité inattendue. Tant qu’il pouvait utiliser son incroyable agilité pour esquiver l’attaque, il devait pouvoir se créer une ouverture pour s’échapper.
Il avait atterri sur le sol, se tenant face à face avec l’humain.
Egriny était complètement concentré, attendant le moment exact pour agir.
Et pourtant, ce cauchemar n’en finissait pas. Des murs de pierre avaient soudainement émergé de toutes les directions, et il avait été choqué de constater que sa vision avait été complètement obscurcie.
Il était trop tard pour réaliser que la jeune fille elfe qu’il avait ignorée lui avait tendu un piège. Les murs qui le recouvraient dans quatre directions augmentaient progressivement en épaisseur.
Le problème, c’est qu’il s’agissait de murs qu’Egriny ne pouvait pas contrôler. Ils étaient construits par de puissants esprits, il faudrait donc un temps extraordinaire pour les briser. Il ne leur avait toujours pas montré sa magie qui pouvait reconstruire le labyrinthe, donc c’est par pure coïncidence qu’ils avaient contré sa capacité. Il se trouve qu’il avait été capturé vivant, qu’il y avait un petit trou d’environ dix centimètres de large dans l’un des murs, et que le garçon humain avait une attaque puissante capable de vaincre l’énorme vitalité d’Egriny.
Vwoooooom ! Le monstre était resté bouche bée alors que le son devenait plus fort.
Ce n’est pas possible. Comment était-ce possible ? Pouvait-il vraiment périr par une simple coïncidence comme celle-ci ? Il était un être absolu et puissant, et il n’était pas du genre à mourir comme une grenouille sur laquelle on aurait marché par accident. Il était celui qui apporterait le désespoir et la mort au troisième étage.
Arrêtez…
Une lumière brillante comme celle d’étoiles étincelantes fit irruption dans la petite ouverture des murs, et une onde de choc jaillit de l’épée de l’humain. Egriny laissa échapper un soupir de reddition à la fin, l’impact le pressant de face et se reflétant dans toutes les directions, vaporisant son corps.
§
La porte s’est ouverte avec un bruit lourd et grinçant.
Il y avait un ennemi étonnamment puissant le long du chemin, mais nous venions juste d’entrer au troisième étage, donc nous allions sûrement rencontrer d’autres monstres puissants ici. Cela m’avait fait considérer que le troisième étage était un endroit bien plus effrayant que ce que j’avais imaginé. Je m’étais frotté le visage, me rendant compte que je commençais à sourire.
Eh bien, euh, ce n’est pas que j’aime me battre. C’est plutôt un moyen d’évacuer le stress du travail. C’est-à-dire que ça fait du bien de faire un peu d’exercice, et ce n’est pas que j’aime tuer ou quoi que ce soit dans le genre… Oh, ce n’était pas bon. Je commençais à me trouver des excuses dans ma propre tête.
J’avais pensé qu’il y avait peut-être un problème avec les adultes qui travaillent, mais alors que j’étais sur le point d’aborder quelque chose que je n’aurais probablement pas dû, la porte s’était ouverte avec un bruit sourd.
Les autres équipes de raid attendaient là, et il semblait qu’elles discutaient de ce qu’elles devaient faire après que la porte se soit soudainement refermée sur elles. Ils avaient fait des commentaires sur notre retard, mais nous avions pu ouvrir la porte et vaincre ce monstre sans nom sur le chemin. Pour moi, cela annulait notre retard.
Zera m’avait ensuite fait subir un gros coup de tête. Avec le terrible ennemi que nous devions encore rencontrer et qui allait nous faire perdre notre chemin dans le labyrinthe, j’avais pris douloureusement conscience du fait que la vie n’était pas juste.
À ce moment-là, Marie s’était approchée par-derrière et avait sauté sur mon dos.
« Vas-tu bien ? Encore fatigué de ce premier combat ? »
« Oh, non, c’était un excellent échauffement. Mais j’ai entendu dire qu’il y a un ennemi unique à cet étage qui va faire perdre une certaine elfe mignonne, » avais-je répondu, et un beau sourire s’était répandu sur son visage. Je m’étais demandé pourquoi elle n’avait pas l’air d’avoir peur de se perdre, mais en y réfléchissant, nous avions avec nous un Arkdragon qui pouvait invoquer des portes d’ombre. Alors oui, elle n’avait pas vraiment de raison d’avoir peur.
« Oh, mon Dieu, c’est assez effrayant. Viendrais-tu me chercher si jamais je me perdais ? »
« Si tu te perds, tu devrais laisser une trace de casse-croûte comme dans le livre que nous avons lu l’autre jour. Comme ça, je pourrais la suivre pour te retrouver. Alors, qu’as-tu apporté aujourd’hui ? » avais-je demandé. Elle avait gloussé joyeusement, puis avait fouillé dans son sac et en avait sorti du chocolat. Il était dans le genre de boîte que l’on pouvait ouvrir et secouer pour en faire sortir plusieurs morceaux à la fois. Mais l’expression de son visage me disait qu’elle n’en ferait jamais tomber par terre, même si elle se perdait.
J’avais regardé à côté pour trouver Shirley accroupie sur le sol. Je m’étais demandé ce qu’elle faisait et je m’étais approché d’elle, Marie toujours sur mon dos, puis j’avais remarqué qu’elle touchait le cadavre du monstre que nous avions vaincu plus tôt.
Il avait été frappé par un impact dévastateur. Le monstre ne conservait plus sa forme, et il avait été réduit à un tas de sable blanc. Je ne pouvais m’empêcher de me demander ce que faisait Shirley, alors que les restes étaient dispersés par un coup de vent. Curieux, j’avais fait descendre Marie de mon dos et j’avais jeté un coup d’œil pour le découvrir.
« Shirley, qu’est-ce que tu fais là ? »
Je venais de remarquer que Shirley avait déjà couvert ses yeux avec son voile. Elle s’était retournée, et ses lèvres lustrées avaient formé un sourire. D’habitude, elle avait des expressions enfantines, mais elle avait un air étrangement mature quand elle était en public comme ça. Mais en tant que faucheuse, c’était une femme tout à fait inhabituelle, et nous étions très intéressés par le genre de pouvoirs qu’elle avait. J’avais pensé qu’elle se battrait avec une faux comme avant, mais elle ne semblait pas avoir d’arme sur elle.
Shirley avait touché le tas de sable du bout du doigt. Il avait alors commencé à fondre soudainement, et s’était transformé en quelque chose comme de l’argile.
« Wow, je n’ai jamais entendu parler de quelqu’un qui puisse modifier un monstre vaincu, » déclara Marie, et j’étais tout aussi surpris qu’elle. Les monstres commençaient à se décomposer dès qu’ils mouraient, pour finalement être réduits en cendres et disparaître complètement. Mais la substance qu’il était devenu bouillonnait maintenant, devenant plus petite à mesure qu’elle devenait plus dense. Un objet métallique était alors apparu, et Shirley l’avait ramassé du bout des doigts.
« Oh, quel genre de clé est-ce… ? » Shirley observa l’expression de surprise de Marie, puis elle plaça l’objet dans sa main et elle sourit comme pour dire : « Pour toi. »
C’était une clé à l’aspect étrange. Son design était simple, et je pouvais vaguement ressentir une certaine magie. J’avais tout de suite ouvert l’écran d’état pour vérifier nos biens, mais la description ne disait que « Déverrouille une serrure invisible. »
***
Partie 3
« Hmm, un trou de serrure invisible ? Peut-être qu’il y a une porte spéciale quelque part dans l’ancien labyrinthe. » Je trouvais curieux qu’il soit question d’un trou de serrure invisible plutôt que d’une porte cachée. Nous avions déjà découvert des coffres au trésor et des portes secrètes, mais nous étions capables de les ouvrir normalement en utilisant la magie. Bien sûr, la fois où notre propre Arkdragon avait ouvert un coffre au trésor en grand était une exception.
Nous pourrions éventuellement avoir besoin de la clé pour quelque chose, alors j’avais décidé de la mettre dans mon sac pour la garder en sécurité.
« Oh, regardez ! Le sable change de forme ! » L’argile de tout à l’heure avait changé pendant que nous étions distraits par la clé. Je m’étais retourné pour voir de quoi Marie parlait et j’avais vu qu’elle avait pris la forme d’un lézard recouvert d’un extérieur lisse. Il clignait avec des yeux de fouine, et ressemblait à un animal de compagnie adorable.
Le lézard sauta sur le bras de Shirley et il s’arrêta là. Voyant Marie le regarder avec fascination, Shirley s’était rapprochée comme pour dire : « Tu peux le caresser si tu veux. »
« Oh, wôw, je peux ? Ça ne va pas mordre, hein ? Es-tu sûre ? O-Okay, j’y vais… »
Elle s’était approchée avec précaution et avait touché l’étrange créature nouveau-née. Elle l’avait légèrement pressé du doigt, mais il n’avait pas eu de réaction négative. J’avais été surpris par sa docilité, alors que nous venions de le combattre.
En un rien de temps, Marie avait frotté le menton du lézard, qui avait répondu en poussant un cri de joie. Les yeux violets de Marie s’étaient illuminés.
« Si adorable ! Comment t’appelles-tu ? »
Egriny.
Le mot avait soudainement surgi dans mon esprit, et mes yeux s’étaient élargis de surprise. Marie faisait la même tête, il avait donc dû projeter ses pensées sur nous tous en même temps. C’était une créature étrange en effet, si elle était capable d’envoyer des mots directement dans nos esprits.
Shirley, qui était tout sourire en regardant notre échange, avait fait apparaître un grand livre sorti de nulle part. Il était trop grand pour tenir dans une poche, et il était assez épais.
Elle feuilleta des pages vides avant d’atteindre la catégorie « créatures » et « reptiles », et je m’étais demandé ce qu’elle faisait maintenant.
Peut-être était-il temps de dire au revoir. Egriny grignota légèrement le doigt de Marie, puis sauta sur le livre. L’instant d’après, il était parti.
« Oh, est-ce qu’il vient de se fondre dans le livre ? Regarde ça, cette photo lui ressemble. »
« Tu as raison. C’est écrit “Egriny” juste au-dessus de sa tête. Peut-être que Shirley peut mettre les monstres dans les livres. »
« Hm, il y a aussi quelque chose d’étrange dans ce livre. On devrait peut-être l’appeler le livre des monstres. Mais ils contiennent de vrais monstres plutôt que de simples images. Tes pouvoirs sont très uniques et intéressants, Shirley. »
Elle semblait ravie du compliment. Shirley serra son livre contre sa poitrine, puis murmura « Merci. »
Nous étions surpris de voir tant de nouvelles choses, mais Shirley était la gardienne du deuxième étage verdoyant et une faucheuse qui présidait à la vie et à la mort. Il était clair que ses pouvoirs ne seraient pas les mêmes que ceux d’un aventurier normal. Il était difficile de prévoir l’ampleur de ce qu’elle accomplirait à l’avenir, mais en rougissant joyeusement devant nous, elle ressemblait à une jeune écolière ordinaire.
§
Il se trouve que plusieurs hommes étaient également réunis au même étage que Kitase et son groupe. Ils étaient dans une pièce en pierre faiblement éclairée, et à en juger par la couverture en fourrure sur le sol, ils venaient de prendre un court repos.
La raison pour laquelle ils avaient pu arriver plus vite que le commando d’Arilai était liée au sang qui coule dans leurs veines. Ils étaient bien plus proches des monstres que des humains, ce qui leur permettait de passer à côté des monstres du labyrinthe.
Les membres réunis ici étaient considérés comme des combattants d’élite. Ils avaient perdu beaucoup de leurs membres dans une embuscade à l’étage précédent, et ceux qui étaient tombés en premier étaient ceux qui étaient moins habiles que les survivants.
« Eh bien, nous nous sommes essentiellement débarrassés des mauviettes qui nous entraînaient vers le bas. Pas de problème. » L’orateur était un homme à l’air sournois avec une barbe non entretenue. Il s’était déjà battu avec un certain jeune homme à l’oasis et avait plus que tenu son rang.
La femme en armure connue sous le nom de Kartina était enragée par ce commentaire, et elle s’était approchée de lui par-derrière, puis elle l’avait attrapé par l’épaule.
« Bâtard ! Tu fuis au premier signe de danger, et tu oses traiter mes hommes de mauviettes !? »
L’homme observa la fureur dans les yeux de Kartina en silence, puis expira par le nez et attrapa son bras. Il déplaça son poids pour soulever Kartina de ses pieds, puis elle la jeta par-dessus son épaule et la plaqua sans pitié contre le sol.
Il s’agissait moins d’une technique habile que d’un adulte maîtrisant un enfant par sa seule force, et la femme était restée allongée, le souffle coupé. L’homme avait immédiatement reculé le bras de Kartina, la forçant à ramper sur le ventre.
La différence de puissance était évidente, et la raison en était simple.
Si un homme et une femme avaient un entraînement égal, l’homme aurait l’avantage en force sur la femme. Afin de combler cette lacune, Kartina avait traversé plusieurs pays pour s’entraîner à l’épée, mais son visage avait été écrasé avant qu’elle puisse en faire usage.
Après une légère pause, l’homme souleva le visage rouge de la femme. Il chuchota ensuite à son oreille.
« Hm… Maintenant, tu sais exactement pourquoi tes hommes se sont tous fait avoir. Petite miss chef des mauviettes, prétendant être un chevalier. Qu’est-ce qui ne va pas ? Ton nez saigne. »
Des rires éclatèrent tout autour de Kartina, et elle se sentit devenir enflammée de rage. Bien que le sang sauvage en elle se soit dilué au fil des générations, cela avait réveillé quelque chose en elle, rendant ses griffes et ses crocs plus acérés. Bientôt, elle ne verrait plus que du rouge et massacrerait ceux qui l’entourent dans un accès de fureur débridée. Au moment où cette pensée lui traversa l’esprit, un orteil s’enfonça dans son flanc avec un lourd bruit sourd. Elle tressaillit, puis vomit son acide gastrique sur le sol.
« Que fais-tu, Kartina ? Essaies-tu de me défier ? » Le coup de pied ne venait pas du même homme qui l’avait jetée à terre. Elle leva les yeux avec le liquide qui pendait encore de sa bouche et vit un homme debout avec une expression sans émotion. Il était le chef responsable de ce plan. Il avait fait un mouvement pour frapper l’attaquant original de Kartina afin de le punir également, mais il avait immédiatement relâché son emprise sur Kartina et s’était éloigné d’un bond.
« Silence, bande d’animaux. Si vous vous mettez en travers de la mission, je vous donne à manger aux monstres sur-le-champ. » Son ordre était comme un poids sur le groupe entier, et ils s’étaient tous tus immédiatement. Il y avait une présence puissante en lui, ce qui était nécessaire pour gérer un groupe brutal comme celui-ci.
Le capitaine avait ricané, puis il avait tourné le dos aux autres.
La « mission » dont le capitaine avait parlé plus tôt consistait à prendre le contrôle de la relique située au troisième étage. Quelques sorciers noirs encapuchonnés étaient assis sur le sol, lançant une malédiction pour contrôler le terminal qui avait été laissé par les anciens.
En raison de la densité de la magie canalisée, les motifs complexes émis par la malédiction pouvaient être vus même à l’œil nu. Un faisceau de lumière s’était étendu vers ce qui ressemblait à un réservoir d’eau géant. Il semblait qu’ils avaient fait une percée, et le réseau de malédictions avait commencé à se lier au terminal et au réservoir d’eau un par un.
La sagesse des anciens avait rapidement été démêlée. Une image était apparue dans l’air avec un vwoom électronique, et ils avaient tous élevé la voix de surprise en même temps.
« Ah ! Voilà donc la disposition et la position de chaque monstre au troisième étage ! »
« Niveau 82… 99… Ces chiffres sont incroyables. Mais avec ça, nous pouvons écraser n’importe quel envahisseur qui ose mettre un pied à l’intérieur ! »
Les monstres présentés étaient tous de haut niveau. Les chiffres représentant la puissance des monstres étaient tous bien plus élevés que ce à quoi ils s’attendaient. S’ils pouvaient contrôler ces monstres, ils pourraient repousser les forces d’Arilai avec facilité. C’est pourquoi le capitaine avait dit qu’ils comprendraient assez vite il y a quelques jours. Ceux qui étaient rassemblés là avaient une lueur d’espoir dans leurs yeux.
Mais une personne parmi eux, celle qui dirigeait le reste de l’équipe, s’était dit que quelque chose clochait. Il aurait dû y avoir un monstre unique capable de changer la structure du labyrinthe. Il fronça les sourcils en lisant la liste, ne voyant son nom écrit nulle part. Pourtant, il n’y avait pas de temps à perdre. Ses semelles claquent sur le sol et il fit un pas en avant.
« Commençons. Il est temps d’éradiquer les chiens d’Arilai. » Les coins de ses lèvres se retroussèrent en un sourire intense, et il commença à faire fonctionner le terminal. Sur l’écran, un monstre de haut niveau appelé dragon de chaleur était apparu.
Jusqu’à présent, le géant se promenait nonchalamment dans le labyrinthe pavé de pierres, mais il s’était soudainement arrêté. Il avait alors regardé autour de lui avec son long cou et avait reçu un signal du contrôle central.
Le dragon avait changé de direction, et des étincelles avaient jailli de ses griffes acérées alors qu’il se précipitait en avant. Il avait battu des ailes une fois pour voler juste au-dessus de la balustrade. Une falaise abrupte se trouvait juste devant, mais il avait plongé dans l’obscurité sans hésiter. D’après ses mouvements, il savait que les envahisseurs étaient en bas.
Le dragon qui avait reçu l’ordre d’exterminer tous ses ennemis était un monstre terrifiant d’un niveau supérieur à 100. Comme son nom l’indique, le dragon de chaleur pouvait expulser un fluide visqueux semblable à de la lave. Bien sûr, tout humain qu’il touchait était englouti par les flammes et brûlé vif.
Les dragons étaient des créatures spéciales.
Ils avaient en eux un organe appelé noyau de dragon, et la magie et la force vitale qu’il générait étaient pratiquement infinies du point de vue d’un humain. Même si quelqu’un réussissait à décapiter un dragon par miracle, il pouvait continuer à se battre sans sa tête pendant un mois d’affilée.
Le dragon de chaleur avait déployé ses ailes rouge sang et avait pris son envol. Il allait bientôt réduire en poussière les intrus stupides. Ensuite, la bataille se déroulera du labyrinthe obscur jusqu’à la surface.
§
Lorsque Marie et Shirley étaient retournées auprès des autres, les groupes étaient en pleine discussion. Il semblait qu’ils décidaient de la direction à prendre maintenant que les quatre équipes et l’organisation de taille moyenne de Gaston allaient travailler ensemble.
La discussion s’était centrée sur les leaders de chaque groupe, Kitase étant l’un d’entre eux. Marie se tenait à côté de lui, et Kitase l’avait saluée d’un « Bon retour. »
« Marie, c’était dans le rapport préliminaire, mais les outils magiques sont devenus instables au troisième étage. Notre liaison ne fonctionne pas non plus correctement, donc la carte ne sera pas d’une grande utilité. Nous devons supposer que nous ne pourrons pas entrer en contact avec le QG pendant un certain temps. »
« Oh, vraiment ? Donc, nous sommes essentiellement coupés du monde extérieur pour le moment. »
« Je me doutais que ça arriverait. Enregistrons notre groupe de raid tant que nous le pouvons. » Le groupe acquiesça à la remarque de Zera, puis chacun commença à utiliser son terminal. Même si les équipes étaient séparées, elles seraient maintenant capables d’avoir une idée générale de leurs positions grâce au Lien Mental.
La femme aux cheveux roux, Doula, qui avait vérifié son outil magique jusqu’à présent, avait alors scruté son environnement.
« Regardez, il y a des trucs qui poussent partout dans cet endroit. Ça doit être ce qui interfère avec le flux de la magie ici. La carte fonctionne toujours, mais la portée est beaucoup plus limitée. » Kitase avait pu voir que les bords de la carte étaient flous. Puisque le support d’Aja ne pouvait pas tout à fait les atteindre ici, c’était l’étendue de ce que la carte pouvait afficher. Si la structure du labyrinthe était modifiée dans cet état, le groupe serait en danger immédiat.
Puseri, le maître de l’équipe Diamant, s’était retournée, ses cheveux crépusculaires se balançant.
« Nous devrons rester vigilants face à ce monstre qui peut nous faire nous perdre notre chemin. Alertons-nous mutuellement si la carte change à tout moment. » Tout le monde s’était exprimé en même temps.
Bien que l’équipe de raid ait été constituée à la hâte, chaque membre était très expérimenté. En fait, l’équipe Améthyste, qui avait passé la plupart de son temps en électron libre plutôt qu’en groupe organisé comme les autres, était la plus susceptible de tirer les autres vers le bas. Même maintenant, ils fixaient les œuvres d’art murales et le mobilier avec grand intérêt, et ils ne semblaient pas trop fiables par rapport aux autres.
Il y avait une rambarde dans le couloir rectiligne, et au-delà se trouvait une crevasse abrupte, trop profonde pour en voir le fond. Il n’y avait aucun moyen de survivre à une chute de cette hauteur. Et comme c’était complètement silencieux, sans même le bruit du vent pour les accompagner, un sentiment de désespoir avait envahi l’air dès que les conversations avaient cessé. S’ils n’avaient pas été dans un grand groupe, le sentiment de solitude aurait pu être trop fort. C’est-à-dire, pour toute personne autre que l’équipe Améthyste.
***
Partie 4
Le groupe avait continué à avancer, exprimant ses dernières inquiétudes. Les fournitures qui avaient été envoyées du quartier général étaient limitées.
L’équipe Andalusite de Doula pouvait facilement soigner les blessés du fait qu’ils étaient des serviteurs divins, mais la nourriture et les consommables étaient une nécessité absolue. Mais le chemin entre la campagne, l’oasis et le deuxième étage était assez long, et ils devaient également faire face aux interférences sur leurs outils magiques. Cela signifiait qu’ils devaient être plus prudents que d’habitude. Le garçon avait compris cela, mais il avait tout de même exprimé sa plainte.
« Ils ont dit qu’ils enverraient autant de fournitures que nécessaire pour cette mission. J’ai demandé du thé, mais tout ce que nous avons eu, ce sont des feuilles de thé périmées. »
« As-tu vraiment l’intention de demander du thé à Sir Hakam et au Grand Aja ? Incroyable. Ah, je commence à avoir soif à force de parler. » Le garçon acquiesça, puis sortit sa gourde avec des mains expertes. C’était un récipient métallique inhabituel, et ils se turent en le regardant verser du thé chaud et fumant comme s’il venait d’être fraîchement infusé. Au moment où ils voulaient poser des questions sur cette étrange gourde, cela s’était produit.
Doula avait levé la main depuis l’avant, et tout le monde s’était immédiatement arrêté. Le silence était assourdissant. Ils avaient attendu un certain temps. Puis soudain, un bruit de grincement avait été entendu au loin.
Screeeeeech ! Le son destructeur se répercutait depuis le haut, signalant que quelque chose s’approchait avec un élan dévastateur. Certains hommes semblaient prudents, mais l’inébranlable équipe Diamant ouvrait la voie.
Puseri, qui avait probablement la meilleure défense du groupe, leva son grand bouclier crépusculaire. Mais même elle ne pouvait empêcher une perle de sueur froide de rouler sur sa joue. Ce qui s’approchait était si intense.
Booom, vwoosh… !
Quelque chose d’énorme s’était écrasé, causant des fissures sur le pavé de pierre tout autour. La chose qui avait déchiré la balustrade avec facilité et était tombée à travers le mur raide au-dessus était…
« Un d-dragon ! !! » La voix de quelqu’un s’était brisée en hurlant de terreur, et le dragon de chaleur avait montré pourquoi il avait mérité son nom. Il ouvrit ses branchies rouge vif, et son souffle était si chaud qu’il déformait l’air autour de lui. Quelque chose avait rugi dans ses poumons comme une flamme brûlante alors qu’il chargeait son souffle de dragon. Une fois que ce souffle se serait échappé de ses poumons, le nombre de victimes serait calamiteux.
Mais malgré l’apparition soudaine du dragon, les yeux de deux personnes brillaient d’étonnement.
L’un d’entre eux était un jeune garçon qui affirmait que ce monde était comme un rêve et vouait une profonde admiration aux monstres fantastiques tels que celui-ci.
« Wôw, c’est tellement grand ! C’est vraiment autre chose quand on les voit en vrai. » Il s’était mis à avancer de manière instable, comme hypnotisé, et l’autre personne avait fait son mouvement en même temps.
Le vieil homme était capable de contrôler son énergie, et il avait caché sa présence pour qu’elle ne soit pas détectée. Il s’était ensuite complètement volatilisé, ne pouvant être remarqué, même par le sens aigu de l’odorat du dragon.
C’était Gaston. Le vieil homme aux cheveux blancs qui avait la réputation d’être indéfectible avait parlé avec son habituelle décontraction, puis il s’était approché de l’aile du dragon sans être vu… Enfin, c’est ce qu’il pensait.
« Ka ha ha, prends ça… » Avant qu’il ait pu finir sa phrase, le dragon s’était arrêté. Ses yeux infernaux fixaient un certain individu. Il l’avait peut-être imaginé, mais il semblait que le dragon avait baissé la tête. Même le grognement grondant ressemblait presque à des excuses.
Alors que le groupe se demandait ce qui se passe, le dragon de chaleur avait disparu au-delà de la balustrade. Sa retraite fut aussi soudaine que son apparition. Gaston et les autres étaient restés abasourdis par la disparition soudaine de l’énorme créature.
Pendant ce temps, Kitase continuait à regarder fixement. Il regardait la grande femme aux cheveux noirs qui lui arrivaient à la taille, qui disait « Oui, je m’excuse ! », mais les autres ne comprenaient pas ses mots.
Wridra était un être bien supérieur aux dragons normaux, de sorte que sa propre espèce pouvait la reconnaître même si elle dissimulait sa présence. Elle était comme un seigneur qui tente de se fondre dans la société.
Quant au vieil homme qui était toujours figé avec son épée levée, les autres ne lui avaient jeté qu’un regard superficiel avant de l’oublier, et il n’avait pas eu de réelle chance de briller.
C’est à cet instant qu’il avait réalisé que le champ de bataille n’était plus celui qu’il avait connu. Le temps où la bataille signifiait grimper sur les cadavres de vos alliés et ne chercher que la tête de vos ennemis était révolu. Le vieil homme rengaina son épée et laissa échapper un soupir.
Il y a quelques jours, il avait dépensé une grande somme d’argent pour inviter une certaine fille dans son manoir.
Elle s’appelait Hakua de l’équipe Diamant, une jeune fille ordinaire aux longs cheveux châtains. Elle avait une capacité spéciale qui lui permettait de lire l’avenir en utilisant l’astrologie, et on lui avait récemment interdit d’utiliser ses pouvoirs pour les étrangers. La raison de ce changement de politique était peut-être liée à la capture de leur chef, Zarish.
La plupart des gens auraient sans doute une question en tête s’ils avaient l’occasion de s’interroger sur l’avenir. Dans le cas de Gaston, il en avait une très particulière.
« Quand est-ce que je vais crever ? » La plupart des gens pencheraient la tête à une telle question. Ce n’était pas comme s’il souffrait d’une maladie grave ou avait des tendances suicidaires. Le vieil homme voulait simplement savoir. Il avait surmonté trop de batailles pour les compter, et il se demandait quand cette vie insensée prendrait fin.
« L’ancien labyrinthe qui vous attend sera votre lieu de mort. » Les yeux du vieil homme s’étaient agrandis. Étrangement, Gaston sentait la force parcourir son corps maintenant qu’il savait que la fin était proche. Il était ravi d’affronter la fin de sa vie qui n’avait que trop duré.
Son expression avait changé comme s’il était en pleine bataille maintenant, puis il avait tapé son genou et il s’était levé avec vigueur. Ainsi, il avait volontairement rejoint la mission très impopulaire du troisième étage.
Alors pourquoi ? Ce n’est pas pour ça que j’ai signé. Gaston laissa échapper un lourd soupir pour une raison quelconque. Peut-être était-ce parce qu’une fille elfe créait avec joie un grand four en pierre à l’aide d’un esprit de pierre. Ou peut-être était-ce l’odeur appétissante qui se dégageait de la pâte aplatie qu’un jeune garçon y plaçait.
L’odeur était suffisante pour faire gronder l’estomac du vieil homme, même s’il n’avait pas particulièrement faim.
Le groupe avait décidé de faire une pause dans une grande salle qu’ils avaient rencontrée. Cela ne dérangeait pas Gaston. Après tout, il était important pour un guerrier de se maintenir dans une condition optimale à tout moment. Cependant…
« Imbéciles, pourquoi faites-vous la cuisine dans le labyrinthe !? »
« Whoa ! »
Gaston s’était levé en criant, et le gamin au nom stupide, Kazuhiho, avait tremblé de surprise.
Pourquoi personne d’autre ne soulignait-il l’absurdité de la situation ? Ils avaient joyeusement cuisiné ensemble, et certains d’entre eux faisaient même joyeusement la queue avec des assiettes à la main. Il pouvait au moins s’attendre à ça des membres de l’équipe Améthyste de Kazuhiho. Mais voir même l’elfe noire de l’équipe Diamant se joindre à l’absurdité était de trop. Le garçon ajusta finement la chaleur à l’aide d’un bâton à l’extrémité aplatie tout en regardant Gaston avec une expression d’excuse.
« Je suis désolé. J’ai pensé que ce serait une mauvaise idée de cuisiner ici, mais nous avons déjà décidé de faire une pizza aujourd’hui. »
« Hein ? Comment ça, tu as “décidé” ça ? Un homme doit juste se taire et manger ses rations militaires. C’est comme ça que ça a toujours été depuis que je suis né. Qu’est-ce qui se passe ? » Les Lézards de Feu semblaient avoir remarqué l’agitation et les fixaient de l’intérieur du four en pierre. La façon dont ils clignaient leurs yeux de fouine était suffisante pour faire oublier sa rage. Le sourire béat du garçon était plus distrayant que tout.
« J’ai toujours voulu avoir un four à pizza, j’ai donc été étonné que nous puissions en fabriquer un aussi facilement. Les céréales et les herbes que l’on peut obtenir d’Arilai sont d’une telle qualité, donc je suis sûr que l’on pourrait faire d’excellentes pizzas avec. Nous pourrions même utiliser de l’huile et… » Étonnamment, l’avorton à l’air endormi s’était mis à parler avec force.
Et pourquoi cette femme aux cheveux noirs le regardait-elle en réponse comme pour lui dire « Ne nous interromps pas, imbécile » ? Il devait admettre qu’il sentait son estomac se serrer à cause de son regard.
Comment est-ce possible ? Je n’ai même pas cédé face à ce morveux de Zarish… Il avait raison d’être confus. Le vieux Gaston avait vaincu plus de dix mille ennemis qui se dressaient devant lui. Et pourtant, il savait instinctivement que cette femme était d’un autre niveau.
« Oh, je pense que c’est le moment. Faisons-les sortir, » dit le garçon.
« Bien ! Je suis affamé ! » L’éruption d’arômes qui s’en dégageait était presque écrasante.
Du concentré de tomates rouges avait été appliqué sur la pâte à pizza circulaire, avec beaucoup de bacon sur le dessus. Le fromage fondu bouillonnant remplissait agressivement l’air de sa délicieuse odeur.
L’odeur fit couiner les elfes de plaisir, et les assiettes commencèrent à circuler. Gaston déglutit, parvenant à avaler sa salive avant qu’elle ne s’échappe de sa bouche, lui faisant ravaler ses paroles par la même occasion.
« Oh, Gaston », cria le garçon en coupant la croûte croustillante avec un couteau.
Ce n’était pas comme si Gaston s’attendait à recevoir quelque chose, mais il ne voulait pas être impoli. Il n’avait pas apporté d’assiette avec lui, mais il supposait qu’il supporterait la chaleur et prendrait une tranche.
« Je suis désolé si nous vous dérangeons. Ne faites pas attention à nous et profitez de vos rations militaires. » À l’expression du visage du garçon, Gaston pouvait voir qu’il n’était pas sarcastique ou malveillant. Cependant, c’est à ce moment-là qu’il a commencé à détester Kazuhiho. Il sentait grandir en lui l’envie de tuer ce morveux.
Au même moment, le vieil homme pressait ses doigts contre ses rides et se disait douloureusement. Peut-être que c’est ici que je vais mourir. Non, ce n’est pas possible. C’était impossible. Il devait y avoir une fin glorieuse plus appropriée pour lui.
Gaston gémit à l’agonie en ouvrant le sceau de ses rations militaires. Il avait autrefois aimé du fond du cœur l’odeur de l’argile et la consistance moelleuse…
§
L’ensemble de la salle obscure ne savait plus quoi dire.
Le lanceur de sorts qui contrôlait le terminal, le chef du groupe et chacun des membres de l’équipe présents dans la pièce n’en croyaient pas leurs yeux. Le chef du groupe fixait son regard d’un air glacial, mais il luttait secrètement pour garder son calme.
Le Dragon de Chaleur a fui la bataille ? En l’espace de quelques secondes ? On aurait même dit que le dragon baissait la tête, mais de quoi s’agissait-il ? Il avait donc donné l’ordre d’envoyer un autre dragon de patrouille qui n’était pas lié à une zone particulière pour attaquer le groupe, mais…
« Monsieur, ça ne marche pas. Il n’y a pas de réponse du tout ! »
« Est-ce leur volonté ? Est-ce qu’ils communiquent entre eux d’une manière ou d’une autre ? Se pourrait-il que l’ensemble du réseau de dragons défie notre ordre !? » Les lanceurs de sorts haussèrent la voix en signe de panique, et l’homme dissimula sa détresse en essayant de comprendre la situation.
Quelque chose n’allait pas. Ils ne s’attendaient pas du tout à cette situation. Depuis le deuxième étage, il ne pouvait se défaire du sentiment qu’une entité supérieure se cachait parmi l’équipe du raid. Le garçon qui s’était approché du dragon sans se mettre en garde et le vieil homme qui avait instantanément caché sa présence lui venaient à l’esprit.
L’un des lanceurs de sorts contrôlant le terminal avait élevé la voix. Contrairement à tout à l’heure, il y avait un soupçon d’espoir dans son ton.
« J’en ai trouvé un ! Il y a un monstre encore plus puissant qui patrouille. L’être terrifiant qui peut lancer la nécromancie et qui contrôle les innombrables âmes des morts… Une liche ! »
« Bien, envoyez-le immédiatement ! Détruisez-les ! » La liche leva sa faux géante sur son épaule, du sang s’écoulant de sa pointe.
Sa robe noire de jais flottait dans le vent et son crâne était couvert de runes qui lui permettaient d’activer sa magie immédiatement. Les runes servaient également à interférer avec les incantations sur une large portée, mais elles n’interféraient pas avec la nécromancie. C’est ce qui rendait les Liches si terribles. Ils n’avaient aucun mal à trancher la tête de leurs ennemis, même s’ils les suppliaient de les épargner, et les cadavres ne faisaient que grossir les rangs de l’armée des morts.
La liche reçut l’ordre d’anéantir l’équipe du raid, répondit par un simple « Compris, » puis s’enfonça dans le sol, entraînant avec elle les innombrables morts-vivants gorgés de sang.
***
Partie 5
« Ah, » j’avais entendu quelqu’un parler, et je m’étais retourné pour trouver un monstre semi-transparent, ressemblant à un squelette, regardant par la porte. Il regardait Shirley, qui portait son assiette à ce moment-là, alors j’avais pensé qu’ils se connaissaient et j’avais continué à cuisiner. La faux qu’il portait sur son épaule et son apparence squelettique me rappelait Shirley.
Le monstre aux orbites vides et Shirley avaient continué à se fixer l’un l’autre pendant un certain temps. Puis, le monstre dont j’ignorais le nom avait disparu derrière la porte.
« Qui était-ce, Shirley ? Un de tes amis ? » Shirley avait secoué la tête, donc je suppose que non. J’étais occupé de toute façon, alors j’avais décidé de ne pas y penser.
Bref, c’était l’heure de la dégustation des pizzas.
Je m’étais récemment rendu compte que nous pouvions simplement apporter des ingrédients de ce genre lorsque nous n’avions pas le temps de préparer des repas avant de venir. La façon dont les gens nous regardaient me dérangeait un peu — enfin, ça me dérangeait beaucoup, mais comme les filles m’avaient dit : « Je ne mangerai jamais de rations militaires » et « Tu peux les manger toi-même », je n’avais pas vraiment le choix. J’avais l’impression que l’équipe Améthyste était un peu plus joyeuse que les autres, mais notre groupe était composé d’une elfe, d’une Arkdragonne et d’un ancien maître d’étage, alors il valait peut-être mieux ne pas trop s’en faire.
Je commençais à m’habituer à nos habitudes alimentaires, et j’avais apporté notre pâte à pizza dans le monde des rêves. Après avoir mélangé de la farine à pain, du sel, de l’eau et de l’huile d’olive, puis pétri le tout et laissé reposer, il ne manquait plus que des garnitures.
Il était préférable d’amincir la pâte pour obtenir une texture croustillante et une saveur particulière. Nous avions parsemé la pâte de fromage, de bacon et de quelques herbes ressemblant à du basilic que nous avions cueillie au deuxième étage, puis nous l’avons fait cuire dans le four en pierre. C’était une pizza à l’italienne, ce qui était un peu différent du style américain.
Mais avec trois lézards de feu allongés à l’intérieur du four en pierre, je m’étais demandé ce qu’était vraiment une pizza. Ils se prélassaient sur le dos et levaient leurs yeux de fouine quand je leur apportais la pâte à pizza. J’avais plus l’impression d’apporter de la nourriture dans un sauna que de cuisiner. Marie, qui contrôlait les esprits, avait tiré sur ma manche.
« Comment est le feu ? Je peux les faire travailler plus dur si tu le veux. »
« Non, je pense que ça va. L’air du troisième étage est assez froid, donc le four en pierre est aussi bien pour nous garder au chaud. » Attirés par l’air chaud et l’odeur, les gens avaient commencé à se rassembler autour de nous. Ceux qui avaient fait le premier pas étaient le couple de fiancés, Zera et Doula, et les curieux comme Eve l’elfe noire. Ils fixaient sans broncher le four en pierre, et Eve avait même apporté sa propre assiette en bois.
Elle avait également pris part à des repas portables jusqu’à la dernière fois, alors peut-être savait-elle instinctivement qu’il fallait apporter une assiette ? Non, ça n’a pas pu être… J’avais secoué la tête. À ce moment-là, Zera s’était approché pour me parler.
« Hein, tu as une cuisine bizarre d’où que tu viennes, Kazuhiho. Veux-tu bien nous laisser goûter un morceau ? »
« Oh, salut, Zera. Bien sûr, tu peux en prendre un peu. » Nous n’avions qu’une quantité limitée de nourriture, et il n’y avait pas assez de temps ou de ressources pour en distribuer à toutes les personnes présentes. Je me sentais mal, mais j’avais dû me contenter de ça.
Après avoir attendu un certain temps, j’avais sorti la pizza du four en pierre. Le fromage avait bien fondu, et la couleur rôtie avait fait briller les yeux de tout le monde d’excitation. L’arôme délicieux avait rempli la pièce tandis que j’enfonçais mon couteau dans la croûte bien cuite.
Oui, il n’y avait rien de tel qu’une pizza fraîchement cuite. Sans compter que nous avions utilisé une méthode de cuisson à haute température qu’il n’était pas possible de faire à la maison, donc je ne pouvais pas m’empêcher de me sentir étourdi.
J’avais placé une tranche dans les assiettes de Marie, de Wridra et de Shirley. Puis j’avais coupé une autre tranche en trois et j’en ai placé une dans l’assiette en bois d’Eve. J’avais déjà placé les garnitures sur un autre morceau de pâte aplatie, alors je l’avais placé dans le four en pierre. Marie m’avait regardé en s’excusant.
« Je me sens mal de manger avant toi quand tu fais toute la cuisine. »
Ses sourcils étaient froncés, et Wridra se tenait derrière elle, la bouche grande ouverte. Elle s’était empêchée de prendre une bouchée à la dernière seconde. À ma surprise, il semblait qu’elle avait appris à lire l’ambiance.
« Non, non, je veux que vous le goûtiez pendant qu’il est chaud. Il ne sera pas aussi bon si vous attendez plus longtemps, après tout. » Je leur avais fait signe de se servir, et Marie avait hoché la tête avec hésitation.
La coutume voulait que l’on prenne la pizza sans utiliser de fourchette alors qu’elle est brûlante. Elles sentaient la chaleur sur leur peau lorsqu’ils la prenaient. Elles l’avaient mise dans leur bouche avec précaution, pour ne pas se brûler la langue. Elles n’avaient pas tardé à élever la voix de plaisir. La croûte s’était émiettée facilement lorsqu’elles avaient mordu dedans, et le goût fort de mon fromage préféré, le Parmigiano Reggiano, avait rempli leurs bouches. Il avait fondu avec la graisse de lard, et l’acidité de la sauce tomate avait équilibré et amélioré le goût vers de nouveaux sommets.
Le parfum de la croûte de la pizza, la saveur de la sauce et l’umami du fromage avaient assailli leurs papilles gustatives lorsqu’elles y avaient plongé leurs dents. Cela avait désarmé leur prudence face à la chaleur, et elles avaient continué à mâcher afin d’obtenir plus de saveur à chaque bouchée.
« Mm ! Mm ! Mm ! Si bon… ! »
« Nnnh ! Cette texture croustillante ! Aaargh, le fromage est criminellement délicieux ! »
J’étais heureux de les voir étirer le fromage, le sourire aux lèvres. Les yeux de Shirley s’illuminaient aussi de joie, et son contour devenait un peu flou… J’avais essayé de lui faire signe avec mes yeux de faire attention et de se calmer. Elle avait levé les deux poings dans une pose victorieuse, ce qui m’avait inquiété un peu plus.
« Mmm, le fromage est si extensible ! Nnf, nngh, j’adore la pizza ! »
« Hng ! La croûte fine met encore plus en valeur le fromage ! La texture croustillante est tout simplement divine ! » J’avais voulu corriger un peu sa prononciation, mais je l’avais gardé pour moi.
Quoi qu’il en soit, je m’étais senti chanceux rien qu’en observant les expressions heureuses de ces belles femmes alors qu’elles dégustaient de bons plats, y compris le moment où elles me tapaient dans le dos et sur l’épaule. Une fois qu’elles avaient fini de manger, elles m’avaient apporté leurs assiettes et m’avaient demandé d’en refaire.
Mais celle qui aimait le plus la pizza était Eve, l’elfe noire. Ses yeux s’étaient pratiquement transformés en cœurs, et elle était restée assise, rêveuse, la bouche entrouverte, pendant un certain temps après avoir fini de manger.
J’avais le vague sentiment qu’elle aimerait la malbouffe, mais c’était un peu inquiétant de la voir respirer lourdement avec ses sourcils en forme de V inversé. Elle me regardait avec impatience, et je ne pouvais pas m’empêcher de la gâter un peu.
« Eve, veux-tu une autre part ? »
« Je peux ? Yay, yay, yay ! Merci, Kazu ! » Elle avait bondi sur moi et m’avait enlacé par le côté, face à lequel j’avais cligné des yeux de surprise.
Je me sentais un peu comme son grand frère, mais elle était bien plus grande que moi dans le monde des rêves. Ses paroles et ses actions pouvaient être assez sévères, mais elle était comme un enfant quand elle voulait quelque chose. Cependant, la façon dont elle s’accrochait à moi par-derrière en faisant des bruits impressionnés quant au four en pierre était un peu gênante.
J’avais fourni une deuxième, puis une troisième tranche, et l’estomac de chacun avait commencé à se remplir. Wridra aurait pu en manger encore beaucoup, mais j’avais envie d’en manger moi-même.
Nous étions dans l’ancien labyrinthe, donc personne ne s’était soucié du fait que nous nous tenions debout en mangeant, contre l’étiquette. Alors que nous prenions du thé, Zera avait fait un commentaire.
« Maintenant que j’y pense, ce vieil homme Aja a dit qu’il nous enverrait des provisions si nécessaire. Peut-être qu’il nous enverrait des ingrédients comme ceux-ci si nous le demandions ? Nous avons quelques membres d’équipe compétents, donc je pense qu’ils pourraient cuisiner quelque chose à la place de Kazuhiho. »
« Ne sois pas stupide, Zera. Je ne suis pas assez effrontée pour leur demander de nous livrer de la nourriture. Pourtant, ça aiderait le moral, donc je dois admettre que je suis tentée, » dit Doula en essuyant les miettes de la bouche de Zera, montrant son côté maternel. C’était étrange de la voir prendre soin de son fiancé tout en l’insultant d’un air froid.
J’avais pensé à la proposition de Zera de commander des ingrédients. Arilai avait des épices, du thé et des céréales de grande qualité. Mon porte-monnaie apprécierait grandement qu’ils nous envoient ce dont nous avons besoin. Mais pour cela, nous devions raccourcir le chemin entre l’entrée du labyrinthe et le QG. Dans les jeux de type dungeon crawler, on débloque généralement des raccourcis après avoir nettoyé un donjon. Je m’étais dit que c’était trop demander et j’avais soupiré.
Je ne l’avais pas remarqué à ce moment-là, mais une étrange clé pendait à la taille de Marie, qui se frottait le ventre avec satisfaction. Elle scintillait à la lumière, mais personne ne l’avait remarquée alors qu’ils savouraient leur repas. Il faudrait encore un certain temps avant que le chemin ne s’ouvre.
Et ainsi, le raid d’aujourd’hui s’était terminé de manière relativement calme.
§
Un silence assourdissant règne dans la pièce. Il faisait si sombre que les personnes rassemblées ne pouvaient même pas voir le visage de leur voisin, mais elles n’avaient pas besoin de se voir pour savoir que leurs expressions étaient remplies de désespoir. Après tout, la liche était partie après avoir seulement dit « Ah ! »
« N’avaient-ils pas plus de mal à l’étage précédent !? »
« Hé, ferme-la ! Je faisais un effort pour ne pas le dire à voix haute ! » Le commandant du groupe tressaillit en réponse aux voix du bandit et de Kartina. Mais lorsqu’il observa les visages du groupe, il réalisa que tout le monde disait la même chose et décida de se taire. L’homme était habituellement froid et posé, mais il était véritablement ébranlé par le fait que ces puissants monstres partaient d’eux-mêmes, l’un après l’autre.
Il avait redressé son col distraitement, puis avait tranquillement réévalué la situation. Le système de défense était bien supérieur au troisième étage, et les monstres y étaient d’un tout autre niveau. Mais pour une raison inconnue, il avait l’impression que le vent avait tourné pour le pire sens ici.
Il n’arrivait pas à mettre le doigt sur le sentiment d’impuissance qui débordait en lui. Il avait beau avancer, il ne parvenait pas à progresser. En fait, les pièces à sa disposition disparaissaient à mesure qu’il avançait. Il serra les dents et fixa les images. Il pouvait les voir passer joyeusement leur temps ensemble.
Non. Ce n’est pas censé être comme ça.
Il avait prévu divers scénarios, mais pas la vision de la dégustation qui se déroulait devant lui. C’était même difficile à comprendre. En temps normal, il devrait être aux premières loges d’un paysage infernal palpitant. Il ne voulait pas entendre leurs rires résonner dans la pièce silencieuse et sombre. C’était terriblement déprimant d’une certaine façon.
« Je ne pense pas qu’ils aient remarqué cette fois-ci… »
« Espèce d’idiot ! Notre chef est brillant ! Bien sûr qu’il a un autre plan en tête ! » Il sentait sa tête s’engourdir. Il était même en train de se faire coincer par ses propres subordonnés.
Heureusement, il était assez résistant et capable de contenir ses émotions. Sinon, il aurait pu s’agripper à sa propre tête et crier. Ou peut-être aurait-il frappé un de ses hommes à la tête. Mais en tant que leader, il devait donner de l’espoir à son équipe. C’était son devoir.
« Bien sûr. C’est le troisième étage. Il y a toujours un moyen. »
« Oooh ! » Un soulagement visible avait envahi les membres de son équipe. Avec une lueur d’espoir en vue, ils étaient impatients de connaître la prochaine étape. Il afficha un sourire rassurant, puis s’adressa à ses subordonnés inutiles.
« J’ai un atout dans ma manche à tout moment. Oui, j’ai toujours mon dernier recours. »
« Attendez, en êtes-vous déjà à votre dernier recours ? » Il lança un regard furieux à son interlocuteur, et Kartina se couvrit la bouche de ses mains et détourna les yeux.
Il semblerait qu’il soit parfois nécessaire de laisser libre cours à ses émotions et de brandir ses poings, après tout.
Il retroussa ses manches.
***
Chapitre 10 : Vers la piscine à vagues
Partie 1
J’avais lentement ouvert les yeux. J’y avais vu des draps tout neufs et des cheveux encore plus blancs et lustrés. J’avais senti la texture soyeuse entre mes doigts, et quand je les avais caressés, une légère odeur féminine s’était répandue dans l’air.
Son souffle apaisé avait chatouillé ma clavicule. Elle avait l’air tellement sans défense, endormie dans le lit, et elle s’était accrochée à moi avec ses deux bras et une expression paisible.
Son cou pâle, ses cils d’une longueur captivante… Je pouvais sentir sa chaleur à travers le tissu fin de son pyjama. Quelque chose s’était emparé de moi et j’avais attrapé son dos, et mes mains s’étaient posées sur sa taille et son dos minces.
Encore plongée dans son sommeil, elle avait soudainement émis un joli bruit de somnolence. Alors que je fixais ses lèvres pleines, Marie avait lentement ouvert les yeux. J’avais peut-être attendu ce moment. Je voulais voir le moment où ses yeux améthystes s’ouvriraient alors qu’elle se réveillait ici au Japon.
Il y a certaines choses qui la différencient des humains. Ses yeux brillaient comme des pierres précieuses, et sa peau parfaitement lisse ne demandait qu’à être touchée. Je ne savais pas si c’était un trait commun aux elfes, ou si cela faisait partie du charme naturel de Mariabelle.
À ce moment-là, Marie avait posé sa cuisse sur ma hanche et s’était accrochée à moi pour que nos ventres se touchent. Je savais qu’elle était encore à moitié endormie, mais c’était un peu trop. Marie ne semblait pas se soucier de ma détresse et frissonnait. Elle avait ensuite laissé échapper un adorable bâillement et m’avait regardé de ses yeux violets et humides.
« Hee hee, le week-end est enfin arrivé. Je me demande quelle aventure amusante tu me réservas cette fois-ci ? Si tu ne penses à rien, je te fais faire des imitations. »
« Pourquoi des imitations ? Quoi qu’il en soit, je vais te donner quelques idées, alors tu me diras si l’une d’entre elles te semble intéressante ? »
Marie avait accepté et elle s’était assise, puis elle était montée sur moi pour une raison quelconque. Le geste était assez inoffensif, mais la chaleur de ses fesses pressées contre moi avait fait battre mon cœur plus vite.
Malgré cela, elle ne semblait pas du tout préoccupée et elle avait touché du bout du doigt la pierre précieuse noire. La pierre s’était alors immédiatement transformée en un chat noir, qui s’était posé sur le sol. C’était un peu comme le familier de l’Arkdragon, ou plutôt comme une pierre étrange qui lui permettait de visiter le Japon depuis l’autre monde.
J’avais regardé le chat miauler d’un regard en coin, puis une idée m’était venue.
« Je sais. Et si on allait à la piscine ? C’est l’été, après tout. On pourrait aller chercher des maillots de bain ensemble et conduire jusqu’à la piscine de là. » Je pensais que c’était une bonne idée, mais Marie m’avait jeté un regard dubitatif pour une raison inconnue.
C’est bizarre… Elle ne semble pas du tout intéressée.
« Ne sois pas stupide. Nous ne sommes pas riches. Il n’y a aucun moyen pour des roturiers comme nous d’aller dans une piscine. Il y a très peu de gens qui ont de telles installations, même dans l’autre monde. Tu devrais simplement l’appeler une rivière ou un lac au lieu de te donner l’air chic, tu sais. »
« Oh, je vois. Je pense qu’il y a une différence dans notre sens des valeurs. Cela dépend de la région, mais les piscines sont beaucoup plus accessibles que les rivières et les lacs dans ce pays. Vous voyez ? Regardez. » Sur ce, j’avais pris mon smartphone et j’avais regardé une vidéo promotionnelle pour une piscine publique. Marie et même la chatte avaient grimpé sur mon ventre et m’avaient fixé.
La vidéo montrait des enfants qui couraient joyeusement et descendaient un toboggan aquatique, avec des rires joyeux en arrière-plan. La vidéo s’était terminée au bout d’une minute environ et j’avais mis mon téléphone de côté. Le regard de Marie était complètement différent de ce qu’il était il y a un instant. Ses yeux améthystes brillaient d’intérêt.
« Qu’en pensez-vous ? Si vous êtes intéressées… »
« Allons-y ! » dit Marie avec enthousiasme, les joues rouges, et la chatte miaula en signe d’approbation. Ainsi, nos plans de week-end étaient fixés. J’étais soulagé de ne pas avoir à faire d’imitations. De plus, je voulais acheter nos maillots de bain avant de partir à la plage, et je voulais voir si Marie savait nager. Aller à la piscine était l’occasion parfaite pour moi.
J’avais frappé le chat sur le nez avec le bout de mon doigt, puis j’avais parlé à la femme dans l’autre monde.
« Si ça t’intéresse, que dirais-tu d’aller te chercher dans le monde des rêves une fois que nous aurons fini d’acheter des maillots de bain ? Il n’y a rien de tel qu’un repas chaud après être allé à la piscine. Le ramen est l’un de mes plats préférés. » Les yeux dorés de Wridra avaient brillé, et elle avait miaulé avec enthousiasme en réponse. Je pouvais voir à sa bave que mon commentaire avait stimulé l’appétit de Wridra. J’avais souri en voyant le chat et Marie se tenir la main et s’applaudir joyeusement.
« D’accord, alors c’est décidé. Nous allons choisir des maillots de bain aujourd’hui, puis nous irons à la piscine. »
« Yaaay ! »
J’avais gloussé et m’étais levé pendant qu’elles sautaient sur le lit, puis j’avais ouvert les rideaux. La lumière du soleil était entrée dans la pièce, me disant que c’était le jour parfait pour être dans la piscine.
C’était un soulagement, étant donné qu’elles m’auraient probablement détesté s’il pleuvait dehors après les avoir tant hypnotisées par cette sortie.
§
Il faisait clair dans le grand magasin en face de la gare de Kinshicho, et il y avait des ventes saisonnières dans toutes sortes de magasins. Le coin des maillots de bain était glamour à mes yeux… Par contre, je n’étais pas assez courageux pour y mettre les pieds. J’étais resté là à me débattre mentalement, et un groupe d’étudiants en uniforme est passé. Ils semblaient être sur le chemin du retour de leurs activités de club pendant les vacances d’été.
« Hé, tu l’as vue ? »
« Ouais ! Trop mignonne ! Pourquoi tenait-elle un chat ? »
Ils avaient discuté entre eux en s’éloignant, se demandant d’où venait Marie, et disant qu’ils auraient dû prendre des photos.
« Hm, » avais-je dit. Je ne pouvais pas laisser Marie seule là-dedans alors que nous étions venues faire du shopping ensemble. J’avais donc redressé mon dos et j’étais entré dans le coin des maillots de bain aussi naturellement que possible. Là, je l’avais vue marcher toute seule avec une expression inquiète, mais son visage s’était éclairci dès qu’elle m’avait vu.
« Oh, bien. J’espérais que tu viendrais avec moi. Tiens, prends Wridra. »
« C’est sûr. C’est la première fois que tu choisis des vêtements à porter dans l’eau, hein ? » J’avais pris Wridra, et elle était restée calmement suspendue à mes bras comme d’habitude. Marie était restée un moment dans ses pensées, puis elle avait levé les yeux comme si elle se souvenait de quelque chose.
« Dans l’eau… ? Attends, il y a eu cette fois pendant le typhon. »
« Oh, tu veux parler de l’imperméable. Tu n’as pas tort, mais c’était sous la pluie. » Je ne m’attendais vraiment pas à ça, mais j’aurais peut-être dû mieux le formuler. Comme « des vêtements dans lesquels il est facile de nager », par exemple.
« J’ai effectivement vu des filles porter quelque chose comme ça autour de moi. La plupart des elfes n’aiment pas les vêtements qui limitent les mouvements. »
« Maintenant que tu le dis, beaucoup d’entre eux portaient des vêtements révélateurs. Tu portes habituellement des robes, alors j’ai failli oublier. » On dirait qu’elle n’avait pas aimé ce commentaire. En la voyant gonfler ses joues de façon boudeuse, j’avais ressenti un peu de panique. Je pensais que c’était peut-être insensible de ma part de mentionner d’autres femmes, mais il semblerait que c’était faux.
« Ce n’est pas juste. Pourquoi ai-je toujours dû porter des robes grises alors que je suis aussi une elfe ? »
« Attends, c’est de ça que tu parlais ? Je veux dire, je n’avais pratiquement qu’une seule tenue là-bas aussi. En plus, n’est-ce pas agréable de ne pas avoir à se soucier de salir ou de déchirer ses vêtements ? » Elle m’avait lancé un regard, comme pour me dire qu’elle n’était pas une flemmarde comme moi. Puis elle avait commencé à se plaindre des robes, comme pour libérer ses frustrations refoulées.
« Bien sûr, il n’était pas obligatoire de les porter, mais je suis sûre qu’il y avait quelques droits et intérêts impliqués dans la raison pour laquelle elles ont été officiellement adoptées. Ne penses-tu pas aussi ? Sinon, pourquoi ne choisiraient-ils pas un design plus mignon ou ne nous donneraient-ils pas d’autres options ? »
« Oh, hum… Qui sait ! Mais Arilai est assez loin de la guilde des sorciers, donc tu peux probablement porter ce que tu veux là-bas. » Wridra avait miaulé, peut-être pour exprimer son accord. L’Arkdragon pouvait créer toutes sortes de choses, alors elle n’aurait sûrement aucun problème à fabriquer des vêtements. Marie aimait porter des tenues mignonnes, et je pouvais dire que cette robe n’était pas le genre de design qu’elle aimait.
« D-D’accord ! Je vais peut-être l’envisager si tu le dis ! » Je pensais que Marie avait déjà dit qu’il était convenable de porter la tenue officielle en tant que sorcière, mais il semblait qu’elle devenait plus flexible avec sa façon de penser.
Elle avait l’air heureuse et sa bouche s’était courbée en un sourire, mais je m’étais souvenu de quelque chose et j’avais secoué la tête.
« En fait, ce ne serait pas le bon moment. Je veux dire, nous sommes au milieu d’une mission dans le labyrinthe, donc ce n’est peut-être pas une bonne idée de changer de tenue de façon aussi radicale… »
« Ah ! » Marie avait titubé, puis elle s’était recroquevillée sur le sol. Elle avait été frappée par la dure réalité après avoir vu une lueur d’espoir, aussi ai-je mis du temps à la consoler.
Maintenant, il était temps de reprendre nos achats.
Nous avions d’abord fait le tour du magasin pour nous faire une idée de la dernière tendance générale, puis nous avions examiné les articles de plus près.
Cela s’appliquait également au choix des vêtements et des chaussures, mais Marie était très prudente lorsqu’il s’agissait de choisir un seul vêtement, et elle finissait parfois par ne rien acheter du tout lorsqu’elle ne trouvait pas quelque chose qui lui plaisait. J’avais vu que Marie regardait fixement une étiquette de prix.
« Qu’en penses-tu ? As-tu trouvé quelque chose qui te plaît ? »
« Jette un coup d’œil à ça. C’est une si jolie couleur. C’est plus vif que ce que je porte habituellement… Tu vois ? Ce maillot de bain bleu ciel est magnifique. Mais ne penses-tu pas qu’il est un peu trop révélateur ? »
« Oh, c’est une jolie couleur estivale. J’ai l’impression qu’elles t’iraient toutes bien, parce que tu es si mignonne, Marie. »
« Oh » Marie s’était retournée pour me regarder. Elle a fait une grimace, comme pour dire que je devrais la complimenter davantage. Pourtant, tout le monde aurait reconnu que Marie était plutôt jolie.
« Si tu n’es pas sûre de ce que tu veux, tu peux essayer des choses dans ce vestiaire. Tu peux en choisir quelques-uns qui te plaisent. »
« Oui, je pense que je le ferai. Aide-moi à choisir quelque chose, Wridra. » La chatte avait miaulé et avait hoché la tête, alors je l’avais confiée à Marie. Le sens de la mode de Wridra s’était amélioré ces derniers temps, et il semblait qu’elle avait gagné la confiance de Marie dans ce domaine. Peut-être que cela aurait été bien après tout que j’attende dehors. Alors que je pensais à cela, Marie s’était retournée.
« Tu es chargée de juger les maillots de bain. N’ose pas t’enfuir comme la dernière fois, d’accord ? » Elle avait fait un geste de pincement, et j’avais dû me rendre tout de suite. J’avais regardé les deux faire leur choix, puis nous nous étions dirigés vers les vestiaires.
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