Wortenia Senki – Tome 8 – Chapitre 5

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Chapitre 5 : L’Église de Meneos

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Chapitre 5 : L’Église de Meneos

Partie 1

La région méridionale du continent occidental était parsemée de plusieurs petits royaumes qui étaient en guerre permanente. C’était la région la plus disputée du continent, et il y avait toujours des combats à un moment ou à un autre.

À l’extrémité ouest de cette région, à la frontière d’une des plus grandes nations du continent, le Saint Empire de Qwiltantia, se trouvait une ville. Son nom était la Capitale Sainte, Menestia. Une ville de pierre qui se dressait au centre de vastes plaines.

On disait que Menestia avait été construite dans les temps anciens par les saints hommes instruits par les dieux, et leurs nombreux disciples. Cette grande ville était la plus grande base d’opérations de l’Église de Meneos.

Au cœur de cette grande ville se trouvait un temple massif. Mais en vérité, ce n’était pas tant un temple qu’un château. On ne s’attendrait pas à trouver des ecclésiastiques travaillant au service du Dieu Vivant dans une structure aussi élevée.

Bien sûr, une telle déclaration susciterait l’ire des croyants zélés de l’Église de Meneos, qui y verraient une insulte à la foi. Mais la ville était couverte de trois couches de murs et d’un fossé qui puisait dans un bras de la rivière Uranoa voisine pour repousser les envahisseurs.

Le temple au centre de Menestia avait l’apparence d’un lieu de culte, mais il était également protégé par ses propres douves et la route qui y menait était étroitement surveillée par des soldats d’élite entièrement armés. Ainsi, malgré les apparences, il serait difficile d’appeler cela un simple lieu de culte.

Un certain Rodney Mackenna était assis dans sa chambre du temple, affalé, la joue contre le bureau, et regardait les nuages par la fenêtre ouverte. La douce lumière du soleil enveloppait son corps, induisant une somnolence tentante dans son esprit.

Je n’ai pas eu une bonne nuit de sommeil ces derniers temps, hein… ?

Avec cette pensée en tête, Rodney réprima un bâillement. Depuis qu’ils étaient revenus de leur garnison à Beldzevia il y a quelques jours, les choses étaient devenues si agitées qu’il n’avait pas pu bien dormir… Et bien qu’il ait dit « quelques jours auparavant », cela faisait en fait plusieurs mois qu’ils étaient revenus. À l’heure actuelle, il aurait terminé ses rapports depuis longtemps et se serait réhabitué à sa vie dans la capitale.

Mais la question de savoir comment gérer le fardeau qu’il avait ramassé sur le chemin du retour vers la capitale était la source de ses inquiétudes. Le travail s’était accumulé et il ne pouvait pas se permettre de se relâcher. Ses paupières s’alourdissaient pourtant de seconde en seconde, et assez rapidement, la conscience de Rodney sombra dans le sombre bourbier du sommeil.

« Je vois que vous vivez dans des conditions assez confortables. Vous repoussez toute votre paperasse sur votre pauvre lieutenant et vous ronflez tout l’après-midi, Capitaine… Pas étonnant que le Cardinal Barugath ait des vues sur vous. »

Un regard froid et acéré réveilla la conscience de Rodney comme un jet d’eau glacée. Son lieutenant et demi-sœur fraternelle, Menea Norberg, le regardait avec un regard aussi acéré qu’une paire de poignards, ce à quoi Rodney répondit par un haussement d’épaules malgré lui. En général, Menea l’appelait simplement « Capitaine ». Son comportement n’était pas différent de celui qu’il avait adopté lors de leur mission il y a quelques jours, lorsqu’il avait mené son unité en mission punitive.

Les autres membres l’appelaient chef, tandis que Menea l’appelait Capitaine. Mais c’était uniquement lorsque d’autres personnes étaient présentes. Quand ils étaient seuls, ils s’appelaient généralement par leur prénom. En supposant, bien sûr… que Menea ne soit pas de mauvaise humeur.

Menea connaissait Rodney depuis longtemps. Lorsque leur père était décédé subitement, Rodney avait 12 ans et était un noble prestigieux du Royaume de Tarja. Lorsqu’il hérita du titre de chef de famille et de comte de la Maison Mackenna, Menea lui avait été présentée comme sa demi-sœur d’une autre mère.

Ils avaient travaillé ensemble pendant une dizaine d’années depuis, et ayant vécu si longtemps ensemble, ils pouvaient reconnaître l’état d’esprit de l’autre juste par le ton de leur voix. Et en ce moment, Rodney pouvait voir que le cœur de Menea bouillonnait de colère. La véritable montagne de paperasse qu’il lui avait confiée semblait l’avoir laissée de mauvaise humeur. Ou peut-être qu’elle était juste agacée de le voir s’assoupir.

Quoi qu’il en soit, Rodney savait qu’il devait garder la tête basse et se taire en attendant que la tempête passe.

« Essuie-toi avec ça. Tu es en train de baver. »

Avec des yeux pleins de ressentiment, Menea sortit un mouchoir en soie de sa poche et le tendit vers lui.

Apparemment, la lumière du soleil était si agréable que Rodney s’était endormi tout en bâillant, et sa bouche était restée ouverte.

« Ooh. Désolé, merci… », dit Rodney en s’essuyant précipitamment la bouche et le menton.

Menea avait deux ans de moins que lui, mais n’importe qui les regardant maintenant supposerait qu’elle était l’aînée de la fratrie.

« Je te jure, Capitaine, tu es un adulte, pas un enfant… Et je ne suis certainement pas ta mère. », grommela Nemea tout en poussant un gros soupir.

Rodney était certes un enfant noble gâté, et même en ayant atteint l’âge adulte, sa capacité à vivre indépendamment était essentiellement inexistante. Lorsqu’il vivait à Tarja, il n’avait jamais eu besoin de sortir pour acheter ses propres affaires, et il ne se rappelait même pas combien d’argent il avait dans son portefeuille. Il était tellement détaché de la vie commune qu’il avait un jour tendu son portefeuille à un mendiant, qui avait été peu après promptement arrêté par les gardes pour vol présumé.

D’ailleurs, c’est justement au moment où Nemea demanda à Rodney où était son portefeuille que le mendiant fut épargné de l’incarcération. Elle s’était empressée de le chercher et réussit à s’expliquer. Dans le pire des cas, le pauvre mendiant aurait pu être exécuté pour vol qualifié. Nemea était soulagée d’avoir évité cette effusion de sang inutile, c’était le moins que l’on puisse dire.

Rodney avait certainement agi par bonté d’âme, mais la somme qu’il avait remise au mendiant était beaucoup trop importante. Dans une mesure stupéfiante. Le mendiant avait probablement été choqué lorsqu’il avait ouvert le portefeuille et trouvé plusieurs dizaines de pièces d’or, alors qu’une seule pièce suffisait à un roturier pour vivre confortablement pendant une année entière.

La somme entre ses mains était suffisante pour vivre pendant une bonne vingtaine d’années. S’il se rendait dans l’une des régions frontalières, il pouvait facilement acheter une maison et une ferme avec cet argent. Trouver un tel argent était un tournant qui pouvait racheter sa vie entière.

Bien sûr, le mendiant s’était tellement réjoui de cette découverte que son comportement avait paru suspect à tout le monde autour de lui. Et il n’avait pas fallu longtemps pour que les gardes viennent l’interroger. S’il n’y avait eu que quelques pièces d’argent, son histoire aurait peut-être été plus crédible, mais il avait un portefeuille blindé d’or. Ils n’avaient pas cru son histoire selon laquelle un noble lui avait remis le portefeuille.

Aucun noble, aussi généreux soit-il, n’aurait eu de raison de donner autant d’argent à un mendiant au hasard. C’était comme confier une valise remplie de billets de banque à un inconnu dans la rue.

Tout ceci montrait à quel point l’éducation de Rodney avait été détachée. Et en effet, si Menea n’avait pas été là pour veiller sur lui, il était peu probable qu’il puisse atteindre le rang de Capitaine Chevalier, ou même qu’il soit arrivé vivant à Menestia après avoir fui la capitale Tarja.

Et puis, s’il n’était pas aussi naïvement gentil, il ne ferait pas quelque chose d’aussi fantaisiste et étrange que de sauver un Rearth qu’il avait rencontré par hasard dans les bois.

« Tu dois vraiment être fatigué. Est-ce que cette fille te dérange tant que ça ? », demanda Menea.

Il ne pouvait y avoir aucune autre raison pour que Rodney soit aussi fatigué en ce moment. En regardant Rodney se frotter les yeux d’un air fatigué, Menea laissa échapper un profond soupir exaspéré. Bien sûr, ce n’était pas comme si Menea n’aimait pas Asuka Kiryuu. Après tout, la propre mère de Menea était une Rearth d’Amérique, et elle avait toujours trouvé fascinants les récits d’Asuka sur le Pays du Soleil Levant. Et plus elle apprenait à connaître cette fille, plus Menea se rendait compte qu’Asuka n’était pas faite pour ce monde.

Si Rodney ne l’avait pas trouvée dans la forêt, elle aurait probablement été ramassée par un marchand d’esclaves et serait vendue aujourd’hui. Et une fois qu’elle serait devenue une esclave, il n’y aurait plus eu de salut pour elle. Elle serait le jouet de quelqu’un d’autre jusqu’au jour de sa mort, ou jusqu’à ce qu’elle tire le rideau sur sa vie de son propre chef.

Menea avait vu des gens qui étaient arrivés par hasard dans ce monde depuis Rearth connaître de tels destins plus d’une fois. C’était pourquoi Menea n’avait jamais blâmé ou jugé Rodney pour avoir sauvé la vie d’Asuka. Au contraire, elle était fière de la gentillesse de son demi-frère paternel. Mais elle ne pouvait s’empêcher de se demander pourquoi il devait être si préoccupé par elle.

Je ne veux pas l’envisager, mais…

La possibilité la plus probable était que Rodney s’était entiché d’Asuka. Menea admit qu’Asuka était une jeune femme attirante, et que Rodney était un homme de 26 ans. Asuka allait apparemment avoir 17 ou 18 ans cette année, la différence d’âge n’était donc pas trop importante.

Bien sûr, s’ils avaient été au Japon, l’ordonnance sur la protection des mineurs aurait pu désapprouver un tel couple, mais c’étaient les normes de Rearth. Dans ce monde, un couple avec ce genre de différence d’âge était considéré comme parfaitement valable. Pas seulement les nobles, mais même les roturiers se mariaient à cet âge.

Et connaissant Rodney aussi bien qu’elle, Nemea savait que l’apparence d’Asuka était à son goût.

Mais… est-ce que ça a vraiment un sens ?

Rodney Mackenna était un peu un retardataire en matière d’amour. Ou peut-être que l’appeler un rêveur romantique serait plus approprié. Mais même ainsi, comme Rodney était l’héritier d’une maison de comte, ses proches lui avaient apporté de nombreuses propositions de mariage arrangé à considérer. Qu’il a d’ailleurs toutes refusées… Ce qui était extrêmement inhabituel dans la société aristocratique.

Pour la noblesse, le mariage était un moyen de conserver sa maison et son titre. Et c’était un moyen de resserrer les liens entre les différentes familles nobles. L’affection romantique avait peu d’influence en la matière.

Bien sûr, il était parfaitement probable et même conseillé qu’un couple marié apprenne à s’aimer et à se chérir. Mais malheureusement, les nobles n’avaient pas le privilège d’épouser librement la personne qu’ils aimaient. Ainsi, un noble amoureux devait choisir entre forcer sa volonté et renoncer à sa maison et à son titre, ou simplement croire dans son cœur qu’il serait réuni avec sa bien-aimée dans l’autre vie.

Les soupçons de Menea, cependant, s’étaient avérés faux.

« Oui, je ne peux pas m’empêcher d’y penser… », murmura Rodney évasivement.

Cela fit soudainement changer l’expression de Menea. Elle ne pouvait pas être son assistante personnelle si elle était trop directe, ou si elle ne pouvait pas sentir la gravité derrière ses mots.

« Tu veux dire… Ce katana ? », demanda Menea.

Rodney acquiesça profondément : « Ouais. Il ne fait aucun doute que c’est une épée magique… Malheureusement. »

Nemea ne put s’empêcher de déglutir nerveusement à ses paroles. Elle se doutait bien que cela pouvait être le cas, et apparemment son intuition ne l’avait pas trompée. Mais Nemea avait dû demander à Rodney une seconde fois.

Après tout, cela ne pouvait tout simplement pas être vrai.

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Partie 2

« En es-tu sûr ? »

« Oui. Un de mes soirs de repos, j’ai demandé à Asuka de me le prêter pour la nuit… et j’ai fini par rester debout jusqu’au matin, à me renseigner. »

En entendant son explication, Menea eut le sentiment qu’ils étaient impliqués dans quelque chose de bien plus important que ce qu’ils avaient supposé au départ.

Le katana d’Asuka est une épée magique… Je n’arrive pas à y croire…

L’existence d’une épée magique n’était pas si inhabituelle en soi. Il était vrai que l’épée était une arme redoutable. Elle avait tranché un tigre à trois yeux ayant un corps massif de 500 kilos et un visage dur comme du fer d’un seul coup et sans subir la moindre fêlure.

Il était clair que l’épée avait un sceau de préservation gravé dessus, comme c’était souvent le cas pour les armes magique. En plus de cela, le changement qui avait envahi Asuka en la brandissant était une preuve flagrante.

Dans ce cas, arriver à la conclusion que ce katana, Ouka, était une épée magique n’était pas difficile. Mais le fait que cette arme dangereuse soit entre les mains d’une fille qui venait d’être invoquée de Rearth changeait tout. Comment Asuka, qui avait été invoquée depuis un monde sans magie, avait-elle pu mettre la main sur une telle arme ? Surtout au vu du calibre de sa puissance, qui la mettait au même niveau que les armes les plus prisées et les plus rares de ce monde, une épée démoniaque…

« Mais si c’est le cas… »

« Oui, tu es probablement sur la bonne voie, Nemea… »

Asuka leur avait déjà raconté ce qui s’était passé quand elle était arrivée dans ce monde. Elle avait été appelée dans ce monde avec deux autres hommes, Tachibana et Kusuda. Quelques instants avant que le sceau de l’esclavage ne soit appliqué sur elle, son grand-père Kouichirou Mikoshiba fit irruption dans la scène et la sauva. Avec cette histoire en tête, il n’y avait qu’une seule conclusion plausible.

« Alors c’est vraiment vrai… »

« Oui, si ce qu’Asuka nous a dit est vrai, ce Kouichirou Mikoshiba était déjà venu dans ce monde une fois auparavant et a en quelque sorte utilisé la magie pour retourner à Rearth. Et quand Asuka a été convoquée, il est revenu ici… Honnêtement, c’est difficile à croire… »

Cette histoire était impossible compte tenu de la logique de ce monde. Dans les milliers d’années d’histoire enregistrée de ce monde, il n’y avait pas un seul exemple de personne ayant réussi à retourner à Rearth après être venue dans ce monde.

« Tu l’as dit à Asuka ? »

« Non… Je ne pouvais pas me résoudre à le faire. Et je n’ai sûrement pas besoin d’expliquer pourquoi ? », dit Rodney avec amertume tout en soupirant.

Menea réalisa pourquoi il ne dormait pas du tout.

Donc c’est ce qui s’est passé… Il ne peut en parler à personne d’autre… Cependant, sans le vouloir, Rodney a fini par porter un fardeau absurde sur son dos…

Quelque chose qui ne pouvait pas être réel s’était produit. Si Ouka était vraiment une épée magique, Kouichirou Mikoshiba avait dû visiter ce monde auparavant. Mais s’il y avait une chance que cela se soit produite, il n’y avait qu’une seule explication possible.

« L’organisation… ? », demanda Menea.

Rodney acquiesça sans mot dire. D’innombrables pays se disputaient la domination du continent occidental. Mais seules quelques rares personnes savaient que contrairement à ces pays, qui se battaient ouvertement, deux groupes se battaient pour le contrôle du continent en coulisse.

L’un d’eux était le groupe auquel Rodney était associé : l’Église de Meneos. Cette institution religieuse était impliquée dans d’innombrables activités parmi les nombreuses églises qui parsemaient le continent. Son pouvoir et son influence s’étendaient au-delà de la portée d’un seul pays, et certaines de ses actions l’avaient fait apparaître comme le dirigeant de facto du continent.

Leur objectif était de freiner l’escalade de l’hostilité entre les différents pays et de maintenir l’ordre. Ou, du moins, tel était leur but avoué. La vérité était très différente. Convoquer des gens de Rearth et les asservir n’était que la plus élémentaire de leurs méthodes. L’enlèvement, l’assassinat et les activités subversives faisaient partie intégrante de leur mode opératoire.

La triste vérité était que même s’ils avaient l’intention de maintenir la paix, les platitudes et la bonne volonté ne les mèneraient nulle part. Mais même ainsi, une fois que les méthodes d’une personne allaient trop loin, leurs actions devenaient des crimes. Et à cet égard, ils n’étaient pas tant une organisation religieuse qu’une société secrète.

Mais même l’Église de Meneos avait un rival à affronter. Ou plutôt, la rumeur disait qu’un tel rival existait. Ce groupe était simplement appelé « l’organisation ». L’Église de Meneos avait entendu parler de son existence il y a plusieurs décennies, et depuis lors, elle avait consacré une grande partie de son abondante main-d’œuvre et de ses fonds pour l’étudier.

Pourtant, ils avaient eu beau enquêter sur ce groupe mystérieux, ils n’avaient rien trouvé sur l’identité de ses agents, sans parler de son chef. Ils n’avaient aucune idée de l’endroit où pouvait se trouver sa base. Certains des dirigeants de l’église doutaient même de son existence.

Nous pourrions être terrifiés par une illusion…

Mais Rodney et Menea savaient qu’elle existait, et connaissaient l’étendue de son pouvoir et de son influence… Parce que c’était cette organisation qui avait poussé Rodney et Menea à abandonner leur pays.

L’organisation agissait fondamentalement en coulisses, dissimulant son existence aux yeux de tous. Ils n’avaient presque jamais agi au grand jour. Mais leur force était si grande que les ordres de chevaliers d’un seul pays n’avaient aucune chance contre eux.

Rodney le savait, car ils s’étaient montrés capables de lutter à armes égales contre les Chevaliers du Temple, la plus grande force militaire que possédait l’Église de Meneos.

C’était arrivé il y a 10 ans. Leur invasion ayant été stoppée par une alliance formée par Helena Steiner et Arios Belares, l’expansionnisme brûlant de l’Empire d’O’ltormea n’avait pas été assouvi et ils avaient tourné leurs lances vers les royaumes du sud.

Sentant que leurs mouvements constituaient une menace, l’Église de Meneos coopéra avec le Saint Empire de Qwiltantia et envoya une expédition pour aider les royaumes du sud à former un front contre O’ltormea.

C’est ce qu’on avait appelé la bataille d’Indigoa, une escarmouche qui avait rivalisé avec la première bataille de Notis par sa férocité. Ce fut là que l’Église de Meneos rencontra une certaine unité aux mains de laquelle elle subit une défaite cuisante, une rencontre qui leur fit reconnaître, sans aucun doute, que l’organisation existait.

Cinq mille chevaliers réguliers avaient été déployés pour cette expédition, ainsi que 5000 autres Chevaliers du Temple. Cela représentait un cinquième des forces totales que l’Église de Meneos possédait. À première vue, le simple nombre de cette armée signifiait qu’il fallait compter avec elle.

Après tout, les Chevaliers du Temple étaient bien plus qualifiés et compétents que les chevaliers des petits pays. Selon les normes de la guilde, la force de leurs chevaliers moyens était d’environ quatre, et les chevaliers formant le noyau des ordres de chevaliers étaient de niveau cinq et plus.

Traduit aux normes d’un ordre de chevaliers, cela signifiait que leur rang était extrêmement élevé. En revanche, un chevalier ordinaire de la garde impériale d’O’ltormea n’était que de niveau trois. Ce seul fait montrait à quel point les Chevaliers du Temple étaient forts.

Mais même cet ordre d’élite fut complètement décimé.

Pire encore, le capitaine des Chevaliers du Temple fut tué par l’ennemi. Le niveau de ce capitaine était de niveau six, un niveau que seuls peuvent atteindre ceux qui sont capables d’activer le sixième chakra situé entre les sourcils, le chakra Ajna. Très peu de personnes pouvaient réaliser cet exploit, et la force de ce capitaine était comparable à celle de milliers de personnes.

Aussi, la nouvelle qu’un guerrier aussi transcendant tombait trop facilement au combat fut un grand choc pour les dirigeants de l’Église de Meneos. Principalement parce qu’ils ne savaient rien de l’affiliation officielle de l’unité ennemie, sans parler de l’identité de l’homme qui tua le capitaine.

Les archives officielles disaient qu’il s’agissait d’une unité mixte rassemblée par la guilde, mais l’Église de Meneos savait qu’il valait mieux ne pas avaler cette histoire. Si cela était vrai, cela signifiait qu’une personne qui était fondamentalement l’une des personnes les plus fortes du monde se promenait parmi les aventuriers et les mercenaires de la guilde. C’était évidemment une information que l’Église de Meneos ne pouvait pas tolérer alors qu’elle recherchait la stabilité du continent.

Ce fut alors que l’église admit l’existence de l’organisation qui était, jusqu’alors, une simple rumeur. Et depuis, elle utilisa tout le pouvoir dont elle disposait sur le continent pour rassembler des informations sur elle. Mais malgré cela, l’organisation restait toujours aussi obscure et inconnue. Où étaient-ils situés, quelle était la taille de leur groupe, quels étaient leurs objectifs… tout était enveloppé de ténèbres.

Il était clair que cette organisation possédait une grande influence.

Je ne sais pas si ce Kouichirou Mikoshiba est un membre de l’organisation ou s’il a un lien quelconque avec eux, mais… s’il l’est, c’est la pire chose qui puisse arriver.

Après tout, pour autant que Menea le sache, l’Église de Meneos n’avait jamais fait d’efforts pour développer une technique permettant de renvoyer les habitants d’autres mondes sur Rearth. Même une seule invocation coûtait une petite fortune en termes de catalyseurs nécessaires pour faciliter le rituel. Si quelqu’un voulait renvoyer un autre Rearth chez lui, cela coûterait au moins la même somme en frais.

De plus, le nom du dieu Rearth n’était pas connu dans ce monde, donc toute tentative de ramener un étranger chez lui serait inutile à moins de découvrir le nom de ce dieu. Cela constituerait en soi un projet d’envergure nationale, nécessitant beaucoup de matériel et de main-d’œuvre. L’entreprise nécessiterait des fonds rivalisant avec le budget militaire d’un pays.

Mais si quelqu’un était assez aimable pour vouloir ramener un étranger chez lui, il ne le convoquerait pas pour commencer. C’était vrai pour toutes les nations de ce monde, pas seulement pour le continent occidental.

Dans ce cas, il y avait deux possibilités pour expliquer le mystère de Kouichirou Mikoshiba. La première était qu’il soit tombé d’une manière ou d’une autre sur un interstice entre les mondes, et que par un coup de chance inégalé, il soit revenu à Rearth avec deux épées de thaumaturgie à la main. L’autre était que cette organisation avait développé une méthode pour ramener les étrangers sur Rearth.

Les deux options étaient absurdes, mais la dernière semblait beaucoup plus réaliste que d’avoir la chance de réaliser l’impossible. Et le plus problématique était que si les gens de l’Église de Meneos l’apprenaient, ils arriveraient à la même conclusion.

Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas laisser cette affaire s’ébruiter…

L’église traitait la question de l’organisation avec une extrême prudence. Si l’on découvrait qu’Asuka détenait des informations sur l’organisation, ils se souciaient peu de son bien-être ou de sa survie. Elle serait soumise à un interrogatoire implacable et sans pitié. Et à la fin, elle mourrait probablement sous la torture.

Non… Vu son apparence et son statut de Rearth, les membres de l’église pourraient même en faire leur jouet. On disait que les enfants nés d’un autre monde avaient tendance à hériter facilement des traits de leurs parents. En effet, beaucoup de Chevaliers du Temple avaient du sang Rearth qui coulait dans leurs veines, ce qui donnait du crédit à cette théorie.

La mort par torture ou être le jouet de quelqu’un. Aucune de ces options n’était celle que Menea, qui se considérait comme une sorte de sœur d’Asuka, voulait voir dans le futur de cette fille.

« Alors… Qu’as-tu l’intention de faire ? », demanda-t-elle.

Rodney hausse les épaules.

« C’est bien là le problème… Rien ne me vient à l’esprit. As-tu une idée ? »

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Partie 3

Menea secoua la tête. Elle ne trouvait pas d’idées non plus. Même sans la question de l’organisation, laisser Asuka ici dans la capitale sainte était encore trop dangereux. Son apparence seule attirait inutilement l’attention sur elle, et même sans cela, la défendre des animaux qui rôdaient tout autour d’eux était le maximum que pouvait faire Menea.

Récemment, même les principaux capitaines des Chevaliers du Temple lui avaient fait des avances. Heureusement, Rodney avait sa position de chef de dix des ordres de chevaliers ordinaires de l’Église de Meneos, ainsi que ses relations avec Tarja. Il connaissait également plusieurs cardinaux et même l’archevêque. Lesdits chevaliers ne pouvaient rien faire de trop énergique.

Malgré cela, l’adhésion de Rodney à la doctrine et à une vie de pauvreté honorable signifiait que beaucoup de gens le considéraient comme une nuisance, et au pire, il pouvait lui-même être blessé par les conflits qui éclataient. Le souvenir de la façon dont Rodney avait été envoyé en mission de longue durée avec une petite force de soldats pour le punir pour avoir frappé un cardinal odieux était encore présent dans la mémoire de Menea. Si ses proches n’avaient pas tiré quelques ficelles, Rodney aurait gâché le reste de sa vie dans les terres reculées de Beldzevia.

Mais même ainsi, faire ce qu’ils avaient initialement prévu et envoyer Asuka dans le monde avec un peu d’argent était un choix douteux. Il n’y avait pas beaucoup de problèmes en termes de capacités, même si elle avait du mal à suivre l’entraînement des Chevaliers du Temple. Elle avait probablement un potentiel latent, et avec quelques mois de plus, elle pourrait devenir assez compétente pour servir comme soldat.

C’était cependant tout ce qu’elle avait. Elle avait peut-être le pouvoir, mais il lui manquait le cœur pour l’utiliser, et cela changeait tout. Cette capacité de tuer un autre sans se soucier des apparences. Ou peut-être qu’on pourrait simplement appeler ça de la détermination. Quel que soit le nom qu’on lui donnait, elle n’avait pas ce genre de force. Peu importe le degré de raffinement de la technique d’une personne ou la précision de l’arme qu’elle possédait, tout cela était inutile s’ils n’étaient pas utilisés.

J’ai entendu dire que le Japon est un pays pacifique, mais…

Sa mère lui avait parlé de ce pays lorsqu’elle était enfant, et à l’époque, elle pensait qu’un tel pays idyllique ne pouvait pas vraiment exister. Mais d’après ce qu’elle avait vu et entendu d’Asuka, les descriptions de sa mère étaient apparemment proches de la vérité.

Elle se souvenait de la réaction effrayée d’Asuka à l’idée de devoir étrangler un coq mort. Une telle fille n’avait pas sa place sur un champ de bataille où elle devrait combattre d’autres personnes. Cela n’avait rien à voir avec le fait qu’elle soit forte ou faible, Asuka ne serait d’abord jamais entrée dans cette arène.

Mais ce n’était pas un problème que l’on pouvait résoudre simplement en lui parlant. Cela se résumait à son mode de vie, à ses croyances fondamentales. Après que Menea lui ait montré le côté sombre de la capitale sacrée, comme une façon de lui apprendre les réalités de ce monde, Asuka semblait avoir compris quelque peu les choses. Mais honnêtement, elle était loin d’avoir assez de détermination pour se débrouiller seule dans ce monde, même après ça.

« Au fait, qu’en est-il de Tachibana ? J’ai entendu dire que tu es allé boire avec lui. »

Menea avait mentionné l’autre Rearth qu’ils avaient pris sous leur protection aux côtés d’Asuka.

Aussi cruel que cela puisse paraître, Tachibana était un homme d’âge moyen. Menea était trop occupée à s’occuper d’Asuka, une femme, comme elle, pour se soucier de lui. Bien sûr, elle savait que depuis la guérison de sa blessure à la tête, Tachibana avait travaillé comme assistant de Rodney.

Menea était le lieutenant de Rodney, donc elle parlait à Tachibana assez souvent. Mais c’était purement sur la base de leurs fonctions, ils n’étaient pas assez proches pour qu’elle sache ce que cet homme ressentait.

« Tachibana… va bien, je crois. Je suis sûre qu’il a beaucoup de choses en tête, mais apparemment il s’est fait à l’idée qu’il devra continuer à vivre dans ce monde. Il fait aussi son travail assez bien. Si bien, en fait, que ça ne me dérangerait pas de le prendre comme assistant officiel. En supposant qu’il ne s’y oppose pas. »

Menea ne put s’empêcher de regarder Rodney avec des yeux ronds à cette évaluation. Certes, l’homme s’occupait rapidement de la paperasse, mais elle ne pensait pas que Rodney l’approuverait à ce point. Mais en y réfléchissant bien, elle ne pouvait trouver aucun défaut dans le travail de Tachibana. Elle-même avait l’impression que la pression du travail sur elle avait été quelque peu réduite.

« Et s’il doit être ton assistant officiel, il pourrait éventuellement prendre un poste de chevalier… Je vois… Eh bien, apparemment, il a été habitué à travailler dur avant même de venir ici… »

L’autre jour, les chevaliers avaient organisé des exercices pour s’entraîner au combat à mains nues. En repensant à l’un des matchs, Menea avait lentement hoché la tête. Au début, il était un peu maladroit, mais à la fin du match, Tachibana avait montré une grande habileté dans les clés de bras qui utilisaient le principe de l’effet de levier, désarmant sans effort un chevalier de deux fois sa taille. Les autres chevaliers semblaient avoir reconnu ses compétences depuis.

En plus de cela, il avait été officier de police pendant des années, donc malgré les apparences, il était également très doué pour gérer la paperasse. De ce point de vue, c’était un bon parti pour Rodney. Le fait d’être le chef des ordres des chevaliers signifiait qu’il pouvait désigner un des chevaliers comme son assistant personnel sans trop de problèmes.

Bien sûr, Rodney n’allait pas ordonner à Tachibana de travailler sous ses ordres pour payer sa dette de gratitude. Mais il ne pouvait pas nier qu’il serait tragique de laisser tout ce talent se perdre.

C’est peut-être mieux ainsi, vu ce qui va se passer…

Menea n’avait pas d’objection particulière à ce que Tachibana devienne un assistant officiel de Rodney. Elle savait qu’il aurait besoin de subordonnés fiables s’il voulait atteindre son objectif de réformer l’Église de Meneos en accord avec ses croyances originales en tant que groupe religieux. Mais elle ne pouvait s’empêcher de douter que le fait de s’impliquer dans cette affaire soit bénéfique pour Tachibana.

Après tout, leur intention initiale était de lui donner de l’argent et de l’envoyer loin de Menestia avec Asuka. Alors l’impliquer dans leurs problèmes justes parce qu’il s’était avéré être étonnamment capable serait-il la bonne chose à faire ?

Cependant, l’échange entre Rodney et Menea s’arrêta brusquement à cet endroit.

« Excusez-moi ! », cria une voix, suivie d’un coup vigoureux à la porte.

Sans attendre la réponse de Rodney, la personne même dont ils discutaient, Tachibana, entra dans la pièce. Menea haussa un sourcil en voyant l’entrée impolie de Tachibana, mais elle savait qu’il valait mieux ne pas le faire remarquer maintenant.

« Qu’est-ce qui ne va pas, Tachibana ? Ton visage est tout rouge », dit Rodney.

Il s’était probablement précipité, car son visage était rouge et il était clairement essoufflé.

« Eh bien, je ne sais pas ce qui s’est passé, mais boit ça, » dit Rodney.

Ce dernier versa de l’eau dans une tasse à partir d’un pichet posé sur sa table, puis le tendit à Tachibana.

« Aah, merci, monsieur… », dit Tachibana tout en engloutissant l’eau.

« Alors, que s’est-il passé ? », demanda Menea tout en inclinant la tête de manière interrogative.

Elle ne pouvait pas dire qu’elle le connaissait depuis si longtemps, mais malgré tout, c’était la première fois qu’elle voyait Tachibana si agité.

« Regardez ça ! », dit Tachibana en présentant quelques documents à Rodney.

« Mm, qu’est-ce que c’est ? », demanda Rodney en regardant le document.

C’était un rapport provenant du réseau d’information que l’Église de Meneos avait étendu sur tout le continent. Quelqu’un du bureau des renseignements l’avait probablement livré à lui, non scellé et tout. Appeler cela un échec dans la sécurité de l’information serait un euphémisme, mais les clercs avaient une façon d’être extrêmement négligents quand il s’agissait de transférer des informations au sein du groupe.

« Mm… qu’en est-il, Tachibana ? », demanda Rodney avec une pointe d’appréhension.

Il l’avait survolé, mais les informations semblaient assez standard. Les royaumes du sud étaient, comme toujours, impliqués dans un conflit frontalier ou un autre. L’Empire d’O’ltormea envahissait ses pays voisins, mais ce n’était pas une surprise.

La seule partie qui semblait légèrement intéressante était le rapport de situation concernant le front O’ltormea-Xarooda, qui était dans l’impasse depuis un an maintenant. Mais ce champ de bataille se trouvait de l’autre côté du continent. Rodney ne comprenait pas ce qui faisait paniquer Tachibana à ce point.

« Pas ça, lisez cette partie-là ! »

Tachibana lui arracha le document des mains et pointa du doigt une ligne particulière.

« Qu’est-ce que tu… », marmonna Rodney.

Mais en lisant la ligne spécifiée par Tachibana, il sentit une secousse lui parcourir l’échine.

Le nom de l’homme écrit là, fit presque tomber Rodney de son siège.

« Ce n’est pas possible… Comment est-ce possible… ? », murmura-t-il, surprit.

Voyant sa surprise, Menea lut la section que Tachibana lui a indiquée.

Une bataille décisive dans la guerre O’ltormea-Xarooda… Attends, non, ce n’est pas la bonne partie… Les renforts de Rhoadseria comprennent le général Helena Steiner et un homme mystérieux, Ryoma Mikoshiba… Les renforts de Myest dirigés par Ecclesia Marinelle…

Ces informations n’avaient aucun sens. Bien qu’ils aient pu se trouver sur le même continent, les détails de cette guerre ressemblaient à des événements se déroulant dans un tout autre monde. Mais après l’avoir lu une fois de plus, un des noms m’a semblé étrange.

Attendez, Ryoma Mikoshiba ? Mikoshiba… Mikoshiba !

C’était un nom qui n’aurait pas dû figurer sur ce document. Mais le réseau de renseignements de l’Église de Meneos était inégalé dans son domaine et bien plus puissant que celui de n’importe quel pays individuel, donc la probabilité qu’ils fassent un rapport erroné était hautement improbable.

Ce genre de coïncidence est-il vraiment possible ?

À ce moment-là, Menea sentit une sorte de grande volonté se tordre dans l’obscurité.

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