Convocation
Partie 4
Il était confronté à une lycéenne, et à l’une des plus attirantes et influentes de sa classe. Il ne voulait pas refuser d’une manière qui exprimerait son mécontentement trop fermement, afin de ne pas la rendre hostile. Ainsi, tout en veillant à garder le ton et les mots aussi délicats que possible, Ryoma exprima son refus aussi clairement qu’il le pouvait. Surtout que la mention du karaté avait obligé les autres camarades à écouter leur conversation.
Bien que cette école se concentrait sur le cursus universitaire, elle était également très sérieuse en matière de sport. Leurs réalisations en matière de kendo avaient été particulièrement remarquables. Ils remportaient régulièrement les tournois régionaux et, bien qu’ils n’avaient jamais remporté les compétitions nationales, il n’était pas rare de voir cette école classée parmi les 16 meilleures ou les 8 première.
Alors que se passerait-il lorsqu’un nouvel étudiant musclé comme Ryoma Mikoshiba devait s’inscrire à l’école ?
Comme on pouvait s’y attendre, tous les clubs imaginables avaient immédiatement commencé à essayer de le recruter, lui et ces 190 centimètres ou plus de muscle trempé qui l’accompagnaient. Ces muscles n’étaient pas ceux d’un culturiste, développé pour se faire valoir, mais une armure de chair souple, garnie de la bonne quantité de graisse. Il était évident qu’il avait obtenu cela en s’entraînant dans un club.
« Hmm, eh bien, je suppose que je ne peux pas te forcer à venir aujourd’hui. Néanmoins, j’espère que tu vas au moins y penser. Nous pourrons certainement gagner les tournois nationaux si tu t’inscris ! »
Cela dit, elle s’était retournée joyeusement et pour rejoindre le bureau de son amie. Elle savait probablement déjà par expérience que le harceler obstinément ne lui apporterait rien de bon.
Elle le fait jour après jour, et elle n’abandonne toujours pas… Peut-être que j’y réfléchirais si elle m’invitait à déjeuner comme une personne normale…
Souriant avec ironie devant cette silhouette qui se retirait, Ryoma posa sa main sur la porte de la classe.
Honnêtement, le bento d’Asuka n’était pas vraiment un problème. Il pouvait simplement acheter du pain ou un autre bento, mangeant ainsi avec eux, et garder celui d’Asuka comme collation pour plus tard. Mais il y avait une autre raison majeure pour laquelle Ryoma n’avait pas fait ce choix.
En termes simples, leurs tentatives répétées de le recruter dans leurs clubs étaient irritantes. Il ne pensait pas que les clubs sportifs ou d’arts martiaux avaient quelque chose de répréhensible en soi, pas plus qu’il n’avait l’intention de juger les gens qui leur avaient consacré leur vie.
Mais maintenant qu’ils étaient tous devenus des sports glorifiés, divisés par catégories de poids et basés sur le gain de points, Ryoma ne les trouvait pas du tout intéressants, et n’avait pas envie de les pratiquer uniquement pour montrer sa force.
Pour Ryoma, les arts martiaux étaient un outil servant à tuer un adversaire et à l’empêcher de se faire tuer par ses mains. Ce n’était pas quelque chose dont il voulait faire un spectacle, et ne le voyait pas comme quelque chose avec quoi il pourrait se montrer supérieur. Mais il savait très bien que cette ligne de pensée ne s’alignait pas avec le Japon pacifique d’aujourd’hui, et il n’était pas étonnant de voir à quel point il ne serait pas compris ou accepté, même s’il essayait de l’expliquer avec des mots.
La majorité des gens ne voyaient dans les arts martiaux rien de plus qu’un sport, ou encore une forme d’entraînement mental ou un élément de culture à préserver. Et il y avait une différence aussi grande que le ciel et la terre entre cette ligne de pensée et celle de Ryoma, un fossé qui ne pouvait être comblé ou médiatisé.
Ryoma refusa donc tout simplement, ne disant rien d’autre, et les jours ensoleillés comme celui-ci, il se réfugiait sur le toit pour manger son déjeuner et faisait une sieste jusqu’à ce que la cloche sonne. C’était mieux pour tout le monde de cette façon.
« D’accord, alors, à plus tard. »
Ryoma avait lancé ces mots en direction des regards curieux de ses camarades de classe tout en quittant la salle.
C’était vrai, ce jour-là était le même que tous les autres. Mais ce temps de paix ne dura pas longtemps.
C’était arrivé juste au moment où Ryoma montait l’escalier menant au toit. C’était à ce moment que son long voyage avait commencé.
« Hein ? »
Soudainement, Ryoma ne sentait plus le sol sous ses pieds.
Son corps avait commencé à tomber verticalement. Ce n’était pas qu’il avait raté une marche. Les marches de l’escalier qu’il montait avaient soudainement disparu. Ryoma tendit la main, essayant de s’agripper au bord de l’escalier afin de retrouver son équilibre, mais le reste de l’escalier avait apparemment disparu avec les marches, et ses mains ne tâtonnaient que l’air.
En levant les yeux, il avait vu la lumière de la lampe du bâtiment de l’école devenir de plus en plus petite, pour finalement disparaître complètement. Il n’arrêtait pas de tomber dans cet abîme sombre.
« H-Hein ? »
Ryoma remarqua rapidement un changement, à un moment donné, il semblait s’élever au lieu de tomber.
« Est-ce un rêve ? Ou une sorte d’hallucination ? », murmura Ryoma à lui-même.
« Qu’est-ce qui m’arrive ? »
Une question naturelle venait de se poser. La chute était parfaitement conforme aux lois de la physique. La probabilité que cela se produise était faible, mais une construction défectueuse ou un puissant tremblement de terre pourrait faire se détacher les marches de l’escalier. Mais le fait qu’il ait flotté défiait toute logique. Les gens n’étaient pas capables de voler seuls, peu importe comment ils pouvaient contrôler leur corps.
Ryoma leva les yeux. Il remarqua qu’à un moment donné, la lumière avait commencé à briller sur lui. Son corps flottait, et Ryoma s’était retrouvé volant dans cette lumière.
« Qu’est-ce qu’il se passe ? L’école… ne possédait pas d’endroit comme ça, pas vrai… ? »
Tout en fixant la lumière, Ryoma regarda autour de lui.
Du point de vue de Ryoma, cela aurait dû être l’école, ou dû moins quelque chose que l’on pourrait trouver n’importe où dans ses locaux. Lorsqu’il avait vu l’espace en forme de sanctuaire s’étendre devant lui, il avait d’abord pensé que c’était une sorte d’installation de l’école. Mais dès qu’il avait vu les gens autour de lui, cette idée avait complètement disparu de son esprit.
Ses yeux s’étaient lentement adaptés à la lumière, et les silhouettes confuses dans la pièce s’étaient peu à peu éclaircies.
Qui sont ces gens… ? Des enseignants ? Non, cela n’est pas possible…
Cinq hommes se tenaient devant Ryoma. L’un d’eux était un vieil homme. Il était porteur d’un vêtement qui ressemblait à une robe lourde. Elle était brodée de fils d’argent et d’or. C’était le genre d’habits qu’on pouvait s’attendre à voir dans un film basé sur l’Europe du Moyen Âge. Mais ce n’était pas vraiment le problème ici. Le problème résidait dans les quatre objets brillants et tranchants tenus par les quatre personnes qui se tenaient derrière le vieil homme.
Les hommes avaient un poids et un physique qui n’étaient pas très différents de ceux de Ryoma, et ils avaient l’air bien entraînés. Au vu de l’épaisseur de leurs bras et de leurs cuisses, il comprit en un instant que ce n’étaient pas des amateurs. Ils étaient vêtus d’une armure métallique intégrale et portaient sur la tête ce qui ressemblait à d’anciens casques romains, le galea. Ils avaient des panaches sur le dessus et des protège-nez en forme de T. Ils tenaient dans leurs mains des hallebardes.
Ryoma ne pouvait pas dire au premier regard si leur armure était authentique ou non, mais ayant vu son grand-père brandir une véritable épée à l’entraînement d’innombrables fois, ses yeux pouvaient dire que les hallebardes dans leurs mains étaient de véritables armes de guerre. Et si c’était le cas, cela signifiait très probablement que les épées gainées à leur taille étaient aussi de vraies armes.
S’il ne s’agissait que de leur armure, Ryoma aurait tendance à croire que ce n’était que des costumes et des accessoires. Ils avaient peut-être un design inhabituel, mais il n’était pas impossible d’acheter de faux accessoires de ce genre au Japon si on le souhaitait. Bien sûr, il n’y en avait pas beaucoup qui les achèteraient, et même là, il était peu probable qu’ils les porteraient réellement.
Mais bien que ce soit invraisemblable, ce n’était pas impossible, et Ryoma n’était pas considéré comme une personne qui ne pourrait jamais arriver dans la vie réelle.
Mais alors qu’il ne pouvait deviner le fait qu’il se trouvait dans un autre monde, la prise de conscience que cet endroit ne faisait pas partie de la vie quotidienne auxquels il était habitué l’avait frappé avec une clarté parfaite et indéniable. Cela était dû à la manière dont les hallebardes se dirigeaient vers lui, devenant un éclat mortel. Ayant aidé à entretenir et à aiguiser l’épée précieuse de son grand-père, il était tout à fait capable de distinguer une vraie lame d’une fausse.
Et pour couronner le tout, Ryoma n’arrivait pas à croire que quelqu’un puisse rassembler de vraies hallebardes pour faire ce genre de blague. Il n’imaginait pas posséder une arme comme celle-là sur lui au Japon, qui se vantait de sa tranquillité et de son pacifisme, et même dans le reste du monde moderne. Même les cambrioleurs et les meurtriers ne se donneraient pas la peine de trouver une hallebarde. Ils se serviraient peut-être d’un couteau, mais pas d’une arme de ce genre.
Et finalement, l’intention meurtrière émanant de leur corps était réelle. Ryoma avait étudié les arts martiaux depuis son plus jeune âge, il pouvait ressentir le même genre d’aura chez son grand-père. La sensation familière piqua la peau de Ryoma.
Merde, ils sont sérieux. Je n’aime pas le regard de ces gars…
Leurs mouvements de jambes et la façon dont ils manipulaient leurs hallebardes donnaient l’impression qu’ils avaient de l’expérience. Ils étaient, sans aucun doute, des soldats professionnels entraînés et familiers avec l’utilisation de cette arme unique.
À l’instant où il s’en était rendu compte, un interrupteur semblait s’allumer dans l’esprit de Ryoma. Comme si on passait de l’ordinaire à l’extraordinaire. Il pouvait pratiquement entendre le bruit de sa vie quotidienne paisible s’effondrer en poussière…
Le vieil homme vêtu de la robe parla à l’un des soldats qui se tenaient derrière lui, fixant son regard sur Ryoma.
« Il semblerait que cette fois nous ayons attrapé un beau spécimen dans notre convocation. »
L’homme à qui il avait parlé avait un plumage rouge sur le dessus de son casque. Des quatre soldats présents, il s’agissait très probablement du capitaine du groupe.
« Non, Seigneur Gaius, je crois qu’il est trop tôt pour porter ce jugement. Son physique est impressionnant, bien sûr, mais les premières impressions peuvent être trompeuses… Après tout, nous en avons convoqué plus d’une centaine jusqu’à présent, mais moins de dix se sont révélés utiles. »
Les yeux des hommes considéraient Ryoma avec le poids d’un marchand qui évaluait la valeur de sa marchandise.
« Hmm, c’est vrai… Qu’il en soit ainsi. Nous découvrirons à quel point il est utile une fois que nous l’aurons élevé. »
Hochant la tête aux paroles du jeune homme, le vieux fit un geste du menton en direction de Ryoma.
« Dépêchons-nous de lui graver le sceau… Allez-y. »
Entendant ses paroles, les trois autres soldats s’approchèrent lentement de Ryoma en formation, l’entourant tout en gardant leurs hallebardes pointées dans sa direction.
Qui sont ces gens ? Qu’est-ce qui se passe ici !?
Ryoma lutta pour ne plus penser aux questions qui pesaient sur son esprit. En ce moment, ce que ces gens avaient l’intention de faire de lui n’était pas quelque chose qu’il pouvait savoir. Après tout, il y a encore quelques instants il s’occupait encore de ses problèmes scolaires. Être mis dans une situation où il fixerait des armes en un clin d’œil n’était pas quelque chose qu’il pouvait comprendre aussi facilement.
Merci pour le chapitre.
Beau travail. Je signale un s oublié dans les premiers paragraphes : école classée parmi les 16 meilleures ou les 8 première.
La conversation en fin du chapitre a été coupé dans la version manga alors qu’elle explique la réaction de notre grand baraqué 🙂