Rougo ni Sonaete Isekai de 8-manmai no Kinka wo Tamemasu – Tome 1 – Chapitre 4

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Chapitre 4 : Préparation

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Chapitre 4 : Préparation

Partie 1

Colette s’était réveillée peu après Mitsuha, et le chaos s’en était suivi. Elle avait poussé un gémissement et s’était lancée sur Mitsuha, et bien trop rapidement pour que la fille plus âgée puisse éviter son câlin d’ours. Mitsuha avait gémi, puis commença à frapper sur son épaule dans une tentative désespérée pour signaler sa reddition. Les parents de Colette, en entendant le vacarme, s’étaient précipités dans la pièce.

« Stop, stooop ! Aïe, ça fait mal ! Tu es en train de me briser ! », cria Mitsuha.

Colette finit par lâcher prise.

« M-Mitsuha ! Tes mots ! », répondit Colette en état de choc.

Ses parents avaient l’air tout aussi abasourdis. Heureusement, Mitsuha avait déjà trouvé une explication.

« Tout d’abord, merci pour tout ce que tu as fait pour moi, Colette. En fait, j’ai appris ta langue dans mon pays. Je ne pouvais pas le parler parce que j’avais perdu la mémoire. Mais tout à l’heure, tout m’est revenu. »

« Vraiment ? Je suis si heureuse, Mitsuha ! »

Tout en pleurant fort, Colette s’accrocha de nouveau à Mitsuha. Ses parents hochèrent la tête, les yeux pleins de larmes. Ce sont des gens si gentils, pensa Mitsuha, toute souriante. Lorsque Colette s’était finalement calmée, Mitsuha avait décidé qu’il était temps de recueillir des informations.

Parce qu’elle venait d’un autre monde, Mitsuha devait être prudente lorsqu’elle parlait d’elle-même. C’était pour cette raison qu’elle avait inventé sa propre histoire : elle venait d’un pays lointain, et pour des raisons que l’on avait commodément dissimulées, elle avait traversé la mer et était venue sur ce continent. Elle avait délibérément choisi de dire « ce continent » plutôt que « ce pays », pour autant qu’elle le sache, leur région actuelle aurait pu être enclavée. Mitsuha et son groupe avaient été séparés lors d’une attaque par des bêtes sauvages, mais sinon elle ne se souvenait de pas grand-chose, seulement qu’elle s’était retrouvée dans la maison de Colette au moment où elle se réveillait.

Mitsuha ne connaissait pas non plus le système de caste de ce monde, alors elle avait évité d’utiliser le mot « noble », mais elle les avait tout de même amenés à croire qu’elle était une membre de haut rang de la société. Son choix était un peu risqué, car pour le dire de manière simple, les relations entre la noblesse et les roturiers n’étaient pas toujours bonnes, ce qui aurait pu être perturbant pour Colette et sa famille. Heureusement, ils ne semblaient pas s’en soucier.

En toute honnêteté, c’était logique, s’était dit Mitsuha. Les vêtements qu’ils m’avaient trouvés n’étaient pas du tout ceux d’un fermier, alors ils ont probablement pensé que c’était quelque chose comme ça. Sinon, il se pourrait peut-être qu’ils ne soient en conflit qu’avec la noblesse locale, et qu’ils ne se soucient pas du tout des nobles étrangers. Ou alors ils ne comprennent rien du tout, si vous voyez ce que je veux dire.

Une fois son histoire terminée, c’était au tour de Mitsuha de poser des questions sur sa situation. Je vais avoir toutes les infos dont j’ai besoin et plus encore ! Elle avait découvert qu’elle avait été inconsciente durant cinq jours. Près d’une semaine… Elle ne pouvait pas reprocher à Colette de s’inquiéter. Mitsuha n’avait aucune idée si c’était dû à l’épuisement et au choc ou si cela avait quelque chose à voir avec ce que la « chose » lui avait fait, mais elle ne se souciait pas vraiment des deux. De plus, ils n’avaient pas oublié de récupérer ses possessions — couteaux, lance-pierres et tout le reste. Comme c’est gentil.

De toute façon, les bêtes qu’ils avaient rencontrées étaient, en fait, des loups. Les villageois avaient rassemblé les cadavres et les avaient réduits en crocs, en fourrure et en viande, ne laissant pas une seule partie se perdre. Ils avaient fendu et mangé la viande, parce qu’elle aurait pourri autrement, mais les crocs et la fourrure n’avaient pas encore été utilisés. Il s’était avéré qu’ils avaient été mis de côté pour Mitsuha, avec un peu d’argent pour la viande. Aww, c’est si doux que ça va me donner des caries ! pensa-t-elle. Mais vu qu’ils croyaient tous qu’elle était sans le sou et qu’ils voulaient lui faire une faveur, il aurait été impoli de sa part de ne pas accepter. Je vais demander à quelqu’un de m’acheter les crocs et la fourrure.

Les villageois étaient extrêmement reconnaissants qu’elle a pu se débarrasser des loups avant qu’ils ne puissent blesser quelqu’un. C’était logique, surtout si l’on considérait que les animaux auraient pu facilement tuer l’une des femmes ou l’un des enfants du village. Colette, par exemple, n’aurait pas eu la moindre chance si elle avait été coincée seule. Mais Mitsuha n’était pas sûre d’avoir tué tous les loups. Ce sont des animaux de meute, n’est-ce pas ? Et vu que c’était une mère louve avec ses petits, il devrait donc y avoir un père aussi, non ?

Elle n’était pas encore convaincue que l’endroit était sûr, mais si les gens du coin le pensaient, elle n’allait pas les contrarier. Les loups d’ici étaient peut-être différents de ceux qu’elle connaissait. Peut-être qu’il était normal que les mères loups de la région emmènent leurs petits en voyage d’entraînement, ou peut-être qu’elle avait eu une séparation difficile et qu’elle ramenait les enfants dans la tanière de ses parents. Peu importe, ça n’a pas d’importance à ce stade, conclut-elle.

Une fois qu’elle avait été amenée ici, Mitsuha avait posé toutes sortes de questions sur le pays dans lequel elle se trouvait : combien valait la monnaie, qu’elle était la ville la plus proche, la capitale, son niveau de développement, etc. — bien sûr elle ne posait pas directement les questions — . Les paysans ne savaient pas grand-chose, évidemment, mais elle était satisfaite d’obtenir environ la moitié des connaissances que les paysans connaissaient par cœur. Quand elle avait terminé, elle avait une autre question qu’elle voulait vraiment poser, mais qu’elle ne pouvait pas faire : Comment se fait-il que Colette en sache plus que ses parents !?

Le troisième jour après son réveil, Mitsuha était allée à l’encontre des objections de sa petite gardienne et s’était promenée seule. Selon les villageois, lorsqu’ils l’avaient amenée des bois, elle était dans un état si terrible que Colette avait été complètement folle de rage. Mais ses blessures apparemment graves avaient guéri depuis, et maintenant on ne voyait qu’un petit bleu sur Mitsuha.

Pourtant, persuader Colette de la laisser partir seule s’était avéré être un défi. Elle avait donné plus de raisons que vous ne pouviez l’imaginer. Ce voyage solitaire était absolument positivement nécessaire pour Mitsuha. Finalement, Colette s’était repliée et était allée chercher du fourrage, même si elle avait jeté un coup d’œil en arrière au moins une douzaine de fois. Après sa disparition, Mitsuha avait vérifié si elle était vraiment seule, puis elle retourna chez elle sur Terre.

Whoa, j’ai manqué tellement d’appels, dit-elle en regardant son téléphone. Eh bien, je ne pouvais pas répondre. Tout le monde doit être mort d’inquiétude… Il vaut mieux que je leur réponde à tous.

Après ça, Mitsuha avait vérifié la boîte aux lettres. Ses factures étant toutes payées automatiquement, il n’y avait donc pas de problème. Elle s’était également rendue au poste de police local pour leur faire savoir qu’elle était saine et sauve. Ils l’avaient beaucoup aidée quand elle traitait avec son oncle et les délinquants qui essayaient de s’en prendre à son argent. Elle voulait apaiser les inquiétudes qu’ils auraient pu avoir au sujet de sa récente disparition.

Ensuite, elle avait apprécié en prenant son premier bain depuis longtemps, elle mit aussi des vêtements propres et s’était occupée de quelques autres tâches diverses. Elle ne pouvait pas laver les vêtements qu’elle portait, car cela risquerait de paraître étrangement propre, alors elle les avait laissés dans leur état actuel. Elle les enfilerait de nouveau quand elle retournerait dans l’autre monde. Il n’y avait pas non plus de raison d’aller faire du shopping puisqu’elle ne pouvait rien apporter à la maison de Colette. Tout ce qu’elle avait quand Colette l’avait trouvée, c’était un sac à bandoulière bon marché contenant un parapluie pliable, des mouchoirs en papier et un sac à provisions jetable. Patience, Mitsuha… Tu emporteras beaucoup de choses une fois que tu auras quitté le village.

Elle avait terminé ses affaires terrestres et était retournée au village bien avant le soir, mais Colette l’avait quand même interrogée sur ce qu’elle avait fait et où elle était allée. C’est quoi le problème, elle est revenue beaucoup trop vite ! Je suppose qu’elle s’est précipitée parce qu’elle s’inquiétait pour moi.

Mitsuha était tellement occupée à passer d’un monde à l’autre et à ses plans pour devenir riche qu’elle avait complètement oublié les hommes qui l’avaient approchée sur la falaise. Au moment où ils avaient poussé Mitsuha dans le vide, elle avait crié si fort que les couples voisins l’avaient vu tomber. Ils voulaient éviter d’être impliqués tant que les délinquants ne faisaient que la draguer, mais ils ne pouvaient ignorer un meurtre.

Après la chute de Mitsuha, la jeune fille du jeune couple avait poussé un cri strident, son petit ami avait pris des photos des auteurs, le vieil homme avait appelé la police, et sa femme avait pris des photos de leur voiture. C’était un travail d’équipe impressionnant. Les voyous avaient paniqué, criant que ce n’était pas de leur faute et d’autres bêtises de ce genre, puis ils avaient sauté dans leur voiture et ils s’étaient échappés. Mais avec tous les témoins et les photos, ils n’avaient pas mis longtemps à se faire prendre et arrêter. Tout le monde pensait que l’affaire était close.

Mais il s’était rapidement heurté à un mur parce qu’ils n’avaient pas pu trouver le corps de la victime. La police avait même vérifié tous les dossiers locaux à la recherche d’une personne disparue, mais n’avait trouvé personne qui correspondait à la description. Cela s’expliquait en partie par le fait que la victime était décrite comme un enfant allant à l’école primaire où au collège, de sorte que Mitsuha était complètement hors de portée des enquêteurs. Ils avaient plusieurs témoins et les aveux des criminels, mais la victime était une inconnue et son corps était introuvable. La police était perdue.

D’un autre côté, les trois hommes avaient obtenu ce qu’ils méritaient. Mitsuha serait sûrement morte sans sa collision étrange et fortuite avec l’être ancien. Le fait qu’elle ait survécu n’avait rien changé, ils avaient quand même commis un meurtre, il était donc juste de les punir comme il se doit. S’ils étaient relâchés, ils feraient sûrement la même chose et harcèleraient d’autres personnes, transformant d’autres innocents en victimes.

Après le décès de sa famille, Mitsuha avait mis fin à leur abonnement au journal. La télévision par câble et Internet étaient plus que suffisants pour elle. Les journaux se seraient aussi empilés rapidement, et elle n’aurait pas pu se donner la peine de les retirer, sans compter que le facteur les entassait toujours dans la boîte aux lettres comme s’il empaillait ses rêves brisés, pour que les gens puissent savoir si Mitsuha était à la maison ou non. Si certains types louches avaient découvert qu’elle n’était pas là aussi souvent, sa propriété aurait été en danger.

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Partie 2

Mitsuha n’était pas sur Terre lorsque l’incident de la falaise faisait la une des journaux, et même lors de cette dernière visite, elle avait été trop occupée à répondre à tous ses messages manqués pour regarder la télévision ou naviguer sur le Web. Elle n’avait pas eu l’occasion de voir l’histoire, et à son retour, tous les médias l’avaient complètement abandonnée. Mitsuha n’avait jamais entendu parler de l’enquête et n’avait même pas rappelé les hommes présents sur les lieux.

De retour dans l’autre monde, il était presque temps pour Mitsuha d’aller de l’avant. Sept jours s’étaient écoulés depuis son bref retour à la maison, et ses blessures avaient si bien guéri qu’elle avait dû cacher le fait qu’elles ne laissaient pas une seule cicatrice. Certains villageois avaient volontiers acheté les crocs de loup et la fourrure. Apparemment, les peaux de loups juvéniles étaient des marchandises de qualité, elles ne présentaient pas autant de dommages que la peau d’adulte, de sorte que les trois peaux que Mitsuha avait vendues lui avaient rapporté une jolie somme. Les acheteurs avaient aussi parlé de raffiner les matériaux et de les vendre à la ville voisine. Vous avez donc un contact avec une ville, se dit-elle.

Dotée de ses fonds nouvellement acquis, Mitsuha pouvait maintenant dire à tout le monde qu’elle voulait partir en voyage. Elle avait prévu de se rendre à la ville où résidait le seigneur local, puis de se rendre à la capitale à partir de là. D’après ce qu’elle avait appris, la ville du seigneur local n’était pas si impressionnante. Bien qu’elle ne soit pas aussi rurale que ce village, elle correspondait pourtant assez bien à l’image du village. Néanmoins, c’était la ville la plus développée de la région, le point de départ pour les calèches allant à la capitale et, surtout, le lieu où vivait le seigneur local.

Après sa rencontre avec les loups, Mitsuha s’était liée d’amitié avec d’autres villageois que Colette, ce qui l’avait aidée à apprendre beaucoup plus. Tous avaient pris soin de la remercier, et les aînés — pensant qu’elle ne pouvait pas bouger à cause de ses blessures — s’assirent pour discuter avec elle. Les villageois ne savaient pas grand-chose individuellement, mais une fois qu’elle avait tout rassemblé, elle avait obtenu une quantité impressionnante d’informations. En fin de compte, elle avait appris à mieux connaître la ville voisine et la famille du seigneur local que toute autre personne présente.

Je vais commencer par embobiner le seigneur, décida Mitsuha.

Selon les villageois, c’était une personne étonnamment bonne pour un noble. Il chérissait ses sujets, n’hésitait pas à reporter les impôts en cas de mauvaises récoltes… En gros, les gens avaient touché le jackpot avec lui. En plus de cela, il était comte, ce qui signifiait qu’il avait aussi beaucoup d’influence dans la capitale. Après tout, si vous ignoriez les ducs, qui étaient de sang royal, les seuls au-dessus des comtes étaient les marquis.

La ville est à environ dix-huit milles de là, pensa Mitsuha. Du moins, c’est ce que je pense d’après ce que les villageois m’ont dit. Mais s’ils couraient à la vitesse de 19 km à l’heure, alors ces trente kilomètres pourraient facilement être faits ! Ugh, d’accord, assez de ça. Pour l’instant, je dois me concentrer sur le fait de gagner les faveurs du comte pour pouvoir me rendre à la capitale en calèche. J’ai vraiment besoin de son soutien.

Quoi ? Vous vous demandez comment je vais payer la voiture et me débrouiller dans la capitale ? Bien sûr, l’argent que j’ai ici ne suffira pas, mais encore une fois, c’est là que le compte entre en jeu.

De plus, elle n’avait pas encore surmonté son plus gros obstacle.

« NON, NON, NON, NOON ! », hurla Colette.

« NE PARS PAS ! »

Mitsuha ne pouvait pas se résoudre à blâmer la fille. Elles avaient toutes les deux sauvé la vie de l’autre, et il n’y avait pas beaucoup de filles de son âge dans le village. Si Colette n’était pas en train de chercher de la nourriture, elle était partout avec Mitsuha, surtout après que cette dernière eut subi de graves blessures.

« Désolée, mais je dois y aller », lui dit Mitsuha.

« Je voulais faire ça depuis le début. En plus, mon peuple et moi avions convenu de nous retrouver dans la capitale si quelque chose tournait mal. »

« M,mais, mais… ! »

Colette ne voulait tout simplement pas céder. Même ses parents n’avaient pas réussi à la calmer.

« Très bien, alors faisons une promesse. Quand je serai installée dans la capitale, je reviendrai te raconter tout ça. Et si jamais tu y vas, je m’assurerai de te voir quoiqu’il arrive. »

Colette gémissait, mais se calmait lentement.

« Tu es une fille intelligente. Tu sais que tu ne peux pas m’arrêter, hein ? Alors, s’il te plaît… Fais-moi un beau sourire. Je penserai à toi tout le temps jusqu’à ce que je te revoie, et je ne veux pas me souvenir de toi comme ça. »

« Hic… »

Colette avait poussé un autre sanglot, puis elle força ses lèvres vacillantes à sourire. Son père, Tobias, s’émerveilla à cette vue.

« Cette fille est pratiquement une séductrice ! », chuchota-t-il.

C’est vrai, c’est impoli !

Le lendemain matin, les villageois avaient vu Mitsuha partir, elle avait finalement pris le chemin en direction de la ville. Elle avait un sac rempli de nécessités : un gallon d’eau et quatre repas, dont deux légers. Les villageois s’étaient dit que, puisque le voyage prendrait une journée entière pour un adulte, cela prendrait deux jours pour Mitsuha. Ils avaient rempli son sac en conséquence, sans même laisser un pouce pour autre chose.

Mitsuha n’avait pas apporté grand-chose en premier lieu, mais les villageois avaient essayé de la charger de couvertures et d’autres fournitures. Si elle les avait apportées, elle n’aurait pas pu se tenir debout, et encore moins marcher. Certaines personnes avaient même proposé de l’accompagner, mais elle avait fermement refusé. Ce serait vraiment mauvais pour moi.

Quoi qu’il en soit, elle avait plus ou moins dû quitter le village de force. On lui avait dit qu’il était rare que quelqu’un aille en ville. Que le voyage aller-retour prendrait deux jours, trois si vous y passiez une nuit. C’était tout simplement trop loin pour que quiconque puisse s’y rendre sans avoir des affaires sérieuses à régler. Séjourner dans l’une des auberges de la ville était aussi un petit luxe. Le village était en grande partie autosuffisant, de sorte que les gens d’ici ne gagnaient pas assez d’argent pour pouvoir se payer une chambre, de la nourriture et des marchandises.

En fin de compte, personne n’allait en ville sans une très bonne raison. Tout ce qu’ils ne pouvaient pas se procurer dans le village pouvait souvent être acheté auprès des marchands ambulants qui passaient de temps en temps. Ils acceptaient même les demandes et faisaient de leur mieux pour apporter les articles lors de leur prochaine visite.

Mitsuha était bien consciente du fait qu’elle pouvait choisir de ne pas aller en ville, et ils ne le sauraient pas. Si certains villageois décidaient de partir de cette façon dans quelques semaines ou quelques mois, elle doutait qu’ils se promènent en demandant des nouvelles d’elle. Même s’ils le faisaient, ils n’apprendraient rien parce qu’elle n’y serait jamais arrivée. Ce n’est pas comme si je n’avais pas prévu d’aller en ville, pensait-elle. Je vais juste être complètement en retard.

Mitsuha avait maintenant une parfaite compréhension de son mouvement transcontinental, le « saut du monde », comme elle aimait l’appeler. La « chose » avait installé cette compréhension directement dans son cerveau. D’après le manuel intangible, la première zone vers laquelle elle avait sauté avait été déterminée au hasard, mais maintenant elle pouvait aller où elle voulait.

Il y avait une mise en garde : elle ne pouvait se rendre qu’à un endroit qu’elle pouvait imaginer, ce qui, dans ce cas-ci, signifiait un endroit qu’elle avait déjà visité auparavant. Elle pouvait sauter d’un endroit à l’autre en utilisant l’autre monde comme tremplin. Pour cela, elle devait d’abord s’y rendre en utilisant les méthodes normales, mais une fois cela fait, elle pouvait s’y rendre quand elle le voulait. Donc pour l’instant, Mitsuha alla directement en ville, puis revint sur Terre pour faire quelques préparatifs. Après tout, il ne serait pas facile de s’approcher du seigneur et de s’assurer un chemin vers la capitale.

Une fois qu’elle avait parcouru une bonne distance à pied depuis le village, Mitsuha se rendit dans sa maison, sauta sur son scooter de confiance, Scooty, puis revint avec dans l’autre monde. Le chemin entre le village et la ville n’était que peu emprunté, les témoins n’étaient donc pas un problème. Même si quelqu’un la rencontrait, elle pourrait revenir sur Terre.

Le terrain n’étant pas très plat, elle ne pouvait donc pas rouler à pleine vitesse, mais elle était arrivée à la périphérie de la ville après seulement une heure de route. Elle n’avait rencontré personne en chemin, tout se passait donc comme prévu.

Ça suffit pour aujourd’hui, Scooty. Je ferai le reste du chemin à pied à mon retour. Maintenant, il est temps de s’activer ! Mitsuha était rentrée chez elle et avait décidé de porter des vêtements décontractés. Elle s’était rendue à pied à la gare et avait pris le train jusqu’à la ville la plus proche possédant une base militaire américaine. Certains Américains étaient également présents, probablement des militaires affectés à la base. On dirait que je n’ai pas besoin d’attendre d’être là pour ce rôle, se dit-elle.

« Excusez-moi. »

Elle avait adressé ses paroles à l’homme le plus intelligent qui soit. Elle avait simplement demandé si le train s’arrêterait à la première ville qui lui venait à l’esprit, l’avait remercié quand il avait répondu et se mit à marcher jusqu’à la voiture voisine. Elle était ensuite sortie à l’arrêt suivant et était retournée à son point de départ. Grâce à cela, Mitsuha avait acquis la capacité de parler, d’écrire et de comprendre l’anglais.

Pourquoi avait-elle choisi cet homme en particulier, demandez-vous ? Eh bien, elle avait utilisé son aptitude à « scanné » le cerveau de la personne à qui elle parlait afin de copier son langage. Normalement, elle serait en mesure d’en apprendre le plus possible sur une langue en interagissant avec de nombreux locuteurs différents, mais comme elle avait un choix limité, elle s’était efforcée de choisir la personne la mieux informée qu’elle avait vue.

Une fois rentrée chez elle, Mitsuha s’était connectée à Internet et avait commencé à faire des recherches. Les mots-clés, les résultats, les sites — tout était en anglais, et elle en avait visionné une multitude de pages dans le cadre de sa préparation.

***

Partie 3

À une centaine de kilomètres de là se trouvait le quartier général d’une petite organisation mercenaire. Le groupe jouissait d’une réputation relativement enviable. Par rapport aux standards mercenaires, bien évidemment.

« Capitaine. Vous avez de la visite », rapporte l’un des mercenaires, qui ouvrit la porte d’un bureau d’apparence ordinaire.

« Je suis presque sûr que je n’avais pas de rendez-vous aujourd’hui », répondit le responsable.

« C’est une visite inopinée. Êtes-vous d’accord ? »

Le capitaine avait pris un moment pour y réfléchir. Ils n’étaient pas en mission majeure, et l’argent résultant des missions mineures pouvait s’accumuler et aider à couvrir les frais de fonctionnement de l’escouade.

« J’arrive dans une seconde… Emmenez-les à la salle de réception. »

« Bien reçu. Héhé, vous serez surpris. »

« Qu’est-ce qu’il y a ? C’est une nana sexy ou quoi ? »

« Hmm… On peut dire ça. »

Ouais, c’est vrai. Il n’y a pas moyen qu’une femme comme ça puisse venir dans un endroit comme celui-là, pensa-t-il avec incrédulité en se rendant à la salle de réception. Cependant, quand il ouvrit la porte et vit qui l’attendait à l’intérieur, sa mâchoire faillit tomber.

Mon gars ne mentait pas après tout. Merde, je suis vraiment surpris. Il avait regardé la visiteuse dans les yeux. Elle était loin d’être une « fille canon », mais « jolie fille » semblait bien lui convenir.

« Enchantée de vous rencontrer », commença la fille.

« Je m’appelle Mitsuha, et j’ai une requête pour vous… »

Son invitée ressemblait à un écolier du primaire. Elle avait des cheveux noirs soyeux, des yeux sombres et mystiques et un visage bien proportionné, semblable à celui d’une poupée. Le capitaine avait écouté l’intégralité de son monologue avant de prendre la parole.

« Alors, vous me dites que vous voulez apprendre à utiliser des armes légères, vous entraîner au tir, vous entraîner au combat au couteau et à l’épée courte, et qu’on vous achète tout ce qu’il faut pour, hein ? »

Enfant ou pas, c’était une cliente. Et c’était lui qui dirigeait ici, donc il était évident qu’il savait comment parler affaires, même s’il était effrayé par la situation. La fille hocha la tête en réponse.

« Les armes de poing restent la priorité des priorités. En particulier, j’aimerais en avoir un petit que je pourrais porter avec moi en tout temps pour me défendre, un pistolet puissant de grande capacité que je pourrais utiliser comme arme principale, un revolver léger que je pourrais utiliser si les autres se coinçaient, un jeu d’étuis pour les trois, ainsi qu’une formation sur comment les utiliser. Tout le reste est secondaire. L’entraînement au couteau et à l’épée ne sera peut-être pas très utile… alors n’hésitez pas à les passer sous silence. Supposons que c’est juste pour l’intimidation. »

« Il est dit ici que vous voulez aussi apprendre à utiliser des mitrailleuses, des fusils d’assaut, des armes de tireurs d’élite, des grenades et des lance-grenades… Petite dame, qu’est-ce que vous cherchez à faire comme coup ? »

Il n’avait pas pu s’empêcher d’élever la voix. Merde, j’ai perdu mon calme.

« Je ne prévois rien de tel... ! Ce n’est que de la légitime défense. Mon pays est actuellement en proie à des troubles, voyez-vous… Oh, et bien sûr, je paierai d’avance. »

D’où diable es-tu !? Les voyous de ton pays possèdent des tanks ou quoi !?

« Ah, j’ai beaucoup de yens japonais qui traînent en ce moment », avait-elle fait remarquer.

« Ça vous dérangerait si je vous paie avec ça ? »

« Bien sûr, le yen est au moins une valeur bien plus forte que le yuan », avait répondu le mercenaire.

« Mais il y aura cependant des frais quand on le convertira en dollars… Vous allez aussi couvrir ça, n’est-ce pas ? »

« Oh, mais bien sûr. Ça ne me dérange pas du tout. Ah, mais je peux passer à l’utilisation de pièces d’or. Accepteriez-vous aussi ? »

Des pièces d’or ? Sérieusement, qui diable es-tu ? S’il avait pu lever un sourcil plus haut, il l’aurait fait.

« Je n’ai rien contre, mais de quel genre de pièce d’or on parle ? Krugers ? Maples ? »

« Non. Il s’agira de pièce sans nom provenant d’un pays sans nom. Pensez à la valeur de l’or qu’elles contiennent. Je vous apporterai un échantillon plus tôt que prévu, pour que vous puissiez l’évaluer. Mais… »

« Mais ? »

« Gardez à l’esprit que vous devrez peut-être convertir une centaine de ces pièces, non un millier. »

Après qu’ils se soient mis d’accord, la fille était partie. Elle était louche… non… bizarre, mais je devrais accepter ce boulot. Quelqu’un doit couvrir les frais de la brigade, bon sang ! Le capitaine était presque sûr d’avoir fait le bon choix, mais pour une raison quelconque, la main tenant sa cigarette tremblait encore. Il avait ordonné à un de ses subordonnés de la suivre. Maintenant, je dois attendre qu’il revienne.

« Je suis de retour, Capitaine », avait dit l’homme en question en arrivant.

Uhh, ok, c’était un peu trop rapide.

« Comment ça s’est passé ? »

« Désolé, mais… Je l’ai perdue. »

Quoi ? Quoi ? Elle s’était débarrassée de ce type ?

« Je l’ai vue tourner au coin de la rue en sortant de la base, mais quand je l’ai poursuivie, elle était partie. J’ai regardé autour de moi, mais je ne l’ai trouvée nulle part. »

« Qu’est-ce que c’est que ces conneries !? Il n’y a plus de virages à des kilomètres à la ronde ! »

Son subordonné n’avait pas donné de réponse. Il n’avait rien d’autre à dire non plus. Mec, je suppose que j’ai vraiment besoin de prendre les armes, pensa-t-il en regardant les objets sur son bureau. Il y avait un épais rouleau de yen et un morceau de papier avec les mensurations de Mitsuha dessus. Ils avaient besoin de sa taille pour savoir quel genre d’étuis lui donner.

Une taille A, hein…

◇ ◇ ◇

Purée, c’était vraiment stressant ! pensa Mitsuha.

Sa conversation avec le chef des mercenaires, c’était la première fois qu’elle parlait à quelqu’un en anglais en dehors de ses cours. De plus, son statut d’étranger et de mercenaire ne l’avait pas du tout aidée à se calmer.

Garder le rôle d’une dame de grande classe était vraiment difficile ! J’étais complètement trempé de sueur ! Une fois ses affaires terminées, elle avait disparu de la base des mercenaires. Ils avaient peut-être envoyé quelqu’un pour la suivre, mais ça n’avait pas d’importance. Elle était sortie par la porte d’entrée, avait tourné à droite et s’était téléportée.

Elle avait choisi ce groupe particulier après des heures de recherche en ligne. Elle avait été surprise de voir à quel point les groupes de mercenaires étaient variés. Certains étaient énormes, d’autres petits, certains étaient intègres, d’autres encore se comportaient comme des ordures, et ainsi de suite… D’un autre côté, c’était peut-être étrange d’appeler les mercenaires « intègre ». Pourtant, elle avait opté pour celui qui paraissait le plus honnête de tous.

Si elle avait senti qu’elle faisait une erreur, elle n’avait qu’à faire machine arrière. Rester hors de leur radar semblait assez facile. Et s’ils essayaient de me capturer ou de me violer, je les écraserais. Si leur armurerie était soudainement vidée, ou si leurs fonds et documents disparaissaient avec leur coffre-fort, les mercenaires auraient les mains trop occupées pour s’occuper d’une fugitive. En tant que personne voyageant entre différents mondes, je pourrais devenir une grande voleuse, une tueuse ou un terroriste… Mais ce n’est pas mon style ! Teehee ! Elle espérait seulement que cette nouvelle relation ne tournerait pas mal.

Quant à la façon dont elle était arrivée dans un autre pays si facilement… Elle avait eu une révélation.

Au départ, elle avait eu l’impression que, parce qu’elle avait besoin d’une image mentale concrète de l’endroit où elle voulait aller, elle devait l’avoir été au moins une fois. Mais il lui était venu à l’esprit de tenter une petite expérience. Elle avait absorbé des émissions de télévision, des films et des journaux télévisés qui montraient un lieu spécifique, puis avait vérifié une photo satellite de ce lieu. Cela lui avait donné une image mentale aussi bonne que — non, même meilleur que celle qu’elle aurait si elle l’avait vue en personne.

Le résultat ? Un succès total.

Mitsuha pourrait maintenant aller à de nombreux endroits différents en dehors du Japon. Cependant, elle ne pouvait utiliser cette tactique que sur Terre. Après tout, il n’y avait pas de photos ou de satellites dans l’autre monde, ce qui signifiait qu’elle devrait se rendre à destination au moins une fois. Comme c’était horrible.

Je suis en train de dépenser l’argent de maman et papa… Mais finalement, c’est comme n’importe quel investissement initial. C’est une dépense nécessaire.

Ses pensées s’étaient dirigées vers un collier sur la table. C’était un vrai produit de luxe. Le collier était orné de perles d’un centimètre d’épaisseur et lui avait coûté plus d’un million de yens (8000 euros). C’était en fait sa meilleure arme, donc elle n’avait pas pu se contenter de quelque chose de bon marché.

Juste à côté se trouvait un couteau pliant Gerber. Pas celui que Tsuyoshi avait laissé derrière lui, mais un nouveau qu’elle venait d’acheter. Il y avait aussi un couteau suisse et un couteau de chasse Randall. Sur un cintre voisin, il y avait une robe de grande valeur — et en fait assez chère —, associée à une paire de chaussures à talons. En outre, il y avait quelques ensembles de vêtements de rechange, ainsi que quelques accessoires. Mitsuha avait soigneusement mis tout dans un grand sac à dos, s’était habillée et s’était équipé tout ce qu’elle pouvait.

Très bien ! On déménage !

Très vite, elle se retrouva devant une grande porte. Prenant une grande respiration, elle s’était préparée. Il était enfin temps de passer à l’étape suivante de son plan. Elle avait saisi le heurtoir et avait frappé à la porte, ce qui avait créé de gros bruits sourds. Bien que personne ne puisse l’entendre, elle cria en elle-même.

Il y a quelqu’un !

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