Monster no Goshujin-sama (LN) – Tome 2 – Chapitre 6

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Chapitre 6 : Le passage vers le cœur, le chemin du mana

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Chapitre 6 : Le passage vers le cœur, le chemin du mana

Partie 1

Le lendemain, je m’étais préparé à quitter le nid de l’arachnide de bonne heure.

« Mon Seigneur. J’ai terminé ce que tu m’as demandé. »

Gerbera m’avait remis quelques vêtements avant notre départ. C’était quelque chose que je lui avais déjà demandé. Elle pouvait tisser le tissu à une vitesse énorme, mais il était hors de question de le finir aussi rapidement, alors environ la moitié de la chemise avait été faite avec du tissu qu’elle avait déjà stocké.

Le haut était un simple vêtement blanc aux manches un peu bouffantes, mais il était assez robuste pour être porté lors d’une promenade en forêt. Le pantalon était également blanc, ce qui rendait l’ensemble quelque peu discutable, mais je n’avais pas vraiment le luxe de me plaindre de la mode.

« Cela te convient, mon Seigneur, » déclara Gerbera.

« … Vraiment ? » demandai-je.

Gerbera m’avait jeté un coup d’œil après que je me sois changé et, pour une raison inconnue, elle s’était mise à s’agiter en rougissant. J’étais curieux de savoir si c’était parce qu’elle était heureuse que je porte quelque chose qu’elle avait fait ou parce qu’elle avait réalisé que j’avais maintenant le même genre de vêtements qu’elle. Ou peut-être était-ce parce que ces vêtements étaient faits de ses propres fils, donc dans un certain sens… ses fils étaient enroulés sur tout mon corps, stimulant ses instincts d’araignée. J’avais décidé de ne pas trop y penser et j’avais mis le protège-poitrine noire que Rose m’avait fait. Après avoir attaché mon épée en pseudo acier de Damas à ma hanche, mes préparatifs étaient terminés.

L’armure de Rose et les vêtements de Gerbera avaient été fabriqués de manière totalement indépendante l’une de l’autre, mais à l’avenir, je voulais qu’elles coopèrent pour les fabriquer. Bien sûr, elles le feraient maintenant si je le leur ordonnais, mais il était clair que cela laisserait des racines profondes de ressentiment entre elles qui perdureraient dans le futur. De toute façon, cela ne donnerait pas de résultats immédiats et il n’était pas nécessaire de se presser. C’était vraiment quelque chose de mieux à faire après que le malaise se soit dissipé entre elles.

« Mon Seigneur, » dit Gerbera en me regardant avec anxiété.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

« Hum, ce n’est pas grand-chose. Tu as juste l’air un peu pâle, » déclara Gerbera.

« Vraiment ? » J’avais essayé de me toucher la joue. La sensation contre mes doigts était un peu froide. « … Ce n’est rien de grave. Ne t’inquiète pas. »

C’était vrai que j’avais eu beaucoup de choses à penser ces derniers temps, et je n’avais pas beaucoup dormi hier à cause de cela. Cependant, je ne m’étais pas senti mal et je n’avais pas eu particulièrement sommeil. J’étais encore un peu fatigué de marcher ces derniers jours, mais c’était bien dans mes limites. Je n’avais pas eu besoin de repos.

« Allons-y. »

Gerbera me regardait toujours avec inquiétude, mais je l’avais encouragée à avancer alors que nous quittions le nid de l’arachnide. Après s’être vraiment dépêchée et avoir montré que je ne mentais pas, elle n’en avait plus parlé.

Nous étions arrivés à notre destination au bout d’une heure environ. C’était un lac assez grand, et la faune locale l’utilisait comme source d’eau. Nous avions continué à marcher pendant une heure environ et nous avions rencontré deux monstres lors du trajet. L’un était un ours avec une tête de lapin que nous appelions un lapin rugueux. L’autre était quelque chose comme une écrevisse d’un mètre de haut qui fendait la surface de l’eau en sautant. Je n’avais jamais entendu parler de ce type d’écrevisse dans la colonie, alors je lui avais donné le nom de « grand ciseau ».

Je voulais rapporter ces monstres. Nous ne les avions jamais rencontrés auparavant, alors j’avais au moins besoin de les donner à manger à Lily pour améliorer ses capacités de combat. Un seul lui suffirait, mais ce n’était pas ce que je voulais dire.

Lily devait manger une grande partie du corps d’un monstre pour que son mimétisme se manifeste pleinement. De ce fait, nous n’aurions pas pu manger la viande du lapin rugueux et du grand ciseau. Bien sûr, nous n’avions pas besoin de les manger. Nous avions après tout un stock suffisant de viande de croc de feu. Cependant, même ainsi, je voulais les manger. J’en avais déjà assez de la viande de croc de feu dur.

Je n’étais pas un mangeur particulièrement difficile, mais j’en avais vraiment assez de manger la même mauvaise nourriture tous les jours. Je voulais manger autre chose que des lézards et des rats. Les grands ciseaux, en particulier, avaient l’air très savoureux. Ils pouvaient avoir un goût plutôt terreux ou terne, vu que c’était une écrevisse, mais j’étais convaincu que ce ne serait pas un problème. La qualité de nos réserves d’alimentation actuelles était tout simplement mauvaise. Cela dit, je ne pouvais pas augmenter la charge de Gerbera pour satisfaire des besoins aussi mesquins. Je devais attendre la prochaine fois que nous en trouvions un pour profiter des grands ciseaux en guise de repas.

Pendant que je faisais une pause, en pensant à ce genre de choses, Gerbera avait fini d’« emballer » nos marchandises. Le lapin rugueux était assez grand, donc le cocon dans lequel il était enveloppé était tout aussi énorme. La regarder le traîner avec désinvolture était quelque peu humoristique.

« Bon travail. »

« Toi aussi, mon Seigneur. »

Gerbera avait tendu vers moi la flasque artisanale de Rose. Elle était remplie d’eau du lac voisin, que je pouvais boire sans avoir à la faire bouillir. L’eau était en fait assez lourde, alors Gerbera en transportait pratiquement tout le stock, sauf ce dont j’avais besoin pour étancher ma soif pendant que nous marchions.

« Merci. »

Et juste au moment où j’allais lui prendre la flasque…

« … Argh ? »

Ma vision s’était brouillée et j’avais vu d’innombrables petites lumières scintillantes autour de moi. C’était juste pour un instant. Cependant, le moment était mal choisi. Ma main avait manqué le flacon que Gerbera tenait.

« Ah. »

Mes doigts l’avaient frôlé et l’avaient fait tomber par terre. L’eau s’était mise à dégouliner. Je m’étais dépêché de la ramasser, mais un tiers environ s’était déjà déversé.

Je l’ai vraiment fait maintenant…

Bien sûr, je ne parlais pas de l’eau.

« Quelque chose ne va pas, mon Seigneur ? » Gerbera me regarda avec un regard suspicieux. « Cela fait un moment que j’y pense. Ton état semble quelque peu étrange. »

« … Étrange, comment ? »

« Il t’est arrivé de faire des erreurs qui ne te ressemblent pas. Peut-être me caches-tu quelque chose ? »

Les yeux rouges de Gerbera fixaient le mien. En regardant fixement et sans cesse… Son regard ne montrait aucun signe d’hésitation. Elle semblait complètement convaincue d’elle-même. J’avais essayé de réfléchir à un moyen de faire oublier cela, mais ce n’était pas raisonnable d’essayer. J’avais passé ces derniers jours presque entièrement avec elle. C’est elle qui avait soutenu mon misérable moi humain pendant que nous cherchions dans la forêt. Même si cela n’était pas arrivé, elle s’en serait rendu compte tôt ou tard.

« Ce n’est rien de grave… » J’avais commencé par la préface nécessaire, puis je lui avais fait part de ma situation actuelle. « Il semble que mes yeux soient troubles de temps en temps depuis peu. »

« Tes yeux ? »

« Ouais. »

Je n’en avais pris conscience moi-même que récemment. Le premier événement dont je me souvienne remonte à environ quatre jours, lorsque j’avais parlé à Lily dans un état d’étourdissement.

« Ma vision devient floue, et au pire, je vois des lumières blanches étincelantes… »

« N’est-ce pas grave ? » Gerbera cria alors qu’elle s’approchait rapidement et m’avait attrapé le visage à deux mains.

C’était la vitesse maximale de l’arachne blanche. Il m’était impossible d’esquiver. Je regardais maintenant son beau visage, que je ne pouvais que décrire comme étant fait par les mains d’un dieu, à bout portant.

« Hmm… »

Je pouvais sentir son souffle alors qu’elle continuait à me regarder. Mon cœur s’était mis spontanément à battre la chamade, mais Gerbera ne dégageait pas du tout une atmosphère érotique. Elle me regardait si sérieusement dans les yeux que c’était effrayant. Mais il n’était pas nécessaire d’avoir recours à des médecins si c’était tout ce qu’il fallait pour comprendre l’état de quelqu’un.

Je me demande s’il y a des médecins dans ce monde… ? Ou peut-être n’en ont-ils pas besoin puisqu’ils ont de la magie… ?

« Ce n’est vraiment qu’une fois de temps en temps. Ce n’est rien de grave. Comme je l’ai dit, mon corps se sent bien. »

J’avais commencé à inventer des excuses aussi vite que possible lorsqu’un petit pli s’était formé entre les sourcils de Gerbera.

« Vraiment ? »

« Oui. Les humains ont tendance à avoir une vision floue quand ils sont fatigués. Cela arrive tout le temps. »

« Tu as dit quelque chose de similaire l’autre jour pour essayer de me tromper, n’est-ce pas ? »

« … Bref, laisse-moi un peu d’espace. »

Je l’avais repoussée par la moitié inférieure de son visage, et la phrase « on récolte ce qu’on sème » m’était venue à l’esprit. C’était une façon un peu rude de traiter une dame, mais Gerbera était bien plus forte que n’importe quelle dame normale et ne s’en souciait pas vraiment.

Elle grogna en s’enfonçant dans ses pensées et en croisant les bras. « Mais… Des lumières blanches… ? Hmm ? Hmmm ? Se pourrait-il que… ? » Ses sourcils blancs, qui semblaient avoir été dessinés avec un pinceau fin, se levèrent très légèrement.

« Quoi ? »

« Pas grand-chose. Je suis juste curieuse de quelque chose. » Gerbera avait tendu sa main fine devant mes yeux. « Laisse-moi vérifier rapidement. Regards ici, mon Seigneur. »

« Hm ? »

« … Mais ce genre de choses n’est pas vraiment ma spécialité. »

Quelques secondes après que Gerbera ait plissé les yeux…

J’avais fait ce qu’elle m’avait dit et j’avais regardé le bout de ses doigts. « Hein ? » avais-je dit, abasourdi.

Il y avait des lumières blanches étincelantes juste au bout de ses doigts. C’était les mêmes lumières que j’avais vu de temps en temps ces derniers jours.

« Comment… ? »

« Comme je le pensais, » dit Gerbera avec une expression un peu fatiguée. Elle avait retiré sa main, et les lumières avaient immédiatement disparu. « Mais je ne pensais pas que ce serait vraiment le cas, » poursuit-elle en soupirant. « Mon Seigneur, tu es devenu capable de sentir le mana. »

« Mana… ? Moi ? »

« Hm. Il n’y a pas d’erreur. » Gerbera avait fait un signe de tête avec une expression grave et mortelle.

Elle ne plaisantait pas, mais c’était difficile à accepter pour moi. « Je comprends ce que tu dis, mais je n’ai aucune aptitude pour la magie. Les tricheurs qui pouvaient utiliser la magie dans la colonie me l’ont clairement dit. »

« Je ne peux pas dire grand-chose à ce sujet. » Même si elle avait déclaré l’évidence, Gerbera avait offert ses propres réflexions sur la question. « Cependant, si cela est vrai, c’est certainement assez étrange. » Elle avait replié ses jambes et s’était assise en penchant la tête. « N’importe qui est capable d’utiliser la magie tant qu’il possède du mana. Et tant que l’on possède suffisamment de mana, ce n’est pas si difficile de le voir. La capacité à l’observer est nécessaire pour pouvoir utiliser la magie… Cependant, les bases pour pouvoir le faire ne sont pas censées changer. »

« Est-ce ainsi que cela fonctionne ? »

« Hm. Les bases auxquelles je fais référence résument en gros la quantité totale de mana qu’une personne est capable de posséder. Pour une raison inconnue, ta capacité de mana a augmenté, mon Seigneur. »

Je ne savais pas pourquoi, mais je ne pouvais pas être malheureux de cela. Ce n’était vraiment pas un inconvénient pour moi. Au contraire, c’était en fait très pratique. Cependant, je me sentais mal de savoir que mon corps changeait et pourtant c’était un mystère complet.

« Est-ce parce que nous avons vaincu des monstres ? J’ai entendu dire qu’on pouvait obtenir du mana de cette façon, non ? C’est ainsi que l’équipe d’exploration de la colonie s’est renforcée. »

« C’est certainement une façon de faire, mais elle n’est pas particulièrement efficace. J’ai mentionné que les fondements du mana ne sont pas censés changer. Même si tu tuais 100 ou 1000 monstres, il serait toujours douteux que ton mana soit sensiblement élevé. Cependant, il y a bien sûr une différence entre toi et moi à cet égard. »

« Tu veux dire que nos capacités sont complètement différentes, » déclarai-je.

« Précisément. Mais bon, même si tu m’as accompagnée, ce n’est pas toi qui as porté le coup de grâce. »

« C’est vrai. » Cela signifiait que les monstres que nous avions vaincus n’avaient rien à voir avec ça.

« Alors, il y a peut-être un moyen plus efficace, et tu l’as fait sans t’en rendre compte, mais… »

« Ouais… » Je m’étais gratté la tête. « Je ne comprends pas. Ça vaut la peine de fêter ça si je peux utiliser la magie grâce à ça, bien que…, » j’avais soudain fait une grimace en remarquant l’expression compliquée de Gerbera. « Qu’est-ce qu’il y a ? » avais-je demandé.

« Que dis-tu, mon Seigneur ? »

« Hm ? »

« N’utilises-tu pas déjà la magie ? »

Elle avait l’air exaspérée, mais malheureusement, je n’avais aucune idée de ce dont elle parlait.

***

Partie 2

« … Que veux-tu dire ? »

« Ne l’as-tu vraiment pas remarqué ? Nous sommes liés par le cheminement mental. C’est en soi une forme splendide de magie. »

« … Vraiment ? »

« Comment peux-tu l’ignorer ? »

« Même si tu me demandes ça… »

Je m’étais gratté la tête. Les élèves normaux de l’équipe locale pouvaient éventuellement apprendre la magie, mais seule une poignée d’entre eux avaient eu la chance de le faire. Ma connaissance de la magie n’était qu’une fraction de ce qu’ils savaient dans la colonie. Je ne savais pas ce que c’était en fait, donc c’était à peu près une évidence, je n’avais jamais pensé au cheminement mental de cette façon.

Bien que, en y repensant, le mystérieux pouvoir qui nous avait reliés ne pouvait pas vraiment être accompli par autre chose que le mana. Cela signifiait que j’avais utilisé la magie sans même le savoir. Autrement dit, ma tricherie était un type de magie qui était toujours en activité.

La magie qui avait relié mon cœur aux cœurs des monstres, cela semblait un peu fantaisiste quand on le présentait comme ça, et ne semblait pas vraiment convenir à un gars comme moi…

« … »

Maintenant que j’y pense… Pourquoi m’a-t-on donné une telle tricherie ?

Un certain doute s’était soudain fait jour. Les humains qui avaient été téléportés sur ce monde avaient été trompés. La raison de ce phénomène restait un mystère, mais si cela s’appliquait à tous, cela signifiait peut-être qu’il s’agissait d’une sorte de nécessité propre à ce monde.

Alors, y avait-il une sorte de nécessité qui m’avait accordé ce pouvoir ? Si oui, pourquoi cette capacité en particulier ? Cela pouvait sembler être une plainte, mais je ne me plaignais pas vraiment. Il ne s’agissait pas de pouvoir éviter mon destin si j’avais eu une capacité plus facile à comprendre qui se serait manifestée pendant que j’étais à la Colonie. Il ne s’agissait pas non plus d’une capacité toujours opérationnelle qui était beaucoup trop difficile à utiliser. Il ne s’agissait pas non plus de son niveau de puissance discutable en tant que tricheur…

Je ne voulais pas me plaindre. Cette tricherie avait été exactement ce qui m’avait permis après tout de rencontrer Lily et les autres filles. Ce seul point avait balayé toutes les plaintes que j’avais. C’est pourquoi je n’avais fait qu’entretenir le doute. Pourquoi est-ce que ça a fini comme ça… ?

« … Hm ? Attends un instant. Le cheminement mental ? » déclara soudainement Gerbera, en ramenant ma conscience loin de mes spéculations.

Je m’étais tourné vers elle et j’avais vu qu’elle avait complètement cessé de bouger, comme si elle venait de réaliser quelque chose. Au moment où je m’étais demandé de quoi il s’agissait, Gerbera avait fait un bond et m’avait saisi le visage à la même vitesse qu’il y a quelques minutes.

Encore ?

C’est du moins ce que je pensais, mais elle avait l’air un peu étrange cette fois-ci.

« … »

Les yeux rouges de Gerbera me fixaient, comme avant, mais il semblait que son attention était ailleurs.

« … C’est donc comme ça. »

« Hé, Gerbera. » J’avais intentionnellement approfondi ma voix dans le mécontentement et je l’avais appelée par son prénom. J’avais l’impression que ma voix allait craquer si je ne le faisais pas. « Ne va pas te convaincre sans rien dire. Explique-moi. Aussi, laisse-moi un peu d’espace. »

Gerbera avait dû apprendre tôt ou tard à quel point elle était attirante en tant que femme. Elle affichait déjà des sentiments pour moi, laissant mon cœur en quelque sorte dans le désordre. Elle était ma servante, une existence très spéciale pour moi. De plus, je l’avais laissée me gâter alors que mon cœur était affaibli l’autre jour. Ce ne serait pas bizarre que cela me fasse perdre complètement mon rythme. Je ne pouvais pas perturber ma relation avec mes serviteurs alors que ma position à ce sujet était si peu claire. C’est ce que j’avais décidé, et je devais donc tenir bon dans ma résolution.

« Hm. Excuse-moi. »

Gerbera avait obéi. Cependant, son regard était encore fixé au fond de mes yeux. Elle ne montrait aucun signe de malaise. C’était comme si elle me disait implicitement que ce n’était pas le moment.

« Mon Seigneur. Reste calme et écoute-moi. Mon mana existe dans ton corps. »

« … Hein ? » C’était tellement inattendu que j’en avais été complètement abasourdi. « … Et qu’est-ce que ça veut dire ? »

« Je ne suis pas en mesure de le dire avec certitude. Normalement, c’est impossible. » Gerbera secoua la tête alors que ses cheveux d’un blanc pur se balançaient. « Cependant, je peux au moins faire des suppositions. Le cheminement mental entre nous en est probablement la cause principale. »

« A-Attends un peu. Et alors ? Tu dis que le mana qui s’accumule en moi t’appartient ? » avais-je demandé en toute confusion.

« Peut-être que le mana de Lily et de Rose s’y trouve également mêlé. Bien que ce soit une quantité tellement infime que je ne la sens pas. »

« Ce n’est pas possible… » J’étais sur le point d’objecter, mais j’avais remarqué que je ne possédais pas les connaissances nécessaires pour le faire. « Je suppose que… Je suppose que cela explique le scintillement que je vois depuis que tu es devenu mon serviteur. » Au moins, ce n’était jamais arrivé avant ça. « Mais pourquoi le mana qui est en moi n’appartient-il qu’à toi ? »

« N’est-ce pas là un simple problème de volume ? Par exemple, considère le mana qui arrive par le cheminement mental pour ainsi dire comme une fuite. Si le même ratio fuit de nous toutes, alors la quantité venant de moi sera d’autant plus importante. »

« C’est logique. »

Cela signifiait que si le même phénomène s’était produit avant que Gerbera ne devienne mon serviteur, ce n’était pas à un niveau où je pouvais le sentir. En y repensant, on disait déjà dans la colonie que le mana habitait l’âme. Il était difficile pour un simple étudiant comme moi de dire ce qu’était l’âme, sans parler de la distinguer du cœur et de l’esprit. Cependant, en supposant qu’ils étaient tous semblables… et sinon, en supposant qu’ils étaient au moins apparentés, alors il ne serait pas si étrange que la puissance qui nous reliait, le cheminement mental, passe par ladite âme. Non pas que je puisse affirmer une telle chose de façon sûre… de toute façon, ce n’était pas le point important ici.

« Et alors ? » J’avais mouillé mes lèvres sèches avec ma langue et j’avais parlé d’une voix légèrement rauque. « Plus je rassemble de serviteurs, plus mon mana sera fort ? »

« C’est sans doute le cas. Ou peut-être que, même dans ton état actuel, nous pourrions augmenter ta capacité de mana en faisant passer notre mana par toi. »

« Si c’est vrai… Alors ça ne semble pas si mal que ça, hein ? »

Je ne possédais pas beaucoup de pouvoir. Cela s’appliquait à l’ensemble, mais le défaut bien plus fatal ici était mon incapacité totale à me battre par moi-même. J’étais bien trop faible. Peu importe le nombre de compagnons puissants que je rassemblais, notre point faible serait toujours exploité. Cette découverte offrait la possibilité de surmonter cette faiblesse. Pour la première fois depuis longtemps, j’avais tremblé d’excitation. Le mot magie était si puissant.

« Peut-être que je demanderai à Lily de commencer à m’enseigner la magie à notre retour. »

C’est un choix que je n’avais pas eu à faire en raison de mon manque de talent pour la magie. Jusqu’à présent, j’étais une cause tellement perdue que le simple fait de brandir une épée me permettrait de faire mieux. Mais la situation était différente maintenant. Avec une certaine base en place, il était sûrement préférable d’en faire usage. C’était d’autant plus le cas si l’acquisition continue de serviteurs signifiait augmenter ma capacité de mana.

« C’est un peu regrettable que je n’aie pas remarqué plus tôt. » C’était mon sentiment sincère sur la question, mais c’était peut-être une erreur de le dire à voix haute.

« Si tu avais consulté quelqu’un plus tôt, tu aurais pu agir plus rapidement, mon Seigneur… Oh, ce n’est pas juste… » Gerbera avait l’air un peu triste en réalisant quelque chose. « C’est de ma faute… »

« … »

La raison pour laquelle je n’avais consulté personne au sujet des irrégularités de mon corps est que je ne voulais pas que mes voyages dans la forêt soient retardés. Je ne pouvais pas vraiment nier que c’était à cause de Gerbera. Cela dit, elle n’avait pas besoin de se sentir responsable.

« Ce n’est pas vraiment ta faute. » J’avais posé ma main sur la tête blanche et pure de Gerbera alors qu’elle était assise, déprimée.

« Mon Seigneur… »

« Je l’ai fait parce que je le voulais. J’étais juste égoïste. »

En raison de multiples facteurs qui s’étaient tous mélangés, j’avais fini par cacher beaucoup de choses à mes compagnons. Ce n’était pas une bonne chose. Cependant, la situation allait bientôt changer. Non, j’allais la changer. Je devais le faire. Je devais résoudre tous mes problèmes ainsi que ceux de mes serviteurs. Il n’y avait pas d’autre choix. J’avais la responsabilité de le faire en tant que leur maître.

« Hm ? » À ce moment, l’expression de Gerbera s’était considérablement renforcée. « Mon Seigneur ! »

Comme on l’attend d’un spécialiste du combat de haut niveau, Gerbera avait changé de vitesse en un instant. J’avais soudain senti un picotement dans l’air. Je m’étais levé et j’avais suivi son regard. J’étais suffisamment habitué à cela pour pouvoir au moins faire une telle action par réflexe.

Il y avait une ombre au-delà des arbres. Au début, j’avais cru que c’était un croc de feu, mais l’ombre était beaucoup trop petite. Cela dit, elle était quand même aussi grande qu’un chien de taille moyenne.

« … Un renard ? »

Il avait des oreilles triangulaires et une queue pelucheuse. Il était grand pour un renard, mais comparé à un croc de feu, il avait l’air assez petit. La taille d’un monstre n’avait cependant rien à voir avec sa dangerosité.

J’avais immédiatement commencé à fouiller dans mes connaissances de la colonie. « C’est… un renard souffleur ! »

Au moment où j’avais crié le nom qu’ils avaient donné à ce monstre dans la colonie, le renard s’était mis à aspirer de l’air et s’était mis à grossir comme un ballon. Il s’était transformé en une sphère d’environ cinq fois sa taille d’origine et nous avait regardés avec des yeux exorbités de sang. On pourrait penser qu’il s’agissait d’une forme d’intimidation, un peu comme un poisson-globe, mais ce n’était pas le cas. C’était le moyen d’attaque du renard-souffleur.

« Graaaah ! »

Il avait dégonflé son corps et une boule de feu orange était sortie de sa bouche en rugissant.

 

 

« Mon Seigneur ! »

Gerbera m’avait pris dans ses bras et elle s’était enfuie. La boule de feu avait manqué sa cible et s’était écrasée sur l’arbre devant lequel nous nous tenions.

« — !? »

Une explosion avait éclaté avec le grondement du tonnerre. Le tronc de l’arbre avait éclaté et avait été englouti dans un incendie. Les « bagages » de Gerbera qui s’étaient détachés — les cocons d’araignées avec des monstres vaincus à l’intérieur — avaient été envoyés par l’onde de choc, jusqu’au bord de mon champ de vision. L’un de ces cocons contenait le cadavre d’un lapin rugueux, de la taille d’un ours. L’explosion avait dû être assez puissante pour l’envoyer voler aussi loin.

« … C’est tout à fait ridicule, Kitsunebi. »

Les flammes du renard souffleur avaient été accompagnées d’une onde de choc physique. Le feu lui-même n’était pas aussi chaud que celui d’un croc de feu, mais sa puissance ne pouvait pas être aussi facilement comparée à cela.

« Sois à l’aise. Ce n’est rien pour moi, » m’avait dit Gerbera avec fiabilité, sans doute en sentant la menace que je ressentais de la part de ce monstre.

Elle avait tout à fait raison. Le renard souffleur devait se gonfler pour chaque boule de feu qu’il crachait, même si cela ne prenait que deux ou trois secondes. Nous n’étions pas prêts à nous battre plus tôt, alors elle avait décidé de s’enfuir pour se mettre à l’abri, mais maintenant elle pouvait s’en occuper avant qu’il ne crache à nouveau du feu. Si le renard souffleur avait vraiment décidé d’attaquer, elle l’aurait sans doute vaincu en un instant.

« Hm ? »

Mais cela ne s’était pas produit. Après avoir vu sa première attaque esquivée, le renard souffleur s’était tourné et il s’était enfui. C’était une splendide décision, dans un sens… Mais ce n’était pas le moment de s’en vanter.

« Il s’échappe ! »

« Je sais ! Allons-y, mon Seigneur ! »

Si ma mémoire est bonne, les renards souffleurs étaient comme des crocs de feu en ce sens qu’elles formaient des meutes. Cela nous mènerait très probablement à d’autres monstres. C’est pourquoi nous avions commencé à chasser les renards souffleurs comme nous l’avions fait avec les crocs de feu l’autre jour.

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