Le Monde dans un Jeu Vidéo Otome est difficile pour la Populace – Tome 7 – Chapitre 7

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Chapitre 7 : Un combat entre sœurs

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Chapitre 7 : Un combat entre sœurs

Partie 1

Les forces les plus proéminentes dans le combat à venir s’étaient rassemblées dans la salle de réunion de l’Einhorn. Mes amis d’école à l’air mal à l’aise étaient alignés contre le mur. J’avais supposé que leur malaise venait du fait qu’ils partageaient la même pièce que Julius et les autres anciens héritiers nobles d’élite. Mlle Louise, qui était pratiquement une princesse étrangère, était là aux côtés de la prêtresse, Noëlle. Puis venaient Anjie et Livia, qui étaient blotties à côté de moi. La présence d’Émile et de Lelia n’avait probablement pas arrangé les choses, le premier étant le fils de l’une des Six Grandes Maisons, tandis que la seconde était une survivante de la Maison Lespinasse déchue. La pièce était remplie de personnages de haut rang et de premier plan. N’importe qui aurait été déstabilisé, je ne pouvais donc pas blâmer mes amis de se sentir intimidés.

« Ne sommes-nous pas totalement déplacés ici ? » demanda Daniel à voix basse.

Raymond répondit en chuchotant : « Oui, euh, pourquoi sommes-nous ici avec Son Altesse et les autres fils de grands seigneurs ? »

Je les avais ignorés pour regarder la carte de la République étalée sur la table. Nous avions besoin de reconfirmer la situation actuelle.

« Maintenant, » avais-je dit, « Ceci nous montre les terres de la République. Nous savons que Mlle Yumeria a réussi à voler les blasons de chaque homme à l’intérieur de ces frontières. » J’avais fait une pause pour jeter un coup d’œil à Mlle Louise, qui était devenue terriblement pâle. Elle était vraisemblablement préoccupée par la sécurité de sa famille. Serge avait fait prisonnier, Monsieur Albergue, et nous n’avions aucune information pour confirmer la sécurité de sa mère à ce stade. « La plupart des armes de la République nécessitent d’être alimentées en énergie par des emblèmes. Il en va de même pour leurs dirigeables et leurs Armures. À cause de ça, l’armée de la République est essentiellement impuissante à l’heure actuelle. Elle ne peut ni s’opposer à nous, ni nous rejoindre en tant qu’alliés. »

L’armée de la République était bien trop dépendante de l’Arbre Sacré, ce qui la rendait totalement inutile dans l’urgence actuelle. Ils n’auraient pas imaginé dans leurs rêves les plus fous que tous les nobles du pays se feraient voler leurs armoiries d’un seul coup comme ça.

« Honnêtement, je suis juste heureux qu’ils ne puissent pas se mettre en travers du chemin. Cela signifie que nos seuls ennemis sont Serge et ses partisans. »

Lelia s’était levée de sa chaise dès que j’avais dit ça. « Attends une seconde. As-tu vraiment l’intention de te battre contre Serge ? » Je pouvais voir qu’elle avait du mal à comprendre la situation.

Émile ajouta : « Lelia, Serge ne peut pas être laissé en liberté après ce qu’il a fait. »

« Mais quand même ! Je sais qu’il doit avoir une sorte de raison pour faire ça. Il le doit ! » Elle secoua la tête. « C’est vrai, si vous n’étiez jamais venus en République, Serge n’aurait pas eu recours à ça ! » Ses yeux étaient remplis de haine et elle nous regardait fixement.

Donc elle pense qu’il n’aurait jamais commencé une révolution si ce n’était pas pour nous ? Huh. Elle n’a pas tout à fait tort ! C’était quand même le choix de Serge de commencer tout ça, pas le nôtre.

« Désolé, mais peux-tu garder tes diatribes hypothétiques pour plus tard ? » Je lui avais lancé un regard sombre. « Nous aimerions sauver Mlle Yumeria. »

« Tu es vraiment une ordure. Je ne comprends pas comment tu peux être si calme dans une situation comme celle-ci. »

J’avais haussé les épaules. « Et si je paniquais, qui viendrait à mon secours ? Crois-tu que Serge oubliera le passé si je verse quelques larmes ? »

Lelia n’avait pas d’argument pour ça, parce que j’avais raison. Elle avait baissé son regard vers le sol. D’un point de vue purement logique, elle savait que j’avais raison, mais ses émotions ne lui permettaient pas d’être d’accord avec moi.

Noëlle s’était approchée et avait serré la main de sa sœur en disant : « Ressaisis-toi. »

« Grande sœur ? »

« Serge doit assumer la responsabilité des décisions qu’il a prises. Ne blâme pas Léon pour cela. »

Noëlle ne connaissait pas tous les détails des jeux et de leur scénario. Ainsi, les mots de Lelia sonnaient-ils encore plus cruels qu’ils ne l’étaient en réalité à ses oreilles. Ce n’était que parce que Lelia et moi avions des souvenirs de notre vie passée que nous connaissions la vérité, alors quand on prenait cela en compte, on ne pouvait peut-être pas prétendre être complètement irréprochables. C’était précisément la raison pour laquelle je me sentais un peu responsable de la situation actuelle, même si je reconnaissais que Noëlle supposait que cela n’avait rien à voir avec moi.

J’avais tapé dans mes mains pour attirer l’attention de tous. « Très bien, assez de chamailleries. Nous n’avons pas de temps à perdre. Je vais passer à l’explication de notre plan de bataille : en gros, nous allons prendre d’assaut le Temple de l’Arbre Sacré et sauver Mlle Yumeria. »

Brad se tapa le front, grimaçant comme si cela lui faisait soudainement mal. « Tu appelles ça un plan ? Si ce que Serge a dit est vrai, Mlle Yumeria est maintenant la prêtresse de l’Arbre Sacré, n’est-ce pas ? Ne penses-tu pas qu’ils vont mettre leur vie en jeu pour la protéger ? »

« Avec le peu que nous avons, penses-tu vraiment que nous avons le temps de mettre au point une sorte de plan élaboré ? On va s’introduire là-dedans, l’attraper, et s’enfuir », avais-je dit.

« Je me demande vraiment si les choses vont se passer aussi bien que ça… »

« Pourquoi pas ? Ça a très bien marché quand je vous ai battus à plate couture avant. »

Brad avait ricané. « Tu aimes vraiment verser du sel dans les blessures des gens. »

Nous ne pouvions rien faire de trop voyant avant d’avoir sauvé Mlle Yumeria, mais une fois qu’elle serait en sécurité sous notre garde, les choses devraient se dérouler sans problème. Julius semblait moins convaincu, il soupira anxieusement et dit, « Je suppose que nous devrons penser aux détails nous-mêmes. Vu qu’ils sont beaucoup plus nombreux que nous, je suppose que notre meilleure chance serait de lancer une offensive complète avant de battre en retraite rapidement. Dans ce cas, nous irons également là-bas dans nos armures. » Il était plus que motivé pour nous rejoindre dans la bataille, même s’il avait quelques réserves.

Jilk avait secoué la tête. Bien sûr, ce ne serait pas si facile. « Non, c’est trop dangereux, Votre Altesse. Tu restes ici pendant que le reste des personnes iront à la bataille. »

« Quoi ? »

Greg croisa les bras et hocha la tête. « C’est logique, vu que tu es un prince. »

« Eh bien, oui, je comprends, mais…, » La voix de Julius s’était tue. Il n’était pas en position d’argumenter avec eux, mais il ne voulait pas non plus rester sur la touche. Personnellement, si j’étais à sa place et que tout le monde me disait de me retirer, je le ferais volontiers. Il était bien plus consciencieux que moi à cet égard.

« Vu les circonstances, ta simple participation pourrait avoir des répercussions plus tard », dit Chris, qui avait aussi l’intention de décourager son ami. « Je suis d’accord. Il serait préférable que tu restes en dehors de ça, Julius. »

Julius avait baissé sa tête en signe de déception.

 

☆☆☆

 

Alors que Léon et les autres garçons avaient commencé à se préparer, les membres féminins de leur groupe étaient restés ensemble dans la salle de réunion. Un air gêné s’était installé autour d’elles.

Carla s’était penchée près de Marie et lui avait chuchoté à l’oreille : « Lady Marie, j’ai peur. Terrifiée, en fait. On pourrait couper la tension ici avec un couteau ! »

« Ne t’inquiète pas. Je peux toujours intervenir pour les arrêter si nécessaire, » lui avait assuré Marie.

Elles faisaient référence à Lelia et Noëlle. Les jumelles s’engueulaient depuis le départ des garçons, tandis qu’Anjie et Livia observaient tranquillement la dispute… Enfin, c’était une interprétation des événements. Ces dernières étaient trop occupées à discuter de Léon et de leurs inquiétudes à son sujet pour s’occuper d’autre chose. Louise était toujours présente, mais ne souhaitait pas intervenir. Pour elle, cela n’avait rien à voir avec elle. Il ne restait donc que Marie et Carla pour intervenir si nécessaire.

Lelia et Noëlle s’agrippaient aux vêtements de l’autre tout en continuant à s’engueuler.

« Tu ne sais rien du tout, alors laisse ton gros nez en dehors de ça ! » avait hurlé Lelia. « Ce problème n’a rien à voir avec toi ! »

« Rien à voir avec moi, hein ? Et qui es-tu pour décider de ça ? J’en ai marre que tu me regardes de haut tout le temps ! »

Marie avait envie d’enfouir sa tête dans ses mains. Je peux comprendre ce que pense Lelia puisque je me suis réincarnée ici tout comme elle, mais elle n’a pas à trouver à redire à chaque petit geste de Noëlle ! Ce n’est pas comme si Noëlle n’était pas impliquée !

L’implication de Noëlle n’était pas en cause, avec la tentative de coup d’état en cours, le Saint Royaume de Rachel s’était sans doute allié à Serge précisément pour mettre la main sur elle. Son indignation lorsque sa sœur lui avait dit de se retirer était parfaitement logique. Cela dit, Lelia avait quelques arguments valables à faire valoir : On pouvait difficilement prétendre que Léon et Marie n’avaient rien à voir avec la situation actuelle. C’était la faute de Serge pour avoir choisi la voie qu’il avait choisie, oui, mais il était également vrai que cela ne serait pas arrivé si Léon et Marie n’étaient jamais venus en République. Lelia ne se serait jamais sentie obligée de récupérer Ideal sans la menace qu’ils représentaient.

Mais je n’aimerais pas non plus que quelqu’un pointe un doigt dans ma direction et agisse comme si tout était de ma faute, pensa Marie avec amertume. Elle était prête à accepter une partie de la faute, mais elle pensait qu’une part équitable revenait aussi à Lelia. Comme Marie, Lelia n’avait pas la finesse nécessaire pour mener les choses à bien. Elle avait ignoré les sentiments et les opinions de Noëlle pour choisir Loïc comme partenaire de Noëlle, et son intervention malvenue avait gâché la dynamique entre les deux. Elle s’était aussi attiré l’intérêt le plus facile de tous les amoureux : le gentil Émile.

On peut dire que sans nous, elle aurait tout fait foirer bien avant le coup d’État.

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Partie 2

Noëlle semblait avoir ses propres comptes à régler avec Lelia, alors Marie avait choisi de les laisser se chamailler au lieu d’intervenir. Anjie et Livia avaient gardé le silence avec elle, semblant sentir qu’elle se tenait à l’écart pour de bonnes raisons.

« Ça a toujours été comme ça. Tu es toujours celle qui est spéciale, » grommela Lelia. « Je veux dire, tu es la seule à avoir les capacités d’une prêtresse. Et puis il y a moi, l’accompagnatrice indésirable, qui te suit, le centre d’attention. J’ai dû supporter ça pendant si longtemps ! As-tu la moindre idée de combien j’ai souffert ? Ça m’a tellement énervée de voir à quel point tu étais joyeuse tout le temps, ignorant béatement ma douleur ! »

Lelia ne l’avait pas dit ouvertement, mais de son point de vue, Noëlle était la protagoniste de l’histoire et jouissait naturellement de tous les feux de la rampe. Même Marie avait un peu d’empathie. Elle jeta un coup d’œil à Livia, qui chuchotait à Anjie.

« Mais chéri est… »

« Laisse ça à Léon. »

De retour dans le feu de la dispute, les mots de Lelia avaient déclenché un changement dans le comportement de Noëlle. « Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire — “toujours le centre de l’attention” ? »

« Ça devrait être évident. C’est toi qui as l’aptitude de prêtresse. Ça doit être agréable d’avoir toujours quelqu’un pour venir te sauver. Dès que tu te trouves en difficulté, les garçons se précipitent pour te défendre. Prends Léon par exemple ! Il s’est précipité pour te sauver de Loïc. Tu es vraiment comme le personnage principal d’un roman. » Lelia avait vraisemblablement choisi de comparer sa sœur au protagoniste d’un livre plutôt que de risquer la confusion que cela entraînerait si elle disait la vérité.

Des larmes avaient coulé sur le visage de Noëlle. Elle s’était jetée en avant et avait attrapé Lelia par sa queue de cheval.

« Aïe, aïe ! Lâche-moi ! »

« J’en ai déjà assez de toi ! » avait hurlé Noëlle. Sa voix était si stridente que Marie avait dû mettre ses mains sur ses oreilles, même si Noëlle ne faisait pas attention à ceux qui la regardaient. « L’aptitude de prêtresse ? Qui se soucie de cela ? Je ne l’ai jamais demandé ! Je ne l’ai jamais voulu ! Ça n’a jamais eu de sens pour moi. C’est toi qui as pris toutes les choses que je voulais vraiment et qui les as gardées pour toi. Tout ce que tu as fait, c’est voler, et voler, et continuer à me voler depuis qu’on est enfants. Comment oses-tu prétendre que tu es la victime ici ! »

Alors que Noëlle la secouait, Lelia déclara docilement : « Lâche-moi. »

« C’est toujours la même chose avec toi ! Tu trouves le moyen de charmer tous ceux qui t’entourent pour qu’ils te dorlotent et fassent ce que tu veux. As-tu la moindre idée de ce que ça fait d’être comparé à toi toutes ces années ? Ce que ça fait d’être un piètre substitut ? Tu ne pourras jamais le comprendre ! »

Comme Noëlle commençait à partir en vrille, Marie s’était élancée en avant et avait tenté de les séparer. « Assez ! » s’écria-t-elle. Son élan l’aida à plaquer Noëlle au sol, de sorte que Lelia fut enfin libérée de son emprise.

Lelia s’était affalée sur un siège, en soufflant et en haletant. Son visage s’était lentement teinté de rouge alors que sa colère grandissait. Elle s’était remise sur ses pieds et avait piétiné jusqu’à Noëlle. Noëlle tenta de se lever pour rejoindre sa sœur et continuer le combat, mais Marie la maintenait frénétiquement au sol. « Noëlle, calme-toi ! »

« Laisse-moi partir ! Je ne me calmerai pas tant que je ne lui aurai pas dit ce que je pense. Comment ose-t-elle agir comme si c’était elle qui devait souffrir en silence ? C’est elle qui a profité de toutes les choses que je n’ai jamais eues ! C’est moi la vraie victime ici ! »

Lelia s’apprêtait à se jeter sur Noëlle, bien décidée à reprendre leur crêpage de chignon, mais Louise l’attrapa par le bras avant qu’elle ne puisse le faire.

« Assez de chamailleries mesquines », déclara Louise, qui en avait assez de leurs pitreries. « Toutes vos jacasseries me donnent la migraine. Certains d’entre nous ont des préoccupations légitimes, comme le bien-être de leur famille. Allez régler votre petite querelle ailleurs. »

« La famille ? » Lelia avait jeté un regard noir à Louise. « Tu as du culot. Si tu n’avais pas poussé Serge dans ses retranchements, il n’aurait jamais eu recours à ça. Tu te donnes un beau spectacle en jouant les spectateurs innocents, mais tu es aussi fautive. »

Louise avait rétréci ses yeux. Ses doigts se resserrèrent autour du bras de Lelia. « Et qu’est-ce que tu en sais ? As-tu la moindre idée de ce que Serge m’a fait dans le passé ? »

« Être une famille, c’est aussi se pardonner les uns aux autres. »

« Tu aimes bien te mêler des affaires des autres familles, même quand elles ne te concernent pas du tout. Laisse-moi deviner. Serge a raconté sa version de l’histoire d’une manière qui nous a dépeint comme les seuls méchants, n’est-ce pas ? Et tu as cru chaque mot, comme une idiote sans espoir. »

« Haha. Ce sont toujours les gens vraiment méchants qui peuvent se déguiser en victimes saintes, n’est-ce pas ? »

« Vous, les Lespinasses, vous savez vraiment comment vous mettre dans la peau des gens, n’est-ce pas ? Je n’aime pas Noëlle, mais toi, je te déteste vraiment. »

À peine la querelle entre Noëlle et Lelia était-elle terminée qu’une nouvelle querelle entre Lelia et Louise commençait. Marie était au bord des larmes. Je comprends ce que vous ressentez toutes les deux, mais vous ne pouvez pas continuer à vous battre comme ça ! À ce rythme, vous allez me donner un ulcère à l’estomac ! Elle enviait Léon d’avoir quitté la pièce avant d’être entraîné dans cette histoire. Elle aurait dû trouver une excuse, comme devoir aller aider les garçons. Elle aurait alors pu s’échapper plus tôt avec eux.

« J’en ai assez », déclara la voix d’Anjie. Sa patience envers les autres avait finalement été épuisée.

Lelia s’était renfrognée et avait regardé par-dessus son épaule. « Qu’est-ce que tu as dit ? » Sa voix traduisait son agacement, mais elle avait à peine fini de parler qu’elle détournait les yeux. Le regard effrayant sur le visage d’Anjie l’intimidait trop pour qu’elle puisse continuer. Si Lelia était un voyou dans cette équation, Anjie était plutôt une chef de la mafia.

« Je n’ai aucune idée de la raison de vos chamailleries, et cela ne m’intéresse pas. En ce moment, c’est un moment critique pour Léon et les autres. Si vous continuez à vous quereller et à le gêner, alors j’interviendrai pour m’occuper de vous. »

Marie pouvait presque visualiser des flammes jaillissant de derrière Anjie. Pour être honnête, un feu furieux représentait parfaitement la personnalité passionnée d’Anjie.

En revanche, le regard de Livia était glacial lorsqu’il se fixait sur les autres filles. « Une fois qu’il aura terminé, n’hésitez pas à discuter autant que vous le souhaitez. Nous vous demandons seulement de vous taire pour le moment afin que Monsieur Léon et les autres puissent se concentrer sur ce qu’ils font, ils n’ont pas le temps ou la place dans leur esprit pour d’autres problèmes, j’en suis sûre. » Le tempérament de Livia ressemblait plus à une rivière : calme par moments et terrifiant à d’autres. Bien que les deux filles soient intimidantes, Livia était celle qu’il fallait éviter lorsqu’elle était en colère.

Marie avait hoché la tête avec empressement. Coincée sous elle, Noëlle avait commencé à sangloter. « Je voulais juste… Je voulais juste que les gens m’aiment aussi. »

Marie baissa les yeux vers son amie, les sourcils froncés. « Noëlle ? »

 

☆☆☆

 

Le plan que j’avais élaboré avec les cinq idiots était le suivant : l’Einhorn conduirait notre petite flotte dans une attaque directe contre le Temple de l’Arbre Sacré. Nous nous y infiltrerions ensuite avec nos Armures et récupérerions Mlle Yumeria de ses ravisseurs. Si nous avions l’occasion de libérer des membres des Six Grandes Maisons capturés, nous le ferions également, mais à condition qu’ils soient encore en vie. Nos chances étaient probablement de cinquante-cinquante. Je voulais au moins croire que Monsieur Albergue était encore en vie, d’autant plus que Mlle Louise était très inquiète pour sa sécurité.

Les filles seraient transférées sur la Licorne, où elles resteraient en attente, éloignées du champ de bataille. Je ne voulais pas qu’elles soient impliquées dans le combat si je pouvais l’éviter.

Je me tenais sur le pont de l’Einhorn, les bras croisés, et en balayant la zone du regard, j’avais remarqué que Julius brillait par son absence. « Hein ? Où est parti Julius ? Aux toilettes ? »

Jilk avait jeté un coup d’œil vers la porte. Il était habillé dans une combinaison de pilote. « Il était découragé de ne pas pouvoir se joindre à nous, alors il a dit qu’il resterait avec les filles sur la Licorne. »

« Donc, depuis qu’il a perdu sa motivation, il va plutôt traîner là où il est en sécurité et regarder de loin ? Je vois qu’il se comporte toujours comme un prince gâté. » Je secouai la tête.

« Il a peut-être été dépouillé du titre de prince héritier, mais il reste néanmoins un prince. Comte Bartfort, je te demande de te souvenir du statut de son Altesse et de le garder à l’esprit à l’avenir. »

« Laisse-moi tranquille. C’est l’idiot qui a laissé une femme le priver de son droit au trône. Crois-moi, je n’ai pas oublié son statut ou le vôtre — vous êtes tous des crétins dans mon livre à moi », avais-je dit.

Jilk plissa les yeux. « Quelqu’un t’a-t-il déjà dit qu’il fallait faire attention aux tirs amis sur le champ de bataille ? »

Espèce de bâtard pourri. As-tu l’intention de me tirer dessus par derrière ou quoi ?

Pendant que nous nous occupions de ce ridicule va-et-vient, Luxon surveillait le pont de l’Einhorn. « Maître, Loïc est là », avait-il annoncé.

« Vraiment ? »

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Partie 3

Quand j’étais arrivé sur le pont, j’avais trouvé Loïc debout. Un petit navire l’avait transporté ici, et pour une raison inconnue, il était prêt à rejoindre le combat.

« Comte Bartfort, j’aimerais que vous me permettiez de me joindre à vous », avait-il dit.

« Tu sais que Marie est sur l’autre vaisseau, n’est-ce pas ? »

Il avait cligné des yeux lentement vers moi. « Elle est là-bas ? N-Non, je veux dire, ce n’est pas pourquoi je suis ici. Je veux me battre à vos côtés. »

Greg se renfrogna et s’avança vers Loïc en l’attrapant par le col de sa chemise. « Ce n’est pas un jeu ici ! Sans le pouvoir de l’Arbre Sacré, tu ne feras que nous gêner ! »

Son emportement m’avait pris par surprise, mais il n’avait pas tort, nous ne pouvions pas nous permettre de laisser quelqu’un comme Loïc nous rejoindre. Les nobles de la République étaient extraordinairement faibles sans la puissance de leurs blasons. Loïc était plus tonique et musclé que la plupart d’entre eux, mais cela ne le rendait que légèrement plus efficace qu’un fantassin moyen. Il y avait un écart évident entre ses compétences et le reste d’entre nous, qui avions travaillé jusqu’à l’os juste pour trouver assez d’argent pour des cadeaux à offrir aux filles holfortiennes à l’académie.

Loïc avait tenu bon et avait répondu : « Je peux au moins être un bouclier pour vous, même si c’est tout ce que je peux faire. »

« Qu’est-ce que tu viens de dire ? » grogna Greg.

« Milady m’a sauvé la vie, je lui suis donc redevable. De plus, ce serait plus pratique de m’avoir avec vous puisque je connais la disposition du temple. Je vous en supplie. Laissez-moi vous aider ! »

Ce serait beaucoup plus facile pour nous de nous déplacer avec lui. Greg me lança un regard et j’acquiesçai. Il relâcha sa prise sur la chemise de Loïc et se gratta l’arrière de la tête avant de tourner le dos à l’autre homme.

« Fais comme tu veux », avait-il dit. « Mais Marie serait triste si tu mourais, alors ne nous fait pas faux bond. »

« Merci ! »

Je trouvais ironique que Greg dise une telle chose à Loïc, étant donné qu’ils avaient tous deux des vues sur la même femme et étaient logiquement rivaux l’un de l’autre. De toute évidence, seuls les beaux hommes comme lui avaient la magnanimité de réciter de telles lignes. Je savais que je serais trop jaloux pour faire la même chose à sa place.

« Nous avons une Armure de rechange à portée de main que tu pourrais utiliser. Prends la blanche, » dis-je. C’était celle de Julius, mais puisqu’il ne se joignait pas à nous, elle pourrait au moins fournir une protection suffisante à Loïc pour qu’il ne meure pas au combat… J’espérais.

« J’apprécie beaucoup. Avec ça, je vais pouvoir me battre avec vous. Le fait de ne pas pouvoir intervenir et faire quoi que ce soit alors que vous étiez tous entraînés dans notre conflit m’a beaucoup vexé. »

Ce n’était donc pas une décision prise sur un coup de tête, mais quelque chose qu’il avait mûrement réfléchit. J’étais impressionné. Malheureusement, cette scène avait été interrompue quand une personne étonnamment familière était apparue — une personne que je n’avais pas vue depuis un certain temps. Pas dans cet accoutrement, en tout cas.

« Messieurs ! Cela fait bien trop longtemps ! » Julius — pardon, je veux dire — le chevalier masqué se tenait devant nous.

La dernière fois que je l’avais vu, c’était pendant la guerre entre le Royaume de Holfort et l’ancienne Principauté de Fanos. Il avait l’air tout aussi suspect qu’à l’époque avec son masque et sa cape, ainsi que sa démarche assurée.

« C’est l’homme masqué ! » Chris avait pris l’épée à sa hanche et l’avait dégainée.

Brad conjura immédiatement une boule de feu dans ses mains. « Pourquoi est-il aussi ici dans la République !? »

Les deux autres crétins le rejoignirent, tous les quatre complètement inconscients de la véritable identité de l’homme. Même le frère adoptif de Julius — qui avait été élevé aux côtés du prince depuis son plus jeune âge — ne le reconnut pas et pointa le canon de son arme sur le chevalier masqué.

Loïc avait cligné des yeux à plusieurs reprises. Il ne pouvait pas comprendre ce qu’il voyait.

Luxon s’était approché de mon oreille et avait dit : « Alors on recommence cette petite charade ? Pourquoi ne pas renoncer à la ruse et révéler son identité une fois pour toutes ? »

« Je ne veux pas être impliqué », avais-je dit. « De plus, on ne sait jamais. Peut-être que ces idiots apprécient leur petit jeu théâtral. Mieux vaut les laisser faire, quoi qu’il arrive. C’est une comédie plutôt amusante tant que tu te tiens à distance. »

Une partie de moi était désolée pour Marie et la façon dont elle devait supporter les pitreries de ces idiots, mais le reste de moi pensait que c’était bien fait pour elle. Le moins qu’ils puissent faire est de me divertir un peu.

Le chevalier masqué s’était avancé vers moi. « Cela fait longtemps, comte Bartfort. »

Attends. Tu me parles tout d’un coup ?

« Euh, ouais… »

« J’ai entendu que les chances sont contre vous. Bien que cela ne représente pas grand chose, je vous prêterais mon pouvoir. Je demande seulement que vous me fournissiez une armure convenable à utiliser. La blanche du Prince Julius est disponible, n’est-ce pas ? »

Tu as vraiment le pire timing du monde.

Alors que le chevalier masqué semblait confiant que j’allais accéder à sa demande, j’avais jeté un coup d’œil à Loïc et j’avais dit : « Euh, désolé mais pas possible. Je viens de promettre à Loïc qu’il pourrait le piloter. »

Loïc avait regardé l’homme masqué avec méfiance. Vu le peu de contacts qu’il avait eu avec Julius, je ne m’attendais pas à ce qu’il devine sa véritable identité.

« Vous avez entendu le monsieur, » dit Loïc. « Si vous n’avez plus rien à faire ici, partez. »

« Comment osez-vous ? Cette armure m’appartient ! »

« Il appartient au comte Bartfort, n’est-ce pas ? » Loïc avait examiné le chevalier. « Quel est l’intérêt de ce drôle de masque ? Pourquoi ne pas l’enlever et nous donner votre vrai nom ? »

Le chevalier masqué avait tressailli. Aussi valables que soient les demandes de Loïc, le chevalier ne pouvait pas les accepter. Il se racla la gorge et dit : « N’est-il pas évident pour vous que j’ai de bonnes raisons de garder mon identité cachée ? Comte Bartfort, je vous assure que cet homme n’est pas apte à piloter l’Armure blanche. Permettez-moi de le faire à sa place ! »

Dommage. On avait besoin de Loïc pour nous montrer le chemin une fois arrivé au temple. Il était plus prioritaire que Julius. « Renoncez à venir avec nous et suivez-moi plutôt sur le pont. Je peux au moins vous offrir du thé. »

« Pourquoi pensez-vous que j’ai pris la peine de venir ici ! ? Laissez-moi y aller ! »

 

☆☆☆

 

Nous avions quitté le pont après cela et nous nous étions dirigés vers le hangar de l’Einhorn. Jilk avait regardé Loïc monter dans le cockpit de l’Armure blanche, vêtu de la tenue de pilote qui avait été conçue à l’origine pour Julius. Il marmonnait en lui-même : « Le comte Bartfort est un homme assez déroutant. Il faut un sacré culot pour affronter un adversaire comme la République avec une toute petite flotte comme la nôtre. »

« C’est l’armée rebelle, pas la République, » corrigea Brad. « Et ils n’ont que deux cents vaisseaux. Je pense que nous avons de bonnes chances de gagner. »

« Même si leur force de combat est au moins six fois supérieure à la nôtre ? »

Brad avait haussé les épaules. « Notre objectif est le sauvetage de Mlle Yumeria, non ? Ils ne pourront pas nous pourchasser si nous fuyons par la suite. Tous leurs armements sont faits spécifiquement pour la défense, après tout. À la seconde où ils quittent leurs frontières, ils ne peuvent plus se battre. »

La dépendance de la République au pouvoir de l’Arbre Sacré signifiait qu’elle était inévitablement affaiblie lorsqu’elle sortait de ses limites. L’argument de Brad avait été retenu.

« Si notre adversaire a vraiment les mêmes capacités que Luxon, alors ne serait-il pas raisonnable de penser qu’ils pourront se battre même en dehors des frontières de la République ? » Chris s’était interposé.

« Argh… » Brad grimaça. « Je-je suppose que tu as raison. Mais Luxon a dit que nous avions de bonnes chances. Je suis sûr qu’ils ont prévu une stratégie secrète. »

Chris avait plaisanté : « Ne trouves-tu pas que c’est un peu bizarre d’agir de façon aussi arrogante alors que tu n’as aucune idée de ce que cette prétendue stratégie secrète implique ? »

Brad était resté silencieux cette fois.

Greg avait froncé les sourcils. « Concentrez-vous, les gars. Cette fois, on ne peut vraiment pas se permettre de faire n’importe quoi, surtout quand on sait à qui on a affaire. »

Ideal était un artefact perdu tout comme Luxon, et il apportait tout son soutien à Serge. Greg et les autres garçons avaient vu par eux-mêmes la puissance d’Arroganz lorsqu’ils l’avaient combattu. Ils savaient à quel point c’était terrifiant. Leur adversaire viendrait vers eux avec une force similaire.

En ce qui concerne l’Arroganz, Léon était déjà bien installé dans son cockpit et hors de vue. Alors que les quatre nobles garçons discutaient entre eux, sa voix résonna à l’intérieur : « Je commence à en avoir marre de vos bavardages ! On dirait une bande d’enfants dans une cour de récréation. Essayez de baisser d’un ton, voulez-vous !? »

Jilk fronça les sourcils, habitué sinon perpétuellement épuisé par l’attitude de Léon. « Tu as vraiment une langue mordante, et pas dans le bon sens du terme. »

« Fermez-la tous et faites votre travail en tant que mes boucliers de viande. »

S’ils n’étaient pas irrités par l’attitude de Léon avant, ils l’étaient certainement maintenant.

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Claramiel

Bonjour, Alors que dire sur moi, Je suis Clarisse.

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