Chapitre 7 : Un combat entre sœurs
Partie 2
Noëlle semblait avoir ses propres comptes à régler avec Lelia, alors Marie avait choisi de les laisser se chamailler au lieu d’intervenir. Anjie et Livia avaient gardé le silence avec elle, semblant sentir qu’elle se tenait à l’écart pour de bonnes raisons.
« Ça a toujours été comme ça. Tu es toujours celle qui est spéciale, » grommela Lelia. « Je veux dire, tu es la seule à avoir les capacités d’une prêtresse. Et puis il y a moi, l’accompagnatrice indésirable, qui te suit, le centre d’attention. J’ai dû supporter ça pendant si longtemps ! As-tu la moindre idée de combien j’ai souffert ? Ça m’a tellement énervée de voir à quel point tu étais joyeuse tout le temps, ignorant béatement ma douleur ! »
Lelia ne l’avait pas dit ouvertement, mais de son point de vue, Noëlle était la protagoniste de l’histoire et jouissait naturellement de tous les feux de la rampe. Même Marie avait un peu d’empathie. Elle jeta un coup d’œil à Livia, qui chuchotait à Anjie.
« Mais chéri est… »
« Laisse ça à Léon. »
De retour dans le feu de la dispute, les mots de Lelia avaient déclenché un changement dans le comportement de Noëlle. « Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire — “toujours le centre de l’attention” ? »
« Ça devrait être évident. C’est toi qui as l’aptitude de prêtresse. Ça doit être agréable d’avoir toujours quelqu’un pour venir te sauver. Dès que tu te trouves en difficulté, les garçons se précipitent pour te défendre. Prends Léon par exemple ! Il s’est précipité pour te sauver de Loïc. Tu es vraiment comme le personnage principal d’un roman. » Lelia avait vraisemblablement choisi de comparer sa sœur au protagoniste d’un livre plutôt que de risquer la confusion que cela entraînerait si elle disait la vérité.
Des larmes avaient coulé sur le visage de Noëlle. Elle s’était jetée en avant et avait attrapé Lelia par sa queue de cheval.
« Aïe, aïe ! Lâche-moi ! »
« J’en ai déjà assez de toi ! » avait hurlé Noëlle. Sa voix était si stridente que Marie avait dû mettre ses mains sur ses oreilles, même si Noëlle ne faisait pas attention à ceux qui la regardaient. « L’aptitude de prêtresse ? Qui se soucie de cela ? Je ne l’ai jamais demandé ! Je ne l’ai jamais voulu ! Ça n’a jamais eu de sens pour moi. C’est toi qui as pris toutes les choses que je voulais vraiment et qui les as gardées pour toi. Tout ce que tu as fait, c’est voler, et voler, et continuer à me voler depuis qu’on est enfants. Comment oses-tu prétendre que tu es la victime ici ! »
Alors que Noëlle la secouait, Lelia déclara docilement : « Lâche-moi. »
« C’est toujours la même chose avec toi ! Tu trouves le moyen de charmer tous ceux qui t’entourent pour qu’ils te dorlotent et fassent ce que tu veux. As-tu la moindre idée de ce que ça fait d’être comparé à toi toutes ces années ? Ce que ça fait d’être un piètre substitut ? Tu ne pourras jamais le comprendre ! »
Comme Noëlle commençait à partir en vrille, Marie s’était élancée en avant et avait tenté de les séparer. « Assez ! » s’écria-t-elle. Son élan l’aida à plaquer Noëlle au sol, de sorte que Lelia fut enfin libérée de son emprise.
Lelia s’était affalée sur un siège, en soufflant et en haletant. Son visage s’était lentement teinté de rouge alors que sa colère grandissait. Elle s’était remise sur ses pieds et avait piétiné jusqu’à Noëlle. Noëlle tenta de se lever pour rejoindre sa sœur et continuer le combat, mais Marie la maintenait frénétiquement au sol. « Noëlle, calme-toi ! »
« Laisse-moi partir ! Je ne me calmerai pas tant que je ne lui aurai pas dit ce que je pense. Comment ose-t-elle agir comme si c’était elle qui devait souffrir en silence ? C’est elle qui a profité de toutes les choses que je n’ai jamais eues ! C’est moi la vraie victime ici ! »
Lelia s’apprêtait à se jeter sur Noëlle, bien décidée à reprendre leur crêpage de chignon, mais Louise l’attrapa par le bras avant qu’elle ne puisse le faire.
« Assez de chamailleries mesquines », déclara Louise, qui en avait assez de leurs pitreries. « Toutes vos jacasseries me donnent la migraine. Certains d’entre nous ont des préoccupations légitimes, comme le bien-être de leur famille. Allez régler votre petite querelle ailleurs. »
« La famille ? » Lelia avait jeté un regard noir à Louise. « Tu as du culot. Si tu n’avais pas poussé Serge dans ses retranchements, il n’aurait jamais eu recours à ça. Tu te donnes un beau spectacle en jouant les spectateurs innocents, mais tu es aussi fautive. »
Louise avait rétréci ses yeux. Ses doigts se resserrèrent autour du bras de Lelia. « Et qu’est-ce que tu en sais ? As-tu la moindre idée de ce que Serge m’a fait dans le passé ? »
« Être une famille, c’est aussi se pardonner les uns aux autres. »
« Tu aimes bien te mêler des affaires des autres familles, même quand elles ne te concernent pas du tout. Laisse-moi deviner. Serge a raconté sa version de l’histoire d’une manière qui nous a dépeint comme les seuls méchants, n’est-ce pas ? Et tu as cru chaque mot, comme une idiote sans espoir. »
« Haha. Ce sont toujours les gens vraiment méchants qui peuvent se déguiser en victimes saintes, n’est-ce pas ? »
« Vous, les Lespinasses, vous savez vraiment comment vous mettre dans la peau des gens, n’est-ce pas ? Je n’aime pas Noëlle, mais toi, je te déteste vraiment. »
À peine la querelle entre Noëlle et Lelia était-elle terminée qu’une nouvelle querelle entre Lelia et Louise commençait. Marie était au bord des larmes. Je comprends ce que vous ressentez toutes les deux, mais vous ne pouvez pas continuer à vous battre comme ça ! À ce rythme, vous allez me donner un ulcère à l’estomac ! Elle enviait Léon d’avoir quitté la pièce avant d’être entraîné dans cette histoire. Elle aurait dû trouver une excuse, comme devoir aller aider les garçons. Elle aurait alors pu s’échapper plus tôt avec eux.
« J’en ai assez », déclara la voix d’Anjie. Sa patience envers les autres avait finalement été épuisée.
Lelia s’était renfrognée et avait regardé par-dessus son épaule. « Qu’est-ce que tu as dit ? » Sa voix traduisait son agacement, mais elle avait à peine fini de parler qu’elle détournait les yeux. Le regard effrayant sur le visage d’Anjie l’intimidait trop pour qu’elle puisse continuer. Si Lelia était un voyou dans cette équation, Anjie était plutôt une chef de la mafia.
« Je n’ai aucune idée de la raison de vos chamailleries, et cela ne m’intéresse pas. En ce moment, c’est un moment critique pour Léon et les autres. Si vous continuez à vous quereller et à le gêner, alors j’interviendrai pour m’occuper de vous. »
Marie pouvait presque visualiser des flammes jaillissant de derrière Anjie. Pour être honnête, un feu furieux représentait parfaitement la personnalité passionnée d’Anjie.
En revanche, le regard de Livia était glacial lorsqu’il se fixait sur les autres filles. « Une fois qu’il aura terminé, n’hésitez pas à discuter autant que vous le souhaitez. Nous vous demandons seulement de vous taire pour le moment afin que Monsieur Léon et les autres puissent se concentrer sur ce qu’ils font, ils n’ont pas le temps ou la place dans leur esprit pour d’autres problèmes, j’en suis sûre. » Le tempérament de Livia ressemblait plus à une rivière : calme par moments et terrifiant à d’autres. Bien que les deux filles soient intimidantes, Livia était celle qu’il fallait éviter lorsqu’elle était en colère.
Marie avait hoché la tête avec empressement. Coincée sous elle, Noëlle avait commencé à sangloter. « Je voulais juste… Je voulais juste que les gens m’aiment aussi. »
Marie baissa les yeux vers son amie, les sourcils froncés. « Noëlle ? »
☆☆☆
Le plan que j’avais élaboré avec les cinq idiots était le suivant : l’Einhorn conduirait notre petite flotte dans une attaque directe contre le Temple de l’Arbre Sacré. Nous nous y infiltrerions ensuite avec nos Armures et récupérerions Mlle Yumeria de ses ravisseurs. Si nous avions l’occasion de libérer des membres des Six Grandes Maisons capturés, nous le ferions également, mais à condition qu’ils soient encore en vie. Nos chances étaient probablement de cinquante-cinquante. Je voulais au moins croire que Monsieur Albergue était encore en vie, d’autant plus que Mlle Louise était très inquiète pour sa sécurité.
Les filles seraient transférées sur la Licorne, où elles resteraient en attente, éloignées du champ de bataille. Je ne voulais pas qu’elles soient impliquées dans le combat si je pouvais l’éviter.
Je me tenais sur le pont de l’Einhorn, les bras croisés, et en balayant la zone du regard, j’avais remarqué que Julius brillait par son absence. « Hein ? Où est parti Julius ? Aux toilettes ? »
Jilk avait jeté un coup d’œil vers la porte. Il était habillé dans une combinaison de pilote. « Il était découragé de ne pas pouvoir se joindre à nous, alors il a dit qu’il resterait avec les filles sur la Licorne. »
« Donc, depuis qu’il a perdu sa motivation, il va plutôt traîner là où il est en sécurité et regarder de loin ? Je vois qu’il se comporte toujours comme un prince gâté. » Je secouai la tête.
« Il a peut-être été dépouillé du titre de prince héritier, mais il reste néanmoins un prince. Comte Bartfort, je te demande de te souvenir du statut de son Altesse et de le garder à l’esprit à l’avenir. »
« Laisse-moi tranquille. C’est l’idiot qui a laissé une femme le priver de son droit au trône. Crois-moi, je n’ai pas oublié son statut ou le vôtre — vous êtes tous des crétins dans mon livre à moi », avais-je dit.
Jilk plissa les yeux. « Quelqu’un t’a-t-il déjà dit qu’il fallait faire attention aux tirs amis sur le champ de bataille ? »
Espèce de bâtard pourri. As-tu l’intention de me tirer dessus par derrière ou quoi ?
Pendant que nous nous occupions de ce ridicule va-et-vient, Luxon surveillait le pont de l’Einhorn. « Maître, Loïc est là », avait-il annoncé.
« Vraiment ? »
merci pour le chapitre