Chapitre 2 : Les visiteurs
Partie 6
« … Ouf. »
Après s’être séparée de Wein et avoir ôté son déguisement, Zenovia avait poussé un soupir dans son bureau.
« Excellent travail aujourd’hui, Lady Zenovia, » Jiva l’avait louée.
« Des problèmes pendant mon absence ? »
« Pas du tout, » avait-il déclaré. « Quelques papiers doivent être examinés… Mais nous pouvons nous en occuper après les avoir vu partir demain. »
Zenovia acquiesça. « Ça n’a pas été facile, mais on dirait qu’on va s’en sortir d’une manière ou d’une autre. »
« Oui. Tout cela grâce à vous… Il semble qu’il ait effectivement demandé une union conjugale aujourd’hui dans votre expédition. »
« Il semblait se demander ce qui prenait tant de temps. » Elle avait détourné les yeux. « … Je suis désolée, Jiva, d’avoir ignoré ton conseil de l’épouser. »
« Vous vous entendez ? Vous êtes la souveraine de ce territoire, Lady Zenovia. Vous serez toujours notre priorité absolue, » avait-il répondu. « D’ailleurs, je comprends vos sentiments. Le prince Wein est… »
« Uh-huh, » confirma Zenovia avec un sourire sans humour. « Je ne pourrais jamais lui dire, mais… il est distant et un peu effrayant. »
Ses sentiments pour Wein étaient compliqués.
Son plus grand sentiment était la gratitude envers lui pour avoir aidé l’Armée de libération. Le suivant était l’empathie et le respect en tant que jeune leader, suivi par l’envie et un sentiment d’infériorité face à ses réalisations. Elle craignait son état d’esprit et ses idées, qui semblaient presque divorcer de sa position royale, mais elle admirait sa ruse et son courage.
En résumé, Wein était un héros distant, incroyable et effrayant.
« D’après notre visite d’aujourd’hui et nos interactions passées, je suis douloureusement consciente que je ne pourrais jamais être sa femme. »
Si Zenovia devait épouser Wein, elle deviendrait naturellement sa princesse consort.
À l’époque où elle ne savait rien de lui, elle aurait été d’accord. Cependant, bien que leur temps ensemble ait été court, Zenovia avait fini par le considérer comme un héros. Elle n’avait pas confiance en sa capacité à être le vent sous ses ailes.
« De plus, sa princesse consort est la future reine. Et cela vient avec de nombreux devoirs… »
Elle avait été élevée à l’abri. Bien qu’elle étudiait à fond, elle manquait cruellement de moyens, ce qui avait pour conséquence d’alourdir le fardeau de ses vassaux. Gérer le territoire était déjà assez difficile. Si elle devenait la femme de Wein, elle serait accablée par la responsabilité de Natra dans son ensemble.
Si la paix régnait, elle aurait pu se reposer dans le palais de Natra, loin de la politique.
Non seulement c’était une période de troubles, mais Natra essayait de faire d’énormes progrès. Si Zenovia devenait reine, le rôle qui lui serait attribué ne serait pas mince. Elle ne croyait pas en elle.
Elle avait déjà eu un aperçu de la boîte de Pandore. Sa décision était simple.
Elle savait qu’épouser Wein serait une décision brillante, mais son cœur n’y était pas.
« Je suis une ratée… »
Ce serait beaucoup, beaucoup mieux si la princesse impériale Lowellmina épousait Wein. En fait, Zenovia aurait franchi le pas si tel était le cas, servant de maîtresse avec la permission de ses vassaux enthousiastes. En fait, elle avait envisagé de lui poser des questions sur la princesse Lowellmina pendant la fête de bienvenue.
Jiva avait soudainement pris la parole. « Excusez-moi de dépasser les limites, mais lorsque nous avons arraché cette ville à l’emprise de Cavarin, les vassaux ont fait deux vœux à votre égard, Lady Zenovia. »
« Quels vœux ? » demanda-t-elle en inclinant la tête.
Jiva poursuit. « Un : nous ferions tout pour le bien de Marden. Deux : nous ne vous forcerions jamais à suivre une voie contre votre volonté, même si c’était la meilleure chose pour le territoire. »
Les yeux de Zenovia s’étaient élargis. Elle savait que ses vassaux faisaient de leur mieux, mais elle n’aurait jamais imaginé qu’ils iraient aussi loin.
« Si vous pensez que le mariage avec le prince Wein n’est pas la solution, ce n’est pas grave. Nous nous réunissons pour former le meilleur plan possible. Soyez à l’aise. » Il avait offert un petit sourire. « Entre nous, c’est mon devoir de vassal qui me l’a proposé. Personnellement, je n’étais pas très chaud pour cette union. »
« N’as-tu pas une haute opinion du Prince Wein ? »
« Bien sûr. Je n’ai même pas le droit de l’évaluer. Mais sa personnalité et sa conduite sont inquiétantes… Quand j’ai appris qu’il avait tué le roi de Cavarin et mis le feu à la ville pour s’enfuir, j’ai eu des doutes sur sa santé mentale, pour ne pas dire plus. »
« Ah. Eh bien, c’était plutôt rébarbatif pour moi aussi. »
« Au lieu d’agoniser sur le passé, il est crucial de regarder vers l’avant, » avait-il dit pendant le fiasco, ce qui l’avait encore plus dégoûtée. Toute personne ayant une once de bon sens pouvait voir pourquoi aucune femme saine d’esprit ne choisirait d’être sa femme.
« Vous devrez vous marier à un moment donné pour vous assurer un héritier, mais il y a plus qu’assez de prétendants pour vous. Avec des négociations réussies entre Natra et Soljest, nous ne serons plus en danger, et vous aurez le temps d’y réfléchir à loisir. Nous pouvons en discuter avec tout le monde. »
« Tu as raison… Merci, Jiva. »
« Pas du tout. Cela fait partie de mes fonctions. » Il a fait une révérence respectueuse au jeune chef.
« Pardonnez-moi… ! » Un fonctionnaire agité s’était précipité dans le bureau.
« Qu’est-ce que c’est ? S’est-il passé quelque chose ? » demanda Jiva.
« À l’instant, à la porte principale du palais — . »
Les yeux de Zenovia et de Jiva s’étaient écarquillés à ce rapport.
Pendant ce temps, Wein était de retour dans sa chambre.
« Un homme laid avec un énorme ego, hein…, » gémit-il en s’étirant au milieu du lit.
« Peux-tu, s’il te plaît, t’en remettre ? C’était sa dernière excuse. »
Ninym était à côté de lui. Rien ne semblait améliorer son humeur.
Elle soupira. « Il semble que Zenovia n’ait pas l’intention de s’associer secrètement à une autre nation. C’est une information vitale. »
« Mais maintenant, je ne sais vraiment pas pourquoi elle ne m’a pas demandé en mariage ! »
« Peut-être… des circonstances personnelles ? »
« Comme quoi ? »
« … Comme si tu n’étais pas son type ? »
« Je reviens tout de suite ! Je vais me tuer ! »
« Si tu sautes par la fenêtre, tu vas te casser les jambes… ! »
Éloignant Wein de la fenêtre, Ninym cherchait les bons mots à dire.
« En plus, tu peux toujours être sexy et ne pas être son type. »
« Dis-le. Dis-moi que je suis sexy. »
« … Entends-tu quelque chose ? »
« Hé ! N’essaie pas de trouver des excuses… ! Comme c’est typique, Mlle Ninym… ! »
« Non. Attends, » elle avait ignoré ses gémissements.
Il avait compris qu’elle avait raison quand elle avait ouvert la porte. Ils pouvaient entendre quelque chose se passer dehors.
« Attends ici, Wein. Je vais vérifier. »
« Pendant que tu n’es pas là, je vais bouder et hiberner pour toujours. »
« C’est à peine l’automne. » Elle lui avait adressé un sourire sec avant de quitter la pièce.
Il n’avait pas fallu longtemps pour qu’elle revienne avec un air paniquer sur le visage.
« C’est mauvais, Wein. On dirait que Marden a un invité surprise. »
« Qui cela peut-il être ? » Il avait penché la tête sur le côté.
Ninym était très sérieuse. « Le Premier ministre de Delunio, Sirgis. »
+++
— Comment cela est-il arrivé ?
L’esprit de Zenovia avait tourné autour de cette question dans l’une des salles de réception du palais.
Un homme de petite taille était assis juste en face d’elle. Il s’appelait Sirgis, né roturier, il était maintenant Premier ministre de Delunio.
« Je m’excuse de m’imposer à vous sans prévenir, princesse Zenovia… Je veux dire, Marquise, » corrigea Sirgis en inclinant la tête.
Son regard n’avait rien de chaleureux. « Pour un Premier ministre, enfreindre les règles de conduite… Vous devez savoir que cela donne une mauvaise image de votre royaume. »
Son attitude inaccessible avait fait se raidir Sirgis, ainsi que son aide Jiva et son garde Borgen.
« Jiva, elle a l’air énervée, » chuchota Borgen.
Il avait fait un tout petit signe de tête. « Il ne s’agit pas seulement de mauvaises manières. Le prince Wein reste avec nous. Elle ne veut pas qu’on lui vole son plaisir. »
« Mais n’est-elle pas trop difficile ? »
« C’est comme ça. » Jiva soupira. « Après tout, Lady Zenovia déteste Delunio. »
« Quoi ? » Les sourcils de Borgen s’étaient plissés.
Sirgis avait répondu. « Je comprends votre colère. Cependant, je ne suis ici que pour résoudre un problème urgent entre Delunio et Marden. Je vous demande votre compréhension. »
« Quel problème ? Ça ne me dit rien du tout. »
« Oh, je vous en prie. » Sirgis ne semblait pas perturbé. « Vous devez avoir reçu notre lettre. Nous avons des inquiétudes concernant vos marchandises exportées. » Son ton indiquait clairement qu’il n’accepterait aucune excuse.
Zenovia avait affiché un sourire superficiel en y réfléchissant.
— Tu vas tomber, Premier Morceau de Merde.
À l’époque où Marden était son propre royaume, ils étaient en relativement bons termes avec Soljest et Delunio. Du moins, de leur point de vue.
Cependant, Cavarin s’était emparé de leur capitale l’année précédente. Zenovia avait tenté de mener ses forces restantes dans une révolte contre leur contrôle, mais elles s’étaient retrouvées en position de faiblesse. Elle avait dû demander l’aide des deux nations.
Ces espoirs furent vains, car aucune réponse ne vint des deux nations. Le roi Gruyère de Soljest ne pensait pas à Marden, et Sirgis voulait éviter de se faire un ennemi de Cavarin puisqu’ils accueillaient les Saintes Élites.
Finalement, Marden s’était allié à Natra et avait repris la capitale, mais cela n’avait en rien atténué le sentiment de trahison éprouvé par Zenovia et ses vassaux.
« D’après ses dames d’honneur…, » chuchota Jiva. « Quand elle était jeune fille, Zenovia avait un petit chiot qui s’est égaré un jour dans les jardins du palais. Là, il est mort d’une morsure de serpent. »
« Et ? »
« Lady Zenovia se découragea. Après son enterrement, elle a passé quatre jours à chercher le serpent. Apparemment, elle l’a tué avec sa propre épée. »
« … »
« Elle aime Marden de tout son cœur. Cependant, ses émotions ont une autre facette. »
En d’autres termes, Cavarin, Soljest, Delunio, et même Levetia étaient sur sa liste de cibles. Zenovia était furieuse qu’un représentant de Delunio soit venu à l’improviste pour se plaindre du commerce.
« Même si vous dites que vous avez des inquiétudes…, » commença Zenovia. « Nous n’avons rien fait de mal. Si vous êtes venus avec de fausses allégations, je dois vous demander de partir. »
« Je suppose que vous n’avez aucun intérêt pour la discussion ? »
« Est-ce comme ça que vous gérez les discussions dans votre pays ? En faisant irruption et en essayant d’imposer vos opinions dans ma gorge ? Il semble y avoir une différence culturelle, si vous voulez mon avis. »
« … C’est triste de voir que vous preniez votre rétrogradation si mal. »
Ils s’étaient tirés dessus à coups de poignard. Tout semblant de civilité avait disparu. Ceux qui écoutaient ne pouvaient rien faire d’autre que de regarder avec inquiétude.
« Je suppose qu’il n’y a pas d’autre solution. Je n’ai pas d’autre choix que de parler directement à la famille royale de Natra. »
« Ah oui ? Eh bien, ne vous attendez pas à ce que je coopère. »
« Vraiment ? » répondit Sirgis. « Le prince n’est-il pas ici ? Je souhaite le rencontrer. »
« … »
Zenovia avait finalement compris.
Sirgis avait misé là-dessus. En se présentant sans être invité pendant le séjour de Wein, il pouvait parler à son supérieur si elle refusait de coopérer. C’était totalement logique, vraiment.
C’était la première fois que quelqu’un la traitait avec un tel manque de respect.
Je vais le tuer.
Elle avait l’impression qu’elle allait entrer dans une rage meurtrière.
Je dois rester calme. Comme l’a dit le prince Wein, il est barbare de sortir son épée au milieu d’une réunion.
C’était le domaine politique. Elle ne pouvait pas agir de manière irréfléchie. Zenovia s’était souvenue de ce que Wein lui avait appris et avait calmé son cœur.
— Eh bien, Wein avait assassiné le roi Ordalasse de Cavarin.
Mais je dois arrêter Sirgis tout de suite…
Lui permettre de rencontrer Wein n’était pas une option. Cependant, son adversaire n’allait pas reculer facilement.
La porte de la chambre s’était ouverte alors qu’elle essayait de trouver une stratégie de sortie.
« Ne vous inquiétez pas, Lady Zenovia, » assura un jeune homme — Wein.
Il avait souri. « Si vous souhaitez me parler, je suis tout ouïe, M. le Premier ministre. »
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La, ces infos n’avez pas été indiqué dans l’animé.
Merci pour le chapitre.