Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 8 – Acte 6 – Partie 2

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Chapitre 6 : Acte 6

Partie 2

« Non, mais sérieusement, tu as attendu trois années entières que je revienne, et tu as décidé d’aller à Yggdrasil avec moi. Je sais à quel point tu as un grand cœur, » déclara Yuuto. « Félicia m’a même dit quelque chose à ce sujet ! Comme prévu pour la femme que Grand Frère a choisie. Elle est vraiment digne d’être l’épouse d’un souverain. Tu aurais dû voir ma tête. Et puis, quand j’ai entendu ce que tu as dit après ça, donnant ton approbation officielle aux affaires conj... J’ai eu du mal à fermer ma mâchoire après ça. »

« C’était… J’ai fait des recherches sur les épouses de la période des États en guerre, et j’ai beaucoup réfléchi à tout, et donc… »

« Cependant, tu réfléchis trop. Je suis loyal envers toi, et toi seule. »

« Oui. Je sais que je suis la personne que tu aimes le plus. Mais la deuxième personne que tu aimes le plus est Félicia, non ? »

« … »

« Je vais interpréter le silence comme un aveu. »

« N-Non, attends, attends un peu. Maintenant, hum… »

Yuuto avait commencé à bégayer et à paniquer, ce qui avait fait glousser Mitsuki.

« Écoute, je n’essaie pas de t’attaquer ou de te blâmer ou quoi que ce soit. C’est une belle femme, et elle s’est occupée de tes besoins, professionnels et personnels, pendant si longtemps. Je pense qu’il serait impossible de te demander de ne pas avoir ressenti quelque chose pour elle. »

« Mais je t’ai quand même choisie. Et tu as abandonné tant de choses, juste pour être avec moi. J’ai une responsabilité envers… »

« Yuu-kun, tu as la responsabilité de penser d’abord à ton clan, pas à moi, » déclara Mitsuki sans ambages. « Parce que tu es leur patriarche. »

Elle avait poursuivi :

« Par exemple… Si tu prenais Linéa, ou Al et Kris, comme épouses, cela approfondirait les relations entre les clans, non ? »

« … Eh bien, oui, ça le ferait. »

« Et garde à l’esprit que je n’ai pas l’intention de céder le siège de “première épouse et reine” à qui que ce soit, bien sûr. Mais si tu le faisais, si tu prenais des filles d’autres clans comme épouses secondaires et autres, ce serait un énorme avantage pour le Clan du Loup. Est-ce que ce scénario a un sens ? »

« … » Une fois de plus, Yuuto resta silencieux d’une manière qui servait d’aveu tacite. Puis, il poussa un long soupir. « Es-tu vraiment sûre que tu serais d’accord avec quelque chose comme ça ? »

« Si tu m’aimes vraiment toujours plus que tout, alors oui. »

« … Tu es vraiment, vraiment trop bien pour moi. Je ne mérite pas une femme comme toi. »

« Alors, tu ferais mieux de me traiter correctement. » Mitsuki avait dit cette dernière déclaration d’une manière presque ludique. Mais le ton de la voix dans la réponse qui lui était revenue était presque sinistrement sérieux.

« Oui, je le ferai, quoi qu’il arrive… Je t’aime. »

 

« Et il a vraiment dit ça — ! Aaaah ! » Mitsuki s’était exclamée. « Quand j’ai entendu ça, j’étais tellement émue que j’ai cru que j’allais m’évanouir ! »

« O-Oh, je vois. C’est merveilleux. » Rífa s’était physiquement retirée, submergée par Mitsuki, qui sautait partout avec excitation pendant qu’elle parlait.

Elles s’étaient retrouvées toutes les deux dans le jardin familier de fleurs blanches.

Mitsuki, pour sa part, semblait ne pas prêter attention à la façon dont Rífa réagissait.

« N’est-ce pas impressionnant !? Yuu-kun est un type de gars assez vieux jeu, tu sais, alors j’étais tellement sûre qu’il n’allait jamais me dire “je t’aime”. Je pensais que si je l’entendais, ce serait sur son lit de mort ou autre. Mais de penser que j’allais l’entendre cette même année ! Je me suis dit : “Ça y est, je n’ai plus de regrets…” »

« Oh, tu vas te taire ! » grogna Rífa. « Tu as tellement insisté pour que je t’écoute que j’ai cru que c’était quelque chose d’important, et qu’est-ce que j’obtiens, sinon ta vantardise ridicule sur ta vie amoureuse ! Ça suffit à me rendre malade ! »

Rífa avait fini de crier et avait gonflé ses joues, toujours visiblement en colère.

 

 

Il semblerait qu’elle était à bout de patience.

Cependant, étant donné qu’elle avait passé toute sa vie à être le centre d’attention, il y avait peut-être quelque chose à dire sur le fait qu’elle ait tenu aussi longtemps.

« Tu n’es pas venue t’entraîner pour qu’on puisse invoquer Yuuto !!! » s’emporta-t-elle. « On n’a pas de temps à perdre en bavardages inutiles ! »

« O-oui, c’est vrai… »

« Bien, alors retournons à la pratique de l’incantation pour Mistilteinn. »

« Bien ! »

La séance d’entraînement de ce jour-là avait été beaucoup plus dure que d’habitude.

Il n’est pas inapproprié de dire que c’était, en partie, dû à la jalousie.

 

« Feu, feu, feu ! Lâchez tout ce que vous pouvez ! » Sigrun hurla, encourageant ses hommes, tandis qu’elle-même dirigeait son arc et ses flèches vers un ennemi et se déchaînait.

L’arc qu’elle utilisait était un nouveau modèle, qu’Ingrid avait fabriqué pendant l’hiver pour Sigrun et les membres de ses forces spéciales.

Le type d’arc commun utilisé à Yggdrasil était en forme de croissant, mais ces nouveaux arcs avaient la forme de deux montagnes jointes en leur milieu.

Selon Yuuto, cette forme permettait de tirer plus fortement sur la corde de l’arc, augmentant ainsi la puissance des flèches.

Grâce à cela, même si ces arcs étaient de petite taille pour pouvoir être utilisés à cheval, ils tiraient plus loin que les arcs normaux, et ils étaient également plus faciles à manier.

Alors que les soldats du Clan de la Foudre commençaient à passer à la contre-attaque et à avancer, Sigrun donna rapidement l’ordre de se retirer. « Ghh. Très bien, reculez ! »

Cependant, dans une rare démonstration des membres d’élite de son unité, les hommes avaient été lents à réagir.

Ce délai avait permis aux troupes du Clan de la Foudre de réduire la distance.

« Rrraaagh ! Je vais tous vous tuer ! »

« Vous pensiez vraiment pouvoir nous affronter et gagner avec un si petit nombre de personnes ? »

Les soldats du Clan de la Foudre avaient avancé avec encore plus de férocité.

Dans une bataille de terrain comme celle-ci, le plus grand nombre de tués et de capturés provenait toujours de l’attaque de votre ennemi lorsqu’il battait en retraite.

La grande majorité des soldats avaient été enrôlés dans l’armée par décret, mais ils étaient toujours désireux d’obtenir des récompenses pour leurs exploits militaires qui constitueraient un juste prix pour avoir risqué la mort au combat.

Les ennemis tués pouvaient rapporter des récompenses de la part de son patriarche, sans compter que les armes et les effets personnels de l’ennemi pouvaient être saisis pour soi et vendus plus tard.

En ce moment, les soldats attaquants étaient convaincus sans aucun doute que c’était l’occasion parfaite de faire fortune.

« On dirait qu’ils ont mordu à l’hameçon, » murmura Sigrun pour elle-même, et fit accélérer son cheval. Elle fit ensuite glisser le haut de son corps dans une position faisant face à l’arrière, et commença à tirer.

Les forces de Múspell sous son commandement avaient toutes suivi son exemple, et avaient libéré flèche après flèche.

C’était la technique de leur ennemi détesté, les archers montés du Clan de la Panthère — le Tir parthe.

À l’automne de l’année précédente, le Clan du Loup avait souffert face à la tactique du Tir parthe. Ainsi au cours de l’hiver dernier, ils s’étaient furieusement entraînés pour pouvoir eux-mêmes l’utiliser.

Leur exécution était bien sûr encore très imparfaite par rapport au clan dont ils s’étaient inspirés, mais leurs ennemis avaient baissé leur garde.

Les soldats du Clan de la Foudre avaient été la proie des flèches si facilement que c’en était presque comique.

Et pourtant, ils n’avaient pas arrêté leur poursuite.

Bien que les forces spéciales du Clan du Loup utilisaient cette technique pour attirer délibérément l’ennemi vers elles, du point de vue de l’ennemi, elles donnaient toujours l’impression de fuir.

Ainsi, plutôt que de faiblir, les soldats du Clan de la Foudre avaient poursuivi les cavaliers du Clan du Loup avec encore plus d’énergie.

Ils se présentaient sur un plateau d’argent.

Attirer l’ennemi à proximité, puis tirer et fuir. Attirer, et tirer. L’unité de Sigrun avait répété ce processus.

Ils ont finalement dépensé toutes leurs flèches et, après avoir réussi à infliger un nombre satisfaisant de pertes, il était temps de se retirer.

C’est à ce moment-là que c’est arrivé.

Un seul cavalier à cheval était sorti des troupes du Clan de la Foudre, laissant un énorme nuage de poussière dans son sillage.

Même de loin, Sigrun pouvait distinguer le rouge ardent des cheveux du cavalier, et elle frissonna.

« On s’en va ! » avait-elle crié. « Battez en retraite à toute vitesse ! »

À son ordre, les membres des forces spéciales avaient tous éperonné leurs fidèles chevaux au pas de course, penchant leurs corps vers l’avant et se concentrant uniquement sur la fuite.

Ils se déplaçaient à une vitesse incroyable, incomparable à leur prétendue « fuite » de tout à l’heure, et en un clin d’œil, les troupes du Clan de la Foudre disparurent derrière eux.

Cependant, Steinþórr lui-même restait toujours sur leurs talons. Loin d’être laissé derrière, il les rattrapait chaque seconde.

« Khh… il est si rapide ! » Sigrun grimaça amèrement en jetant un coup d’œil derrière elle.

Le commandant en chef de l’ennemi avait chargé en avant pour les poursuivre seul, sans aucun allié ni protection. Normalement, cela aurait été une occasion en or. Cependant, le bon sens était inutile contre cet ennemi — Steinþórr, le guerrier surhumain sans égal.

Si elle l’attaquait maintenant avec les 300 soldats d’élite de ses forces spéciales, elle pensait avoir de bonnes chances de gagner. Mais cela se ferait indéniablement au prix d’énormes pertes de son côté.

Bien sûr, il y avait suffisamment de valeur à le tuer pour que même ce prix en vaille la peine. Le problème était que, selon toute vraisemblance, avant qu’ils ne parviennent à l’épuiser suffisamment pour l’achever, ses troupes les rattraperaient. C’était l’issue la plus prévisible, et cela rendrait toutes leurs pertes complètement inutiles.

Bien sûr, à ce rythme, ce n’était qu’une question de temps avant qu’il ne les rattrape de toute façon.

« Allez… allez… où est-il… !? » murmurait Sigrun pour elle-même, presque comme un chant, ne pouvant réprimer son impatience.

Il devrait être juste un peu plus loin devant.

Chaque seconde qui passait semblait désespérément longue.

« Guaah ! » Un cri était venu de derrière elle, le cri de mort d’un homme.

Un des membres de son unité avait pris du retard, et Steinþórr l’avait rejoint.

« Rrgh… ! Est-ce encore loin !? » Un rayon de lumière frappa les yeux de Sigrun — le reflet de la lumière du soleil sur l’eau. « Ah ! C’est là ! »

Une rivière était apparue, son eau était d’un gris-brun sale. C’était l’Élivágar, la rivière qui avait été autrefois la frontière entre les territoires du Clan du Loup et du Clan de la Foudre.

« En avant ! On y va ! » Immédiatement, elle avait aboyé l’ordre.

L’un après l’autre, ses cavaliers avaient fait sauter leurs chevaux dans la rivière avec un grand plouf ! et ils avaient avancé dans l’eau.

Leur vitesse avait visiblement baissé, car le courant leur avait fait perdre pied.

Cela signifiait l’opportunité parfaite pour Steinþórr. Cependant, il tira fermement sur les rênes de son cheval et s’arrêta brusquement, refusant de s’approcher du bord de l’eau.

Son comportement était tout à fait naturel.

C’est au cours de la bataille de la rivière Élivágar, en fait sur cette même rivière, que les eaux en furie avaient infligé à Steinþórr la toute première défaite de sa vie.

C’était un homme qui avait toujours foncé sans relâche, mais en ce moment, il ne pouvait qu’hésiter.

Et ainsi, l’unité des forces spéciales de Múspell échappa à la poursuite de Steinþórr.

 

Ce soir-là, après que Steinþórr se soit regroupé avec son armée principale, il s’était trouvé confronté à une tempête d’un autre genre.

« Combien de fois… combien de fois dois-je te le dire avant que tu n’écoutes !? Ne le fais pas ! Charger… en avant… tout seul ! »

Les cris de Þjálfi lui tombaient dessus comme des coups de tonnerre, entrecoupés de petites pauses pour respirer.

Bien qu’il ait crié à perdre haleine, il semblait avoir encore beaucoup de choses à dire. La colère semblait irradier de tout son corps comme de la vapeur, et c’était suffisant pour même faire trembler les soldats du Clan de la Foudre, qui regardaient de loin.

Mais Steinþórr lui-même ne semblait pas être dérangé le moins du monde. Il retirait paresseusement la saleté dans son oreille avec un doigt.

« Père ! » Þjálfi avait crié.

« Hé, tu n’as pas besoin de crier si fort. Je peux très bien t’entendre. Mais allez, je n’avais pas le choix. »

« Comment, exactement, pouvais-tu ne pas avoir eu le choix !? »

« Écoute, si je n’avais pas fait ça, on se serait retrouvé avec beaucoup plus de morts et de blessés que ce qu’on a eu, non ? »

« Nngh. » Þjálfi avait froncé les sourcils et n’avait pas répondu.

L’attaque de la cavalerie du Clan du Loup avait tué près d’une centaine de membres du Clan de la Foudre, laissant plusieurs fois ce nombre de blessés.

« Je nous ai aidés en chassant ces gars de l’autre côté de la rivière. Maintenant, ils savent qu’ils ne peuvent plus essayer cette merde avec nous, n’est-ce pas ? »

« Rrrrgh… ! » Þjálfi avait senti ses dents grincer.

Il voulait se mettre en colère, mais ne pouvait pas. Il n’avait nulle part où diriger sa colère, et cela déformait son visage.

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