Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 11 – Chapitre 3 – Partie 5

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Chapitre 3 : Acte 3

Partie 5

Yuuto lui-même n’en était pas conscient, mais c’était exactement le genre de qualité qui convenait à un grand souverain.

Cela dit, les deux filles n’étaient toujours pas convaincues.

« Certes, même moi je dois admettre que cet homme a de grands talents, mais je dirais que c’est exactement pour cela qu’il est si dangereux, » dit Sigrún. Il était rare qu’elle soit aussi insistante.

« Si jamais il essaie de nous trahir à nouveau, tu pourras l’abattre là où il se trouve, » affirma Yuuto, d’une voix basse et glaciale.

En vérité, le fait de ne pas vouloir tuer l’homme qui était autrefois son frère juré faisait toujours partie des sentiments de Yuuto. Cependant, si le moment était venu et que cela s’avérait nécessaire, il avait l’intention d’aller jusqu’au bout — et même de couper lui-même la tête de l’homme si cela était nécessaire.

D’ordinaire, Yuuto était une personne douce et sincère, mais lorsque la situation l’exigeait, il n’avait aucun problème à se détacher de ses propres sentiments et à faire ce qui devait être fait.

« Un homme sage change d’avis, mais un fou ne le fait jamais. » C’était une façon de plus pour Yuuto de posséder la nature d’un vrai roi.

Félicia et Sigrún restèrent silencieuses, leur souffle coupé par la force de l’esprit de Yuuto, mais Hveðrungr gloussa, semblant s’amuser.

 

 

« Heh heh, connaissant la petite chose naïve que tu étais il y a seulement trois ans, c’est vraiment comme si je regardais une personne entièrement différente. »

Son courage et sa capacité à résister à cette pression étaient certainement ce que l’on pouvait attendre du cerveau qui avait pris le contrôle du Clan de la Panthère et l’avait élevé au rang de nation puissante capable d’envahir de grands clans en moins d’un an.

« Je n’aurais jamais été prêt à servir sous le toi de l’époque, pour rien au monde, mais comme tu es maintenant, je ne suis pas contre d’envisager de prendre ton Calice. »

« Quelle insolence ! Comme si vous alliez recevoir une meilleure offre ! »

« Vraiment. Il y a plus de gens qui souhaitent avoir l’honneur de recevoir le Calice de Grand Frère qu’il n’y a d’étoiles dans le ciel ! »

Félicia et Sigrún s’étaient immédiatement emparées de la réponse prétentieuse de Hveðrungr.

Elles étaient toutes les deux zélées quand il s’agissait de leur croyance en Yuuto, elles n’avaient pas pu se retenir de protester contre l’offense.

Yuuto lui-même, cependant, était une autre histoire. Il frappa une main contre sa cuisse et sourit joyeusement.

« Très bien, donc tu acceptes ! C’est une grande aide. »

Il était le genre d’individu qui ne se souciait pas du tout de savoir si les gens lui parlaient avec humilité ou respect. C’est pourquoi il ignorait si facilement les éclats de langage grossiers d’Ingrid, ou les remarques et l’attitude délibérément tranchantes de Kristina.

« Tu prends de l’avance. Tu ne m’as toujours pas donné de détails sur ce nouveau serment du Calice, tu sais. »

« Hm ? Oh, oui, c’est vrai. Eh bien, je ne peux évidemment pas faire de toi un enfant subordonné. Ce sera un serment entre frères et soeurs. Après tout, officiellement parlant, tu as déjà renoncé à la position de patriarche du Clan de la Panthère à Skáviðr et tu t’es retiré de cette famille. »

« Oui, je suppose que je ne pouvais pas m’attendre à être autorisé à revenir dans la lignée principale de la famille, » avait convenu Hveðrungr, avec un sourire sardonique.

Sous le système clanique d’Yggdrasil, chaque clan était structuré à l’image d’une famille, les serments prêtés sur le Calice formant les relations de pouvoir dans cette famille.

En tant que centre de cette famille de clan, le patriarche et ses subordonnés enfants directs étaient le centre du pouvoir pour la gouvernance du clan.

Les frères et sœurs jurés du patriarche recevaient l’honneur et le respect qui leur étaient dus en tant qu’« oncles et tantes » des enfants subordonnés, mais ils étaient de la « famille dérivée », ne faisant pas partie de la lignée familiale principale au cœur du clan. Ils étaient éloignés de toute participation aux politiques ou aux affaires du clan.

Un frère ou une sœur assermenté(e) ne pouvait pas avancer son rang au sein de la famille principale, c’était donc une carrière sans issue.

« Ce n’est peut-être pas le meilleur remplacement, mais j’ai préparé un poste pour toi en tant que commandant de notre régiment de cavalerie indépendant. »

Sigrún sursauta. « Père, je pense que tu lui donnes beaucoup trop de pouvoir ! » dit-elle en élevant la voix. « Nous devrions au moins attendre et voir si nous pouvons vraiment lui faire confiance avant… »

Yuuto secoua la tête, refusant d’entendre ses protestations une fois de plus. « Quand une personne prend le pouvoir, c’est là que ses vrais désirs remontent à la surface. Si nous essayons de le tester sans lui donner de pouvoir, nous ne saurons jamais rien de sûr. »

Au cours des deux dernières années, Yuuto n’avait que trop vu comment le pouvoir et l’autorité changeaient les gens.

Il savait maintenant qu’essayer de juger les gens avant ce changement ne l’aiderait pas à prendre les bonnes décisions.

Il était plus facile et plus rapide de donner du pouvoir à quelqu’un et de regarder ce qu’il en faisait.

« De plus, » poursuit Yuuto, « le régiment de cavalerie indépendante est destiné à agir comme une force militaire totalement détachée. Les diriger nécessite des capacités de décision exceptionnelles, pour pouvoir s’adapter aux conditions changeantes et aux nouvelles informations. Il n’y a personne de mieux placé pour ce rôle que ce type. »

« Hm, à en juger par le nom de ce groupe, je suppose qu’ils sont composés des cavaliers du Clan de la Panthère faits prisonniers lors de la bataille de la rivière Körmt », songea Hveðrungr.

Il avait déjà déduit l’identité de leur base de soldats. Sa perception était aussi impressionnante que prévu.

« C’est exact. Nous avons aussi ceux qui se sont rendus et ont accepté de se soumettre au Clan de l’Acier à la fin de notre campagne contre vous. Cela représente environ trois mille hommes en tout. »

« Ohoh. » Derrière son masque de fer, les yeux de Hveðrungr s’étaient rétrécis.

Quand il s’agissait d’habileté au combat, les cavaliers du Clan de la Panthère étaient les meilleurs des meilleurs. Ils étaient peut-être les plus habiles combattants de tout Yggdrasil.

Si le commandement de leur régiment était confié à Hveðrungr, qui était déjà habitué à les mener au combat, ils pourraient surclasser une force de dix mille fantassins normaux.

Une force de dix mille soldats était égale à la puissance militaire de l’un des dix grands clans.

Donner une position aussi puissante à un ancien commandant ennemi, et qui avait entretenu une vendetta personnelle contre Yuuto pendant si longtemps semblait être une rupture de la logique saine.

Cependant, Yuuto ne s’était pas contenté d’accorder ce pouvoir à Hveðrungr sans réfléchir.

Hveðrungr avait autrefois été le chef d’une armée de plus de dix mille cavaliers aussi armés, avait forgé une alliance avec le Clan de la Foudre, avait profité de l’absence de Yuuto pour pousser le Clan du Loup et ses alliés au bord de la destruction — puis avait été complètement vaincu par Yuuto sans aucun effort apparent.

Ce souvenir était sûrement gravé dans son esprit.

Le calcul de Yuuto était que l’homme n’était pas assez fou pour qu’une simple troupe de trois mille cavaliers le tente en essayant quelque chose d’étrange.

« Très bien. De toute façon, je commençais à me lasser de l’autoréflexion dans cette cellule de la tour. Je vais accepter l’offre. »

« Super ! J’ai déjà préparé le calice. Félicia. »

« … Oui. » Pour une fois, la réponse de Félicia avait été légèrement retardée.

Avec un langage corporel qui montrait clairement qu’elle ne le faisait qu’à contrecœur, Félicia était allée chercher le Calice et l’avait placé devant Yuuto et Hveðrungr.

« J’aimerais que tu n’aies pas l’air si contrariée par tout cela, Félicia, » dit Hveðrungr, avec un sourire amer.

« Je m’en fiche. » Félicia avait tourné sa tête et détourné le regard.

Yuuto avait rigolé. « Ne le traite pas trop cruellement, Félicia. Techniquement, il va être ton petit frère juré maintenant. »

« … ! » Les yeux de Félicia s’étaient agrandis. Apparemment, elle ne s’en était pas rendu compte jusqu’à maintenant.

La façon dont les serments du Calice fonctionnaient était que, traditionnellement, la première personne à échanger le serment du Calice avec quelqu’un en tant que jeune frère ou enfant assermenté était « plus âgée » que ceux qui venaient ensuite.

Même sans tenir compte de cela, Félicia occupait le poste de chef des subordonnés, ce qui signifie qu’elle était chargée de gérer tous les subordonnés de la jeune fratrie de Yuuto.

« Dans ce cas, je serai aussi froide et autoritaire avec lui qu’il est humainement possible, » déclara Félicia avec une expression glaciale sur le visage.

« Haha, je dois dire que j’ai du mal à t’imaginer agir de la sorte, Félicia, » répondit Yuuto.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Hveðrungr avec un sourire en coin. « Tu joues toujours l’innocente avec lui ? »

« Frère ! »

« Wôw, ça, c’est effrayant. » Hveðrungr avait fait mine de frissonner de manière assez exagérée.

C’est ainsi qu’au bout de deux ans, le serment du Calice fut à nouveau échangé entre les deux hommes, et ils devinrent à nouveau frères jurés.

« Père, j’ai préparé les documents déclarant l’ordre de procéder à des plantations consécutives. Si je pouvais vous demander d’apposer votre sceau, s’il vous plaît. »

« Seigneur Réginarque, concernant la question du district ouest de Gimlé… »

« Yuuto, il y a quelque chose que je ne comprends pas vraiment dans le design des voiles, peux-tu vérifier certaines choses pour moi ? »

Ce qui attendait Yuuto après le renouvellement de son ancienne relation était une montagne de travail.

Les choses s’accumulaient, principalement des demandes pour qu’il prenne des décisions avant de partir en guerre avec l’armée du clan de l’acier et de devenir indisponible.

En l’absence de Yuuto dans la capitale, il transmettrait toute l’autorité concernant ces tâches à son second, Linéa, mais il était peut-être normal que tout le monde souhaite que les décisions viennent de Yuuto lui-même et non de son représentant.

Yuuto s’assurait d’écouter attentivement les personnes qui venaient lui faire des rapports ou lui adresser des pétitions, et il rendait ses décisions les unes après les autres. Cependant, quel que soit le nombre de questions qu’il abordait, le nombre de personnes cherchant à obtenir une audience semblait sans fin.

Il était assez tard dans la nuit quand le dernier d’entre eux était parti.

« C’est enfin terminé — ! » Yuuto avait crié son triomphe en levant ses mains en l’air.

« Je suis terriblement désolée, Grand Frère, » dit Félicia. « Il y a encore des messages non lus. »

« Gah, il en reste encore, hein ? » Yuuto se laissa tomber sur son bureau.

Apprendre qu’il y avait encore du travail à faire alors qu’il pensait que c’était terminé était le sentiment le plus épuisant.

« Le premier est… Oh, c’est de la part de Ginnar, que nous avons en tant qu’envoyé du Clan de la Flamme. »

« Ah ! » À la mention de ce nom, Yuuto se redressa en sursaut. « Dépêche-toi de le lire ! »

Pour l’instant, obtenir une rencontre personnelle avec le patriarche du Clan de la Flamme était la plus grande préoccupation de Yuuto.

Il n’avait bien sûr pas l’intention de minimiser l’importance de son affrontement imminent avec le Clan de la Foudre ou de baisser sa garde, mais pour Yuuto, il ne s’agissait pas vraiment d’une guerre pour régler un compte avec un adversaire égal, mais plutôt pour supprimer et contrôler un adversaire plus faible.

Le fait est qu’avec Steinþórr parti maintenant, Yuuto ne se sentait pas vraiment menacé par le Clan de la Foudre.

D’autres parts, non seulement la véritable identité du patriarche du Clan de la Flamme le préoccupait, mais il y avait aussi le fait que les résultats de leur rencontre et de leur dialogue détenaient la clé pour briser l’alliance des clans ennemis et leur stratégie d’encerclement.

Chaque jour semblait une éternité à attendre une réponse du Clan de la Flamme.

« Informez mon grand-père, le Seigneur Réginarque Yuuto du Clan de l’Acier. Je suis Ginnar, officier exécutif du Clan du Loup. » Félicia commença à lire le message, en commençant par l’introduction formelle.

Ginnar était à l’origine un marchand qui avait voyagé dans un grand nombre de pays à travers la largeur d’Yggdrasil, et Yuuto l’avait invité à rejoindre le Clan du Loup en reconnaissance de ses compétences exceptionnelles en matière de commerce.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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