Le Dilemme d’un Archidémon – Tome 6 – Chapitre 1

Bannière de Le Dilemme d’un Archidémon ***

Chapitre 1 : La phase de rébellion d’une fille est assez angoissante pour même terrifier un Archidémon

***

Chapitre 1 : La phase de rébellion d’une fille est assez angoissante pour même terrifier un Archidémon

Partie 1

« Des vêtements… pour un rendez-vous ? »

Au cours de la nuit. Zagan s’était retrouvé à court de mots après avoir été informé de quelque chose par son majordome Raphaël. Trois jours s’étaient écoulés depuis qu’il avait invité Néphy à un rendez-vous, mais ils n’étaient pas encore allés le faire. Il y avait eu une forte augmentation du nombre d’habitants dans son château en raison de l’attaque de Bifrons contre Kianoides, ce qui les avait tous submergés de travail. Néphy elle-même était occupée à courir partout, s’occupant de tous les travaux ménagers du château.

Bifrons parvient encore à me gêner même après sa défaite. Les Archidémons sont vraiment quelque chose de problématique…, ce n’était pas comme si tout était de la faute de Bifrons, mais c’était sur lui que Zagan avait décidé d’exprimer son ressentiment. Et avec tout ce qui se passait, il avait été décidé que la date aurait finalement lieu une semaine plus tard, mais… Raphaël avait soudain abordé le sujet des vêtements comme s’il s’était souvenu de quelque chose.

Comme toujours, Zagan présentait un visage diabolique qui pouvait faire pleurer un enfant. Ses cheveux noirs, qu’il avait ignorés jusque-là, étaient au moins peignés et attachés, mais cela n’avait pas vraiment changé, et il portait une robe noire complètement unie avec un manteau rouge sur le dessus. Zagan regarda ses propres vêtements alors qu’il était en état de choc, puis se retourna vers son majordome.

« Je ne peux pas y aller avec ça ? » demanda Zagan.

« … Mon seigneur. Réfléchis-y bien. Entre Lady Néphy qui se présente à votre rendez-vous en tenue de chambre habituelle et Lady Néphy qui se présente après avoir mis tous ses efforts dans son apparence… qu’est-ce qui te rendrait plus heureux ? » demanda Raphaël.

« N’est-il pas évident que les deux me rendraient heureux ? » répondit Zagan avec une expression sérieuse. C’était sa réaction immédiate. Zagan n’avait pas l’intention de faire porter quelque chose d’embarrassant à Néphy, et elle était déjà magnifique dans son uniforme de bonne. Naturellement, la robe qu’elle portait lorsqu’il l’avait rencontrée pour la première fois était aussi très jolie, mais cela n’avait pas vraiment d’importance. Il était impossible pour Zagan d’attribuer un classement à son apparence.

« Ce n’est pas ce que je veux dire… Alors, est-ce que tu me dis que, peut-être, tu te moques de ce que Lady Néphy porte ? » demanda Raphaël en posant sa main sur son front d’une manière troublée.

« Non, c’est une tout autre histoire. J’aimerais bien qu’elle porte de nouveaux vêtements à notre rendez-vous, mais… Je vois. C’est donc ce que tu veux voulais dire par là, » déclara Zagan.

Son majordome avait raison. Zagan voulait absolument voir Néphy revêtir des vêtements à porter spécialement pour lui… En plus, il voulait vraiment la voir habillée comme ça. Dans ce cas, Néphy serait sûrement aussi heureuse de voir Zagan porter des vêtements bien choisis.

Mais… n’est-ce pas les seuls vêtements que je possède ? La raison pour laquelle les sorciers portaient des robes et des manteaux si démodés n’était pas à cause de leurs caprices ou pour créer une sorte d’atmosphère. C’était des forteresses qui étaient implantées avec toutes les formes de cercles magiques pour la défense, l’attaque, le renforcement physique et la régénération. Ce n’était pas quelque chose que l’on pouvait mettre dans des chemises fragiles ou des pantalons fantaisie que portaient les nobles et les roturiers. Cependant, ce n’était pas une raison suffisante pour que Zagan aille à son rendez-vous habillé comme un pouilleux. Il lui restait encore une semaine, donc il avait encore le temps de faire quelque chose pour remédier à la situation.

« Dis-moi, Raphaël. Que dois-je faire ? Quel type de vêtements serait approprié ? » demanda Zagan.

« Je ne suis pas non plus très versé dans ce domaine. Cependant, tu devrais peut-être commencer par régler ton problème d’hygiène, » déclara Raphaël.

« Mon hygiène !? » demanda Zagan.

Maintenant qu’il l’avait mentionné, Zagan avait réalisé qu’il portait les mêmes vêtements tous les jours. S’ils se salissaient ou commençaient à sentir mauvais, il pouvait s’en sortir à l’aide de la sorcellerie. Et parce qu’il pouvait décomposer la sueur et la saleté dans les moindres fissures jusqu’à la dernière bactérie, ce n’était pas comme s’il était sale. Cependant, la question de savoir s’il s’agissait ou non d’une question d’hygiène était différente.

« Et aussi, un gentleman porterait sûrement au moins une cravate, » ajouta Raphaël.

« Une cravate ? Je n’en possède même pas une, » avait gémi Zagan. La seule chose qu’il possédait et qui était proche était une corde utilisée pour pendre les gens.

Sûrement, quand le temps serait venu que Néphy et les autres puissent vivre librement sous la lumière du soleil, Zagan devrait porter des vêtements normaux et mener une vie normale. Ainsi, son obstacle actuel était d’acquérir ce premier ensemble de vêtements « normaux ». Après tout, un rendez-vous était apparemment quelque chose qu’un couple normal faisait.

« Alors… Je suppose que je dois aller acheter des vêtements…, » Zagan murmura, semblant se résigner à son sort. Mais il était certain qu’il devrait le faire sans qu’aucun des autres sorciers de son château ne le découvre et surtout Gremory.

« Raphaël, tu comprends ce que tu dois faire, n’est-ce pas ? » demanda Zagan en jetant un regard aiguisé sur Raphaël.

« C’est une question idiote, mon seigneur. Tout ce que j’ai à faire, c’est de cacher tes vraies intentions à tout le monde et de sceller les mouvements de ces satanés sorciers, non ? » demanda Raphaël.

D’un côté, il y avait le plus jeune Archidémon de l’histoire avec un visage méchant. De l’autre, il y avait l’ex-archange le plus redoutable, avec une énorme cicatrice sur le visage, qui avait un nombre de victoires proche de 500. La scène d’une conversation confidentielle entre eux deux avait suffi à faire croire à n’importe qui qu’ils complotaient des actes ignobles. Mais, en vérité, ils discutaient juste de la petite inquiétude de « Que dois-je faire pour paraître bien ? » Quoi qu’il en soit, Zagan acquiesça d’un signe de tête de satisfaction à la réponse de Raphaël, qui correspondait parfaitement à ses propres intentions.

« Je vois que mon majordome est plus impressionnant que jamais. Je te laisse le château, » déclara Zagan.

« Compris, » répondit Raphaël.

Il ne restait plus qu’à se procurer des vêtements pour un rendez-vous. Cela dit, il était un peu tard le soir pour sortir, puisqu’il était l’heure du dîner. Il s’était rendu compte que s’il voulait se rendre en ville, il faudrait que ce soit plutôt tard dans la nuit ou le lendemain matin.

Je n’ai pas le temps pour ça… C’est peut-être dangereux… mais dois-je compter sur Manuela… ? En repensant toutes les fois où elle avait choisi des vêtements pour les autres, il savait qu’il courait le risque d’être utilisé comme un jouet, mais on pouvait faire confiance aux yeux de cette vendeuse méfiante. Elle choisirait certainement des vêtements appropriés pour un rendez-vous… Ou plutôt, il n’y avait pas vraiment d’autre magasin où il pouvait imaginer demander une telle chose. Le nom de Zagan était trop connu à Kianoides. S’il leur ordonnait de choisir les vêtements pour un Archidémon à leur propre discrétion, la plupart des vendeurs se recroquevilleraient sans lui donner une réponse appropriée.

Heureusement que Raphaël le lui avait signalé avec une semaine d’avance. Il était vraiment très utile. Et au moment où il décida quel serait le meilleur moment pour s’échapper du château sans se faire remarquer…

« C’est un malentendu total, ma petite missy ! J’étais juste, genre, intéressée par ce qu’il y avait à l’intérieur ! Ou, genre, j’ai pensé que c’était peut-être adressé à moi ! »

« Qu’est-ce qui se passe… ? » Zagan et Raphaël plissèrent leurs sourcils en entendant ce cri qui provoquait des maux de tête. Peu de temps après, la porte s’était ouvert en même temps qu’on frappait. Celle qui était ensuite entrée, c’est Foll, et elle traînait Selphy par le cou. Comme toujours, Foll avait les cheveux verts tressés le long de son dos, et elle avait des cornes de dragon dépassant derrière ses oreilles. Ses yeux ambrés brillaient de mille feux, et à en juger par le souffle rude qui venait de son nez, elle semblait en colère à propos de quelque chose. Cette jeune fille était une descendante de dragons et était aussi la fille adoptive de Zagan. Elle avait Selphy dans la main gauche et une enveloppe dans la droite.

Quant à Selphy… C’était une fille aux cheveux bleus. Elle avait un joli visage quand elle se taisait, mais en ce moment, elle laissait couler une cascade de larmes tout en mendiant pour sa vie. Et peut-être parce qu’elle était trempée par ses larmes, la partie inférieure de son corps s’était transformée en une queue d’un poisson et se tortillait. C’était une sirène. Et, comme on pouvait s’y attendre, sa spécialité était le chant. Cependant, même sa voix en pleurs était anormalement bruyante.

« Puis-je entrer ? » Foll leva les yeux vers Zagan et Raphaël, s’arrêta et posa cette question. Apparemment, elle pouvait dire qu’ils parlaient de quelque chose de sérieux, et elle demandait si elle était une nuisance.

Ce n’est pas comme si c’était trop important. Je demandais juste un conseil en matière de rencontres… De l’extérieur, il y avait un sentiment de tension dans l’air qui rendait la réunion extrêmement sérieuse et dangereuse, mais Zagan lui-même ne le savait pas.

« Ouais. On a presque fini. Tu peux entrer, » déclara Zagan.

« Voilà. Une lettre pour toi, » Foll avait marché jusqu’à Zagan avec ses bagages en remorque.

« Oh. Bon travail… Au fait, qu’est-ce que c’est ? » demanda Zagan en jetant son regard vers Selphy.

« C’est un malentendu, Monsieur l’Archidémon ! Je n’essayais pas de lire votre lettre, je le jure ! Je ne suis pas si courageuse ! » Selphy commença à lui faire un appel d’une voix forte, alors que des larmes coulaient sur son visage.

« Alors pourquoi l’ouvrais-tu ? » demanda Foll en la fusillant du regard.

« … Je ne comprends pas vraiment ce qui se passe. Elle a essayé de lire ma lettre ? » demanda Zagan.

« Oui, » répondit Foll. Il semblait qu’elle l’avait prise en flagrant délit.

« Eh bien, je doute que quoi que ce soit d’important me soit envoyé par lettre, mais tu ne devrais quand même pas ouvrir les lettres des autres sans leur permission. Si c’était une lettre d’un sorcier, elle aurait pu exploser dès que tu l’aurais ouverte, » déclara Zagan.

« Ce n’est pas ça, d’accord ? L’expéditeur de cette lettre vient de chez moi, non ? Alors j’ai pensé qu’ils l’avaient peut-être envoyé ici pour moi…, » Selphy marmonna d’une voix craquante. Elle était devenue affreusement pâle et s’était mise à trembler violemment en entendant l’avertissement de Zagan. Elle ne mentait probablement pas. Cette fille était plutôt irréfléchie à l’occasion, mais elle comprenait au moins qu’elle travaillait dans un endroit où elle pouvait mourir au moindre caprice de Zagan. Cependant, dans ce cas, la lettre elle-même était plutôt incompréhensible.

« Pourquoi une lettre viendrait-elle de chez toi ? Je ne connais pas d’autres sirènes, » déclara Zagan.

« C’est pour ça que je pensais que c’était pour moi…, » Selphy répondit d’un ton complètement découragé, ce qui fit hausser les épaules de Zagan.

« Je comprends ta situation pour l’instant. Tu peux la relâcher, Foll, » déclara Zagan.

« Très bien, » déclara Foll.

« Wow ! » La tête de Selphy s’était cognée contre le sol en marbre quand Foll l’avait brusquement laissée partir. Après l’avoir regardée tomber sur le sol en se tenant la tête, Zagan s’était tourné vers Foll.

« Foll, tu devrais traiter les animaux avec un peu plus de soin. Contrairement aux sorciers, ils sont faibles et peuvent mourir, » Zagan le lui avait reproché d’un ton sympathique.

« … Je n’avais pas remarqué. Je ferai plus attention la prochaine fois, » répondit Foll. Zagan caressa doucement la tête de Foll après qu’elle se soit excusée avec obéissance, ce qui fit que Selphy se tourna vers lui avec mécontentement.

« Un animal… Eh bien, je suppose que c’est bien que vous me reconnaissiez au moins comme une créature vivante et respirante…, » murmura Selphy. Quoi qu’il en soit, Foll avait fait tout son possible pour lui remettre cette lettre, de sorte que Zagan avait rapidement tracé son doigt le long du bord de l’enveloppe, ce qui était suffisant pour l’ouvrir comme si un couteau l’avait traversée. Puis, la lettre à l’intérieur s’était envolée. Ce n’était pas quelque chose d’aussi grandiose qu’on pourrait l’appeler de la sorcellerie, car tout ce qu’il faisait était d’utiliser le mana pour couper le papier. Et, alors que la lettre s’installait devant ses yeux, Zagan plissa ses sourcils.

« La Conférence Continentale Interraciale des Aînés ? » murmura Zagan.

Il n’en avait jamais entendu parler avant. Ce continent avait été l’hôte d’un nombre incalculable de races, y compris des elfes et tous les thérianthropes. Parmi celles-ci, les races comme les dragons et les elfes possédaient une faible population. D’après le contenu de la lettre, cela semblait être une réunion à laquelle tous les participants devaient assister, mais…

« Hm…, » Raphaël marmonna avec intérêt avant de dire. « C’est une conférence organisée pour les représentants de chaque race. Il y en a parmi eux qui sont pratiquement au bord de l’extinction, alors c’est peut-être une conférence qui est censée les aider à trouver un moyen de survivre, ou à commencer un échange culturel en quelque sorte. Et quoi qu’il en soit, il sera adopté par toutes les races du continent. »

« Tu es bien informé à ce sujet, n’est-ce pas ? » demanda Zagan.

« C’est parce que le représentant des humains est choisi parmi les membres de l’Église. Je n’y ai jamais assisté moi-même, mais j’en connais au moins les grandes lignes. Cette fois, quelqu’un comme Chastille a très probablement été choisi, » déclara Raphaël.

Les sorciers étaient des humains qui vivaient dans le monde souterrain. Lorsqu’il s’agissait d’un rassemblement de races à la surface, il était évident que le personnel de l’Église serait choisi.

« On nous a aussi dit de courir à l’Église si des sorciers étaient après nous. Ils prennent de l’argent, mais ils abritent au moins les autres races, » déclara Selphy, ajoutant sa propre contribution. C’était quelque chose que Zagan n’avait appris que lorsqu’il avait conduit Kuroka et Kuu là-bas sur un coup de tête l’autre jour, mais l’Église avait une section qui ressemblait à un refuge. C’est pourquoi les gens comptaient encore sur l’Église malgré le coût élevé des dons. Il l’avait compris, mais Zagan avait quand même fait entendre une voix étonnée.

« As-tu oublié que c’est un château de sorcier ? » demanda Zagan.

« Uhhhh, je suppose que oui, hein ? » Selphy marmonna ces mots d’une voix abasourdie. Comment a-t-elle pu être si écervelée ?

« Mais cette lettre signifie qu’ils veulent que moi, un sorcier, j’y assiste aussi. Sont-ils devenus séniles ? C’est comme un gros mouton qui invite un loup affamé, n’est-ce pas ? » Zagan pencha la tête sur le côté quand il posa cette question.

Ils ne pourraient pas penser qu’un sorcier et encore moins un Archidémon soit vertueux, n’est-ce pas ? Selphy avait fait allusion à cette idée plus tôt, mais la raison pour laquelle tant d’espèces étaient sur le point de disparaître était à cause des sorciers. Il y avait beaucoup de races non humaines qui avaient des propriétés magiques inhérentes, alors les sorciers les avaient traquées pour les utiliser comme catalyseurs et sacrifices. Et pourtant, ils invitaient un sorcier à un grand rassemblement. Cependant, le seul à rire de l’idée était Zagan.

***

Partie 2

« Parfois, tu ne comprends vraiment pas, Zagan, » déclara Foll d’une voix vraiment étonnée.

« Hein… ? Ai-je dit quelque chose d’étrange ? » s’enquit Zagan. En réponse, Foll avait fait un visage comme si ce serait pénible de lui expliquer, et à sa place, Raphaël s’était tourné vers Zagan avec un sourire tendu bien visible sur son visage.

« Monseigneur. Ce château abrite une haute elfe, une dragonne, une fomorienne, un léonin, et récemment, même une sirène. Il serait déraisonnable qu’ils ne s’y intéressent pas, alors qu’il y a tant de races qui coexistent ici sans qu’il y ait de conflits à proprement parler. Après tout, il existe d’innombrables espèces en voie de disparition qui ont besoin d’être protégées, » déclara Raphaël.

« Oh…, » murmura Zagan. Mis à part Néphy et Foll, les autres étaient tous des gens qui étaient venus de leur propre gré, alors il avait trouvé cette conclusion difficile à accepter. Alors, il baissa le regard vers la lettre comme s’il essayait de l’ignorer, puis il plissa de nouveau ses sourcils et il déclara. « Je me fiche de ce que pensent les autres races, mais cette lettre dit que je dois aller avec l’envoyé. Quelqu’un a apporté cette lettre au château ? Il n’a pas été tué, n’est-ce pas ? »

C’était un envoyé pour une conférence de toutes les races, donc il y avait une très forte probabilité qu’il fût quelqu’un d’assez haut placé. Dans ce cas, il était comme un canard assis pour une bande de sorciers satanistes. Qu’il soit humain ou d’une autre race, Zagan ne pensait rien de la mort de quelqu’un qu’il ne connaissait pas. Pourtant, il avait certainement laissé un mauvais arrière-goût si quelqu’un qui était venu ici spécialement pour lui avait été tué par ses subordonnés avant même qu’il n’ait eu la chance de lui parler. Il s’était donc tourné vers Selphy pour trouver des réponses.

« Uhhhh, quoi ? » demanda Selphy.

« C’est bien toi qui portais cette lettre, non ? Où l’as-tu eue ? » demanda Zagan.

« Hein… ? Cela a juste été apporté par un pigeon voyageur, » répondit Selphy.

« Un pigeon voyageur ? » demanda Zagan.

Ce n’est pas comme si ce pigeon voyageur était l’envoyé ou quoi que ce soit d’autre, non ? Il n’était pas clair quelle race l’avait invité à participer, alors il était resté confus.

« Le nom qui est écrit ici est Ainselph Thalasa Neptuna… une troisième princesse d’un endroit ou d’un autre, » Zagan avait lu le nom sur la lettre à haute voix, ce qui avait fait pencher la tête de Selphy sur le côté avec une expression vide.

« Hein, moi ? » demanda Selphy. Et cette fois, ce n’était pas seulement Zagan, mais toutes les personnes présentes qui l’avaient regardé fixement.

 

 

« Ce n’est pas le moment de faire de telles blagues, » déclara Zagan en soupirant.

« C’est tellement méchant ! Je n’ai fait que réagir à mon propre nom ! » s’exclama Selphy, complètement choquée par leurs paroles haineuses et leurs regards.

« Les noms sont peut-être similaires, mais c’est écrit princesse ici. C’est quelqu’un d’autre, » répondit Foll d’un ton négatif.

« Mais je suis bien une princesse ! » déclara Selphy.

« Le fait d’être traîné ici t’a-t-il fait perdre la tête ? » répliqua Foll avec un soupçon de pitié dans les yeux.

« Gaaah, c’est vrai ! Selphy est le diminutif de Ainselph ! Et Thalasa est un nom qui ne peut être utilisé que par les membres de la royauté des sirènes. Je ne mentirais pas à ce sujet ! » s’exclama Selphy alors qu’elle était au bord des larmes, ce qui fit que Raphaël la regarda de face avec une expression perplexe.

« Hm… Maintenant que tu en parles, j’ai entendu dire que les sirènes aux cheveux bleus font partie d’une lignée spéciale…, » déclara Raphaël.

« N’est-ce pas ? Pas vrai !? Écoutez, je ne suis pas, genre, super élégante ? » demanda Selphy.

« Pas du tout, » répondit Raphaël sans hésitation, rendant Selphy complètement silencieuse. Zagan avait trouvé cela quelque peu pitoyable, alors il avait décidé d’au moins l’écouter.

« Si tu es de la royauté, pourquoi as-tu travaillé comme chanteur sur un bateau de sorcier et pourquoi t’es-tu soûlée dans un bar parce que tu étais au chômage ? » demanda Zagan.

« Ce n’est pas qu’une question d’argumentation ! Je ne mens pas du tout ! » Selphy rugit en se levant, et parce que tous ses pleurs avaient mouillé son visage, elle s’essuyait le bout de son nez en disant. « Eh bien, vous voyez, notre peuple a cette sorte de règle où les chansons royales sont, comme, sacrées ou quelque chose comme ça, non ? Donc, ils ne peuvent être écoutés que par quelques élus. Je n’aimais pas ça, alors je me suis enfuie de chez moi. Je n’aurais jamais cru que je deviendrais une servante dans votre château ! »

« Alors, qu’est-ce qui te prend d’être une envoyée ? » demanda Zagan. Regarder cette fille rire sans se soucier de rien commençait à lui donner mal à la tête.

Selphy avait croisé les bras et s’était creusé la cervelle à ce sujet. Il semblerait que la personne en question ne le savait pas non plus.

Après avoir attendu en silence que la trotteuse de l’horloge fasse un tour complet, Selphy avait finalement frappé dans ses mains.

« Oh, c’est peut-être ça. Ma famille s’inquiète de me voir chez vous, Monsieur l’Archidémon, depuis que je leur ai envoyé une lettre à ce sujet. Ils ont écrit pour vous emmener la prochaine fois, » déclara-t-elle.

« Pourquoi n’as-tu rien dit plus tôt ? » demanda Zagan.

« Hahahaha, je veux dire, genre, même moi, je ne suis pas assez effrontée pour vous traîner chez moi sous l’océan, Monsieur l’Archidémon, » répondit Selphy. Pour l’instant, il semblerait qu’elle était au moins consciente qu’elle n’avait pas honte.

Bien que, je suppose que ce timing a du sens maintenant…, les sirènes étaient au courant de l’existence de Zagan grâce aux lettres de Selphy, alors les aînés avaient probablement pensé à l’appeler à cette conférence.

« Je sais que je n’en ai peut-être pas l’air, mais je suis occupé ici…, » déclara Zagan en jetant la lettre sur une table comme s’il s’agissait d’une ordure. Son rendez-vous avec Néphy approchait à grands pas. Il ne lui restait qu’une semaine pour se préparer.

Je ne peux pas non plus me résoudre à faire attendre Orias beaucoup plus longtemps…, Zagan se concentra sur sa poche, où il avait laissé un pendentif en Mithril, alors qu’il y réfléchissait.

L’Archidémon Orias était aussi la mère de Néphy. Elle était passée l’autre jour, mais à cause des hostilités ouvertes avec Bifrons, elle avait décidé de revenir une autre fois. Zagan s’occupait du pendentif, qui était la seule preuve au monde qu’elles étaient mère et fille, et ne l’avaient pas encore donné à Néphy. Il voulait lui donner dans une ambiance agréable, comme lors d’un rendez-vous, alors il avait fini par le remettre constamment à plus tard. Orias était quelqu’un qu’il respectait profondément, et il ne pouvait pas vraiment faire attendre Néphy ou elle plus longtemps, alors il devait se dépêcher.

« Non, non, non, non, ce n’est pas comme si j’avais l’intention de vous causer des ennuis ici, Monsieur l’Archidémon. C’est plutôt gênant de montrer mon visage à ma famille, alors je ne veux pas vraiment…, » Selphy laissa facilement transparaître ses véritables intentions, et Zagan la fit taire d’un seul regard alors qu’il se penchait de nouveau sur son trône.

« … Peu importe, » marmonna Zagan. Tout ce qu’il voulait, c’était essayer des choses que les couples feraient avec Néphy. Et comme il était déjà occupé à planifier cela, il n’avait pas envie d’augmenter sa charge de travail. Pendant qu’il se creusait la cervelle sur la question pendant un moment, Foll était arrivée en titubant et s’était écrasée sur ses genoux. Il semblait qu’elle sentait que les discussions sérieuses étaient terminées et qu’elle était venue pour se faire gâter. Ainsi, Zagan caressa doucement la tête de sa fille bien-aimée.

Hm, si c’est un rassemblement de toutes les races du continent, alors ce n’est pas complètement sans rapport avec Néphy et Foll… Le cas de Foll était spécial. On disait que les dragons avaient complètement disparu du monde, il était donc possible qu’elle soit en fait la toute dernière membre vivante de sa race. Et dans ce cas, ce n’était pas quelque chose qu’elle pouvait simplement ignorer pour protéger son mode de vie actuel. La durée de vie d’un dragon surpassait de loin celle d’un Archidémon comme Zagan, après tout, de sorte qu’elle aurait finalement dû vivre sans lui. Et, alors qu’il ruminait, Raphaël hocha la tête.

« C’est l’heure du dîner. Donnez votre putain de vie à vos devoirs professionnels, » demanda Raphaël en fixant la sirène.

« Je ne fais même pas la cuisine, vous vous en souvenez au moins ? » répondit Selphy.

« Hm… Maintenant que j’y pense, il y a une légende au Liucaon où ils cuisinent des sirènes dans un plat appelé “sashimi” qui donne la jeunesse éternelle, » déclara Raphaël.

« Pourquoi en parlez-vous maintenant ? » Selphy hurla de terreur quand Raphaël la traîna hors de la salle du trône.

Ce foutu Raphaël, il a déjà rencontré Kuroka…, Kuroka, était une sorte de fille pour Raphaël. Après la fin de l’incident en ville, Zagan ordonna à Raphaël d’aller s’occuper des choses à l’Église, mais il n’avait jamais su s’ils s’étaient réellement réunis ou non. Même si Raphaël était son majordome, Zagan n’aimait pas s’immiscer dans la vie privée des autres, et Raphaël lui-même trouvait probablement le sujet embarrassant, de sorte que Zagan ne l’avait jamais abordé lui-même.

À la fin, je n’ai rien appris sur Azazel… Kuroka était membre d’une organisation appelée Azazel, mais ce n’était pas la treizième épée sacrée elle-même. Il semblait que le Treizième avait une sorte d’implication avec les elfes, alors il voulait obtenir des informations à ce sujet, mais…

Tandis qu’il pensait à de telles choses et qu’il les regardait tous les deux quitter la salle du trône, Zagan remarqua que Foll le regardait comme si elle avait quelque chose à dire. Et ainsi, il caressa doucement la tête de sa fille bien-aimée et inclina sa tête sur le côté.

« Alors, qu’est-ce que c’est ? Tu as quelque chose dont tu veux parler, n’est-ce pas ? » demanda Zagan. L’autre jour, Foll avait levé les yeux sur Zagan comme ça parce qu’elle avait une requête personnelle. À l’époque, elle le harcelait pour qu’il lise un livre d’images parce qu’il était indécis. Zagan interrogea sa fille d’une voix aussi doucement que possible, et Foll ouvrit et ferma la bouche plusieurs fois comme si elle ne pouvait pas trouver les mots pour le dire. Et, alors qu’il attendait patiemment qu’elle mette ses sentiments en mots, Foll ne tarde pas à aller droit au but.

« Zagan, tu sais quoi ? » demanda Foll.

« Oh ? » murmura Zagan.

Et encore une fois, le silence. Pourtant, il n’avait pas fallu beaucoup de temps pour qu’elle continue.

« Zagan, tu m’as dit que si je voulais du pouvoir, je devais le voler, » déclara Foll.

« Oui, je l’ai fait, n’est-ce pas ? » répondit Zagan. C’est ce qu’il lui avait dit quand elle était arrivée au château. À l’époque, il n’avait pas encore décidé d’en faire sa fille adoptive, et il n’avait pas l’intention de prendre d’autres disciples que Néphy. C’est ce qu’il lui avait dit. Maintenant que Foll était officiellement sa fille, Zagan n’avait eu aucun problème à lui enseigner la sorcellerie, mais…

Je veux que Foll vive une vie ordinaire remplie de bonheur…, c’est pourquoi Zagan ne voulait pas lui donner un trop grand pouvoir.

« … Mais tu as donné le pouvoir à Gremory et Kimry, » continua Foll timidement.

« … Je l’ai fait, » répondit Zagan. Il leur avait donné le pouvoir de se battre pour qu’ils puissent protéger ses subordonnés des démons et des autres Archidémons. Même s’il avait dit à sa fille de voler le pouvoir, il avait fini par accorder le pouvoir à ses autres subordonnés. Elle était probablement malheureuse à ce sujet.

« Je veux aussi… le pouvoir…, » déclara Foll.

« Ne fais pas cette tête. J’ai aussi pensé à un pouvoir convenable à t’accorder, » déclara Zagan en caressant la tête de Foll.

« … Vraiment ? » demanda Foll.

« Le Champ de Neige de l’Écaille du Paradis, » murmura Zagan en levant les mains en l’air. Avec cela, des lumières qui ressemblaient à de la neige poudreuse remplirent l’air. C’était une variante de l’une des deux sorcelleries que Zagan avait créées pour tuer les autres Archidémon. L’Écaille du Ciel était une sorcellerie défensive qui allait créer un bouclier invincible. Les lumières flottantes dans la salle du trône faiblement éclairée ressemblaient à des étoiles scintillantes dans le ciel sombre de la nuit.

« Si jolie…, » dit Foll en soupirant. Puis, elle avait regardé le paysage en transe pendant un moment, mais avait finalement jeté son regard vers le bas dans le mécontentement alors qu’elle demandait. « Zagan, c’est l’Écaille du Ciel, celle utilisée pour la défense, non ? »

« Ça l’est. Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Zagan.

« Je préfère… celle qui brûle… Le Phosphore du Ciel, » déclara Foll.

C’était l’autre sorcellerie que Zagan avait créée, le feu qui pouvait brûler la vie elle-même et réduit en cendres tout ce qu’il touchait, le Phosphore du Ciel. C’était un pouvoir qui aurait dû être scellé comme un sort interdit parce qu’il était si puissant. C’était aussi le même pouvoir que Zagan avait accordé à Gremory et Kimaris. Cela dit, c’était des versions qui avaient été ajustées pour eux, et qui ne pouvaient être comparées à celle que Zagan lui-même avait utilisée…

Eh bien, vouloir le pouvoir va de pair avec la recherche de la violence… Il semblait que Foll n’était pas satisfaite de l’autoprotection que Zagan avait montrée. Pourtant, il ne montra aucun signe d’offense et caressa la tête de sa fille.

« Écoute-moi, Foll. Sais-tu ce qui est le plus important pour un sorcier ? » demanda Zagan.

« … Pour devenir fort ? » demanda Foll.

« Cette réponse te rapporte cinquante points, » répondit Zagan.

« Ai-je tort ? » demanda Foll en penchant la tête sur le côté.

« Ce qu’un sorcier doit prioriser par-dessus tout… c’est prolonger sa vie. La plupart des sorciers, y compris moi-même, se tachent les mains de sorcellerie pour pouvoir continuer à vivre. Le pouvoir peut t’aider à vivre, c’est pourquoi nous le recherchons. Si nous mourions, nous perdrions notre savoir et tout le reste avec lui. C’est pourquoi nous construisons notre force pour vivre, » déclara Zagan.

C’est pourquoi les sorciers possédaient une force physique surhumaine, une peau tenace qui pouvait arrêter une lame, une force brute qui pouvait déchirer l’acier, un cœur qui pouvait supporter de courir à toute vitesse sur des kilomètres sans s’essouffler… Une fois qu’on arrivait à un tel stade, ils étaient de vrais sorciers. Et même avec tout ça, tu ne serais qu’une fille fraîchement éclose dans le monde de la sorcellerie. Pour atteindre les extrémités de la sorcellerie que des gens comme Gremory avaient atteintes, une personne devait consacrer encore plusieurs centaines d’années à perfectionner son art. Zagan était l’étranger pour avoir atteint le sommet des sorciers à l’adolescence.

« Foll, tu finiras peut-être par vivre plus longtemps que moi, mais tu es encore jeune. Pour l’instant, apprends d’autres façons de te défendre. Ceci deviendra un nouvel ensemble d’écailles pour protéger ta peau, » déclara Zagan.

Foll n’était pas si stupide qu’elle ne pouvait pas comprendre la logique derrière ça. Cependant, elle n’était pas assez mature pour l’accepter sur le plan émotionnel.

« Je ne peux pas utiliser le Phosphore du Ciel… parce que je suis petite ? » demanda Foll.

« C’est vrai. Une fois que tu seras plus grande, je t’apprendrai, c’est sûr, » avait promis Zagan.

« … Compris, » répondit Foll. Sa voix ne donnait pas l’impression qu’elle était convaincue, mais elle avait probablement l’impression qu’elle ne pouvait que hocher la tête dans une telle situation. Foll avait sauté des genoux de Zagan, puis avait titubé hors de la salle du trône.

J’ai fini par gâcher son humeur… Foll savait sûrement que Zagan n’avait rien dit de déraisonnable. Cependant, les enfants ne pouvaient pas toujours agir logiquement. Le privilège de se plaindre aussi égoïstement, il ne l’accordait qu’à elle seule, puisqu’elle était encore une enfant. C’est pourquoi il la regarda d’une manière aimante quand elle s’éloignait de lui.

Elle ne me déteste pas, hein ?

Il mentirait complètement s’il disait que son comportement ne lui faisait pas mal, mais il devait s’en accommoder. Et, après avoir vérifié qu’il n’y avait personne d’autre dans la salle du trône, Zagan s’était maintenu la poitrine et s’était tortillé.

***

Partie 3

« Alors, tu as fini par fuir Maître Zagan ? »

Après s’être disputé avec son père, il y avait un nombre limité d’endroits où un enfant pouvait s’enfuir. Comme on pouvait s’y attendre, Foll avait donc fini par aller jusqu’à Néphy. Elles se trouvaient actuellement dans la cave derrière la cuisine. Comme Selphy était venue faire son travail, elles avaient fini par avoir assez de mains pour s’occuper de la cuisine, et la préparation du dîner était déjà terminée. Même si elles restaient un certain temps dans la cave pour parler, il ne semblait pas que quelqu’un viendrait les interrompre.

« Tu n’as pas besoin de faire ce genre de tête. Ce n’est pas comme si Maître Zagan te rabaissait ou t’intimidait, Foll, » Néphy, qui s’accroupissait devant Foll pour s’aligner, lui caressait doucement la tête en disant cela.

Est-ce si évident que ça ? pensa Foll en touchant son propre visage. Au moment où Foll était arrivée en courant dans la cuisine, Néphy s’était tout de suite précipitée vers elle. Elle avait l’intention de rester plutôt résolue, mais il semblait que cela n’avait pas fonctionné. Après avoir longuement réfléchi à la question, elle avait immédiatement trouvé sa réponse.

J’ai dit que je te laisserais faire ce que tu veux, non ? Ne t’inquiète pas de tout de ce qui ne sert à rien… C’était ce que Zagan avait dit quand il avait fait de Foll sa fille. Lui et Néphy chérissaient Foll à tel point qu’ils pouvaient savoir ce qu’elle pensait rien qu’en regardant son visage. Elle l’avait bien compris.

« Mais Zagan t’a appris ainsi qu’à Gremory et à Kimry… C’est injuste que je sois la seule qu’il ne veut pas enseigner, » déclara Foll en serrant contre elle les bords de sa jupe. Elle savait qu’elle n’était en aucun cas inférieure aux autres, donc la situation était particulièrement étrange.

« Tes cheveux ont un peu poussé, n’est-ce pas ? » demanda Néphy en défaisant les tresses de Foll.

« Vraiment ? » répondit Foll. En y repensant, Foll résidait dans le château depuis trois mois déjà. Ses cheveux avaient dû s’allonger, mais elle ne l’avait jamais remarqué… Lorsque Néphy dessina un cercle magique dans l’air avec son doigt, un peigne se manifesta dans sa main. C’était rudimentaire d’invoquer ça avec de la sorcellerie.

« La raison pour laquelle Maître Zagan m’enseigne la sorcellerie est que s’il ne le fait pas, je ne serai même pas capable de faire des choses simples comme ça. Puisqu’il t’a dit de le voler, ça ne veut-il pas dire qu’il reconnaît déjà tes capacités ? » demanda Néphy.

« C’est peut-être le cas, mais…, » Foll commença à répondre aux paroles de Néphy, mais finit par s’éloigner.

« Ce n’est pas grave. De la même façon que tes cheveux sont devenus plus longs, tu deviendras aussi plus forte, Foll. Un jour, tu deviendras sûrement beaucoup plus fort que moi, ou Mlle Gremory, ou Sire Kimaris… et peut-être même que Maître Zagan…, » déclara Néphy en se déplaçant derrière Foll et en lui peignant les cheveux. Les cheveux détachés de Foll avaient dépassé sa taille et descendu jusqu’aux cuisses. La façon dont ses cheveux dansaient sur ses fesses la chatouillait. Quand elle était arrivée dans ce château, ses cheveux n’étaient descendus que jusqu’à la moitié de son dos.

« Maître Zagan dit que les bonnes choses arrivent à ceux qui attendent. Ce n’est pas nécessaire d’être impatient. Nous t’aimons tous tellement, Foll, alors tu peux compter sur nous à chaque instant, » déclara Néphy en cessant de peigner les cheveux de Foll et en l’enlaçant par-derrière. Enveloppée par sa douce chaleur, Foll ressentit un soulagement qui lui enleva la force de ses genoux.

C’est comme ça… une maman ? Le père de Foll était le grand Sage Dragon Orobas. Cependant, elle ne savait absolument rien de sa mère. Vu qu’elle n’était pas là quand Foll s’était rendu compte pour la première fois de ce qui l’entourait, il était possible qu’elle soit décédée depuis longtemps.

Néphy avait une aura qui faisait instinctivement ressentir à Foll comme si elle était une mère. Zagan avait une façon différente de traiter avec elle qu’Orobas, mais elle savait au moins qu’il l’aimait… Elle le savait bien… mais Foll se mit à trembler dans les bras de Néphy.

« J’aime aussi… Néphy et Zagan. Je vous aime vraiment autant que j’aimais mon père, » déclara Foll.

« Oui. Je le sais, » répondit Néphy. Cependant, Foll avait l’impression qu’elle ne comprenait pas vraiment.

Parce que je les aime tellement… Je veux les protéger… Elle n’aimait pas n’être que là pour le spectacle. Foll voulait qu’ils dépendent d’elle. Elle voulait leur être utile, et qu’ils lui disent. « Tu as bien fait. » Ces sentiments avaient toujours été à l’intérieur de Foll, mais elle comprenait ce que Zagan et Néphy disaient. C’est pourquoi elle avait essayé de rester patiente. Cependant, elle n’avait plus été en mesure de le supporter à cause de l’incident d’il y a quelques jours. Le château de Zagan avait été attaqué par une chimère envoyée par Bifrons. Elle contenait les fragments du Seigneur-Démon et était une ennemie répugnante et redoutable. Foll n’avait aucune chance, mais Kimaris avait réussi à l’abattre. Non seulement ça, mais il n’y avait pas eu le moindre dommage à son environnement, et il l’avait fait tout seul. Même si Foll ne pouvait que trembler sur place, il pouvait vaincre cette monstruosité avec facilité. Elle avait supposé qu’ils étaient égaux, donc sa soudaine croissance était troublante. Cependant, ce n’était pas le problème principal.

Quand Zagan était revenu, avec son virage inhabituel, il avait été très blessé. Cependant, plutôt que de s’inquiéter pour son propre corps, il avait fait l’éloge de Kimaris en lui tapant sur la poitrine et en lui disant. « Tu t’en es bien sorti » avec le sourire. Foll était jalouse, et elle avait aussi réalisé à quel point elle était vraiment impuissante. Il en avait été de même lorsque l’Archidémon Orias avait attaqué. Elle était complètement inutile. Tous leurs ennemis avaient été vaincus par le poing puissant de Zagan.

Je veux être utile à Zagan. Et puis… Je veux qu’il me loue… Et pourtant, elle était bien trop petite en ce moment. Elle voulait lui rendre toutes ses faveurs en le protégeant, alors pourquoi était-elle si faible ?

En plus, j’ai même fini par troubler Zagan encore une fois… Elle n’était même pas égoïste, alors pourquoi ça n’a-t-il pas marché ? Si le seul vrai problème était son âge…

« … Je veux me dépêcher et grandir, » murmura Foll pour mettre de l’ordre dans ses sentiments, pas parce qu’elle cherchait de l’aide. Cependant…

« Keeheeheehee, j’ai tout entendu ! »

Aussi bien une enfant à problèmes qu’une grand-mère, l’Enchanteresse Gremory, avait ouvert la porte et avait foncé avec vigueur dans la cave. Elle avait des cornes de chèvre tordues qui sortaient de sa tête et se présentait sous la forme d’une vieille femme, portant sa robe noire comme d’habitude. Bien que, dans un visage inhabituel, du sang coulait de son nez.

« Gremory… ce saignement de nez…, » déclara Néphy.

« Aggh... Trop de pouvoir d’amour s’est accumulé, hein ? Permettez-moi de dire ceci. Lady Néphy… c’est le beau pouvoir d’amour ! » Gremory cria ces mots et se frotta le visage avec sa manche en leur montrant une expression pleinement satisfaite. Puis, elle baissa les yeux vers Foll et elle déclara. « Lady Foll. J’ai un moyen d’exaucer ce vœu. »

Foll pouvait en quelque sorte imaginer qu’il s’agissait d’un murmure maléfique qui entraînerait une situation terrible, mais elle n’était pas dans le bon état d’esprit pour discuter. Alors, à sa place, Néphy avait affronté Gremory avec un sourire froid.

« Mademoiselle Gremory, vous ne feriez rien qui puisse causer des ennuis à Maître Zagan, n’est-ce pas ? » demanda Néphy.

Bien que son visage soit devenu relativement plus expressif ces derniers temps, cette fille n’avait pas encore beaucoup d’émotion. Alors, quand elle avait dit quelque chose avec un sourire comme ça, elle avait un air intimidant qui surpassait même celui de Zagan.

« Eeek ? Je vous promets que je ne le ferai pas, d’accord ? J’ai été très sage ces derniers temps ! Je ne peux pas faire quoi que ce soit qui puisse troubler mon seigneur ! » répliqua Gremory.

En voyant Gremory se rétracter, au bord des larmes, Foll avait découvert la vérité.

Zagan est le plus fort, mais Néphy est la plus effrayante…, à ce moment-là, elle décida de ne jamais rien faire qui puisse mettre Néphy en colère. Cependant, son esprit se concentrait aussi sur autre chose.

Je peux… vraiment grandir ?

Le murmure diabolique de Gremory avait un certain charme qui avait fait que la pensée était restée au premier plan de l’esprit de Foll.

***

Partie 4

Zagan avait quitté sa salle du trône au milieu de la nuit.

Bon, c’est l’heure d’acheter des vêtements pour mon rencard !

Pendant le dîner, Foll semblait incapable de retrouver son calme et de regarder Zagan dans les yeux, mais elle ne montrait aucun signe d’offense pour ce qui s’était passé plus tôt dans la soirée. Zagan voulait croire qu’elle s’en remettrait après avoir dormi. Il était inquiet, mais son rendez-vous avec Néphy n’était qu’à une semaine d’ici, donc il n’avait pas de temps à perdre.

Les sorciers qu’il avait croisés l’avaient tous regardé et lui avaient dit des choses du genre. « Hein, Archidémon Zagan ? » « Où allez-vous à cette heure-ci ? » Mais Zagan n’avait jamais fait autre chose que hocher la tête. Ils étaient peut-être confus par son comportement, mais c’était bien tant qu’il n’était pas découvert par quelqu’un de bruyant comme Selphy ou Gremory.

Après s’être assuré que personne ne le suivait, Zagan avait ouvert les portes de son château et glissa par l’ouverture. Cependant, à ce moment-là, quelque chose de surprenant s’était produit.

« Oh non ! »

Il entendit un adorable cri résonner derrière lui. Et, en se retournant, il aperçut la femme qu’il aimait le plus.

« N-Néphy ? » demanda Zagan.

« Maître Zagan… ? » répondit Néphy, ses oreilles tremblant de surprise en levant les yeux vers Zagan. Elle tenait actuellement une lanterne à la main et semblait revenir du jardin.

Tous mes plans seront ruinés si Néphy découvre ce que je fais ! Il fallait qu’il réfléchisse vite, sinon il était condamné.

« Uhhhh, qu’est-ce que tu fais dehors à cette heure-ci ? » demanda Zagan.

« Eh bien, il y avait juste un petit quelque chose qui m’inquiétait, alors…, » répondit Néphy.

« Quelque chose qui t’inquiétait ? » demanda Zagan.

« Ce n’est pas quelque chose dont tu as encore besoin d’entendre parler, Maître Zagan. Je suis probablement juste un peu paranoïaque… En tout cas, que fais-tu à cette heure-ci ? » demanda Néphy.

« Euh, je suis, euh…, » le regard de Zagan errait alors qu’il cherchait une excuse, et il avait fini par regarder le ciel nocturne. Il y avait une lune mince suspendue au-dessus de nos têtes, et les étoiles scintillaient admirablement.

Maintenant que j’y pense, la lune était comme ça le jour de notre rencontre…, la lune était si mince qu’elle donnait l’impression qu’elle allait se lever et disparaître, et Néphy étendit les mains vers elle, ce qui lui fit suivre son exemple. Et c’est pourquoi Zagan tendit à nouveau les mains vers la lune.

« J’ai fini par venir ici sur un coup de tête à cause du ciel nocturne, » proclama Zagan d’une manière grandiose. Son excuse était tout à fait vague, mais bizarrement, cela lui ressemblait beaucoup.

« C’est vraiment une belle nuit, » déclara Néphy en laissant son regard suivre les mains de Zagan, puis elle poussa un profond soupir.

« Oui, ça me rappelle la nuit où je t’ai rencontrée pour la première fois, Néphy, » répondit Zagan alors que Néphy se blottissait à côté de lui et étendait aussi les mains vers la lune. Comme toujours, ses mains ne saisissaient rien, mais c’était comme si c’était le cas. Zagan avait été complètement décontenancé par la situation.

Hein ? N’est-ce pas… une très bonne ambiance !? C’était dommage qu’il ne puisse pas aller acheter des vêtements pour leur rendez-vous, mais c’était plus que suffisant pour compenser cette perte. Même dans le meilleur des cas, les deux individus étaient étrangement conscients l’un de l’autre, de sorte que des moments comme celui-ci où les deux étaient à l’aise étaient plutôt rares. Zagan baissa les yeux vers le visage de Néphy.

« … Ah. »

Et au même moment, Néphy leva les yeux vers Zagan.

« A-Ahahahahahah ! »

« Fufufufu… »

Tous les deux avaient laissé échapper des rires secs, puis ils avaient détourné le regard. Ce genre d’échange s’était souvent répété dernièrement… Non, pas seulement dernièrement. Cela faisait près d’un demi-mois que cela se produisait.

C’est mauvais ! Reprends-toi, Zagan ! Zagan rassembla son courage et jeta à nouveau son regard sur le visage de Néphy. Son embarras semblait toujours en train de s’estomper, puisqu’elle avait simplement détourné le regard et avait commencé à bouger ses doigts malgré qu’il ait placé ses yeux sur elle. Ses joues étaient légèrement rouges et son souffle était blanc lorsqu’elle se frottait les mains l’une contre l’autre. En regardant de plus près, Zagan avait remarqué qu’elle portait sa tenue de femme de chambre habituelle et qu’elle n’avait pas de manteau. Et ainsi, il ouvrit son manteau et y entraîna Néphy.

« Qu…, » Néphy poussa un gémissement tremblant quand Zagan l’enveloppa dans son manteau. Et honnêtement, elle n’était pas la seule à être gouvernée par ses nerfs.

H-Hein ? Attends, n’est-ce pas la même chose qu’une étreinte serrée ? Il voulait seulement partager son manteau avec elle, mais il avait fini par la serrer contre lui. Zagan n’avait jamais eu l’intention d’être aussi audacieux, mais il était trop tard pour reculer maintenant.

Je veux dire, c’est naturel pour un couple, non ? Pas vrai !?

Étonnamment, Néphy n’avait pas essayé de se débarrasser de lui. Au contraire, elle serrait légèrement la robe de Zagan.

« … C’est chaud, » déclara Néphy.

« Bien sûr que si ! » répondit Zagan.

Zagan ne savait même pas avec quoi il était d’accord, mais c’était le mieux qu’il pouvait faire dans cette situation tendue.

Ce serait mieux si je lui trouvais un manteau ou quelque chose comme ça pour notre rendez-vous ? Zagan avait réfléchi en sentant le corps de Néphy s’échauffer. Le foulard qu’il avait reçu de Néphy l’autre jour était plutôt confortable, et avec cela, il était possible de les réchauffer tous les deux à la fois. Cependant, il n’aimait pas l’idée de le salir, c’est pourquoi il l’avait rangé en lieu sûr.

Après avoir réfléchi à ça pendant un certain temps, Zagan regarda la lanterne que tenait Néphy. Après avoir remarqué son regard, Néphy leva la lanterne avec un regard curieux.

« Il y a un problème avec ça ? » demanda Néphy.

« Non, ça fait juste longtemps que je n’en ai pas vu une utilisée, » répondit Zagan.

La dernière fois qu’il en avait vu une, c’était au bal de Bifrons. À l’époque, les lumières ondoyantes des lanternes au sommet du navire créaient une atmosphère suspecte. Les sorciers pouvaient voir dans la nuit sans compter sur aucune source de lumière. Ils utilisaient normalement un peu de lumière pour lire, mais même alors, des bougies bon marché étaient plus que suffisantes. Avant que Néphy ne vienne au château, il ne faisait que créer de la lumière à l’aide de la sorcellerie. Les lanternes allaient prendre une main lors de leur utilisation, donc elles étaient beaucoup trop encombrantes selon Zagan.

« Toutes mes excuses. Il semble que je sois toujours inadéquate…, » Néphy avait placé sa main vers l’une de ses oreilles avec honte en disant ça. Néphy avait vite appris, mais elle n’avait commencé à apprendre la sorcellerie qu’il y a quelques mois. À cause de cela, Zagan lui avait interdit d’utiliser toute sorcellerie de longue durée, qui incluait toute création de lumière.

« Tu n’as pas besoin d’avoir honte. La lumière des bougies a un certain charme, alors n’est-ce pas bien ? » dit Zagan en prenant la lanterne de la main de Néphy. Et tandis qu’il la tenait levée, la lanterne illuminait le visage rougissant de Néphy.

« … Oui. Merci… beaucoup…, » Néphy répondit alors que ses oreilles tremblaient comme si elle était incapable de supporter le gonflement des émotions en elle. Puis, Néphy s’appuya contre lui, ce qui attira l’attention de Zagan sur le pendentif dans sa poche.

N’est-ce pas le moment idéal pour le lui remettre ? Non, attends, si je le lui donne maintenant, le but principal de notre rendez-vous sera perdu… Je sais que c’est bien tant qu’elle apprécie vraiment le rendez-vous, mais j’ai l’impression que tout mon dur labeur sera pour rien…

Après avoir hésité un peu, Zagan avait décidé de laisser le pendentif pour plus tard. Au lieu de cela, il avait éclairé une plus grande partie du jardin avec la lanterne.

« Puisque nous sommes tous les deux ici, pourquoi ne pas faire un petit tour ? » demanda Zagan.

« Oui, Maître Zagan, » Néphy le regarda avec surprise pendant un moment avant de dire cela et de lui faire un léger sourire.

Ne se lassera-t-elle pas en se baladant, hein ? Une anxiété sans fondement avait commencé à s’accumuler au sein de Zagan alors que lui et Néphy marchaient main dans la main dans le jardin. Le ciel étoilé était beau, mais ce n’était pas suffisant pour illuminer leurs pas. Zagan pouvait voir sans problème, mais Néphy devait rester prudente pour ne pas trébucher. Et, comme cette pensée lui traversa l’esprit, Zagan se rappela ce qui s’était passé il y a peu de temps et s’en rendit soudainement compte.

« Hum, Néphy…, » déclara Zagan.

« Oui ? Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Néphy.

« Foll est bouleversée, n’est-ce pas ? » demanda Zagan.

On aurait dit qu’il avait touché le mile. Les oreilles pointues de Néphy se redressèrent en un clin d’œil et son regard se mit à errer à la recherche d’une excuse. Cependant, peu de temps après, elle s’était dit qu’il serait inutile d’essayer d’esquiver la question et elle avait ouvert la bouche pour parler.

« Je suis surprise… que cela soit visible, » murmura Néphy.

« J’ai blessé Foll tout à l’heure, et la dernière fois qu’elle a fui le château, c’était par une nuit pareille, non ? » demanda Zagan.

C’était ce qui s’était passé lorsque Foll s’était installée pour la première fois dans son château. Parce que c’était les chevaliers angéliques qui avaient tué son père et qu’elle en avait un sous les yeux, Foll avait fui le château afin d’obtenir plus de pouvoir pour atteindre ses objectifs.

À l’époque, on s’en était sort1 parce que c’était un malentendu, mais Raphaël a quand même été grièvement blessé… C’était à cause de cet incident que son majordome avait perdu un bras.

« Cet enfant comprend ce que tu penses, Maître Zagan. Ce n’est pas comme si elle s’était enfuie, mais…, » Néphy s’éloigna en penchant la tête sur le côté.

« Mais quelque chose s’est passé, » s’exclama Zagan, finissant sa phrase.

« … Oui. Je n’essaie pas de lui faire porter le chapeau, mais Mlle Gremory semblait prête à faire des bêtises, » déclara Néphy.

Encore cette satanée Gremory ? Zagan pensait honnêtement que cette grand-mère était beaucoup trop insouciante.

« Gremory peut être difficile, mais quand il s’agit de faire la distinction entre le bien et le mal… elle n’est peut-être pas la meilleure juge… Elle n’est pas stupide au point de gâcher ma bonne humeur. Ça devrait être bien de la laisser tranquille, » déclara Zagan.

D’ailleurs, l’image d’un petit enfant qui s’enfuit et s’accroche à une grand-mère n’était pas une scène contre nature.

« Il serait bon que les choses se terminent pacifiquement…, » Néphy répondit avec un regard anxieux, ce qui fit rire Zagan d’un commun accord.

« En fait, Foll me harcelait pour que je lui apprenne le Phosphore du Ciel, » déclara Zagan.

« Oui. Elle me l’a déjà dit, » répondit Néphy.

« Mais j’ai donné à Gremory un Phosphore du Ciel qu’elle seule peut vraiment utiliser, donc cela ne sera d’aucune aide pour Foll. Je sais que cela peut la mettre en colère, mais je promets que j’ai au moins essayé de penser à d’autres choses que je peux faire pour elle. De plus, si je ne peux pas au moins supporter les crises de colère de ma fille, je n’ai pas le droit de me considérer comme un père, » déclara Zagan.

***

Partie 5

« Je comprends ce que tu ressens, Maître Zagan. L’accumulation du pouvoir rapproche les gens du danger, alors honnêtement, même moi, je déteste l’idée que notre fille apprenne de telles choses… Cependant, je comprends aussi les sentiments de Foll, » répondit Néphy, puis hocha la tête en silence avant de placer son regard sur la lanterne que Zagan tenait. Elle déclara ensuite. « Je veux devenir quelqu’un qui peut t’être utile, Maître Zagan. Et pourtant, j’ai besoin de l’aide d’un outil pour quelque chose d’aussi simple que de marcher sur un chemin sombre. Comme je suis maintenant, je ne suis rien face à Mlle Gremory ou Foll. »

« Ce n’est pas vrai. Je veux dire, tu as le mysticisme et le mysticisme céleste, non ? » Zagan avait réfuté cela. S’il s’agissait d’un combat loyal, surtout dans un environnement avec des arbres et des rivières où elle pouvait emprunter la puissance de la nature, Néphy pourrait actuellement même rivaliser avec un Archidémon. Cependant, s’ils s’étaient vraiment battus, quelqu’un comme Nephteros serait probablement battu en raison de son manque d’expérience, mais c’était une tout autre histoire.

« Ce… n’est pas quelque chose que j’ai obtenu par mes propres efforts. J’ai l’impression d’être la seule à avoir triché quand tout le monde travaillait jusqu’à l’os pour devenir plus fort, et je n’aime pas ça, » déclara Néphy en secouant la tête quand elle avait entendu sa réponse. Le mysticisme était un pouvoir avec lequel elle était née, et le mysticisme céleste était quelque chose qu’elle avait appris en le voyant une fois. Il avait fallu beaucoup de talent pour réaliser l’un ou l’autre de ces exploits, mais il semblait que Néphy avait encore du mal à l’accepter. C’est pour ça qu’elle s’identifiait à Foll.

Mais si elle pouvait mieux utiliser ses pouvoirs draconiens, elle deviendrait beaucoup plus forte… Malheureusement, Foll semblait plutôt obsédée par l’amélioration de sa sorcellerie. Cela réduisit quelque peu sa vision, mais on pouvait aussi dire qu’à long terme, gagner du pouvoir qu’un dragon ne possédait pas normalement était mieux pour eux. Zagan n’était pas sûr d’être d’accord, mais il ne pouvait pas non plus réfuter l’idée.

« Le comprends-tu maintenant, Maître Zagan ? Si c’est le cas, ne gronde pas Foll, s’il te plaît, » supplia Néphy en levant les yeux vers Zagan, comme si elle faisait appel à son bon cœur.

« Comme si j’allais la gronder. J’ai dit que je supporterais sa crise de colère, n’est-ce pas ? » Zagan répondit en riant, néanmoins, ses paroles étaient remplies de sincérité.

Ai-je mal réagi tout à l’heure… ? Le désir de Foll de devenir plus forte était quelque chose qu’il connaissait depuis leur première rencontre. En y repensant, Zagan s’était rendu compte qu’ignorer complètement cette facette d’elle et lui dire de jouer le rôle d’un enfant innocent était tout à fait égoïste de sa part. Cela dit, il ne pensait toujours pas qu’il était convenable de lui donner accès à un pouvoir destructeur comme le Phosphore du Ciel.

« Ce n’est pas comme si je n’avais pas pensé à quel genre de pouvoir accorder à Foll…, » Zagan marmonna d’un grognement. C’est précisément pour cela qu’il a créé le Champ de Neige, mais malheureusement, ce n’était pas ce que Foll voulait.

« Attends, qu’est-ce que tu avais prévu d’accorder à Foll ? » demanda Néphy, semblant plutôt surprise. Il semble que Néphy n’ait pas été informée de cette partie, car elle avait regardé Zagan en réponse avec une expression sans émotion.

« Oh, à ce propos… C’est encore incomplet, mais…, » Zagan leva la main alors qu’il activa le Champ de Neige. En un clin d’œil, des taches de lumière enveloppèrent la région comme de la poussière d’étoiles, et Néphy poussa un soupir, complètement envoûté par la vue.

« Comme c’est beau, » murmura Néphy.

Tu es bien plus belle… Ces mots étaient remontés jusqu’à sa gorge, mais il n’osait pas les prononcer. Zagan s’était arrêté, puis il avait démontré ce qui se passait quand une masse de mana était entrée en collision avec les lumières du Champ de Neige.

« Il est plus que suffisamment robuste, mais il est beaucoup trop complexe à manipuler librement et il oblige aussi l’utilisateur à rester immobile, » expliqua Zagan.

« Est-ce vraiment un problème lorsque tu l’utilises pour te défendre contre des projectiles… ? » demanda Néphy. Cependant, un moment plus tard, quelque chose avait surgi en elle et elle avait dit. « Je vois… C’est juste un entraînement pour ce que tu comptes lui enseigner ensuite, non ? »

« Tu as vraiment un bon sens de la sorcellerie, Néphy, » répondit Zagan. Il était choqué qu’elle ait réussi à comprendre ses intentions même s’il ne lui avait rien du tout expliqué.

Néphy se tut un moment, fixant tranquillement les lumières enneigées de l’air avant de décider de lui parler.

« C’est un peu flou, mais je m’en souviens. Tu as utilisé la sorcellerie pour créer une énorme lumière, Maître Zagan. Ce champ de neige a la même couleur, » déclara Néphy. Puis, soudain, elle pensa à quelque chose et demanda. « Maître Zagan, est-ce que tu contrôles toutes ces Écailles du Ciel individuellement ? »

« Non, il y en a presque un millier ici. Elles sont prêtes à se déplacer seules et sont attirées par les accès de mana à proximité, » répondit Zagan. Il était parfaitement capable de les contrôler tous individuellement, mais cela avait été conçu avec Foll en tête. Il n’y avait aucun sens à créer quelque chose qu’elle était incapable de contrôler. Bien que, dans ce cas, il ait été possible de le lui donner sous une forme encore plus simple…

« Il semble que le même circuit ait été placé dans chaque Écaille du Ciel, alors serait-il possible de les contrôler en grappes ? » s’enquit Néphy en continuant d’observer chaque point de lumière qui formait le Champ de Neige.

« En grappes ? » demanda Zagan.

« Oui. Je parle de les contrôler en les divisant en grappes groupées. L’utilisation de circuits pour unifier les Écailles du Ciel autour d’un chef ne fonctionnerait-elle pas ? De cette façon, tu pourrais tous les manipuler simplement en contrôlant quelques groupes sélectionnés. »

Zagan la fixa d’un air émerveillé. Il avait été complètement déconcerté par sa brillante idée.

 

 

« Je vois. Dans ce cas, son contrôle serait certainement simple, et il permettrait de se déplacer facilement tout en l’utilisant… Bon travail, Néphy, » déclara Zagan.

« Je suis contente de pouvoir t’aider, » répondit Néphy.

« Tu es toujours… Pourtant, je ne peux m’empêcher de m’étonner que tu y aies pensé, » dit Zagan d’un ton chargé d’admiration, ce qui fit que Néphy plaça timidement son regard sur le sol.

« Je n’y ai pensé que parce qu’un pouvoir du mysticisme céleste que j’ai utilisé avant a fonctionné comme ça. De plus, je ne pourrais jamais espérer contrôler un millier d’Écailles du Ciel à la fois, alors mon esprit s’est déplacé pour trouver des moyens de les utiliser, » répondit Néphy.

Je suppose que ça veut dire qu’il y a des choses qui sont plus faciles à comprendre parce que tu as des problèmes avec eux, hein ? Ce fait avait étonné Zagan. Il était capable de contrôler individuellement les mille Écailles du Ciel, et c’est précisément pour cela qu’il était incapable de trouver une solution du point de vue de quelqu’un qui ne pouvait pas. Néphy, d’autre part, se plaignait d’être faible, mais elle avait pu arriver à une conclusion qui lui était étranger en raison de sa faiblesse.

« Ce sont ces parties de toi qui me servent le mieux, Néphy. Alors, aie plus confiance en toi, » se réjouit Zagan, qui avait fait presser légèrement son visage contre la joue de Néphy en disant ces mots.

« Wawawa ? » s’exclama Néphy. Et dans le manteau de Zagan, les oreilles de Néphy tremblaient violemment de haut en bas. Cela lui avait fait penser qu’il avait encore fait une erreur, mais il avait décidé de mettre ces pensées de côté pour l’instant.

Après cela, Néphy continua à faire des bruits complètement incompréhensibles, mais peu de temps après, elle s’installa et acquiesça d’un signe de tête résolu. Et puis, elle étendit les bras devant Zagan et donna un coup de pied par terre. Quand elle atteignit son cou, Néphy l’enveloppa de ses bras et l’enlaça fermement.

« O-Oh ? » murmura Zagan. Cette fois-ci, c’était lui qui avait les yeux rivés sur elle, car Néphy s’accrochait à lui de façon extrêmement serrée. Il était extrêmement inhabituel pour Néphy d’adopter une ligne de conduite aussi audacieuse, mais c’était tout de même plus que bienvenu.

Qu’est-ce que c’est… ? C’est vraiment doux et chaud… Je le jure, c’est la première fois que Néphy exprime son amour directement. Je suis si content que mon cœur saute presque hors de ma poitrine ! Zagan avait heureusement rendu l’accolade malgré ses nerfs qui l’emportaient sur lui. La façon dont les oreilles rouge vif de Néphy se tortillaient lorsqu’elle l’enlaçait lui rappelait quand Néphy était devenue une enfant, ce qui la rendait tout à fait irrésistible.

Il se peut que le fait d’être devenue une enfant ait aidé Néphy à retrouver sa personnalité d’origine. Et si tel était le cas, les actions d’Orias étaient plus que justifiées. Après tout, il n’y avait aucun moyen pour la Néphy, habituellement réservée, d’exprimer son amour avec autant d’audace sans que quelque chose change en elle.

« Maître Zagan, » marmonna Néphy en se prélassant dans l’instant joyeux.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Zagan.

« Je suis, euh, extrêmement heureuse que nous ayons pu faire une promenade ensemble si tard dans la nuit. Est-ce que cette chose s’appelle un rendez-vous… quelque chose de similaire ? » demanda Néphy.

« Hein ? Euh, je me le demande… ? » répondit Zagan.

C’était une première même pour Zagan, alors il ne savait pas exactement en quoi consistait un rencard. Mais en même temps, il sentait qu’il devait y avoir quelque chose de très similaire.

« Je suis sûr que c’est comme ça, mais c’est encore plus incroyable ! Nous irons dans les magasins et les rues où nous n’allons pas d’habitude, nous nous habillerons, nous nous promènerons, et nous ferons quelque chose de spécial ! » proclama Zagan. Par quelque chose de spécial, il voulait bien sûr dire lui remettre le pendentif.

Les oreilles pointues de Néphy bougèrent d’un frémissement et, en affichant un virage inhabituel, elle avait un grand sourire.

« D’accord. J’ai hâte d’y être, » déclara Néphy.

Zagan avait l’impression d’avoir relevé la barre inutilement, mais il avait décidé de ne pas s’en faire. Néphy semblait ravie, et c’était finalement tout ce qui comptait. Malheureusement pour lui, il n’avait aucun moyen de savoir quelle calamité lui arriverait le lendemain matin…

***

Partie 6

« Zagan, je veux grandir. » 

Le lendemain, Foll s’arrêta à la salle du trône avant le petit déjeuner. Derrière elle se trouvait Gremory, sous la forme d’une vieille femme, alors qu’elle avait de la sueur sur le front.

« Hm… Vas-y, continue. Écoutons-là, » Zagan se gratta la mâchoire, et il hocha la tête lorsqu’il lui donna sa réponse.

« L-Lady Foll. Je ne crois pas qu’on doive en parler à notre seigneur tout d’un coup. Ne penses-tu pas que des imbéciles comme Kimaris ou le Purgatoire pourraient nous donner un coup de main à la place tant que certaines conditions sont remplies ? » Gremory chuchota à Foll derrière elle d’une voix troublée, clairement inquiète que Zagan découvre ses plans ignobles.

« Tu as dit que tu ne pouvais pas le faire, Gremory, alors ce sera pareil pour tous les autres. Zagan est le seul à qui on peut le demander, » répondit Foll avec résolution.

« Non, eh bien, tu as peut-être raison, mais…, » Gremory s’arrêta de parler, alors qu’elle ne cessait de jeter un coup d’œil à Zagan avec un visage complètement pâle.

Le fait que Foll puisse parler franchement signifiait qu’elle faisait confiance à Gremory. Zagan, personnellement, aurait préféré qu’elles restent plus éloignées l’une de l’autre, puisque Gremory ne pouvait qu’avoir une mauvaise influence sur sa fille. Néanmoins, il se fiait à Gremory et la considérait comme sa servante de confiance, alors cela aurait été étrange qu’il dise à Foll de l’éviter.

En tout cas, elle veut devenir plus grande… pas plus forte… ? Cela pourrait probablement se faire avec l’aide de la sorcellerie de Gremory, qui manipulait l’âge, mais d’après ce qu’elles avaient dit, cela n’avait pas encore réussi. Dans ce cas, pourquoi avaient-elles tout dit à Zagan ? Ce n’était pas une question très difficile à répondre, mais Zagan avait décidé d’attendre que sa fille continue à s’expliquer pendant qu’il la fixait. Et peu de temps après, Foll rassembla sa détermination et ouvrit la bouche pour parler.

« Zagan, tu penses que je suis trop petite pour que tu me donnes du pouvoir, ce qui veut dire que je dois juste devenir plus grande ! » déclara Foll.

« Je vois ce que tu veux dire. Et ? » demanda Zagan.

Foll était une fille qui aimait passer à l’action. Si elle en était arrivée à cette conclusion, elle concrétiserait son idée et montrerait les résultats à Zagan. Le fait qu’elle ne l’ait pas déjà fait signifiait qu’il y avait une raison pour laquelle elle ne le pouvait pas. Et, comme Zagan l’avait pressée de continuer, Foll s’était mordu la lèvre avec humiliation.

« Mais… ça n’a pas marché sur moi alors que cela marche sur Gremory, » déclara Foll.

« Je vois. J’ai entendu dire que les dragons ont une résistance énorme contre la sorcellerie. La sorcellerie destinée aux humains ne devait pas être assez bonne, » fit remarquer Zagan. On disait que les écailles d’un dragon ancien pouvaient repousser naturellement la sorcellerie, et même une épée de la plus haute qualité ne pouvait pas laisser une seule égratignure sur elles.

Même en mettant cela de côté, les dragons étaient incroyablement puissants. Leur vitesse et leur force étaient inégalées, à tel point que même Kimaris, qui était reconnu comme l’être le plus rapide au monde, ne pouvait pas suivre Foll tout en transportant des gens comme elle. Cela s’appliquait particulièrement à Foll, car elle était une descendante du légendaire Sage Dragon Orobas. Franchement, son potentiel latent éclipsait facilement Zagan et Néphy. Et c’est pourquoi, même si elle était encore une jeune dragonne, ce n’était pas si simple de manipuler son corps. Ce n’était pas du tout surprenant que Gremory n’ait pas été en mesure de le faire.

« Aide-moi, Zagan. J’ai besoin de grandir, » déclara Foll en regardant le visage de Zagan d’un air suppliant.

« … Et quand tu seras plus grande, tu veux que je t’apprenne le Phosphore du Ciel ? » demanda Zagan.

Foll avait compris la raison pour laquelle Zagan ne lui accordait pas le pouvoir. Elle échoua dans sa tentative d’annuler sa décision, et vint quand même demander de l’aide à Zagan. Cela avait peut-être semblé stupide à la plupart des gens, mais Zagan ne pensait pas du tout que ses actions étaient déraisonnables.

Je suppose que ce serait un bon compromis… Foll avait trouvé un moyen d’obtenir l’approbation de Zagan toute seule. Et après avoir étouffé sa fierté, elle était même allée jusqu’à supplier Zagan de l’aider. Comment pouvait-il nier l’existence de sa fille alors qu’elle travaillait si dur ?

Les paroles de Néphy de la veille lui avaient traversé l’esprit et l’avaient poussé à continuer. « Cependant, je comprends aussi les sentiments de Foll. »

Zagan pensait qu’il comprenait aussi les sentiments de Foll, alors il devait réagir de façon appropriée. Après avoir été demandé par sa fiancée et sa fille, il n’allait pas refuser. Et ainsi, Zagan avait fait un signe de tête régulier.

« … Alors, très bien, » avait-il déclaré.

« Vraiment ? » demanda Foll quand ses yeux d’ambre commencèrent à scintiller.

« Cependant, j’ai une condition. C’est la sorcellerie de Gremory, donc l’effet est temporaire, non ? Je déciderai quand c’est bon pour toi de grandir. Je t’interdis de le faire sans ma permission, » déclara Zagan.

« D’accord, » répondit Foll sans la moindre hésitation de sa voix. Elle avait probablement déjà prédit qu’une telle condition serait imposée. À ce moment-là, l’expression de Zagan s’était finalement détendue.

« Si tu promets de tenir ta parole, alors je t’enseignerai le “Phosphore du Ciel” qui brûle toute vie, » déclara Zagan.

Les yeux de Foll brillèrent encore plus, et à ce moment-là, elle se leva et enlaça le cou de Zagan.

« Merci ! Je t’aime, papa ! » déclara Foll.

« Ah ! » Zagan avait poussé un cri de surprise. Les paroles de Foll le rendaient si heureux qu’il se sentait prêt à cracher du sang, mais en même temps, il pouvait dire que Foll ruminait l’affaire depuis un bon moment, ce qui l’avait fait tenir le coup.

Cependant, je voulais qu’elle reste ma petite fille un peu plus longtemps… Pourtant, il savait que ce n’était pas pour le mieux. Après tout, quel genre de parent serait-il s’il n’était pas heureux de la croissance de son enfant ?

Ainsi, bien qu’ils n’aient pas encore déjeuné, Zagan se dirigea vers le laboratoire de Gremory.

***

« Que dois-je faire exactement ici ? » demanda Zagan en entrant dans le labo de Gremory.

Une partie du château avait été attribuée aux serviteurs de confiance de Zagan comme Gremory et Kimaris. Ces salles servaient généralement de laboratoires où les sorciers faisaient des expériences et poursuivaient leurs recherches. Le château était en fait assez grand pour attribuer des pièces à tous ses subordonnés, mais la plupart d’entre eux utilisaient l’autre base de Zagan, le palais de l’Archidémon. Il avait soudain gagné une trentaine de subordonnés à la fois, devant maintenant ainsi gérer tout ce qui devenait incontrôlable.

Arrivé dans le laboratoire de Gremory, il trouva un grand cercle magique qui avait déjà été préparé. La sorcellerie était quelque chose qui différait dans sa forme avec des variations infinies, mais le fait que le cercle magique ait été entièrement tracé avait indiqué à Zagan que la sorcellerie elle-même avait été perfectionnée. Cependant, cela signifiait aussi qu’ils n’avaient pas besoin des connaissances de Zagan, ce qui l’embrouillait beaucoup.

Saisissant son étonnement, Gremory tapota le bord de sa grande faux contre le cercle magique et se mit à rire bizarrement. « La structure de la sorcellerie est complète. De plus, j’ai fait des recherches approfondies sur l’écoulement optimal du mana à travers lui, il n’est donc pas nécessaire d’ajouter d’autres circuits. »

« Je peux déjà le dire, » déclara Zagan.

Les cercles magiques étaient tissés avec des symboles appelés circuits, et le cercle magique de Gremory avait plus de dix mille circuits entassés dedans. Zagan ne savait même pas s’il pouvait lui-même créer un cercle magique aussi délicatement assemblé, et ce n’était pas seulement parce que cette sorcellerie était hors de son domaine de compétence.

« Keeheeheehee, je vois qu’il n’y a pas besoin de vous expliquer ma sorcellerie, mon seigneur. Ce qui manque ici, c’est le mana nécessaire pour surpasser la résistance à la sorcellerie d’un dragon. C’est-à-dire, nous avons besoin de pouvoir proche du niveau d’un Archidémon, » dit Gremory en plissant ses yeux d’une manière heureuse.

« C’est beaucoup, hein… ? » déclara Zagan.

Pour le dire franchement, Zagan avait été surpris. Il pensait déjà comprendre le pouvoir des dragons, mais il semblait qu’ils dépassaient même son imagination la plus folle. Elle était vraiment la fille du légendaire Sage Dragon Orobas.

En d’autres termes, ils veulent que j’utilise le Sceau de l’Archidémon… Ce n’était pas comme si le mana de Zagan surpassait le leur d’une quantité significative. Le sceau sur sa main était la preuve qu’il était un Archidémon, mais en vérité, Zagan ne trouvait pas vraiment cela désirable. C’est pourquoi il ne l’utilisait qu’en cas de besoin.

C’était un pouvoir emprunté, un sceau dangereux qui pouvait retourner ses crocs contre lui à tout moment. Il s’en servit pour sceller le sceau d’un autre Archidémon, mais il n’avait pas l’intention de s’y fier pour beaucoup plus que cela. Cependant, il était également vrai qu’il s’agissait essentiellement d’un conteneur rempli d’une quantité absurde de mana.

Eh bien, je suppose que ce n’est pas un problème. Je l’utiliserai juste pour amplifier le mana de Foll ici…

« Si je comprends bien. Tout ce dont tu as besoin, c’est que j’envoie le mana du sceau à Foll, non ? » demanda Zagan.

« Exactement, » répondit Gremory.

« Très bien. Alors je lui fournirai… hein ? Mais franchement ! Tu veux que je lui fournisse du mana ? » Zagan avait rugi, clairement agité. Certains sorciers pouvaient voler du mana à d’autres, mais d’après ce qu’il pouvait voir, le cercle magique de Gremory ne comprenait rien de tel. L’inclusion d’un élément aussi inutile dans un cercle magique si délicatement assemblé était quelque chose que seul un Archidémon pouvait faire, donc cela avait du sens. Cependant, cela signifiait qu’il devait lui fournir du mana d’une manière primitive qui n’interférerait pas avec la sorcellerie…

Me dis-tu d’embrasser ou d’avoir des relations sexuelles avec ma propre fille ? Le sexe était évidemment hors de question, alors il ne restait plus que le baiser. Pourtant, il n’y avait aucun moyen qu’il puisse faire ça.

Mais franchement, je n’ai même pas encore embrassé Néphy !

« Zagan, qu’est-ce qui ne va pas ? » Foll avait incliné la tête sur le côté comme si elle ne comprenait pas vraiment ce qui se passait quand elle lui avait posé cette question.

« Non, c’est juste que le moyen de fournir du mana est…, » Zagan s’était effondré. Il n’y avait aucune chance qu’il puisse expliquer une telle chose à sa jeune fille. Cependant, il avait déjà promis de coopérer avec le désir de Foll de devenir plus grande. Et par-dessus tout, il voulait aider sa fille qui faisait de son mieux. Cela dit, il n’était pas question de l’embrasser sans lui expliquer quoi que ce soit.

Au fait, Gremory poussait une clameur en disant. « Wooo, le beau pouvoir d’amour ! Qu’est-ce que vous allez faire, Archidémon !? Il est temps de me montrer votre vrai potentiel… ! Ah, j’ai un saignement de nez. »

Après s’être inquiété à ce sujet pendant un certain temps, Zagan avait renoncé à s’expliquer.

***

Partie 7

« Écoute, tu es sur le point d’avoir le mana de quelqu’un d’autre versé en toi. Es-tu vraiment d’accord avec ça ? » demanda Zagan. 

« Je ne comprends pas vraiment… mais c’est d’accord si c’est toi, » répondit Foll. Elle était prête à forcer une poussée de croissance pour gagner du pouvoir, alors il avait tort de lui demander une telle chose.   

Alors, en tant que parent, je ne peux plus reculer… Zagan était le plus jeune sorcier de l’histoire à devenir un Archidémon, ce qui était le résultat de sa grande force mentale. C’est pourquoi il avait trouvé sa réponse même en hésitant. Et puis, posant une main sur l’épaule de Foll, il s’adressa à elle en murmurant.

« Alors, Foll. Tu dois fermer les yeux, » déclara Zagan.

« D’accord…, » répondit Foll.

Elle était visiblement nerveuse. Son corps se raidit en fermant les yeux. Et puis, Zagan avait amené son visage sur le sien.

« Va-t-il vraiment le faire ? Attends, ce genre de développement est beaucoup trop soudain. Le pouvoir de l’amour est quelque chose qui devrait s’accumuler avec le temps. Il faut qu’il soit plus gracieux et plus digne ! Mais même si je n’aime pas ça, voir mon seigneur sur le point de commettre un péché par amour est passionnant… Aaaaaaaah, je veux l’arrêter… Non, je veux veiller sur lui ! Ugh, qu’est-ce que je fais !? » s’écria Gremory.

Gremory essayait probablement de garder ça pour elle, mais elle faisait beaucoup trop de bruit.

Kimaris fait de l’hypotension et n’est pas bon le matin, hein… ? À ce moment-là, Zagan s’était rendu compte à quel point ce sorcier l’avait aidé.

Même Foll avait l’air de faire une tête irritée, alors Zagan avait fait obstruction à tous les sons autour d’eux. Il avait créé une barrière pour isoler ceux qui étaient à l’intérieur et ceux qui étaient à l’extérieur. Cela n’avait aucune propriété défensive, mais même si la foudre frappait à l’extérieur, ils ne pourraient pas l’entendre.

Tandis que les environs s’étaient soudainement tus, le corps de Foll trembla d’un coup. Et pour mettre sa fille à l’aise, Zagan avait mis ses lèvres sur son front.

« Hein… ? » marmonna Foll, ouvrant les yeux par surprise.

Bref, il ne me reste plus qu’à créer un chemin pour le mana ! Un baiser était nécessaire, c’était donc la réponse de Zagan à ce problème difficile. Puisqu’il n’avait besoin que d’entrer en contact avec elle pour lui envoyer son mana, cet acte était plus que suffisant.

« Un baiser sur le front… fournit du mana ? » demanda Foll en se touchant le front dans la confusion.

« Eh bien, ouais, » répondit Zagan.

« … Je ne le savais pas, » déclara Foll.

Même si c’était sur le front, c’était vraiment embarrassant pour elle. Les joues de Foll étaient devenues légèrement rouges.

Aurais-je dû l’expliquer correctement ? Zagan n’était pas sûr de pouvoir regagner sa confiance si cela la faisait le détester. Il s’inquiétait de ce dilemme quand Foll avait parlé d’une voix si calme qu’il avait eu l’impression qu’il allait disparaître à tout moment.

« Oh, ce n’est pas mal…, » déclara Foll.

« Je-Je vois…, » déclara Zagan.

Pourquoi les choses étaient-elles devenues si gênantes ? Zagan avait continué de s’inquiéter de l’état de sa relation avec sa fille lorsqu’il s’était rendu compte que la grand-mère habituellement bruyante était beaucoup trop calme.

Oh oui, j’ai mis une barrière insonorisée… Après avoir abattu la barrière, Zagan et Foll étaient restés sans voix.

« CELA ! WOOOOOWWWW ! WOOOOOOOOOOOOO Ouf… Je vois. Pour une petite fille, un baiser sur le front est vraiment la meilleure approche. Vous êtes toujours aussi magistral, mon seigneur. Ahhhh, je vais mourir d’une overdose de toute cette puissance d’amour ! » cria Gremory.

Gremory avait l’air d’être devenue blanche comme un drap et était sur le point de se noyer dans une mare de sang provenant de son saignement de nez.

« Zagan… Gremory est…, » déclara Foll.

« Ne la regarde pas, » déclara Zagan en bloquant la ligne de vue de sa fille avec son corps.

« Keeheeheehee, j’ai vraiment cru que cela allait me tuer, mais il semble que les préparatifs soient terminés, » déclara Gremory en se levant sur ses pieds.

« Le mana est-il vraiment fourni là ? » demanda Foll en secouant la tête comme si elle n’y croyait pas du tout.

« Hm, Lady Foll, si tu utilises la sorcellerie maintenant, tu peux tirer le mana de l’inépuisable réserve de mon seigneur en utilisant ce lien qu’il vient de créer. Bien que cela ait été simplifié, cela ne devrait pas être un problème, » déclara Gremory.

« Ton mana est amplifié. Essaie, » déclara Zagan en acquiesçant aux paroles de Gremory.

« … D’accord ! » s’exclama Foll en acquiesçant d’un signe de tête vigoureux. Puis, elle se tenait au centre du cercle magique. Après l’avoir vérifié, Gremory commença à chanter clairement, et avant que personne ne s’en rende compte, sa silhouette avait changé, passant de celle d’une vieille femme à celle d’une belle jeune femme. C’était elle dans la fleur de l’âge, et le fait qu’il était nécessaire de le faire montrait à quel point cette sorcellerie était puissante.

« Le temps est l’anneau qui cerne de la lune au soleil. La spirale qui s’étire vers l’écoulement de haut en bas. Ce qui gouverne du commencement à la fin. Ainsi, ce qui lie le changement du soleil à la lune, du bas vers le haut, et de la fin vers le commencement, sera aussi le temps lui-même, » déclara Gremory.

Son sort était semblable à un chant céleste, peut-être parce qu’elle était autrefois l’élève d’Orias. Et bien que Zagan ait été instinctivement attiré par cela, il avait été agressé par un sentiment d’épuisement de voir son pouvoir soudainement retiré de son corps. Foll avait besoin de plus de mana, et il sortait du corps de Zagan à un rythme rapide.

« Sceau de l’Archidémon, prête-moi ton pouvoir ! » proclama Zagan en tenant sa main droite en l’air. En un instant, un mana suffocant avait gonflé dans la zone et son sentiment d’épuisement s’était dissipé.

Les dragons ont après tout une capacité plutôt terrifiante… Zagan croyait que l’approvisionnement en mana du Sceau de l’Archidémon était quelque chose qui dépassait de loin la portée de l’homme, mais cette situation lui fit réaliser qu’il y avait une race qui pouvait facilement le consommer. Peu de temps après, un changement avait commencé à se manifester à Foll. Ses bras et ses jambes avaient commencé à s’étirer, ses cheveux s’étaient étendus dans l’air et son corps plat avait commencé à gonfler. En d’autres termes, elle passait d’enfant à femme.

Est-ce que ça marche ? se demandait Zagan. Et à ce moment précis…

« Argh…, » Zagan avait gémi en voyant sa vision déformée.

« Zagan !? » cria Foll en se précipitant et en le soutenant par l’épaule.

Il est dangereux d’interrompre un rituel aussi délicat… Ils versaient quand même du mana du Sceau de l’Archidémon. Si les choses tournaient mal, cela pourrait s’emballer et détruire le château tout entier… Non, même Kianoides ne serait pas en sécurité dans le pire des cas. C’est pour ça que Gremory n’arrêtait pas de chanter. Elle comprenait sûrement la situation et souhaitait éviter tout danger. Son chant s’accéléra, accélérant le rituel jusqu’à sa conclusion.

Foll avait l’air anxieuse, mais elle était retournée au milieu du cercle magique. Sa silhouette avait déjà atteint à peu près la même taille que Néphy.

Attends, n’est-elle pas un peu trop grande là… ? C’était probablement parce qu’il s’accroupissait, mais Foll était maintenant assez grande pour qu’il doive lever les yeux vers elle. Cependant, celle qui semblait encore plus déconcertée que Zagan… était Foll.

« Zagan, tu es…, » balbutia Foll.

Avant qu’elle ait pu finir de parler, le cercle magique s’était brisé, laissant derrière elle une lumière éblouissante. Le rituel semblait terminé. Cela semblait aussi avoir été un fardeau considérable pour Gremory, alors qu’elle haletait pour respirer après que son chant se soit arrêté.

Le corps de Foll était devenu assez grand pour que sa robe natale habituelle ne puisse pas rester intacte. Sur le plan humain, elle avait l’air d’être dans la deuxième moitié de l’adolescence. Le même âge ou plus vieux que Zagan, en gros.

« Oh… »

Les vêtements des enfants étaient beaucoup trop petits pour son corps maintenant. Les zones de ses seins étaient particulièrement incapables de le supporter, car un bouton lui avait été tiré dessus et il arriva sur le front de Zagan. Il semble que le rituel ait été un succès pour l’instant.

« Zagan… » Foll avait encore une fois essayé de se précipiter à Zagan, mais…

« Ah ! »

Elle n’était pas encore habituée à son grand corps, et elle avait trébuché en chemin.

« Regarde où — hein ? » Zagan s’était levé pour essayer d’attraper Foll, mais pour une raison inconnue, son corps n’avait pas bougé comme il le souhaitait. Le corps de sa fille était beaucoup plus lourd qu’il ne l’imaginait quand il s’appuya sur lui. Il était arrivé à temps, mais les deux individus avaient fini par tomber ensemble.

Et comme ses seins étaient tombés sur son visage, il s’était senti terriblement réchauffé… Non, il n’avait pas eu le temps de se concentrer là-dessus. La pression étouffante qu’ils exerçaient sur lui était une question plus pressante. D’une façon ou d’une autre, ils l’écrasaient.

« MmmMmmmmmmmmmmmm ! »

« Est-ce que ça va, Zagan ? » demanda Foll d’une voix tremblante. Elle essayait de faire quelque chose pour améliorer la situation, mais elle ne pouvait pas très bien bouger son corps et était seulement capable de se tortiller.

« Calme-toi. Calme-toi. Tu n’es pas encore habituée à cette sensation. Si tu paniques, il sera de plus en plus difficile de bouger, » dit Gremory en expliquant à Foll comment contrôler son nouveau corps. Après avoir remis de l’ordre dans sa respiration, elle avait travaillé pour libérer Zagan des mâchoires de la mort. Cependant, quand elle l’avait fait, le visage de Gremory s’était raidi, complètement en état de choc.

« Qu’est-ce que c’est que ce bordel !? Zagan… Attendez, êtes-vous au moins Zagan ? » demanda Gremory.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? » demanda Zagan en penchant la tête sur le côté. Et en disant cela, il remarqua que sa voix était étrange. C’était généralement beaucoup plus grave que ça, alors le changement l’avait surpris.

Et honnêtement, ce n’était pas seulement sa voix. Ses vêtements s’étaient relâchés et lui semblaient sur le point de tombée. La raison pour laquelle il n’avait pas pu attraper Foll, c’est qu’il avait fini par marcher sur l’ourlet de sa robe.

Complètement confus, Zagan baissa les yeux vers ses mains… pour s’apercevoir que ses mains rustres étaient maintenant petites et grassouillettes.

Hé, qu’est-ce qui se passe ici… ? Zagan toucha timidement son propre visage. C’était tout élastique, et cela ne ressemblait pas du tout à son propre visage. Et pour empirer les choses, Foll et Gremory semblaient complètement abasourdies, comme si elles n’étaient même pas sûres de parler à Zagan, et cela l’avait vraiment blessé.

Cependant, ce qui piquait le plus, c’était que Zagan, qui se vantait d’être un sorcier aux capacités physiques surhumaines, était incapable d’attraper une jeune fille en pleine adolescence. Il pouvait facilement soulever Foll quand elle avait pris sa forme de dragon, alors comment était-ce possible ?

Regardant autour de lui, exaspéré, Zagan aperçut une cruche d’eau dans le coin du laboratoire.

Qu’est-ce qui s’est passé ici… ? Et, alors qu’il regardait dans la cruche pour tenter d’obtenir des réponses, toute la couleur de son visage avait disparu.

Malheureusement pour lui, le reflet dans l’eau montrait un jeune enfant qui ressemblait beaucoup à Zagan.

 

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

Laisser un commentaire