Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant.
Table des matières
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 1
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 2
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 3
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 4
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 5
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 6
- Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant. – Partie 7
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Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant.
Partie 1
« Wôw ! Elle est redevenue une enfant, hein ? » déclara Barbatos en essayant de toucher les joues de la petite Néphy.
Il était encore tard la nuit. Zagan s’était immédiatement précipité dehors quand il s’était rendu compte que Néphy avait disparu, mais il l’avait trouvée de l’autre côté de la porte, apparemment rajeunie. Incertain de la façon de faire face à la situation, Zagan avait rassemblé tout le monde dans le salon. Il avait réussi à avoir Foll, Chastille, Nephteros, et Barbatos.
Gremory et Kimaris n’étaient pas là. Tous les deux étaient allés enquêter sur la maison que Néphy avait visitée. C’était parce que la sorcellerie qui manipulait l’âge était le domaine d’expertise de Gremory, et Kimaris pouvait suivre les gens par l’odeur. Ils avaient laissé la fenêtre ouverte pour qu’ils puissent faire un rapport dès qu’ils auraient trouvé quelque chose.
Zagan baissa les yeux vers ses genoux… où la petite Néphy dormait profondément. Sa tenue de femme de chambre habituelle était trop ample pour être portée, alors elle s’était changée en vêtements d’enfants qu’ils avaient trouvés dans le manoir. Il était assez vieux, mais toujours mignon, avec de la dentelle froufrou décorant le col et la jupe. Ça ressemblait plus à une tenue de soirée qu’à quoi que ce soit d’autre, mais ils ne pouvaient pas se permettre de refuser ça.
Foll caressait doucement la tête de Néphy. D’après son apparence, elle avait l’air d’avoir cinq ou six ans. Il était difficile de juger de l’âge d’un enfant, mais il était certain qu’elle avait moins de dix ans, ce qui la laissait plus jeune que Foll.
Néphy avait essayé de son mieux d’expliquer la situation, mais marcher dans le froid l’avait laissée essoufflée. Elle avait fini par s’assoupir avant qu’ils n’aient des informations pertinentes. Heureusement, elle avait laissé un indice avant…
« Cette note a été laissée dans la chambre de Néphy. “J’ai vu une lumière dans ma maison, alors je vais enquêter”, » déclara Zagan.
« Pourquoi diable est-elle partie toute seule ? Ne demande-t-elle pas toujours l’avis de Zagan avant de faire quelque chose ? » demanda Barbatos, avec une expression perplexe bien visible sur son visage. Même Barbatos, plus que tout autre, semblait comprendre assez bien Néphy.
Puis, Chastille avait pris la note de la main de Barbatos.
« Tu ne comprends vraiment pas, n’est-ce pas ? C’était son ancienne maison, un endroit plein d’horribles souvenirs. Ne comprends-tu vraiment pas le sentiment de honte et d’embarras qu’elle a dû ressentir ? » demanda Chastille en arrachant le mot des mains de Barbatos.
« Pas question que je comprenne ce genre de conneries, » répliqua Barbatos.
Chastille avait fusillé du regard Barbatos en réponse, mais cela n’avait pas eu beaucoup d’effet.
Tout est de ma faute. J’aurais dû la garder à mes côtés en tout temps…, bien sûr, Zagan savait que Néphy avait dû réfléchir avant d’agir, mais cela ne l’avait pas aidé à se sentir mieux. Il voulait saluer sa détermination, mais il aurait aimé qu’ils puissent tout simplement discuter et travailler ensemble dès le début. Alors, les choses ne se seraient pas si mal passées.
« Zagan, tu peux faire que Néphy redevienne comme avant ? » demanda Foll.
« Je vais te montrer que je le peux, » répondit immédiatement Zagan. Cependant, il n’en était pas si sûr. Et il semblait qu’il n’avait pas réussi à cacher ce malaise, alors que Barbatos plissa ses sourcils.
« Attends un peu. Si tu pouvais arranger les choses, elle serait déjà redevenue normale… Tu ne peux pas briser cette sorcellerie, n’est-ce pas ? » demanda Barbatos.
« … Ce n’est pas de la sorcellerie, » déclara Zagan.
« Tu viens de dire quoi ? » demanda Barbatos.
C’était la raison pour laquelle Zagan faisait une expression si sinistre.
« Néphy n’a pas été transformée en enfant par la sorcellerie. C’est du mysticisme, ou si ce n’est pas cela, quelque chose d’encore plus ancien, comme un dragon ou la malédiction d’un dieu, » déclara Zagan.
En d’autres termes, c’était quelque chose que même le Tueur de Sorciers Zagan ne pouvait pas surmonter.
« Ce n’est pas une malédiction de dragon. C’est autre chose. Peut-être quelque chose d’encore plus puissant…, » affirma Foll en posant sa main sur le front d’une Néphy endormie. Elle était peut-être jeune, mais Foll était encore un dragon, donc elle avait probablement raison.
« … Je pense que c’est du Mysticisme, » déclara Nephteros.
« En es-tu certaine ? » demanda Zagan.
« Je ne peux pas le dire avec certitude, mais c’est assez similaire… C’est quand même étrange. Les seuls hauts elfes vivants dans le monde, sans parler de ce village, sont Néphélia et moi, » déclara Nephteros.
« Penses-tu que tu peux le casser ? » demanda Zagan.
« Ce serait très difficile. Maître Bifrons ne m’a jamais rien appris de tel. Tu peux peut-être lui demander de l’aide, mais…, » Nephteros était plutôt vague, mais son expression disait qu’elle pensait qu’il valait mieux ne pas consulter Bifrons.
Ça me convient très bien. Je ne veux pas vraiment finir endetté envers ce type…, même s’il était allé auprès de Bifrons, il n’y avait pas de confiance en cet Archidémon louche. Bifrons enlèverait probablement Néphy sous prétexte de l’examiner.
« Cela prendra un certain temps, mais je vais essayer d’y jeter un coup d’œil… Je déteste dire ça, mais cette vielle… Gremory est probablement votre meilleure chance, » proclama Nephteros en reconnaissant à contrecœur la femme qui l’avait harcelée plus tôt.
Il était certainement vrai que Gremory pouvait changer son âge à l’aide de la sorcellerie, ce qui faisait d’elle leur atout le plus précieux dans cette affaire. La réponse de Nephteros avait été judicieuse, ce qui avait surpris Zagan et l’avait fait tourner un regard chaleureux vers elle.
« Hm ? Qu’est-ce que tu veux ? » demanda Nephteros.
« Mmm… Je ne m’attendais pas à ce que tu veuilles vraiment aider Néphy, » déclara Zagan.
« Ne te méprends pas ! J’ai une dette envers toi, alors c’est ma façon de te rembourser ! En plus, je ne peux pas vraiment partir après t’avoir mis de mauvaise humeur plus tôt, non ? » déclara Nephteros, alors que ses oreilles devenaient rouge vif pendant qu’elle continuait à bouger.
« Franchement, t’es une fille plutôt problématique…, » marmonna Barbatos d’un ton exaspéré.
« … Qu’est-ce que tu essaies de dire ? » demanda Nephteros en le regardant fixement, mais Barbatos haussa simplement les épaules en guise de réponse.
« Je te comprends tout à fait ! » déclara Chastille en serrant l’épaule de Nephteros d’un regard ardent. Elle semblait penser qu’elle avait trouvé une âme sœur.
« Que je trouve cet homme irritant et que j’ai envie de le tuer ? » demanda Nephteros
« Ça aussi, mais je parle du fait que tu es une personne vraiment gentille au fond de ton cœur ! » déclara Chastille.
« Qu… Qu-Qu-Qu-Quoi !? » Les oreilles de Nephteros étaient teintes en rouge vif quand elles commençaient à battre des bras. Il semblait qu’elle était complètement désorientée, puisqu’elle n’était même pas capable de répliquer froidement comme elle le faisait d’habitude.
« Oh, franchement, pourquoi me détestes-tu autant ? Je t’ai sauvé la peau une tonne de fois, rappelle-toi… ? » Barbatos marmonnait quelque chose, apparemment déprimé, mais cela n’avait pas vraiment d’importance.
Je vois. Si Nephteros fait un petit faux pas, elle finit comme Chastille, hein ? Bien sûr, elle ne s’effondrait pas comme un pleurnichard, mais la façon dont elle avait l’air quand Gremory jouait avec elle rappelait à Zagan le visage en larmes de Chastille.
La personne en question semblait gênée de ce fait, puisqu’elle s’était contractée avec un visage pâle, puis elle avait secoué la tête.
« Je n’aime pas être malmenée comme toi ! » déclara Nephteros.
« … N’est-ce pas un peu grossier ? » Chastille avait l’air déprimée. Il semblait qu’être rejeté par une camarade potentielle était beaucoup trop dur à supporter pour elle.
À ce moment précis, Gremory et Kimaris reviennent de chez Néphy.
« Nous sommes de retour, mon Archidémon, » dit Gremory.
« … Comment était-ce ? » demanda Zagan. Malheureusement, tous les deux secouèrent la tête.
« Il y a des traces de quelque chose qui a été utilisé, mais le lanceur de sorts est parti depuis longtemps, » déclara Gremory.
« Leur odeur a aussi disparu, donc je n’ai pas pu le suivre. Je suis désolé, » déclara Kimaris.
Ils faisaient face à un adversaire qui pouvait transformer Néphy en enfant avant même qu’elle ne s’en rende compte, donc il n’était pas surpris qu’ils aient couvert toutes leurs traces.
« Bon travail. Il y a quelque chose que j’aimerais que vous m’aidiez à commencer demain, alors reposez-vous un peu, » déclara Zagan en remerciant les deux individus alors qu’il poussait un soupir.
« Hm…, » Gremory hocha la tête alors qu’elle ajusta la faux sur son épaule, mais il était clair pour Zagan que quelque chose clochait.
« Quelque chose te tracasse, Gremory ? » demanda Zagan.
« … Seulement un peu. C’est juste que les traces de pouvoir que j’ai vues me semblaient terriblement familières, » déclara Gremory.
« Vraiment ? » demanda Zagan.
« C’est juste une intuition. Je ne connais pas vraiment sa vraie nature, mais…, » Gremory s’était arrêtée avant de secouer la tête et de dire : « Eh bien, je vous rappellerai tout de suite si je me souviens de quelque chose. Ne vous faites pas trop d’illusions. »
« Non, je compte sur vous, » déclara Zagan, affirmant sa conviction. Même s’ils étaient incapables de briser la malédiction elle-même, la sorcellerie de Gremory avait le potentiel d’aider à guérir Néphy.
Gremory et Kimaris furent surpris par la réponse de Zagan, alors ils le regardèrent avec émerveillement pendant un moment avant de répondre.
« Keeheeheehee, vous êtes une sacrée pipelette, n’est-ce pas ? Si mon Archidémon compte sur moi, je ne peux pas me permettre de faire des concessions, » déclara Gremory.
« Je ferai aussi tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider, » proclama Kimaris.
« Vous comptez sur eux… ? » Nephteros les regarda tous les deux attentivement en disant ça. Sa voix était presque envieuse. Et honnêtement, Zagan pouvait comprendre ce sentiment. Après tout, il n’avait appris que récemment la joie de compter sur les autres et qu’eux puissent compter sur lui en retour. Heureusement, cette leçon lui avait aussi fait comprendre qu’il devait montrer sa sincérité aux autres, et c’est pourquoi Zagan répéta les mêmes paroles à Nephteros.
« Je compte aussi sur toi, Nephteros. Tu es la seule d’entre nous qui s’y connaisse en Mysticisme, » déclara Zagan.
« … J’ai déjà accepté de coopérer, n’est-ce pas ? » Nephteros détourna le visage en disant cela, mais Zagan pouvait dire que ses oreilles tremblaient de joie.
Je ne sais pas qui est assez stupide pour s’en prendre Néphy, mais je ne manquerai pas de le leur faire regretter.
En général, la colère était un facteur de motivation principal, et Zagan était positivement bouillonnant. Il avait du mal à contenir la rage ardente qui coulait dans ses veines, et il attendait avec impatience l’occasion de la diriger directement sur la source de toutes ses frustrations.
Cependant, malheureusement pour Zagan, les choses ne s’étaient pas du tout déroulées selon son plan.
***
Partie 2
« Maiztre Zagan ! Qu’est-ce que c’est ? » demanda Néphy en déterrant une grenouille qui hibernait dans la forêt.
« Cette créature… est connue sous le nom de grenouille. C’est comestible, donc on peut au moins l’utiliser comme ration d’urgence, » répondit Zagan.
« Je ne pourrais jamais ! » s’écria Néphy.
« Seulement si tu meurs de faim. On dirait qu’elle hiberne encore. Alors remets-la où tu l’as trouvée pour l’instant, » déclara Zagan.
« Hiberne… ? » demanda Néphy.
« Ce genre de créature ne peut pas accumuler beaucoup de nourriture en hiver, ce qui l’oblige à dormir pendant la majeure partie de l’hiver, » déclara Zagan.
« Maiztre Zagan est incroyable ! Vous savez tout, n’est-ce pas !? » s’écria Néphy.
« … Pas vraiment, » déclara Zagan.
Le lendemain matin, l’esprit de Néphy avait régressé pour correspondre à son apparence. Au matin, elle avait complètement oublié ce qui s’était passé la nuit précédente. Cela dit, ce n’était pas comme si elle avait oublié Zagan et les autres. En fait, elle était très attachée à eux.
« Néphy, allons l’enterrer, » déclara Foll, juste à côté de Néphy.
« Oui, Grande Soeur ! » Néphy répondit en titubant derrière Foll. Il semble que le changement de Néphy les ait rapprochées. Foll avait aussi l’air d’aimer qu’on l’appelle Grande Sœur, et elle continuait à mener Néphy par la main partout.
Zagan lisait un livre à l’ombre d’un arbre tout en veillant sur eux deux. Contrairement à la gravité de la situation, la scène qui se déroulait devant lui ressemble à un pique-nique familial.
Pour l’instant, c’est une bonne chose que Néphy ne soit pas si déprimée que ça…, heureusement, elle n’avait pas oublié Zagan et les autres, ou peut-être que ce n’était pas vrai.
Zagan avait jeté un coup d’œil derrière lui. Maintenant qu’il faisait jour, les autres avaient commencé à enquêter sur le village. Aucun d’eux ne savait exactement ce qui était arrivé au corps de Néphy, alors Zagan et Foll avaient fini par rester à ses côtés.
Barbatos, qui avait des ombres profondes sous les yeux et dont la parole et la conduite étaient irréparables. Gremory, qui avait repris la forme d’une vieille femme et était beaucoup trop indigne de confiance. Kimaris, qui avait le visage d’un lion qui pouvait tuer une bête d’un seul regard. Nephteros, qui lors de leur première rencontre, n’avait jamais fait que froisser les autres. Et Zagan, qui, inutile de dire, n’avait pas du tout un visage qui attirait les enfants. Au mieux, la seule personne en qui un enfant pouvait avoir confiance lors d’une première rencontre était la pleurnicheuse, Chastille. Aucun enfant ne survivrait dans un environnement aussi hostile.
Zagan regarda comment allaient ses compagnons. Peut-être l’ayant remarqué, Chastille s’approcha de lui avec une expression d’ennui présente sur son visage.
« Comment ça se passe ici, Zagan ? » demanda Chastille.
« Foll s’en sort très bien avec Néphy. Malheureusement, je n’ai rien trouvé de particulièrement utile, » répondit Zagan.
Bien sûr, ce n’était pas comme si Zagan faisait du baby-sitting. À côté de lui, il y avait une pile de documents qu’il avait trouvés dans le manoir. C’étaient les journaux des anciens du village qui s’étendaient sur plusieurs générations.
« Tu sais lire l’écriture elfique ? » Chastille marmonnait d’admiration.
« Le Célestian est une autre histoire, mais oui, je peux comprendre leur langue commune dans une certaine mesure, » répondit Zagan. Puis, il avait posé une question à Chastille : « Est-ce que tout va bien de ton côté ? »
« Désolé, mais ma connaissance des elfes et de la sorcellerie n’est comparable à aucune d’entre vous. Je serai probablement plus utile comme garde du corps de Néphy…, » Chastille répondit d’une manière digne qui lui donna l’air tout à fait faussé avec son caractère habituel de pleurnicheuse. Et après cela, elle déplaça son regard vers le bas et dit : « Penses-tu qu’il y ait des indices dans ces journaux elfes ? »
« Eh bien, en ce moment, je cherche les dossiers de ceux qui ont quitté le village ou des descriptions d’hérétiques qui ont idolâtré la sorcellerie. Ils ne peuvent pas être si communs dans un village elfique. Et puisqu’ils ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour venir nous chercher ici, il est naturel de croire qu’ils ont un lien avec cet endroit, » déclara Zagan.
D’après ce que Nephteros et Gremory avaient dit, le coupable était certainement un elfe.
« Je comprends tout ça, mais en quoi le fait d’en trouver une description nous aiderait-il ? » demanda Chastille, avec une expression confuse sur son visage.
« La plupart des elfes ne peuvent pas survivre dans le monde. S’ils quittaient le village, ils devraient créer une sorte de barrière avec la sorcellerie. Et dans ce cas, je peux suivre la sorcellerie tant que je découvre ce que c’est, » expliqua Zagan.
Les elfes étaient pourchassés par les gens ordinaires et les sorciers. La mise aux enchères de Néphy en était un exemple. La seule façon pour eux de se protéger était de maîtriser la sorcellerie et d’utiliser leurs énormes quantités de mana. Et s’ils utilisaient la sorcellerie, Archidémon Zagan serait certainement capable de les coincer.
En d’autres termes, les documents qu’il lisait étaient ses meilleures pistes. Cependant…
« Pourquoi fais-tu cette tête ? » demanda Chastille.
« Hmm…, » Zagan poussa un gémissement perplexe en feuilletant les pages de l’un des livres.
« Aucune d’entre elles ne mentionne le moindrement Néphy, » répondit Zagan.
« Ne s’agit-il pas seulement de journaux d’avant la naissance de Néphy ? » demanda Chastille en le regardant avec émerveillement.
« Ils ne le sont pas. Les journaux se terminent par une description de la façon dont les humains ont envahi leur territoire. Je suppose qu’ils l’ont griffonnée juste avant que le village ne soit détruit. Et je sais pertinemment que Néphy était là quand c’est arrivé, » répondit Zagan.
« J’ai entendu dire qu’on appelait Néphy une enfant maudite ici, non ? Alors, n’est-il pas sûr de conclure qu’on l’ignorait ? » murmura Chastille, profondément enfoncée dans ses pensées.
« Si j’avais été à leur place, j’aurais surveillé une gamine aussi dangereuse. Le fait qu’ils ne l’aient pas fait montre clairement qu’ils comprenaient le pouvoir de Néphy. Je veux dire, ils l’ont même suppliée de les aider à la fin, n’est-ce pas ? » déclara Zagan.
« Tu as raison… S’ils l’avaient vraiment trouvée dangereuse, ils auraient porté plus d’attention à elle…, » murmura Chastille en rassemblant ses pensées. Puis, un regard de compréhension avait été visible d’un coup sur son visage, et elle avait dit. « Attends, n’y aurait-il pas un journal entièrement consacré à la surveillance de Néphy ? Je suis sûre que les elfes la détestaient, mais se comporter en public était probablement mal vu, non ? N’est-il pas possible qu’ils aient caché des informations sur elle aux autres villageois ? »
La bouche de Zagan s’était ouverte en raison de la surprise. Il ne s’attendait pas à entendre des paroles aussi sages de sa part.
« Hein ? Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Chastille.
« Non, c’est juste que… Je suis surpris que tu aies eu une si bonne idée, » déclara Zagan.
« Pour qui me prends-tu ? » s’exclama Chastille alors que son visage était en état de choc et empli de colère.
« Essaie de dire ça après avoir cessé d’être un pleurnichard, » déclara Zagan.
« J’essaie juste de garder mes visages public et privé séparés, c’est tout. Et j’ai jugé que la situation actuelle faisait partie de mon devoir public, » déclara Chastille.
En d’autres termes, bien qu’étant un Chevalier Angélique assez capable, cette fille est une épave complète dans sa vie privée ?
Zagan avait été laissé au bord du gouffre par sa réponse. En y repensant, elle semblait en fait très digne et prudente quand ils s’étaient battus pour la première fois. À cette époque, elle avait défié Zagan en raison de sa mission en tant que Chevalier Angélique. Et puis, quand Néphy l’avait retrouvée en ville, c’était une vraie pleurnicheuse. C’est à ce moment-là qu’elle avait été relevée de ses fonctions de Chevalier Angélique, ce qui avait du sens grâce à toutes les nouvelles informations qu’elle venait de fournir. Par la suite, elle n’avait rencontré Zagan que lorsqu’elle n’était pas en service, ce qui lui avait valu le statut de pleurnicheuse.
La capacité de Chastille à séparer si clairement les deux parties d’elle était digne d’éloges, mais on se demandait pourquoi elle ne pouvait pas au moins garder un peu de son calme en privé. Mais ça n’avait pas eu d’importance en fin de compte. En fait, sa double personnalité s’était avérée très utile dans ce cas.
« J’ai une requête. Apporte-moi tous les livres elfes que tu peux trouver dans le manoir de l’aîné. Cherche tout ce qui est écrit en elfique et apporte-le ! » Zagan leva les yeux de son livre en lui demandant cette faveur.
« Donc tu dis qu’il pourrait être caché à la vue de tous, hein ? » demanda Chastille.
« Exactement. Comme c’est malin, Chastille, » déclara Zagan.
« E-Euh, merci… Hehehehe…, » le visage de Chastille se détendit un instant, mais elle reprit immédiatement son calme et courut au manoir de l’aîné.
Je n’arrive pas à croire qu’elle se comporte comme ça et qu’elle m’aide beaucoup… Quelque chose ne va pas dans ce village.
Des phénomènes complètement inconnus et anormaux se produisaient à gauche et à droite. Cependant, si Chastille se débarrassait volontiers de son caractère de pleurnichard et prenait cela au sérieux, il n’y avait aucun moyen pour Zagan de s’amuser de ça. Et ainsi, il continua à parcourir la pile de journaux à ses côtés.
Malheureusement, il n’avait trouvé le nom de Néphy nulle part, même après avoir parcouru cinquante ans de journaux intimes. Et tandis qu’il s’asseyait là, perplexe devant cette tournure des événements, il sentit quelque chose peser sur sa tête.
« Hehehehe… »
Zagan leva les yeux et aperçut une petite Néphy avec un énorme sourire sur son visage.
Pourquoi es-tu si mignonne !? Le sourire de Néphy illuminait son cœur jadis sombre. Zagan pouvait à peine se contenir. L’envie de la protéger débordait à l’intérieur de lui. Et à cause de cela, son corps avait ignoré son esprit et il avait fini par l’emmener sur ses épaules.
« Wooow, c’est vraiment trop haut ! » s’écria Néphy.
« Zagan, moi aussi ! » s’exclama Foll
« Gaaah, bien bien ! » déclara Zagan en déplaçant Néphy sur son épaule gauche afin de faire de la place à sa droite pour Foll. Et puis, il avait fait un tour sur lui-même avec les deux enfants là-haut.
Kimaris, qui investiguait sur les autres maisons du village, semblait vouloir les rejoindre, mais il avait fini par se contrôler.
« C’était amusant, » déclara Foll.
« Ça l’était ! Grande Sœur ! » répliqua Néphy.
Foll poussa un soupir de satisfaction, et Néphy rebondit à côté d’elle. Après un moment de silence, Néphy avait commencé à parler avec un sourire plâtré sur son visage.
« Maître Zagan, j’ai fait une couronne de fleurs avec Grande Sœur Foll ! C’est pour vous ! » déclara Néphy.
« Ouais, merci…, » répondit Zagan d’un ton déconcerté. C’était le premier cadeau qu’il recevait de Néphy, ce qui signifiait qu’il devait le protéger. Et ainsi, Zagan avait utilisé la sorcellerie pour empêcher les fleurs de se faner. Cependant, pendant qu’il faisait cela, la petite Néphy leva les yeux vers lui avec un regard inquiet sur son visage.
« Vous sentez-vous mieux maintenant, Maître Zagan ? » demanda Néphy.
« Ai-je… l’air mal en point ? » demanda Zagan.
« Ouais. D’habitude, vous avez l’air de vous amuser, mais vous aviez l’air très triste tout à l’heure, Maître Zagan, » déclara Néphy.
C’était évidemment parce qu’il était difficile de rester heureux quand la fille qu’il aimait souffrait d’une sorte de malédiction.
« Alors, voici un porte-bonheur pour vous remonter le moral, » déclara Néphy en s’allongeant avec ses petits bras pour attraper les joues de Zagan. Après s’être fermement agrippée à lui, elle se frotta le front contre le sien. La sensation n’était que trop familière. Ou bien, bien sûr, puisqu’il avait fait quelque chose de semblable dans le passé lorsqu’il essayait d’aider Néphy.
Cette fille est vraiment la même au fond, hein ? Même après avoir rétréci, perdu ses souvenirs les plus récents et vu sa personnalité réduite à celle d’une enfant innocente, Néphy était toujours Néphy. Et cela rendait Zagan extrêmement heureux.
« Quel charme utile ! Je vois. Je me sens vraiment mieux maintenant, » déclara Zagan.
« Vraiment ? Hehehehe…, » déclara Néphy en souriant.
Cette Néphy sourit vraiment beaucoup, n’est-ce pas ?
C’était comme si elle ne savait rien du rejet ou de la perte qu’elle avait vécus. Elle était la définition même d’une petite fille pure. C’était peut-être sa vraie nature depuis le début, et elle s’était rétractée à cause des années d’abus qu’elle avait subies dans le village. Il était heureux qu’elle ait retrouvé son sourire, mais le fait qu’il ne soit revenu que parce qu’elle était devenue une enfant avait laissé Zagan plutôt amer.
Pour tenter de bannir de telles pensées, Zagan essaya de toucher la couronne de fleurs que Néphy avait faite pour lui. Quand il l’avait fait, il avait remarqué qu’il était fait de belles fleurs violettes.
« Je suis surpris que des fleurs aussi délicates fleurissent par ce temps, » déclara Zagan.
La saison commençait à s’approcher de l’hiver, et cela même à Kianoides, ce qui signifiait que Norden, un pays typiquement froid, était déjà en plein hiver. C’est pourquoi Zagan était si surpris que des fleurs soient en fleurs.
« Ce sont des violettes. Elles ne sont pas en saison en ce moment, » dit Foll en penchant la tête sur le côté dans la confusion.
« … Qu’est-ce que tu veux dire ? » demanda Zagan d’un ton qui indiquait clairement qu’il était aussi perplexe que Foll. En réponse, Foll avait dû montrer du doigt le ciel. Et quand il leva les yeux, il vit… un essaim de papillons qui voltigeaient.
« … Hein ? » Zagan s’était levé quand une expression choquée était apparue sur son visage, puis avait dit, « Des papillons… dans ce temps froid ? »
Les papillons étaient une race étroitement liée aux fées, ce qui faisait de leurs ailes des catalyseurs idéaux pour la sorcellerie. C’est pour ça que Zagan les connaissait. Contrairement à la plupart des créatures, elles ne pouvaient pas survivre à un hiver rigoureux. S’il ne s’agissait que d’un seul, il était possible qu’il se soit réveillé par erreur, mais un essaim entier était une tout autre histoire. Après tout, les papillons étaient tellement sensibles au froid qu’ils ne pouvaient même pas éclore s’ils n’étaient pas dans un climat chaud.
Foll regarda autour d’elle, clairement confuse. Et comme Zagan suivait son regard, il remarqua quelque chose d’assez étrange. La veille au soir, les maisons n’avaient tout simplement pas d’habitants à l’intérieur et ne montraient aucun signe de dépérissement. Cependant, ils étaient maintenant envahis par le lierre et la mousse. De plus, des fleurs de toutes les couleurs fleurissaient sur le sol, des papillons voltigeaient à la recherche de nectar, et un vent printanier chaud balayait ses joues. Il n’y avait aucune chance pour que ça ait un sens. Un tel changement n’aurait pas pu se produire dans le temps qu’il lui avait fallu pour lire tous ces documents.
« Le temps ici est devenu fou… Non, l’écoulement du temps lui-même est bizarre. Nous devrions rapidement partir…, » Foll l’en avait informé d’une voix lugubre.
***
Partie 3
Après avoir remarqué l’irrégularité, Zagan avait convoqué tout le monde. Nephteros, Barbatos, Kimaris et Gremory étaient réunis. Chercher pendant qu’elle était sous la forme d’une vieille femme semblait insupportable pour son dos, alors elle était actuellement dans une forme plus jeune et plus belle.
Chastille, qui était chargée de fouiller le manoir, n’était pas revenue. Elle venait juste de commencer à chercher, ce qui excusait largement son absence, mais Barbatos avait dit qu’elle avait trouvé quelque chose d’intéressant. Pour l’instant, son ombre était liée à elle, donc c’était bien même s’ils ne l’avaient pas rappelée de force.
Le sang de haute elfe de Néphy aurait dû la protéger contre la sorcellerie, mais elle a quand même été transformée en enfant. J’aurais dû réaliser que quelque chose de plus fort était en jeu…, Zagan s’était reproché d’avoir raté l’évidence. D’une certaine façon, il n’avait même pas réalisé que quelque chose n’allait pas jusqu’à ce que Foll le lui montre.
Zagan avait essayé de toucher le sol. Même maintenant, ce qui était sur terre avait repoussée alors que de nouvelles pousses surgissaient, ici et là. Le soir, la zone où ils se trouvaient serait sans doute complètement couverte de mauvaises herbes. Il pouvait sentir le flux de mana, et cela lui disait que ce phénomène n’était pas « créé » comme lorsqu’une personne faisait usage de la sorcellerie. C’était clairement contre nature, mais c’était aussi naturel de la même façon que la terre s’était transformée au cours des mois et des années. C’était comme regarder pousser une mer d’arbres à un rythme accéléré.
« C’est donc ça aussi le mysticisme ? Comme c’est gênant. Pour l’instant, devrions-nous sortir d’ici ? » déclara Zagan. Il s’était spécialisé dans la rupture de la sorcellerie, ce qui signifiait qu’il était totalement hors de son élément. De plus, si la barrière autour de cette terre était responsable de la transformation de Néphy en enfant, il y avait une chance qu’en s’en éloignant, elle redeviendrait normale. Et honnêtement, même si cela n’avait pas fonctionné, il aurait peut-être été préférable que ses subordonnés cherchent refuge ailleurs.
« Non, c’est probablement inutile. On dirait que la barrière couvre déjà tout le village. Cependant, quelqu’un comme le Purgatoire peut se faufiler…, » Gremory corrigea la position de la grande faux sur son épaule et secoua la tête en refusant la suggestion de Zagan.
« Vraiment ? » demanda Zagan.
« Peut-être que si c’est juste moi. Cependant, transporter un groupe de personnes à travers tout ça serait assez difficile…, » répondit Barbatos, haussant les épaules tout le temps. La façon dont il avait dit ça donnait l’impression qu’il avait déjà essayé et échoué.
Pas de chance, hein ?
« Mon odorat a été limité. Il est probable que nous finirons par être ramenés ici même si nous essayons de nous enfuir. Celui qui fait ça a le contrôle total…, » Kimaris se tenait le visage tendu alors qu’il transmettait ses pensées.
« Même mon Œil maléfique de Balor est scellé. C’est probablement la même chose pour le souffle de Valefor…, » Gremory possédait un mauvais œil qui pouvait transformer en cendres tout ce qu’elle regardait. C’était une capacité que certains fomoriens possédaient et qui était différente de la sorcellerie par sa nature, et à certains égards, elle était encore plus puissante que le mysticisme.
« Je vois. On a été emprisonnés dans ce village, hein ? » déclara Zagan.
Tout le monde s’était tu alors qu’il exprimait ses réflexions collectives sur la question. Néphy était la seule qui ne comprenait pas vraiment, et elle avait incliné la tête sur le côté avec curiosité.
« … Qu’est-ce qu’on va faire, Zagan ? » demanda Barbatos. Cependant, au lieu de répondre à sa question, Zagan avait simplement posé sa main sur le sol et avait examiné le flux de mana une fois de plus.
C’est assez complexe, mais ce n’est pas comme si je ne pouvais pas non plus le lire…, d’après ses constatations, il y avait probablement un « écart » quelque part. Et le fait que Barbatos ait pu s’échapper avait corroboré sa théorie.
« Au fait, Barbatos, tu te souviens de ce qu’on a mangé au petit-déjeuner ? » Zagan avait interrogé Barbatos pour obtenir des détails.
« Hein ? Qu’est-ce que tu fous… ? » Barbatos fit entendre une voix de colère, mais se tut quand il vit l’expression sérieuse sur le visage de Zagan. Puis, il avait réfléchi et avait dit. « Des restes de soupe et de pain d’hier, et de la salade de plantes sauvages, n’est-ce pas ? Qu’est-ce qu’il y a ? »
« Hm… Alors Kimaris, peux-tu parler de ce qui s’est passé depuis que Néphy a fini comme ça ? » demanda Zagan.
« Sire Zagan, vous nous avez dit, à moi et à Mademoiselle Gremory, d’enquêter sur l’ancienne maison de Lady Néphy parce que mon nez est utile pour traquer les créatures. Et Mademoiselle Gremory est bien versée en sorcellerie qui manipule l’âge. Et dès que nous avons trouvé quelque chose d’étrange, nous devions rentrer sans nous engager dans des hostilités…, » répondit Kimaris avec une expression perplexe.
« Foll. Avant de venir ici, tu as travaillé sur un parterre de fleurs avec Kimaris, non ? Qu’est-ce que tu as déterré à l’époque ? » Zagan avait fini les choses en interrogeant Foll.
« Euh… ? Une mandragore. C’est savoureux comme collation, et ça renforce aussi le mana, alors je les faisais pousser avec Kimry, » répondit Foll.
« C’est vrai. La prochaine fois, essayons d’en faire pousser de jolies fleurs avec un meilleur sol, » déclara Kimaris.
« Hmm…, » Foll ronronna et hocha joyeusement la tête de Kimaris tandis que Zagan brossait doucement la tête de sa fille bien-aimée.
« Quel est l’intérêt de toutes ces questions ? » demanda Barbatos d’un ton agité.
« Voyons voir. Pour l’instant, je peux dire que tous nos souvenirs sont intacts. Seule Néphy est une exception…, » les souvenirs récents de Néphy étaient tous vagues. S’il y avait eu une sorte d’influence malveillante, cela aurait probablement aussi modifié leurs souvenirs des derniers jours. Zagan avait vérifié chacun d’entre eux juste pour s’en assurer, mais il semblait qu’il n’y avait rien d’inhabituel dans leurs souvenirs. Peut-être était-ce dû à leur race, car chacun dans son groupe était différent ?
Peu importe la raison, ils semblaient bien mentalement. En plus, il ne pouvait pas dire si leurs corps tenaient le coup. Cependant, les sorciers avaient naturellement résisté aux effets de la vieillesse, donc ce n’était pas vraiment un problème.
Après avoir confirmé tous ces faits, Zagan avait expliqué sa conclusion comme si ce n’était pas grave.
« Eh bien, nous avons les moyens de le percer par la force. Pour l’instant, poursuivons notre enquête, » déclara Zagan.
Une distorsion temporelle était certainement une chose à surveiller avec prudence, mais il n’y avait aucune trace d’une autre menace. Dans ce cas, faire des histoires ne servirait à rien. C’est la réponse à laquelle Zagan était arrivé.
« La force pure ? Ce n’est pas une barrière faite par sorcellerie, n’est-ce pas ? Vous pouvez faire quelque chose ? » demanda Gremory.
« Qui s’en soucie si ce n’est pas de la sorcellerie ? On peut encore percer avec la sorcellerie, non ? » demanda Zagan.
Bien sûr, Zagan ne pouvait pas le dévorer, mais ce n’était pas son seul talent. Il n’avait pas seulement perdu ses journées dans son château après avoir appris le mysticisme céleste. En fait, il avait mis au point au moins un moyen de faire face à des situations aussi délicates.
Cet endroit finira probablement en terre brûlée où même pas un seul brin d’herbe ne poussera, mais ce n’est pas comme si une personne vivait encore ici…, le seul doute dans son esprit était de savoir si c’était vraiment bien de brûler la ville natale de Néphy. C’est pourquoi il voulait essayer de rassembler quelques indices supplémentaires. Et aussi, Zagan était venu ici pour enquêter sur le lien entre le mysticisme céleste et les Épées Sacrées, donc regarder autour de lui ne pourrait pas faire de mal.
« Vous savez, mettre ça ainsi, cela fait vraiment mal. Vous faites comme si ce n’était pas si grave que ça, » dit Gremory, l’air visiblement déprimé.
« C’est ainsi, c’est tout. Quitter cet endroit n’est pas si difficile. En plus, même si c’était le cas, tu m’aiderais, donc je n’étais en aucun cas inquiet, » déclara Zagan.
En vérité, il s’agissait d’une barrière extrêmement puissante qui avait peut-être même transformé Néphy en enfant, ce qui signifiait qu’il y avait une chance que la même chose arrive un jour à Zagan et les autres. Cependant, ce pouvoir avait simplement piqué le sens de la curiosité de Zagan. Il souhaitait prendre son temps et étudier sa structure.
Mais je suppose que je vais devoir mettre fin aux choses plus tôt s’ils commencent à devenir nerveux…, quoi qu’il en soit, cette situation n’était pas quelque chose dont ils avaient beaucoup de s’inquiéter. Et, alors que les subordonnés de Zagan se détendaient en raison de son manque de tension, Nephteros avait pris la parole pour contester sa détermination.
« Arrêtez-vous là. Je sais ce que vous pensez, mais je ne peux rien faire contre cet obstacle. Le mysticisme céleste n’est pas tout-puissant, donc si vous avez l’intention de dépendre de moi ici…, » déclara Nephteros.
« Je te l’ai déjà dit, tu te souviens ? Tu es une invitée. Une invitée n’a pas besoin d’être troublée pour des choses aussi insignifiantes ! » Zagan avait tapoté Nephteros sur la tête à plusieurs reprises en disant ça.
« Hein… ? Quoi ? » Nephteros avait fait une sorte de visage compliqué, mais elle n’avait pas repoussé la main de Zagan.
« Grande Soeur Nephterosh est comme moi…, » déclara Néphy en tirant sur l’ourlet de la jupe de Nephteros.
« Quoi ? Comment ? Comment ? » demanda Nephteros.
« Tu es contente que Maître Zagan te caresse la tête ! » déclara Néphy.
« Non, ce n’est pas vrai ! » proclama Nephteros en serrant la main de Néphy.
« D-D-Désolée… Je pensais… que tu serais heureuse…, » sanglota Néphy, apparemment choquée par les actions de Nephteros.
« Attends, ce n’est pas une raison pour pleurer ! Je ne suis pas fâchée ou quoi que ce soit du genre, je le jure ! Écoute, tu peux demander à Zagan de te caresser la tête pour que tu te sentes mieux, non ? » Nephteros devint pâle et paniquée quand des larmes apparurent sur le visage de Néphy. Puis, elle avait levé Néphy dans ses bras et avait tendu ses mains vers Zagan dans un appel à l’aide.
« Écoute-moi, Néphy. Nephteros ne te déteste pas. Même quand elle est heureuse, elle a tendance à se sentir gênée si les autres le lui signalent. Tu ferais bien de sympathiser avec son état, » déclara Zagan.
« Vraiment ? » demanda Néphy.
« Oui, il a raison…, » Nephteros répondit d’un signe de tête réticent quand Néphy dirigea ses yeux innocents vers elle.
« J’aime vraiment, vraiment, vraiment beaucoup Grande Soeur Nephterosh ! » s’exclama Néphy, avec un sourire éclatant et énergique sur son visage.
« Argh… Ce… euh… Euh… Bon sang…, » Nephteros poussa un soupir exaspéré après un moment de tergiversation. La vision d’elle qui était incapable de résister à la Petite Néphy était mignonne. Surtout si l’on considère l’indifférence avec laquelle elle la traitait normalement.
« On dirait que tu ne peux pas t’occuper des petits enfants, hein ? » Zagan l’avait taquinée à cause de cette faiblesse. En réponse, elle lâcha simplement un grognement avec un « Hmph », et abaissa Néphy au sol avant de prendre la parole.
« … Ce n’est pas vrai. Je me sens mal pour eux. Les enfants naissent libres de tout péché, n’est-ce pas ? Même toi, tu as fait semblant de laisser tomber une pomme pour aider un enfant sur le bord de la route, n’est-ce pas ? » répliqua Nephteros.
« … Attends un peu. Comment sais-tu ça ? » Le visage de Zagan s’était raidi en entendant son marmonnement si nonchalamment.
L’autre jour, lorsque Zagan s’était rendu à Kianoides avec Néphy, il avait vu un enfant sans abri assis au coin d’une rue. Et en voyant cette figure se chevaucher à celle de son passé, il donna une pomme à l’enfant. Néphy l’avait remarqué, puisqu’elle était juste à côté de lui, mais elle aurait dû être le seul témoin.
Nephteros s’était soudain couvert la bouche comme si c’était un lapsus, mais il était déjà trop tard. Forcée d’avouer ses méfaits, elle répondit à sa question sur un ton timide.
« Maître Bifrons a préparé une boule de cristal pour vous surveiller tous, et c’est ce que j’ai vu quand j’ai jeté un coup d’œil…, » déclara Nephteros.
« Ce type est toujours un voyeur ? » demanda Zagan.
« C’est… C’est vrai ! Je l’ai repéré par hasard en regardant Maître Bifrons ! » déclara Nephteros.
Ne me dis pas que Nephteros regardait parce qu’elle voulait s’entendre avec Néphy ? Zagan lui avait jeté un regard plein de suspicion quand il avait entendu son ton agité.
Peu importe la façon dont il le regardait, Zagan pensait que cette affaire ne concernait pas Bifrons. Si Bifrons était impliqué, ils ne seraient pas restés spectateurs tout le temps. Mais il se demandait pourquoi Nephteros ne s’entendait pas avec Néphy alors qu’elle était si inquiète pour elle.
En bien, je ferais mieux d’arrêter maintenant. J’ai l’impression que cette fille sera plus têtue si je continue à la taquiner…, c’était peut-être la principale différence entre elle et Chastille, qui pouvait supporter d’être taquinée pendant des siècles, mais qui allait rebondir à l’improviste.
La capacité de Chastille à se remettre des insultes était autre chose. Elle avait pour elle une robustesse qui ressemblait à celle d’une mauvaise herbe. Et à cause de cela, les gens qui la taquinent oubliaient souvent comment se retenir et s’amusaient à ses dépens.
D’un autre côté, Nephteros ne donnait pas l’impression d’être une cible aussi facile. Mais ça rendait les taquineries plus amusantes. Pourtant, Zagan était celui qui l’avait étiquetée comme son invitée, alors il savait qu’il devait en finir.
« Eh bien, je ne m’intéresse pas à ce que tu fais, alors dit à Bifrons de faire preuve de modération. La prochaine fois, je ne laisserai pas les choses finir si facilement…, » Zagan haussa légèrement les épaules quand il répondit.
« Je vais faire passer ce message…, » Nephteros hocha la tête. Cependant, Zagan avait l’impression d’entendre son marmonnement. « Toutes mes excuses, Maître Bifrons…, » à elle-même.
« Hohoo, donner une pomme à un enfant dont tu ne connais même pas le nom. Je vois. Mon Archidémon est très généreux, n’est-ce pas ? » Gremory avait fait un sourire espiègle alors qu’elle avait fait une remarque sur leur échange.
« Je l’ai fait sur un coup de tête. Il n’y a pas assez de nourriture dans le monde pour nourrir tous les pauvres gosses que je vois, » déclara Zagan.
***
Partie 4
Il exagérait, et si quelqu’un lui demandait s’il recommencerait, sa réponse honnête serait oui. Cependant, il serait un menteur s’il disait qu’il voulait sauver tous les enfants du monde. Zagan n’était pas un saint qui se souciait de tous les innocents du monde. En fait, il n’avait aucun scrupule à frapper un enfant qui le suppliait sans vergogne de lui donner à manger tout en faisant comme s’ils méritaient sa charité.
« Mais avec le temps, ne seriez-vous pas récompensé ? » Gremory acquiesça d’un signe de tête en faisant cette affirmation.
« Ne sois pas stupide. Qu’est-ce que j’obtiendrai d’un gamin qui rampe sur le bord de la route ? » demanda Zagan.
De tels enfants n’avaient pas beaucoup d’utilité. Leur valeur principale était de servir de sacrifice, mais Zagan méprisait la sorcellerie qui était alimentée par la vie humaine. Et franchement, prendre leur vie pour une seule pomme semblait injuste.
Gremory éclata de rire en entendant la réponse de Zagan. Et puis, elle avait ouvert son manteau et s’était retournée sur place. Quand elle s’était finalement arrêtée, elle avait à peu près la même taille que Foll. Cela avait fait croire à Zagan qu’elle était revenue à sa forme de vieille femme, mais…
« Keeheeheehee, c’est la récompense dont je parlais…, » Gremory avait pris la forme d’une fillette de dix ans. Elle avait des cornes de chèvre tordues, mais ses mains avaient l’air toutes molles, et ses traits du visage étaient très attendrissants. De plus, la façon dont elle clignait des yeux étincelants était la définition même de l’innocence pure. Il était difficile de croire que la vieille femme rebelle était autrefois si charmante.
Néphy et Foll applaudirent à la vue.
« Mish Gremory, c’est incroyable ! » s’exclama Néphy.
« C’est trop cool, Gremory. Apprends-moi à faire ça ! » demanda Foll.
« Fufu. C’est vrai, c’est vrai. Félicitez-moi encore plus ! Je suis reconnue comme un génie, même parmi les fomoriens, alors vous avez de la chance d’assister à une démonstration de mon talent ! » Gremory gonfla sa poitrine d’orgueil alors qu’elle était couverte d’éloges par les deux filles.
Comment quelqu’un d’aussi mignon est-il devenu cette vieille chauve-souris ? Gremory avait totalement déconcerté Zagan et il commença peu à peu à douter que cette jeune fille et cette vieille dame soient une seule et même personne. Mettant de côté le visage sinistre de Zagan, Gremory avait fait signe à Néphy et Foll de la rejoindre.
« Vous deux, tendez-moi l’oreille. Vous m’écoutez ? Mrmrmrmrmrmrmr…, » déclara Gremory.
« Oui ! Compris ! » déclara Néphy.
« Quel est l’intérêt de faire ça ? » demanda Foll.
Malgré les protestations de Foll, les trois fillettes s’étaient alignées, avec Néphy en leur centre, et s’étaient alignés devant Zagan. Et puis, les trois jeunes filles avaient parlé à l’unisson.
« Je t’aime tellement, papa ! »
« H-Hnnngh… ! »
Si mignonne ! Je veux juste les serrer dans mes bras ! Zagan était tombé à genoux. C’était quelque chose qui ne s’était jamais produit, quelles que soient les épreuves auxquelles il avait dû faire face. Zagan avait tenu bon lorsqu’il avait combattu un Archange de front, lorsqu’il s’était retrouvé face aux douze Archidémons, lorsqu’il avait combattu la chimère démoniaque, et même lorsqu’il avait sous les yeux le Seigneur Démon de la Boue. Mais le voici, réduit à un tel état en raison d’une seule phrase.
Maintenant que j’y pense, on ne m’a jamais appelé « papa », hein ? C’était logique, puisque la seule fille de Zagan était Foll, et qu’elle ne l’appelait que par son nom. Malheureusement, à cause de cela, il n’avait jamais connu le pouvoir destructeur de ce mot.
L’une d’entre elles était Gremory, mais il avait toujours le désir de les élever tous les trois avec amour. Après tout, s’il faisait assez d’efforts, ne serait-il pas possible d’élever Gremory comme une fille tranquille ? Il était allé si loin qu’il hébergeait même de telles illusions irréalistes.
Néanmoins, Zagan était un Archidémon. Alors même que son corps tremblait, il se leva.
« Hé, qu’est-ce que tu prépares... Gremory ? » demanda Zagan.
« Keeheeheehee, vous ne vous souvenez pas de ce que j’ai dit ? C’est une récompense que vous pouvez recevoir des enfants. Les paroles de gratitude honnêtes sont très satisfaisantes, n’est-ce pas ? » déclara Gremory en s’accrochant à sa jambe. Puis, elle avait ri et lui avait souri.
S’il n’y avait eu que Gremory, alors il l’aurait repoussée pour agir comme une idiote, mais la présence de Néphy et Foll lui avait donné envie de les enlacer toutes. C’était absolument impossible de les chasser.
« Zagan, tu veux que je t’appelle “papa” ? » Foll pencha la tête sur le côté quand elle lui posa cette question.
« Argh… Je ne peux pas dire que je déteste l’idée…, » Zagan avait lâché une réponse docile.
« Compris. Je vais m’entraîner…, » Foll hocha la tête comme si elle délibérait de la question en lui répondant.
Foll était la seule vraie enfant parmi les trois filles, ce qui avait dû la rendre assez confuse sur toute la situation… Mais ça ne voulait pas dire qu’elle trouvait ça moins embarrassant. Zagan pouvait voir que ses joues devenaient rouges.
« Hehehehe, donc Maître Zagan est mon père, non ? Je pensais que je n’en avais pas…, » Néphy frotta innocemment son visage contre la jambe de Zagan en disant ça. Et en entendant ces paroles, Zagan fut complètement déconcerté.
« Comment ça, Néphy ? Tu ne connais pas tes parents ? » demanda Zagan.
« Euh, je ne sais pas vraiment… C’est juste que Maître Zagan a été la première personne à me tenir la main et à me traiter comme un parent…, » déclara Néphy.
Néphy n’avait-elle actuellement que des souvenirs de ses cinq ans ? Cela s’additionnerait, puisqu’elle était persécutée à l’époque, mais elle ne savait même pas que ses parents se sentaient mal à l’aise vis-à-vis d’elle. Elle comprenait bien le concept des relations parentales et des familles, de sorte qu’elle ne devait pas savoir qu’elle ne les avait jamais rencontrées. Et tandis que Zagan ruminait sur ce fait, Néphy le regarda avec anxiété.
« Ai-je… encore dit quelque chose de mal ? » demanda Néphy.
« Non, pas du tout. Est-ce que je t’ai déjà grondé avant ? » Zagan aligna sa vue avec celle de Néphy en s’agenouillant sur un genou, puis parla comme s’il la réprimandait. Et, tandis que le bout des oreilles de Néphy tremblait joyeusement, elle lui enroula les bras autour du cou et le serra dans ses bras pour l’embrasser.
« Maître Zagan, je t’aime tellement ! » déclara Néphy.
Zagan lui caressa les cheveux en réfléchissant à ce qu’elle avait dit il y a quelques instants.
« Ai-je… encore dit quelque chose de mal ? » Selon lui, ce n’était pas une déclaration qu’un jeune enfant devrait répéter si souvent.
C’est probablement quelque chose qu’elle s’est habituée à dire parce qu’elle se reprochait pour la façon dont les autres elfes la traitaient…, en d’autres termes, Néphy était revenue à ses manières par défaut de l’époque. La raison pour laquelle elle pouvait sourire constamment était parce que c’était avant qu’elle ne ferme son cœur pour de bon.
Pourquoi suis-je détesté ? Que dois-je faire pour que tout le monde m’aime ? À l’époque, elle avait sûrement de telles pensées. Et si elle avait grandi sous la garde de Zagan à partir de ce jour-là, Néphy aurait pu vivre sans le fardeau de ses souvenirs plus douloureux. Après tout, même les souvenirs d’enfance de Zagan étaient devenus flous à l’adolescence.
« Petite Néphy, les enfants ne font rien de mal. Ils font simplement les mauvaises choses quand on ne leur enseigne pas correctement. C’est pourquoi vous n’avez rien à craindre d’ici…, » Kimaris s’était accroupi devant Néphy et lui sourit en disant cela. Peut-être en était-il arrivé à la même conclusion que Zagan.
« … Vraiment ? » demanda Néphy.
« Bien sûr que oui, » répondit Kimaris.
« Alors, est-ce que je peux demander quelque chose d’égoïste ? » Néphy le supplia en jouant avec ses doigts, et Kimaris lui sourit en réponse.
« Je vous en prie, demandez tout ce que vous voulez, » déclara Kimaris.
Le visage de Néphy s’était éclairci grâce à sa réponse. Et puis, elle lui avait parlé avec un grand sourire sur son visage. « Je peux… caresser ta crinière, Shire Kimry ? »
« Caresser… ? » Kimaris la regarda avec émerveillement. Jamais dans ses rêves les plus fous il ne s’était attendu à une telle demande.
« Je suppose… que je ne peux pas ? » demanda Néphy.
« Non, ça ne me dérange pas. Allez-y, » déclara Kimaris.
« Superrrr, merci ! J’aime aussi Shire Kimry ! » déclara Néphy quand elle commença à caresser sa crinière. Puis, elle l’avait touché jusqu’au menton, ce qui avait fait que Kimaris avait laissé échapper une voix qui était un mélange de bonheur et d’embarras.
« Je vais… devoir rester sous cette forme pendant un moment, hein ? » demanda Kimaris.
« Désolé, Kimaris…, » Zagan y repensa, et il réalisa rapidement que Kimaris passait beaucoup de temps dans le château sous sa forme de lion. Il avait toujours supposé que c’était parce que Foll l’aimait ainsi, mais peut-être que Kimaris aimait simplement passer du temps avec les enfants.
« Qu’est-ce que vous foutez, anciens candidats Archidémon ? Ce n’est pas le moment de faire l’imbécile avec les gosses ! Ne vous souvenez-vous pas de la situation dans laquelle nous sommes ? » Barbatos les avait réprimandés avec un grognement.
« Shire Boboto, tu es en colère ? » Néphy avait fait une tête étonnée en entendant ses plaintes.
« C’est Barbatos, » répliqua Barbatos.
« Oui, Shire Boboto, » déclara Néphy.
« Argh… Peu importe, c’est très bien, » déclara Barbatos, renonçant à la corriger. Il semblait que son nom était difficile à prononcer.
Ne t’es-tu pas aussi adouci ? Peut-être qu’il se sentait seul parce que personne ne faisait attention à lui. La réaction de Barbatos avait été si décevante que ses véritables sentiments avaient été mis en doute. Et alors même qu’il faisait la grimace, il s’était accroupi devant Néphy.
« Tu m’entends, petite morveuse ? On dirait que Zagan ne peut pas jouer les durs devant toi. C’est le moment d’être égoïste et de lui causer toutes sortes d’ennuis, tu m’entends ? » déclara Barbatos.
« Tu ne peux pas embêter Maître Zagan ! » déclara Néphy.
« Oh, franchement, ce lion ne t’a pas dit de demander ce que tu voulais ? Les gosses comme toi existent pour déranger les adultes. Et je parie que ce type sera plus heureux si tu le fais. N’est-ce pas ? Ne veux-tu pas aussi rendre Zagan heureux, argh ? » Zagan avait impitoyablement enfoncé son poing dans la tête du méchant qui tentait de corrompre une fille si pure.
« Écoute-moi, Néphy. Ne suis pas les paroles d’adultes suspects, d’accord ? » déclara Zagan.
« Oui, Maître Zagan ! Mais Shire Boboto n’est-il pas aussi une bonne personne ? » demanda Néphy.
« Je n’en suis pas si sûr…, » Zagan regarda Barbatos d’un air noir, qui avait fini avec un grognement inconfortable. Et pendant que tout cela se passait, Nephteros s’était finalement remise de ses troubles, et elle avait poussé un soupir.
« Êtes-vous tous… vraiment en train de vous calmer, hein ? » Nephteros se parlait probablement à elle-même, mais en entendant cela, Gremory avait eu un large sourire.
« Hé, Grande Sœur, joue avec moi ! » déclara Gremory.
« Joue ! » Foll se leva et l’enlaça, suivant l’exemple de Gremory.
« Ah, h-hey, qu’est-ce que tu fais ? Arrêtez ! Arrêtez ça ! » Nephteros protesta.
« Grande Soeur, joue avec moi ! » Néphy s’était fait entendre quand elle avait rejoint les deux autres filles.
« Argh, petite…, » Nephteros voulait protester à nouveau, mais elle se souvenait qu’être froide avec Néphy l’avait réduite aux larmes il y a quelques instants. Et bien qu’elle avait eu l’air extrêmement en conflit à ce sujet, elle avait fini par affaisser ses épaules pour signifier sa démission.
« … Qu’est-ce que vous voulez faire ? » demanda Nephteros.
« Jouons au loup ! » déclara Gremory.
« Allons chanter ! » déclara Foll.
« Allons cueillir des fleurs ! » déclara Néphy.
« Réduisez un peu la liste ! » Nephteros se moqua d’elles avec colère, ce qui fit rire les trois petites filles, bien qu’elle ne soit pas si fâchée que ça. Bien sûr, il y avait une expression amère sur son visage, mais elle voulait vraiment passer du temps avec elles.
« Qu’est-ce qui se passe ici ? » Chastille remarqua ça en sortant du manoir de l’aînée.
Gremory s’était transformée en petite fille, Kimaris servait de chaise à trois petites filles, Barbatos s’était effondré et Nephteros jouait avec elles.
Vu le point de vue de Chastille, c’était vraiment une situation foireuse. Cependant, Zagan secoua simplement la tête comme si ce n’était pas grave.
« Tout le monde a besoin d’un peu de repos de temps en temps, » déclara Zagan.
« Un temps d’arrêt, tu dis ? Ne sommes-nous pas en danger en ce moment ? » demanda Chastille.
« Oh, non, non. Ne t’inquiète pas. Nous sommes en parfaite sécurité. Je ferai exploser ce village en morceaux quand on voudra sortir de cette barrière, » annonça Zagan de façon décontractée.
« Tu vas le faire sauter… ? N’est-ce pas la ville natale de Néphy ? » demanda Chastille.
« Et… ? Eh bien, penses-y comme notre dernier recours. Plus important encore, as-tu trouvé quelque chose ? » Zagan l’avait appelée plus tôt, mais Chastille avait continué son enquête sur le manoir au lieu de répondre à son appel. Ça devait vouloir dire quelque chose.
« Oui, » Chastille avait fait un signe de tête. Puis, poursuit-elle, « j’ai trouvé un compartiment caché dans la chambre de l’aîné du village. Et voici ce que j’ai trouvé stocké à l’intérieur…, » Chastille avait sorti un seul livre de son dos. C’était écrit à la main, tout comme les journaux du village, mais en voyant le titre, Zagan avait plissé les yeux.
« Comprends-tu le sens des mots sur la couverture ? » demanda Zagan.
« Non, je ne peux pas lire la langue elfique… Est-ce quelque chose d’important ? » demanda Chastille.
« Eh bien, oui…, » Zagan était excité par la vue. Et bien sûr, il l’était, puisque c’était exactement ce qu’il cherchait. Néanmoins, il se demandait s’il était vraiment d’accord pour qu’il regarde le contenu. Il avait souffert face à cette décision, mais il avait finalement décidé qu’il ne pouvait pas laisser passer l’indice que Chastille avait trouvé. Ce n’était pas le moment d’hésiter. Et ainsi, Zagan avait accepté le journal.
« Ce livre était-il la seule chose que tu as trouvée ? » demanda Zagan.
« Non, c’était caché à côté…, » Chastille tenait un pendentif en disant ça. Bien que, peut-être que « pendentif » n’était pas un mot approprié. Il ressemblait plus à une pointe de flèche qui avait été suspendue. Il n’était pas si grand, mais il avait dix joyaux sertis à sa surface et un symbole comme celui d’un arbre sculpté en son centre.
« Ce n’est pas un symbole utilisé pour la sorcellerie, mais j’ai déjà vu ça avant. Si je me souviens bien, c’est l’arbre de vie, et c’est un symbole qui représente le Célestian… As-tu trouvé ça à côté de ce journal ? » Zagan hocha la tête quand il interrogea Chastille.
« Oui, on dirait une antiquité, mais je ne sais pas ce que ça vaut, » répondit Chastille en acquiesçant de la tête à Zagan.
« Pourquoi ne me le donnes-tu pas… ? » demanda Zagan.
« Oh, OK…, » déclara Chastille.
Cela avait l’air d’être en argent, mais ce n’était pas le cas. La chose était dotée d’un mana terriblement puissant, et le taper avec son ongle suffisait à convaincre Zagan qu’il était beaucoup plus robuste qu’une épée normale. C’était si fort qu’on avait presque l’impression qu’il était fait en pétrissant ensemble le mana lui-même…
« Est-ce du mithril ? » se demanda Zagan à voix haute.
« Du mithril, tu dis ? Tu veux dire la substance que l’on dit être au même niveau que le métal des dieux utilisé dans les légendes, l’orichalque ? » demanda Chastille.
« Ouais. C’est la première fois que je vois la vraie chose. J’aurais dû savoir qu’un village elfique caché en avait dans le coin, » déclara Zagan.
« Hé, attends, c’est vraiment du mithril !? » Barbatos s’était levé dès qu’il les avait entendus parler de cette substance rare.
« Ferme-la. Ceci appartient probablement à Néphy, » déclara Zagan. Mais il devait faire attention, car quelqu’un aurait pu le piéger.
Je suppose que je trouverai si c’est dangereux avant de le remettre à Néphy.
« Oh, bon, laisse-moi au moins jeter un coup d’œil ! En fait, où diable as-tu trouvé ce truc ? » demanda Barbatos.
« Je l’ai trouvé. Interroge au moins la bonne personne ! » déclara Chastille avec une expression exaspérée bien visible sur son visage.
« H-Hey, Zagan ? C’est… elle qui l’a trouvé, c’est ça ? Cette pleurnicharde, je veux dire…, » Barbatos avait l’air complètement décontenancé par les mots de Chastille.
« Oui, c’est elle, d’accord, » déclara Zagan.
« Cette barrière doit réécrire les lois de l’univers ! C’est la seule façon d’expliquer qu’elle est vraiment utile pour changer, » répliqua Barbatos.
« Comment oses-tu… ne crois-tu pas que tu vas trop loin ? » demanda Chastille.
« Et elle ne pleure pas, même si je l’ai insultée !? » Barbatos tomba à genoux, agissant comme si quelque chose qui dépassait son entendement s’était produit.
« Je suis en plein milieu de mes devoirs professionnels en ce moment. Ne crois-tu pas qu’il est temps que tu deviennes sérieux ? Je ne déteste pas qu’on me taquine, mais il y a un temps et un lieu pour tout, » affirma Chastille.
Aime-t-elle vraiment qu’on la taquine ? Zagan n’en croyait pas ses oreilles, mais ses paroles semblaient choquer encore plus Barbatos.
« Je n’y crois pas ! Qu’est-ce que c’est que ce sentiment ? Est-ce que… je tremble ? » Barbatos grognait et marmonnait à plusieurs reprises de manière conflictuelle. Il semblait troublé par sa nouvelle connaissance des sentiments de Chastille.
« Je vais me pencher là-dessus. Je te laisse Néphy et les autres, » déclara Zagan en se levant et en regardant Chastille.
« Ça me va, mais dis-moi une chose avant de partir. Sais-tu lire la langue des elfes, non ? » demanda Chastille.
« Ouais. Et ? » demanda Zagan.
« Quel est le titre de ce livre ? » répliqua Chastille d’un ton digne.
Zagan fut surpris par sa question, mais il reprit rapidement son sang-froid et décida qu’elle méritait une explication après s’être donné la peine de la trouver.
« Nephilim. Ça veut dire celui qui est tombé du ciel. Je pense… que c’est la racine du nom de Néphy, » déclara Zagan.
Autrement dit, Chastille avait trouvé un journal sur Néphy.
***
Partie 5
Le journal avait commencé par la préface suivante.
Aujourd’hui, il n’y a que moi qui le sache, mais il y avait autrefois un diable dans ce village. Le diable a quitté le village il y a longtemps, mais juste une fois, il est revenu pour une seule journée. Et quand c’est arrivé, le diable a laissé un bébé. Cette enfant est peut-être le signe avant-coureur d’une calamité, c’est pourquoi je documente toutes ces informations. Si le diable revient vraiment un jour, je prie pour que cela vous aide à le vaincre.
— Mois du Dragon, Jour de l’Eau.
Il s’est passé quelque chose de terrifiant. Ce diable est revenu au village.
C’est la faute de cette maudite et répugnante enfant maudite. Quel genre d’ennuis va-t-il arriver à ce village ?
Quand j’étais enfant, ce diable était déjà une calamité qui rongeait ce village comme un parasite. Beaucoup de mes frères ont perdu la vie quand ils ont été utilisés comme sacrifices ou sujets d’essai.
J’ai l’impression de les entendre encore quand je ferme les yeux. Il n’y a pas eu un seul jour où leurs cris ont cessé. Ils me traversent l’esprit, me hantent sans cesse.
Comment ce diable ose-t-il amener un bébé dans ce village ! Bien sûr, il m’a dit que je pouvais faire bouillir ou brûler ce bébé comme bon me semble avant de partir, mais c’est beaucoup trop suspect.
Le bébé portait un pendentif en mithril inspiré de l’Arbre de vie. Il semblait être une œuvre d’art, mais je ne connais pas sa véritable nature, alors je l’ai confisquée.
Je sais que le bébé ne porte pas de péché, mais il est aussi clair pour moi que l’enfant peut devenir un autre démon. J’ai hésité en réfléchissant à ce que je devais faire, mais j’ai finalement décidé de tuer le bébé.
C’est pour le bien de tous. Même si je déteste ça, je dois agir dans le meilleur intérêt de notre village.
Cependant, je n’ai pas pu le tuer. Cette chose était déjà un diable. Les arbres de la forêt se sont précipités vers moi comme s’ils possédaient leur propre volonté, arrachant mon bras qui tenait la lame.
Quel enfant terrifiant ! J’ai pensé à essayer de l’affamer, mais la forêt l’a quand même maintenu en vie.
Je me suis rendu compte que nous n’avions aucun moyen de tuer cette chose, alors j’ai confié le bébé aux archers les plus compétents du village, les Neruels. J’ai pitié d’eux, mais dans le pire des cas, ils sont les seuls à avoir assez de pouvoir pour se protéger.
— omis —
***
— Mois du Lion, Jour du Feu.
Cinq ans se sont écoulés depuis l’arrivée de l’enfant maudite.
La chose grandit assez vite. Les Neruels l’ont confiné à la cave, mais quand elle émerge de temps en temps, il y a toujours un sourire étrange présent sur son visage. C’est répugnant.
Les habitants du village se sont demandé s’il fallait l’enchaîner, mais je sais qu’il est inutile de l’attacher.
Je les ai rejetés à l’époque en disant qu’il serait injuste de faire une telle chose, mais il est clair comme de l’eau de roche que ma décision suscite l’insatisfaction.
La seule chance est peut-être le fait que la forêt est silencieuse depuis que j’ai perdu mon bras. Grâce à cela, le voile de la peur sur le village est mince.
C’est certainement l’avantage de donner l’ordre strict qu’il ne faut pas lui faire de mal. Tout le monde est heureux parce qu’ils pensent qu’elle n’a aucun pouvoir.
Oui, je n’ai même pas dit aux Neruels comment j’ai perdu mon bras. Personne d’autre n’a besoin de connaître ce cauchemar.
Même si les gens du village la détestent, ils n’ont pas l’air d’en avoir peur. C’est bien pour eux de ne pas savoir que c’est un diable avec assez de pouvoir pour anéantir notre village en un seul souffle. Ils seront plus heureux comme ça. Mon seul souci qui me reste est de savoir combien de temps cette chose restera docile…
— omis —
***
— Mois de la Sylphe, Jour de la Terre.
Dix ans se sont écoulés depuis l’arrivée de l’enfant maudite.
Elle ne sort plus, et ce sourire étrange a disparu. Les habitants du village ont cessé de se soucier de son existence, et le fardeau des Neruels semble s’être considérablement allégé.
C’est bien que cela soit paisible, mais je ne peux pas me détendre. J’ai récemment trouvé le cadavre d’un oiseau étrange près du village.
C’est probablement un familier de sorcier. Et c’est la troisième fois que j’en vois une dans le mois de la Sylphe..
Quelque chose de l’extérieur essaie peut-être d’envahir notre village. Et quand j’y pense, le diable me vient à l’esprit.
Peut-être que maintenant que l’enfant maudite a grandi, il vient la récupérer ? Je peux spéculer autant que je le veux, mais je n’ai aucun moyen de savoir quelles sont ses véritables intentions.
Est-ce le résultat que le diable désirait ? Où n’est-il pas allé comme il l’a voulu ? Je ne sais pas, je ne sais pas. Cependant, je sais qu’une terrible calamité nous attend dans un avenir proche.
Je ne peux pas permettre que cela se produise. Mais, je crois aussi… qu’il y a l’option d’avoir l’enfant maudite en conflit avec le diable…
***
Partie 6
« … Je ne peux même pas supporter de regarder ça…, » Zagan avait fermé le livre, ce qui lui avait même donné la nausée, après l’avoir terminé. Il était actuellement dans la chambre de l’aîné du village. Le journal n’était pas si long que ça, et il avait fini de le lire en une minute.
L’auteur était clairement l’aînée, et elle expliquait comment Néphy était devenue la fille déprimée qu’il avait rencontrée pour la première fois. Tout cela parce que personne n’avait réalisé que la petite fille montrait un sourire pur dans l’espoir de s’entendre avec les autres.
Il semble que ce joli sourire leur paraissait étrange à cause de leur paranoïa.
Eh bien, c’était peut-être raisonnable, étant donné que leur première rencontre s’était terminée par la perte d’un bras, mais l’aîné recevait tout simplement ce qu’il méritait pour avoir en premier lieu essayé de tuer Néphy.
Tandis que Zagan poussait un seul soupir, il lança le journal en l’air. Et sans bruit, il s’était transformé en cendre et s’était dissipé avant de toucher le sol. Il avait de la peine pour Chastille, qui avait fait tout son possible pour la retrouver, mais Zagan ne voulait pas que Néphy le voie un jour. De plus, il pouvait mémoriser le contenu d’un livre en ne le lisant qu’une seule fois, de sorte qu’il n’était pas nécessaire de laisser traîner une chose aussi désagréable.
Dois-je réduire ce village en cendres après notre enquête ? Au début, Zagan pensait attendre que Néphy parvienne à comprendre ses sentiments, mais il ne pensait plus que c’était une bonne idée. Mais il n’avait pas l’intention de dire que c’était pour le bien de Néphy. S’il utilisait une telle excuse, il ne serait pas différent de celui qui avait écrit ce journal. Les sorciers comme lui détestaient les gens qui prétendaient agir pour le bien commun.
Zagan n’aimait pas ça du tout, et il ne pouvait pas leur pardonner, donc la seule option qui restait était de les effacer de la surface de ce monde. Même s’ils étaient déjà morts, il éliminerait toutes les traces.
Zagan avait trouvé Chastille et Barbatos qui l’attendaient alors qu’il sortait du manoir de l’aîné. Il semblerait qu’ils étaient curieux de connaître le contenu du journal. Et, en regardant le visage de Zagan, ils avaient reculé d’un cran.
« H-Hey… Tu as déjà fini de lire ? Alors, c’était quoi ce livre ? » demanda Barbatos.
« C’est des cendres maintenant, » répondit Zagan.
« Hein ? » Barbatos était à court de mots et Chastille affichait une expression inquiète.
« C’est probablement mieux… de ne pas demander ce qui était écrit dedans, hein ? » demanda Chastille.
« Eh bien, j’ai réussi au moins à y trouver plusieurs indices, » répondit Zagan en haussant les épaules comme si ce n’était pas grand-chose.
« Des indices ? » Chastille inclina la tête sur le côté, ce qui provoqua un signe de tête de la part de Zagan.
« On dirait que Néphy n’est pas née dans ce village. Une enfant abandonnée… Non, ce n’est pas tout à fait exact, mais il semble qu’elle ait été amenée dans ce village quand elle était bébé. Et en plus, celui qui l’a déposée était considéré comme un diable par ce village, c’est pourquoi ils l’ont tous maltraitée. »
Bizarrement, Chastille avait souri de soulagement en entendant ces mots. « Je vois. Alors c’est une bonne nouvelle. »
« … Comment ça ? » Zagan répondit involontairement d’un ton critique, ce qui fit acquiescer Chastille.
« Ça veut dire que la vraie famille de Néphy ne faisait pas partie de ce village, non ? Je ne sais pas si elle se sentira mieux, mais le fait que sa famille soit encore en vie est une bonne nouvelle, n’est-ce pas ? » demanda Chastille.
« Je suis surpris que tu puisses voir les choses de cette façon. Je veux dire, même s’ils sont vivants, ça veut juste dire qu’ils l’ont abandonnée, non ? » Zagan la fixa d’un air émerveillé en lui répondant.
En réponse, Chastille avait cligné des yeux, comme si elle disait : « Est-ce à toi de parler ? »
« Même toi, tu as essayé de garder Néphy à distance une fois, n’est-ce pas ? Pourquoi n’était-ce pas le cas ici ? » Chastille avait répondu d’une manière concrète.
Zagan avait une fois blessé Néphy et l’avait tenue à distance. C’était parce qu’il avait peur en rencontrant les douze Archidémons. À l’époque, il savait qu’il deviendrait un jour un allié de ces monstres. Cependant, il souhaitait épargner à Néphy un tel sort. Zagan voulait que Néphy vive sous la lumière du jour. C’était une pensée stupide provoquée par sa propre faiblesse. Après tout, un vrai homme protégerait absolument tout ce qui lui est cher, y compris Néphy elle-même.
En d’autres termes, elle essaie de dire que les parents de Néphy ont peut-être aussi fait la même erreur… ? Zagan avait involontairement formé un sourire amer.
« C’est un point de vue assez optimiste, » déclara Zagan.
« En te voyant tous comme tu es, je veux croire que c’est le cas…, » l’opinion de Chastille était tout à fait inhabituelle. C’était comme de placer tout le monde dans le même panier.
« Hein ? Ne vas-tu pas les traquer et te venger ? » demanda Barbatos en plissant ses sourcils.
« … Pourquoi n’as-tu jamais eu que des idées aussi dégoûtantes ? » demanda Chastille.
« Selon toi, les sorciers, c’est quoi ? » demanda Barbatos.
Zagan se sentit étrangement soulagé en les voyant se chamailler.
Ces deux-là se complètent, n’est-ce pas ? Honnêtement, il avait l’impression qu’ils tenaient habilement un numéro d’équilibriste. Et en même temps, Zagan s’était rendu compte que la colère qu’il nourrissait depuis qu’il avait lu le journal s’amenuisait.
« Eh bien, je suppose que je vais me limiter à faire sauter le manoir de l’aîné, » déclara Zagan.
« Pourquoi s’embêter ? » s’enquit Barbatos.
« Je suppose que c’est pour me distraire, non ? » répondit Zagan avec résolution. Barbatos était resté abasourdi. Et Chastille s’était mise à rire à côté de lui.
« Déjà des blagues, hein ? Ça doit vouloir dire que tu es revenu à la normale maintenant, » déclara Chastille.
« Hein… ? Mais je ne faisais pas de blague, » déclara Zagan.
« Quoi ? Ce n’était pas une blague ? » Chastille avait été choquée pour une raison inconnue, mais Zagan avait l’impression qu’il comprenait ce qu’elle voulait dire.
L’ai-je fait s’inquiéter quand à mon état d’esprit ? Eh bien, Zagan était conscient qu’il devait sembler sur les nerfs, alors peut-être que le désir de Chastille de le réconforter avait du sens.
Même si c’est une pleurnicheuse inutile, elle sait quand il faut être sérieuse. Au moins, elle avait combattu Zagan une fois pour des motifs égaux.
« Il y avait un autre indice dans le journal. Il est probable que le “diable” ou quoi que ce soit du journal est celui qui a attaqué Néphy, » déclara Zagan.
« Hein… ? Attends un peu. Si c’est vrai, alors ce “diable” ou quoi que ce soit d’autre ne serait-il pas un parent de Néphy ? » demanda Chastille.
« La possibilité existe, mais je n’ai aucune preuve. Pour ce qu’on en sait, elle a été enlevée quand elle était bébé, non ? » demanda Zagan.
« C’est… C’est… vrai…, » Chastille acquiesça sans réfuter sa déclaration.
« Mais alors, pourquoi ce type est-il le coupable ? » Barbatos pencha la tête sur le côté quand il interrogea Zagan.
« Un processus d’élimination. Il n’y a presque pas d’autres suspects quand il s’agit d’individus qui peuvent aller et venir d’un village caché dont même les Archidémons ignoraient l’existence. En plus, ils doivent aussi être des elfes. Le “diable” dont parlait le journal était certainement un autochtone, » expliqua Zagan.
« Hm… Le seul sorcier elfes célèbre qui me vienne à l’esprit est la “Reine des fées” Titania, » déclara Barbatos en se caressant le menton, plongé au fond de sa pensée. Zagan avait déjà entendu ce nom auparavant.
« Veux-tu parler de l’elfe qui a défié l’Archidémon Orias et a perdu ? » demanda Zagan.
L’Archidémon Orias était toujours en vie. En fait, cet Archidémon aurait dû être présent au rassemblement où Zagan avait rejoint leurs rangs.
« Ouais. Titania était déterminée à créer un pays elfes, alors elle a dirigé une armée d’acolyte utilisant la sorcellerie elfes et s’est battue contre Orias. C’est toujours considéré comme la plus grande bataille contre les Archidémons de l’histoire, » déclara Barbatos.
Il n’aurait certainement pas été difficile pour une elfe aussi habile de transformer Néphy en enfant ou de former la barrière qui entourait le village. Cependant, Zagan secoua la tête.
« Titania n’est-elle pas morte il y a plusieurs centaines d’années ? » demanda Zagan.
« Oui, mais je n’ai jamais entendu parler d’autres sorciers elfes. La plupart d’entre eux gardent leur identité secrète, puisqu’ils se font tuer quand on les découvre, » déclara Barbatos.
C’était la même chose que Foll cachant le fait qu’elle était un dragon. Les elfes étaient utilisés comme sacrifices et catalyseurs, et même une seule mèche de cheveux ou une seule goutte de sang présentait une valeur extraordinaire, assez de valeur pour que cela vaille la peine de regarder la mort dans les yeux pour obtenir un maigre montant. Sorcier ou non, il y avait d’innombrables personnes qui voulaient mettre la main dessus. Et à cause de cela, un sorcier elfes ne dévoilerait jamais son identité.
Je suppose que j’essaierai de contacter Orias dès qu’on sera sortis d’ici…, Zagan n’en avait pas vraiment envie, mais cet Archidémon semblait familier avec les sorciers elfes. Et s’il était peut-être impliqué dans leur situation difficile actuelle, ce serait bien de le tuer en réponse. Après tout, rien ne changeait le fait que Zagan était furieux.
« Je peux traquer le coupable quand je veux. Plus importants encore, comment vont Néphy et les autres ? » demanda Zagan alors qu’il se retirait de ses pensées meurtrières.
« Si tu cherches Néphy, elle est là-bas, » dit Chastille en montrant du doigt la place au milieu du village. Tandis qu’il regardait, Zagan aperçut trois jeunes filles appuyées contre Kimaris sous sa forme de lion.
***
Partie 7
« Hmm. Donc elle dort, » déclara Zagan.
Chastille et Barbatos retournèrent au manoir pour ramasser les objets de valeur avant que Zagan ne les réduise en pièces. Ce n’était pas comme s’il avait l’intention de le détruire tout de suite, mais il était heureux qu’ils fassent tout le nécessaire pour quand cela arrivera, alors il ne les avait pas arrêtés.
Kimaris était recroquevillé sous un grand arbre au milieu du village, et les trois petites filles à côté de lui dormaient toutes profondément. Nephteros était assise à côté d’eux, serrant ses genoux dans ses bras. Il semblait qu’elle était épuisée, car elle avait l’air épuisée.
« … Hé, c’est ta famille là-bas, non ? Pourquoi dois-je être leur baby-sitter ? » Nephteros interrogea Zagan avec un reflet de gêne sur son visage. Même si elle avait découvert qu’elle était coincée à faire du baby-sitting, elle aurait pu s’enfuir, mais elle était quand même restée.
« Eh bien, désolé pour ça. Tu as mes remerciements, » répondit Zagan, ce qui fit que Nephteros le regarda avec émerveillement.
« J’y pense depuis un bon moment, mais tu es vraiment un Archidémon atypique, hein ? » déclara Nephteros.
« Cependant, j’ai essayé d’être plus arrogant et audacieux…, » déclara Zagan.
« Une personne vraiment arrogante ne ferait pas des remerciements aux autres, » déclara Nephteros.
Zagan haussa simplement les épaules en réalisant que Nephteros avait raison. Et puis, il regarda les petites filles qui semblaient dormir confortablement.
Elles sont toutes si mignonnes quand elles dorment…, Néphy et Foll étaient déjà des anges, mais même Gremory avait l’air adorable, ce qui le surprenait. Et, tandis qu’il les regardait avec une expression charmante, Nephteros leva les yeux vers Zagan comme si elle avait quelque chose à dire.
« Quoi ? As-tu quelque chose à dire ? » demanda Zagan.
« Pas vraiment. Ce n’est pas comme si je me plaignais ou quoi que ce soit, mais…, » déclara Nephteros.
« Si tu as quelque chose en tête, essaie d’en parler. On ne sait jamais, cela pourrait s’avérer utile dans cette situation, » affirma Zagan dans une tentative d’apaiser la tension de Nephteros. Il avait l’intention de dire cela sur un ton aussi doux que possible, mais ce n’était pas comme si n’importe qui d’autre que Néphy pouvait bien lire entre les lignes, alors il devait juste espérer qu’elle y réussisse un peu.
« Mais ça n’a rien à voir avec ce village…, » Nephteros avait ouvert la bouche pour parler, apparemment toujours sur les nerfs.
« Ça ne me dérange pas. Parle, » exhortas doucement Zagan. Encouragée par ses paroles, Nephteros commença timidement à parler.
« Te souviens-tu quand tu avais à peu près le même âge que ces enfants ? » demanda Nephteros.
C’était une question complètement aléatoire, donc la tentative de Nephteros d’éviter de la poser avait du sens.
« Voyons voir. Tout ce dont je me souviens ne vaut rien, mais je me souviens d’eux, oui, » répondit Zagan, hochant la tête vers Nephteros malgré sa confusion.
« … Par exemple ? » demanda Nephteros.
« Comme quand je n’ai pas réussi à m’enfuir après avoir volé de la nourriture et que j’ai failli me faire battre à mort, ou quand j’ai passé une semaine entière sans rien manger et que j’ai réussi à trouver du pain moisit, mais cela m’a laissé errer à la frontière de la mort à cause de la maladie, ou quand j’ai été attiré par un sorcier, enlevé et presque utilisé comme un sacrifice. Ce genre de choses, en gros…, » Zagan avait essayé de parler de divers souvenirs, mais tous avaient fini par pointer du doigt la nourriture à la fin. Comme c’est embarrassant !
« Est-il normal d’avoir seulement des souvenirs d’expériences de mort imminente ? » demanda Nephteros.
« Hm… Eh bien, j’ai eu tellement d’expériences de ce genre que j’ai tout simplement dû devenir sorcier. Je suppose que ce n’est probablement pas normal du tout, hein ? » Zagan n’avait rien compris de la bonne manière à ce sujet, mais il n’y avait personne pour le signaler.
« Puis-je… parler d’un truc un peu bizarre ? » demanda Nephteros alors qu’elle continuait à serrer ses genoux.
« Vas-y, » répondit instantanément Zagan. Il pouvait dire qu’elle s’inquiétait de quelque chose. Mettant de côté la question de savoir s’il pouvait lui donner des conseils, Zagan savait qu’il pouvait au moins l’écouter. Et lorsqu’on lui avait dit d’aller de l’avant, Nephteros avait commencé à parler d’une voix effrayée.
« Je ne me souviens de rien quand j’avais leur âge, » déclara Nephteros.
« As-tu perdu la mémoire ? » demanda Zagan en plissant son front.
« … Je ne sais pas. Pour être honnête, je n’y avais jamais pensé jusqu’à maintenant, » déclara Nephteros.
Servir sous les ordres d’un Archidémon ne lui avait pas donné l’occasion de s’impliquer auprès des enfants, alors c’était peut-être tout naturel.
« Et aussi, pourquoi Néphy a-t-elle le même visage que moi… ? » demanda Nephteros.
Zagan était en fait celui qui voulait poser cette question, mais il semblait qu’elle ne connaissait pas la réponse elle-même.
« Qui suis-je… ? » demanda Nephteros d’une voix tremblante, prête à éclater en larmes à tout moment.
Demande ça à quelqu’un comme Chastille, pas à moi…, Zagan n’était même pas douée pour réconforter Néphy. Il ne savait pas quoi dire dans ces moments-là. Alors, après s’en être inquiété pendant un certain temps, il s’était contenté de renifler d’un ton ennuyeux.
« Comme c’est inutile ! » déclara Zagan.
« … » Nephteros affaissa silencieusement ses épaules tandis que Zagan continuait à parler.
« Quel genre de réponse attends-tu ? Franchement, même moi, je ne sais pas qui je suis ni où je suis né. Mais quand même, ne suis-je pas juste moi ? Je veux dire, comment une personne peut-elle être quelqu’un d’autre que ce qu’elle est en ce moment ? » demanda Zagan.
Nephteros fixa Zagan avec une expression vide. Elle était restée confuse, ne sachant pas s’il se moquait d’elle ou s’il la réprimandait, et peu de temps après, elle avait ouvert la bouche pour essayer de comprendre ce qui se passait.
« Se pourrait-il… que tu essaies de me réconforter ? » demanda Nephteros.
« Prends-le comme tu le veux, » répondit Zagan nonchalamment. Cependant, à l’instant suivant, il avait ouvert en grand les yeux, et il avait été surpris. Il fut stupéfait par la vue de la bouche de Nephteros se détachant et formant un doux sourire.
« Je vois. J’ai l’impression de comprendre enfin pourquoi Néphélia a dit que la façon dont tu t’inquiètes des choses est mignonne, » déclara Nephteros.
« … Tu crois que je ne vais pas te tuer juste parce que tu es une invitée ? » répondit Zagan d’un ton clairement agité.
« Pour l’instant, je suppose que je devrais te remercier. Je me sens… juste un peu mieux maintenant, » déclara Nephteros en se levant avec un sourire amer. Zagan avait trouvé son expression de gratitude très embarrassante, alors il n’avait fait que hausser les épaules.
« Au fait, qu’est-ce que c’est ? » Nephteros plissant ses sourcils tout en interrogeant Zagan.
« Qu’est-ce que tu veux dire… ? Oh, ça ? » s’exclama Zagan en réalisant que Nephteros montrait le pendentif en mithril. C’était celui qu’ils avaient trouvé à côté du journal sur Néphy. En un rien de temps, la chaîne était sortie de sa poche, et elle se balançait.
Maintenant que j’y pense, je n’ai pas encore examiné cette chose…, Zagan avait sorti le pendentif de sa poche quand il réalisa son erreur.
« C’était caché dans le manoir de l’aîné. Je ne l’ai pas encore examiné, mais il semble qu’il y ait un mécanisme qui y soit lié, » déclara Zagan.
« Vraiment ? Puis-je jeter un coup d’œil ? » demanda Nephteros.
« Ça ne me dérange pas, mais ne le casse pas, d’accord ? » déclara Zagan.
« Je ne le ferai pas, » répondit Nephteros d’un ton exaspéré. Puis, elle avait pris le pendentif et commença à l’examiner, et au bout d’un moment elle plissa les sourcils.
« On dirait que ça s’ouvre ici. Es-tu sûr que c’est fermé ? » demanda Nephteros.
« Quoi, vraiment ? » Zagan avait regardé de plus près le pendentif après qu’on lui ait fait remarquer ce fait. C’est à ce moment-là qu’il avait remarqué que le pendentif avait un petit trou dans celui-ci.
« Peux-tu l’ouvrir ? » demanda Zagan.
« Je vais essayer…, » déclara Nephteros en essayant de le gratter avec ses ongles plusieurs fois. Finalement, elle avait semblé trouver un fermoir et l’avait enfoncé, ce qui avait ouvert le pendentif d’un simple clic. Et à l’intérieur, il y avait un seul portrait et une courte inscription.
« Est-ce que c’est... Néphy et sa mère ? » demanda Nephteros.
Le portrait était une peinture d’un bébé aux cheveux blancs tenu dans les bras d’une jeune elfe. La femme plus âgée était probablement la mère de Néphy, car elles se ressemblaient. Elle possédait aussi des cheveux blancs et des yeux d’azur… ce qui ne pouvait que signifier qu’elle était une haute elfe.
Ce n’était pas si surprenant, mais l’inscription posait un énorme problème. Étonné par cette vue, Zagan l’avait lue à haute voix dans l’espoir d’être corrigé.
« À ma fille bien-aimée, Néphélia — Titania, » avait lu Zagan.
C’était le nom de l’elfe qui avait défié l’Archidémon Orias il y a des centaines d’années et qui en avait péri.