Chapitre 2 : Créature Née sur Terre
Partie 1
« Pourquoi êtes-vous si mécontent ? » Rushella demanda cela après avoir baissé la tête, mais Hisui ne répondit pas à cette question.
Il ne regardait que le ciel, maudissant sa propre vie ainsi que le monde se transformant pour devenir finalement une anomalie.
En cet instant, nous étions pendant la pause, sur le toit de l’école.
C’était un des symboles de la vie du lycée, avec l’odeur douce du printemps. Mais en ce moment, le visage d’Hisui était rempli de confusion.
Le cours cauchemardesque s’était enfin terminé. Hisui avait finalement pu terminer ses cours du matin.
Parce que c’était le premier jour d’école, les informations qu’ils avaient apprises étaient uniquement des éléments de base, ne nécessitant qu’une attention légère et cela avait enfin pris fin. Mais la performance arrogante de Rushella devant les personnes de l’école avait complètement dévasté le cœur d’Hisui.
Même son précieux temps de pause, dû aux interrogations incessantes de Rushella concernant la réglementation et les politiques scolaires, ne lui avait laissé ni paix ni repos.
Non seulement elle était une étudiante transférée, mais en plus elle était une telle beauté parfaite. Elle était donc devenue instantanément populaire auprès des filles comme des garçons. Sauf que vis-à-vis d’eux, Rushella avait totalement ignoré tout le monde, en parlant seulement à Hisui. Ceci avait ainsi créé une aura dangereuse chez tous les étudiants masculins.
Et enfin, la pause tant attendue arriva, mais... elle l’avait encore suivi telle une sangsue.
« Je vous demande... ne pouvez-vous pas être un peu plus miséricordieuse... à quel point votre haine est-elle profonde envers moi ? » (Hisui)
« Très profonde. J’ai bu votre sang et pourtant vous refusez de devenir mon serviteur, et vous m’avez même pulvérisé avec de l’ail. » (Rushella)
« Mais vous m’avez attaquée en première, n’est-ce pas ? Et pourquoi prétendez-vous être une étudiante ? La vie dans un lycée n’a rien à voir avec mon corps, non ? » (Hisui)
Les questions d’Hisui étaient des soupçons tout à fait raisonnables, et Rushella détourna les yeux à ces interrogations judicieuses.
« Se pourrait-il que... vous regardiez ces jeunes comme de nouvelles proies ? » Le ton d’Hisui était devenu sérieux en demandant cela.
Les adolescents étaient tous rassemblés dans un lycée, de sorte que, si l’on y réfléchit bien, ceci serait le terrain de chasse idéal pour un vampire.
Les connaissances du commun des mortelles indiquaient que les vampires aimaient le plus le sang des jeunes filles vierges ―― et il devrait y en avoir beaucoup ici.
« Faux ! Je ne suis pas le genre de vampire qui laisse une proie à moitié remplie, puis court après quelqu’un d’autre. » (Rushella)
« Pas même une goutte, complètement à sec ? Je ne vais pas me sentir heureux avec ce genre de logique venant de vous, le savez-vous ? » (Hisui)
« N’est-ce pas préférable que de vous abandonner à moitié transformée ? » (Rushella)
« Ceci, c’est seulement la logique d’un vampire. » (Hisui)
Hisui soupira, puis se pencha contre la rambarde du toit.
Après avoir été mordu par un vampire, il n’y avait généralement que deux possibilités. ―― Soit la mort soit la transformation en vampire.
La mort ou la servitude, c’était le choix de toutes les personnes mordu par un vampire. Dans certaines situations rares se déroulant au cours du processus de transformation en vampire, le maître disparaissait.
Dans une situation comme celle-ci, la victime restait ainsi bloquée dans une [transformation inachevée] pour le restant de sa vie.
En raison de la [transformation inachevée], la victime pouvait acquérir certaines caractéristiques des vampires ― elle pourrait avoir les instincts vampiriques ainsi qu’une durée de vie plus longue par rapport aux humains normaux ―― et elle porterait cette malédiction pour le reste de leur vie.
« Je choisis soigneusement le partenaire dont je bois le sang. Si je veux qu’il devienne mon serviteur, alors les critères sont encore plus rigoureux. En outre, je ne partirai pas jusqu’à ce qu’il devienne mon serviteur. Il s’agit de l’étiquette des vrais anciens depuis l’antiquité ! » (Rushella)
« Alors, pourquoi m’avez-vous sélectionné ? » (Hisui)
« ... » (Rushella)
« En vous observant, vous qui étiez si sérieuse à vouloir faire de moi votre serviteur, pourquoi la nuit dernière, m’avez-vous visé ? » (Hisui)
Hisui était encore confus au sujet de la nuit dernière après avoir entendu la réplique précédente de Rushella.
Quand hier soir, ils s’étaient rencontrés, Rushella avait vraiment voulu le transformer en son serviteur.
Mais son corps avait empêché cette transformation, alors elle avait même été jusqu’à s’inscrire dans cette école pour le suivre.
Ainsi... pourquoi était-elle si intéressée par moi ?
« Ne vous sentez-vous pas honoré ? Je me sens attirée vers vous. Comme si j’étais vraiment liée à vous. Cherchant quelqu’un de jeune et beau, d’âge comparable au mien, un garçon avec un sang ayant une délicieuse saveur pour qu’il devienne mon serviteur. » (Rushella)
« ... Un âge similaire ? Qu’est-ce que vous déblatérez ? N’êtes-vous pas un Véritable Ancien ? Bien qu’on ne puisse pas le savoir par votre seule apparence, l’âge réel d’un vampire doit être bien plus important que mon âge. En parlant de ça, quel âge avez-vous ? » (Hisui)
Alors qu’Hisui demanda cela, l’expression de Rushella se refroidit instantanément.
C’était presque comme si elle ne se sentait pas offensée que quelqu’un demande son âge... mais plutôt comme si quelqu’un lui avait demandé quelque chose de vraiment très effrayant.
« Quoi ? Est-ce que la longévité d’un vampire n’est-elle pas quelque chose dont il devrait être fier ? » (Hisui)
« Je... je ne sais pas. » Murmura Rushella d’une voix si faible qu’elle en était presque inaudible. C’était les paroles les plus faibles qu’elle ait prononcées en présence du garçon depuis qu’ils se connaissaient.
C’était la voix d’une fille de l’âge d’Hisui, se sentant totalement impuissant.
« Quel âge ai-je... ? Je ne suis pas vraiment sûre de cela. » (Rushella)
« Parce que vous avez vécu si longtemps, alors vous l’avez oubliée... non, ce n’est apparemment pas cela. Alors, d’où venez-vous... hey, où sont vos proches et vos serviteurs ? Pourquoi vous ne leur demandez-vous pas...? » (Hisui)
« Je n’ai pas... de telles personnes. » (Rushella)
« Hein ? Mais... » (Hisui)
« Familles... Je devrais en avoir, mais je ne me souviens de rien. Des serviteurs... Je ne devrais pas en avoir. Boire du sang... ma première fois, oui, je l’ai fait pour la première fois avec vous. » (Rushella)
« Ha―――― !? » (Hisui)
C’était tout à fait confus ce qu’elle disait.
OK, maintenant, Hisui pouvait comprendre pourquoi ses techniques de suceurs de sang étaient tellement horribles, mais cela fit plonger encore plus profondément les mystères qui l’entouraient.
« Mais... n’êtes-vous pas un Véritable Ancien ? Une Dame de sang royal, qui se tient au-dessus de plusieurs milliers de serviteurs ? » (Hisui)
« Je n’ai aucun... souvenir de cela. » (Rushella)
« Hein ? ... » (Hisui)
« Par exemple, comment est-ce que je suis née, où suis-je née... ? Je ne sais rien de tout cela. De même que, mon âge... Je ne le sais pas non plus. » (Rushella)
Rushella se tenait les bras collés l’un à l’autre, se redressant.
Elle regardait au loin, tout en mordant ses lèvres.
« Avez-vous perdu vos... souvenirs ? » (Hisui)
« Peut-être que... La nuit où je vous ai rencontré, je venais de me réveiller dans mon cercueil. J’étais près de la forêt se trouvant à l’extérieur de la ville. Mais, pourquoi étais-je là, depuis quand j’étais là... ? Je ne me souviens absolument de rien. Je connaissais seulement mon nom, que je suis un véritable ancien, à part ça... » (Rushella)
Après quelques secondes, Rushella continua à parler.
« Certaines connaissances courantes sont bien présentes, mais plus rien à propos de moi-même. Mais ces connaissances... sont quelque peu dépassées. » (Rushella)
Hisui comprit finalement certains détails étranges vus depuis leurs rencontres.
La mode vestimentaire étrange, le « style » du vampire qui était rare de nos jours, ainsi que la technique pour sucer le sang qui était complètement aberrante.
Une existence aussi étrange, parce qu’elle ne se comprend même pas elle-même.
Il semblait que Rushella ne mentait pas. En outre, il n’y avait rien de bon à gagner en révélant sa propre faiblesse à une autre personne. Il semblait qu’elle ait vraiment perdu tous ses souvenirs.
« Vous êtes venue à l’école ! Est-ce que cela signifie que vous voulez apprendre plus d’informations sur l’époque actuelle ? Est-ce que c’est l’idée ? » (Hisui)
« ... C’est vrai. Je veux savoir comment ce monde fonctionne. Mais... l’humanité a vraiment beaucoup changé. Regarder ce monde pendant la journée m’a vraiment choqué. De tels bâtiments énormes, tant de personnes... Et si j’y réfléchis avec attention, les gens travaillent et jouent en plein jour. Bien que cela me rend mal à l’aise, mais il est clair que le pouvoir de ce monde est entre les mains des humains. Mais c’est tellement étrange... avoir oublié les vampires, je ne sens même pas les esprits de toutes les créatures surnaturelles. Pourquoi est-ce que c’est rendu ainsi ? » (Rushella)
« Parce qu’en ce moment, c’est la situation du monde. La plupart des gens, même s’ils voyaient des vampires, ne le croiraient pas. » (Hisui)
« ... Oui, il semblerait. Lorsque ce matin, j’ai annoncé mon nom, personne n’a réagi. Mon nom a une histoire significative dans l’histoire des vampires. Toute personne ayant une compréhension minimale de notre histoire devrait donc savoir qui je suis. » (Rushella)
« On dirait que vous l’avez également pris en compte... alors ceci est donc la raison pourquoi vous avez dit votre nom si fortement. Juste pour mieux comprendre la situation !? » (Hisui)
L’opinion d’Hisui sur ce vampire désuet s’était un peu améliorée en comprenant ses raisons.
Bien que son bon sens ait été figé il y a des centaines d’années, son adaptabilité n’était certainement pas mauvaise.
« Qu’est-il arrivé à ce monde ? Pourquoi ma race est-elle disparue ? Pourquoi les humains ne savent-ils rien sur notre existence ? » (Rushella)
« Même si vous demandez ceci... avec mes 15 ans, je suis toujours en train d’apprendre les connaissances communes de ce monde. » (Hisui)
« Dites-le-moi rapidement. Étant donné que vous n’êtes pas étonné de mon existence, vous êtes donc bien mieux informé que les humains en général. » (Rushella)
Elle avait complètement vu à travers lui, donc Hisui ne put plus jouer à l’idiot.
« J’ai seulement entendu ces informations de mon parent [1]. Ce n’est pas énorme ce que je sais. Ceci s’est déroulé dans notre histoire, proche de la période de la révolution industrielle. Au cours de cette période, les connaissances de l’humanité sont devenues de plus en plus avancées. En raison de cela, notre monde et [la position] du monde des créatures surnaturelles se sont comme désalignés. » (Hisui)
« Pouvez-vous me l’expliquer en utilisant des mots simples ? Qu’est-ce que la révolution industrielle ? » (Rushella)
« ... Ha... Donc J’ai besoin d’expliquer dès le début, hein. Je pense que vous devriez en apprendre davantage sur l’histoire du monde. Pour le dire simplement, c’est comme une communication sans fil. Quand il y a une station de diffusion sans fil, les émissions de télévision deviennent possibles. Mais la plupart des personnes ne peuvent pas recevoir le signal. L’humanité et les monstres étaient censés correspondre ensemble, mais ils sont actuellement mal positionnés. Ainsi, ils ne se connaissaient plus. Mais de temps en temps, ils se lient et il y a un chevauchement entre eux. Ceux qui sont comme sensibles à la haute fréquence... les personnes qui sont décrites comme sensibles aux esprits sont capables de recevoir les informations de l’autre monde beaucoup plus clairement. » (Hisui)
« Je suis complètement confuse... sans fil c’est quoi ? » (Rushella)
« ... Désolé, c’est ma faute. » (Hisui)
Hisui avait pensé que son explication était plutôt bonne, mais il semblait qu’elle ne comprenait pas le point plus important. Le garçon secoua alors la tête et reformula son explication pour que cette demoiselle d’un autre monde puisse le comprendre.
« En d’autres termes, les monstres n’ont pas cessé d’exister, mais l’humanité ne peut plus ressentir leur existence... quelque chose comme ça. C’est presque comme s’ils étaient séparés, chacun vivant dans leur propre monde. Ainsi, même les vampires ne seront pas capables de trouver d’autres monstres. » (Hisui)
« Vous auriez dû le dire plus tôt, au lieu de dire vos phrases qui ne veulent rien dire. » (Rushella)
« ... Désolé. » (Hisui)
« J’ai compris. Mais les vampires sont spéciaux. Oui, les vampires sont différents des autres monstres. Les vampires ont toujours existé dans ce monde. De plus, ils doivent vivre en plein milieu du monde humain. Nous sommes liés l’un à l’autre. Et ceci serait un gros problème si l’humanité n’existait pas. » (Rushella)
« En effet, c’est complètement différent des spectres qui n’ont pas de corps et qui flottent juste dans une certaine zone. Les vampires existent toujours dans mon monde. On pourrait dire qu’ils sont les premiers représentants des monstres. Ainsi, l’humanité reste toujours en alerte vis-à-vis de leur existence. » (Hisui)
Les yeux d’Hisui s’assombrirent après avoir dit cela, ce que Rushella ne manqua pas de constater.
« Qu’est-ce que vous dites ? Vous dites que l’humanité a expulsé ma race ? » (Rushella)
« Ce que je voulais dire était que de telles personnes existent. Elles comprennent la vraie apparence de ce monde, et elles considèrent les monstres qui coexistent dans le monde humain, comme étant leurs pires ennemis. Pendant votre présentation ――― n’avez-vous pas dit que personne n’avait eu de réactions en entendant votre nom ? Et bien, ceci pourrait changer. Certaines personnes peuvent tout à fait soupçonner que vous êtes un vampire. Vous devriez donc faire attention. » (Hisui)
« Vous n’avez pas à vous inquiéter, je ne prévois pas de cacher mon identité. Même si l’humanité se réunissait contre les vampires, ceci ne sera pas une grosse difficulté. » (Rushella)
Rushella répondit cela tout en faisant bomber sa poitrine.
Une telle réponse satisfaisait complètement les attentes d’Hisui la concernant, il haussa donc simplement les épaules en réponse.
« Tout d’abord, je dois retrouver mes souvenirs. Si j’y parviens, je pourrais ainsi trouver d’autres vampires. Je voudrais leur poser des questions. Vous semblez avoir une bonne compréhension des vampires, alors aidez-moi. » (Rushella)
« Je ne veux pas. Vous pouvez tout à fait le faire seule. » (Hisui)
« Mais vous êtes mon serviteur qui est destiné à me servir pour toujours. » (Rushella)
« Non, je ne suis nullement votre serviteur. De plus, je ne connais pas l’organisation de votre race et en plus, je ne souhaite pas faire quelques choses pour vous aider. » (Hisui)
« Vous êtes vraiment effronté envers moi. » (Rushella)
La fierté de Rushella semblait blessée à ces mots. Elle fit alors claquer sa langue puis se rapprocha rapidement du jeune homme.
Comme il faisait jour, ses capacités physiques étaient grandement réduites, mais Rushella gagnerait sans aucun doute si elle décidait d’y aller sérieusement.
Le garçon envisageait encore ses options lorsque Rushella se mit à rire.
« Bien que vous battre soit simple pour moi, mais de certaines manières, j’aurais quand même perdu. Je veux que vous capituliez par votre propre chef. Alors, agenouillez-vous devant moi, et nous pourrons vite enterrer la hache de guerre. » (Rushella)
« Toujours aussi expéditif, mais les vampires sont naturellement tous comme ça. Mais vous avez vos crocs et vos yeux mystiques, alors ne pouviez-vous pas soumettre quelqu’un très facilement ? » (Hisui)
« Tout cela n’est-il pas inutile contre vous !? Mais d’une certaine manière, cela reste quand même efficace. Par exemple... vous vous inquiétez de savoir si je ne chercherais pas d’autres proies, n’est-ce pas ? Ces personnes n’ont peut-être aucune relation avec vous, mais vous vous souciez quand même pour elles. » (Rushella)
« Bien sûr que je me soucie de cela. Si quelqu’un proche de moi meurt ou cesse d’être humain... Je ne voudrais certainement pas que cela se produise. Si cela devenait ainsi, même moi... Je deviendrais un chasseur de vampires. » (Hisui)
Pour protéger sa vie paisible, même Hisui deviendrait un ennemi féroce.
Rushella émit un son de *hum*, puis se leva.
« Je ne pense pas que vous puissiez m’exterminer. Mais, cessons de perdre du temps. Vous ne voulez toujours pas m’aider ? » (Rushella)
« Cela, je l’ai déjà dit... » (Hisui)
« Si vous acceptez de m’aider, je ne sucerai pas le sang de quelqu’un d’autre. Je peux vous le promettre. Si vous êtes prêt à vous sacrifier, je garantirai la sécurité d’autrui tout autour de vous. Est-ce que cela vous convient ? » (Rushella)
« Ça craint... » (Hisui)
Cela devait bien être le sentiment d’un homme piégé sur l’autel destiné à un sacrifice humain.
Ce n’était que le premier jour à l’école, et déjà, le destin de chacun ici était sur ses épaules.
*
« Alors, décidez-vous rapidement ! » (Rushella)
« ... je vais vous servir. » (Hisui)
« Je n’ai rien pu entendre, pouvez-vous parler un peu plus fort. » (Rushella)
Rushella mit en valeur ses belles oreilles, tout en se déplaçant à côté de lui.
« Laissez-moi vous aider. » (Hisui)
« N’avez-vous pas oublié quelque chose ? » (Rushella)
« Permettez-moi de vous aider... Maîtresse. » (Hisui)
« Hum ! maintenant, vous parlez correctement ! » (Rushella)
Il était clair qu’il n’avait pas perdu son humanité, mais Hisui avait soudainement atteint un rang inférieur à celui des humains normaux.
« Dommage... Je n’aurais jamais pensé qu’un jour, je voudrais maudire mon corps... » (Hisui)
« Alors vous travaillerez durement à partir de maintenant, n’est-ce pas ? Un serviteur qui peut se déplacer pendant la journée est très précieux pour moi. Et un jour, vous deviendrez tout comme moi. Alors maintenant, laissez-moi effectuer le service d’aujourd’hui ? » (Rushella)
« Hein ? » (Hisui)
Hisui paraissait confus. Soudain, son champ de vision devint d’un coup, sombre, et le visage de Rushella se rapprocha rapidement de lui.
Et un instant plus tard, il se trouva au sol.
Ce qui bloquait les rayons du soleil était Rushella se tenant sur lui, avec son parasol dans la main.
« Alors... Rushella-sama [2] ? » (Hisui)
« Vous êtes allé à la "cafétéria" pour acheter votre déjeuner, alors moi, maintenant, je vais aussi déjeuner. » (Rushella)
Rushella se lécha les lèvres, puis plongea vers le cou d’Hisui.
Le garçon essaya de lutter, surtout pour éviter la douce respiration qui chatouillait son cou.
« Hé, arrêtez ! Ce matin, ne m’avez-vous pas assez aspiré de sang ? Cela aurait dû largement suffire ? » (Hisui)
« Restez tranquille ! Je ne me sens pas bien, alors, quel est le problème ? Tout ce que je veux c’est sucer un peu de sang ! » (Rushella)
« J’ai dit que ce n’est pas autorisé...! » (Hisui)
Les lèvres de Rushella se rapprochaient, tandis qu’Hisui se débattait.
Les deux lutèrent, jusqu’à ce qu’enfin, les lèvres de Rushella atteignirent le cou du garçon.
« Vous êtes en train de me faire perdre beaucoup d’énergie à vous débattre... ! OK, je vais bien prendre soin de vous... ! » (Rushella)
« Êtes-vous un bureaucrate corrompu qui vole les filles des parents ? » (Hisui)
Alors qu’Hisui préparait sa dernière ligne de défense, la porte du toit fut soudainement ouverte.
« ... Hisui... san [3] !? » (Sera)
Hisui reconnut rapidement la voix et se figea.
Il y avait plusieurs personnes debout dans les escaliers.
Les lèvres de Rushella étaient toujours sur son cou, tandis qu’il tourna la tête.
Parmi les étudiants qu’il connaissait à peine, il y en avait une qui avait une meilleure relation avec lui ――― La Représentante de classe Séra Reina.
À en juger par la boîte à lunch qu’elle portait, Reina prévoyait de venir déjeuner avec Hisui.
« Ceci... Je suis désolée pour l’interruption ! » (Sera)
En entendant les excuses sincères de Reina, Hisui commença à suer d’une manière incontrôlable.
Ses propres membres étaient actuellement bloqués au sol par Rushella.
Et vu de l’extérieur, il donnait l’impression qu’ils allaient partager un baiser passionné.
Même s’il arrivait à pousser le vampire plus loin, il y aurait encore des marques de ce baiser laissées avant.
« Je-je dis...! » (Hisui)
Avant qu’Hisui ne puisse s’expliquer, toutes les filles s’étaient déjà dispersées.
Mais leurs bavardages inoffensifs atteignaient toujours ses oreilles.
« Hum, ils sont... donc vraiment ensemble ? Ils l’ont déjà si rapidement fait ? » (étudiante A)
« On dirait qu’ils ne vont pas juste s’embrasser... » (étudiante B)
« L’école vient juste de commencer, et la lumière du jour est encore haute, qu’est-ce que... » (étudiante C)
« Les filles venant de l’étranger... sont si débauchées. » (étudiante D)
Bien que cela ne soit que des chuchotements, mais ils arrivaient en Hisui comme s’ils étaient des rugissements douloureux cognant sa tête.
... Et un coup de poignard dans le cœur.
*
Hisui regarda le ciel comme s’il était sans âme.
Rushella semblait avoir perdu tout intérêt à ce qu’elle faisait précédemment. Elle était en train de se recoiffer ses cheveux et arranger ses vêtements qui avaient été froissés par Hisui, puis elle se leva de dessus le corps d’Hisui.
« Venir observer discrètement les autres au cours de leur déjeuner, quel tas de personnes impolies ! Ne le pensez-vous pas, vous aussi ? » (Rushella)
« Je viens de finalement comprendre ce que ressent une fille quand elle est maintenue au sol par la force... » (Hisui)
Hisui murmurait cela, les larmes aux yeux. Ses mains perdirent toutes leurs forces et le sac en plastique, contenant la nourriture qu’il avait apportée de la cafétéria, tomba sur le sol.
« Ah oui ! Qu’avez-vous acheté ? Laisse-moi regarder, je veux aussi y goûter. » (Rushella)
« Comme vous voulez... en fait, il serait utile que vous m’aidiez à manger cela. » (Hisui)
En cherchant dans le sac, elle sélectionna finalement un berlingot de lait à la fraise.
Elle commença à étudier le conteneur de tous les côtés, et après avoir finalement compris comment l’utiliser, elle commença à siroter son contenu.
« Quoi ? Un lait rose si doux ! Peut-être qu’ils ont ajouté du sang dedans !? » (Rushella)
Non, le matériel original était déjà ainsi, alors nul besoin de le mélanger... Hisui n’avait même plus la force de soupirer à ces mots.
Rushella continua à sucer le lait au moyen de la paille, tout en libérant des petits sons mignons. Hisui était assis à proximité avec des yeux remplis de larmes.
La dernière once de compassion de la classe avait été balayée par le vent.
Il voulait vraiment dès maintenant aller à la classe de l’après-midi.
La capacité du sexe opposé à diffuser les ragots était plus rapide que la vitesse de la lumière.
Juste avec cela, il perdrait la capacité d’avoir une vie scolaire normale.
Maintenant, il devra accueillir sa vie de lycéen en étant "étiqueté comme une personne étrange".
Hisui envisageait déjà un transfert scolaire, alors que Rushella suçait son lait avec un grand plaisir visible sur son visage.
« C’est tellement doux ! C’est le deuxième après le sang... » (Rushella)
« ... Simplement, tuez-moi ! » (Hisui)
Hisui répondit avec un désespoir taché de sang, mais quelqu’un non loin de là, observait les deux personnes présentes sur le toit.
Elle ne faisait pas partie du groupe de filles venues plus tôt, mais elle se tenait dans l’ombre, derrière la porte d’accès au toit et se concentrait sur Hisui avec une intensité semblable à un laser.
« Excellent mâle, localisé <3 » (Inconnue)
Notes
- 1 Le mot utilisé pour décrire « parent » est « un proche », ici cela signifie probablement un « gardien ».
- 3-san : La traduction la plus simple serait "monsieur" ou "madame" (c’est donc un suffixe unisexe), mais leur fonction est bien plus que ça. "-San" est à utiliser avec quelqu’un que l’on respecte et avec qui l’on n’est pas spécialement proche, par exemple : un collègue ou un patron, des clients, quelqu’un que vous connaissez peu.