Chapitre 8 : Discorde
Partie 1
« Majesté… ! Votre Majesté ! »
Quelqu’un m’appelait. Mais comment était-ce possible ? Pourquoi me traiter comme une reine ? J’étais juste une joueuse, une fille solitaire qui faisait une fixation sur le seul jeu qu’elle aimait. Pourquoi m’aurait-on appelée « Votre Majesté » ?
Oh, c’est vrai… Je dois encore mettre mon reste de repas dans le micro-ondes. Je n’ai même pas encore dîné. Je crois que j’ai aussi de la sauce à salade quelque part. Je dois juste la réchauffer et ensuite je ferai un bon repas.
« S’il vous plaît, je vous en supplie, réveillez-vous… » la voix sanglotait.
Mes yeux s’ouvrirent. Alors que ma vision s’ajustait, je vis que je n’étais plus dans mon appartement familier. J’étais allongée sur un lit dans une autre pièce, une pièce à l’ancienne avec des détails d’allure exotique. Il n’y avait ni lampe ni ampoule, et la seule chose qui illuminait la pièce était la lumière naturelle qui brillait à travers la fenêtre. Une femme me tenait le bras, son visage était enfoui dans ma poitrine.
« Sérignan… ? » Son nom était sorti de ma bouche.
« Votre Majesté ! Vous êtes réveillée ! »
La femme s’était levée d’un bond et m’avait regardée avec excitation.
« Je… Que m’est-il arrivé ? »
Je n’arrivais pas à comprendre ma situation. Il y a quelques instants, j’étais encore dans ma chambre, en train de jouer au jeu vidéo. Pourquoi étais-je ici maintenant ? Mon esprit était complètement dérangé.
« Votre Majesté, avez-vous mal ? »
« Je suis… Je ne suis pas une reine », avais-je dit en secouant la tête.
« Oh non. Avez-vous perdu vos souvenirs ? Peut-être avez-vous contracté une maladie qui a brouillé vos souvenirs… ? »
« Hum, je ne sais pas. Je n’ai aucune idée de ce que vous dites, je le jure. »
Je n’étais qu’une joueuse ordinaire qui se trouve être très douée pour utiliser l’Arachnée. Attends, l’Arachnée ? N’ai-je pas beaucoup joué avec cette faction dernièrement ?
« Lysa ! Sa Majesté est réveillée, mais quelque chose ne va pas ! Viens ici ! »
Lysa ? Un autre nom familier… N’est-ce pas la nouvelle unité jouable qu’ils ont introduite dans la dernière mise à jour ? Elle était dans ma faction lors du dernier match, et elle avait aidé Sérignan à gérer la charge de la cavalerie.
« Je suis là ! », s’écria une autre fille en courant dans la salle.
Comme dans le jeu, c’était une fille elfe ayant la moitié inférieure d’un insecte, et elle portait un arc long. Elle positionna l’arc dans son dos et se précipita à mes côtés.
« Votre Majesté, comment vous sentez-vous ? Est-ce que ça va ? »
« Je suis un peu confuse… »
Pourquoi est-ce que je parle à un personnage de jeu vidéo ? Je joue à un jeu de stratégie en temps réel, pas à un jeu de rôle. Mais… tout a l’air si réel. Les joues de Sérignan et les bras élancés de Lysa ont l’air si doux et soyeux, comme s’ils étaient agréables au toucher.
« Euh, agréable… ? Eh bien, euh, si c’est ce que vous voulez, Votre Majesté », bégaya Sérignan.
« Hein ? ! »
Elles ont entendu mes pensées ? C’est impossible. Mais attendez, ne suis-je pas…
« Sérignan, pouvez-vous me dire quelle est ma position ? », avais-je demandé, en pensant soudainement plus clairement qu’avant.
« Votre position, Votre Majesté ? Vous êtes notre reine, la reine d’Arachnée. Vous avez promis de nous conduire à la victoire. »
Oui. Maintenant, je me souviens.
Tout me revenait en mémoire. C’était un monde où l’Arachnée existait, mais était traitée comme une étrangère. Un coup d’État avait éclaté dans le duché de Schtraut, j’avais alors fait entrer une armée d’Essaims dans cette nation pour la réprimer. Nous devions achever notre conquête avant son invasion par la Papauté de Frantz.
Mes souvenirs étaient revenus, mais un doute subsistait dans mon esprit.
« Mais un jour, je sauverai votre âme. Je vous le promets, je vous sauverai avant que la cage du diable ne se referme. »
Est-ce que cet endroit est une cage ? Que voulait dire cette fille ?
J’avais pris une grande respiration.
« Sérignan… et Lysa, je me souviens de tout maintenant. Je suis votre reine. Je ne peux pas croire que j’ai oublié quelque chose de si important. Je suis censée mener la conquête… Je suis tellement, tellement désolée. »
« Oh, Votre Majesté ! »
Sérignan s’accrocha à mon corps et se mit à pleurer une fois de plus.
« Allez, pas de pleurs. Tu es un chevalier. Tu sais que tu dois être digne, hein ? », lui dis-je en la prenant dans mes bras.
« Je pensais vraiment que vous nous aviez oubliés ! J’ai été complètement inutile pendant que vous dormiez… Je ne savais pas ce que je ferais si vous ne vous étiez pas réveillé. »
« Ça suffit. Je suis désolée de t’avoir inquiété, Sérignan. Je vais bien maintenant. Je n’irai nulle part, pas tant que nous n’aurons pas gagné la victoire que je t’ai promise. Je ne reviendrai jamais sur ma parole. De toute façon, combien de temps ai-je dormi ? », lui dis-je en essuyant ses larmes avec un coin de ma chemise.
« Deux ou trois jours », dit Lysa, le soulagement écrit sur son visage.
« Nous avons appliqué un antidote petit à petit. »
« Deux ou trois jours, hein ? Est-ce que quelque chose a changé depuis ? »
« Rien n’a bougé. On dirait que l’ennemi a du mal à rassembler ses forces. », rapporta Sérignan.
« C’est vrai. Alors, venons-en à eux. Ils doivent être punis pour ce sale tour qu’ils ont joué. S’ils veulent assassiner, je leur montrerai de première main comment on fait. »
« N’oubliez jamais votre cœur humain. »
Je n’oublierais pas, mais c’était quelque chose qui devait être fait. Nous devions nous venger. Nos ennemis avaient massacré les citoyens de Marine, et ils voulaient souiller de sang toutes les autres villes. Il était juste que nous les massacrions en retour.
Œil pour œil… Ce n’est pas comme ça que les humains fonctionnent ?
☆☆☆**
« C’est ridicule ! »
Un cri retentit dans le camp principal de l’armée des nobles.
« Nous sommes venus pour nous battre et gagner, alors pourquoi devons-nous attendre notre heure ici ? ! Nous devrions engager l’ennemi, le pousser dans une bataille décisive ! Vous voulez dire que nous sommes condamnés à perdre cette bataille ? ! Nous devrions nous battre contre l’ennemi dès maintenant ! N’êtes-vous pas d’accord, mes amis ? ! »
Celui qui lança ce discours passionné était le marquis Adrian de Arden, qui menait une armée de 50 000 hommes. Il critiquait vivement les actions du quatorzième duc de Schtraut, Léopold de Lorraine.
« Le moment est venu de tenir notre position, Lord Arden », déclara Roland de Lorraine, le frère cadet de Léopold et le commandant de l’armée des nobles.
« Riposter serait faire le jeu de l’ennemi. Nous avons appris que l’armée de Léopold commençait à marcher, nous devrions donc les rencontrer et joindre nos forces avant d’engager le combat avec l’ennemi. Notre adversaire veut que nous agissions avec négligence afin qu’il puisse exploiter la moindre erreur. »
« Il a raison, Seigneur Arden. Oh, et gardez à l’esprit que le Duc de Lorraine pend ses adversaires à gauche et à droite. Vous feriez bien d’obéir à ses ordres, en supposant que vous ne souhaitez pas être le prochain sur la potence. », dit un noble.
« Bon sang. Nous n’aurions jamais dû laisser le Duc de Lorraine prendre le contrôle. Ce genre de chose ne serait jamais arrivé si le duc Sharon était toujours au pouvoir. Le destituer était une erreur. Il est peut-être trop tard pour le dire maintenant, mais je ne peux pas m’empêcher de me plaindre. Je veux dire, regardez l’état des choses ! », dit un autre.
Beaucoup de nobles étaient très mécontents de « l’administration » de Léopold. Ils détestaient et craignaient sa rapide exécution de ceux qui s’opposaient à lui, et ils détestaient que son incompétence ait conduit à l’invasion de l’Arachnée.
« S’il vous plaît, ne dites pas cela. Léopold a établi une alliance avec le Royaume Papal, nous n’avons plus besoin de craindre l’Arachnée ou Nyrnal. », supplia Roland tout en essayant de les calmer.
« Alors maintenant nous sommes censés plier un genou devant les saints hommes sordides de Frantz ? Nous ferions mieux de servir Nyrnal. »
« C’est vrai ! Le Royaume Papal de Frantz n’est qu’un autre pays arrogant qui cherche à dominer. Ils agissent comme s’ils étaient la seule nation à suivre le Dieu de la Lumière. “Des dons importants à l’Église vous absoudront de vos péchés”… Pah ! Je ne me serais jamais attendu à ce que le Dieu de la Lumière fasse tant de mal pour de l’argent, franchement. »
Les tentatives de persuasion de Roland tombèrent dans l’oreille d’un sourd lorsque les nobles firent connaître leurs griefs.
« Le Royaume Papal de Frantz fera un grand allié. J’en suis sûr. », dit-il fermement.
Il était difficile de dire à quel point Roland faisait confiance au Royaume Papal. Frantz s’était depuis longtemps armé de sa foi dans le but de soutirer toutes sortes de choses au duché et à ses citoyens, y compris des fonds pour les cérémonies d’inauguration papales et les festivals religieux. Pour beaucoup, le Royaume Papal était une sangsue qui utilisait n’importe quelle excuse pour aspirer plus d’argent des autres nations.
S’allier avec un tel pays était-il vraiment la bonne idée ? Le Populat de Frantz et l’Empire de Nyrnal étaient tous deux des pays hautains et puissants à leur manière. Compte tenu des événements récents, peut-être que le duché aurait vraiment été mieux placé sous le contrôle de Nyrnal.
« Seigneur Roland… S’il vous plaît, soyez honnête. S’allier avec le duché était-il la bonne décision ? Votre frère nous a-t-il menés sur le mauvais chemin ? », demanda un des nobles.
Son expression était grave.
« C’est… difficile à dire à ce stade. Pour parler franchement, messieurs, je pense que la mise en accusation était une erreur. Changer de dirigeant pendant une crise nationale crée bien plus de problèmes qu’elle n’en résout. Il est difficile de juger si mon frère peut faire preuve des qualités de leader que le Duc-erm, le Seigneur Sharon, avait. Purger tant de noblesse en ces temps difficiles provoquera un fossé encore plus grand entre nos peuples. »
Roland n’était pas d’accord avec la mise en accusation, car il connaissait les nombreux problèmes qu’un changement de dirigeant causait lorsque la guerre se profilait à l’horizon. Maintenant, l’Arachnée rampait à l’extrémité occidentale de ses terres, et Roland commençait à douter qu’ils aient un moyen de repousser l’invasion. Peut-être que s’ils s’étaient alliés avec l’Arachnée, comme l’avait proposé César de Sharon, toute cette épreuve et cette tragédie auraient été évitées.
L’un des nobles soupira.
« Pourtant, nous avons déjà donné au Duc de Lorraine le pouvoir de diriger ce navire. Tout ce que nous pouvons faire maintenant est de nous assurer que nous ne coulerons pas au fond. »
« C’est vrai. Nos mains sont maintenant tachées du sang des nobles et noircies par le fait d’avoir brûlé leurs terres. Nous pourrions prier tout le reste de notre vie, c’est une chose qui ne changera pas. »
Les nobles présents étaient ceux qui avaient été chargés de détruire les opposants à Léopold. Sous le prétexte d’unifier Schtraut, ils avaient pendu des innocents et réduit leurs terres en cendres.
« Pardonnez-moi, messieurs ! J’ai un rapport ! »
Un soldat à cheval s’était approché d’eux au galop.
« Les monstres ont été aperçus ! Cinquante individus ! Ils semblent fuir vers l’ouest ! »
« Nous y voilà ! Enfin une chance de montrer notre valeur ! »
Le marquis et les autres nobles s’étaient rapidement levés.
« Attendez, ça pourrait être un piège ! », avertit Roland.
« J’en ai assez entendu ! C’est le moment de se battre ! Le Royaume Papal est peut-être notre allié, mais nous devons encore défendre notre propre pays ! Nous montrerons à Frantz que nous avons toujours l’esprit d’une nation indépendante ! »
Les nobles au tempérament chaud ordonnèrent à leurs soldats de se diriger vers l’ouest, espérant se venger de leurs récentes pertes. Quelque 1 600 cavaliers et 150 000 fantassins prirent d’assaut la poursuite de l’ennemi.
Pas un seul d’entre eux n’en revint.
Deux jours plus tard, Roland apprit que toute la force détachée avait été décimée. Il rassembla rapidement les nobles restants, et ils s’enfuirent tous aussi vite qu’ils le purent vers l’est.
merci pour le chapitre
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Merci pour le chapitre
Il y a une erreur de chiffre dans ce chapitre. On indique plus haut une armée de 50 000 hommes, et en fin de chapitre
»Quelque 1 600 cavaliers et 150 000 fantassins »