Chapitre 3 : Symposium
Table des matières
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Chapitre 3 : Symposium
Partie 1
« Tomoe a beaucoup visité la maison de Juna ces derniers temps. »
C’était une nuit d’été fraîche, lorsque la chaleur du jour s’était déjà estompée.
Lorsque je l’avais mentionné de manière désinvolte, Roroa avait hoché la tête. « Ohh, j’ai entendu parler de ça. Elle dit qu’elle veut apprendre les charmes d’une femme adulte. »
« Une femme adulte, hein… J’aimerais au moins qu’elle soit enfantine tant qu’elle est encore une enfant. Mais peut-être que c’est juste l’égoïsme d’un adulte qui parle. »
« Nyahaha ! Cela pourrait l’être, » dit Roroa en riant. « Tomoe a déjà douze ans, n’est-ce pas ? C’est là que nous, les filles, commençons à grandir, tu sais… Mais, attends, pourquoi crois-tu qu’elle ne me le demande pas ? »
« N’est-ce pas évident ? C’est parce que tu ne donnes pas du tout cette impression, n’est-ce pas ? » répondis-je.
Roroa avait gonflé ses joues et m’avait pincé sur le côté. Cela m’avait fait un peu mal.
« Pourquoi pas ? Je suis déjà une femme mariée, tu sais ? » répondit Roroa.
Roroa m’avait serré dans ses bras de sorte que sa peau s’appuie contre la mienne. Elle était alors allongée dans le lit avec moi, utilisant mon bras tendu comme oreiller. Il y avait une couverture sur nous, mais en dessous, nous étions tous les deux nus.
Je m’étais tourné vers Roroa, sans bouger le bras sous sa tête, et je lui avais caressé les cheveux. « C’est plutôt le genre de femme qu’elle veut devenir. Dans ton cas, il y a cette amie qu’elle a… Lucy, c’est ça ? »
« Ohh. Cette gamine de la compagnie Evans, hein ? » demanda Roroa.
« Cette fille t’admire, n’est-ce pas ? » demandai-je.
« Ohh, je suppose que oui. Mais ça m’a mise en colère quand elle a commencé à m’appeler Grande Soeur Roroa, sortie de nulle part, » répondit Roroa.
L’autre jour, nous avions appris que Tomoe s’était fait des amis à l’académie, nous les avions donc invités au château, mais pas à titre officiel.
Alors qu’Ichiha et Yuriga vivaient déjà dans le château et que je connaissais Velza, Lucy, la fille d’une famille de marchands, était la seule à être nouvelle pour moi.
Lorsque toutes mes femmes et moi étions venus les saluer, puisqu’il s’agissait de notre petite sœur bien-aimée Tomoe, Lucy avait d’abord été intimidée, mais lorsqu’elle avait remarqué que Roroa était là aussi, elle avait poussé un cri.
« Eeek !? Lady Roroa ! N’est-ce pas Lady Roroa !? » s’écria Lucy.
« Qu… quoi ? Pourquoi criez-vous tout d’un coup ? » s’exclama Roroa.
« Je suis l’une de vos grandes fans ! S’il vous plaît, serrez-moi la main ! » s’exclama Lucy.
Puis elle avait pris la main de Roroa et l’avait serrée vigoureusement. Roroa et tous les autres individus présents avaient été abasourdis, mais Velza s’était empressée de saisir Lucy par la peau du cou et de la traîner.
« L-Lucy ! C’est impoli envers Sa Majesté et les reines ! » s’exclama Velza.
« Hein !? Oh, non ! J’étais si étourdi de rencontrer enfin Lady Roroa, que j’ai perdu le contrôle de moi-même ! S’il vous plaît, pardonnez mon impolitesse ! Cela n’a rien à voir avec ma famille, alors s’il vous plaît, ne punissez que moi ! » Lucy s’était jetée par terre et s’était excusée.
Incapable de la regarder plus longtemps sans rien faire, Tomoe avait parlé. « Grand Frère, Lu est généralement une bonne fille. C’est aussi mon amie, alors pardonne-lui, » ou quelque chose comme ça. Mais il n’y avait pas besoin de pardon. Pour commencer, je n’étais même pas contrarié.
Les choses devenaient incontrôlables, alors j’avais décidé d’en rire pour qu’ils sachent que je n’avais pas l’intention d’en faire tout un plat.
« Quelle fille joyeuse et amusante ! C’est une bonne amie que tu as trouvée là, Tomoe, » déclarai-je en riant.
« Grand frère… Oui ! » Elle m’avait fait un grand sourire. C’était tout ce dont j’avais besoin.
Roroa avait dû se souvenir de ce qui s’est passé cette fois-là aussi, car elle avait ricané.
« Je suis comme une petite sœur pour Grande Soeur Cia et les autres épouses, mais je suis une “grande sœur” pour elle. C’était une sorte de sentiment nouveau, » déclara Roroa.
« Il y avait aussi la princesse Tia dans le royaume de Lastania, n’est-ce pas ? » demandai-je en réaction.
« Je sais qu’elle est plus jeune, mais c’est une grande sœur pour moi. Oh, c’est vrai. J’ai correspondu avec Grande Soeur, et il semble que mon grand frère n’ait pas encore posé la main sur elle. Il prévoit d’attendre un an environ, » déclara Roroa.
« La princesse Tia était plutôt petite, après tout… Je suppose que ça montre que Julius prend soin d’elle, » déclarai-je.
C’était probablement parce qu’il voulait qu’elle grandisse un peu plus avant qu’ils ne commencent à faire des bébés. Vous savez, pour réduire autant que possible les risques liés à la grossesse.
Pendant que je réfléchissais à cela, Roroa m’avait donné un coup de poing sur le côté. Il était temps de commencer… apparemment.
Puis, Roroa avait recouvert son corps de ses mains et, d’une voix désespérée, elle avait dit. « Vous pouvez faire ce que vous voulez de mon corps. Mais, s’il vous plaît, ne faites pas de mal aux gens de mon pays », ses yeux étaient humidifiés par des larmes.
Je l’avais regardée et j’avais poussé un soupir. « … Peux-tu arrêter de jouer la princesse d’une nation en ruine ? »
Roroa semblait terriblement à l’aise pour mettre en place des situations comme celle-ci. Je trouvais sa façon de jouer mignonne, mais elle semblait terriblement désireuse de faire de moi un roi lubrique dans ses scénarios fantaisistes. Quand j’avais essayé d’en parler avec Liscia…
« Hee hee, j’ai entendu. Cette fille pense vraiment beaucoup à ce genre de choses, hein ? Mais, tu sais… Je suis aussi une ancienne princesse. Peut-être que je devrais faire ça pour toi la prochaine fois ? » dit-elle avec un sourire.
Il semblerait que mes femmes échangent fréquemment des informations entre elles.
C’était une très bonne chose pour moi, et pour le pays, que mes femmes s’entendent, mais… Je ne savais pas si cela n’allait pas me faire perdre la tête assez rapidement.
« Je n’ai pas si mauvais goût que ça, d’accord ? » déclarai-je.
« Tu n’es pas drôle. N’as-tu pas entendu les rumeurs disant que tu as commencé une guerre pour poser la main sur moi ? » demanda Roroa.
« C’est une vieille histoire. Elle a été dissipée depuis longtemps, » déclarai-je.
« Mais ce genre d’action ne t’excite pas ? » demanda Roroa.
J’avais incliné ma tête vers Roroa, et j’avais rapproché de moi la tête qui reposait sur mon bras.
« Même sans ça… tu m’as déjà fait me mettre en route, » répondis-je.
« Nyaheheh ! »
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Partie 2
Le lendemain, j’avais appelé Tomoe et Ichiha au bureau des affaires gouvernementales. Liscia et Hakuya étaient déjà dans la pièce. Lorsque je leur avais expliqué la raison de ma convocation, ils avaient tous deux placé la tête sur le côté à l’unisson.
« « Symposium de monstrologie ? » »
Le mot devait leur être inconnu. Tomoe avait ensuite posé une autre question : « Qu’est-ce qu’un “symposium”, Grand Frère ? »
« C’est un mot de mon ancien monde qui fait référence à une conférence universitaire sur un thème spécifique. Un échange d’opinions en matière de recherche, qui se tient dans un lieu public. Cette fois, j’ai décidé de tenir un symposium sur le domaine de la recherche sur les monstres — c’est-à-dire la monstrologie — à l’Académie royale ce week-end. »
« L’Académie… Vous le faites dans notre école ? »
« Oui. D’accord, Hakuya, je te laisse expliquer la suite. »
« Compris. »
Hakuya s’était incliné, puis il avait sorti un livre. Sur la couverture, les mots « Encyclopédie des monstres » avaient été écrits dans la langue de ce monde.
Il s’agissait de la première encyclopédie des monstres de ce monde, publiée sous la forme d’un ouvrage écrit conjointement par Ichiha et Hakuya, et qui présentait des illustrations de monstres dessinés par Ichiha et classés par catégories. L’impression avait déjà existé sans que j’introduise l’idée dans ce monde, il y avait donc déjà un certain nombre d’exemplaires en circulation.
« Entre la publication d’une encyclopédie des monstres présentant des croquis catégorisés d’Ichiha et les recherches sur les différentes parties de monstres que nous avons pu rassembler après que la vague démoniaque ait frappé le royaume de Lastania, les domaines universitaires concernant les monstres ont connu un essor dans ce royaume. La question “Qu’est-ce qu’un monstre ?” est importante pour ce royaume, non, pour ce monde. »
« Il y a le Domaine du Seigneur-Démon au nord, et même s’il n’y en avait pas, ils sont aussi dans des donjons, » déclara Liscia, l’air convaincu.
« Oui. » Hakuya avait fait un signe de tête. « Il y a aussi les démons que Tomoe à renco… Non, ceux qui existent dans le Domaine du Seigneur-Démon à considérer aussi. Si nous avons une bonne compréhension des monstres, je crois qu’il sera plus facile de les distinguer des démons. Il sera possible de négocier avec les démons sapiens pour éviter des conflits inutiles. »
« Je préfère aussi ne pas les combattre si nous n’avons pas à le faire. » Tomoe s’agrippa la poitrine pendant qu’elle parlait. « À Lastania… j’ai touché l’esprit de ces monstres lézards. Ils avaient tous un sentiment intense de famine, et ils ne voyaient en moi qu’une proie. Ils ne pensaient à rien d’autre qu’à manger. Alors… »
Les sentiments inexprimés de Tomoe, je ne veux pas mettre dans le même sac le kobold qui m’a sauvée avec ces choses qui ne pouvaient penser qu’à ce niveau… étaient clairement apparus.
Ichiha était ici en ce moment, donc elle ne voulait pas le dire ouvertement, mais elle avait dû vouloir dire qu’il y avait aussi des démons avec un cœur.
« … Oui. » Je lui avais fait un signe de tête. « Ils disent que les démons sont intelligents, mais ce n’est pas encore clair. Même s’ils sont intelligents, il est dangereux de penser qu’on pourra dialoguer avec tous les démons. Il faut quand même envisager la possibilité que certains soient comme ça. Pour s’assurer que la guerre ne se déroule pas avant qu’un camp ne soit anéanti. »
Apparemment d’accord, tout le monde avait fait un signe de tête grave.
« Quoi qu’il en soit, sur cette note, il est dans notre intérêt national de rechercher des monstres. C’est pourquoi j’organise le symposium de monstrologie. Eh bien, au lieu de l’étude des monstres elle-même, les principaux sujets seront probablement “L’importance et les vérifications à faire sur la recherche sur les monstres” et “La voie à suivre concernant la recherche sur les monstres”. Étant donné l’importance du sujet, nous devons avancer avec prudence. »
« La recherche sur les monstres… Ça ressemble beaucoup à une hérésie, hein ? L’État papal orthodoxe va probablement faire des histoires. »
J’étais d’accord avec l’observation de Liscia.
Dans un pays qui accordait une telle importance à la religion, même si un développement académique était nécessaire, il était inévitable que le pays subisse un recul s’il tentait de percer un mystère divin. On ne voudrait pas permettre l’étude des monstres, qui servaient d’ennemis de Dieu faciles à comprendre.
« Faisons participer leur évêque, Souji, au symposium. Il sera difficile d’effacer toutes leurs préoccupations, mais cela devrait nous permettre de nous couvrir. J’ai l’intention de faire participer Kuu en tant que représentant de la République, et de laisser Madame Maria dans l’Empire regarder via Joyau de Diffusion de la Voix. Hakuya, les préparatifs sont en place pour cela, n’est-ce pas ? »
« Par votre volonté. J’ai reçu son consentement enthousiaste par l’intermédiaire de Madame Jeanne, » répondit-il.
J’avais fait un signe de tête satisfait à la réponse de Hakuya et j’avais dit. « Les monstres sont un sujet que je veux étudier avec l’Empire et la République. De plus, je ne voudrais pas risquer de les faire enquêter sur nous alors que nous ne faisons rien de mal. »
« Hum… puis-je dire quelque chose, Grand Frère ? » Tomoe hésita à lever la main.
« Qu’y a-t-il, Tomoe ? » demandai-je.
« Je pense que ce que tu dis est logique, mais ce symposium sera public… ce qui signifie que tout le monde peut écouter, non ? Comment vas-tu gérer Yuriga ? » demanda Tomoe.
« … Oh, c’est vrai. Yuriga, hein ? » Je m’étais tenu la tête.
Yuriga, étant la sœur cadette du roi de Malmkhitan, écrivait périodiquement des lettres à son frère pour décrire sa vie ici dans le royaume. Si elle assistait au symposium de monstrologie en tant qu’observatrice, le contenu de ces lettres serait transmis à Fuuga. C’était une information vitale pour lui, car il était au centre du mouvement de récupération des terres.
Fuuga était un homme qui pouvait faire exploser les flux de cette époque, alors je ne voulais pas lui montrer nos cartes, mais… comme je l’avais déjà dit, il était dangereux de mener ces recherches en secret.
« Qu’en penses-tu, Hakuya ? » demandai-je.
« … Je pense que c’est inévitable. Mais si possible, je préférerais que Madame Yuriga ne participe pas, » répondit-il.
« Si elle ne s’intéresse pas à la recherche sur les monstres, il est possible qu’elle ne…, » commençai-je.
« Il n’y a aucune chance que cela se produise, » déclara Tomoe avec une grande clarté. « Pendant la bataille en chanson, Yuriga m’a dit “Les événements auxquels vous ne semblez pas avoir réfléchi ont une intention plus profonde qui se cache dans l’ombre.” Si elle entend parler d’un événement aussi inattendu, elle est sûre de réaliser que c’est important. »
« … Cette fille n’est pas mal. Elle est parvenue à comprendre la personnalité de Souma à son âge, » déclara Liscia, impressionnée.
Maintenant que j’y pense, Liscia m’avait aussi dit quelque chose de semblable une fois. Liscia et Yuriga… Elles avaient peut-être beaucoup en commun, hein ?
« Dans ce cas, on ne peut pas le cacher… » J’avais hésité un moment, mais j’avais fini par me résoudre. « Si l’information doit sortir d’une façon ou d’une autre, publions-la nous-mêmes. »
« Êtes-vous certain de vouloir faire cela ? » demanda Hakuya.
« Fuuga envahit le domaine du Seigneur-Démon. En ce moment, il est le chef le plus susceptible de se heurter aux démons. Ce serait mauvais pour nous s’il se mettait à leur tenir tête, car il ne sait pas faire la différence entre les monstres et les démons. Nous devrions lui donner des informations sur les monstres, comme un avertissement, si ce n’est plus. Peut-être devrions-nous lui prêter un exemplaire de l’encyclopédie des monstres tant que nous y sommes ? »
« Je vois. Cela semble sage. » Hakuya semblait satisfait, donc notre cap était fixé.
Je m’étais levé de mon siège et j’avais fait face à tout le monde.
« C’est tout. Tout le monde, gardez à l’esprit tout ce dont nous avons parlé ce week-end, » déclarai-je.
« Ok, compris. »
« « « Compris, Sire. » » »
« En ce qui concerne la façon de s’occuper des enfants… Honnêtement, je ne sais pas trop quoi faire. » Une fois que Tomoe et Ichiha avaient été renvoyés, j’avais confié mes pensées à Liscia et Hakuya. « Je suis sûr qu’Ichiha ira bien. Il n’est pas très loyal envers le duché de Chima, et avec un peu de négociation, je suis convaincu qu’il offrira son allégeance à ce pays. Es-tu d’accord avec ça, n’est-ce pas, Hakuya ? »
« En effet. Je pense que nous pouvons nous réjouir de son service à l’avenir, » répondit-il.
« Le problème, c’est… Yuriga. Que faisons-nous d’elle, à l’avenir ? » demandai-je.
« Que voulez-vous dire par "faire avec elle” ? » demanda Hakuya.
« Nous avons défini notre politique en matière de monstrologie pour l’instant, mais tant que Yuriga restera dans ce pays, ce genre de choses continuera à se produire. Ce sera pénible de devoir s’inquiéter des yeux de Yuriga chaque fois que nous essaierons de faire quelque chose qui nous fera avancer, » déclarai-je.
« C’est… vrai, oui, » répondit Liscia.
Pendant que Liscia mâchouillait cette pensée, j’avais levé deux doigts et je les lui avais montrés.
« Deux options s’offrent à nous. La première est de la renvoyer à Fuuga sans lui apprendre quoi que ce soit d’important. Si nous la renvoyons dans l’ignorance, cela n’améliorera pas notre relation avec Fuuga, mais cela ne l’aggravera pas non plus. Cela ne fera que maintenir le statu quo, » déclarai-je.
« C’est le choix le plus sûr, oui. » Liscia avait fait un signe de tête. « Alors, c’est quoi l’autre ? »
« Nous l’amenons à nos côtés, » répondis-je.
« Veux-tu dire… faire d’elle notre alliée ? » demanda Liscia.
« Non, il n’est pas nécessaire qu’elle soit complètement alignée avec nous. Elle doit juste ne pas être une ennemie, » répondis-je.
« … Je ne suis pas sûre de bien comprendre la différence, » répondit Liscia.
Liscia semblait confuse, alors j’avais croisé les bras et je l’avais expliqué. « D’après les derniers rapports, bien que Fuuga et Yuriga soient frère et sœur, j’ai l’impression que leurs personnalités sont très différentes. Yuriga est plus réaliste. Je suppose qu’on peut dire ça, non ? Plus l’adversaire est puissant, plus Fuuga s’enflamme, mais j’ai l’impression que Yuriga préfère éviter les batailles dangereuses. »
« … Je crois que je peux comprendre. » Hakuya était d’accord avec moi. « La fille est intelligente. Sa capacité à étudier est loin d’être du niveau de la Petite Sœur ou d’Ichiha, mais elle possède un esprit capable de penser et d’imaginer avec souplesse. On peut dire qu’elle s’adapte… Elle est capable de voir la vraie nature des choses. La façon dont elle loue votre façon de régner, mais s’en méfie aussi, en est un autre signe… Ahh, je vois. Vous pensez pouvoir l’utiliser comme moyen de dissuasion contre Sire Fuuga ? »
Hakuya avait fait un signe de tête fascinant, ayant peut-être vu ce que je prévoyais.
« Il est vrai que si vous montrez à Madame Yuriga de quoi ce pays est capable, elle avertira Sire Fuuga de ne pas se battre avec vous. Peut-être le prévient-elle déjà par ses lettres. »
« Hrmm, » Liscia croisa les bras et gémit. « Je comprends ce que vous dites tous les deux, mais… Je n’ai jamais rencontré ce Fuuga. Mais d’après ce que j’entends, il n’a pas l’air du genre à s’arrêter parce que sa sœur l’a mis en garde contre quelque chose, non ? S’il l’était, Souma n’aurait aucune raison de se méfier de lui. »
Liscia avait touché le cœur du problème, et j’avais hoché la tête.
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Partie 3
« C’est exact. Je pense que Fuuga serait probablement capable de jeter Yuriga pour son ambition. Mais il n’aimerait pas le faire. Il y a une légère différence de nuance entre “ne pas hésiter” et “ne pas pouvoir hésiter”. »
Je pensais à un grand homme similaire, Oda Nobunaga.
Il avait tué son jeune frère, et avait assassiné les familles de sa femme et du mari de sa sœur. On se souvenait donc de lui comme d’un roi-démon cruel et impitoyable, mais il pouvait être terriblement doux avec ses proches. Il avait pardonné plusieurs fois à son petit frère et à Matsunaga Hisahide de l’avoir trahi, et avait offert à ce même Hisahide et à Azai Nagamasa l’opportunité de se rendre jusqu’au dernier moment.
En fin de compte, Nobunaga avait dominé l’époque en détruisant tous ceux qu’il avait à détruire, mais il avait un cœur fort, et ce n’est pas comme s’il n’avait pas lutté avec cela.
« Le fait de devoir le faire malgré les objections de sa petite sœur devrait lui mettre une certaine pression psychologique, ne serait-ce qu’un peu. Si nous devons faire face à cet homme, je pense que nous allons devoir accumuler tous les petits avantages possibles, » déclarai-je.
« C’est une question difficile… Mais penses-tu que Yuriga s’opposera vraiment à lui pour nous ? » demanda Liscia.
« C’est bien là le problème, n’est-ce pas ? Qu’est-ce que tu en penses, Hakuya ? » demandai-je.
« C’est difficile à le dire à ce stade, » déclaré Hakuya, en haussant les épaules comme s’il abandonnait. « En fin de compte, cela dépendra de qui, selon Yuriga, gagnera dans un conflit entre vous et Sire Fuuga. Si elle décide que Sire Fuuga gagnerait, nous ne pourrons pas l’utiliser comme une contrainte pour lui. Si elle pense que vous gagneriez, ou peut-être que le Seigneur Fuuga aurait des difficultés à gagner, je m’attends à ce qu’elle fasse tout ce qu’elle peut pour l’en empêcher. Cette dernière solution serait bonne pour nous, mais… »
« C’est le résultat idéal… mais il faudrait lui montrer une certaine part de notre pouvoir réel pour la convaincre que notre pays est fort, non ? Il est évidemment encore trop tôt pour lui montrer quelque chose comme l’Hiryuu, » déclarai-je.
« Oui. C’est pourquoi nous devrions la faire participer à des événements comme ce symposium. Montrer que nous étudions des domaines que d’autres pays n’étudient pas est un signal facilement compréhensible que nous sommes en avance sur les autres nations sur le plan académique, » déclara Hakuya.
« Nous devrions lui montrer de manière proactive ce que nous pouvons, hein… ? » déclarai-je.
Eh bien… je suppose que c’est la seule façon de le faire, pensais-je… Je ne sais pas ce qui va se passer entre nos pays à l’avenir, et je ne peux pas être sûr de la décision que prendra Yuriga le moment venu. Si possible, j’aimerais qu’elle nous considère comme un pays avec lequel ils ne veulent pas se battre…
« Tout ce qu’on peut faire, c’est regarder et attendre pour le moment. Nous devrons lui montrer ce que nous pouvons nous permettre afin de lui faire voir la puissance de ce pays, et la surveiller. Hakuya, toi aussi tu gardes les yeux ouverts, » déclarai-je.
« J’en ai l’intention, bien sûr, » répondit-il.
Lorsque Hakuya s’était incliné, Liscia avait poussé un soupir et avait dit. « La fille est intelligente, mais nous devons espérer qu’elle le dissuadera de le faire. »
J’étais d’accord avec Liscia du fond du cœur.
L’après-midi, quelques jours après que les plus hautes autorités du pays aient eu cette discussion.
Ayant terminé ses cours à l’Académie Royale, Tomoe et les autres élèves s’étaient rassemblés dans le grand auditorium après la fin des cours. Ils étaient là pour nettoyer et apporter des sièges en vue du symposium de monstrologie qui se tiendra demain. Ce monde n’avait pas encore de chaises pliantes, alors ils avaient dû apporter celles en bois qu’ils utilisaient habituellement en classe.
Plus tard, lorsqu’il en avait entendu parler, Souma avait envisagé de développer une chaise pliante. Leur production en série serait coûteuse, et ils se débrouillaient déjà assez bien pour déplacer les sièges en bois qu’ils avaient déjà, alors il avait décidé de les reporter.
Pendant que Tomoe installait les chaises en rangées bien ordonnées sur le tapis, Lucy était arrivée avec une chaise sous chaque bras et les avait posées avec un « Ouff ! » Puis elle s’était assise elle-même sur une chaise.
« Augh, c’est épuisant. » Lucy soupira, en penchant la tête. « Les chaises sont lourdes et elles se trouvent trop loin. »
« Ça va, Lucy ? » demanda Tomoe.
« Je ne sais pas si c’est un symposium, ou un symbole, ou quoi que ce soit d’autre, mais pourquoi font-ils travailler une jeune fille frêle comme ça ? Et où sont Yuriga et Ichiha dans un moment pareil ? » demanda Lucy.
« Ils ont tous deux des clubs. Le professeur a dit que c’est prioritaire, et Ichiha est dans la Société de Recherches sur les Monstres, il doit donc être particulièrement occupé, » répondit Tomoe.
« Je comprends, mais ça me tue d’aller et venir encore et encore pour avoir des chaises. Je n’ai jamais porté quelque chose de plus lourd qu’un sac de blé avant, tu sais ? » déclara Lucy.
« C’est assez lourd, n’est-ce pas ? Plus qu’une chaise, je dirais, » Tomoe avait fait cette remarque avec un sourire ironique, et Lucy pencha la tête sur le côté.
« Si l’on ajoute à cela le fait qu’elles sont difficiles à transporter, n’est-ce pas à peu près la même chose ? Et toi, Tomie ? » demanda Lucy.
« Moi ? Hmm… Je n’ai pas porté beaucoup de choses lourdes, mais j’en ai peut-être tiré quelques unes, » répondit Tomoe.
« Tu les as tirés ? » demanda Lucy.
« Quand j’étais une réfugiée, nous avons tous tiré une lourde charrette ensemble, » répondit Tomoe.
« … »
La facilité avec laquelle cette histoire émotionnellement éprouvante était sortie avait laissé Lucy sans voix. Cela lui avait rappelé une fois de plus que Tomoe avait vécu une vie assez étrange pendant ses douze ans, et elle avait joint les mains et s’était incliné pour s’excuser.
« Aïe, je suis désolée, » déclara Lucy.
« Ahaha... Ne le sois pas. Avec M. Jirukoma et Mme Komain à la tête des réfugiés, nous n’avons pratiquement perdu personne, et nous avons été bien traités depuis notre arrivée au Royaume. Les choses étaient difficiles à l’époque, mais ce n’est pas un souvenir si désagréable que ça, » répondit Tomoe.
Dans le cas de Tomoe, c’était en grande partie parce que sa famille était là avec elle. De nombreux réfugiés avaient été séparés de leur famille, mais comme les kobolds l’avaient épargnée, Tomoe avait pu évacuer.
Une fois arrivés au Royaume, le roi Albert, aimable, mais indécis, leur avait donné l’approbation tacite de rester avec en plus, un petit soutien. Puis, une fois que Souma avait pris le trône, Tomoe était devenue la sœur adoptive de Liscia, et les réfugiés avaient été acceptés comme citoyens du Royaume.
La gentillesse de nombreuses personnes lui avait permis d’être là où elle se trouvait maintenant. Cette pensée lui avait réchauffé le cœur. Ce furent des jours d’incertitude, où elle ne savait jamais ce que le lendemain lui apporterait, et elle ne voulait pas y retourner de son plein gré, mais rien en eux ne rendait douloureux et triste le simple fait de se souvenir d’eux.
Tout ce que cela lui avait fait penser, c’est : « Oh, oui, c’est une chose qui s’est produite, n’est-ce pas ? »
J’espère pouvoir un jour rendre la pareille à la gentillesse dont j’ai été témoin. Aux anciens réfugiés, et aussi aux kobolds du nord. La première étape pour y parvenir devait être le symposium de monstrologie qui se tiendra demain.
Alors que Tomoe y pensait, Lucy s’était soudain écriée, surprise : « Wôw ! Combien de ces choses peux-tu transporter, Velie ? »
Lorsqu’elle avait regardé, Velza avait apporté une pile de cinq chaises. Les sièges en bois n’étaient pas conçus pour être empilés, de sorte que la pile était gênante et tremblait. Pourtant, Velza la portait avec un regard froid.
« Ce n’est rien. J’ai encore un long chemin à parcourir avant de ressembler à Lady Aisha, » répondit Velza.
« Non, non, pourquoi te compares-tu à la personne la plus forte du royaume, la Reine Kochiji ! » (Bop !)
« Aïe… ! » Lucy avait donné une frappe à Velza avec le dos de la main pour un effet comique, et l’impact avait fait encore plus vaciller sa tour de chaises.
« « Wôw ! » »
Tandis que Tomoe et Lucy criaient de surprise, Velza se concentrait.
« Oof, là… »
La tour tremblait d’un côté à l’autre, mais Velza avait réussi à l’équilibrer et à empêcher son effondrement, face à quoi Tomoe et Lucy s’étaient mises à applaudir. Lorsque les tremblements s’étaient complètement calmés, Velza avait déposé la tour de chaises, et les trois enfants l’avaient démontée ensemble.
« Oh, c’est vrai, je crois que vous disiez quelque chose sur les clubs tout à l’heure ? » demanda Velza en alignant les chaises.
« Oh, oui, c’est vrai. Ichiha et Yuriga sont tous les deux dans des clubs, » répondit Tomoe. « Tu ne vas pas en rejoindre un, Velza ? Tu es vraiment athlétique, alors je parie que tu as reçu des invitations de tous ces clubs. »
« Il est vrai que je bouge bien, mais… Je ne suis pas si intéressée. Je pense que je préfère m’inscrire au Club de cuisine, » répondit Velza.
« Hein ? La cuisine ? » demanda Tomoe.
« Oui. Si je considère mon avenir, je crois que cela sera nécessaire, » déclara Velza, ses joues rougissant un peu.
En y repensant, Velza a dit qu’elle était venue dans cette académie pour être en mesure de servir une certaine personne. D’après son comportement, est-ce quelqu’un qu’elle aime ?
Tomoe avait déjà douze ans. C’est le moment de la vie où l’on s’intéresse pour la première fois à l’amour. Elle voulait en entendre parler en détail quand elle en aurait l’occasion.
Mais Velza a rejoint le club de cuisine, hein… ? Si l’on considère la fixation qu’elle avait montrée sur la nourriture servie au salon de fruits que la famille de Lucy exploitait, cela pourrait être plus naturel que vous ne le pensez.
« N’as-tu pas toi-même envisagé de rejoindre quelque chose, Tomoe ? » demanda Velza.
« Hmm… Ça ne me dérangerait pas de rejoindre Ichiha dans la Société de Recherches sur les Monstres, mais… Et toi, Lu ? Tu ne vas pas rejoindre un club ? » demanda Tomoe.
« S’il y avait un fan-club de Lady Roroa, je m’y joindrais, » répondit Lucy.
« Fan-clubs ? Il y a des fan-clubs !? » s’exclama Tomoe.
« Pas possible. C’est pourquoi je pense en faire un moi-même. Lady Roroa est populaire, donc je pense que je peux obtenir des membres, et si nous en faisons quelque chose de commercial, à des fins publiques, je pense que je peux le faire approuver. Ahh… Grande Soeur Roroa, » déclara Lucy.
Un regard de béatitude avait traversé le visage de Lucy. Il semblait que la rencontre en personne dans le château n’avait fait qu’intensifier son amour pour Roroa.
« Ahh, si seulement je pouvais vous revoir. Lady Roroa, êtes-vous la merveilleuse déesse mère ? » demanda Lucy.
« « C’est la reine ! Et attends, elle est à égalité cette fois-ci !? » »
Tomoe et Velza ne pouvaient que sourire ironiquement.
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Partie 4
« Oh ! C’est Yurie là-bas, n’est-ce pas ? »
« Ah ! Tu as raison. »
Une fois la préparation du grand auditorium terminée, les étudiants se dispersèrent. Ils discutaient de l’endroit où ils pourraient passer après l’école lorsqu’ils passèrent devant l’un des terrains de sport de l’académie. Sur le terrain, le trio avait aperçu Yuriga avec son club. Ils avaient été divisés en deux équipes, utilisant leurs pieds pour essayer de prendre le contrôle du ballon. À première vue, cela ressemblait à du football, mais si c’était le cas, les bruits qu’ils entendaient seraient étranges.
Shoom… ! Whoosh... ! Shooooom !
Brrrrrr… Kaboom !
Il était difficile d’imaginer qu’ils jouaient au football à cause de ces bruits. Si Souma était là, il se demanderait. « Est-ce une usine ou la piste d’un aéroport ? »
Il fallait s’y attendre, car ils ne jouaient pas au football. Ce qu’ils pratiquaient était un nouveau sport, créé en fusionnant les règles du sport appelé soccer que Souma leur avait apporté avec une nouvelle règle permettant toute magie non offensive.
Il avait été judicieusement baptisé Magic Soccer.
« Yuriga, j’y vais ! » Une joueuse Dragonewt avait lancé le ballon très haut dans les airs.
Elle leur semblait familière, et elle l’était. C’était la doyenne qui avait poursuivi Yuriga dans les airs pour la recruter dans un club le jour de la cérémonie d’entrée. Yuriga s’était alors échappée, mais il semblait qu’elle avait fini par céder à l’enthousiasme de l’autre fille et qu’elle l’ait rejointe.
La balle avait volé à une hauteur que même un amateur pourrait juger trop élevée (environ dix mètres en l’air), et Yuriga avait continué à la suivre, profitant de sa capacité à voler. Puis, se mettant en position pour un coup de pied au-dessus de la tête, elle avait enroulé le vent autour d’elle.
« Goooooooo ! »
Shoooom !
Le tir puissant de Yuriga s’était envolé droit vers le but.
« Je ne vous laisserai pas faire ! » La gardienne de but avait ouvert ses mains en grand et le sol devant le but s’était soulevé, prenant la forme d’une poupée de terre.
La fille qui était gardienne de but utilisait la magie de la terre, comme Genia, et avait invoqué un golem de trois mètres de haut. Non, il avait été étalé pour mieux protéger le but, donc il ressemblait moins à un golem, et plus à la créature de Nurikabe du folklore japonais.
La balle, enveloppée par le vent, avait frappé le golem Nurikabe. Quand il l’avait fait…
« Passe au travers ! » Yuriga hurla, et le golem Nurikabe se fissura.
« Pas possible !? Mon golem ! »
Le tir avait traversé le golem Nurikabe et s’était écrasé dans le filet. Un coup de sifflet avait été fait pour indiquer qu’un but avait été marqué, et l’équipe qui l’avait marqué avait fêté ce but en tapant dans les mains.
« La mêlée est terminée ! Faites une pause ! » Un long coup de sifflet retentit alors qu’un membre du club, une dragonewt avait fait l’annonce, et les autres membres commencèrent à se disperser.
Yuriga, qui avait été prise à partie parce qu’elle avait marqué le point, avait été libérée et s’était retournée lorsqu’elle avait remarqué que Tomoe et les autres étudiants la regardaient.
« Eh bien, si ce n’est pas Tomoe et son gang. Quoi, l’auditorium est déjà installé ? » demanda Yuriga.
« Oui. Ce tir que tu as fait était cool, » déclara Tomoe.
« Bien sûr qu’il l’était. » Yuriga avait gonflé sa poitrine encore sous-développée avec fierté. En regardant vers l’auditorium, elle avait dit. « À propos du symposium de demain. Je peux aller voir, n’est-ce pas ? »
« Hein… ? Oh, oui. Les sièges du public sont ouverts au public. Mais Ichiha et moi allons tous les deux être dans les sièges des personnes impliquées dans le symposium, donc tu regarderas ça de ton côté. »
« C’est bien. Mais je suis sûre qu’il y aura aussi des gens qui me regarderont. »
« Je le pense aussi, mais… »
Yuriga avait mis ses mains sur ses hanches, en riant comme si elle venait de se rappeler quelque chose. « Quand nous sommes allés au salon de fruits de Lucy, le vendeur de glace qui est venu réapprovisionner la glacière chantait quelque chose. C’est à cause de cette bataille de chants que vous avez menés, n’est-ce pas ? »
« … »
Elle était tout à fait dans le coup, et Tomoe ne savait pas comment réagir quand la question s’était posée si soudainement.
La Société des chansons de travail avait reçu le soutien de l’État après l’escarmouche expérimentale appelée « bataille de chants », et une partie de ses recherches sur l’amélioration de la magie utilisée dans la vie quotidienne avait été rendue publique. Soit dit en passant, la chanson que le vendeur de glace avait chantée provenait de l’ancien monde de Souma et donnait envie de construire un bonhomme de neige quand on l’entendait.
« Même lorsque les politiques de ton frère semblent inutiles, elles ont un certain sens en eux. Maintenant que je le sais, je ne peux pas me permettre de détourner le regard, » proclamait Yuriga alors que Tomoe restait sans voix.
Euh, oh. Je ne peux pas laisser des choses comme ça me secouer. Reprenant ses esprits, Tomoe secoua la tête. Je dois faire ce que Juna m’a dit. Dans des moments comme ça, je…
« Souris toujours, pour que ton adversaire ne sache pas ce que tu ressens vraiment. Agis toujours avec sang-froid, et ne laisse que celui que tu aimes voir tes faiblesses. » C’est ce que Juna, sa vision d’une femme idéale, lui avait appris.
Tomoe avait souri à Yuriga et avait dit. « Je ne sais pas de quoi tu parles. »
« … À quoi sert ce sourire collé ? » demanda Yuriga.
« Oh, rien, vraiment, » répliqua Tomoe.
« Tu m’énerves un peu… De toute façon, je regarderai depuis les sièges des invités demain, » déclara Yuriga.
« Bien sûr, fait comme tu le veux, » déclara Tomoe.
Yuriga avait regardé d’un air douteux la Tomoe souriante. Le sourire et le regard s’étaient heurtés.
« Qu… Quoi, quoi ? Qu’est-ce qui se passe ici ? » bégaya Lucy.
« … Moi aussi, j’ai été stupéfait pendant une seconde, » marmonna Velza. « J’ai besoin de m’entraîner davantage. »
Le malaise qui régnait entre ces deux personnes qui, en apparence, ne faisaient que bavarder paisiblement avait donné des frissons à Lucy et Velza.
☆☆☆
Partie 5
C’était aujourd’hui le jour du symposium de monstrologie, et l’auditorium de l’Académie royale était bondé. Le thème s’était limité à la monstrologie, mais des experts de différents domaines avaient été appelés à donner leur avis, si bien qu’un assez grand nombre de personnes étaient réunies. En outre, il y avait dix fois plus de spectateurs qui voulaient regarder et écouter, c’était donc probablement le plus grand rassemblement que cet auditorium n’avait jamais organisé.
En ce qui concerne la disposition des places, les principaux invités de cet événement, les auteurs de l’Encyclopédie des Monstres, Hakuya et Ichiha, étaient assis à une table au centre de la scène. Le chef de la Société de Recherches sur les Monstres, un jeune homme pétrifié par la nervosité, était également assis avec eux. Il avait été amené ici uniquement parce qu’il dirigeait le club auquel Ichiha appartenait, et je devais me sentir mal pour le type qui était mis sous les projecteurs comme ça.
À la table de droite se trouvaient les membres de la famille royale : Liscia, Roroa, Tomoe et moi. La table de gauche était occupée par le directeur de l’Académie, Ginger, le directeur de l’école professionnelle de Ginger, Kuu, le fils du chef de la République, et Souji, un évêque orthodoxe lunaire. En raison de la présence des VIP sur la scène, Aisha et la servante de Kuu, Leporina, étaient là en tant que gardes du corps, tandis que Carla et la femme de Ginger, Sandria, étaient là pour aider à d’autres tâches.
Il y avait des rangées de longues tables devant la scène, et les chercheurs en Monstrologie et de tous les autres domaines étaient rassemblés autour. Parmi eux, il y avait des visages familiers comme Genia la Surscientifique, et Merula la haute elfe. Ce symposium allait être essentiellement un échange d’opinions entre nous sur la scène et les chercheurs et experts qui se trouvaient aux tables devant nous.
De l’autre côté des chercheurs et des experts, il y avait des chaises remplies de ceux qui étaient venus observer. Étant donné que cette réunion se tenait à l’Académie royale, un grand pourcentage d’entre eux étaient des étudiants. Yuriga était probablement là aussi. Le symposium était également retransmis à l’impératrice Maria de l’Empire par l’intermédiaire du Joyau de Diffusion de la Voix.
Les préparatifs étant presque terminés, j’avais parlé à Liscia qui était assise à côté de moi.
« J’ai l’impression que cela fait longtemps que je n’ai pas été assis à côté de toi lors d’une cérémonie officielle, » déclarai-je.
« Oui, je dois remercier maman d’avoir accepté de surveiller Cian et Kazuha, » répondit Liscia avec un sourire.
Les enfants étaient surveillés par Lady Elisha, qui nous aidait souvent pour les élever, et par Sire Albert, qui était venu au château pour voir le visage de ses petits-enfants pour la première fois depuis longtemps. Ils nous aidaient toujours.
De l’autre côté de Liscia, Roroa avait affiché un air grincheux sur le visage. « Hé, chéri, je suis là aussi, tu sais ? »
« Oui, je compte aussi sur toi aujourd’hui, Roroa, » avais-je dit en lui caressant les cheveux. « Je pense que ton domaine d’expertise va probablement être abordé. »
« Nyahaha, tu peux me laisser faire. » Roroa avait souri en gonflant sa poitrine avec fierté.
OK… On dirait que tout va bien, alors je dirais qu’il est temps de mettre le spectacle en route.
Je m’étais levé et j’avais marché vers le lutrin au centre de la scène. Au même moment, tous les gens réunis s’étaient levés et avaient baissé la tête devant moi. Ils ne pouvaient pas après tout s’asseoir alors que leur roi était debout.
« Repos, tout le monde. » J’avais commencé par leur faire lever la tête. « Merci à tous d’être venus à ce symposium de monstrologie. »
Comme il y avait tant de personnes de différentes classes et positions réunies, je m’étais dit qu’il était plus efficace pour moi, la personne la plus haut placée dans ce pays, de faire l’animation et de diriger le spectacle. C’était aussi la première fois que nous le faisions, donc c’était probablement bien.
« Tout d’abord, j’aimerais vous demander à tous de vous asseoir et de regarder la couverture des documents que vous trouverez devant vous. »
Maintenant que tout le monde était assis à sa place, j’étais passé à l’explication de ce symposium une fois de plus.
« Le thème de ce symposium est donc “Les monstres”. Les monstres du Domaine du Seigneur-Démon qui ont attaqué en grand nombre et détruit les terres du nord. Ainsi que les monstres qui vivent dans les donjons, apparaissant parfois à la surface et menaçant la zone qui les entoure. Les monstres sont une menace pour l’humanité, mais il est très important de les étudier si nous voulons protéger nos vies et nos biens. Je pense que vous savez tous que des recherches considérables sont actuellement menées sur les monstres dans mon pays. »
J’avais fait un geste pour qu’Ichiha et Hakuya se lèvent. Hakuya avait baissé la tête, et en le voyant faire, Ichiha s’était empressé de faire de même.
« C’est cette encyclopédie des monstres, écrite par Sire Ichiha Chima, un étudiant en échange du Duché de Chima, ainsi que par notre propre Premier ministre Hakuya, qui en sont à l’origine. Je suis sûr que tout le monde ici, intéressé par les monstres comme vous tous, l’a déjà lue. »
Je pouvais voir les chercheurs hocher la tête. C’était leur livre favori pour eux, et ceux qui ne l’avaient pas lu auraient tout aussi bien pu vivre sous un rocher.
Une fois que Hakuya et Ichiha avaient relevé la tête et s’étaient assis à nouveau, j’avais continué.
« Moi-même, j’ai vu des monstres à de multiples reprises. Des monstres qui ont débordé d’un donjon de la République de Turgis, à la grande armée de monstres qui s’est élancée vers l’Union des nations de l’Est depuis le Domaine du Seigneur-Démon. C’était des êtres terrifiants qui dévoraient les gens. En même temps, je sentais qu’ils étaient des créatures pleines de mystère. »
J’avais fait une petite pause et j’avais regardé le public.
« Que sont les monstres ? Pourquoi sont-ils nés ? Pourquoi s’attaquent-ils aux gens et aux autres créatures vivantes ? Se présentent-ils toujours sous des formes aussi aberrantes ? Qu’est-ce qui les différencie des démons dont on dit qu’ils vivent au fond du Domaine du Seigneur-Démon ? »
J’avais parlé avec force, en frappant des mains sur le lutrin.
« C’est l’Encyclopédie des Monstres qui m’a permis de comprendre un certain nombre de ces mystères. Qu’est-ce qu’un monstre ? Si ce mystère est résolu, nous pouvons les traiter plus efficacement et réduire considérablement la menace qui pèse sur les gens. C’est un thème pour lequel nous devrions mettre les ressources de la nation derrière cette étude. J’espère que ce symposium constituera un forum animé pour discuter de l’orientation que devrait prendre la recherche. »
Un petit nombre de personnes avaient commencé à jeter un regard de côté sur les autres, ou à chuchoter entre elles.
« C’est la première fois, donc nous nous sentons encore dans le noir. Ce n’est pas comme si toutes les méthodes d’étude des monstres avaient déjà été connues. C’est pourquoi j’ai fait appel à divers experts et chercheurs de premier plan. Il y a des moments où la perspective d’un domaine de recherche complètement différent peut aider à la découverte d’une nouvelle approche. Dans ce domaine en particulier, il est également nécessaire de prendre en compte les aspects sécuritaires et éthiques de votre travail. À cette fin, je souhaite encourager un échange d’opinions actif. Peu à peu, je souhaite que nous trouvions ensemble le chemin à suivre. Ceci étant dit, je conclus ici mon discours d’ouverture. »
Quand j’avais fini, la salle avait éclaté sous les applaudissements.
Une fois qu’ils avaient fini avec ça, j’avais tapé dans mes mains.
« Cela étant dit, allons droit au but. Nous commencerons par une conférence de Sire Ichiha et Hakuya sur le thème “Les êtres connus sous le nom de monstres”. Ensuite, il y aura une période de questions et réponses, alors gardez vos questions pour la fin. Maintenant, Sire Ichiha, Hakuya, prenez la suite. »
« Oui, monsieur. Compris. » Hakuya s’inclina poliment, tandis qu’Ichiha répondit par un « O-Oui » raide.
J’étais retourné à mon siège et m’étais assis alors qu’ils prenaient ma place au pupitre.
« Penses-tu qu’Ichiha tiendra le coup ? » demanda Tomoe, le visage plein d’inquiétude. « Il a l’air tendu. »
« Je sais qu’il n’est pas le meilleur pour se tenir devant les gens, mais si les choses tournent mal, je suis sûr que Hakuya le remplacera, » avais-je dit. « Cependant, je pense qu’il est temps qu’il le renverse… »
« Le renverse ? Qu’est-il censé renverser ? » demanda Tomoe.
J’avais regardé Tomoe avec un sérieux absolu et j’avais dit. « L’opinion courante est que lui, le 8e enfant de la Maison de Chima, n’est qu’un figurant. »
☆☆☆
Partie 6
Un peu avant le début du symposium, Ichiha se tenait dans les coulisses de la scène de l’auditorium, l’air tendu. Il ne pouvait pas croire qu’il se trouverait sur une scène comme celle-ci.
Pendant son séjour à la Maison de Chima, son corps avait été faible et éclipsé par ses frères et sœurs — il ne s’était jamais distingué. Beaucoup d’adultes s’étaient moqués du fait qu’il soit le huitième frère étrange de Chima, alors qu’il n’était même pas compté parmi eux. C’était Mutsumi qui avait toujours essayé d’encourager Ichiha.
« Ne t’inquiète pas. Je suis sûre que tu deviendras une personne extraordinaire un jour, Ichiha. »
Les mots que sa sœur lui avait adressés ce jour-là avaient apporté à Ichiha un soutien émotionnel. Cependant, d’autres mots l’avaient tourmenté. « Il a mené toutes ces troupes, et tout ce qu’il a obtenu pour cela, c’est le plus jeune frère. Ça ne vaut pas la peine d’avoir fait tout ça. »
Les ricanements et les railleries de ce jour-là étaient revenus à Ichiha. Lorsque Souma l’avait invité au royaume, les généraux de l’Union des nations de l’Est avaient rabaissé Ichiha afin de faire l’éloge de Souma. « Qu’ils disent ce qu’ils veulent, » avait-il dit, mais ces mots avaient été trop durs pour un Ichiha de dix ans.
Est-ce que je… mérite qu’il soit aussi gentil ? Le fait que sa vie dans le royaume était si amusante ne lui avait fait que penser davantage à ça.
Tout d’abord, depuis qu’il était arrivé au royaume, il se sentait en super bonne santé. Dans le duché de Chima, il passait souvent la journée au lit, mais il ne l’avait pas fait une seule fois depuis son arrivée ici. À ce propos, le docteur Hilde qui l’avait examiné avait déclaré. « Le gamin a une maladie respiratoire. L’air du nord est mauvais à cause du désert et de la proximité du Domaine du Seigneur-Démon. S’il vit dans un endroit où la qualité de l’air est relativement bonne, son état devrait s’améliorer à mesure qu’il grandit. »
Le simple fait qu’on lui ait dit qu’il ne serait pas frêle pour toujours avait permis à Ichiha de se sentir beaucoup mieux. De plus, les gens du royaume étaient gentils avec lui. Tomoe était particulièrement proche depuis qu’ils s’étaient rencontrés dans le duché de Chima, et sa famille, la famille royale, était également bonne avec lui.
Il avait rencontré un professeur qu’il pouvait respecter, Hakuya. Et, avec Yuriga, Velza et Lucy, il avait maintenant plus d’amis dans sa propre tranche d’âge. Enfin, en écrivant l’encyclopédie des monstres avec Hakuya, il avait été loué par les gens pour la première fois. Le directeur de la Société de Recherche sur les Monstres avait même pleuré de joie lorsqu’il avait rejoint le groupe. Il n’aurait jamais pu imaginer qu’une telle chose puisse se produire à l’époque où il était dans le duché de Chima.
Aujourd’hui, il allait faire une grande présentation commune sur le thème de la recherche sur les monstres, devant un grand nombre de personnes. Il l’avait préparé avec les membres de la Société de Recherche sur les Monstres.
« I-Ichiha, tout va bien se passer. Nous serons à vos côtés. » Le président de la société était à ses côtés, l’air encore plus tendu qu’Ichiha lui-même.
La seule pression sur Ichiha était de savoir si sa présentation était un succès ou non. Pour le président, cependant, la présentation devant les membres de la famille royale et les principaux vassaux du pays était un événement majeur dans sa vie, et qui pourrait ne jamais se reproduire. Il était tout à fait naturel qu’il soit nerveux. Mais comme Ichiha interagissait quotidiennement avec Souma et les autres membres de la royauté de manière amicale, il était peu affecté par ça.
« C’est bon. Sa Majesté ne s’énervera pas si nous bousculons un peu nos lignes de texte, » déclara Ichiha.
Alors qu’Ichiha essayait de rassurer le président, quelqu’un lui avait tapé sur l’épaule. Lorsqu’il s’était retourné pour voir qui c’était, Hakuya se tenait là avec un sourire faible, mais paisible sur le visage.
« … Monsieur Hakuya ? » demanda Ichiha.
« Vos épaules sont trop raides, elles aussi. Vous feriez bien de vous détendre davantage, » déclara Hakuya.
« D’accord… Je le sais, mais… Je veux faire de mon mieux pour vous, et Sire Souma, et Tomoe, et tous ceux qui ont tant fait pour moi, » répondit Ichiha.
« Je suis heureux de vous entendre dire cela, mais vous vous mettez trop de pression, » répondit Hakuya.
Hakuya s’était déplacé derrière Ichiha, et avait commencé à lui frotter les épaules. Il était chatouilleux et avait baissé la tête pendant une seconde, mais il ne pouvait pas se débarrasser de Hakuya, alors il s’était assis et l’avait accepté.
Alors qu’Ichiha avait l’air détendu, Hakuya lui avait demandé. « Sire Ichiha, vous aimez faire des recherches sur les monstres, n’est-ce pas ? »
« Hein… ? Oh, oui. Je n’ai fait que les étudier, c’est devenu un hobby. Quand je vois un monstre que je n’ai pas encore vu, je veux le dessiner, » répondit Ichiha.
Le visage d’Ichiha avait rougi de honte, mais Hakuya avait doucement souri.
« Dans ce cas, vous devriez considérer cet endroit comme un lieu où vous pouvez parler de votre hobby. Les gens peuvent parler encore et encore des choses qu’ils aiment, et ils veulent que les personnes à qui ils parlent les aiment aussi, n’est-ce pas ? Je pourrais continuer éternellement à parler de livres, » déclara Hakuya, en posant sa main sur la tête d’Ichiha. « Laissez le succès ou l’échec du symposium hors de votre tête. Vous devriez juste vous amuser, et dire ce que vous voulez dire. Parce que tout le monde est venu vous voir parler. »
« Monsieur Hakuya…, » déclara Ichiha.
« Vous n’êtes encore qu’un enfant, alors laissez les parties compliquées à nous, les adultes… Je crois que j’ai dit quelque chose de similaire à la Petite Sœur il n’y a pas longtemps, » déclara Hakuya.
« Avez-vous aussi dit ça à Tomoe ? » demanda Ichiha.
« Il est courant de vouloir agir avec plus de maturité à son âge. Il n’y a pas lieu de se précipiter. » Hakuya avait tapoté la tête d’Ichiha.
Vous devriez considérer ce site comme un lieu où vous pouvez parler de votre hobby. Amusez-vous, et dites ce que vous voulez dire. Les mots de Hakuya s’étaient infiltrés dans le cœur d’Ichiha. Ne t’inquiète pas, amuse-toi bien…
Ichiha s’était tourné vers l’avant. Il pouvait s’adonner à la recherche de monstres, sans se lasser. C’était ce que signifiait avoir une spécialité. Une spécialité qu’aucun de ses frères et sœurs ne pouvait lui faire concurrence. Même lorsque le moment était venu et qu’il avait pris place à la table du milieu, Ichiha ne baissa plus la tête.
« Maintenant, Sire Ichiha, Hakuya, vous prenez la suite, » leur avait dit Souma après avoir ouvert le symposium. Ichiha s’était levé avec Hakuya et le président.
Debout au pupitre, Ichiha avait gardé la tête haute et avait regardé droit devant lui pendant qu’il parlait. « Je tiens tout d’abord à remercier Sa Majesté de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer ici, ainsi que tous les habitants du Royaume de Friedonia qui sont venus. Je suis Ichiha Chima, un étudiant en échange qui est venu ici depuis le duché de Chima, un pays de l’Union des nations de l’Est. Je suis honoré de pouvoir discuter des monstres avec vous ici aujourd’hui. »
Sa façon de parler avec confiance avait inspiré tous ceux qui s’étaient réunis en ce lieu. Même dans le royaume, il y avait des rumeurs sur le supposé huitième enfant étrange du Duc Chima. Cependant, les personnes réunies dans le public savaient qu’il était l’auteur de l’Encyclopédie des Monstres. Le texte de l’ouvrage précisait clairement que Hakuya avait joué un rôle de soutien. Lorsqu’ils avaient appris que la nouvelle encyclopédie radicale avait été écrite par un garçon de onze ans, le monde de la recherche s’était enthousiasmé.
Extrinsèque et prodigieux.
Il y avait eu un décalage entre ces deux évaluations, et les gens regardaient attentivement pour savoir quel Ichiha était vraiment. À en juger par la manière confiante dont il s’était exprimé ici, c’était probablement le dernier. Après tout, Souma n’était pas resté coincé avec des choses inutiles. Les gens d’ici comprenaient que, fidèle à sa réputation de maniaque du recrutement de personnel compétent, le roi Souma avait vu le potentiel du garçon et l’avait ramené.
« J’étais inquiet avant qu’il ne commence, mais il semble que je n’ai pas eu à l’être, » avait commenté Souma, impressionné par l’audace soudaine d’Ichiha.
« Tu l’as dit. C’est le genre de type qui est vraiment fort. »
« C’est évident. Grand frère, grande sœur, » déclara fièrement Tomoe. « Ichiha est timide, mais c’est parce qu’il manque de confiance en lui. Mais il a un cœur fort et il ne s’enfuira jamais quand ça compte vraiment. Il m’a protégée quand nous étions entourés par des gens effrayants dans le duché de Chima. C’est le vrai Ichiha. »
« « … » »
Lorsque Tomoe parlait de lui comme si c’était elle-même, Souma et Liscia la regardèrent toutes deux avec tendresse. Elles pouvaient sentir une confiance absolue en Ichiha dans ses paroles.
Finalement, Souma avait poussé un petit soupir, et Liscia avait souri.
« … Si papa Inugami pouvait l’entendre, il serait tellement jaloux, » déclara Souma.
« Et toi, Souma, ne l’es-tu pas ? Hee hee, c’est tellement aigre-doux, » déclara Liscia.
« ? ? »
Il y avait un regard vide sur le visage de Tomoe et des points d’interrogation planaient au-dessus de sa tête. Elle n’avait aucune idée de ce dont ils parlaient.
Pendant que la famille Souma discutait, Ichiha faisait encore son discours.
« Le duché de Chima, où je suis né, borde le Domaine du Seigneur-Démon. De ce fait, les incursions aussi importantes que la vague démoniaque sont peu fréquentes, mais de petits groupes de monstres sortent du nord à l’occasion. Bref, c’est une situation où les sujets d’observation sont nombreux. Les monstres étaient abattus par des soldats dirigés par mes frères aînés, qui excellaient dans les arts martiaux, mais je m’asseyais sur les murs, où il n’y avait pas de danger, pour dessiner les monstres que mes frères combattaient. De tous mes frères et sœurs, j’étais le seul à ne pas avoir de compétences notables, alors je voulais fournir le peu d’aide que je pouvais apporter à tout le monde en apprenant à connaître les monstres… »
Ichiha s’était éloigné du pupitre, et son visage s’était éclairci.
« … Bien qu’en cours de route, cela soit devenu un passe-temps. C’est amusant, vous savez ? Si l’un d’entre vous a la chance d’aller dans le nord, essayez de faire un croquis, » continua Ichiha.
Tout le public avait ri. On aurait dit qu’il s’était adapté au point de pouvoir y ajouter une blague de temps en temps.
« La première à me reconnaître pour mes croquis a été ma sœur aînée. La seconde était la petite sœur de Sa Majesté, Tomoe. J’ai pu venir au royaume parce qu’elle m’a présentée à Sa Majesté, et cela m’a permis de rencontrer mon professeur respecté Hakuya. Je la remercie du fond du cœur. » Ichiha regarda Tomoe et sourit.
Ichiha… Les oreilles de loup de Tomoe se dressèrent joyeusement.
Il s’était réjoui de ça et il avait alors saisi l’encyclopédie des monstres qu’il avait écrite.
☆☆☆
Partie 7
« Ce livre a été réalisé à partir de ces croquis, avec l’aide de M. Hakuya. C’est également sur cette base que nous avons compilé l’encyclopédie des monstres. Il s’agit du système d’identification des pièces de monstres. Ah — . »
Ichiha s’était arrêté, avant de continuer à nouveau.
« C’est un peu long, hein. Appelons-le MPI pour faire court. Oui. Afin de vous guider sur la voie de la recherche sur les monstres, j’aimerais donner une conférence sur le MPI. Président de la Société de Recherches sur les Monstres, si vous le voulez bien. »
« Compris, » déclara le président. Il avait l’air un peu sec en raison de la nervosité qui l’assaillait.
Il avait tout de même mis un grand papier sur le tableau mobile qui avait été préparé. Ce papier était rempli de dessins de monstres. Les hommes-lézards que Souma avait rencontrés dans le royaume de Lastania étaient là, ainsi que les monstres serpents ailés qu’ils leur avaient fait manger.
Debout devant les photos, Ichiha avait repris sa présentation.
« Alors que je dessinais des monstres dans le duché de Chima, j’ai réalisé quelque chose. Il y a des monstres qui, bien qu’ils soient de races différentes, partagent exactement les mêmes parties. Depuis que j’ai réalisé cela, j’ai fait très attention aux parties du corps des monstres. »
Il se tenait devant l’image d’un serpent rond et ailé et il avait mis en boîte les ailes et le corps du serpent dans de longues et fines découpes de papier coloré.
« Prenez ce monstre comme exemple. Il n’a pas de nom officiel, mais je pense que le nom temporaire de Sa Majesté, le tsuchinoko volant, me semble approprié, c’est pourquoi je vais l’appeler ainsi. Ce tsuchinoko volant est composé de deux types de parties : la partie du corps du serpent, et la partie des ailes. Les caractéristiques qui le définissent en tant que créature sont son saut puissant et sa capacité à voler, même si ce n’est que pour de courtes distances. De plus… il est comestible. »
Des voix s’étaient fait entendre dans la foule lorsqu’il avait dit qu’il était comestible. La plupart des hommes n’étaient pas encore au courant de ce fait. Même dans cette salle où de nombreux experts s’étaient rassemblés, c’était une déclaration qui avait fait l’effet d’une bombe.
« Dieu nous pardonnerait-il de manger des monstres… ? » On pouvait entendre une voix qui disait cela. C’était apparemment un évêque de l’orthodoxe lunaire.
Certains participants à ce symposium avaient considéré l’étude des monstres avec un sentiment de crise et de tabou. Afin de connaître les réactions que pourrait susciter l’étude des monstres, Souma ne leur avait pas refusé l’entrée.
Les chuchotements s’étaient poursuivis. En voyant qu’Ichiha ne savait pas quoi faire, Hakuya était intervenu et avait dit. « C’est un fait. Il y a un précédent où ils ont mangé des tsuchinoko volantes dans l’Empire. Bien que, de toute évidence, avec des monstres comme le lézard, qui possèdent une partie du corps humain, il était tout simplement impossible d’essayer de les manger. Un tsuchinoko volant est en fait de la viande de serpent avec des ailes de poulet. Il n’est donc pas surprenant qu’il soit comestible. »
Sur les paroles de Hakuya, la pièce s’était un peu calmée. Pensant qu’il en résulterait un scandale, il avait décidé de ne pas inclure le fait que Jeanne, la jeune sœur de l’impératrice Maria, avait été l’une de celles qui l’avaient mangé.
Reprenant là où Hakuya s’était arrêté, Ichiha avait repris la parole. « Je parlerai plus tard de la question des monstres comestibles, alors écoutez-moi bien. Maintenant, en ce qui concerne les ailes du tsuchinoko volant, il est confirmé que d’autres monstres ont exactement les mêmes ailes. Veuillez vous reporter à la page 5 de la brochure qui vous a été fournie. »
Ichiha avait fait une pause pour donner au public le temps de s’orienter avant de poursuivre.
« Le monstre qui s’y trouve est un chien à deux têtes. Nous l’appellerons un orthrus. Maintenant, pour une raison quelconque, lui et le tsuchinoko volant ont la même partie bien qu’ils soient deux types de monstres différents. Quand j’ai remarqué cela, j’ai trié mes croquis en fonction des parties du corps de chaque monstre. C’est alors que j’ai réalisé qu’il y avait un nombre inhabituellement élevé de cas où cette même chose se produisait. L’orthrus a les mêmes ailes que le tsuchinoko volant. Et j’ai aussi trouvé un autre monstre avec le corps d’une tortue et la même tête que cet orthrus. »
Puis Ichiha s’était déplacé pour se mettre devant la photo du lézard.
« Il en est de même pour ce lézard. C’est un monstre que la force de défense nationale de la Friedonie a combattu dans le royaume de Lastania, et nous avons pu obtenir de nombreux échantillons de morts pour la recherche. Le haut du corps de ce lézard ressemble à un humain, mais le visage et le bas du corps présentent des traits typiques d’un grand lézard bipède. Il a des éléments humains, mais sa nature est strictement celle d’une bête sauvage. Il semble qu’il ait autant d’intelligence qu’un shoujou, et qu’il puisse répartir le travail au sein de sa meute, mais pas au point de pouvoir communiquer avec lui. N’est-ce pas, Tomoe ? »
Quand Ichiha le lui demanda, Tomoe s’écria « Oui ! » et elle se leva.
« J’ai vu un lézard captif dans le royaume de Lastania. J’ai la capacité de parler aux animaux… de comprendre leur cœur, mais le lézard ne m’a reconnue que comme “nourriture”… ou comme “proie”. C’était en fait effrayant comme il semblait manquer d’autres sentiments. Normalement, si un animal est capturé, peu importe s’il a faim, je suis capable de ressentir de la colère et du malaise… »
Tomoe avait croisé les bras et serré les coudes en racontant l’événement. Ce souvenir terrifiant d’être considérée comme une proie était gravé dans son esprit.
Ichiha se sentait mal pour elle alors qu’il continuait d’une voix calme. « Merci. Comme Tomoe vient de le dire, il est intéressant de constater qu’ils n’ont pas les émotions qu’ils devraient avoir en tant que créatures vivantes. »
Après avoir vérifié que Tomoe s’était bien assise, Ichiha était revenu sur le sujet.
« Comme vous pouvez le voir, les monstres sont un mélange d’éléments provenant d’une variété de créatures différentes. En outre, il y a les zombies et les squelettes, qui semblent être des créatures existantes qui ont pourri ou se sont squelettisées. Si les monstres nous semblent effrayants par rapport aux animaux sauvages, c’est peut-être parce que, selon nos idées préconçues, ils ont des parties de corps inutiles (parties d’autres créatures), ou des caractéristiques inutiles (pourriture ou squelettisation). »
« C’est logique…, » dit Souma.
Il n’avait pas utilisé une voix forte, mais les mots avaient attiré l’attention de tous puisqu’ils venaient du roi. Lorsque Souma avait réalisé que tout le monde le regardait, il s’était senti mal à l’aise de retarder la présentation.
« … Puis-je dire un mot ? » demanda Souma en levant la main.
« Oui. Allez-y. »
« Être trop formel est trop difficile, alors je vais juste parler de manière décontractée, mais… J’ai rencontré des ogres à quatre jambes dans la République de Turgis. N’est-ce pas, Kuu ? »
Souma se tourna vers Kuu, qui était assis à la table en face de la sienne.
« Oui, » dit Kuu d’un signe de tête. « Ces ogres à fourrure, c’est ça ? Je me souviens qu’ils avaient de grands bras et quatre jambes. Ils sont sortis du donjon, ont attaqué des villages, et ont mangé des gens. Vu leur méchanceté, je parie qu’ils étaient comme les hommes-lézards, et qu’ils ne nous voyaient que comme des proies. »
Kuu exprimait sa haine des ogres au moment même où il parlait, et Souma était d’accord avec lui.
« Quand j’ai vu ces ogres, j’ai pensé que c’était des créatures déformées. En y repensant maintenant, ils avaient des visages d’ogre, mais leurs corps devaient venir d’une autre créature. Le gorille… C’est une grande créature de mon monde qui ressemble au shoujou, et ils lui ressemblaient. » Souma croisa les bras et gémit en parlant. « Quand je me suis souvenu de ça, et que j’ai entendu ce que vous disiez, Sire Ichiha, j’ai eu l’impression de comprendre pourquoi les monstres sont déformés. Je suis désolé. Il semble que j’ai fini par vous interrompre. »
« Non, c’est une histoire précieuse que vous venez de nous raconter. » Ichiha s’était incliné, puis s’était retourné vers la foule et avait repris la parole. « Il est exceptionnellement difficile de classer les monstres qui sont un tel mélange de traits différents. C’est pourquoi M. Hakuya et moi avons créé le MPI, qui classe chaque monstre en ses différentes parties. Je voudrais maintenant demander à M. Hakuya d’en expliquer les raisons. »
« Très bien. »
Ichiha s’était retiré du lutrin, et Hakuya était venu prendre sa place.
« Je suis Hakuya Kwonmin, le Premier ministre de ce pays. L’encyclopédie des monstres est considérée comme étant écrite conjointement par Sire Ichiha et moi-même, mais je l’ai simplement rendue agréable à lire. L’essentiel de la matière se trouve dans les croquis que Sire Ichiha a dessinés, et la méthode selon laquelle ils ont été triés. Je me sens mal de prendre le lutrin quand c’est la situation, mais je voudrais expliquer le MPI au nom de Sire Ichiha. »
En se tournant vers Ichiha, Hakuya avait fait un petit signe de tête.
« Alors… Normalement, les monstres sont comme les mauvais esprits, et à moins qu’ils ne forment des paquets tous de la même sorte, il est difficile de les classer par espèce. Ils se présentent sous une multitude de formes, et il est impossible de les classer en espèces en se basant sur leur corps en entier. Cependant, lorsque j’ai appris l’existence du système de Sire Ichiha, qui trie les monstres en fonction des parties de leur corps, j’ai découvert qu’il pouvait être appliqué de différentes manières. »
Hakuya avait montré les photos de monstres derrière lui.
« Comme vous pouvez le voir, lorsque les monstres ont été triés de cette manière, nous sommes capables de reconnaître ceux qui partagent les mêmes parties. Cela a permis de nommer les monstres. »
« Ohh… » C’était une exclamation emplie de crainte venant un certain nombre de membres de la foule qui s’était fait entendre. Ce devait être ceux qui avaient compris ce que Hakuya essayait de dire.
Cependant, la plupart des spectateurs s’étaient contentés de dire. « Les nommer ? À quoi bon ? » et ils avaient penché la tête sur le côté. Était-il même possible de nommer les monstres alors qu’ils avaient tous l’air si différents ?
Ayant anticipé cette réponse, Hakuya avait expliqué. « Pour que nous puissions reconnaître une chose, nous devons d’abord la nommer. Car lorsque quelque chose a un nom, nous pouvons le prendre comme sujet, et la recherche devient possible. En partageant cela avec d’autres personnes, cela nous permet de diffuser des informations sur le sujet de notre recherche. Pour donner un exemple rapide, en donnant le nom de “individu” à des “individus” et en partageant ce mot avec d’autres, je peux leur communiquer que j’étudie ces individus. »
Il avait commencé à avancer lentement vers un côté de la scène pendant qu’il parlait.
« En revenant un peu en arrière dans notre conversation, nous savons que les monstres ont des formes aberrantes par rapport aux autres créatures. C’est pourquoi il est difficile de transmettre parfaitement à d’autres personnes ce que nous avons vu sur les monstres. Par exemple, qu’en est-il du “tsuchinoko volant” que Sa Majesté a nommé ? Si vous deviez communiquer l’existence de ce monstre aux autres, comment le décririez-vous ? … Je suppose que vous diriez qu’il s’agit d’un monstre à corps gras ressemblant à un serpent, avec des ailes, ou quelque chose de similaire. »
Avec une légère pause, Hakuya s’était retourné et avait commencé à faire les cent pas vers le centre de la scène.
« Ce serait bien si cela suffisait, mais il existe des monstres aux traits variés comme “à des cornes”, “à deux têtes”, “crache du poison”, etc. Nommer toutes ces espèces individuellement et partager une compréhension commune de celles-ci serait une tâche trop ardue. »
S’arrêtant proche de la planche portant les feuilles, il avait fait un geste vers le papier rempli de croquis.
☆☆☆
Partie 8
« Cela constituerait un obstacle au partage d’informations sur les monstres. Si nous les étudiions en détail, ce serait tolérable. Cependant, lorsqu’un groupe de monstres qui sont un mélange de différents traits déborde d’un donjon, il n’y a pas de temps à perdre. Il faut s’occuper de la situation immédiatement. »
Hakuya s’était dirigé vers le lutrin, et avait posé ses mains dessus en soupirant.
« Lorsque les soldats sur place contactent l’armée pour obtenir des renforts, ils n’auront pas le temps de signaler chacun de ces traits. Les informations provenant de la scène se limiteront à : “Il y a une attaque de monstres”, “Il y en a beaucoup dans les environs” et “Ils volent ou ne volent pas”. Si le groupe est composé d’une seule race, comme la meute d’hommes-lézards que nous avons rencontrée dans l’Union des nations de l’Est, leurs capacités sont clairement définies et il devient plus facile de les contrer. »
Il avait levé l’un de ses bras et l’avait pointé vers la planche.
« Les hommes-lézards ne volent pas. Cependant, ils ont la capacité de sauter. Les verts ne crachent pas de feu, mais les rouges demandent de la prudence… C’est plus facile parce que nous pouvons partager ces points communs à leur sujet. En attendant, dans le cas d’une horde composée de nombreuses espèces, ce n’est pas si simple. Tout d’abord, parce qu’il y a des monstres qui prennent des formes déformées, et qu’il est difficile de communiquer les traits de l’ennemi. »
Après ça, Hakuya avait pris une gorgée de l’eau laissée à côté du lutrin et s’était arrêté pour reprendre son souffle.
« Il existe un risque de mauvaise communication des informations. Nous avons négligé de comprendre la situation avant de nous précipiter sur les lieux, et nous n’étions pas équipés pour faire face aux monstres » ou « Nous avons pris trop de temps à nous préparer soigneusement, et les dégâts se sont étendus ». Je peux imaginer que l’une ou l’autre de ces situations se produise. Cependant, si nous identifions les monstres par les parties de leur corps et si nous avons un système de dénomination commune, ce temps peut être considérablement réduit. »
Hakuya avait tapé l’image du tsuchinoko volant avec un pointeur.
« Prenez par exemple ce “tsuchinoko volante”. Nous appellerons “volants” les monstres ayant cette partie d’ailes et “tsuchinokos” ceux ayant cette partie courte et grosse du serpent. De plus, les monstres loups seront appelés “loups”, ceux qui pourrissent seront appelés “zombies”, ceux qui sont venimeux seront appelés “poison”, ceux qui ont des cornes seront appelés “cornus” et ceux qui ont deux parties seront appelés “jumeaux plus le nom de la partie”. »
Il avait fait une nouvelle pause pour permettre au public d’absorber cette information.
« Pensez-y comme si nous appelions déjà les monstres avec des parties humaines “hommes”. Ce faisant, un groupe qui aurait autrefois été signalé comme contenant “des monstres serpents gras avec des cornes et des ailes, des loups à deux têtes avec des crocs venimeux et des hommes-lézards dont le corps est en décomposition” peut maintenant être signalé comme “un groupe de tsuchinoko à cornes, de loups venimeux à deux têtes et d’hommes-lézards zombies”, et la même information sera transmise. Nous savons à l’avance que s’il y a beaucoup de monstres volants, il serait sage d’envoyer du matériel antiaérien, et s’il y a beaucoup de monstres venimeux, nous devrions envoyer des antidotes et du sérum. »
« « « Ohhh ! » » » La foule s’était mise à crier à la suite de la compréhension. Ils avaient finalement compris l’aspect pratique de la chose.
Alors que Hakuya parlait, Souma pensait, Hum… Bien que s’ils utilisaient un système d’écriture qui représentait des idées, et non des sons, on pourrait le comprimer encore plus…
Souma pensait au « kanji », qui existait dans la langue du pays où il avait vécu. Avec le kanji, on pouvait écrire ces trois noms de monstres, 角飛槌蛇, 双頭毒狼, et, 腐蜥蜴人.
Cependant, Souma secoua la tête. Le Continental Standard utilise un alphabet comme l’anglais, donc ça ne va pas être possible, hein… Peut-être que si j’inventais quelque chose comme des pictogrammes… Attends, on ne peut pas les communiquer verbalement.
Pendant que Souma réfléchissait à cela, Hakuya avait poursuivi. « Maintenant, le MPI fait plus que nous permettre de partager des informations en nommant des monstres. C’est une question qui a été soulevée au début, mais elle est également pertinente pour déterminer quels monstres peuvent être mangés. Le tsuchinoko volant est comestible. Cela a été prouvé par les cas où ils ont été mangés dans l’Empire, et consommés par les hommes-lézards. Les tsuchinokos volants contiennent une partie serpent et une partie aile, mais les deux doivent être comestibles. Il est probable que les monstres composés que de parties comestibles soient comestibles. »
Il avait pointé le corps et les ailes de l’esquisse pour mettre l’accent.
« Inversement, s’ils ont, ne serait-ce qu’une seule partie toxique dans leur corps, il y a de fortes chances que ces monstres ne soient pas comestibles. Toutefois, en raison de l’absence d’essais à ce stade, cela reste une simple prédiction. Si nous donnons les monstres que nous tuons à des animaux et que nous continuons à faire des expériences, nous pourrons peut-être arriver à une conclusion plus précise. Je voudrais vous demander à tous de coopérer pour le démontrer. »
Hakuya avait baissé la tête, et la foule avait acquiescé à sa suggestion raisonnable. Le souvenir de la crise alimentaire était encore frais dans ce pays.
« Il y a aussi des monstres avec des parties humaines, et même si ces parties ne sont pas toxiques, je doute que quelqu’un veuille les manger, sauf en cas de crise grave. Cependant, sur la ligne de front, si nos hommes sont affamés pour une raison quelconque, ils pourraient servir de source de nourriture précieuse pour les maintenir en vie. Il est important de se pencher sur les implications juridiques et éthiques de la consommation de viande provenant de monstres ayant des parties semblables à celles des humains. C’est un point sur lequel je voudrais procéder avec prudence, en prenant en considération les opinions de l’État et, bien sûr, des religions qui soutiennent le bien-être spirituel de notre peuple. »
Il y avait eu un bourdonnement de voix étouffées de la foule face aux paroles de Hakuya. Les chercheurs s’étaient penchés vers leurs proches, en chuchotant. « Qu’en pensez-vous ? » Ils échangeaient leurs opinions, mais les personnalités religieuses présentes dans le public avaient des regards sévères.
L’évêque orthodoxe lunaire, qui s’était méfié de l’idée d’étudier les monstres au départ, avait jeté un regard malheureux sur Hakuya. Il avait dû penser qu’il était impensable de consommer des monstres. Même avec les opinions de ceux qui le regardaient si divisées, Hakuya continua à parler.
« Le troisième mérite du MPI est que, en catégorisant les parties du corps, nous pouvons déterminer combien de parties humaines se trouvent dans un sujet. Ce n’est encore qu’une théorie, mais il semble que les monstres ayant plus de parties humaines soient plus intelligents. »
Il avait montré les photos de tsuchinoko et de lézard volant.
« Le tsuchinoko volant agit selon des pensées de type animal. La façon dont il vole pour attaquer sa proie, puis consomme sa viande, est un schéma d’action purement instinctif. Il n’est pas différent de tout autre animal sauvage. Les hommes-lézards que la Force de défense nationale a rencontrés, en revanche, ont démontré leur capacité à apprendre. Lorsque nous avons montré à un lézard comment cuisiner et manger un tsuchinoko volant, ce lézard en a cuisiné et mangé un lorsqu’il était de retour parmi sa meute. Les autres lézards qui l’ont vu l’ont imité, et ils se sont mis à attaquer les tsuchinokos volants. Ce qu’il faut retenir ici, c’est que les hommes-lézards peuvent apprendre. »
Hakuya avait regardé avec insistance alors que toute la salle se taisait.
S’il y avait des monstres ayant la capacité d’apprendre, cela les rendait encore plus dangereux. On disait que les démons qui vivaient à l’extrémité nord du continent étaient intelligents. Et ces mêmes démons avaient autrefois détruit les forces unies de l’humanité qui étaient dirigées par l’Empire.
Les monstres n’étant pas intelligents comme les démons, on supposait qu’ils étaient simples à manipuler. Cependant, si certains de ces monstres avaient la capacité d’apprendre, ils ne pouvaient pas garder une perspective optimiste. Il est plus difficile de faire face à une meute de loups qu’à un grand ours. Si les bêtes étaient intelligentes, cela augmentait la menace pour l’humanité.
Hakuya poursuit. « Le renseignement est le plus grand avantage que nous ayons sur les monstres. S’ils possèdent ne serait-ce qu’une once de ce que nous faisons, c’est une menace pour nous. Mais ne pouvons-nous pas aussi le dire ? Si ceux qui possèdent ne seraient-ce qu’un petit nombre de parties humaines sont intelligents, alors ceux qui en possèdent plus seront plus intelligents. Peut-être au point qu’il leur sera possible de communiquer avec nous. »
Il s’était arrêté là et avait regardé la foule une fois de plus.
« Je suis sûr que vous pouvez tous penser à un groupe auquel cela s’applique… Les démons. »
Avec ses mots, le peuple assemblé avait dégluti une fois de plus. Ils avaient entendu dire que les démons semblaient être intelligents, mais ils ne se croyaient pas si intelligents qu’ils pouvaient communiquer avec les humains. Un ennemi doté d’une intelligence de niveau humain était dangereux. Cela ouvrait également la possibilité d’un dialogue, mais à quelques exceptions notables près, presque personne ne l’avait encore réalisé. Ces exceptions étaient les personnes qui étaient déjà au courant.
« Sommes-nous enfin arrivés jusqu’ici… ? »
« Ça a certainement pris du temps, hein ? »
Sur scène, Souma et Liscia se chuchotèrent. Seules quelques personnes de haut rang de ce pays avaient eu connaissance de la façon dont les Kobolds avaient contacté Tomoe. Mais il n’était pas simple de prouver que la communication avait été rendue possible par le pouvoir de Tomoe, et ils risquaient d’être condamnés par d’autres pays pour avoir été en communication avec des démons.
Si d’autres pays le découvraient et commençaient à essayer de contacter les démons indépendamment, ce serait le chaos. Aucun de ces pays ne pouvait faire la différence entre les monstres et les démons avant ça. Pour cette raison, Souma avait gardé ce fait secret. Mais aujourd’hui, cela avait finalement été révélé à tous.
Avec l’avancement de l’étude des monstres et des démons grâce au MPI d’Ichiha, ils avaient nouvellement présenté le potentiel objectif que le dialogue était possible. Si cela semblait être objectivement le cas, les autres pays ne pouvaient pas les condamner pour cela. Bien sûr, il n’y avait qu’un potentiel à ce stade, mais l’époque rattrapait lentement les faits qu’ils avaient glanés grâce à la capacité de Tomoe.
« Si les démons sont intelligents comme nous, pensez-vous qu’ils peuvent comprendre des monstres qui n’ont qu’une intelligence maigre ? »
Les mots de Hakuya restèrent dans l’air.
« Pensez-y. Si vous étiez entouré sur la route par une meute de chiens sauvages, vous seriez effrayé. Et si vous étiez un démon ? Pensez-vous que vous seriez calme en étant entouré de monstres ? Entre les monstres et les démons, ne pourrait-il pas y avoir un conflit entre eux ? Pensez-vous que les terrifiants démons et les monstres ont établi une relation symbiotique ? Peut-être devons-nous penser aux démons et aux monstres séparément… C’est tout. Merci de nous avoir écoutés. »
Hakuya s’était incliné et s’était retiré. Il n’y avait pas eu d’applaudissements. Tout le monde était occupé à réfléchir aux nouvelles possibilités qui venaient de leur être présentées.
Au milieu du silence, Souma avait commencé à taper des mains. Liscia et Tomoe suivirent, et la foule, ramenée à la raison par ce bruit, applaudit massivement. Lorsque les applaudissements cessèrent, Souma se leva et prit la parole.
« Maintenant que l’explication du système MPI de Sire Ichiha et Hakuya est terminée, je voudrais passer à l’échange d’opinions qui est le but de cet événement. En tenant compte de ce que Sire Ichiha et Hakuya ont expliqué, j’aimerais entendre vos opinions franches sur les monstres, la recherche de monstres et le système MPI. »
Puis, prenant une profonde inspiration, il avait dit. « Si vous avez des questions, veuillez lever vos mains. »
Il y avait eu le bruissement des vêtements. De nombreuses mains se levèrent à l’unisson.