Comment NE pas invoquer un Seigneur-Démon – Tome 9 – Chapitre 1

***

Chapitre 1 : Invasion de l’armée du Seigneur-Démon Suprême

***

Chapitre 1 : Invasion de l’armée du Seigneur-Démon Suprême

Partie 1

« Je m’appelle Émile Bichelberger ! Le plus grand guerrier surhumain de Faltra, avec un niveau de 99 ! » un homme s’était présenté d’une manière imposante.

Cet homme était un guerrier vêtu d’une armure dorée. Bien qu’il soit humain, sa carrure était aussi massive que celle d’un pantarien masculin, et il portait une épée cramoisie sur son dos. Il se rendait à Faltra en provenance d’une autre ville lointaine lorsqu’il était tombé sur une voiture renversée et un nain qui semblait être dans la fleur de l’âge.

« Un aventurier… ? Aidez-nous, s’il vous plaît ! »

« Si c’est de l’aide que vous cherchez…, » Émile tourna son regard vers l’ennemi devant lui.

Ce qui avait renversé la calèche et ce qui était en train de la piétiner, c’était un monstre, un oiseau massif et noir comme un corbeau géant. Il avait l’apparence d’un corbeau, sauf qu’il était assez massif pour avaler en entier un membre adulte des Races, et avait un bec pointu d’une longueur qui éclipsait même une épée longue. C’était une bête qui était issue des Déchus — une bête magique.

Les rumeurs annonçaient que le Seigneur-Démon se trouvant à l’ouest avait ressuscité, et il était de notoriété publique que le réveil d’un Seigneur-Démon signifiait que les bêtes magiques allaient augmenter en nombre. Ils étaient plus forts, plus agressifs et plus dangereux que les bêtes et les monstres normaux que l’on trouvait dans les champs ou les montagnes.

« Faites quelque chose, maître guerrier ! » s’écria le nain. « Ma fille est toujours dans la voiture ! »

« Votre fille, vous dites !? »

Les yeux d’Émile s’étaient élargis. Il dégaina l’épée de son dos, et l’énergie magique contenue dans la lame se transforma en flammes, brûlant son environnement. Il avait tenu l’épée dans une position élevée alors qu’il déclarait. « Je mets les femmes avant tout ! »

« Quoi… !? »

La réalisation soudaine de « Je viens de demander de l’aide à un idiot » avait flotté quelque part dans l’esprit du nain. Émile n’avait pas eu l’air de le remarquer.

« Je vais le dire encore une fois ! J’aime les femmes par-dessus tout ! Émile Bichelberger est le protecteur de toutes les femmes ! » déclara Émile.

Peu importait le nombre de regards exaspérés et perplexes qu’on lui adressait, c’était insignifiant face au noble objectif de cet homme de protéger les femmes.

« Aie pitié de toi, maudit oiseau ! » cria Émile en chargeant sur le corbeau géant.

… Mais le corbeau géant avait simplement déployé ses ailes et s’était hissé vers le haut, décollant de la voiture.

Il s’enfuit !?

Apparemment non, car après avoir volé vers le haut, il était redescendu vers Émile. Les Races avaient de nombreux moyens de combat, mais elles étaient basées sur la prémisse que l’adversaire était au sol. Un adversaire aéroporté était difficile à atteindre, et le corbeau géant prenait de l’élan en plongeant. Cela rendait son attaque égale en force au coup d’un marteau géant descendant d’en haut.

« Craaaaaaaaaaaaaaaaaaaw ! » Le monstre ouvrit la bouche et hurla.

« Trop lent ! » déclara Émile.

Émile avait sauté. Il était vêtu d’une armure qui pesait au moins autant que lui. Une personne normale aurait du mal à se tenir droite sous un tel poids, et un guerrier bien entraîné serait tout au plus capable de faire un bon jogging. Mais Émile avait sauté, atteignant au-dessus de la tête du corbeau géant qui s’abattait sur lui avec une agilité qui faisait honte même aux marcheurs des herbes agiles.

« Prends ça !! » Il avait abaissé son épée de flammes sur la bête magique.

Ne s’attendant apparemment jamais à être attaqué d’en haut, le corbeau géant s’était figé de surprise. Le bruit des os qui se brisaient retentit, et la tête de la bête magique fut rapidement fendue en deux. Une bête vivante versait habituellement du sang, mais les bêtes magiques se dispersaient plutôt en particules de lumière à leur mort.

Une seule frappe d’Émile avait détruit la créature. Il avait atterri sur le sol avec un bruit sourd, ses lèvres se recourbant en un sourire.

« Hehe... Est-ce qu’une autre femme est tombée amoureuse de moi en raison de ma force écrasante ? » demanda Émile.

Émile se retourna vers la calèche, où le nain et sa fille n’avaient qu’un regard de gratitude envers lui…

Mais ils étaient partis. Il n’y avait personne. Émile avait vérifié à l’intérieur de la voiture pour être sûr, mais n’avait pas pu trouver un chaton errant à l’intérieur. Les deux individus s’étaient enfuis pendant qu’il se battait.

En soupirant, Émile sentit ses lèvres se relâcher.

« Oh, mon Dieu, toi, petite fille timide. » Il avait passé ses doigts dans ses cheveux à l’avant. « Dire que tu serais trop timide pour montrer ton visage à l’homme qui t’a plu. »

Émile était extrêmement positif, comme d’habitude…

*

Quand la cloche de midi avait sonné, Émile avait franchi les portes de Faltra. L’atmosphère dans la ville était trop lourde. Il y avait habituellement des échoppes pleines de clients le long de la rue principale, mais à l’heure actuelle, il n’y avait pas un seul résident en vue. La majorité des entreprises avaient été fermées, seuls les auberges et les magasins d’armes étant toujours en activité. Au lieu de civils, il y avait beaucoup de soldats qui se déplaçaient. Beaucoup d’entre eux étaient revêtus d’armures, et lourdement équipés. Certains d’entre eux regardèrent Émile d’un air méfiant, mais il leva simplement la main vers eux d’une manière aussi facile.

« Salut, il y a des festivités aujourd’hui ? » demanda Émile.

« Émile !? Tu es vivant, espèce de chien fou ! Je ne t’ai pas vu depuis des lustres ! » Un petit groupe de soldats s’était rassemblé autour de lui.

Émile était une sorte de célébrité locale à Faltra. C’était peut-être un aventurier, mais il était bien connu des soldats comme un guerrier fiable. Il avait également beaucoup d’amis à cet égard.

« “Vivant”, dites-vous ? Bien sûr que je le suis ! C’est de l’Émile Bichelberger dont vous parlez ici ! Tant qu’il y aura des femmes à défendre dans ce monde, je ne tomberai jamais ! » déclara Émile.

« Tu ne changeras jamais… Mais je suppose que c’est à cause de cette personnalité que tu es revenu dans un moment pareil, hein ? » déclara un autre soldat.

Alors que les soldats semblaient heureux d’être réunis avec un vieil ami, leurs expressions étaient empreintes d’une tristesse tragique. Les choses étaient-elles vraiment si mauvaises ?

« Comment ça se passe à l’Ouest ? » demanda Émile.

« Nous avons décidé d’abandonner le pont Ulug. L’armée du Seigneur-Démon aurait atteint la forêt Mangeuse d’Hommes. D’après les rapports, ils sont nombreux, et il y a aussi beaucoup de bêtes magiques de grande classe. »

« Ohh… Mon bras armé palpite d’excitation, » déclara Émile.

Les paroles d’Émile incitèrent les soldats à échanger des regards.

« J’aimerais avoir un peu de ton optimisme sans fond. Faltra pourrait être détruite cette fois… »

Un autre soldat acquiesça d’un signe de tête grave. « Même avec une barrière qui repousse les Déchus… Il n’y a aucune chance qu’on puisse tenir plus de quelques mois, enfermés en ville. »

« Tout va bien se passer ! » Émile posa des mains encourageantes sur leurs épaules.

« Hein ? Quoi !? As-tu une sorte de plan secret ? Ou est-ce que des renforts de la capitale arrivent !? »

« Je n’ai pas de plan et je doute que des renforts arrivent. C’est le roi de Lyferia, il n’affaiblirait pas ses propres défenses maintenant que le Seigneur-Démon s’est réveillé, » déclara Émile.

« Alors il n’y a rien de bien là-dedans… »

« Mais tout ira bien ! Ayez foi, si ce n’est en rien d’autre que moi ! » déclara Émile.

« Hein ? »

« Je défends avant tout les femmes, mais je vous protégerai tant que j’y suis ! Alors, aussi loin que vos épées vous atteignent, assurez-vous de garder les femmes en sécurité ! » déclara Émile.

« Ahahaha, pendant que tu y es, hein…, » les soldats avaient échangé des sourires exaspérés. « Je me sens bête d’être déprimée à cause de ça quand je te regarde. »

« Être déprimé, c’est de la folie. Mais s’il y a un fait qui ne changera jamais… c’est que nous, mes amis, sommes les protecteurs de toutes les femmes ! » déclara Émile.

« Tu as raison sur ce point ! » Le soldat acquiesça de la tête.

« Bordel de merde ! » Un autre soldat semblait excité. « Faisons-le ! »

Ce zèle s’étendait apparemment à tout le monde autour d’eux.

***

Partie 2

Le même jour, à 11 heures du matin.

« … Allez, Boris, » chuchota Massa, l’ami de l’homme, d’une voix fine. « Tout ira-t-il vraiment bien ici ? »

« Ça devrait l’être. Garde la tête baissée, et cela, quoiqu’il arrive. Et je t’en supplie, ne fais pas de bruit si quelque chose se produit, » déclara Boris.

« Je sais, je sais… C’est pourquoi nous avons choisi les deux chevaux les plus silencieux que nous avons pu trouver. »

Les chevaux des hommes étaient plaqués à l’ombre d’une grange à une courte distance de là. C’était une position qu’on ne pouvait pas voir de l’autre côté de la rivière. Boris et Massa eux-mêmes rampaient contre le sol, se cachant à la vue de tous.

Le pont Ulug… Boris s’était porté volontaire pour partir en éclaireur dans son ancienne zone, ce qui signifiait que lui et son ami d’enfance Massa restaient seuls pendant que les autres battaient en retraite. Leur travail consistait à surveiller les mouvements de l’armée du Seigneur-Démon. Ils seraient forcés de se battre une fois que les Déchus auraient marché sur la ville, mais connaître les effectifs et le potentiel de guerre de l’ennemi pourrait leur donner un certain avantage… ou, au moins, les aider à se préparer mentalement pour ce qui allait venir. Cela soulagerait les soldats de la peur et du stress de ne pas savoir ce qui s’en vient et quand cela pourrait se produire. L’information était cruciale à cette époque.

Cependant, la collecte de ces informations signifiait aussi que l’armée du Seigneur-Démon se trouvait à portée de vue. C’était une perspective exceptionnellement dangereuse.

« Ils arrivent ! » Boris serra la main sur la bouche de Massa, qui allait crier. Les doigts de Boris atteignirent le nez de Massa, et il avait l’air de pleurer. Mais ce n’était pas le moment d’y faire attention.

Les yeux de Boris s’étaient élargis.

L’armée du Seigneur-Démon !

Les silhouettes qui apparaissent de l’autre côté de la rivière étaient sans aucun doute les forces du Seigneur-Démon. La première chose qui était entrée dans leur champ de vision avait été des bêtes magiques géantes en forme de tortues, connues sous le nom de grandes tortues. Il s’agissait essentiellement de forteresses mobiles. Sur leur dos se trouvaient les formes déformées des Déchus.

D’autres Déchus marchaient autour d’eux, semblant exceptionnellement petits par rapport aux grandes tortues, malgré le fait que les Déchus étaient plusieurs fois plus grands qu’un membre des Races. Il y avait aussi d’autres bêtes magiques de taille moyenne qui rôdaient, allant au rythme qu’elles voulaient, sans aucun semblant d’ordre ou de discipline.

Qu’est-ce que c’est ? se demanda Boris. Une boîte ?

Enchaînée au sommet de la carapace de la grande tortue en tête se trouvait ce qui ressemblait à un dé carré à quatre faces. Il était fixé avec quelque chose qui ressemblait aux chaînes utilisées pour ancrer les navires. La boîte était noire, et il y avait des lettres gravées sur sa surface qui faisaient se tortiller l’estomac de Boris juste en les regardant. Les races nourrissaient un certain dégoût instinctif à la vue même du grotesque Déchu, mais c’était encore plus fort que cela…

« Argh…, » Massa frissonna à côté de Boris. « Je me sens mal… »

« Tu ne devrais pas regarder, » déclara Boris.

« … Ça devrait suffire… Retournons en arrière, Boris, » déclara Massa.

« Pas encore. Regarde ailleurs et pense à ta copine en ville, » déclara Boris.

« … Mais je n’en ai pas, » déclara Massa.

« Alors, pense à ta mère, » déclara Boris.

À l’aide du précieux télescope qu’il avait emprunté à son capitaine, Boris regarda au loin. Quelqu’un se tenait devant la boîte. Leur commandant, peut-être ? Est-ce que c’était le Seigneur-Démon Suprême Modinaram… ?

Il ressemble… à un hibou ?

La boîte était fixée sur le dos de la grande tortue. La carapace épaisse était traitée comme le pont d’un navire, avec d’épais pieux enfoncés dedans. Des chaînes étaient reliées à ces piquets et tendues vers la boîte, la liant en place. À chaque pas lent de la grande tortue, les chaînes grinçaient.

La boîte était assez grande pour contenir la maison d’un noble. Si la grande tortue devait être comparée à un château en mouvement, la boîte était comme sa citadelle intérieure.

Devant la boîte se tenait un Déchu avec la tête d’un hibou. Son corps avait des membres, comme les Races, et avait des muscles épais et développés.

« C’est en vue ! Le territoire des Races ! »

Il y avait quelques autres Déchus à genoux près de lui. L’un d’eux était revêtu d’un tissu lâche et d’un chapeau ovale entouré d’une broderie dorée. Ils avaient la tête de grenouille, et même si son corps robuste n’était pas inhabituel chez les Déchus, le fait que son intestin était en saillie l’était certainement.

« Commandant Eulerex, le pont Ulug est en vue. Les armées des Races pourraient très bien être là. »

« Nous allons de l’avant ! » Le hibou déchu répondit en tendant la main. « Et on les écrase ! L’extermination complète des races est la volonté du Seigneur-Démon Suprême Modinaram ! »

« Il sera fait selon votre volonté…, » la tête de grenouille s’était baissée, avait frappé son ventre rond et s’était inclinée.

Le prêtre déchu, Lazpuras. Dans le passé, il avait été un conseiller auprès d’Edelgard, Edelgard, qui avait des liens avec les dragons, mais elle avait depuis perdu sa réputation à cause de ses échecs. Il était maintenant officier d’état-major d’Eulerex.

Lazpuras tourna son regard vers la fille qui se tenait à côté de lui, Manuela. Elle était la moitié de la taille de l’autre Déchu qui avait le physique d’Eulerex, la mettant à peu près à la taille des Races. Ses membres et son torse étaient minces comme des brindilles, et étaient si délicats qu’il semblait que, si on leur appliquait une pression, ils se briseraient… comme un squelette.

Alors que Manuela manquait de prouesses physiques, elle était une habile utilisatrice de bêtes magiques. Elle aussi, une fois, avait servi un autre maître. Elle était autrefois officière et épouse de Varakness, un Déchu de type vampire. Varakness avait déjà occupé le poste de commandant en chef de l’armée, mais… dans ce que les Déchus pourraient appeler « regrettable », il avait été battu par un sorcier-démon.

Manuela était actuellement sous le commandement d’Eulerex et avait aidé à diriger l’armée aux côtés de Lazpuras. C’était, en fait, sa magie qui avait subjugué les bêtes magiques, qui normalement n’obéiraient même pas à un Seigneur-Démon, et leur avait fait renforcer les forces de l’armée.

« Comme c’est méprisable…, » murmura Eulerex comme s’il disait une malédiction. « Depuis combien d’années avons-nous désiré traverser ce pont minable et maudit… ? »

« Ce pont a déjà été à moitié détruit, n’est-ce pas ? » Lazpuras jeta un regard vers le pont de pierre.

« Hmm… Edelgard a affronté un sorcier des Races ici, et il a jeté un sort de Nova blanche, » répondit Eulerex.

« C’est ce que j’ai entendu dire… Mais j’ai du mal à le croire. L’une des Races les plus minables étant capables de jeter un sort aussi avancé… »

« C’est d’autant plus méprisable. Il se fait appeler Diablo… et avec ses prouesses magiques, cela va de soi. »

« Diablo !? » Manuela, qui manipulait silencieusement les bêtes magiques à leurs côtés jusqu’à présent, hurla soudain. « Aaaaaaaah ! Diaaaaaaaaabloooooooo ! »

Maintenant que j’y pense, c’est l’homme qui a tué son ancien maître.

« Calme-toi, » lui dit Lazpuras. « Concentre-toi sur ta magie… Tout se passera bien. Maître Modinaram détruira tout. »

« Aaah... Aaah… Aaah..., » Manuela fit un signe de tête tremblant, ses dents cliquaient et grinçaient nerveusement.

Ce serait différent cette fois-ci. Ils ne peuvent pas perdre. Ils avaient huit grandes tortues et une armée de 1000 bêtes magiques et des Déchus, le pouvoir leur ayant été donné par le Seigneur-Démon Suprême.

Ils traversèrent la rivière, alors qu’un plan d’eau de cette profondeur ne pouvait pas se mettre en travers du chemin des grandes tortues. Ils avaient franchi le pont de pierre comme si la structure n’était même pas là alors qu’ils marchaient dans les plaines, écrasant le pont dans leur sillage.

*

Eulerex sourit. « Heheheheheheh... Voyez la puissance écrasante de notre armée ! »

*

Le bruit du vent qui se coupait avait retenti soudainement autour d’eux. Un autre Déchu descendit sur le dos de la grande tortue, battant des ailes de dragon. C’était une fille mince et bien proportionnée qui portait une robe chinoise, ouverte du bas de sa poitrine jusqu’à son nombril. Ses longs cheveux étaient attachés à l’arrière. Elle avait une longue épée chinoise accrochée à sa taille.

« N’était-ce pas juste une des forteresses des Races qu’on a écrasées ? Où sont-ils !? » La queue écailleuse qui poussait sur les fesses de cette belle fille se balançait de haut en bas avec excitation.

« Il n’y avait aucune présence des Races. » Le cou d’Eulerex tournait horizontalement. « Je pense que c’est une forteresse vide. »

« Huuuh ? Qu’est-ce que ça veut dire !? »

« Je parie que les Races ont eu vent de notre avance et l’ont abandonnée. »

« Donc c’était juste un tas de cailloux ? Ag-aç-ant ! » déclara Ryoka.

« Lady Ryoka, calmez-vous…, » Lazpuras avait fait ce reproche à la fille. « Nous sommes en présence du Seigneur-Démon Suprême. »

« Hmm… B-Bien, j’ai compris. Mais quand est-ce qu’on va se battre ? Cette stupide tortue ne peut-elle pas aller plus vite ? Si ça va plus lentement, je me dessécherais et je me transformerais en fossile de dragon avant qu’on y arrive, » déclara Ryoka.

« … Stupide… tortue ? » La colère commença à remplir l’expression de Manuela.

Les utilisateurs de bêtes magiques avaient tendance à s’attacher à leurs bêtes magiques. Ryoka, d’autre part, était une Déchue qui utilisait des armes, et montrait seulement de l’affection pour son épée.

Les Déchus étaient intrinsèquement agressifs. Alors que Lazpuras se creusait les méninges sur la façon d’arbitrer les deux femmes, Ryoka avait soudainement déplacé son regard vers la route à suivre. Un seul cheval galopait sur la route, avec un soldat seul sur le dos.

« Les Races !? » s’écria Ryoka.

Aussitôt après, et avant que l’officier Lazpuras ou même le commandant en chef Eulerex n’ait dit un mot, Ryoka avait décollé comme une flèche après lui.

« … C’est un leurre, » dit Lazpuras en regardant devant lui.

Ryoka avait rattrapé le cheval qui courait le long de la route et avait balancé sa longue épée chinoise. Sa frappe avait touché à la fois le soldat et le cheval, les coupant en deux et creusant dans le sol en dessous d’eux. Le sang et les viscères avaient coulé sur la route.

***

Partie 3

L’Auberge de la Tranquilité de l’Esprit — Crépuscule.

La fille de l’affiche de l’auberge, Mei, était en train de nettoyer la salle à manger qui était complètement vidée de ses clients. Il était deux heures, à peu près à l’heure où l’endroit serait plein de monde.

« Haha… » La Panthérienne aux cheveux bruns et longs jusqu’à ses épaules, soupira avec une expression lunatique sur son visage.

La porte d’entrée s’ouvrit et la cloche installée à côté se mit à sonner, incitant Mei à sourire largement dans un geste amical.

« Bienvenue à l’Auberge de la Tranquilité de l’Esprit ! Je suis l’idole de l’auberge, la petite Mei ! » déclara Mei. 

« Hahahaha... Désolée. » C’était Sylvie, la chef de la Guilde des aventuriers, qui était entrée dans l’endroit avec un sourire amer sur les lèvres. Elle était vêtue d’une tenue révélatrice qui ne comptait pas vraiment comme des vêtements, mais seulement quelques morceaux de tissu. Elle avait l’apparence d’une jeune fille, mais cela avait été attribué au fait qu’elle était une Marcheuse des Herbes, une race qui n’allait pas changer d’apparence avec l’âge. Elle était en fait une vétérante chevronnée.

« Oh, vous n’êtes pas une cliente, » dit Mei, ses yeux se rétrécissant. 

« Je suis la chef de guilde, tout bien considéré. J’ai fait le tour de la ville pour m’assurer que tout est en ordre, » déclara Sylvie.

« Si vous cherchez Diablo, il n’est pas encore rentré. » Mei haussa les épaules devant les paroles d’excuse de Sylvie.

« Je vois…, » parfois, Sylvie faisait semblant d’être en patrouille pour pouvoir venir voir l’Auberge de la Tranquilité de l’Esprit. Un certain sorcier qui était l’un des clients habituels de l’auberge était apparemment extrêmement puissant. Mei ne l’avait jamais vu se battre, mais la rumeur avait circulé.

« Les choses vont-elles si mal en ville ? » demanda Mei.

« Eh bien, pas vraiment, mais…, » Sylvie répondit joyeusement, mais cela rendait Mei encore plus anxieuse.

« Vous ne viendriez pas vérifier s’il était là si vous n’aviez pas besoin de son aide…, » déclara Mei.

« Hahahaha... C’est bon, vraiment. Faltra a la barrière anti-déchue, après tout. Oubliez les bêtes magiques et les déchus. Même le Seigneur-Démon ne peut pas passer outre, » déclara Sylvie.

La citadelle de Faltra était entourée d’impressionnants murs de pierre, avec des tours en pierre érigées parmi eux. Ces tours servaient d’amplificateurs pour la barrière, qui était maintenue par l’énergie magique du chef de guilde de la guilde des Mages, Célestine Baudelaire. Tant que Céles restait dans la ville, la tour de la Guilde des Mages continuerait à créer la barrière, et les murs l’amplifieraient, gardant les Déchus et tous ceux qui étaient alignés avec eux hors de Faltra.

« Les soldats vont-ils se battre ? » Mei était inquiète malgré tout ça.

« Je ne sais pas grand-chose sur ce que l’armée va faire, vous voyez ? Les troupes stationnées à Faltra agissent comme la garde personnelle du gouverneur. C’est Galford qui en décidera, » déclara Sylvie.

« Et les aventuriers, alors ? » demanda Mei.

« Tout le monde est agité. Nous protégerons tous cette ville pour que vous puissiez dormir tranquille ! » déclara Sylvie.

Mei pinça ses lèvres avec inquiétude. « Mrow… Je connais une tonne d’aventuriers. Je suis inquiète. »

« J’apprécie votre sollicitude. Mais c’est notre travail de protéger les Races face au Seigneur-Démon, » déclara Sylvie.

Sylvie s’était retournée en disant qu’elle devrait aller à l’endroit suivant pendant sa patrouille. Ouvrant la porte, elle avait dit une dernière fois avant de partir :

« Si Diablo se pointe, dites-lui qu’on le cherche à la Guilde des Aventuriers. »

« Mew a compris. Mais je ne le dirai pas gratuitement, » déclara Mei.

« Hein ? »

« Quand vous chasserez le Seigneur-Démon, vous devez tous venir ici et manger nos délicieuses saucisses ! » Mei avait fait un signe du pouce à Sylvie.

« Heheh... C’est une promesse. Alors, au revoir, » déclara Sylvie.

Sylvie quitta l’auberge, fermant la porte derrière elle, et le silence remplit à nouveau l’endroit.

À la porte ouest de la Citadelle de Faltra.

« La porte ! Ouvrez la porte ! » un homme à cheval cria jusqu’en haut des murs. C’était un humain. Il n’avait pas l’air d’être un soldat, car il n’était pas en armure et il n’était pas armé, mais les gardes de la porte l’avaient reconnu.

« C’est Boris ! Ouvrez ! Ouvrez la porte ! » Ils avaient donné l’ordre d’ouvrir la porte rapidement.

Les portes à l’extrémité du pont avaient une porte en acier qui s’ouvrait en tirant une chaîne vers l’arrière. Boris était apparu sur un seul cheval, avec quelqu’un d’autre sur le dos — Massa, qui avait l’air complètement épuisé.

« C’est bon de vous revoir ! » Les soldats les avaient encerclés dès qu’ils étaient entrés dans les murs. « Comment ça s’est passé ? »

« Nous avons vu l’armée du Seigneur-Démon ! » déclara Boris.

Tout le monde autour d’eux avait donné un « Oooh ! »

« C’est super que vous soyez revenu de là. »

« Non… Nous avons dû sacrifier l’un de nos chevaux et mon équipement pour faire un leurre, » déclara Boris.

Ils avaient pris une poupée de paille et mis l’armure de Boris dessus, puis ils avaient précipité le cheval sur la route. S’il s’était enfui, ils auraient tout simplement galopé sur la route, eux aussi… mais une Déchue ailée avait coupé le leurre peu après. Si elle les avait trouvés, ils auraient sûrement été tués. Pendant que la Déchue était distraite par le cheval sur la route, Boris et Massa chevauchaient l’autre cheval à travers une forêt près de la route pour revenir à Faltra.

« Argh… » Massa se couvrit la bouche avec ses mains, son visage pâle. « Je me sens mal, Boris… »

« E-Est-ce que ça va ? Tu peux descendre maintenant. Je m’occupe du rapport, » déclara Boris.

« Oui, merci… Le lieutenant-général est effrayant… Uuuugh…, » déclara Massa.

Massa était assez vulnérable quant au mal des transports. Les autres soldats l’avaient remercié pour son service.

« Ne t’inquiète pas pour le cheval et l’armure. » Un officier avait pris les rênes du cheval de Boris. « Plus important encore, le lieutenant-général attend votre rapport. »

« Oui, monsieur ! » déclara Boris.

En allant vers le nord le long des murs de la porte ouest, Boris s’avança dans la garnison de l’armée. Elle possédait ses propres écuries, une caserne, un terrain d’entraînement, une armurerie, un grenier et, bien sûr, un quartier général. Il s’agissait d’un bâtiment en briques où seuls les officiers étaient habituellement autorisés à entrer.

« Je reviens du pont d’Ulug ! » Boris avait salué les sentinelles. « J’ai un rapport pour le lieutenant général ! »

« Entrez ! » Les sentinelles avaient salué en réponse, invitant Boris à l’intérieur.

Il marcha dans le couloir jusqu’à la porte la plus éloignée. Après avoir répété les mêmes mots à plusieurs reprises, il s’était finalement présenté devant le gouverneur de Faltra, le lieutenant général Chester Ray Galford.

*

À l’intérieur du quartier général — .

Un grand bureau, appartenant au lieutenant-général, se dressait à l’avant, entouré des deux côtés par d’autres bureaux occupés par des officiers d’état-major et remplis à ras bord de paperasse. L’odeur de la sueur, de l’encre et de l’acier remplissait la pièce.

Boris n’avait pas vu Galford depuis la première directive de l’année, il y avait presque un an. Au cours de cette seule année, Boris se souvint que le lieutenant-général lui avait semblé complètement différent de l’homme maussade qui se tenait ici aujourd’hui. Sa peau s’était creusée, sa peau avait pris une couleur plus terreuse, et des mèches de blanc avaient commencé à couler dans ses cheveux. Mais l’éclat de ses yeux restait vif, tandis qu’il fixait Boris du regard.

« Vous dites avoir vu l’armée du Seigneur-Démon… ? » demanda Galford.

« Oui ! Ils avaient huit grandes tortues, tout portant d’innombrables Déchus sur leur dos ! Ils avaient aussi des bêtes magiques de classe moyenne, et ils comptaient au total environ un millier de soldats. Ils avancent à la vitesse du sprint et ont traversé le pont d’Ulug vers onze heures aujourd’hui ! » répondit Boris.

« Mille bêtes magiques et déchus !? » murmurèrent les officiers d’état-major dans la panique. Une centaine, c’était déjà un chiffre désespérant. Dans toute l’histoire enregistrée, il n’y avait pas eu d’escarmouche entre l’Armée du Seigneur-Démon, qui comptait 1 000 hommes, et les Races.

« Avez-vous la preuve que vous avez vraiment vu ça !? » Un officier d’état-major âgé, aux cheveux fins, se leva.

« … À cette vitesse, ils devraient atteindre Faltra à la tombée de la nuit, » annonça Boris.

« Nng. »

« Vitesse de sprint, vous dites ? » demanda un autre officier d’état-major. « Dans ce cas, on devrait pouvoir les distancer à cheval. »

« Peut-être les grandes tortues. Mais je… Non, nous avons failli être attaqués par une Déchue ailée. Elle a volé plus vite qu’un cheval et a tranché à travers une armure et un cheval avec une seule attaque, » déclara Boris.

« Incroyable… »

L’objectif de l’armée du Seigneur-Démon était l’extermination des Races, il n’y avait pas de négociation de paix ni de capitulation devant elle. Que devaient-ils faire ? Le bureau du personnel avait poursuivi la discussion.

« Et le Seigneur-Démon ? » demanda Galford. « Avez-vous vu le Seigneur-Démon Suprême Modinaram ? »

« Je ne peux pas en être sûr. » Boris secoua la tête. « En plus de la bête magique de grande classe à la tête de la force, il y avait un Déchu qui ressemblait à un hibou. Il avait l’air important… »

« Donc vous avez vu Eulerex. Un déchu très ancien, » déclara Galford.

« C’est… »

« Avez-vous vu autre chose ? » demanda Galford.

Boris avait parlé à Galford de la femelle déchue avec les ailes et la queue d’un dragon, ainsi que de la grenouille déchue.

« Ah, et il y avait aussi une boîte, » déclara Boris.

« Une boîte ? » demanda Galford.

« Elle était enchaînée au dos de la grande tortue, et elle avait un motif… flippant à sa surface, » expliqua Boris.

Le fait de s’en souvenir lui avait empli la bouche avec une nausée.

« Hmm. » Galford croisa les bras de manière pensive.

La porte derrière Boris s’ouvrit alors bruyamment, et une voix de femme remplit la pièce.

*

« Êtes-vous toujours en train de paniquer ? Vous avez une mèche bien plus longue que ce que nous vous avions dit. »

*

« Lady Laminitus !? » appela un officier d’état-major.

L’ancien gouverneur de la Tour de Zircon : Fanis Laminitus.

C’était la première fois que Boris la voyait. Elle était vêtue d’un uniforme rouge et avait une poitrine si grande qu’il était difficile de croire qu’elle était humaine. Ses cheveux étaient d’une brillante teinte cramoisie. Ses cils étaient longs, ses lèvres brillantes, et elle se comportait avec un air séduisant qui ne semblait pas convenir à cette occasion. Boris fut stupéfait de la voir.

 

 

Laminitus était une commandante accomplie qui avait une fois repoussé l’armée du Seigneur-Démon. Mais, après avoir appris que le Seigneur-Démon avait été ressuscité, elle avait jugé qu’elle ne serait pas en mesure de défendre la Tour de Zircon et avait abandonné la position, se réfugiant maintenant à Faltra.

« Qu’importe qu’il y ait mille ou deux mille déchus ? » demanda-t-elle à l’officier d’état-major, comme si elle était elle-même la commandante. « Ils peuvent ramasser autant de petits morveux qu’ils le souhaitent et cela ne changera pas grand-chose à long terme. »

« Ce ne sont pas des morveux, Lady Laminitus… Ils sont des Déchus ! Des Déchus puissants, je vous dis ! »

« Haha ! Vous êtes aussi terrifié qu’une jeune fille pour sa première nuit ! » déclara Laminitus.

« Quoi !? »

« Ne vous inquiétez pas. Si nous vainquons leur commandant, l’armée du Seigneur-Démon s’effondrera. Leur pouvoir individuel est peut-être élevé, mais ils ne sont rien de plus qu’une foule désordonnée. Il n’y a rien à craindre, » déclara Laminitus.

« Celui qui dirige cette armée “désordonnée” de Déchus est le Seigneur-Démon Suprême Modinaram, » dit Galford. « Si nous le battons, ce combat se terminera par une victoire pour les Races… C’est clair comme de l’eau de roche. »

« Alors c’est une histoire simple. Nous devons rassembler nos forces les plus puissantes et affronter le Seigneur-Démon Suprême. Il n’y a pas d’autres options, n’est-ce pas ? » déclara Laminitus.

« Nous avons déjà envoyé une demande d’aide à la capitale royale, » déclara Galford.

« Hmph ! » Laminitus se moqua hautainement. « Comme si ce lâche allait affaiblir les défenses de la capitale ! »

« Sa Majesté est un sage gentleman, » déclara Galford.

« Si le roi était vraiment le chef sage et courageux que vous lui faites passer pour être, il aurait envoyé ses héros pour détruire le Seigneur-Démon Suprême, comme vous l’avez fait autrefois. Combien de jours se sont écoulés depuis l’attaque de la Tour de Zircon ? » demanda Laminitus.

« Je suis sûr qu’il a ses plans, » déclara Galford.

« Vous vous êtes ramolli, Galford ! » déclara Laminitus.

« Alors, laissez-moi vous dire : si les Races doivent combattre le Seigneur-Démon, nous devons être unis. Peu importe ce qu’ils pensent, les soldats ne doivent jamais soupçonner le roi, » déclara Galford.

« Si nous obéissons trop aveuglément, les Races seront sûrement décimées ! » déclara Laminitus.

« C’est absurde. La discorde et les luttes intestines sont ce qui conduira les races à la destruction, » déclara Galford.

« Tch… » Laminitus fit claquer sa langue. « Il n’y a nulle part où se réfugier, donc il n’y a pas d’autre choix que de se battre. Nous partageons votre opinion qu’il vaut mieux ne pas attendre de renforts de la capitale royale. Se disputer sur la stupidité du roi ne nous servirait à rien, de toute façon. »

« Ne voyez-vous pas combien il est blasphématoire de dire de telles choses devant les officiers d’état-major ? » demanda Galford.

« L’armée du Seigneur-Démon arriverait ce soir, n’est-ce pas ? Préparons-nous donc à la bataille. Il y a vous et nous… Y a-t-il quelqu’un d’autre qui pourrait être utile ? » demanda Laminitus.

Galford se tut. Faltra était un point stratégique important entre les territoires des Races et le domaine du Seigneur-Démon. Les forces stationnées là étaient toutes des élites, mais aucune d’entre elles n’avait dépassé la limite des Races. Ceux qui fourmillaient d’une telle vivacité d’esprit avaient tous été convoqués dans la capitale. Et si Galford était heureux de voir ses subordonnés se développer et atteindre la grandeur, la vérité était que les lignes de front manquaient de troupes aussi compétentes.

« Diablo n’est-il pas encore là ? » demanda Laminitus.

« D’après ma reconnaissance, il s’est dirigé vers le village du maître épéiste à Sormas, » déclara Galford.

Le gouverneur avait fixé Diablo comme cible d’observation et des soldats compétents en espionnage le suivaient. Ces ordres s’appliquaient de la même manière même en dehors de Faltra, et c’est ainsi que Galford avait suivi les activités de Diablo à la Tour de Zircon et dans la capitale.

« Sormas ? Pourquoi est-il allé là-bas ? » demanda Laminitus.

« Je n’ai aucune idée de ses intentions… mais il a apparemment acheté du fumier et escaladé une montagne, » répondit Galford.

« Ne nous dites pas qu’il a décidé de commencer à travailler dans les champs ? » demanda Laminitus.

« C’est un simple aventurier après tout… Ça ne sert à rien de dépendre de lui, » déclara Galford.

« Nous n’aimons pas trop l’admettre, mais… cette bataille pourrait très bien dépendre de sa présence ici, » déclara Laminitus.

Galford haussa les épaules. « Les nouvelles de l’invasion sont déjà connues. Mais je ne peux pas dire s’il agira ou non. »

Laminitus soupira en réponse.

Diablo est incroyable, pensa Boris. Si ces deux personnes impressionnantes parlaient ainsi de l’importance de sa présence, Diablo devait l’être. Boris pria du fond du cœur pour que Diablo revienne le plus vite possible.

Boris tourna son regard vers l’ouest, par la fenêtre. Le soleil avait commencé à basculer lentement sous l’horizon, et quand il l’avait fait, son anxiété n’avait fait que s’alourdir…

***

Partie 4

Le même jour, à cinq heures du soir.

On croyait que l’invasion commencerait après le coucher du soleil, mais la vigie sur les murs avait haussé la voix avant le crépuscule. Comme ses camarades du pont d’Ulug, Boris fut admis dans les forces de garnison de Faltra et affecté à une tour de guet — qui servait aussi d’amplificateur à la barrière — située légèrement au nord de la porte ouest.

« Ils arrivent ! » Boris avait pointé du doigt l’ouest.

« Uuuu... Déjà !? » Les lèvres de Massa frissonnaient de terreur.

Plusieurs autres avaient haussé la voix en raison de la crainte de l’attaque. Même les soldats entraînés stationnés sur les lignes de front ne pouvaient pas garder leur sang-froid face à une invasion de l’armée du Seigneur-Démon.

Les grandes tortues massives étaient apparues avec le soleil de l’ouest sur leur dos, comme si elles avaient suinté de l’obscurité envahissante de la nuit. La puanteur des bêtes et du sang pouvait être sentie même de loin. Ils étaient comme la personnification de tout ce qui faisait peur dans le cœur des hommes.

Des sonnettes d’alarme avaient retenti, alertant d’une attaque ennemie qui arrivait. D’innombrables soldats levèrent les yeux vers la porte ouest. Le lieutenant-général irait-il sur le champ de bataille ? Ou restera-t-il dans ses fortifications ?

Galford était un héros de la dernière grande guerre et avait mobilisé ses forces de manière proactive lorsque l’armée elfique avait marché sur Faltra, ainsi qu’en d’autres occasions. Et en effet, des soldats portant des armures lourdes avaient été déployés à la porte ouest cette fois-ci.

Mais il n’y avait eu aucun mouvement. La trompette signalant l’ouverture de la porte ouest n’avait pas retenti.

« … Il ne viendra pas, » chuchota quelqu’un.

Le lieutenant-général avait naturellement jugé qu’il n’y avait pas lieu de gagner une lutte directe contre ce mal.

« Nous ne pouvons donc pas gagner…, » dit quelqu’un d’autre d’une voix découragée.

Il y avait le faible espoir que peut-être, juste peut-être, le héros de la grande guerre aurait un moyen d’arrêter l’invasion de l’armée du Seigneur-Démon. Mais la réalité était plus froide que les profondeurs les plus sombres de la mer et dépourvue de toute pitié innocente.

Il n’y avait absolument personne capable de tenir tête à une armée de mille déchus…

« Nous maintenons notre position ! » s’écria un officier qui avait prédit, ou qui savait peut-être, qu’on en arriverait là. « Nous avons notre barrière, et les Déchus ne sont pas assez intelligents pour préparer des provisions. Sans oublier que l’hiver cruel est de notre côté ! On peut gagner ce combat ! »

Les visages des soldats s’illuminèrent de cette compréhension. Même si Faltra était dans une région chaude, c’était bientôt l’hiver. Les arbres de la forêt avaient perdu toutes leurs feuilles, et les fruits et les animaux étaient rares. C’était la période où l’agriculture avait été arrêtée. Comme les Déchus avaient besoin de nourriture, il leur en fallait probablement de grandes quantités juste pour entretenir leurs corps massifs. Il leur serait presque impossible de se procurer assez de nourriture pour nourrir un millier de Déchus.

La tenue d’une ville pendant un siège dépendait du fait que l’adversaire n’ait pas de provisions. Et bien que les murs de Faltra aient été endommagés par une mystérieuse explosion il y a quelque temps, ils avaient été réparés depuis.

« Nous avons assez de provisions pour subvenir aux besoins de 200 000 personnes pendant six mois ! Et nous avons pris en compte les réfugiés du domaine du Seigneur-Démon ! Il n’y a rien à craindre ! »

C’est exactement ce que l’on pouvait attendre du lieutenant-général Galford, avaient dit certains. Mais Boris regarda vers l’ouest, l’anxiété pesant lourdement sur son esprit.

« Qu’est-ce qui ne va pas, Boris ? Tu es pâle, » demanda Massa, provoquant une réponse nerveuse de Boris.

« … Tu te souviens quand une centaine de Déchus ont attaqué le pont d’Ulug ? » demanda Boris.

« Oui, c’est vraiment arrivé… Je croyais qu’on était foutu à l’époque, » déclara Massa.

« Un Déchu avait infiltré Faltra en essayant de tuer Lady Celestine, non ? » demanda Boris.

« C’est vrai. Je crois qu’il s’appelait Gregore ? L’aventurier Émile l’a battu, n’est-ce pas ? » demanda Massa.

« … C’est ce qu’ils disent, bien sûr, » déclara Boris.

Boris avait vu les actions de Diablo au Pont d’Ulug, et il avait aussi entendu ce que le sorcier-démon avait dit :

*

« Je vais tester ma magie du Retour. »

*

C’est ce qu’avait crié Diablo avant de disparaître dans un éclair de lumière. Alors que les aventuriers avaient prétendu que c’était Émile qui avait battu Gregore, Boris soupçonnait que ce n’était pas entièrement vrai.

« Non, ce n’est pas le problème en ce moment… Ce que je veux dire, c’est qu’à l’époque déjà, les Déchus tentaient de trouver un moyen de supprimer la barrière, » déclara Boris.

« C’est vrai, » déclara Massa.

« Et maintenant, ils amènent dix fois plus de déchus qu’avant — ils ont même ce foutu Seigneur-Démon Suprême avec eux. Nous sommes des idiots qui pensons qu’ils n’ont pas prévu la barrière…, » déclara Boris.

« Alors… en ont-ils toujours après Lady Célestine !? » s’écria Massa.

« Bien sûr, je pense que le lieutenant-général se méfie de cela, » déclara Boris.

Ils jetèrent un regard vers le centre de la ville. Il n’y avait pas eu de troubles à la Guilde des Mages, n’est-ce pas ? Mais lorsqu’ils regardaient la tour de forme particulière, qui sortait comme une lance vers le ciel, rien ne semblait sortir de l’ordinaire.

La citadelle de Faltra était sous leurs yeux.

« Toutes les forces, arrêtez-vous. » Eulerex étendit les mains.

Lazpuras répéta les paroles de son commandant, appelant l’utilisateur de la bête magique Manuela à s’arrêter également. Sa magie avait fait ralentir les grandes tortues jusqu’à l’arrêt. Cependant, leurs forces n’étaient pas aussi ordonnées que celles des Races. Certains d’entre eux s’étaient plaints en hurlant, se précipitant pour attaquer de leur propre chef.

« Je crois que c’est la faction de Vahl. »

C’était des Déchus qui n’opéraient que sur le seul désir d’abattre les Races. Ils étaient du type qui se battait souvent entre eux et avaient moins d’intelligence que les bêtes.

Eulerex leur tourna le dos. « Rejetez-les. Les imbéciles nous ont suivis sans que personne ne les appelle… Tout ce qu’ils sont bons, c’est d’être des pions jetables. »

« Comme vous dites, monsieur. »

« Ouvrez la boîte ! » s’écria Eulerex, les bras tendus.

Les Déchus qui se tenaient derrière lui commencèrent à s’agiter. Lazpuras escorta Manuela, lui faisant signe de descendre de la grande tortue.

« Venez, il faut se dépêcher. »

« Attendez. »

« Faites vite, vite. »

« … Je suis désolée… » Manuela tapota l’armure autour des pattes de la grande tortue avec regret. Les chaînes étaient alors rompues par des chocs de haches, le libérant de ses liens.

« Nous n’avons pas le temps. » Lazpuras avait pris Manuela par les aisselles.

« Ah… »

Il s’était propulsé loin de la carapace avec une agilité que l’on ne pourrait attendre de son gros ventre, atterrissant derrière la grande tortue. Il n’y avait pas de temps à perdre.

« Chaînes, coupez ! » les Déchus tenant des haches crièrent.

Pendant ce temps, Eulerex volait dans le ciel, les ailes de hibou sur son dos battant fort.

« Il est temps d’ouvrir la boîte ! Brisez le sceau ! »

« Sceau, brisez ! » Plusieurs autres déchus avaient répété ses paroles. Ils avaient tendu la main vers l’avant de la boîte, certains l’avaient frappée avec les lames de leurs armes…

Puis, cela s’était ouvert.

De l’énergie magique pure et dense s’était déversée. Une énergie magique solidifiée sortait de la boîte comme de la boue noire, touchant les Déchus qui se tenaient autour d’elle. Ils crièrent de douleur tandis qu’ils s’effondraient instantanément en particules de lumière.

L’anéantissement… L’énergie magique était si puissante qu’elle avait détruit les Déchus d’un simple toucher.

*

Regardant d’en haut, Eulerex avait crié, « Canon démoniaque suprême — feu ! »

L’énergie magique avait jailli de la boîte. Se transformant en un éclair de lumière, il éclaira son environnement comme si le soleil était descendu sur la terre avec une férocité aveuglante…

Tous ceux qui le regardaient directement avaient été emplis par la lumière. Les Déchus pouvaient être capables d’y résister, mais les Races ne peuvent que devenir aveugles. Ceux qui se tenaient sur les murs de Faltra, sans aucun moyen de bloquer la lumière, avaient instantanément perdu la vue.

La lumière s’était transformée en chaleur. La tête de la grande tortue avait été la première à s’évaporer. La moitié avant de son corps n’avait pas pu résister à la chaleur émanant de la boîte. Vint ensuite les déchus de la faction Vahl, qui fonçaient vers l’avant, étant rapidement consumée par la déflagration et se disparaissant sans laisser de trace.

La masse de chaleur massive s’approchait rapidement des murs de Faltra. La barrière avait hurlé. Depuis sa création, la ville avait été confrontée à de multiples guerres entre les Seigneurs-Démons et les Races, mais jamais autant de pouvoir n’avait été exercé contre la barrière. Le pouvoir magique était si intense que, s’il n’y avait pas eu de la barrière, la ville aurait certainement été rayée de la carte.

Les soldats crièrent au sommet du mur, et les citoyens de la ville agitèrent dans une frénésie face aux bruits exaspérants. Alors que le grondement des forces magiques qui s’affrontaient autour d’eux, le sol tremblait et l’air frissonna contre les bâtiments de la ville.

Mais la barrière ne se briserait pas. Sa capacité de blocage de « tous les maux des Déchus » était absolue.

La barrière avait tenu bon. La lumière s’était éteinte ainsi que la chaleur intense…

Boris se tenait avec ses mains et il s’agenouilla alors sur les murs, alors que ses jambes tremblaient d’une manière incontrôlable alors que d’épaisses gouttes de sueur tombaient de son front.

J’étais mort, c’est sûr… Je sais que je l’étais…

Il avait presque accepté d’être avalé par la lumière et emporté par le vent.

« Haah, haah ! Haha ! Incroyable… Nous sommes vivants ! »

La barrière avait vraiment résisté. Mais quand Boris avait levé la tête, il avait entendu un cri venant de la porte ouest.

« Repliez-vous ! »

« Hein ? » il n’avait pas pu s’empêcher de le dire bêtement.

La lumière émise par l’armée du Seigneur-Démon s’était complètement éteinte, mais les cris ne faisaient que s’amplifier. Peu de temps après, le sol s’était mis à trembler.

« Qu’est-ce qui se passe !? » Boris se leva, posa ses mains sur le bord du mur et regarda devant lui.

C’est impossible !

Le sol autour de la porte ouest avait complètement disparu. La barrière s’étendait jusqu’au sol également, mais elle avait disparu comme si quelque chose l’avait rasée. Faltra était entourée d’un fossé rempli d’eau courante, mais tout s’était évaporé en vapeur blanche.

« Repliez-vous ! Partez de là ! »

Les soldats s’étaient enfuis de la porte ouest. L’endroit où Boris était stationné avait commencé à trembler.

« Qu’est-ce qui se passe !? » s’écria Boris.

Ce qui se passait était tout à fait naturel. Lorsqu’une grande structure avait perdu le terrain qui la soutenait, il n’y avait qu’une chose qui arrivait. Les portes occidentales avaient basculé sur le côté comme si elles étaient faites de blocs de construction, créant des fissures dans le sol proche des murs lorsqu’elles étaient tombées. Avec les murs étant structurés pour s’appuyer l’un l’autre, il n’avait pas fallu longtemps pour que celui de Boris et son groupe s’effondrent aussi.

« Repliez-vous ! » s’écria l’officier.

Mais ceux qui avaient l’esprit vif avaient déjà commencé à s’enfuir avant l’ordre.

« Aaah ! » Leur prise s’effondra, et Massa avait trébuché. « Aaah, les Déchus, ils me tiennent par la jambe ! Aidez-moi ! »

« Calme-toi, tu viens de trébucher ! » Boris saisit la main de Massa et le tira vers le haut, l’exhortant à continuer à courir.

Heureusement, les murs n’étaient inclinés que sur le côté. Boris était enfin parvenu à se mettre à l’abri, il s’était retourné et avait été choqué au-delà des mots. Ses genoux tremblaient et il n’arrivait pas à reprendre son souffle, car quelque chose qui aurait dû être là avait maintenant disparu.

Une tour de guet qui faisait office d’amplificateur de la barrière antidéchue s’était renversée, tout comme les murs. Cela avait été réduit à rien d’autre qu’un tas de décombres.

« La barrière…, » la voix de Boris lui paraissait très distante. « Elle est détruite ! »

***

Partie 5

« Gaaaahaaaaa ! » Plusieurs bêtes magiques et déchues se précipitèrent sur la porte ouest effondrée.

La citadelle de Faltra était sur le point de s’effondrer. Certains des soldats qui avaient été pris dans l’effondrement de la porte avaient été pris de panique. Certains couraient partout, d’autres étaient stupéfaits et choqués. C’est dans ces moments-là qu’un aventurier faisait habituellement son apparition !

Émile s’avança sur la place de la porte ouest, dégainant sa longue épée. Les murs jadis magnifiques de la porte ouest étaient maintenant complètement effondrés.

« Ils ont fait pas mal de choses sur notre ville, » déclara Émile.

Il n’y avait aucune barrière pour repousser l’attaque de Déchu, laissant la ville complètement exposée. Émile entendait ses camarades l’appeler.

« É-Émile, que pouvons-nous faire contre eux… !? » cria Turon, un ami d’Émile qui était un guérisseur vêtu d’une robe blanche. Il y avait aussi Eristoff, un enchanteur doué pour les enchantements et renforcer les armes. Les quatre membres de son groupe étaient présents.

« Que pouvons-nous faire, me demandez-vous ? Et bien, nous pouvons gagner ! Qu’y a-t-il d’autre ? » proclama Émile, en serrant le poing. « La barrière a disparu, ce qui signifie que cette ville et ses innombrables femmes sont menacées par les Déchus. Par mon nom, Émile Bichelberger, je protégerai toutes les femmes contre le mal ! »

« Heheh... » Le guérisseur, Turon, avait courbé les lèvres en souriant. « Voyager dans les pays a vraiment affiné ta stupidité, n’est-ce pas ? »

« Je ne suis pas stupide ! » déclara Émile.

Eristoff, l’enchanteur, haussa les épaules. « Je ne pense pas que ce soit le choix le plus intelligent, mais nous devons le faire… Rester assis sur mon cul et attendre la mort n’est pas mon style. »

Il déplaça son bâton, et après avoir fait ça, tout l’équipement du groupe avait été recouvert de magie, triplant leur attaque et leur défense.

« Très bien ! » Grutas, un guerrier qui portait un bouclier à la place d’une arme, se tenait devant tout le monde. « Faisons-le ! Nous sommes les héros de la nouvelle ère ! » C’était un autre camarade de leur groupe, appartenant à la classe des Gardiens.

« C’est ça ! On va défendre cette ville ! » Yuan, l’archer du groupe, s’enflamma aussi.

Émile marcha sur les décombres et regarda la ville. Le sol était encore brûlant, et même à travers ses bottes de cuir, Émile sentait ses jambes grésiller.

*

« Hmph… Il y avait donc des aventuriers qui ne se sont pas enfuis… » Un autre groupe était apparu de derrière eux.

« Hmm ? » Émile s’était retourné. Ceux qui étaient apparus étaient plus d’une centaine de chevaliers régionaux, dirigés par le gouverneur lui-même, Galford.

« Oh, c’est vous… Vous vous appeliez…, » déclara Galford.

Il y a deux mois, Émile avait obtenu des cours particuliers sous la direction de Galford pour apprendre le maniement des lames. Bien qu’il soit plus un étudiant intrusif qu’un apprenti…

« Hehe... Je m’appelle…, » commença Émile.

« … Émile Bichelberger, je crois. Êtes-vous allé voir le maître à l’épée ? » demanda Galford.

Il s’est souvenu du nom d’Émile !? Les autres aventuriers étaient magnifiquement stupéfaits.

« Bien sûr ! » Émile avait gonflé sa poitrine. « J’ai expérimenté la frappe de l’épée du maître à l’épée sur ma chair. Grâce à cela, j’ai renaît ! »

« Hmm… Nous voyons que vous avez aussi progressé ! »

La rangée de chevaliers régionaux se sépara sur les côtés, laissant place à une belle femme pleine d’allure. Ses cheveux cramoisis étaient attachés et elle était vêtue d’une armure rouge vif.

« Écartez-vous… Si vous vous mettez en travers de Notre chemin, nous devrions peut-être passer à travers vous, vous savez ? » déclara Laminitus.

Fanis Laminitus s’était rendu sur les lieux, un fusil magique massif à la main. La bouche de son canon était pointée directement sur Émile.

« Qu’est-ce que vous préparez ? » demanda Émile.

« Nous avons dit, écartez-vous. Ils sont déjà à ma portée, » déclara Laminitus.

« Quoi !? » s’écria Émile.

Les Déchus de l’armée du Seigneur-Démon attaquaient. Ils n’étaient pas assez proches pour voir les traits de leur avant-garde, mais si Laminitus avait dit qu’ils étaient à sa portée, cela devait être vrai. Elle était bien connue pour son talent de Magi Gunner accomplie, très peu de gens ne la connaissaient pas.

Le groupe d’Émile s’était éloigné de son chemin quand elle avait appuyé sur la détente. L’instant d’après, une série de coups secoua l’air. Émile doutait même qu’un fusil magique massif puisse tirer de cette distance. Elle était peut-être capable d’en tuer un ou deux, mais cela ne servirait pas à grand-chose…

Soudain, une explosion massive s’était produite.

« Quoi !? »

La fumée noire s’élevait au-dessus des murs. Plusieurs Déchus avaient perdu tout semblant de leur forme originale dans l’explosion, se transformant en particules de lumière avant de toucher le sol. Et c’était sans parler des explosions qui s’étaient produites à trois endroits différents.

Les ondes de choc avaient atteint les soldats quelques instants plus tard. C’était arrivé si vite que les explosions s’étaient produites dans une position où il fallait une dizaine de minutes pour s’y rendre à pied.

Les camarades aventuriers d’Émile marmonnèrent de surprise.

« Qu’est-ce que c’était !? » « C’est impossible ! » « Elle vient d’en tuer trente ! »

« Avez-vous organisé quelque chose à l’avance ? » Aux yeux d’Émile, on aurait dit que les balles avaient explosé et que quelque chose dans le sol avait explosé.

« Heheh... Vous avez une sacrée paire. C’est peut-être ce que l’on peut attendre d’un homme que Galford a observé de ses propres yeux, » déclara Laminitus.

Galford secoua la tête désagréablement. « Je n’attends rien d’un aventurier. »

« Même après l’avoir entraîné tous les jours ? » demanda Laminitus.

« Je l’ai simplement écrasé quand il s’est mis en travers de mon entraînement du matin, » déclara Galford.

« Personnellement, sans commander vos troupes, et avec une épée émoussée destinée à l’entraînement ? » demanda Laminitus.

Laminitus avait continué à tirer avec son fusil tout en taquinant un homme de trente ans son aîné. Une autre explosion s’était produite.

« Émile, était-ce bien ça… ? Comme vous l’avez supposé, nous avons trafiqué la zone près de la porte ouest, » expliqua Laminitus, son fusil magique toujours en main. « Leur logique est la même que celle d’une balle de fusil magique. »

« Vous pouvez faire ça !? » s’écria Émile.

« Les méthodes de guerre changeront un jour. Mais ce n’était que du bluff, » déclara Laminitus.

Galford acquiesça de la tête. « Une bataille avec l’armée du Seigneur-Démon dépend de notre capacité à battre le Seigneur-Démon lui-même. »

« L’armée du Seigneur-Démon n’a pas tant de pions à sacrifier. S’ils n’arrivent pas à percer facilement, ils enverront bientôt leurs troupes plus fortes pour nous affronter, » déclara Laminitus.

Pendant que les deux individus parlaient, les Déchus se dirigeant vers la porte ouest s’étaient arrêtés, et tout s’était soudainement tari. Le bruit du vent résonnait dans toutes les oreilles. Quelque chose se dirigeait vers la porte…

Au début, ils pensaient que la fille était de l’une des Races, jusqu’à ce qu’ils remarquent ses ailes en forme de dragon. Elle avait des cornes sur la tête et portait son gros sabre chinois sur l’épaule. Sa queue se balançait à droite et à gauche. La jeune fille marcha jusqu’à la montagne de décombres et s’était arrêtée, se tenant à une douzaine de pas des soldats.

« Heheh ♪ ! J’ai pensé que le canon du Seigneur-Démon Suprême allait faire exploser toute votre ville… Vous êtes étonnamment tenace, » dit-elle d’une voix aiguë et féminine. « En récompense, je jouerai avec vous pendant un bon moment avant de vous massacrer ! »

« Canon du Seigneur-Démon Suprême ? » demanda Émile. « Est-ce comme ça que vous appelez cette lumière vive de tout à l’heure ? »

« C’est bien ça. Je ne comprends pas vraiment moi-même, mais la boîte déclenche cette énergie magique que le Seigneur-Démon Suprême rassemble pendant très, très longtemps. Je crois qu’Eulerex a dit que c’est l’un des pouvoirs du Seigneur-Démon de l’Œil ? Ou était-ce le Seigneur-Démon de la Main ? » répondit la fille.

Le Seigneur-Démon de la Folie, Modinaram, avait absorbé les autres Seigneurs-Démons et assumé le titre de Seigneur-Démon Suprême. Apparemment, l’attaque de tout à l’heure était celle d’un des Seigneurs-Démons absorbés. Mais ils doutaient que cette fille vienne leur dire cette information…

« Combien de Seigneurs-Démons le Seigneur-Démon Suprême a-t-il absorbés ? » demanda Émile.

La fille déchue avait essayé de compter sur ses doigts, mais apparemment elle n’en avait pas assez sur les deux mains.

« … Un paquet, d’accord !? Et moi, Ryoka, je lui en ai trouvé trois ! Ne suis-je pas la meilleure ? » demanda Ryoka.

« Alors, il en a au moins dix, » déclara Émile.

« En récompense, il m’a donné dix fois plus de pouvoir ! Il n’y a plus personne dans l’armée du Seigneur-Démon contre qui je puisse me battre à pleine puissance… Mais peut-être que tu te battras mieux !? » demanda Ryoka.

La jeune Déchue, qui s’appelait Ryoka, avait souri d’un air sadique, avec une intention meurtrière émanant de son corps. Émile avait dégluti nerveusement face à cette vue. Il avait l’impression que quelque chose de froid s’était glissé le long de sa colonne vertébrale.

« Euh…, » Eristoff l’enchanteur avait du mal à se tenir debout, tremblant des genoux. « Son image me transperçant de son épée ne cesse de me traverser l’esprit… »

« Reprends-toi ! » Émile avait posé une main sur son épaule.

« Une partie de ce que vous venez de dire n’a aucun sens…, » Galford s’avança, parlant sur un ton taciturne. « Vous voulez dire que vous êtes une Déchue et que vous avez ramassé dix fragments du Seigneur-Démon en si peu de temps ? C’est inconcevable… »

C’était vraiment étrange. Malgré l’expression ennuyée sur son visage, Ryoka était plus bavarde que jamais. « Le Seigneur-Démon Suprême les a trouvés. Les Seigneurs-Démons ont cette capacité de sentir les autres Seigneurs-Démons. Ils ne l’utilisent jamais parce que c’est inutile pour massacrer les Races. »

C’était une information choquante pour les autres, mais Galford semblait convaincu.

« A-t-il rassemblé tous les morceaux présents en ce moment ? » demanda Galford.

« Non, il y en a encore dans les territoires des Déchus. Et il y a aussi celui qui s’est enfui. »

« Un qui s’est échappé… ? » demanda Galford.

« Mais ce n’était pas ma faute ! Ce Seigneur-Démon était sur le point de se réveiller et a refusé d’être absorbé, alors il s’est enfui, » déclara Ryoka.

« Un autre Seigneur-Démon… ? Dites-moi, je vous prie, où peut-il être ? » demanda Galford.

Alors qu’elle était sur le point de répondre, un autre Déchu s’était précipité vers elle. Il avait trois queues et un visage de renard avec un corps légèrement plus grand que celui des Races. Il déplaça sa longue bouche jusqu’à l’oreille de Ryoka.

« Lady Ryoka, Lady Ryoka… ! » cria le nouveau venu.

« Hm ? »

« Un ordre du Seigneur Eulerex. Il dit de les tuer rapidement. Et aussi de ne rien dire inutilement, » déclara le nouveau.

« Hein !? Mais plus tôt, il m’a dit d’écouter ce que les autres disent jusqu’à ce qu’ils aient fini ! Est-ce que cette tête de chouette a des plumes pour cerveau !? » demanda Ryoka.

Ryoka pinça ses lèvres de déplaisir et fixa le groupe d’Émile. « Très bien, peu importe. J’ai envie de me battre, de toute façon. »

Ryoka avait dégainé son long sabre chinois dans une main. Elle manipulait cet énorme morceau de métal avec ses membres minces et en forme de brindilles si facilement qu’elle avait vraiment une puissance très éloignée de celui des Races. Elle s’était ensuite adressée au groupe avec le même ton désinvolte et bavard que précédemment.

« Qui veut commencer ? Ou vous voulez vous battre contre moi d’un coup ? Je suis d’accord de toute façon ! » déclara Ryoka.

La jeune fille parlait sur le même ton qu’elle pouvait utiliser pour discuter avec un ami au coin de la rue, mais malgré cela, elle semblait agir de la manière la plus menaçante depuis le début.

 

 

« Kuh... C’est mauvais…, » Émile frissonna.

« Certes, son niveau est beaucoup plus élevé que celui des autres Déchus. » Turon le guérisseur acquiesça d’un signe de tête.

« Oui, avec une beauté à un autre niveau. Et c’est aussi une femme. »

« Quoi !?? Émile, c’est une Déchue ! »

« Une femelle déchue. »

« Les Déchus n’ont pas de sexe ! »

Tandis qu’Émile et Turon poursuivaient leurs chamailleries sur le thème des identités de genre des déchus, Galford s’était avancé.

« Couvrez-moi, » déclara Galford.

« Oh, pouvons-nous ? » demanda d’une manière interrogative Laminitus, la surprise évidente sur son visage. « Nous pensions que vous insisteriez pour un tête-à-tête afin de maintenir la chevalerie ou une autre sorte de fierté masculine. »

« … Ce n’est pas le genre de bataille qu’on peut gagner en s’accrochant à de telles notions, » répondit Galford.

***

Partie 6

L’endroit où se dressait jadis fièrement la porte ouest avait complètement changé. La zone à l’intérieur proche de la porte, où se trouvaient les chevaliers de la région, était criblée de fissures. Les chevaliers étaient bien entraînés selon les standards des Races, mais n’étaient même pas de taille lorsqu’il s’agissait de combattre de puissantes bêtes magiques de grande taille et des déchus.

Laminitus se tenait devant eux, armée de son fusil magique, les yeux fixés sur l’ennemi. Émile et ses compagnons d’aventure se trouvaient près de la porte où les décombres jonchaient le sol. Protégeant Laminitus dans leur dos, ils avaient maintenant maintenu un chemin dégagé pour son fusil magique.

Enfin, devant la porte ouest, le trou ouvert par le canon du Seigneur-Démon Suprême était présent. Les décombres de ce qui était autrefois la porte remplissaient l’endroit, ne laissant aucune trace de la grande route magnifiquement entretenue menant à l’entrée de la ville. Au centre de ce site en ruine se trouvait le champ de bataille de Galford, une vue où il n’avait pas encore sorti l’épée qu’il portait à sa taille.

Galford étudia silencieusement l’écart qui les séparait. Dix pas.

« Hmm, on dirait que tu vas être amusant ♪ . » Ryoka, qui se tenait en face de lui, avait plissé ses yeux.

« … Je ne peux pas dire que je suis d’accord… Je n’ai jamais trouvé la bataille agréable, » déclara Galford.

« C’est parce que tu es faible, n’est-ce pas ? Tu ferais mieux de ne pas me déplaire ! » Ryoka avait vigoureusement crié ces mots et avait donné un coup de pied au sol, en chargeant dans la direction de Galford. Elle se déplaçait cependant plus lentement que prévu.

Est-ce que je me suis trop entraîné ? Émile avait réfléchi à cela en la regardant.

Galford pensait qu’il ne serait pas capable d’égaler cette puissante Déchue de front, mais d’une certaine manière, elle ne semblait pas si rapide.

« Yah ! »

Ryoka avait balancé son long sabre chinois. Il y avait encore une certaine distance entre eux, mais sa lame avait soudainement brillé. La frappe avait touché, un pas plus tôt qu’elle ne l’aurait dû.

Une attaque-surprise !?

« Raaah ! » cria Galford alors qu’il dégainait son épée.

Les yeux d’Émile s’étaient élargis. La vitesse de Galford était dans une tout autre dimension que lorsque Émile s’était entraîné avec lui.

Je savais qu’il y allait doucement avec moi, mais je ne pensais pas qu’il serait si rapide !

L’épée de Galford avait dévié la frappe de Ryoka. L’air tremblait alors que le métal frappait contre le métal, et un autre coup suivit bientôt. C’était une combinaison de deux frappes de Galford, si rapide qu’Émile pouvait à peine la suivre de ses yeux.

Le sang avait jailli du dos de la main droite de Ryoka. Ses yeux s’étaient élargis.

« Ai-je été coupée !? » se demanda Ryoka à voix haute.

« Hm. » Galford baissa les yeux vers sa lame. La pointe de son épée avait été fendue.

« Heheheheh... Pas mal. Pas mal. » La blessure de Ryoka avait rapidement disparu. « Accélérons un peu les choses ! »

Elle avait attaqué à nouveau, cette fois-ci beaucoup plus vite qu’auparavant. Elle avait fait un pas en avant, Galford entrant à tous les coups dans la portée de son long sabre chinois.

« Nng... Aaah ! » cria Galford.

Galford avait dévié son épée. Il s’était ensuite déplacé autour d’elle dans un mouvement fluide et circulaire, coupant vers la partie supérieure de son bras. Ça ressemblait à une blessure profonde, mais cela ne l’avait pas vraiment coupée. Sa main gauche s’était baissée, impuissante.

« Comment !? Je suis plus rapide que toi ! » s’écria Ryoka.

C’était simplement une lacune technique. En tant que Déchu, Ryoka avait l’avantage en termes de force physique et d’endurance, mais il y avait une différence fatale dans le niveau de leur maîtrise à l’épée. Le jeu d’épée de Galford était un mélange de défense et d’attaques, il n’y avait aucune différence ou transition entre une attaque et un garde. Chaque fois que vous pensiez qu’il avait dévié un coup, ses mouvements coulaient comme de l’eau et se déplaçaient naturellement en contre-attaque. C’était une belle maîtrise de l’épée qu’on ne pouvait pas attendre de ses traits stricts.

Mais comme la lame n’avait pas coupé l’os, le bras gauche de Ryoka s’était régénéré en un clin d’œil.

Est-elle immortelle ?

« On dirait que tu n’es pas un perdant d’avorton ! » dit Ryoka, ses lèvres s’enroulant vers le haut dans un sourire extatique. « C’est ça, la bataille ! »

Elle avait encore une fois attaqué. Pensait-elle que la contre-attaque de tout à l’heure était un coup de chance ? C’était le même type d’attaque qu’avant. Galford l’avait encore une fois facilement repoussé, sa contre-attaque coupant l’épaule gauche de Ryoka cette fois-ci.

Les attaques de la Déchue avaient pris de l’ampleur, et Galford s’était empressé de s’adapter au changement. Leurs attaques s’entrechoquaient à maintes reprises, le son du métal se faisant entendre autour d’eux comme une cacophonie.

Leur combat était à un autre niveau. Les sons n’étaient pas des clics légers, mais plutôt des gongs et des coups lourds et retentissants. À chaque échange, l’épée de Galford était déchiquetée. Le long sabre chinois de Ryoka, en revanche, était enchanté et n’avait même pas une égratignure. Il la battait quand il s’agissait de l’épée, mais il y avait une différence entre leurs armes. Émile pouvait-il faire quelque chose face à ça ?

« Tch… » Ryoka avait soudain reculé.

« Hm ? » Galford, en restant prudemment sur ses gardes, ne l’avait pas pourchassée.

« J’abandonne. » Ryoka abaissa son long sabre chinois.

« Hmph… Si vous partez, les Races n’ont aucun intérêt à vous retenir, » déclara Galford.

« Vous ne me combattez pas sérieusement, n’est-ce pas ? » demanda Ryoka.

« Qu’est-ce qui vous fait dire ça ? » demanda Galford.

« Vous me suivez, toujours à la bonne vitesse. Et quand je laisse une ouverture, vous n’essayez pas de la percer, » déclara Ryoka.

« … Je suis un homme prudent. Je ne vois que des ouvertures trop évidentes comme des pièges, » répondit Galford.

« Vraiment… Je suppose alors que je vais devoir vous faire jouer pour de bon, » déclara Ryoka.

Ryoka avait déplacé son regard derrière Galford, le fixant sur Émile et son groupe.

Quoi... Quoi !?

Bien sûr, ils n’avaient pas été pris au dépourvu. Ils étaient exceptionnellement prudents, ou du moins ils le pensaient… Les yeux de Ryoka brillaient dangereusement.

« Esquivez ! » cria Laminitus.

« Gah !? » Eristoff l’enchanteur avait craché du sang. Un trou lui ouvrit le côté gauche de son torse, et il tomba face contre terre.

« Eristoff ! » Émile s’agenouilla à côté de lui, criant son nom comme s’il souffrait.

« Gragh… » En réponse, ce qui sortait de sa bouche n’était pas des mots, mais plus de sang.

« E-Eristoff ! » Turon, le guérisseur, agita son bâton sur l’enchanteur blessé, offrant ses prières à Dieu. Une faible lumière enveloppa Eristoff, qui resta simplement allongée là en silence.

« Mon Dieu ! Que ta miséricorde soit sur nous ! » déclara Turon.

Seul le silence…

« Guérissez ses blessures, Dieu ! S’il vous plaît, mon Dieu ! » déclara Turon.

Turon tissa sérieusement son sort de guérison, mais Eristoff ne bougea pas. L’homme n’avait pas repris son souffle.

« Uuuu... Kuh... » Turon était tombé à genoux.

« E... Est-il mort !? » Émile n’arrivait pas à reconnaître sa propre voix quand ces mots lui échappaient. Son camarade venait de mourir sous ses yeux.

« Eh bien ? » demanda Ryoka, ses lèvres se tortillant en un sourire impitoyable. « Si tu n’es pas sérieux avec moi, je t’en tus un. Vous, les Races, vous détestez ça, n’est-ce pas ? Je parle de voir vos amis mourir. »

« Ne faites rien de stupide ! » Galford avait averti Émile — .

Mais le soldat en deuil s’était déjà lancé dans un sprint.

« Je vous maudiiiiiiiiiiitttt ! » cria Émile.

Le sang d’Émile bouillait dans ses veines. Il s’était précipité à Ryoka, son épée avait basculé vers le haut.

« Idiot… » Laminitus fit claquer sa langue et elle tira avec son fusil magique.

« Ah !? » Ryoka avait reculé alors que le coup de feu grondait dans les oreilles de tout le monde.

Elle l’a frappée ! Elle ne l’a pas évité !? Elle n’a pas pu répondre à temps !? Ou peut-être qu’elle a été négligente ! Peu importe, c’est ma chance !

« Frappe à l’Épée III ! » Émile s’était précipité, utilisant la capacité martiale de la classe de guerrier pour combler l’écart entre eux d’un seul bond.

« Ne vous approchez pas d’elle si négligemment ! » cria Galford.

Mais l’esprit d’Émile était trop taché de colère pour s’en soucier. Ryoka, dont la position avait été perturbée, balança d’une main son long sabre chinois sur sa tête. Leurs épées s’affrontèrent férocement.

Puis, la lame massive de Ryoka s’approcha des yeux d’Émile.

« Hah ! » Il avait dévié le long sabre chinois avec son épée. Il avait ensuite interrompu son élan horizontal au milieu de la ruée et avait libéré un autre talent martial.

« Quadruple frappe ! »

C’était un talent martial qui exigeait prétendument d’être un guerrier de niveau 80 ou plus. C’est une capacité qui allait libérer quatre attaques simultanées effectuées par un guerrier surhumain capable de manier une épée avec aisance. Ryoka avait bloqué l’une des entailles, mais les trois autres avaient touché leur cible et l’avaient fait voler.

« Kah !? Espèce de petit avorton insolent ! » s’écria Ryoka.

« Je n’en ai pas fini avec toi ! » s’écria Émile.

C’était l’effet de sa longue formation. Ryoka était beaucoup plus fort que Gregore, le Déchu qui avait attaqué Faltra la dernière fois, mais Émile était là, repoussant un adversaire si puissant dans cette bataille violente.

Une partie du mérite revenait aux enchantements d’Eristoff. L’épée magique d’Émile n’avait pas craqué en frappant contre le long sabre chinois, pas plus qu’elle ne s’était fracturée en frappant contre le corps solide de Ryoka.

Je te vengerai, Eristoff !

Son épée avait frappé contre le flanc de la déchue, et son corps s’était plié dans une direction contre nature. Si elle avait été de l’une des Races, elle aurait été coupée en deux.

Je peux gagner !

Émile avait pris position avec son épée visant vers le haut : le talent martial, Chute Montagneuse III. Il avait une puissance exceptionnelle, mais il fallait beaucoup de temps pour le déclencher. Dans la plupart des situations, essayer de l’utiliser ne ferait que vous faire frapper en premier. Quand Émile avait combattu Diablo une fois auparavant, il avait été frappé avant d’avoir pu activer son talent martial et avait été projeté en arrière dans un mur.

Mais Émile croyait de tout son cœur que ce talent martial soi-disant inutile était le plus approprié pour lui. Pour cette seule raison, il avait même étendu sa maîtrise à la compétence spéciale « Activation Instantanée » qui avait raccourci son temps d’activation. Ainsi, lorsqu’il était utilisé contre un adversaire ayant perdu son équilibre, la Chute Montagneuse III se faisait dans le temps.

« Prends-le ! » cria Émile.

Le visage de Ryoka était entré dans sa ligne de mire. Elle avait des cornes ainsi que des ailes et une queue de dragon. C’était une Déchue, avec le sang des Races sur les mains. Mais son visage… était celui d’une femme.

*

Je m’appelle Émile Bichelberger. Protecteur de toutes les femmes !

*

« Kuh ! » Contre son gré, Émile hésita un instant.

Ryoka avait affiché ses crocs. « Tu es une déception, petit avorton ! »

L’épée qui s’était écrasée sur la tête de Ryoka avait été brisée par un coup porté par son long sabre chinois.

« Quoi !? »

Une aura noire qui ne pouvait être décrite que comme des flammes répugnantes s’était échappée de la lame de son ennemi. Alors même qu’elle était submergée d’attaques, Ryoka avait gardé caché son atout le plus fort. Y allait-elle doucement avec eux ?

« Deuxième meurtre ! » Le long sabre chinois enveloppé de flammes noires s’abattit sur Émile, qui avait maintenant perdu son épée.

« Émiiiiiiiile ! » Quelqu’un s’était placé entre les deux combattants, bloquant le long sabre chinois de la Déchue avec son énorme bouclier.

… Ou du moins, il avait tenté de le bloquer.

« Gaaah !? » Grutas le défenseur avait été sommairement coupé en deux avec son bouclier.

« Gru… Aaah... !? » La vision d’Émile était peinte en rouge.

Malgré la frappe à travers un bouclier épais et l’homme massif qui le tenait, l’épée de Ryoka s’était encore déplacée avec un élan terrifiant, déchirant l’armure d’Émile. C’était comme si une tige de métal chaud avait été pressée contre sa poitrine. Ce n’était pas tant douloureux que terriblement chaud.

« Aaaaaaaaaaaahh !? »

Émile était tombé par terre. Seule la douleur l’avait dépouillé de toute sa force.

« On dirait que mon deuxième meurtre a été un autre petit avorton, » dit Ryoka, regardant Émile comme un insecte. « Eh bien, quoi qu’il en soit. Qu’est-ce qu’on dit maintenant ? As-tu toujours envie de te retenir ? »

Elle ne considérait plus l’existence d’Émile. Son intérêt s’était déplacé de nouveau à Galford.

« … Ignorer l’ordre d’attaquer à l’aveuglette, pour finir hors service…, » il soupira en réponse à sa question. « Je savais qu’on ne pouvait pas compter sur les aventuriers. Vous n’avez même pas été utile pour nous faire gagner du temps. »

Leur faire gagner du temps… Galford attendait — il attendait quelqu’un qui pourrait renverser la vapeur. Mais à en juger par ses paroles, il avait décidé d’abandonner cet espoir non fondé. Il avait jeté son épée usée de côté.

« Je n’avais pas l’intention de l’utiliser jusqu’à ce que je combatte le Seigneur-Démon, mais vous ne me laissez pas le choix…, » déclara Galford.

***

Partie 7

« Qu’est-ce qu’il y a ? » Ryoka inclina la tête. « Vas-tu jeter ton arme… ? Ne me dis pas que tu songes à te rendre. On va tous vous massacrer. Je disais ça comme ça. »

« Je m’attendais donc à cela… Mais laissez-moi vous dire ceci : vous êtes une Déchue, ne vous attendez à aucune pitié de ma part. »

Galford n’avait pas une épée en main. Malgré ce revers, il avait pris position comme s’il tenait une épée à la taille.

« Ce… n’est pas du bluff. » L’expression de Ryoka devint d’autant plus emplie de doute.

Galford n’avait pas bougé d’un poil, mais la sueur avait commencé à couler sur son visage. Son pouls s’accélérait, et son souffle sortait en rafales plus courtes. Il se tenait prêt, les muscles saillants.

Les talents martiaux allaient consommer l’endurance qui courait à travers votre corps, connu sous le nom de PE. S’ils étaient utilisés de façon interne, ils pourraient élever vos capacités physiques à leur limite maximale. Mais une fois maîtrisé, il déverrouillait une autre utilisation pour votre PE.

« Haaaaaaaaaaaaah ! »

Votre PE pourrait être concentré à l’extérieur de votre corps et se matérialiser.

Galford balança ses bras comme s’il faisait surgir quelque chose, puis une épée brillante se matérialisa dans sa main.

C’était l’Épée de Lumière.

« Tu prends enfin ça au sérieux. » Les côtés des lèvres de Ryoka se recroquevillaient en souriant avec excitation. « Et dire que j’allais presque te massacrer comme le sac de viande inutile que tu es. »

Ryoka donna un coup de pied au sol, décollant à une vitesse qu’elle n’avait jamais atteinte auparavant. Émile savait qu’elle se retenait, mais elle l’avait quand même battu et elle avait pris la vie de ses amis, le laissant ramper pathétiquement sur le sol.

Un monstre…

Ryoka était à un niveau qui lui était propre, même parmi les Déchus. Si un héros de la guerre comme Galford devait dévoiler sa technique ultime, les races n’avaient aucune chance contre un tel ennemi, voilà ce que croyait Émile.

« Montre-moi tes techniques de combat sérieuses ! » Ryoka avait été la première à déplacer son arme vers le bas. « Un sourire est sur mon visage, humain ! »

« Argh ! » Tordant son corps, Galford avait dévié la frappe. Étonnamment, l’épée de lumière avait été écrasée, craquelée en fragments de lumière.

« Hiyaaaaaaaaaah ! » Ryoka hurla d’un rire étrange et aigu.

« Coupe ! » Galford balança sa main gauche à l’air libre. À ce moment-là, une deuxième lame de lumière avait été générée à sa gauche. Du sang s’était répandu dans l’air alors que les deux bras de Ryoka avaient été coupés.

« Quoi !?? Comment… !? » Son long sabre chinois était tombé par terre, alors que ses deux poignets le saisissant toujours.

« Je ne te laisserai pas partir ! » Galford l’avait regardée avec des yeux injectés de sang.

*

Quand il avait fini de crier, sa main gauche avait déjà déplacé l’épée de lumière. La tête de Ryoka avait quitté son cou, volant haut dans les airs avant de s’écraser sur le sol.

*

« C’est impossible !? Comment ai-je… !? » Les yeux de Ryoka réduite à rien d’autre que sa tête s’élargirent à tel point que ses globes oculaires semblaient étayés pour s’étendre. En la voyant parler avec la tête coupée, il avait compris à quel point son existence était détachée de celle d’un simple mortel.

« Qu’est-ce que c’est ? » C’était Galford qui l’avait regardée de haut cette fois. « Allez-y, riez… Ne parliez-vous pas de la joie et de l’amusement de la bataille ? »

« Gah ! Espèce d’insignifiant, petit…, » déclara Ryoka.

« Vos blessures guérissant aussi vite qu’elles le font, vos sens de la peur et de la prudence se relâchent, réduisant ainsi votre défense. Grâce à ça, vous avez perdu votre arme, » déclara Galford.

« Tu avais deux épées ! Tu m’as piégée, lâche ! » déclara Ryoka.

« Lâche, hein… ? Aucun compliment ne pourrait avoir un goût aussi sucré, » répliqua Galford.

« Comment peux-tu t’amuser quand tu te bats comme ça !? » demanda Ryoka.

« Je vous l’ai déjà dit : pas une seule fois, jamais je n’ai trouvé la bataille agréable. »

Galford avait enfoncé son épée de lumière dans la tête de Ryoka.

Assis sur le dos d’une énorme bête magique, Lazpuras examina la bataille. La première bête magique qu’il chevaucha fut réduite en particules de lumière par la puissance du canon du Seigneur-Démon Suprême, alors il se trouvait maintenant au sommet d’une autre grande tortue. À ses côtés se trouvait l’utilisateur de la bête magique Manuela, et le commandant en chef de l’armée, Eulerex, était également à proximité.

« Une bataille digne du héros de la lame scintillante, Chester Ray Galford. Je n’aurais pas pensé que Ryoka périrait après avoir été fortifiée au-delà de ses limites… »

Ils avaient été surpris, mais c’était dans leurs calculs. Le commandant en chef pensait que Ryoka était une horreur, après tout. Elle était jeune, désinhibée et avait tendance à ignorer les ordres. Elle faisait partie de la faction d’Edelgard, et essayait manifestement d’élever sa position. Eulerex aurait dû tuer ce talent dans l’œuf pour consolider la position qu’il s’était forgée. Il avait probablement laissé Ryoka se battre de son propre chef, anticipant qu’elle serait vaincue au cours du processus.

Ce rusé Déchu était-il un tacticien astucieux ? Ou peut-être un faible qui s’inquiétait de sa propre importance ? L’évaluation que Lazpuras avait de lui avait été équilibrée entre ces deux impressions, mais… peu importe, le cas, la position d’Eulerex avait été ce qui avait maintenu l’armée ensemble. Son leadership et sa détermination étaient absolument nécessaires.

Lazpuras avait déplacé son regard vers la boîte placée sur le sol.

Le Seigneur-Démon Suprême Modinaram n’est plus dans un état où il est digne d’être appelé notre seigneur.

« Seigneur Eulerex, nous devons fermer la boîte, » déclara Lazpuras.

« C’est trop tard. »

« Qu’est-ce que vous dites !? »

« On dirait qu’ils ont piqué l’intérêt du Seigneur-Démon Suprême. »

« Est-ce… est-ce… acceptable ? » Lazpuras parla, mettant ses doutes en mots. « Une autre ville pourrait être anéantie. »

Il fallait une grande quantité de nourriture pour maintenir l’armée du Seigneur-Démon, surtout maintenant qu’elle était devenue aussi grande qu’elle l’était. Ils n’avaient pas de provisions et devaient faire des raids dans les villes des races pour se nourrir.

« Une fois que nous passerons par Faltra, de nombreuses positions humaines seront exposées devant nous, » déclara Eulerex, son cou tournant horizontalement. « Pour l’instant, nous allons laisser le Seigneur-Démon Suprême nous montrer sa grande puissance. »

« Je vois… »

« L’ennemi a eu tort d’attiser le désir de se battre du Seigneur-Démon Suprême. Un acte de folie, en effet. Leur insistance à vouloir se battre ne leur a fait qu’obtenir cette conclusion. »

Peut-être que cela aussi faisait partie des calculs d’Eulerex. Il avait laissé Ryoka rencontrer sa mort pour que son combat attire l’attention du Seigneur-Démon Suprême. De plus, avec Faltra réduit en cendres, le côté ouest de Lyferia tomberait facilement sous leur contrôle.

Vraiment rusé…

« Dire qu’ils vont devoir se battre contre le Seigneur-Démon Suprême…, » Lazpuras regarda vers Faltra. « Je suis peut-être un Déchu, mais j’ai un peu de pitié pour eux. »

« Vous êtes bien trop naïf, prêtre ! »

C’était peut-être le cas. Mais il n’avait pas pu s’en empêcher, car le pouvoir du Seigneur-Démon était beaucoup trop écrasant…

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

Laisser un commentaire