Chapitre 1 : Erina Reufelia
Partie 2
Le silence planait sur eux… Mais alors une voix inhabituellement brillante avait navigué entre eux deux.
« Oh, salut, Diablo ! Super boulot là-bas ! »
« Tu as bien fait, patron ! »
Deux marcheuses des herbes avaient traversé le hall en titubant. L’une d’elles était Sylvie, le Grand Maître de la Guilde des Aventuriers de Faltra. L’autre était Horn, une voleuse aspirant à devenir une sorcière. Toutes les deux ressemblaient à des petites filles, et Horn avait en fait treize ans. Diablo ne connaissait pas l’âge de Sylvie, mais elle était apparemment beaucoup plus âgée.
Les marcheuses des herbes étaient une race qui avait les oreilles et la queue d’un lapin et qui gardait une apparence enfantine et juvénile même en vieillissant. Sylvie fit signe de la main à Diablo de s’approcher, ses oreilles se balançant d’avant en arrière.
« Les gens de l’Église nous ont préparé de la nourriture. Les potions peuvent guérir vos blessures et réparer vos os, mais vous ne pouvez pas travailler ou vous battre avec un estomac vide. »
La nourriture, hein… ?
« Oui, oui ! » Shera avait levé les deux mains en l’air. « Ça a l’air délicieux ! Diablo, allons manger ! »
Manger était en effet nécessaire. Les combats avaient commencé à l’aube, et il était déjà midi passé.
Je devrais manger maintenant, quand j’ai encore le temps.
« Je t’ai vu dehors, patron ! » dit Horn avec excitation, en balançant ses poings serrés. « Tu étais super fort ! »
« Hm ? »
« Ta magie a fait exploser cette géante rouge de l’Empire ! J’ai regardé dehors juste à temps pour le voir ! »
Diablo s’était tu.
« Et puis tu as aussi achevé ce géant blanc, et sauvé Rem ! Ta magie est la meilleure, patron ! J’espère pouvoir utiliser quelque chose comme ça un jour, moi aussi… »
« Kuh... »
Diablo pouvait s’en souvenir. Les derniers mots qu’il avait entendus venant de l’intérieur du « Viatanos du Blanc »…
« Aaah, aaaaaaaaah... Nooon ! Il m’écrase ! Il me déchire ! Sauve-moi ! Migurtha, Migurthaaaa ! Airaaaaaaaa ! Quelqu’un, sauvez-moi ! »
« Défausse ton unité, Rikka ! »
« Ça ne bouge pas ! Il ne s’ouvre pas, il ne… Aaaaaaaah… Maman, grande sœur… Sauvez-moi… Quelqu’un, s’il vous plaît, sauvez-moiiiiiiiiiiii ! »
Le cri était resté dans ses oreilles. Diablo sentit quelque chose bouillonner au creux de son estomac.
« Argh… »
Si son estomac n’avait pas été vide, il aurait probablement vomi. Il avala silencieusement les sucs gastriques amers et acides qui lui montaient à la bouche et il tourna le dos.
Il y avait des gens dedans…
Les Sols Magimatiques étaient des armes habitées, et ils n’étaient pas des monstres ou des Déchus à l’intérieur. Ils étaient juste ses ennemis. Ses adversaires. C’est tout.
« Hein ? » demande Horn. « Patron, où vas-tu ? Aux toilettes ? »
« Allez-y et mangez sans moi. »
« Hein !? Tu ne manges pas ? Mais tu n’as pas mangé de la matinée… ! »
Mais quand Horn avait essayé de le poursuivre, elle avait été arrêtée par — de façon assez surprenante — par Shera.
« Diablo… Si tu as faim, viens manger avec nous, d’accord ? » dit-elle d’une voix triste. « Je t’attendrai… »
Même s’il se sentait mal pour ce qu’il lui faisait subir, il ne pouvait pas réprimer l’envie de vomir. La pensée de la nourriture était la dernière chose à laquelle il voulait penser.
Je n’ai pas faim…
Il avait repensé à ces mots. Les mots qu’il avait dits à sa famille dans l’ancien monde quand il s’était enfermé dans sa chambre.
†
Diablo marchait dans le couloir. Normalement, Shera l’aurait suivi sans rien dire, mais là, il n’y avait personne. Elle avait probablement compris qu’il voulait rester seul. Ou peut-être que l’air qu’il dégageait était simplement si distant.
« Kuh... »
Aussi inepte socialement qu’il soit, il ne voulait pas gâcher l’atmosphère pour tous les autres. En fait, c’était précisément cette crainte de gâcher l’ambiance qui le faisait s’attarder, choisir ses mots avec trop de précaution et finalement ne rien dire. Et puis la culpabilité l’empêchait de respirer, lui faisait tourner la tête d’autant plus, avant qu’il ne succombe à la panique…
Non, non, non ! Je suis un Seigneur-Démon maintenant ! Dans ce monde, je suis le Seigneur-Démon Diablo ! Je suis un Seigneur-Démon ! Un Seigneur-Démon, un Seigneu - Démon, un Seigneur-Démon !
Il chantait les mots dans son esprit encore et encore, essayant de s’élever de ces pensées déprimantes. Il avait l’impression que Shera et les autres avaient depuis longtemps vu clair dans son jeu, mais cela n’avait pas d’importance.
« Ahahahahaha ! Je suis un Seigneur-Démon ! Même si mon attitude acariâtre gâche l’ambiance, je n’en ai rien à faire ! Au contraire, c’est évident que ça le fera ! C’est comme ça que ça marche ! Un Seigneur-Démon qui est gentil et amical, ça n’a aucun sens ! »
« Excusez-moi… ? » Quelqu’un l’avait soudainement interpellé par-derrière.
Aaaah !?
Si Diablo le pouvait, il se féliciterait de ne pas s’être exclamé à haute voix. Rien n’était plus embarrassant que d’être surpris en train de se parler tout seul. Et donc, tout en rougissant abondamment à l’intérieur, Diablo avait pris une expression menaçante en se retournant.
« Imbécile ! J’espère que tu t’es préparé aux conséquences de me faire signe… !? »
« M-Mes excuses ! »
La première chose que Diablo remarqua fut l’armure bleue. C’était Tria, la paladine. C’était une femme vraiment pieuse qui avait œuvré pour sauver Lumachina lorsque l’Autorité cardinale contrôlait l’Église. Elle se tenait immobile, le dos droit comme une flèche, et son expression semblait nerveuse.
« C-Capitaine Paladin Diablo, j’aimerais vous interroger sur ce que vous avez dit tout à l’heure ! »
« Qu-Qu’est-ce que j’ai dit !? » Il répète sa question, avec un léger frisson dans la voix.
Il avait dû réprimer l’envie de se tortiller sur place.
Allez, laisse un gars se parler à lui-même ! Fais comme si tu n’avais rien entendu ! Si je n’ai pas mon rôle de Seigneur-Démon, je ne peux pas garder ma tranquillité d’esprit intacte !
Alors que son moi intérieur était à deux doigts de fondre en larmes de frustration, Diablo s’était raidi sur place… Mais il s’est avéré que Tria parlait de quelque chose d’autre.
« Je veux dire ce que vous avez dit à Mlle Rem. »
« Hm ? »
« À propos des Sols Magimatiques de l’Empire de Gelmed. Je crois que vous avez mentionné quelque chose à leur sujet… J’aimerais que vous me donniez plus de détails. »
… Donc elle ne parlait pas de la façon dont je me parlais à moi-même !
Diablo avait retrouvé son sang-froid en quelques instants et avait croisé les bras en grand.
« Hmph… Formulez votre question. Mais vous feriez bien de ne pas me décevoir. »
« Vous avez dit : “Les Magimatic Sols ne peuvent pas se battre pendant de longues périodes.” Est-ce vrai ? Si oui, alors nous pouvons sans risque ordonner à nos troupes de se retirer et de se reposer. »
Oh, je vois. Diablo s’était dit en lui-même.
Il avait peu d’expérience des guerres. Il avait joué religieusement à des jeux de simulation, mais n’avait aucune connaissance des tactiques. Il ne s’était jamais intéressé aux affaires militaires ou à la politique. Pourtant, il pouvait au moins imaginer que les soldats de l’Église étaient en état d’alerte en prévision d’une attaque de l’Empire de Gelmed.
Le château était tombé, après tout, et l’armée de l’Empire était juste de l’autre côté du canal devant eux. Les ponts reliant les autres secteurs avaient été détruits, mais les Magimatic Sols étaient capables de voler. Ils étaient naturellement méfiants.
Comment l’expliquer… ?
Dans le jeu de simulation pour smartphone Girl’s Arms, chaque unité avait une statistique appelée ET — Energy Time. Elle s’épuisait progressivement tant que l’unité était déployée au combat, et l’utilisation de capacités spéciales consommait encore plus d’ET.
L’Empire de Gelmed poursuivait Rem parce qu’elle était la « Fille Réceptacle » ou quelque chose comme ça, et les soldats de l’Église et les chevaliers de l’Empire étaient clairement épuisés et à bout de forces. Mais malgré cela, les Sols Magimatiques avaient battu en retraite.
En se basant sur cela, Diablo avait conclu que les Sols Magimatiques étaient limités par l’ET dans ce monde aussi. Mais il ne pouvait pas dire : « C’est comme ça que les mécanismes du jeu fonctionnent, alors ils ne réapparaîtront probablement pas avant un certain temps ». Et essayer de l’expliquer à Tria ne la convaincrait probablement pas. Il y avait trop de vies sur ses épaules.
« Heheheh... » Diablo avait gloussé avec condescendance. « Ne peux-tu pas dire quand ton adversaire approche de ses limites ? Ils étaient grandement épuisés et avaient besoin de repos. »
« M-Mes excuses, Capitaine Paladin ! Votre sagesse et votre expérience me rendent humble. » Tria inclina sa tête en signe d’admiration.
Bien sûr, Diablo ne pouvait pas non plus savoir combien d’ET il leur restait ou s’ils utilisaient de l’ET pour commencer, juste en les combattant. Il bluffait et mentait comme un arracheur de dents.
« Réaliser autant de choses juste en observant les mouvements de l’ennemi, c’est normal ! Que vos hommes se reposent. Les forces de l’Empire ne devraient pas bouger avant un certain temps. Mais même s’ils essaient de forcer une attaque, je les frapperai moi-même ! »
« Merci beaucoup, capitaine paladin ! Je vais faire reposer les soldats et ne laisser que des sentinelles ! »
« Hm ! »
C’est à ça que ressemblait son jeu de rôle habituel de Seigneur-Démon, mais ses propres mots l’avaient rappelé. Un Magimatic Sol enveloppé par les flammes… Son intérieur détruit par son sort « Mine Explosive ». Des tentacules se tordant de douleur. Une silhouette humaine carbonisée… les restes d’une fille.
« Argh… » L’envie de vomir le tenaillait à nouveau.
« Capitaine Paladin ? » demanda Tria.
« … Ce n’est rien. Informe-moi immédiatement si l’ennemi frappe à nouveau. »
« Compris ! Capitaine Paladin, merci beaucoup. Nous étions en fait assez perplexes. Le prisonnier ne voulait rien nous dire. »
Bien sûr que non. Ils avaient probablement capturé un soldat d’infanterie ordinaire, qui en savait peu sur le fonctionnement des Sols Magimatiques.
« Un des pilotes de ces armures pourrait en savoir plus, » dit Diablo.
« Oui, c’est ce que je pense aussi… Mais elle se tait. »
« Hm ? Attends. » Diablo s’était arrêté, réalisant qu’il venait d’entendre quelque chose d’étrange.
« Hein ? » demanda Tria, confuse.
Diablo avait repensé à ce qu’elle venait de dire.
« … Hé. Le prisonnier n’est qu’un simple soldat, non ? »
« Non, c’est le chevalier qui chevauchait le Magimatic Sol que vous avez détruit, “Burix le Rouge”… Bien que je ne sois pas sûr que “chevalier” et “chevaucheur” soient les bons mots à utiliser ici. »
Pas question !
« Veux-tu dire… que c’est Erina Reufelia !? »
« Ah, oui. Je crois que c’est comme ça qu’elle s’est identifiée. » Tria avait hoché la tête.
Je pensais l’avoir tuée !
Mais en y réfléchissant, Diablo s’était rappelé que la plupart des pilotes de Girls’ Arms n’étaient pas humains, mais plutôt ce qu’on appelait habituellement des filles-monstres. Et la race d’Erina était…
« C’est une…, » marmonna Diablo.
« Je suppose que brûler n’est pas suffisant pour tuer un Vampire, » conclut Tria.
« Où est-elle ? » Diablo avait attrapé Tria par les épaules. « J’ai besoin de la voir, maintenant ! »
« Haa !? Elle est à la surface, dans un camp de prisonniers… »
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merci pour le chapitre