Chapitre 20 : Marché conclu
« Je suis à la maison ! »
Après avoir mangé avec Lety, Raiz était retourné dans sa guilde.
« Bon retour parmi nous ! » Merck l’avait accueilli avec joie. « Attends, où est Lety ? »
Puisqu’ils étaient sortis ensemble, l’homme avait trouvé étrange qu’elle ne soit pas avec lui.
« Elle a dit qu’elle retournerait à l’auberge, » répondit Raiz.
« Ohh... Je vois, » il n’avait pas l’air surpris quand il avait répondu ça.
« Est-ce que c’est correct ainsi ? N’étais-tu pas censé me ramener avec toi ? » demanda Raiz.
« Oui, mais on ne peut pas vraiment te forcer à le faire, » répondit Merck.
L’homme semblait respecter profondément le choix de son ami.
« Est-il vrai que le général actuel t’a dit de ne plus me laisser m’enrôler dans l’armée ? » demanda Raiz.
Même si Merck agissait ainsi, Raiz savait quelle était sa véritable mission.
« Qui t’a dit ça ? Lety ? » demanda Merck alors que le ton dans sa voix avait légèrement augmenté.
Personne ne l’aurait remarqué, mais Raiz, qui était un expert quand il s’agissait de lire l’expression et le comportement des monstres, ne pouvait pas le rater.
« Un ami. Il a dit qu’il y a des personnes qui ne veulent pas que je revienne, » répondit Raiz.
« Oh, y a-t-il quelqu’un qui pense autant à toi ? » demanda Merck. L’homme avait essayé d’agir de manière cool, mais au fond de lui, il était dans la tourmente.
Donc, un espion de Mard se cachait dans la faction du Général Frida... ? C’est mauvais... Qu’est-ce que je fais maintenant ?
Il était déconcerté. Si l’armée savait ce qu’on lui avait ordonné de faire, à son retour, il serait probablement harcelé par les anciens combattants, même si le dompteur ne voulait pas revenir.
Pour causer des problèmes avec Raiz, certains gars ont même mis beaucoup de grenouilles dans sa chambre une fois...
Mais le dompteur l’avait rassuré.
« Ne t’inquiète pas, Merck. Je ne reviendrai pas dans l’armée. Je vivrai ici à partir de maintenant, » déclara Raiz.
« ... V-Vraiment !? C’est bon à entendre ! » déclara l’autre sans réfléchir.
« Au fait, l’espion que nous avons saisi l’autre jour était de Serga, n’est-ce pas ? » demanda Raiz.
« Oui. Je l’ai fait taire et je l’ai dénoncé. Pourquoi cette question ? » demanda Merck.
Il savait ce que Raiz allait dire, alors il avait commencé à pâlir.
« Le poison que tu lui as pris ressemblait à celui que tu as créé, » déclara Raiz.
« Qu’est-ce que tu dis !? » s’écria Merck.
Il avait raison. Cela aurait été mauvais s’il l’avait confirmé, alors Merck s’était creusé la tête pour trouver un moyen de se couvrir, mais Raiz n’avait pas arrêté de parler.
« Aussi, pourquoi un pays n’enverrait-il qu’un seul espion ? » demanda Raiz.
« Hein ? » s’exclama Merck.
C’était parfait. Il n’y avait pas pensé. Après tout, Merck n’était qu’un chevalier, et non un tacticien ou un membre d’une unité spéciale. Il était également jeune, de sorte que ce détail lui avait totalement échappé de l’esprit.
« Dès que j’ai saisi les autres, ils ont tous décidé de parler. Pourquoi apporteraient-ils du poison dans leur barda s’ils venaient me recruter ? » demanda Raiz.
« Tu ne penses pas que c’est négligent de les croire comme ça !? Ils étaient nos ennemis, Raiz ! » s’exclama Merck.
Il croyait franchement en ses propres mots. Faire confiance à quelqu’un avec qui vous avez été en guerre pendant dix ans était au-delà de la naïveté.
Puis, Raiz avait pris une fiole dans sa poche de poitrine. « Qu’est-ce que tu crois que c’est ? »
« Le poison que j’ai pris à cet espion ? L’as-tu pris dans la chambre de mon auberge !? » demanda Merck.
Merck avait commencé à perdre son sang-froid en levant les sourcils en état de choc.
« Calme-toi, je n’ai rien fait de tel, » déclara Raiz.
« Hein ? »
Le dompteur avait claqué des doigts et un important bruit était venu de l’extérieur de la structure... ou plutôt, puisque le bâtiment n’avait pas de murs, il n’était pas possible de dire que le son venait de l’extérieur...
Merck avait tourné la tête et avait vu des personnes en vêtements noirs empilés sur le sol. Aucun d’entre eux ne bougeait un doigt, ils étaient probablement inconscients. Pourtant, les vêtements noirs qu’ils portaient étaient différents de ceux saisis par l’unité de l’ombre.
« Qui sont ces types ? » demanda Merck.
Il se demandait s’ils venaient du pays voisin.
« Ils font partie de l’unité spéciale de ce pays. Ils sont venus t’observer, » déclara Raiz.
« Eh !? » s’exclama Merck.
Au début, il n’avait pas compris ce que Raiz avait dit vu qu’il avait été tant choqué par ça.
« Je suppose qu’ils sont venus voir si tu fais ton travail correctement. L’un d’eux avait ceci sur lui, » déclara Raiz.
Grâce au réseau d’information de Cat Sith, aux fils d’Arachne et aux observations sporadiques de Dragon quand il était allé voir des monstres dans la forêt, Raiz avait compris qu’ils venaient de son propre pays.
Il avait décidé de les ignorer au début, mais après que la situation ait dégénéré, il avait demandé à ses monstres de les saisir.
« Le général Frida ne me faisait pas confiance... ? » s’interrogea Merck.
Son supérieur était incompétent, et il ne lui faisait même pas confiance. Merck n’arrivait pas à suivre la situation et se retrouvait dans un coin.
En tant que noble et chevalier, je pensais que je devais obéir à mes supérieurs pour vivre en paix dans l’armée... mais si Raiz revenait, il ne trouverait pas un accueil chaleureux. Bien sûr, il n’aimerait pas ça.
Il était inutile d’y penser maintenant. Il devait encore suivre les ordres de son général.
Raiz avait rompu le silence en premier. « Merck, veux-tu passer un marché ? »
« Hein ? »
De quoi parlait-il ?
« Je te donnerai ces gars, et dans ton rapport, tu diras que tu les as capturés pendant qu’ils essayaient de négocier avec moi, » déclara Raiz.
« E-E-Eeeh !? Qu’est-ce que tu veux dire par là !? » S’écria Merck.
Merck était déconcerté. Il était le seul à pouvoir en bénéficier.
« Je ne veux pas retourner dans l’armée, et ils ne veulent pas non plus que je revienne. Cela signifie que nous partageons le même point de vue sur la question, » répondit Raiz.
« O-Oui…, » balbutia Merck.
« Pourtant, ces espions m’ont dit de rejoindre les leurs. C’est mauvais pour toi, non ? » demanda Raiz.
« Oui, plutôt mauvais, » répondit Merck.
L’ancien général Mard était particulièrement inquiet concernant ça.
« Alors, l’armée devrait me défendre pour que je ne puisse pas être pris pour cible par d’autres pays, » annonça Raiz.
« Eh ? » Il avait fixé son ami avec étonnement.
« Et j’oublierai le poison. De plus, puisque l’armée ne veut pas de moi et que je ne veux pas rejoindre un autre pays, tu ne peux que me protéger, n’est-ce pas ? » déclara Raiz.
« Ça ne marchera pas ! Le général Frida n’acceptera pas une telle chose ! » répliqua Merck.
Si Raiz avait été licencié à cause des coûts d’entretien, pourquoi le général utiliserait-il encore plus d’argent et de main-d’œuvre pour lui ?
Si Merck offrait une telle proposition à son supérieur, il serait certainement dégradé.
« J’ai déjà terni la réputation de notre unité spéciale. Cela signifie qu’à la fin, personne ne peut m’assassiner. Vois-tu ce que je veux dire ? » demanda Raiz.
« ... Ah ! » Finalement, Merck avait compris ce qu’il disait.
Même si le général Frida envoie plus d’espions, ils seront détruits. Cela signifierait aussi que Raiz pourrait se déplacer dans un autre pays et devenir notre ennemi. De plus, le Général va à l’encontre des ordres du Roi et de l’ancien Général, de sorte qu’il serait viré et ruiné si c’était découvert. Est-ce que c’est ce à quoi visait Raiz en fournissant des informations ?
Le dompteur pourrait préparer son départ en moins de vingt-quatre heures. Il lui suffisait de rassembler ses monstres, de les mettre sur le dos de Dragon et d’attendre la nuit pour partir.
Atteindre quelqu’un qui pouvait voler était impossible, même pour des assassins hautement qualifiés ou des unités spéciales. Si les choses avaient pris cette direction, le général actuel aurait été remplacé et même le pays pourrait en souffrir.
Je dois aussi décider de mon avenir...
« D’accord. J’accepte ta proposition. Je te soutiendrai autant que possible, » déclara Merck.
Il pourrait utiliser cette information pour faire chanter le général et devenir son proche assistant.
Ces espions sont la preuve qu’il y a quelqu’un qui a divulgué des informations. Je leur dirai que leur vie a été épargnée grâce à mes actions et qu’ils ne dérangeront plus Raiz. Ce sera un énorme profit pour moi, et si je deviens vice-général, il est probable que je deviendrai général après que Frida prenne sa retraite ! Raiz profitera également de cette situation !
Merck n’avait pas d’idéaux, il ne pensait qu’à vivre en paix.
C’était pourquoi il s’était rapproché de Raiz, qui était une source de profit, et avait accepté de suivre les ordres de son général inepte.
C’était un opportuniste jusqu’au fond.
« Portons un toast pour commémorer cet accord ! C’est ma tournée ! » déclara Merck.
« Non merci, je viens de déjeuner et je n’en ai nullement envie, » Raiz avait froidement et immédiatement refusé l’invitation de Merck.
Merci pour le chapitre.