Bienvenue au Japon, Mademoiselle l’Elfe – Tome 5 – Chapitre 11 – Partie 1

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Chapitre 11 : Sur la Route

Partie 1

J’observais en ce moment le ciel s’éclaircir. La rivière était devenue brune à la saison des pluies et son niveau d’eau était monté jusqu’au rocher sur lequel j’étais assis. Elle coulait avec beaucoup plus d’intensité que d’habitude, et une grande partie du lit de la rivière avait été avalée par les eaux troubles.

Après un moment, je jetais un coup d’œil pour voir un Zarish inconscient étendu à l’ombre d’un rocher. Il avait dû vivre une expérience très traumatisante, vu qu’il n’avait pas une seule blessure sur lui malgré son visage pâle. À en juger par ses gémissements, il ne faisait pas un très bon rêve. Il était à peu près six heures du soir au Japon, à l’heure qu’il est. Alors que la pensée me traversait l’esprit, une voix m’avait parlé par le biais du Chat de Lien Mental.

« Hm, il semble que tu y pensais depuis le début. » La draconienne n’avait pas l’air de dormir, bien que l’aube soit déjà là. En fait, il y avait un ton doux et maternel dans sa voix. J’avais senti les doigts autour de la poignée de mon épée trembler légèrement à ses mots.

« Je suppose que rien ne t’échappe, Wridra. Les deux autres dorment-elles ? » demandai-je.

« … En effet. Elles ont l’air tout à fait paisibles. Elles ont été turbulentes si tard dans la nuit. Hah, hah, leurs visages endormis commencent à m’endormir. » Je poussai un soupir de soulagement. Je ne voulais pas qu’elles voient ce que je m’apprêtais à faire.

« Tu as la voix d’un homme maintenant. Je te voyais comme un avorton, mais tu es devenu si fiable avant que je ne le sache, » déclara Wridra.

« Ce n’est pas comme ça. Il s’avère que j’ai un tempérament sanguin. On ne sait jamais ce qu’un type comme moi peut faire dans un accès de rage. » La dragonne avait gloussé, et nous avions tous les deux expiré en même temps. Notre soupir matinal était identique, malgré la distance qui nous séparait. Elle regardait probablement tout comme moi le ciel blanc. C’était peut-être pour cela que mes prochains mots pour elle étaient si honnêtes.

« Merci, Wridra. Pour ne pas t’être mise entre moi et Zarish ce jour-là, » déclarai-je.

« Je n’aime pas les subtilités des interactions humaines. J’ai simplement pensé que c’était une épreuve nécessaire à traverser pour toi. Cependant, c’était plus par intuition que par logique de ma part. » J’avais vraiment apprécié. Si je l’avais laissée agir à l’époque, je l’aurais probablement regretté même maintenant, alors que nous étions en train de nous amuser ou de faire autre chose. Et même si Wridra l’avait battu pour moi, cela m’aurait quand même marqué. La honte de lui avoir fait faire tout le sale boulot serait restée avec moi tout le temps.

Cette étape était donc pour moi. Peut-être que ce que je m’apprêtais à faire n’était que de la cruauté pour ma propre satisfaction. Mais je n’aurais pas pu faire marche arrière maintenant.

J’avais de nouveau placé ma main sur la poignée de mon épée. J’avais une fois pour toutes pris la résolution de mettre fin à sa vie. J’avais lentement sorti mon épée de son fourreau, en observant son visage inconscient en silence.

« … J’ai une information intéressante pour toi. On dit qu’il n’y a en fait qu’une seule condition pour qu’un mâle et une femelle deviennent une paire. » Les doigts autour de mon arme s’étaient desserrés. Mon champ de vision étroit s’était élargi à nouveau en raison de ses mots, et j’avais imaginé la dragonne dans mon esprit en lui répondant.

« Pour devenir une paire ? Le mâle doit-il prouver sa force ou est-ce autre chose ? » demandai-je.

« Non, pas cela. C’est pour faire croire à la femelle qu’elle serait d’accord pour mourir. » Ma curiosité avait grandi en entendant cela. À ce moment, j’avais pensé à Mariabelle, pour une raison inconnue.

L’elfe à moitié féérique était toujours si adorable, et je pensais à la façon dont elle s’appuyait contre moi pour se réchauffer lorsqu’elle lisait des livres. Son corps léger qui s’appuyait contre le mien remplissait toujours mon cœur, que je sois au Japon ou dans le monde des rêves. Wridra continua sur un ton doux.

« Il est dangereux de donner naissance à un enfant. C’est pourquoi une femme doit penser qu’il vaut la peine de mourir avec son partenaire avant que les deux puissent vraiment former un couple. »

« Tu dis donc que ce n’est pas moi qui décide. C’est en fait un peu un poids en moins sur mes épaules. » On avait ri. C’était comme toujours. Mon chemin avait toujours été décidé par la curiosité de Marie, et elle me tenait la main par caprice. Je m’étais alors soudain souvenu de quelque chose, et j’avais regardé le ciel à nouveau en posant une autre question.

« Wridra, tu te souviens de ce que tu m’as dit au parc à thème ce jour-là ? Tu as dit : “Les pensées des hommes mauvais finiront par se manifester dans ton esprit sans que tu t’en rendes compte”. Je crois que j’ai enfin compris ce que tu voulais dire, » déclarai-je.

Des hommes puissants et méchants comme lui avaient toujours géré les choses de manière très efficace. Moi aussi, j’essayais de résoudre ce problème à la racine en prenant la vie d’une personne inconsciente. C’était, en effet, la façon la plus efficace de procéder. Mais cette décision avait été prise en raison de ma propre faiblesse. Sinon, j’aurais pu choisir une autre voie, comme le défier en duel.

« Wridra, ne me dis pas que tu crois que je pourrais le battre en duel ? » demandai-je.

« Je n’aime pas le décrire comme une “croyance”. Cela peut sembler agréable, mais je n’opère pas sur la base d’une croyance aveugle. Je souhaite simplement qu’elle devienne vraie, enfant de l’homme, » répondit Wridra.

Pour une raison inconnue, j’avais été ému. Nous étions peut-être très éloignés, mais j’avais senti les paroles de mon mentor dans mon cœur et j’avais remis mon épée dans son fourreau.

Afin de continuer à vivre sans honte, de continuer à tenir la main de Marie et de tenir ma promesse avec Eve de résoudre ce problème avec le moins de violence possible, j’avais décidé de garder mes mains exemptes de sang.

 

§§§

Alors que le ciel s’éclaircissait, l’homme gémit. Je l’avais regardé s’asseoir, puis je lui avais parlé d’une voix calme.

« Enfin réveillé, Zarish ? J’espère que tu as apprécié ta nuit de terreur. »

« … »

Son visage s’était transformé en un air renfrogné pendant un instant, puis il s’était massé les sourcils. Son corps avait dû être épuisé par cette peur et cette tension extrêmes, mais cela n’avait pas dû affecter ses performances au combat. Après tout, il était connu comme le candidat héros.

« Maudit sois-tu… ! Où est-ce que c’est… !? »

« Un endroit assez éloigné du manoir des roses noires. Mais ce n’est pas si loin que tu ne puisses pas retourner dans la civilisation, » répondis-je.

Il avait scruté son environnement pour s’assurer que personne d’autre ne se cachait quelque part. Bien sûr, j’étais le seul ici. Marie et Eve dormaient profondément, et j’avais préparé cet endroit par moi-même en utilisant Trayn, le guide du voyage, ma technique de mouvement qui ne pouvait être utilisée qu’une fois par jour.

Zarish avait tourné ses yeux vers sa taille et il avait été surpris de constater que son épée était toujours là. Il avait eu raison d’être surpris. Vu qu’il était inconscient, j’aurais pu le tuer à tout moment. Pendant qu’il digérait son choc, je lui avais reparlé calmement.

« J’aurais pu y mettre fin après notre petit plaisir, mais il s’avère que je ne peux pas ignorer ma haine envers toi, » déclarai-je.

« La haine ? Pour t’avoir tué ? »

Non, je ne l’aurais pas détesté juste pour ça. Après tout, j’avais été tué par la plupart des femmes que je connaissais, et je ne savais pas combien de fois j’avais été dissous par des créatures quand j’étais plus jeune. Il pouvait dire ce que je pensais juste en regardant mon visage.

« Je suppose que je suis aussi gamin qu’il le semble. Parce que tu as essayé de mettre la main sur Mariabelle et pour tout ce que tu as fait aux nombreuses femmes autour de toi… Je suis en colère, aussi rare que cela soit, » répondis-je.

Un large sourire s’était répandu sur le visage de Zarish. En tant qu’homme qui avait toujours pris ce qu’il voulait, il avait probablement eu affaire à beaucoup de gens comme moi. Et donc, il se disait probablement : « Encore ça ? » C’était beaucoup, beaucoup plus facile à comprendre pour lui que les farces d’hier soir, et la peur en lui avait commencé à se dissiper. Après tout, son adversaire était le garçon qu’il avait poignardé en plein cœur il y a juste un jour.

« Je veux protéger la femme qui m’est précieuse. Je ne te laisserai pas la faire pleurer comme tu l’as fait avec les femmes autour de toi… Mais je ne peux pas m’empêcher de trouver ça ringard quand je le dis à voix haute, » déclarai-je.

« Hah, tu es beaucoup plus simple à comprendre maintenant que tu es de retour en chair et en os. Eh bien, je suis un homme qui prend ce qu’il veut. Tu peux abandonner l’espoir jusqu’au jour où je mourrai de vieillesse, Fantôme, » déclara-t-il.

Notre amusante petite fête de l’horreur s’était terminée, et j’allais maintenant faire face à un adversaire monstrueux, l’épée à la main. C’était pour le bien de mon propre ego, et pour ce que l’Arkdragon avait voulu.

Ses yeux scintillaient dans la lumière de l’aube comme celle d’une bête, et son intensité meurtrière faisait crier mon instinct « Fuis ». Mais c’était l’homme qui avait comploté pour faire vivre l’enfer à Mariabelle. Je devais mettre fin à son voyage ici et maintenant. J’avais pris la résolution de ne lui accorder pas la moindre pitié.

Mon cœur battait avec force dans ma poitrine.

Ce n’est pas que j’avais peur de l’horrible adversaire qui se trouvait devant moi.

Un sentiment que même moi je ne pouvais pas comprendre était au fond de moi, et j’avais l’impression qu’il prenait forme et devenait réel dans cette bataille. Quoi qu’il en soit, j’avais le sentiment que ce « quelque chose » fondu en moi était sur le point de naître dans ce monde.

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