Almadianos Eiyuuden – Tome 3 – Chapitre 67

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Chapitre 67

Juste après l’arrivée de Frigga, un chevalier fut envoyé à cheval du fort Miever.

Il chevaucha jour et nuit, sans s’arrêter. Aujourd’hui, il y avait des auberges avec des écuries dans tout Jormungand, mais il ne se reposait dans aucune d’elles. Il avait changé de cheval, poursuivant son voyage à une allure vertigineuse.

Ce n’est que deux jours plus tard, dans la matinée, qu’il atteignit enfin la capitale du royaume.

Pourtant, il avait battu le record du temps le plus court pour atteindre la capitale à partir du fort Miever.

« Je suis ici pour faire un rapport au ministre de la Guerre… Sire Cellvis Bayard. Je suis un chef de peloton des forces stationnées au fort Miever, Vals Crayn ! »

À bout de souffle, le chevalier s’effondra sur la crinière de son cheval, mais il parvint quand même à faire passer quelques mots à travers ses gémissements douloureux.

À en juger par l’apparence épouvantable du chevalier, le garde qui l’entendit comprit que cet homme était venu aussi vite qu’il le pouvait, sans se soucier de sa propre vie.

Et cela signifiait qu’il était ici pour signaler quelque chose d’urgent.

« Je comprends… Hé, toi ! Dépêche-toi d’aller prévenir le palais royal ! Quant à toi, prends un peu d’eau. Garde-le un peu dans ta bouche. Ne la bois pas trop vite. »

« Merci… »

Tandis qu’il s’occupait du chevalier épuisé, le cœur du garde battait à toute allure. Il avait un mauvais pressentiment.

Le fort Miever était connu pour être la ligne de front faisant face à la frontière de l’empire Asgard. C’était une position stratégique importante.

Et le chevalier n’aurait pas été aussi pressé si rien de très important n’avait eu lieu.

Il se passait donc quelque chose d’important, et c’était lié à la frontière.

Une guerre est-elle sur le point de commencer ? Je ne pourrai peut-être pas profiter de cette vie facile de garde plus longtemps.

◆ ◆ ◆

Le rapport de Vals Crayn frappa le palais royal de Jormungand comme un séisme massif.

Tous les membres de la cour parlaient déjà quotidiennement de la victoire de la Laponie, comme si c’était quelque chose de mythique, mais ils avaient été frappés par une crainte encore plus grande quand ils apprirent que Frigga était passée à travers la nation ennemie et avait pris une forteresse entière avec seulement quelques cavaliers.

C’était l’histoire d’un vrai héros.

La princesse patriotique avait percé le territoire de l’ennemi, où elle était entourée partout par des forces hostiles, mais elle avait triomphé et avait même détruit une forteresse en chemin. Cette histoire avait fait vibrer les cordes sensibles des nobles de Jormungand.

« C’est ridicule ! »

Depuis la victoire de Lapland, le marquis de Strasbourg, Albert, avait désespérément essayé de garder sa faction unie tandis que la peur de la nation d’Asgard s’estompait un peu plus chaque jour.

Ce rapport l’avait mis en colère de façon insondable. Il voulait déchirer le messager membre par membre. Il ne comprenait pas comment quelqu’un pouvait oser rapporter quelque chose d’aussi absurde au palais royal.

S’il croyait le rapport de ce chevalier, cela signifierait que la princesse Frigga avait traversé le territoire de l’empire sur 400 km d’affilée avec l’aide de seulement une centaine de cavaliers.

Pour couronner le tout, elle aurait détruit le fort Mercury, ainsi que les centaines d’hommes qui y étaient stationnés, sans perdre un seul de ses propres hommes.

Si de tels grands exploits étaient vraiment possibles, le concept de « problèmes » n’existerait pas dans ce monde.

Même un laïc comme Albert savait que l’empire Asgard lui-même aurait besoin d’une armée d’au moins 10 000 cavaliers pour y parvenir.

En d’autres termes, Vals venait de rapporter de fausses informations basées sur des rumeurs exagérées.

Albert en était arrivé à cette conclusion en partie parce que l’information était trop irréaliste, mais surtout parce que le côté d’Asgard ne l’avait informé de rien dernièrement.

Grâce à sa trahison vis-à-vis de son pays, Albert pouvait se permettre d’être très confiant quant à l’exactitude de ses propres informations puisque ses renseignements venaient directement d’Asgard.

Mais cela était à l’époque où Asgard restait sur une série de victoires. Mais comme leur situation actuelle n’était plus aussi bonne, les informations qu’ils donnaient aux traîtres qui travaillaient avec eux étaient plus filtrées.

Il n’y avait aucun moyen pour eux de partager des informations comme la mort d’un commandant d’escadron asgardien et la destruction de son armée.

Comme c’était souvent le cas avec des personnes issues d’un milieu prestigieux, Albert n’avait jamais douté du fait qu’il était un collaborateur important de l’empire Asgard.

Mais en réalité, il n’était finalement qu’un pion parmi tant d’autres que l’empire utilisait pour semer le chaos dans le royaume de Jormungand.

Et bien sûr, les inquiétudes d’Albert étaient fondées. L’empire Asgard n’avait pas l’intention de simplement lui donner le trône de Jormungand, et de veiller sur lui. Après tout, ils faisaient semblant de collaborer avec lui dans un but lucratif.

« Mais qui a envoyé cette fausse information ? Serait-ce le Seigneur Bayard ? À moins que ce soit cet abruti de Rosberg… »

Le problème était que l’information de la visite de Frigga, qu’Albert croyait fausse, était actuellement utilisée pour tenter de modifier l’équilibre des pouvoirs de la cour royale. Et c’était très efficace à cet égard.

Peu importe les circonstances, la présence d’un véritable héros inciterait toujours les gens à faire passer leurs émotions avant leur raisonnement. Surtout quand ledit héros était une belle princesse.

Si Frigga venait offrir ouvertement son soutien à Lunaria, la faction de Felbelle serait morte.

Pour le meilleur ou pour le pire, Felbelle n’avait pas une personnalité aussi forte que sa sœur, Lunaria.

Il était donc facile pour l’aristocratie de traiter avec elle et pour Albert de la manipuler, mais l’inconvénient de cette faiblesse devenait de plus en plus évident.

« Raglan, tu es là ? »

« Oui. »

« Va trouver la véritable identité de cet imposteur qui se fait appeler Frigga. Peu importe que l’information qu’elle nous a donnée soit vraie ou fausse. Ce qui compte, c’est son identité. Il n’y a aucune chance qu’elle soit celle qu’elle prétend être. »

« Vos désirs sont des ordres. »

◆ ◆ ◆

L’homme qui se tenait en tête de la liste des membres de la faction de Lunaria était le ministre de la guerre, Bayard Cellvis. Et contrairement à Albert, il savait que le rapport de Vals était en grande partie vrai.

Cellvis avait été informé par Kurats lui-même du plan de sauvetage de Lapland, avant même qu’il ne commence.

Certes, il avait des doutes au début, mais comment aurait-il pu imaginer que Kurats parviendrait à obtenir de si bons résultats aussi rapidement ? C’était incroyable.

Au mieux, il avait pensé qu’avec un peu de chance, Kurats pourrait contribuer un peu et aider à retarder la chute de Lapland.

Comme on pouvait s’y attendre d’un homme qui a gagné la confiance de Sa Majesté. Mais je ne le reconnais toujours pas comme un époux convenable pour elle.

Le visage de Cellvis s’était raffermi lorsqu’il réaffirma sa détermination à éloigner Kurats de Lunaria.

Être fort ne suffisait pas. Le futur partenaire de Lunaria devait également être capable et digne de tenir debout dans le monde de la politique.

Alors que le visage de Cellvis passait d’une expression à l’autre, un soldat d’âge moyen l’approcha silencieusement par-derrière. C’était un des assistants de Cellvis.

« … Le marquis de Strasbourg semble avoir conclu que la personne qui attend à la frontière est un imposteur. »

Le rapport de l’assistant fit bien rire Cellvis.

Heh, il est toujours si prudent et il a choisi ce moment pour être négligent.

Mais quand il y pensa, ce n’était pas si déraisonnable.

S’il avait été dans la même position, Cellvis aurait certainement tiré la même conclusion.

Capturer une forteresse défendue par des centaines de gardes et la détruire complètement avec l’aide d’une centaine d’hommes seulement ? Ça ressemblait à quelque chose qui sortait tout droit d’un conte de fées.

Même avec la fierté de notre royaume, Rosberg, ce serait toujours impossible à faire pour Jormungand. Bien sûr, on pourrait dire la même chose de tous les autres pays du continent.

Mais la célèbre Frigga, mondialement connue, n’avait pas besoin de faire de fausses déclarations. Après tout ce qu’elle avait traversé pour défendre son pays et obtenir son indépendance, il serait stupide de sa part de salir sa glorieuse victoire avec ce genre de mensonge idiot.

Cela étant, la femme qui s’était présentée comme Frigga ne pouvait être qu’une imposture complète, et toute cette mascarade était très probablement inspirée par la faction de Lunaria pour gagner en influence.

Il était naturel que les pensées d’Albert aillent dans cette direction très logique. Mais cette fois, il avait tort.

De plus, il y avait autre chose que Cellvis savait et qu’Albert n’avait pas encore découvert.

« Hmm, je ne le féliciterai pas trop, mais je suppose que je lui donnerai une note de passage pour avoir piégé quelqu’un dans le château. »

Un ricanement maléfique s’était répandu sur le visage de Cellvis.

Son expression ressemblait un peu au visage d’un jeune garçon séduit par un autre enfant.

« Il a raison de prendre les choses en main. Je ne suis pas du genre à rester en arrière et à attendre. Je suppose que nous sommes les mêmes sur cet aspect. »

Apparemment, la princesse Frigga qui attendait au fort Miever était une belle femme aux cheveux noirs. Elle ne correspondait pas à l’apparence qu’on disait d’elle dans les rumeurs.

Il n’y avait rien d’étrange à cela puisqu’elle était vraiment une personne différente, en apparence.

En effet, un certain mage malicieux avait changé l’apparence de la princesse par un sort.

Cellvis avait deviné les intentions de Kurats, et il ne pouvait s’empêcher de ricaner malicieusement.

J’ai hâte.

Puis, il se souvint qu’il devait d’envoyer son aide.

◆ ◆ ◆

Au début, le rapport choquant de la visite de Frigga avait provoqué un raz-de-marée d’excitation dans le palais royal, mais comme l’information était beaucoup trop irréaliste et que le ministre de la Guerre, qui aurait dû être le plus excité de la bande, était resté complètement silencieux, l’affaire s’était rapidement éteinte.

Albert se sentait soulagé.

Je pensais que les choses deviendraient difficiles, mais à la fin, ça commence à ressembler à une grande opportunité pour moi à la place.

C’était l’occasion pour Albert d’exposer qu’elle était la personne se trouvant derrière cette mascarade stupide et de porter un coup fatal à la faction de Lunaria.

Comme Cellvis n’avait rien fait, ça n’avait probablement rien à voir avec lui.

Dans ce cas, est-ce que cela avait été causé par des subordonnés réguliers de la faction de Lunaria qui avaient agi de façon imprudente ?

Quoi qu’il en soit, il s’agissait d’une erreur suffisamment grave pour affaiblir l’influence de l’armée.

Albert gloussa en lui-même à l’idée de ce qui allait arriver.

Tout ce qu’il avait à faire, c’était de pousser un peu les choses pour que tout soit prêt à temps pour l’invasion d’Asgard.

Il pouvait le voir maintenant. C’était clair comme de l’eau de roche. Il voyait le chemin victorieux dans la lutte pour le trône.

« Monseigneur, tout va bien ? »

« Oh, Raglan, tu es là. Comment ça s’est passé ? »

L’espion d’Albert, Raglan, inclina silencieusement la tête sans que son expression change, et fit son rapport.

« La femme qui prétend être la princesse a les cheveux et les yeux noirs. C’est une imposture, en effet. J’ai vérifié deux fois avec des gens qui avaient déjà vu la vraie princesse, juste au cas où. »

« Es-tu sûr que ce n’est pas elle ? »

« C’est la Valkyrie blanche comme neige. Rien que de cela, même un enfant pourrait dire que c’est une imposture après l’avoir regardée. En plus, elle est censée avoir des yeux dorés et avoir la même taille que Sa Majesté, le roi Siegfried. »

« Alors ce n’est vraiment pas elle. À moins qu’elle ne se soit déguisée, mais cela n’a pas de sens pour la princesse de le faire après tout ce qu’elle a traversé pour atteindre notre pays. Toute cette histoire est si stupide. »

N’importe qui pourrait voir à travers tout cela en y réfléchissant un peu.

La faction de Lunaria a dû se sentir acculée si elle s’est abaissée à se reposer sur de si mauvais mensonges.

Albert était maintenant convaincu de sa victoire. Mais les mots suivants de Raglan lui tombèrent dessus comme une douche froide.

« Mais il y a un problème… »

« Quoi ? »

« J’ai vu ce mage spécial au fort Miever. Et il se tenait à côté de l’imposteur. »

« … Ce type ? »

À ce moment-là, Albert avait l’impression que tout devenait clair.

Kurats était un roturier, un arriviste qui avait gravi les échelons en guérissant la princesse. Même aujourd’hui, il n’était encore qu’un petit noble, dont le seul bailleur de fonds était Lunaria.

Si Lunaria était emmenée hors du pays comme nouvelle épouse de l’empereur, il n’y aurait plus personne pour protéger Kurats.

Tout prenait sens maintenant. Une mascarade aussi simpliste semblait tout à fait appropriée pour un roturier sans éducation ni expérience.

Bien que sa magie soit certainement étonnante, quand il s’agissait de politique et de projets, ce n’était qu’un amateur.

Albert ne pouvait que rire maintenant qu’il avait compris.

« Hehe... C’est une grande nouvelle. C’est ma chance de me débarrasser de deux nuisances sans lever le petit doigt. »

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2 commentaires :

  1. amateur_d_aeroplanes

    Merci pour le chapitre 😂

  2. Merci pour le chapitre.

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