Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat
Table des matières
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 1
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 2
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 3
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 4
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 5
- Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat – Partie 6
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Épisode 4 : La fille normale autoproclamée dirige une cafétéria normale à l’orphelinat
Partie 1
La reconstruction de l’orphelinat devait prendre six mois. Du moins, c’est ce que Maria avait estimé, mais les travaux avaient finalement été achevés en un tiers du temps. L’aide apportée par Ristia aux charpentiers ici et là y avait contribué. De plus, l’ancien orphelinat avait été enlevé en une seconde — en un clin d’œil. Elle avait dit qu’elles le referaient revenir s’ils voulaient se remémorer le passé, une déclaration qui se rapprochait des lignes de la folie en soi. C’était logiquement impossible, mais normal pour Ristia. Maria et les autres s’adaptaient lentement mais sûrement à cette forme illogique de réalité qui leur était présentée. L’important, c’est que l’orphelinat avait été officiellement reconstruit. Le soir de son achèvement, Ristia avait dit à tous les enfants, y compris Maria, de se rassembler à la cafétéria, et ils avaient fait ce qui leur était demandé. On leur avait dit de venir là habiller des vêtements qu’elle leur avait donnés, mais Maria avait reçu une tenue de bonne avec une jupe courte. Elle avait accumulé beaucoup de confiance envers Ristia au cours des deux derniers mois, donc elle n’allait pas refuser de changer de vêtements, mais elle s’était demandé pourquoi on lui avait donné une tenue de femme de chambre.
« Merci d’avoir attendu, mes petits. Ah, je vois que vous avez tous fini de vous changer, » Ristia elle-même était arrivée en retard à la cuisine de la cafétéria, vêtue d’une robe gothique. Laissant ses cheveux noirs soyeux et lisses naturels, elle avait l’apparence d’une princesse. Maria s’était trouvée envoûtée par l’apparence de Ristia alors qu’elle était elle-même une fille.
« Maria ? » demanda Ristia.
« … Hein ? O-Oui ? » déclara Maria, bouleversée, réalisant que Ristia la regardait droit dans les yeux.
« Je te demandais s’il y avait des problèmes avec mes habits, » déclara Ristia.
« O-Oh non… Ils sont très bien. C’est extrêmement confortable. Mais… pourquoi une tenue de bonne ? » demanda Maria par curiosité.
D’ailleurs, les autres filles portaient aussi des tenues de bonne et les garçons étaient habillés en majordomes. Il semblait que les enfants aimaient le choix des vêtements, mais… Maria n’était toujours pas certaine de la raison pour laquelle ces vêtements étaient la tenue vestimentaire d’une cafétéria, et donc…
« Pourquoi ? Je veux dire, quand vous pensez à une cafétéria, vous pensez à des bonnes et des majordomes, n’est-ce pas ? » avait répondue Ristia comme si elle se demandait pourquoi elle posait cette question. Elle avait vécu toute sa vie dans un château, donc sa perception des cafétérias incluait des domestiques et des majordomes dans le personnel. Ristia l’avait dit d’une manière indiquant une extrême fortune, mais comme Maria ne connaissait pas son éducation, elle n’avait aucune idée de ce qu’elle voulait dire.
« Eh bien… Je serai dans la cuisine de toute façon, donc ça n’a pas vraiment d’importance. » Quand Ristia avait annoncé qu’ils travailleraient à la cafétéria, Maria avait paniqué. Même parmi les autres filles, elle finissait par repousser de façon irréfléchie toute main qui s’approchait d’elle si quelqu’un la touchait soudainement. Cela n’aidait pas non plus qu’elle panique si une personne du sexe opposé et plus âgé qu’elle s’approchait d’elle. Dans l’ensemble, Maria n’était pas du tout convaincue qu’elle serait capable de travailler à l’avant. Ristia, cependant, semblait tenir compte de ses sentiments et lui avait appris à cuisiner pour qu’elle puisse travailler dans la cuisine. Elle avait enfreint les règles de la logique à bien des égards, mais elle était une fille extrêmement attentionnée et gentille, du type sœur aînée — c’était l’évaluation que Maria faisait de Ristia. Certes, elle n’appellerait jamais Ristia, sa sauveuse et la personne qui gérait l’orphelinat, « Grande Soeur » ou quoi que ce soit d’informel, alors elle avait gardé ses vrais sentiments secrets et l’avait appelée Directrice Ristia à la place. Si Ristia l’avait su, elle aurait plaidé honnêtement en larmes, « Alors, appelle-moi “Grande Soeur” ! ».
« J’avais quelques objectifs en tête en construisant cette cafétéria. » Dès que Ristia avait brisé la glace et commencé à parler, tous les enfants avaient fermé la bouche et avaient tourné toute leur attention sur elle. Ces derniers mois, Ristia avait gagné la confiance de tous les orphelins.
J’aimerais que cela ne prenne pas autant de temps pour moi, pensa Maria, un tout petit peu jalouse. Et surtout, elle était fière que Ristia, la personne qui l’avait sauvée, soit une personne si incroyable.
« Le premier objectif était d’acquérir de l’expérience professionnelle. » Ristia avait commencé par expliquer qu’elle essayait d’enseigner aux enfants un métier pour la suite de leur vie. Cela n’avait pas semblé fonctionner immédiatement avec les autres enfants, mais le raisonnement avait beaucoup de sens pour Maria. Les orphelins devaient éventuellement quitter le nid, il en allait de même pour Maria elle-même. Et à ce moment-là, le problème numéro un auquel ils auraient à faire face aurait été de trouver un endroit où travailler. Mais s’ils avaient acquis de l’expérience alors qu’ils vivaient à l’orphelinat, il aurait été plus facile pour eux de travailler à l’avenir. Pour Maria et les autres, c’était une nouvelle extrêmement bienvenue, mais leur orphelinat était situé au sommet d’une colline à la périphérie de la ville. Non seulement il semblait que les gens restaient à l’écart de l’orphelinat en raison des rumeurs peu recommandables qui l’entouraient, mais il était aussi dans le pire endroit pour la circulation. Il était extrêmement difficile de penser qu’ils gagneraient suffisamment de clients pour même réaliser un profit. Bien que, connaissant Ristia, elle semblait susceptible de dire qu’elle ne se souciait pas de faire des bénéfices — c’était un fait évident que Maria avait déjà prédit. Le problème était que si aucun client ne se présentait, rien de tout cela ne servirait d’entraînement pour le travail. Juste au moment où Maria avait commencé à réfléchir à la façon d’atténuer ce problème, Ristia avait commencé à parler.
« J’établis une règle pour tous ceux qui travaillent sur le terrain. C’est-à-dire que vous devez appeler respectivement chaque client qui vient à notre établissement “Grand Frère” ou “Grande Soeur” ! » Ristia déclara avec fracas.
Les autres enfants avaient des regards sans émotion en réponse, mais à l’instant où Maria avait entendu que, d’un autre côté, elle avait été impressionnée.
Très malin, directrice Ristia. Maria croyait que c’était parce qu’après le nombre incalculable de fois qu’on lui avait demandé de faire du bénévolat, elle savait par expérience que les hommes plus âgés aimaient ça quand elle les appelait « Grand Frère », « Papa » et d’autres surnoms semblables. Les enfants de l’orphelinat avaient été enrôlés en tant que futurs enfants esclaves à des fins de volontariat illicite, de sorte qu’ils avaient tous beaucoup de potentiel caché. De plus, l’intervention de Ristia avait permis à ces enfants de sortir de l’ornière et de briller comme les diamants qu’ils étaient, transformant l’établissement en un orphelinat rempli de belles jeunes filles et garçons. Si les gens étaient appelés « Grand Frère » ou « Grande Soeur » par ces enfants — surtout Ristia — ils viendraient même si c’était dans la banlieue. À noter que Maria était obligée d’appeler les gens « Grand Frère », ce qui lui avait rappelé des souvenirs difficiles. Cependant, Ristia s’était arrangée pour que Maria puisse travailler dans la cuisine, et si quelque chose devait arriver, Maria avait la foi qu’elle la protégerait. Avec les événements de ces derniers jours, la confiance de Maria en Ristia avait augmenté de façon exponentielle. Je suis sûre qu’elle le fait par considération pour moi en tant que processus de réadaptation pour m’aider à me remettre de mon traumatisme. C’était son interprétation des actions de Ristia. Une âme belle, gentille et attentionnée avec une source d’idées — je veux toujours être aux côtés de ma Grande Sœur Ristia, pensa Maria du fond du cœur. C’est ainsi qu’avec un cœur plein de respect pour une personne si honorable, elle avait répondu : « Je te comprends haut et fort, Directrice Ristia. »
C’était une réponse qui, pour une raison quelconque, avait fait flétrir Ristia avant qu’elle ne semble vouloir s’effondrer.
◇◇◇
C’était le jour de l’inauguration. Ristia était assise dans la salle d’attente de la cafétéria, ses épaules étaient baissées. Il y avait un certain nombre de clients qui étaient venus par curiosité, mais ils n’en avaient pas encore attiré beaucoup — cependant, ce n’était pas ce qui avait fait baisser les épaules de Ristia. Ce qui l’avait mise dans la déprime, c’est qu’aucun des enfants ne l’appelait « Grande Soeur ». Elle était passée d’une « sœurette » occasionnelle à une « directrice » plus formelle, et d’une « directrice », elle était passée à une gérante de type « entreprise ». Cette tendance l’éloignait encore plus de son objectif final de « Grande Soeur », ce qu’elle n’aurait jamais pu imaginer. Inutile de dire que ce fut un échec et une déception inimaginables. Bien sûr, elle leur avait seulement dit d’appeler les clients « Grand Frère » et « Grande Soeur » et en conséquence, elle n’avait jamais eu l’intention qu’ils commencent aussi à l’appeler comme ça. Ristia avait pensé qu’on l’appellerait « Grande Soeur » et qu’elle pourrait s’en inspirer, mais ils avaient fini par briser son plan d’une manière grandiose.
Soupir… Je me demande si Maria pense à moi comme une Grande Sœur. Je pense à tous les autres comme à ma petite sœur et à mes frères, cependant… Je regrette le temps où on m’appelait « Sœur » et « Sœurette », même si ce n’était qu’un surnom occasionnel…, Ristia s’était tenue dans ses bras. Bien sûr, il serait facile de les forcer à l’appeler « Grande Soeur », mais Ristia ne voulait pas qu’ils l’appellent simplement « Grande Soeur » par devoir et obligation, elle voulait qu’ils l’appellent « Grande Soeur » par amour et par adoration. Cet objectif ne serait jamais atteint si elle les contraignait à le faire.
« Manager Ristia, j’ai quelque chose à te dire, mais… par hasard, es-tu trop fatiguée ? » demanda Maria en arrivant dans la salle d’attente. En entendant sa question, Ristia s’était rapidement redressée et avait mis un sourire sur son visage.
« Je vais bien. Je vais bien. Je suis heureuse de discuter de tout ce que tu veux, » déclara Ristia.
« O-Oh, merci. » Les joues de Maria étaient devenues un peu rouges. Alors qu’elle était clairement attirée par les paroles aimables et le sourire radieux de Ristia, c’était une chose courante chez la plupart des gens qui parlaient à Ristia — quelque chose dont Ristia elle-même était inconsciente.
« De quoi voulais-tu discuter ? » demanda Ristia.
« Un client nous a demandé s’il était possible de demander une bonne en particulier, » répondit Maria.
« “En particulier” ? Qu’est-ce que tu veux dire ? » demanda Ristia.
« D’habitude, c’est une personne par table, et ils prennent les commandes du client, non ? » demanda Maria.
« Aah... C’est vrai, » déclara Ristia.
À l’heure actuelle, le personnel de l’entreprise siégeait aux tables dans l’ordre, de sorte que l’enfant qui desservait le client était choisi au hasard, y compris le sexe de ce dernier. Il y avait probablement eu des demandes pour pouvoir choisir qui allait servi leur table, surtout en ce qui concerne cela.
« Dis-leur qu’ils peuvent spécifier leur serveur si c’est dans nos capacités. Cependant, n’hésite pas à expulser les clients qui causent des problèmes, » déclara Ristia.
« … Merci, directrice Ristia, » déclara Maria
Si Maria est heureuse, alors je suis heureuse, se dit Ristia avant que Maria ne continue.
« Alors, tu es la première, directrice Ristia. » Ristia ne comprenait pas ce qu’elle voulait dire par là.
« Euh… Je suis quoi ? » demanda Ristia.
« Les charpentiers de l’équipe de construction sont là, et ils veulent que tu serves leurs tables, » déclara Maria.
« … Ils me veulent moi ? » demanda Ristia.
« Oui, Madame. Si tu n’as pas l’intention de le faire, j’irai leur dire non, » déclara Maria.
« Hmm…, » murmura Ristia.
Comme Ristia avait elle-même des sœurs aînées, se comporter comme la petite sœur de quelqu’un n’était pas nécessairement hors de question, mais le but ultime de Ristia était d’être aimée et adorée par les enfants comme leur Grande Sœur. Elle s’était demandé quelle serait sa meilleure ligne de conduite pour réaliser ce rêve.
Le résultat ? Elle avait décidé de travailler elle-même comme une serveuse.
***
Partie 2
La logique de Ristia était qu’elle était actuellement leur manager, mais si elle était une bonne comme tout le monde, elle deviendrait leur collègue senior, ce qui signifie qu’elle serait plus proche d’être une Grande Sœur qu’un grand patron.
« C’est très bien. Je vais donc me changer tout de suite ~, » déclara Ristia.
« D’accord. Je vais leur dire que tu arrives bientôt. » Maria se retourna et sortit de la salle d’attente. Ristia attendit que Maria soit complètement sortie de la pièce avant de saisir les épaules de sa robe et de la retirer. Maintenant qu’elle n’avait plus qu’une paire de jolis sous-vêtements bleus, Ristia avait rangé la robe dans sa boîte à objets et avait à sa place sortie un uniforme de bonne. Elle s’était ensuite habillée avec cette tenue. Enfin, elle avait détaché la courroie qui lui liait les cheveux de façon décontractée dans le dos, laissant tomber librement ses cheveux noirs lustrés sans une seule trace de lien.
« Hehehehe, j’avais raison de le faire juste au cas où, » déclara Ristia, en se retournant et en regardant son allure dans le miroir sur toute sa longueur alors qu’un tendre sourire se formait sur ses lèvres. Son apparence la rendait digne d’être appelée « ange ». Ristia, cependant, s’était murmurée à elle-même. « Ouais, peu importe comment tu me regardes, j’ai l’air d’une fille normale, d’accord. » Elle était ensuite descendue dans la salle principale, avec un doux sourire sur le visage, attirant l’attention des enfants et des clients. Ils étaient vraiment fixés sur sa belle silhouette, mais Ristia restait imperturbable et se dirigea vers les tables où Wood et les autres charpentiers étaient assis, non pas avec une foulée royale et aristocratique, mais avec un élan léger et désinvolte dans sa marche. Elle atteignit Wood et ses hommes et les salua.
Le sourire angélique de Ristia alors qu’elle était vêtue de son uniforme de bonne, avait instantanément captivé tous ceux qui l’avaient vue. Peut-être que c’était un trop grand choc pour leurs systèmes, parce que Wood et ses hommes étaient tous paralysés.
« Grand Frère Wood, es-tu prêt à commander ? » demanda Ristia.
« Je n’arrive pas à exprimer ce sentiment avec des mots ! Qu’est-ce que c’est !? J’ai toujours voulu une sœur comme ça ! » répondit Wood.
« Ce n’est pas juste, patron ! Ristia, appelle-moi aussi “Grand Frère” ! » déclara un autre.
« Okie dokie, Grand Frère ~, » déclara Ristia.
« Oh mon dieuuuu, c’est vraiment génial ! » Après Wood, le deuxième charpentier commença à jubiler.
« À partir d’aujourd’hui, je vais venir ici tous les jours ! »
« Merci, Grand Frère ~. »
« Merde, je suis si heureux que je pourrais tomber raide mort et je m’en foutrais ! » Le troisième homme était alors tombé. L’un après l’autre, les charpentiers commencèrent à tomber comme des mouches sous les charmes de Ristia. Ils s’étaient transformés en fans de Ristia, fondant finalement l’Association des Protecteurs de la Fille Normale Autoproclamée, et ils en venaient à étendre leur influence sur tout le continent, mais… enfin, c’est une autre histoire pour une époque plus normale.
« Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous ? Vous n’avez qu’à dire ce que vous voulez, je le ferai ! » déclara Ristia.
« Bon sang, j’aimerais bien te donner ma commande…, »
« Moi aussi !! »
Ils répondirent tous à l’unisson alors que Ristia s’apprêtait à prendre la commande de Wood et de ses hommes et à les transmettre à Maria dans la cuisine.
« Directrice Ristia… As-tu déjà dirigé une entreprise comme celle-ci par le passé, par hasard ? » demanda Maria.
« Hein ? Non, c’est ma première fois. Pourquoi ? » demanda Ristia.
« Vraiment ? Pour la première fois, tu sembles étrangement bien dans ça…, » Maria était perplexe, mais Ristia était surtout honnête dans sa réponse. Naturellement, appeler les hommes « Grand Frère » n’était qu’une partie de leur demande, mais Ristia n’avait jamais fréquenté que des aristocrates plus âgés toute sa vie. Cela signifiait que si Ristia était une sœur aînée lorsqu’elle parlait à Maria et aux autres jeunes enfants, la façon plus mignonne et immature dont elle parlait aux menuisiers était tout à fait normale pour Ristia.
« En tout cas, comment tiens-tu le coup, Maria ? Y a-t-il quelque chose que tu n’as pas tout à fait compris ? » demanda Ristia.
« Merci de demander, directrice Ristia. Mes compétences n’ont rien à voir avec les tiennes, mais je m’en sors très bien jusqu’à présent. Il n’y a pas de problèmes dont il faut parler, » déclara Maria.
« Je m’en doutais. Après tout, tu t’es toujours adaptée rapidement, » répondit Ristia.
Pendant les quelques mois où l’orphelinat avait été rénové, Ristia avait fait suivre des cours de cuisine à Maria et aux autres enfants. Et de toutes, Maria s’était naturellement adaptée le plus rapidement, vu qu’à l’origine elle avait aidé à mettre de la nourriture sur la table de l’orphelinat. Elle avait progressivement absorbé les recettes de Ristia comme une éponge. Ristia avait posé cette question juste pour s’assurer que tout allait bien, mais il semblait que c’était une inquiétude inutile.
« Sache simplement que si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à demander, » déclara Ristia en souriant. Et tandis qu’elle regardait Maria cuisiner, elle entendit une voix l’appeler de l’étage.
« Manager Ristia, tu as un client ~ ! »
« J’arrive ~, » répondant à l’appel d’Ayane, Ristia marcha à toute allure jusqu’au rez-de-chaussée. Elle s’était dirigée vers la zone désignée pour trouver Nanami, Eindebelle et Rick tous assis à une table ensemble.
« Oh, Belle, Nanami, Rick. Vous avez tous réussi à venir, » déclara Ristia.
« Non non, tu fais tout de travers, hein ? »
« … Hein ? » Ristia fut surprise par la critique immédiate.
« On m’a dit que cet établissement appelait ses clients “Grand Frère” et “Grande Soeur”. Alors tu dois m’appeler “Grande Soeur Belle”, » déclara Eindebelle.
« Grande Soeur Belle ? » demanda Ristia.
« C’est ça, c’est ça ! Je suis ta Grande Soeur, ma petite Ristia ! » déclara Eindebelle, lui sautant soudainement dessus. Ristia évita ses avances pratiquement sans effort. « Attends une seconde, pourquoi tu m’évites ? »
« Il est interdit de toucher les domestiques ~, » répondit Ristia.
« Belle règle, mais je suis ton amie, Ristia ! » déclara Eindebelle.
« Cela ne change rien du tout. Si je commençais à faire des exceptions, ça mettrait les autres enfants dans une situation délicate. » En gros, si quelqu’un voyait Eindebelle enlacer Ristia et qu’il avait l’idée dans sa tête de commencer à enlacer les bonnes, cela signifierait de gros problèmes — un fait qu’Eindebelle avait très probablement compris.
« D’accord, d’accord. Si c’est comme ça que ça doit se passer, c’est normal, » déclara-t-elle, concédante. « Oh, mais dans ce cas, tout ce que j’ai à faire c’est de le faire quand on n’est pas au café ? » En gros, elle exigeait qu’on lui permette d’enlacer Ristia à l’extérieur de l’établissement. Ristia poussa un petit soupir.
« Bon sang… Eh bien, puisque tu insistes. Grande sœur Belle, tu seras mon exception spéciale. Okay ? » déclara-t-elle, mettant son index sur ses lèvres et souriant malicieusement. Eindebelle avait vu ça et avait commencé à se tortiller.
« Oh, mon dieu, j’ai l’impression que quelque chose en moi se réveille ! » s’écria Eindebelle.
Ristia laissa Eindebelle dans son monologue et tourna son regard vers Rick.
« Devrais-je aussi t’appeler “Grand Frère”, Rick ? » demanda Ristia.
« Hein ? Oh, non, je passe mon tour…, » déclara Rick.
« Teehee, ne sois pas celui qui brise le rêve. Alors, laisse-la t’appeler comme tu le veux vraiment, » déclara Eindebelle.
« Ferme-la, maman. Je n’ai rien contre “Rick”, merci. Donc oui, Mademoiselle Ristia, je suis d’accord avec la façon dont tu m’as parlé pendant tout ce temps, » déclara Rick.
« Okie dokie, Rick, » dit-elle, se référant à lui comme d’habitude, mais d’un ton plus amical. Face au sourire pur de Ristia, le visage de Rick était devenu rouge en un rien de temps.
« OK, tout le monde, vous êtes prêts ou — hey, Nanami, qu’est-ce qu’il y a ? » Ristia s’était arrêtée et avait incliné la tête dans la confusion en voyant Nanami assise avec un regard boudeur.
« Dame Ristia, aujourd’hui, je suis l’une de vos clientes, » déclara Nanami.
« Oui, je le sais, mais pourquoi... Hein ? Corrige-moi si je me trompe, mais veux-tu que je t’appelle “Grande Soeur” ? » demanda Ristia.
« … Ce n’est pas permis ? » demanda Nanami.
« Eh bien, c’est permis, mais…, » déclara Ristia.
L’air faussement dévergondé de Nanami mettait Ristia dans le pétrin. Bien sûr, l’affection de Ristia pour Nanami ne la dérangeait pas si elles se comportaient comme des sœurs, mais Ristia s’efforçait d’être sa sœur aînée, et non l’inverse. Est-ce qu’elle me trouve si peu fiable ? Ristia s’interrogea avec des épaules baissées, mais elle passa rapidement à la vitesse supérieure en se disant : Eh bien, si c’est Nanami qui demande, alors je suppose que je pourrais.
« J’ai compris. Dans ce cas… Grande Soeur Nanami, » déclara Ristia.
« Oh mon Dieu… Merci beaucoup, Lady Ristia ! » déclara Nanami.
Et pourtant, la façon dont elle me parle reste la même…, s’était dit Ristia avec un sourire amer, ajoutant aussi : Mais si Nanami s’amuse bien, alors je vais faire ainsi.
« Au fait, Ristia, c’est quoi les classiques dans ton établissement ? » demanda Eindebelle.
« Mm ~ ouais, voyons voir… Je pense que le classique du déjeuner est délicieux, mais… personnellement, je recommande le shortcake, » répondit Ristia.
« … shortcake ? » Ils l’avaient regardée comme si elle avait trois têtes.
Maria et les autres enfants n’en savaient rien quand elle leur en avait parlé, mais elle pensait à l’époque que c’était le résultat de leur éducation à l’orphelinat. Mais maintenant qu’elle avait vu que le groupe d’Eindebelle ne savait pas non plus, c’était une autre histoire. Il semblerait que les humains de cette époque n’étaient pas très familiers avec les types de confiserie. Ristia l’avait confirmé lorsque le gâteau qu’elle avait fait à titre d’exemple était devenu une gâterie très populaire parmi les enfants. Étant donné cela, elle avait fait apparaître avec confiance un shortcake de sa boîte à objets et leur montra.
« C’est un shortcake. C’est doux et délicieux. Allez-y, essayez par vous-mêmes. » Elle l’avait coupé en trois morceaux, qu’elle avait placés sur des assiettes avec des fourchettes, et les avait déposés devant eux.
« Eh bien, je serai… Alors, c’est du shortcake, hein ? » Eindebelle avait piqué la crème fouettée avec sa fourchette par curiosité. Les trois avaient fait preuve d’une légère hésitation, mais ils avaient finalement trouvé le courage de prendre une bouchée… après quoi, leurs yeux s’étaient écarquillés d’un seul coup.
« Qu’est-ce que c’est que cette chose ? Je veux dire, c’est super doux et délicieux ! » s’écria Eindebelle.
« Mon Dieu, Lady Ristia. C’est fantastique ! » s’écria Nanami.
« Je n’ai jamais rien mangé de tel ! » s’écria Rick.
Les yeux de chacun d’eux s’illuminaient à leur façon. Peu de temps après, Nanami avait dit. « Je veux en manger plus », mais Eindebelle avait crié et l’avait arrêtée.
« Ristia, n’y a-t-il pas tout un tas de sucre dedans ? » demanda Eindebelle.
« Permets-moi de te rappeler qu’il y en a assez pour dix parts dans un grand gâteau, alors je dirais qu’une part contient environ… quinze grammes ? » Le gâteau avait été cuit avec une légère douceur, en tenant compte du fait que personne ne semblait habitué à de telles saveurs… mais Eindebelle avait tourné ses yeux sur Ristia en état de choc.
« Il y en a autant là-dedans ? Ne penses-tu pas que c’est une sacrée quantité ? » demanda Eindebelle.
Pour les humains de cette époque, le sucre n’était pas vraiment un article de luxe pour les aristocrates et la noblesse, mais cela ne changeait rien au fait qu’il s’agissait d’un produit de grande qualité, donc il n’était pas déraisonnable pour elle d’être surprise d’entendre qu’une part contenait quinze grammes. Cependant…
« Umm… eh bien, c’est seulement pour une pièce, » dit Ristia, en levant adorablement le petit doigt.
« Euh… ça veut dire une pièce de bronze ? Ça veut dire une pièce d’argent ? » demanda Eindebelle.
« Non, juste un morceau de fer, » répondit Ristia.
« Quoi !? »
Eindebelle, Nanami et Rick assis à côté d’elle… ainsi que tous les autres clients à portée de voix avaient fait la même réaction. Le prix annoncé par Ristia était à peu près aussi cher que le prix du déjeuner, mais elle était incroyablement bon marché, étant donné que les sucreries étaient essentiellement des articles de luxe.
« Puis-je te demander pourquoi tu le factures si bon marché ? » demanda Eindebelle à haute voix, la regardant d’un air qui criait : Tu ne fais plus rien de logique, n’est-ce pas ?
« C’est parce que nous cultivons nos propres ingrédients dans les champs à l’arrière, » répondit Ristia très simplement.
« … Vous les faites pousser ? » demanda Eindebelle.
« Uh-hein, nos propres champs ~, » répondit Ristia.
Il était vrai que, dans les champs à arrière, elle cultivait des betteraves à sucre sélectionnées qui pouvaient pousser même dans des régions relativement plus chaudes… elles ne produisaient pas de sucre juste après avoir été cultivées, et elles ne fourniraient pas la quantité dont elle aurait besoin. Elle ne s’en servait que comme façade pour utiliser le stock massif de sucre qu’elle avait rangé dans sa boîte à objets. Elle avait l’intention d’en faire une terre agricole autosuffisante, mais ce n’était tout simplement pas possible à ce moment-là. Les clients qui l’avaient entendue avaient naturellement partagé la même pensée une fois qu’ils avaient compris que cette cafétéria n’était pas du tout normale. Quoi qu’il en soit, les clients avaient pu profiter d’un dessert rare qui leur serait normalement interdit à un prix qui n’avait pas du tout ruiné leur bourse. Comme aucun d’entre eux ne voulait laisser passer cette occasion extraordinaire, ils avaient tous commencé à passer des commandes à la fois de petits gâteaux. Ainsi, la nouvelle s’était rapidement répandue et la cafétéria de l’orphelinat avait commencé à gagner en popularité en un clin d’œil.
***
Partie 3
Cette jeune fille aux cheveux blonds, doux et ondulés, aux yeux bleus clairs, s’appelait Charlotte. Elle avait participé à la vente aux enchères tenue dans la Capitale Impériale et, heureusement, elle était la fille unique de la maison du comte Warren, qui possédait le terrain de la ville où se trouvait la succursale de la Compagnie Marchande Gratt. C’était pour cette raison qu’elle avait pu si vite se rendre compte de la présence de Ristia. Après avoir découvert qu’une jeune fille mettait en vente des objets d’art sur le territoire de la maison du comte Warren, Charlotte décida de faire enquêter ses serviteurs sur les rumeurs entourant Ristia.
Au début, c’était pour satisfaire une légère curiosité. Si elle possédait un artefact ou un objet enchanté équivalent, elle avait l’intention de demander à Ristia de le lui montrer — peut-être même de l’acheter, si tout allait bien — mais, dans l’ensemble, ce n’était qu’un truc passager. C’était, jusqu’à ce que… Charlotte se soit rendu compte qu’aucune des informations qu’elle recevait n’avait de sens.
Son serviteur avait rapporté que Ristia avait sauvé le survivant d’une équipe de reconnaissance anéantie et qu’elle s’était attaquée à un dragon, qui habitait dans le donjon qu’ils exploraient, le détruisant en mille morceaux. Ensuite, il avait déclaré qu’elle avait échangé un objet enchanté pour compenser les frais d’émission de papiers d’identité à l’entrée de la ville, ajoutant que l’épouse gravement blessée de la vigile, qui avait accepté cet objet, était en parfaite santé le lendemain matin. Il soupçonnait que l’objet enchanté en question était une sorte d’artefact. Après cela, il avait raconté que le lendemain de son arrivée en ville, elle s’était rendue à l’orphelinat et avait pris le poste de directrice. L’ancien directeur louche avait disparu et avait été présumé éliminer. Considérant cela, elle n’avait aucun lien plausible avec le maire. En outre, elle semblait être une fille audacieuse, utilisant tous les moyens nécessaires, mais elle était extrêmement populaire parmi les enfants. Puis, il avait rapporté qu’elle avait dépensé une énorme somme d’argent pour aider à reconstruire l’orphelinat, apparemment « voulant aider tous les enfants dans le besoin », selon ses propres termes. Il pensait que la raison pour laquelle elle avait vendu la broche à la vente aux enchères était pour financer ce projet.
Poursuivant, il avait indiqué que pendant la reconstruction de l’orphelinat, Ristia avait déplacé l’ancien orphelinat dans un coin du terrain, et qu’elle avait transporté avec la plus grande facilité plus de cent kilogrammes de matériaux. Cela avait conduit au rapport selon lequel le nouvel orphelinat utilisait toutes sortes de technologies inconnues, les pièces maintenant toujours une température confortable et pouvant tirer l’eau par une torsion d’un robinet. Par la suite, il avait indiqué que la cafétéria qui avait ouvert ses portes dans l’orphelinat vendait un certain nombre de confiseries gourmandes remplies de sucre à des prix si incroyablement bas que n’importe qui dans la rue pouvait les acheter. Enfin, il avait rapporté que la mignonne petite Ristia en question était une petite sœur angélique, et que la prochaine fois qu’il visitera le café, il demanderait certainement à Ristia de le servir — et ainsi de suite.
Il y avait un certain nombre d’autres choses écrites dans le rapport, mais Charlotte ne pouvait pas vraiment les comprendre.
« … Mais franchement, est-elle vraiment ainsi ? » murmura Charlotte.
Plus elle rassemblait de rumeurs, moins tout cela avait de sens. Maintenant qu’elle avait fini de lire le rapport, Charlotte avait soudain l’air épuisée. Mais si la moitié des rumeurs écrites ici étaient vraies, alors elle ne traitait pas avec n’importe qui. Elle devait aller évaluer si Ristia allait être une aide ou un obstacle au territoire du comte Warren. Il y avait une chance qu’elle puisse être une bénédiction… ou, si les circonstances l’obligeaient, la faire disparaître. Charlotte hésita cependant, se demandant quelle était la meilleure façon d’évaluer cette possibilité. C’est à ce moment-là que ses yeux s’étaient tournés vers l’information sur la cafétéria de l’orphelinat. Il était dit que Ristia y travaillait aussi, donc aller sous couverture et prendre contact avec elle était une option. Charlotte sonna la cloche et informa sa bonne qu’elle se dirigeait vers la ville où résidait Ristia.
Quelques jours s’écoulèrent alors. Charlotte, maintenant déguisée en roturière, se retrouva à l’entrée de l’orphelinat. Elle avait ordonné aux gardes du corps qu’elle avait emmenés de surveiller le périmètre pendant qu’elle entrait dans le restaurant.
« C’est… la cafétéria d’un orphelinat… ? » murmura Charlotte.
Charlotte regarda l’intérieur de l’établissement et fut époustouflée par l’aménagement intérieur. Même un seul mur n’avait aucun sens. Des briques, des pierres ou même des planches de bois seraient normales, mais les murs étaient faits d’une sorte de tissu avec des motifs élaborés dessinés dessus. Elle s’était retrouvée en train de le toucher et elle avait découvert qu’il avait de l’élasticité.
… Ce matériau est quelque peu particulier. Pourquoi utiliserait-elle ce genre de matériel ? Pour que ça ne fasse pas mal si tu tombes dessus ? Ou peut-être… pour l’isolation ?
Éduquée à la manière d’un homme d’État, Charlotte avait fait son analyse à partir de l’environnement de la salle et en était venue à une conclusion relativement exacte. Elle s’était étonnée que la directrice de cet orphelinat puisse avoir ce niveau de technologie et de connaissances.
C’est vraiment incroyable. Maintenant que j’ai une meilleure vue, les murs ne sont pas la seule chose que je trouve singulière ici. Qu’est-ce que c’est que ce verre transparent dans les fenêtres ? Je n’ai jamais vu ça avant. Pas même dans les châteaux. En outre, ce vase qui se tient là a un lustre si brillant, et… oui, c’est assez lourd, en plus. De quoi diable est-il fait ?
Constatant que chaque ameublement, y compris le verre des fenêtres, était plus impeccable que les œuvres d’art de la résidence de sa famille, Charlotte fut stupéfaite.
« Je serai sûrement submergée si je ne maintiens pas ma garde, » murmura Charlotte.
« Bienvenue à la maison, Grande Sœur ! »
« — Qu-Quoi !? »
Le salut soudain à Charlotte par-dessus son épaule l’avait surprise et l’avait fait trembler. Dès qu’elle l’avait fait, elle avait lâché le vase dans ses mains.
— Ka-shhhh ! le vase d’aspect artistique fait d’un matériau mystérieux avait fait du bruit quand il avait touché le sol et s’était brisé en morceaux.
« O-Oh, non… C’est épouvantable. C’est un désastre, » s’exclama Charlotte.
« Oh, mon Dieu… Est-ce que tout va bien ? » demanda l’autre fille.
« C’est loin d’être bon ! Je n’arrive pas à croire que j’ai été assez imprudente pour casser un vase dans… Je veux dire… ! Je m’excuse sincèrement ! » Charlotte avait pâli alors qu’elle se rendait compte qu’elle avait brisé une œuvre d’art assez fascinante pour attirer son regard, même en tant que fille d’un comte, mais…
« Non, je ne parle pas du vase. Je parlais de toi. Tu n’es pas blessée, n’est-ce pas, Grande Sœur ? » demanda la voix d’un ton plus préoccupé par les dommages causés à Charlotte et non pas pour le vase. Trouvant cela étrange, Charlotte s’était finalement retournée pour faire face à la source de la voix. Il y avait là une fille souriante du même âge qu’elle, vêtue d’une tenue de bonne raffinée avec des cheveux noir de jais brillants dans la lumière qui se déversait par la fenêtre — la faisant ressembler à un ange.
« … Qu’est-ce qu’il y a ? Tu as l’air choquée. T’es-tu vraiment fait mal ? » demanda l’ange.
« Oh, je suis désolée. Non, je ne suis pas blessée, mais j’ai cassé votre vase. Je m’assurerai de vous rembourser pour les dommages ! » Charlotte répondit après être revenue à la raison, s’excusant frénétiquement, mais sincèrement.
« Tu n’as pas besoin de me rembourser. Il s’autoréparera bien assez tôt, » répondit l’autre.
« Mais je dois le faire. N’importe qui avec des yeux peut estimer qu’il faudra quelques centaines de pièces d’or pour… attendez, l’autoréparation ? » demanda Charlotte.
Qu’est-ce qu’elle veut dire par là ? se demanda Charlotte, alors que du coin de l’œil, une lumière pâle émanait de l’endroit où le vase était dispersé en morceaux sur le sol. Charlotte jeta un coup d’œil et fut absolument choquée. Le vase écrasé se restaurait entièrement, tout en émettant une lumière pâle. Bien qu’elle n’ait pas trouvé incroyable la vue du vase en train de se régénérer, son choc était dû au fait qu’elle avait un indice sur la raison pour laquelle ce phénomène s’était produit.
« Cela ne peut pas être… C’est impossible… ! Un artefact enchanté avec des capacités d’autoréparation !? » s’écria Charlotte.
On disait qu’à l’époque légendaire, il existait de plus grandes pièces de beauté artistique qu’aujourd’hui, et parmi ces pièces se trouvaient des objets enchantés avec des capacités d’autoréparation. Il faisait partie d’une série qui aurait été réalisée par la plus jeune fille des Sangs Véritables, qui existait à cette époque légendaire. Peut-être parce qu’elle n’aimait pas avoir son nom sous les feux de la rampe, toutes les œuvres d’art qui auraient été réalisées par la plus jeune fille des Sangs Véritables n’étaient pas signées. Normalement, vous ne sauriez pas dire qui avait fait quelque chose s’il n’était pas signé, mais on disait que la plus jeune fille des Sangs Véritables enchantait toujours son travail avec une capacité d’autoréparation. Par conséquent, les articles qu’elle avait fabriqués faisaient partie de ce qu’ils appelaient la Série Non Accréditée. En raison de leur incapacité à se briser, il en restait un bon nombre d’exemplaires encore là, et ils avaient été traités comme des trésors nationaux pour la plupart, considérés comme des œuvres d’art extraordinaires. En fait, c’était la première fois que même Charlotte en voyait un de ses propres yeux.
Qu’est-ce qu’un objet si précieux fait dans le coin d’une cafétéria entre tous les endroits… ? pensa Charlotte, son sang se figeant, jusqu’à ce que…
« Non, juste un vase que j’ai fait pendant mon temps libre, » déclara la fille.
« … Hein ? » s’exclama Charlotte.
Elle ne comprenait pas ce qu’on venait de lui dire. Alors qu’elle tentait désespérément de mettre son esprit confus en action pour le comprendre, elle s’était rendu compte que c’était en réponse à l’exclamation que Charlotte elle-même avait faite il y a quelques instants. C’était une réponse… qui ne répondait à rien.
Dire qu’elle « l’a fait pendant son temps libre » implique qu’elle n’est pas une professionnelle formée et qu’elle l’a fait pour le plaisir. Cela implique en fin de compte qu’il s’agit d’un vase fait par un amateur, mais… son apparence magnifique est clairement celle d’une œuvre d’art digne d’être un trésor national. En plus de cela, il est enchanté par une capacité d’autoréparation qui n’était censée exister que dans les âges légendaires d’antan, donc c’est indéniablement un artefact. C’est presque comme si la fille qui est devant moi avait fait ce travail qui rivalise avec la Série Non Accréditée elle-même.… Cela ne semble pas probable… Non, pas du tout. J’ai dû mal interpréter les choses. Le vase a juste un design un peu inhabituel, il devrait encore être brisé sur le sol, même si nous…, Charlotte s’arrêta et se frotta les yeux pour regarder le vase, mais il était là, complètement restauré dans toute sa splendeur. ... Comme c’est étrange. Il semble très clairement être intact. Et je ne peux clairement que considérer que c’est un travail époustouflant.
« Quelque chose ne va pas, Grande Sœur ? » demanda la fille.
« Non, c’est juste que… J’ai l’impression que ce vase devrait être cassé, mais c’est redevenu normal…, » répondit Charlotte.
« Hein ? Quel est le problème avec ça ? » demanda la jeune fille en réponse avec un regard sans émotion. Son phrasé donnait l’impression que la réparation du vase était la vérité évidente, une vérité de fait.
« Euh… êtes-vous en train de dire que le vase s’est réparé tout seul ? » demanda Charlotte.
« Oui… Je l’ai fait, » répondit l’autre.
« Oui, vous êtes… Attendez, ça ne devrait pas être possible normalement ! » déclara Charlotte, incapable de se contenir alors qu’elle haussait le ton de sa voix. C’est à ce moment-là que le sourire de la jeune fille s’estompa et qu’elle commença à avoir l’air agitée.
« Oui, tu as raison. Normalement, ce n’est pas possible. Mais ne t’inquiète pas. Ce n’est pas à cause de la magie, d’Artefacts, ou de quelque chose comme ça, c’est juste un tour de passe-passe, » déclara la fille.
« Tour de passe-passe… ? » demanda Charlotte.
« Mm-hmm, ouais. C’est bien ça, » la fille avait souri, à l’image de l’innocence. Honnêtement, Charlotte ne comprenait pas très bien de quoi parlait la fille, mais… elle pensait même que c’était plus plausible que le concept illogique de faire quelque chose à égalité avec la Série Non Accréditée dans son temps libre. Étant donné cela…
« … Eh bien, je suppose qu’un petit tour de passe-passe, c’est mieux que rien, » murmura Charlotte, un regard choqué.
« Au fait, Grande Sœur ? » demanda l’autre.
« Euh, ça me préoccupe depuis un moment maintenant. Qu’est-ce que c’est que ce “Grande Soeur”… ? » Les aristocrates avaient été formés pour ne jamais oublier le visage d’une connaissance, pour qu’elle n’oublie jamais une personne qu’elle avait rencontrée, même si ce n’était qu’une fois — un peu exagéré, mais elle savait qu’elle n’oublierait jamais une fille aussi adorable que celle-ci. Charlotte avait pensé à cela avant de se rappeler qu’elle était censée se faire passer pour une roturière. Et vu qu’elle simulait son identité, elle devait agir selon ça. « Excusez-moi, mais c’est la première fois qu’on se rencontre, n’est-ce pas ? »
« Ouais, je ne t’ai jamais rencontrée avant, Grande Sœur, » déclara l’autre.
« … Pardon ? » Les mots « Qu’est-ce que vous racontez ? —, » avaient atteint le bout de sa langue, mais Charlotte s’était arrêtée avant de pouvoir terminer sa question. C’était parce qu’elle avait commencé à se rappeler les différentes choses écrites dans le rapport qu’elle avait trouvé incompréhensible.
« … Si je peux me permettre, est-ce qu’il vous arrive souvent d’appeler des clientes dans cet établissement “Grande Soeur” ? » demanda Charlotte.
***
Partie 4
« Ouais, c’est vrai. Les femmes sont “Grande Soeur”, et les hommes sont “Grand Frère.”. Mais si tu as d’autres demandes, je peux changer mon comportement ou comment je me réfère à toi. Par exemple, je peux jouer le rôle de la Grande Sœur à la place…, » déclara la jeune fille avec un sourire sur le visage qui lui demandait pratiquement ce qu’elle pensait de cette idée. Charlotte était à court de mots. En fait, elle ne savait pas laquelle d’entre elles était la plus âgée, mais rien ne justifiait qu’une serveuse s’adresse à elle en tant que sœur aînée, alors elle avait répondu qu’elle était d’accord avec l’état actuel des choses.
« … Quel fiasco ! » murmura l’autre.
« Hein ? Quelque chose ne va pas ? » demanda Charlotte.
« Uh-uh, non, non. Ce n’est rien, Grande Sœur. Quoi qu’il en soit, laisse-moi te montrer ton siège…, » déclara l’autre.
« Oh… Attendez un instant, s’il vous plaît ! » Elle avait vite crié afin d’arrêter la bonne quand elle s’était retournée. Elle s’était arrêtée sur ses pas et avait regardé par-dessus son épaule. La beauté de la jeune fille qui faisait voltiger ses longs cheveux noirs avait coupé le souffle à Charlotte.
« Qu’y a-t-il, Grande Sœur ? » demanda l’autre.
« En fait, je veux savoir si Mlle Ristia me servirait, » déclara Charlotte.
« Hehehehe, j’apprécie la sélection, Grande Soeur, » la fille devant elle avait répondu avec un sourire à sa demande d’avoir Ristia. Ce qui veut dire…
« Pardonnez mon ignorance, mais êtes-vous Mlle Ristia ? » demanda Charlotte.
« Ouais, c’est moi ~… m’as-tu demandée sans le savoir ? » demanda Ristia.
« Oh, euh, j’ai entendu des rumeurs sur vous. » J’ai déjà merdé, pensa Charlotte en se mordant la lèvre. Si ça l’a déjà prévenue, alors tout mon plan est foutu. Elle était visiblement inquiète, mais Ristia lui avait juste fait un sourire.
« Je suppose que c’est logique, » avait-elle répondu. « Maintenant, laisse-moi te montrer ton siège ~. » Ristia s’était alors mise à marcher, et Charlotte s’était empressée de la suivre.
Une fois escortée à une table et assise, Ristia lui avait présenté un menu et une tasse d’eau. Charlotte s’était trouvée choquée par le matériau mystérieux utilisé pour le menu et sidérée par le verre ridiculement cher que Ristia avait posé si facilement devant elle. Des frissons lui avaient parcouru la colonne vertébrale lorsqu’elle s’était rendu compte que la bonne avait été les mains vides tout le temps avant cela.
« Qu’est-ce qui se passe dans le monde… ? » murmura Charlotte.
« Grande Sœur, qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Ristia.
« N-Non, ce n’est rien. Tout cela mis à part, quels sont vos spéciaux pour aujourd’hui ? » demanda Charlotte.
« Bien, eh bien… qu’est-ce que tu préférerais : un vrai déjeuner, ou des sucreries ? »
« A-Ah, oui, j’irai avec des sucreries, » répondit Charlotte.
« Que dirais-tu d’un Darjeeling servi avec de la glace à la vanille ? »
« De la glace à la vanille… Quoi ? Je n’ai jamais entendu parler de ça avant, » répondit Charlotte.
« C’est froid, sucré et mon dessert préféré, » répondit Ristia.
« Tu dis que c’est ton préféré ? Alors, je prendrais ça, » déclara Charlotte.
« OK, une commande d’un Darjeeling avec de glace à la vanille. Je reviens tout de suite, alors tu ne vas nulle part » déclara Ristia en souriant avant de disparaître dans la cuisine. Charlotte regarda son départ et poussa un soupir de soulagement. Comme Charlotte avait eu une éducation stricte en tant que fille unique d’un comte, elle n’avait jamais eu d’interaction aussi amicale et décontractée qu’aujourd’hui, ce fut donc un changement de rythme extrêmement rafraîchissant.
Cela me rappelle que j’ai toujours voulu une petite sœur… Non, ressaisis-toi. Ce n’est pas le moment d’y penser, c’est l’apprentissage de la personnalité de Mme Ristia qui est prioritaire. Pensa Charlotte, renouvelant sa détermination, mais…
« Ah… c’est si froid et doux. Léger, mais dense avec un goût corsé, et la façon dont il fond dans ta bouche est superbe. Voici donc… C’est… de la glace à la vanille !! » s’exclama Charlotte.
Elle fut bientôt victime des délices de la glace à la vanille que Ristia lui apporta.
« Je n’arrive pas à y croire… ! Je n’arrive pas à croire qu’un dessert si délicieux puisse exister dans ce monde ! Je n’ai jamais vu ni entendu parler d’une telle gâterie, encore moins mangée ! » Même Charlotte, la fille d’un comte, n’avait jamais mangé quelque chose d’aussi délicieux. Si les membres de la royauté découvraient l’existence de la crème glacée à la vanille, elle embaucherait probablement les chefs de cet établissement à n’importe quel prix. Cela signifiait essentiellement qu’il n’était pas impossible de s’enrichir énormément si l’on pouvait garder pour soi la recette de cette glace à la vanille. Il pourrait très bien aider à étendre le territoire du comte Warren de manière importante —, c’était juste à quel point c’était incroyablement délicieux. « Tu dois m’excuser pour mon ignorance au sujet de cette “glace à la vanille”, mais où diable en as-tu trouvé la recette ? » Elle avait demandé ça comme une discussion de tous les jours — du moins à l’oreille non entraînée, mais en réalité, il s’agissait d’une forme désinvolte de fouiner pour obtenir des informations.
« Je n’en suis pas sûr moi-même, mais c’est une recette que mes ancêtres ont apportée de leur patrie, » répondit Ristia.
« Alors, cette glace à la vanille est normalement vendue dans ce pays lointain, non ? » Elle lui demanda, pensant qu’elle pourrait s’en servir comme point de repère pour approfondir son enquête, mais contrairement aux attentes de Charlotte, Ristia lui répondit que ce n’était peut-être pas possible avec un sourire embarrassé.
« … Pas possible ? Mais pourquoi ? » demanda Charlotte.
« J’ai entendu dire que la patrie de mes ancêtres ne fait pas partie de ce monde, » répondit Ristia.
« Oh… Je comprends maintenant. Je suis vraiment désolée de demander ça. » Cela suggérait que… la région n’existait plus. C’est ainsi que Charlotte avait interprété la déclaration, et elle avait présenté des excuses sincères. Cependant, en même temps, elle avait frénétiquement fait tourner ses engrenages pour penser à son prochain plan d’action. D’une part, elle avait la recette d’une gâterie sucrée inconnue de ces terres, d’autre part, Ristia, la seule qui le savait. Soit Ristia était la seule à avoir cette connaissance, soit il y avait un groupe très sélectif de personnes qui l’avaient aussi. C’était une recette qu’elle désirait maintenant à tout prix.
« Mais, Grande Sœur, pourquoi cette question ? Par hasard, aimerais-tu apprendre à faire de la glace à la vanille ? » demanda Ristia.
« Hein ? Euh, non. Pourquoi, je ne le ferais pas…, » déclara Charlotte.
Oh, mon Dieu. Je me suis peux être fait avoir ! Charlotte avait paniqué. C’est une question qui exige le plus grand soin et la plus grande discrétion. Si elle découvrait que j’en ai après cette recette, on ne saurait dire quel genre d’exigence déraisonnable elle me lancerait en échange. Je dois aplanir cette situation immédiatement, Charlotte avait bien réfléchi jusqu’à ce qu’on lui présente un mince morceau de matériel semblable au menu.
« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Charlotte.
« Ça s’appelle du papier, un substitut au parchemin, » répondit Ristia.
« “Papier” ? Je vois… Quelque chose d’aussi fin et lisse est une technologie incroyable, » déclara Charlotte.
« Eh bien, j’espère que tu pourras regarder ce qui est écrit sur le papier, par opposition au papier lui-même, » déclara Ristia.
« Écrit sur le papier ? Oh, en effet, il semble y avoir quelque chose d’écrit ici qui est… Whaaaa !? » s’exclama Charlotte.
Le texte griffonné sur le papier avait coupé le souffle de Charlotte, car sur la toute première ligne se trouvaient les mots : « Comment préparer une délicieuse crème glacée à la vanille ? »
« Ne me dis pas que… c’est… c’est… » Bien qu’elle trouvait l’idée absurde, Charlotte regarda la recette écrite sur le papier. Qu’elle contienne ou non la vraie recette, il y avait certainement le processus de fabrication de la crème glacée à la vanille.
— Qu’est-ce qu’elle essaie de faire ? Est-ce une sorte de piège ? Ou est-ce une fausse recette pour m’écarter de la piste ? Oui, il y a beaucoup d’ingrédients ici que je ne connais pas, donc je ne peux pas être sûre s’il s’agit de l’article authentique ou pas simplement en l’examinant. Puisqu’elle a divulgué la recette si facilement, il y a toujours la possibilité qu’elle essaie de me faire tourner en bourrique, laissant entendre que c’est de ma faute si je ne peux pas la reproduire, se dit Charlotte à elle-même.
« Il y a quelque chose que tu ne comprends pas, Grande Sœur ? » demanda Ristia.
« Hein !? Tu vas vraiment… me répondre !? » demanda Charlotte.
« Bien sûr. Nous ne sommes pas très occupés avec les clients en ce moment, donc c’est bon, » déclara Ristia.
« Alors, pourrais-tu m’expliquer ce qu’est cet “extrait de vanille” ? » demanda Charlotte.
« Ça ? Il suffit d’écraser une gousse d’une plante appelée “vanille”, et…, » déclara Ristia.
Ristia commença son explication, mais Charlotte n’en comprenait presque rien. C’est pourquoi elle était convaincue qu’elle essayait juste de l’embobiner sans réelle intention de lui dire comment faire de la glace à la vanille pour elle-même. C’était, jusqu’à ce que…
« Oh, je sais, je sais. Voudrais-tu le regarder se faire dans la cuisine ? » demanda Ristia.
« Vas-tu vraiment me laisser voir !? » demanda Charlotte.
« Oui, bien sûr que oui. Et je partagerai un plant de vanille si tu en as besoin, » déclara Ristia.
« Quoiiiiiiiii !?? »
Ristia lui tendit un arbre sans hésitation. Charlotte n’arrivait pas à imaginer ce qu’elle voulait faire, même si elle y pensait fort. On l’avait ensuite montrée à la cuisine comme promise et on lui avait enseigné le processus approprié, de sorte que toute la situation devenait encore moins logique au fur et à mesure qu’elle avançait.
— Est-ce que c’est un rêve ? Ou est-ce que j’ai été forcée de faire un pacte avec le diable sans le savoir ? Est-ce que je pourrai sortir d’ici vivante ?
Ristia enseignait simplement à Charlotte le processus, s’adressant à elle en tant que Grande Sœur tout en assumant elle-même secrètement le rôle de Grande Sœur. C’était un sentiment que Charlotte n’aurait jamais été capable de deviner, alors elle avait été laissée dans un état de confusion totale.
« Pourquoi as-tu fait l’effort de m’apprendre la recette ? » La peur qu’elle ne puisse pas s’échapper de cet endroit avec sa vie lui écrasait pratiquement l’âme, mais elle s’était battue avec elle-même pour faire entendre sa question. Quant à la réponse de Ristia…
« Si je vois un enfant dans le besoin, je veux l’aider, ni plus ni moins. » Les yeux cramoisis de Ristia la regardaient alors qu’elle avait son grand sourire. C’était un sourire simple et pur avec une tendresse qui enveloppa Charlotte au milieu de sa crise de panique.
« Qui... Qui es-tu ? » demanda Charlotte.
« Moi ? Je suis une fille normale, » déclara Ristia.
« Une fille normale… dis-tu ? » C’était l’incarnation même d’une blague cruelle. Cette fille était plus élégante que Charlotte et sa noble éducation, et bien qu’elle ait des connaissances qui produiraient une fortune, elle n’avait aucun désir monétaire. Tout cela était lié à une personnalité riche en bienveillance, ne voulant pas fermer les yeux sur un enfant dans le besoin.
Il n’y a aucune chance qu’une fille comme ça soit une fille normale, pensa Charlotte.
« Directrice Ristia, peux-tu venir ici ? »
« Okie dokie ~ Oh, euh… désolée, je dois y aller. Si tu veux toujours regarder dans la zone, n’hésite pas à lire tout ce que tu veux. Et s’il y a quelque chose que tu ne comprends pas, Maria est toujours ouverte aux questions, » déclara Ristia avant de partir. Bien qu’elle ait vu sa vie défiler devant ses yeux, Charlotte était restée sans surveillance et sans conséquence. Elle avait regardé Ristia s’en aller, stupéfaite par toute cette épreuve.
« Hé, ma sœur… Euh, je veux dire, Grande Soeur. S’il y a quelque chose que tu ne comprends pas, demande-le-moi, d’accord ? » Charlotte sursauta en entendant la voix qui s’adressait à elle si soudainement par-derrière. Quand elle se dépêcha de se retourner, il y avait une jeune fille à la peau brune et aux cheveux argentés. Elle dégageait une aura extrêmement mûre et captivante en contraste avec son apparence jeune, mais elle évoquait une image beaucoup plus normale que Ristia, ce qui calmait un peu Charlotte.
« Vous seriez Mlle Maria… N’est-ce pas ? » demanda Charlotte.
« Oui, c’est bien moi. Alors… qui êtes-vous ? » Les yeux de Charlotte s’élargirent à mesure que la fille allait droit au but.
« Cette réaction me dit qu’il se passe quelque chose, » déclara Maria.
« … Pourquoi supposeriez-vous cela ? » Considérant qu’elle avait vu qu’elle était visiblement secouée, les excuses n’allaient pas s’avérer très efficaces. Il avait fallu tout ce que Charlotte avait en elle pour répondre à cette question qui s’adressait à Maria.
« … Raison ? C’était… par hasard ? » déclara Charlotte.
« “Par hasard”…, » demanda Maria.
Elle était nerveuse, en pensant que la raison qu’elle avait donnée l’avait piégée.
« Vous savez, l’ancien directeur m’a forcée à vendre l’une de mes délicates fleurs, » déclara Maria.
« Une délicate fleur ? Qu’est-ce que les fleurs ont à voir avec... Oh, mon Dieu, vous ne voulez pas dire… !? » Reprenant le contexte et réalisant la pire des possibilités, Charlotte jeta un second regard sur Maria. Son deuxième regard avait perçu la même aura captivante de Maria, disproportionnée par rapport à sa stature, sous un autre jour.
« Ça veut dire ce que vous pensez que ça veut dire. Mais je vais très bien maintenant. La directrice Ristia m’a sauvée de cette vie, » déclara Maria.
« Oui, mais…, » Charlotte commença, essayant toujours de défendre son point de vue, mais Maria lui tendit la main et lui coupa la parole.
« Je vais vraiment bien. Mais c’est en raison de la venue de la directrice Ristia. C’est pourquoi je ne sais peut-être pas qui vous êtes, mais si vous avez l’intention de faire quelque chose à la directrice Ristia, alors…, »… Alors tu vas le regretter, le regard de Maria sur Charlotte avait communiqué cela, finissant sa phrase pour elle. La pression sans paroles émanant de la jeune fille avait poussé Charlotte à déglutir de manière importante.
« … Je prendrai votre avertissement à cœur, » déclara Charlotte.
« Je vois. Dans ce cas, je n’ai rien à dire. Je répondrai à toutes vos questions sur la cuisine, » déclara Maria.
« Non, je vais prendre congé. Dite à Mademoiselle Ristia que je reviendrai, » Charlotte avait payé le repas, avec un petit extra, avant de quitter la cafétéria.
Par la suite, l’orphelinat et Ristia étaient restés dans sa tête. Elle rentra chez elle, pensant à ce qu’elle pouvait faire dans le meilleur intérêt non seulement de la maison du comte Warren, mais aussi de la population du territoire.
***
Partie 5
Environ un mois s’était écoulé depuis l’ouverture officielle de la cafétéria, et sa popularité s’était instantanément répandue par le bouche-à-oreille, ce qui avait déclenché un boom pour l’établissement. Un jour, avant le coucher du soleil, Ristia apprenait à Maria à faire des crêpes dans la cuisine.
« … Hum, comme ça ? » demanda Maria.
« Uh-huh. Tu apprends très vite, » déclara Ristia.
« … Les compliments ne te mèneront nulle part, » déclara Maria d’une manière directe, l’air un peu timide. C’était un spectacle adorable, qui faisait sourire Ristia, mais ce moment de bonheur fut interrompu par une voix grossière. Dans la direction du rez-de-chaussée résonnaient les appels insistants d’un homme.
« Je vais aller voir ce qui se passe, » déclara Ristia.
« Essaye de ne pas en faire trop, directrice Ristia, » déclara Maria.
« … Je ne vais pas le faire ~, » Tu n’as aucune foi en moi… Ristia avait été emplie de déception alors qu’elle se dirigeait vers l’étage en dessous. C’est là qu’elle avait rencontré Mew, qui était venue en courant. Mew s’était précipitée vers Ristia dès qu’elle l’avait vue.
« Waah... Sniff ! » Les larmes aux yeux, elle s’accrocha à Ristia. Ses oreilles de chien, normalement joyeuses et remuantes, s’étaient affaissées.
« Qu’y a-t-il, Mew ? » demanda Ristia.
« … Est-ce mal que je sois là ? » demanda Mew.
« Certainement pas, » répondit Ristia.
« … Vraiment ? » demanda Mew.
« Ouais, vraiment. Pourquoi demander une chose pareille ? » demanda-t-elle, tapotant doucement ses cheveux bleus et regardant dans ses yeux de jade.
« Ils m’ont dit que la présence de bêtes rend les villes humaines sales et m’ont dit de quitter la ville, » avait-elle répondu d’un ton feutré avec une expression triste.
« Oh, c’est ce qu’on t’a dit ? Il y a quelqu’un qui a dit ça… n’est-ce pas ? » Ristia étouffa ses émotions de violence et consola Mew en disant. « Tu n’as pas à t’inquiéter, je n’aurais jamais pensé à te dire quoi que ce soit d’aussi faux. »
Il était à noter qu’un tremblement de terre avait frappé la région à ce moment-là…
« … Vraiment ? » demanda Mew.
« Bien sûr que oui. Je n’aurais jamais rêvé de pouvoir te rendre si heureuse, ma chère Mew, » déclara Ristia.
« … Merci, directrice Ristia. » Cela lui avait apporté un peu de soulagement. Ristia avait laissé Maria s’occuper de Mew pendant qu’elle se rendait à la cafétéria pour confirmer l’identité du client impoli qui avait fait pleurer Mew. Quand elle était arrivée, l’étage normalement plein était vide, à l’exception d’un seul homme d’âge moyen avec deux soldats à l’arrière. Il avait un physique plutôt bâti qui suggérait qu’il avait été entraîné au combat, mais ses vêtements semblaient être d’assez bonne qualité — selon les normes humaines de l’époque actuelle, naturellement.
« Manager, ces types sont venus et ont viré tous les autres clients. » Ayane s’était précipitée jusqu’à Ristia quand elle avait réalisé qu’elle était là.
« Je vois… Mais ils ne t’ont rien fait de mal, n’est-ce pas, Ayane ? » demanda Ristia.
« Hm-hm, je vais bien. Mais ils ont dit de mauvaises choses à Mew, ce qui a fait que Allen voulait se battre…, » répondit Ayane.
« Aah... Donc c’est pour ça. » Elle réalisa alors pourquoi Allen était dans le coin de la cafétéria, Luc et les autres le retenant avec une prise de lutte. « Ayane, prends les autres et attends dans la cuisine. »
« Mais…, » répondit Ayane.
« Tout va bien se passer. Je protégerai tout le monde. Vous attendez tous à l’arrière, » déclara Ristia en souriant à Ayane, ce qui l’avait aidée à soulager la tension. Une fois que Ristia vit qu’Ayane et les autres se retiraient avec relativement peu de protestations, elle tourna son attention vers le groupe d’hommes. « Alors, qui êtes-vous tous les trois ? Vous n’avez pas l’air d’être des clients. »
« … Une bonne ? Je leur ai dit d’aller me chercher la directrice de l’orphelinat, » déclara l’homme à l’avant.
« Je suis Ristia, la nouvelle directrice de l’orphelinat, » répondit-elle.
« Oh-ho. Alors c’est toi Ristia, hein ? Tu es aussi belle que les rumeurs l’ont fait croire, » déclara l’homme.
« … Comme je l’ai demandé, qui êtes-vous tous ? » demanda Ristia.
« Je suis Jein, et je dirige cette ville, » déclara l’homme.
« Vraiment ? Alors, avant de vous demander en quoi je peux vous aider, puis-je vous demander une chose ? » demanda Ristia, en souriant sereinement tout en essayant de contenir sa rage silencieuse. La sensation de pression inconnue avait fait déglutir Jein.
« … Quoi ? Vas-y, crache le morceau, » déclara Jein.
« L’une de mes filles est venue me voir en pleurant il y a un instant… Est-ce vous qui avez fait ça ? » demanda Ristia.
« — Hahaha ! Cette gosse s’est enfuie en pleurant !? » Celui qui avait lancé ce gloussement était un soldat debout derrière Jein.
« … Est-ce vous qui l’avez fait pleurer ? » demanda Ristia.
« Et si c’était le cas ? » demanda le soldat.
« J’exige des excuses, » déclara Ristia.
« Haha ! Et je refuse, » répliqua le garde.
« … Je vois. » Ristia s’attendait à ce qu’il réagisse de cette façon, et elle se demandait maintenant quelle ligne de conduite elle devrait prendre. Elle avait le choix de lui faire regretter d’avoir dit quoi que ce soit de désobligeant à Mew sans que Mew ne le sache — Mew ou qui que ce soit d’autre, d’ailleurs. Mais elle savait que cela ne servirait qu’à de l’autosatisfaction. Sinon, ce serait une tâche simple pour Ristia de lui faire s’excuser auprès de Mew avec ses pouvoirs. En fait, ce serait une tâche simple que de le faire supplier en larmes pour qu’il ait la chance de s’excuser. Mais ça n’aiderait pas à guérir les blessures laissées dans le cœur de Mew.
Quoi qu’il en soit, il faudra peut-être lui faire regretter d’être né pour qu’il ne fasse plus jamais quelque chose comme ça, pensa Ristia, mais Jein s’était exprimé.
« D’accord, attends, » déclara Jein. « Geiz, c’est un orphelinat, donc il n’y a rien d’étrange à voir une bête dans le coin. En fait, il est approprié que des individus des tribus soient ici. Tu as tout faux en leur disant de “partir”, »
« — Monsieur ! Vous avez tout à fait raison. Mes plus sincères excuses ! » Le soldat accusé d’avoir fait des remarques désobligeantes contre Mew, apparemment nommé Geiz, avait rapidement fait marche arrière sur ses déclarations et s’était excusé. Mais il avait encore un sourire sur le visage, ce qui montrait clairement que ses excuses étaient, au mieux, superficielles. Ça n’avait pas aidé que le choix du mot de Jein soit assez suspect dès le commencement. Mais elle était sûre qu’en approfondissant la question, elle ne ferait pas plaisir à Mew.
« Très bien, très bien. Si vous voulez dire que vous ne répéterez pas la même erreur, alors j’accepte vos excuses. Soyez averti, cependant… Je ne serai pas si gentille la prochaine fois, » Ristia fixa Geiz en silence, ses yeux pourpres brillaient d’une intention meurtrière.
Faisant face à suffisamment de soif sanguinaire pour faire fuir les plus puissants dragons, Geiz avait du mal à respirer et avaient commencé à transpirer de grosses gouttes de sueur. Dix secondes s’étaient écoulées… puis vingt. Une fois que le visage de Geiz avait commencé à devenir violet, Ristia avait finalement retiré son intention meurtrière. Libéré de la terreur, Geiz s’était effondré là où il se tenait, sa respiration était visiblement ensablée. Cependant, les deux autres semblaient confus quant à la raison pour laquelle il s’était soudainement écroulé sur le plancher. Ristia avait prétendu qu’elle ne savait pas, malgré le fait qu’elle en était la cause profonde, et elle s’était tournée vers Jein.
« Alors qu’est-ce que vous faites là ? » demanda Ristia.
« A-Aah, ouais. Il n’y a qu’une seule raison pour laquelle je suis ici aujourd’hui. Je suis ici pour savoir comment vous allez agir pour ne pas avoir payé les impôts de l’orphelinat ou de cette entreprise, » déclara Jein.
« … Les impôts ? » demanda Ristia.
Ce n’est pas que Ristia n’était pas familière avec le système fiscal. Après tout, ils prélevaient des taxes sous prétexte de payer des frais pour faire des papiers d’identité lorsqu’elle arrivait en ville, et elle savait aussi qu’ils facturaient également des taxes aux citoyens pour qu’ils les laissent résider dans cette ville. Mais un orphelinat était un établissement où l’on pouvait s’occuper d’enfants sans famille, et ils étaient censés être exonérés d’impôt. Du moins, c’est ce qu’Eindebelle lui avait fait savoir.
« Mais les orphelinats n’ont pas à payer d’impôts, n’est-ce pas ? » demanda Ristia.
« Oui, c’était le cas lorsque l’orphelinat était pauvre. Mais maintenant que tu as construit cet immeuble de luxe, je suis sûr que ton entreprise est également en plein essor, » répondit Jein.
« Aah, et vous dites que c’est pour ça qu’on doit maintenant des impôts. » Ristia s’était dit que si c’était une règle de la ville, autant qu’elle s’y conforme, alors elle s’était mise à demander. « Combien cela va-t-il être exactement ? »
« Hmm, voyons voir… Une centaine de pièces d’or par an devrait suffire, » répondit Jein.
Si je fais un collier égal à la broche que j’ai vendue à la vente aux enchères l’autre jour et que j’arrive à la vendre, ce sera suffisant pour payer environ cent quatre-vingts impôts. Ça ne devrait pas être un problème si je fais ça, s’était dit Ristia, son processus de pensée étant un peu de travers.
Cependant, Jein vit le silence de Ristia et se mit à rire.
« Hehe hehe hehe hehe hehe... N’aie pas l’air si choquée. Je ne sais pas dans quelle mesure tu as un pécule, mais je sais que tu n’en as probablement pas assez pour payer ce montant d’impôt, » déclara Jein.
« … Oh, euh, vraiment ? » Ristia était sur le point de retirer une centaine de grosses pièces d’or — pas les plus petites, mais assez pour payer dix ans d’impôts — mais l’hypothèse de Jein qu’elle ne serait pas en mesure de les payer la mettait dans une position délicate. Je me demande si je finirais par briser sa fierté si je lui donnais dix ans d’impôts, ici et maintenant ? Peut-être que je devrais au moins prendre quelques jours pour le préparer…, pensa Ristia en faisant attention à sa situation. Certes, si c’était le cas, Jein rentrerait chez lui en extase. Malheureusement pour Jein, ça ne devait pas arriver. Jein avait un objectif différent à l’esprit dès le début, alors il avait proposé un plan alternatif pour les cent pièces d’or.
« En échange, l’orphelinat ne paye pas ses impôts et laisse les filles faire du bénévolat, » déclara Jein.
« … Du bénévolat, vous dites ? » Quand Ristia réalisa ce que ces mots suggéraient, une secousse affecta l’ensemble du continent. C’était une secousse qui ne s’était produite qu’une seule fois, et elle était petite. Certainement pas assez fort pour qu’on s’en aperçoive. Ristia était une fille avec beaucoup de maîtrise d’elle-même, après tout.
« C’est vrai. L’ancien directeur, le directeur Georg, a aimablement offert les services d’une jeune fille qui s’était portée volontaire. Mais j’ai été dans une situation difficile à cause de cet idiot qui est soudainement parti. Je ne sais pas dans quelles circonstances tu as hérité de l’orphelinat, mais il serait dans tes intérêts d’assumer le travail qu’il a laissé derrière lui. » Je doute sincèrement qu’elle me refuse, se dit-il en libérant ses intentions vicieuses. Mais qualifier cette « intention vicieuse » était présomptueux. Pour Ristia, c’était simplement une sensation d’inconfort. C’était la raison pour laquelle elle était perdue quant à sa stratégie à partir d’ici. Bien sûr, elle n’avait pas l’intention de laisser la situation qui avait fait vivre l’enfer à Maria et aux autres enfants, mais à ce moment-là, Jein n’était rien de plus qu’un petit animal qui aboyait en fanfaronnant. Elle ne savait pas si elle devait ou non tuer quelqu’un comme ça.
Le tuer ici d’une manière directe… ne serait pas une bonne idée. Je me souviens de la réaction de Nanami quand j’ai tué Gawain… Mm-hmm, c’est vraiment une mauvaise idée. Dans ce cas… Je pourrais le punir en lui coupant les bras et les jambes… En y repensant, non, l’ancien directeur George était vraiment effrayé par cela. Je parie que les enfants flipperaient aussi.
« Tu peux bluffer autant que tu veux, à la fin, tu n’es qu’une petite fille. Tu as si peur d’avoir perdu la capacité de parler, n’est-ce pas ? » demanda Jein.
« … Hein ? Vous parlez de moi ? » demanda Ristia.
« Qui d’autre que toi est là ? » demanda Jein.
Euh, je n’ai pas du tout peur de lui…, Ristia se commenta elle-même, mais Jein semblait convaincu qu’elle était terrifiée. Il avait une expression vraiment amusée bien visible sur son visage.
« D’accord, alors. Je vais t’offrir une autre alternative. À la place des orphelins, tu peux t’engager dans des services bénévoles. Je parie qu’il y aura une forte demande pour quelqu’un avec ton physique, » déclara Jein.
***
Partie 6
« … Et pourquoi devrais-je faire ça ? » demanda Ristia.
« Tu aimes les enfants, n’est-ce pas ? Si tu continues à te plaindre, tu risques de mettre mes hommes en colère et ils finiront par attaquer tes précieux enfants. » La menace évidente d’envoyer ses hommes sur les enfants avait fait plisser le front de Ristia. « Pas besoin d’avoir l’air si anxieuse. C’est seulement dans le cas où tu ne suivrais pas les ordres. Si tu le fais comme je dis, tout se terminera bien. Tu ne veux pas non plus voir ces enfants souffrir, n’est-ce pas ? »
« Eh bien…, » déclara Ristia.
Il avait raison. S’ils attaquaient les enfants, ils se défendraient sans aucun doute. Et comme les enfants ne comprenaient pas leur propre force, grâce aux broches que Ristia leur avait données en cadeau, ils pulvériseraient probablement le trio. Bien sûr, Ristia pourrait les ranimer si elle n’attendait pas trop longtemps après que les enfants les aient battus à mort, mais… aller si loin laisserait probablement des cicatrices dans le cœur des enfants.
Quelle terrible menace, pensa Ristia, son sang se gelant. Elle devait y mettre fin tranquillement si elle voulait prendre en compte les enfants, mais elle n’offrait pas ses propres « services bénévoles », c’était certain. Elle souhaitait qu’ils acceptent l’argent et qu’ils s’en tiennent à cela, mais si la sollicitation de ses services était au cœur de leur visite, alors cela semblait être une affaire difficile. Cela dit, la seule idée qui lui était venue à l’esprit était de massacrer Jein et son groupe. Mais si elle le faisait, les enfants en viendraient probablement à ne pas l’aimer. Ristia devait être prudente dans sa décision. Comme Jein l’avait mentionné, il lui restait très peu d’options.
Qu’est-ce que je devrais même faire… ? Ristia réfléchissait désespérément. Par exemple, je pourrais le tuer avec un poison à action lente. Personne ne saurait alors que je l’ai fait. Comme ça, les enfants ne me craindraient pas, n’est-ce pas ? Hmm… non. Ils n’en viendront peut-être pas à me craindre, mais les enfants pourraient quand même avoir peur s’ils voient ces gens souffrir. Et si on détruisait leurs esprits ? J’ai l’impression que c’est faisable, mais… Oh, je l’ai trouvé ! Tout ce que j’ai à faire, c’est de les effacer instantanément sans laisser de trace. De cette façon, je peux les tromper en faisant : « Hein ? Maintenant, où Monsieur Jein et les autres messieurs sont-ils allés ? » Ouais ! Ça devrait faire l’affaire. Allons-y avec ça.
Ristia avait concocté un plan farfelu à mettre en œuvre — jusqu’à ce qu’une fille vêtue d’une robe entre par l’entrée. Sa tenue était très différente de la dernière fois qu’elle était venue, mais ses cheveux blonds ondulés, et ses yeux bleus frais étaient indubitables. C’est la cliente qui avait demandé Ristia lors de sa précédente visite.
« Je suis désolée, Grande Sœur. La cafétéria de l’orphelinat est fermée, je suis un peu occupée en ce moment, » déclara Ristia.
« Oui, c’est ce qu’il semblait. Mais je suis venue ici aujourd’hui pour des affaires séparées, donc ça ne devrait pas être un problème, » déclara Charlotte.
« … Des affaires séparées ? Oh, euh… dans ce cas, en quoi puis-je vous aider ? » Ristia avait éteint le mode serveuse petite sœur et elle était revenue à sa façon de parler normalement. Au moment où Ristia avait laissé tomber son discours, le visage de Charlotte était devenu un peu triste. Du moins, c’est ce qu’on aurait dit.
« Vous pouvez m’aider en me laissant parler. J’espérais vous parler franchement, » déclara Charlotte.
« … Honnêtement ? Qui êtes-vous exactement… ? » demanda Ristia avec confusion, ce qui poussa la jeune fille à pincer l’ourlet de sa robe et à faire une révérence avec élégance.
« Mes excuses pour la présentation tardive. Je m’appelle Charlotte. Je suis la fille aînée de la maison du comte Warren, et je gouverne cette région. » Une fois que la blonde s’était présentée sous le nom de Charlotte, l’humeur générale s’était figée pour une raison inconnue, mais Ristia n’avait pas été affectée et avait réagi normalement.
« Oh, c’est vrai ? Cela veut-il dire que vous êtes aussi ici pour parler de l’orphelinat, Lady Charlotte ? » demanda Ristia.
« … Oh, mon Dieu, vous êtes très perspicace, » déclara Charlotte.
Ristia s’était trouvée découragée. Charlotte avait une beauté différente de Nanami et Maria et sa maturité était plus élevée que son âge. Elle était une fille élégante et séduisante, ce qui avait insufflé chez Ristia un fort désir de lui faire prendre le rôle de petite sœur, mais elle soupçonnait aussi que Charlotte était de connivence avec Jein. C’était jusqu’à ce qu’elle parle…
« Mademoiselle Ristia, j’ai entendu dire que vous avez utilisé vos économies pour reconstruire l’orphelinat. Je ne sais pas si cela sera utile, mais j’ai accordé une subvention d’aide non remboursable au maire ici présent, » déclara Charlotte.
« Aide non remboursable… ? » Ce qu’elle avait dit était le contraire de ce à quoi Ristia s’attendait, alors Ristia s’était trouvée extrêmement confuse.
« Oui, en plus d’une subvention mensuelle, j’ai versé une subvention pour aider à couvrir les coûts de rénovation. La somme est écrite sur ce parchemin, que vous pouvez vérifier, si vous le souhaitez. » Sur le parchemin, il y avait deux totaux : l’un était de trente pièces d’or pour la subvention d’aide à la rénovation, et l’autre était de trente pièces d’or pour une subvention mensuelle. Tandis que Ristia scrutait le parchemin, Charlotte inclina légèrement la tête et elle chuchota,
« La vérité, c’est qu’il y a des rumeurs selon lesquelles le maire aurait détourné les fonds. »
« Détournement de fonds ? » Ristia répondit en répétant, ce qui fit visiblement trembler Jein et ses hommes, mais elle ignora cela pour le moment et continua sa conversation avec Charlotte.
« Oui, détournement de fonds. Cependant, il a été difficile de trouver des preuves qui le ramènent à lui. Pourriez-vous me dire si la valeur de la subvention que vous recevez est différente de celle qui est consignée ici ? » demanda Charlotte.
« Puis-je vous le signaler ? » demanda Ristia.
« Oui. Si vous pouvez obtenir des preuves, alors faire que sa tête roule serait une tâche simple, » Charlotte avait poursuivi, « Mais, encore une fois, je suppose qu’il vous a payé le montant approprié une fois que vous avez pris la direction de l’orphelinat. Sinon, on le découvrirait tout de suite. Et je ne penserais pas qu’il serait assez bête pour faire ça… » Elle avait souri en se dépréciant en pensant à tout ça. Ristia revint avec un sourire un peu ironique, parce qu’elle avait finalement compris la situation.
« La bourse d’assistance mensuelle écrite ici est censée être payée tous les mois ? Pas tous à la fois par an ? » demanda Ristia.
« C’est comme ça que c’est censé se passer, mais… Ne me dites pas…, » s’exclama Charlotte.
« J’en ai bien peur. Je n’ai pas reçu de subvention d’aide au cours des derniers mois où j’ai été la nouvelle directrice, » déclara Ristia.
« … Quoi !? » Charlotte n’avait probablement jamais imaginé que c’était une possibilité, car ses yeux s’élargissaient avec incrédulité.
« Je vois qu’il est pourri au-delà de mon imagination. Mais je ne les trouve pas rapidement, il y a une chance qu’il essaie de s’échapper en insinuant que vous mentez, Mme Ristia. Et même si j’aimerais pouvoir établir des preuves contre lui…, » Charlotte se murmura pour elle-même quand elle commença à réfléchir. C’est à ce moment-là que Jein et ses hommes avaient essayé de se faufiler hors de l’établissement, alors Ristia les avait appelés.
« Rentrez-vous déjà chez vous ? » demanda Ristia.
Et une fois qu’ils avaient entendu cela, Jein et ses hommes avaient surgi d’une manière amusante.
« Oh, mon Dieu, j’avais presque oublié que vous aviez des clients ici. Je suis désolée si je m’immisce dans vos affaires. S’il vous plaît, allez-y, parlez-lui, je peux attendre, » déclara Charlotte en inclinant la tête, cédant la parole à Jein et à ses hommes.
« Non, ça ne nous dérange pas de parler plus tard ! » Il avait dit cela à toute allure et avait essayé de partir, mais Ristia n’était pas prête à laisser faire.
« “Plus tard” serait un problème. Comme je l’ai déjà dit, je refuse de forcer les enfants ou moi-même à participer à des “services bénévoles” en échange de nos impôts, » déclara Ristia à voix haute.
« Hyaa-oh !? » Charlotte déclencha un cri mystérieux. « Mme Ristia, de quoi parlez-vous ? »
« L’homme là-bas, Monsieur Jein ? Il m’a dit qu’il était le maire, » déclara Ristia.
« … Hein ? » Les yeux de Charlotte s’ouvrirent et Jein eut l’impression que le monde touchait à sa fin.
« Il m’a donc demandé de payer cent pièces d’or en impôts chaque année, » déclara Ristia.
« … Hein ? Une centaine d’or, chaque année… ? » demanda Charlotte.
« Il a ensuite exigé que les filles et moi offrions nos “services” bénévolement en échange du paiement des frais, » déclara Ristia.
« Par “services bénévoles”… Vous ne voulez pas dire… !? » demanda Charlotte.
« Oui, c’est exactement comme ça que ça sonne. » Qu’elle comprenne ou non l’explication de Ristia, le beau visage de Charlotte commença à devenir empli de fureur, tandis que Jein, dans une réaction opposée, commença à pâlir. Charlotte pointa son regard sur Jein.
« He. Un tel comportement grossier envers quelqu’un que la Maison du Comte Warren essaie d’accueillir chaleureusement… Il semblerait que c’est vous qui allez être imposé ici, » déclara Charlotte.
« Eek! N -Non ! Il y a un malentendu ! » s’écria Jein.
« Oh ? Et qu’est-ce que j’ai mal compris, je vous en prie ? Si vous dites que vous ne vous souciez pas de fournir votre tête au lieu de payer vos impôts, pourriez-vous m’expliquer votre raisonnement pour que je vous suive ? » demanda Charlotte, ses yeux furieux dirigés vers Jein.
« Eh bien, j’étais juste, euh… Ouais ! Je venais payer la bourse d’assistance ! » Jein s’était mis à trembler, effrayé comme une grenouille qui se fait regarder par un serpent. Et en élevant la voix comme ça, il s’était probablement libéré de sa peur, alors il avait continué sur sa lancée et s’était mis à mentir encore plus. « Je n’ai jamais dit un mot sur le fait de lui demander de payer des impôts ! Et la menacer de faire des choses en échange des impôts, c’est elle qui dit ça pour semer la confusion ! »
« Vous avez du culot de fabriquer des mensonges aussi atroces, » déclara Charlotte.
« Je ne mens pas ! Si vous dites que je mens, prouvez-moi que les déclarations de cette fille sont vraies ! » déclara Jeun.
« Khh, pourquoi vous… Comment osez-vous suggérer si impudemment que… ! » déclara Charlotte avec un visage plein de contrariété.
Hmm ~ on dirait que dire que je suis juste une fille normale ne servira pas de preuve ici, hein ?
Ristia en arriva à cette conclusion, mais soudain elle claqua des doigts, attirant toute l’attention sur elle. Une fois que ses yeux avaient rencontré ceux de Jein, elle avait activé son pouvoir de charme de vampire de Sang Véritable.
« Maintenant… dites à tout le monde ce que vous êtes venu faire ici — tout, » ordonna tranquillement Ristia, faisant briller ses yeux cramoisis.
Dans l’instant qui suit…
« Je suis venu ici parce que je pensais que ça finirait par me rapporter de l’argent. Si je te faisais payer tellement d’impôts que tu ne pourrais pas les payer, et si je pouvais te faire faire ce que je veux en échange, je pourrais détourner l’aide financière destinée à l’orphelinat, » déclara Jein.
« … Hein ? » Jein commença soudain à avouer ses crimes, ce qui laissa Charlotte stupéfaite.
« J’ai aussi entendu dire que la nouvelle directrice était une jeune fille incroyablement belle. J’ai pensé que si je la trompais pour qu’elle me soit redevable, je pourrais utiliser son beau corps, » continua Jein.
« Quel vil plan… ! Vous êtes détestable ! » Les yeux bleus de Charlotte étaient pleins de mépris et de rage. Une fois que Ristia avait compris qu’il avait assez parlé, elle relâcha le charme présent sur Jein.
« … Hein ? Qu’est-ce que je disais… !? C’était un malentendu ! Je disais juste ce qui me venait à l’esprit — je veux dire, non, je disais juste des choses qui n’étaient pas dans ma tête ! Quoi qu’il en soit, vous devez m’excuser ! » En même temps, Charlotte, tremblant de colère, leva la main droite, l’alignant au niveau du visage.
« Saisissez ce maître chanteur ! » déclara-t-elle d’une voix vaillante, en baissant la main. Une fois qu’elle l’avait fait, des hommes habillés en chevaliers avaient fait irruption de l’extérieur et avaient capturé Jein et ses hommes en un clin d’œil.