100 en Chance et une Compétence en Domptage de Dragons – Tome 4 – Chapitre 96

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Chapitre 96 : Le rituel Nunbana

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Chapitre 96 : Le rituel Nunbana

Partie 1

Deux ans et trois mois plus tôt

***Point de vue de Seryanna***

La salle d’audience de l’empereur était censée être imposante et les nobles nains qui s’étaient réunis ici pour surveiller cette cérémonie étaient censés être intimidants. Les gardes royaux dégageaient une force qui aurait effrayé un simple paysan et le regard de l’empereur lui-même était perçant et rempli d’une lourde pression pouvant faire taire même un noble turbulent.

Dans un tel endroit, j’étais censée me sentir humble, peut-être même effrayée, mais cela n’existait pas. Pour ma part, je ne me sentais pas différente de simplement entrer dans un bar bondé. Il y avait quelques regards qui indiquaient un danger, mais rien que je ne puisse pas gérer.

Comparée au roi Feryumstark, l’autorité de ce nain semble faible et la présence de la reine Elliessara est beaucoup plus intimidante que n’importe laquelle des leurs. Je pensai cela en regardant du coin de l’œil les nobles qui nous entouraient.

« Notre présence sur vos terres en est une de bonne volonté, Votre Majesté. » Déclara la princesse Elleyzabelle en lui faisant un sourire élégant.

« Hmph ! Comme beaucoup l’ont dit avant ! » déclara l’empereur Mush’Nomv’Azer.

« Pardonnez mon impolitesse, votre majesté, mais les dragons d’Albeyater ne sont pas ici pour parler en leur nom. » Déclara-t-elle avec le même ton poli et respectueux dans sa voix.

« Et où sont vos hommes ? Je ne vois que des femmes devant moi ! » Dit-il en levant le menton.

« Votre Majesté, il y a peut-être longtemps qu’un dragon n’a pas envahi vos terres. Permettez-moi de vous rappeler que sur le continent du Dragon, nous, les dragonnes, gouvernons les pays et que les dragons les défendent. Cependant, cela ne signifie pas que nous ignorons la capacité d’un homme à gouverner. Le Premier ministre du royaume d’Albeyater, mon respectueux frère aîné, Elovius Seyendraugher, en est la preuve. » Expliqua la princesse Elleyzabelle avec un sourire aux lèvres qui ne trahissait pas sa capacité d’ambassadrice de notre pays.

Ce qu’elle pouvait faire avec une aisance presque naturelle, j’avais du mal à l’imiter. Sourire comme elle le faisait et laisser ma voix cacher mes vrais sentiments était presque impossible pour moi. Quand je m’énervais, c’était clair pour tout le monde autour de moi. Quand j’étais de bonne humeur, cela se voyait sur mon visage et cela se voyait aussi quand j’étais de mauvaise humeur. La plupart du temps, j’essayais d’être stoïque, mais si mon visage ne me trahissait pas, c’est ma queue qui le faisait.

D’autre part, malgré son âge plutôt jeune du point de vue d’un dragon, la princesse Elleyzabelle affichait un maniérisme qui reflétait non seulement son statut, mais également sa profonde compréhension des questions politiques.

Comparée à sa mère, il lui restait encore beaucoup de choses à apprendre et même en imaginant les deux debout côte à côte, c’était la reine qui captiverait toujours votre attention. Néanmoins, si à un tel âge, la princesse Elleyzabelle pouvait se présenter si bien devant le souverain d’un pays étranger, il n’y aurait plus que de grandes choses à attendre de sa part.

En tant que ses chevaliers, Kataryna et moi étions restés autour d’elle. Nous devions agir comme des statues sans émotion, capables de réduire nos ennemis au moment où nous sentions que l’intention de tuer était dirigée contre notre maître.

« Ce sont donc les hommes qui portent les épées et les femmes qui manipulent les documents. Puis-je supposer que vous êtes venu ici sans protection ? » L’empereur lui montra un sourire suffisant.

Nous sommes regardées de haut, avais-je pensé.

« Bien sûr que non, Votre Majesté. Ces deux chevalières sont mes fières chevalières et chacune d’entre elles a le pouvoir de lutter contre toute une armée. » Dit-elle et puis, d’un geste de main, elle me montra du doigt. « Puis-je vous présenter la duchesse Seryanna Draketerus ? Son mari est le duc Alkelios Yatagai Draketerus. Elle est une dragonne de mon beau royaume Albeyater. Lors de la dernière guerre, elle a réussi à vaincre par elle-même l’un des puissants dragons éveillés supérieurs de notre ennemi. » Les murmures commencèrent à se répandre parmi la foule des nobles. Les ignorants, la princesse déplaça ensuite sa main vers Kataryna avec le même mouvement fluide. « Permettez-moi de vous présenter Kataryna Georg, une chevalière royale et une puissante dragonne qui a combattu et dominé de multiples dragons éveillés supérieurs. »

« Je ne comprends pas. Quelle est la puissance d’un éveillé supérieur. Expliquez. » Demanda Sa Majesté.

« C’est quelqu’un qui a un niveau de pouvoir supérieur à 1000. Les humains l’appellent souvent éveillé ou ascendant. J’ai lu dans certains livres qu’ils s’appelaient autrefois béni ou évolué. »

« Hm… je vois. Alors elles sont puissantes, dites-vous. Pensez-vous qu’en venant avec ces deux, notre pays ne fera que pencher la tête face aux demandes défavorables ? » Interrogea-t-il alors que son regard devenait strict et perçant.

« Bien sûr que non, Votre Majesté. Leur devoir est seulement d’agir comme mes gardes dans ce voyage. Si vous ou quelqu’un d’autre avez l’intention de me faire du mal, elles agiront en conséquence. Néanmoins, notre intention ici n’est pas de transformer l’empire Trindania en ennemi, mais en un allié, » avait-elle expliqué sans montrer aucun signe de pression ou d’intimidation.

L’empereur Mush’Nomv’Azer se pencha en arrière sur son trône et ferma les yeux un instant. Il semblait être plongé dans ses pensées alors que des rides se formaient sur son front. Pendant ce temps, les nobles murmuraient entre eux et leurs opinions allaient de la simple curiosité à la désapprobation absolue de notre présence dans ces murs.

Peu importe ce qui était murmuré à l’arrière-plan, nous étions restés silencieux et avions attendu patiemment que Sa Majesté poursuive la conversation. Ce nain, cependant, n’était pas un imbécile et même moi, je pouvais dire que ces négociations seraient assez difficiles à atteindre. Nous proposions quelque chose que l’Empereur avait promis à son peuple, un lien avec le monde extérieur, mais il devait également tenir compte des paroles des nobles qui l’avaient aidé à remporter la couronne.

Avec notre présence sur le continent de Trindania, les choses allaient probablement plus vite que prévu.

Lorsque l’empereur Mush’Nomv’Azer ouvrit les yeux, il nous regarda. Une détermination inébranlable se manifesta sur son visage et une vague d’autorité se dégagea de sa présence.

« Bien que je considère votre présence dans mon empire comme favorable, une opportunité pour notre avenir, nous, les nains, sommes toujours ancrés dans nos traditions. Quand il m’est venu, d’accepter les héros humains comme faisant partit de mon peuple, je l’ai fait sans sourciller pour que leur aide dans mon ascension au trône soit claire pour quiconque. Les dragons, cependant, n’ont jamais été accueillis pour entrer sur nos terres. Notre commerce est, au mieux minime, et de nombreux cas de parias ont été passés en contrebande sur vos navires et sortis de l’Empire. Quant au dernier membre de la royauté à avoir pénétré dans ces lieux, c’était un roi relliar, il y a plus de 200 ans. Il est venu avec une demande de guerre que le roi a alors rejetée. »

« Je comprends, Votre Majesté. Alors que pouvons-nous faire pour obtenir l’acceptation de l’empire Trindania ? » Demanda la princesse Elleyzabelle.

« Mon acceptation ? Rien. Cependant, la plupart des nobles ici ne vous voient pas avec des yeux favorables. Leurs sujets seront sans doute les mêmes. Quant aux nains plus traditionnellement liés, ils exigeront immédiatement de vous renvoyer. Ce sont eux que vous avez besoin de convaincre pour gagner l’acceptation de notre peuple. » Déclara-t-il.

« Et comment ferons-nous cela ? » Demanda-t-elle sans perdre son calme même une fraction de seconde.

« Je ne peux penser qu’à une chose. Cependant, aucun autre étranger n’a osé accepter cette voie… » Dit-il en se frottant la barbe et en fermant les yeux.

« Votre Majesté, vous parlez de… » L’un des nobles osa parler avec surprise.

« Oui. » Répondit-il avec un signe de tête puis nous regarda. « Vous passerez toutes les trois par le rituel de Nundaba, également connu sous le nom de rituel d’acceptation. Grâce à cela, vous serez considéré comme des nôtres, un nain. Cela ne signifie nullement que vous abandonnez votre pays d’origine. Le rituel de Nundaba depuis les temps anciens a été utilisé pour tester la loyauté d’un nain ainsi que son lien avec nos dieux. Si nos divinités vous acceptent, nous, les nains, ne pouvons que nous plier à leur volonté. » Il expliqua.

« Puis-je entendre les détails de ce rituel ? » Demanda la princesse Elleyzabelle en plissant les yeux.

C’était le premier signe d’émotion qu’elle avait montré, et l’impact de celle-ci fit vaciller l’empereur.

« Euh… Oui. Ahem! Le rituel de Nundaba exige que tous ceux qui souhaitent participer soient amenés à la cour du temple. Là, ils choisiront chacun le Dieu dans le temple duquel ils se soumettront. En tant que princesse d’Albeyater, cependant, nous ne pouvons vous demander de faire de même. Vous serez vêtue du même costume traditionnel que les deux autres et resterez sur la Plate-forme de l’âme jusqu’à ce que vos deux Chevaliers aient terminé leur rituel, si elles le souhaitent. »

« Votre Altesse, nous ne pouvons pas vous quitter… Quelque chose comme ça… » Objectai-je immédiatement.

« Sire Draketerus, je comprends votre inquiétude, cependant, il y en a d’autres qui peuvent agir en tant que mes gardes pendant votre procès. Je crois que Sire Shellar, Sire Van, Sire Attrakus et Sire Narnyesall suffiront. En outre, je crois que nous pouvons faire confiance au bon empereur Mush’Nomv’Azer pour nous fournir la protection appropriée. » Dit-elle puis regarda Sa Majesté.

« Bien sûr ! Je ne montrerai aucune pitié à ceux qui osent déranger ce rituel sacré ! Ai-je été clair ? » Il éleva la voix en jetant un regard froid sur tous les nobles de la pièce.

« Bien sûr, Votre Majesté ! » Plusieurs d’entre eux inclinèrent la tête.

« Je vais envoyer mes meilleurs hommes pour les garder en signe de ma loyauté ! » Déclara un autre.

« Moi aussi ! Bien sûr, je ne ferai rien pour tacher le nom de Sa Majesté ! »

Ils avaient tous donné leur accord, mais j’avais entendu un étrange murmure : « Ce n’est pas comme si tout le monde s’attendait à ce qu’ils passent ce genre de procès. C’est trop honteux pour les femmes, après tout. »

L’empereur Mush’Nomv’Azer se leva. Il ramassa son arme puis le souleva au-dessus de sa tête.

D’une voix forte et dominante, assez fort pour être entendu dans toute la salle d’audience, il cria : « Alors, qu’il en soit ainsi ! Je déclare que ces trois personnes doivent passer par le rituel de Nundaba immédiatement ! »

Les nains avaient acclamé leur empereur. Tous ne semblaient pas en être satisfaits et nous étions encore confuses quant à ce que cet étrange rituel nous demanderait.

Une fois que les nains s’étaient calmés, l’empereur s’était tourné vers la foule et avait ordonné « Grand prêtre Klen'Ashin'Tark, veuillez escorter nos invités estimés jusqu’à la cour du temple et les préparer au rituel de Nundaba. »

« Comme vous voulez, Votre Majesté ! » Un nain vêtu d’une robe d’un blanc pur s’était avancé et s’était incliné devant lui.

Il avait une longue barbe blanche tressée et portait autour du cou un grand collier composé de dents de monstre, tout infusées d’énergie magique. Avec son sourire calme et doux, vous ne sentiriez pas que ce nain pourrait constituer un danger, mais mon instinct me disait qu’il était probablement l’un des individus les plus puissants présents ici.

Avec un rythme lent, il s’était approché de nous et avait ensuite fait un petit salut.

« Je m’appelle Klen'Ashin'Tark. Je suis le grand prêtre de cette ville et aussi un représentant de tous les temples. S’il vous plaît, permettez-moi de vous guider vers notre lieu de prière. Par ici. » Il avait ensuite marché devant nous.

« Je vous souhaite bonne chance, dragonnes ! » déclara l’empereur.

« Merci, Votre Majesté. Nous ne vous décevrons pas, » déclara la princesse Elleyzabelle en hochant la tête, puis en suivant le grand prêtre.

Je fis un salut à l’empereur puis les suivis. Kataryna acquiesça une fois et nos quatre chevaliers avaient salué.

Dès que nous étions sortis de la salle d’audience, Tanarotte avait approché Kataryna avec un grand sourire aux lèvres.

« Ne t’inquiète pas, je veillerai à protéger la princesse ! » Déclara-t-elle.

« Je m’inquiète davantage que tu essayes de te faufiler à l’intérieur du temple pour me regarder. » Dit Kataryna en grommelant en plissant les yeux.

« Keh! Comment as-tu découvert mon plan ?! » La demoiselle-dragon était sous le choc.

« Peut-être qu’avant de commencer ce rituel de Nundaba ou quoi que ce soit, nous devrions organiser des funérailles pour toi ? Tu sais, juste au cas où. » Demanda Kataryna avec une contraction sur la joue droite.

***

Partie 2

« Ne vous inquiétez pas, Sire Kataryna, tous nos temples sont gardés par de puissants guerriers et les salles dans lesquelles vous prierez ne peuvent être ouvertes que par un prêtre de confiance choisi par vous. Si quelqu’un ose ouvrir la porte sans mon approbation, les autres prêtres l’entendront certainement et agiront immédiatement. » Nous déclara le prêtre nain.

Au moment même où je voulais faire un commentaire sur la possibilité d’un assassinat de la princesse, elle m’avait regardée puis m’avait dit. « Je sais ce que tu veux dire, Seryanna, mais c’est un risque que je suis prête à courir si cela signifie que nos deux nations se rapprochent. »

La détermination dans ses yeux brillait comme une étoile brillante. Rien de ce que j’aurais dit ne l’aurait fait changer d’avis. En outre, à moins que quelque chose de vraiment dangereux ne se produise, interrompre ou refuser de participer à cet essai ternirait la confiance de l’Empereur en nous et en tous les dragons.

« Je suivrai vos ordres. » J’ai dit.

« Bien. Maintenant, grand prêtre Klen'Ashin'Tark, que devons-nous faire exactement? » Elle l’avait demandé.

« C’est simple. Vous choisirez un dieu ou un esprit de votre désir, puis vous resterez dans la salle de prière pendant trois jours. Un sablier sera utilisé pour mesurer le temps. Vous aurez le devoir de le retourner une fois que le sable aura complètement coulé. À la goutte du premier grain de sable, vous recevrez un livre de prières pour cette entité spécifique. Vous aurez le devoir de le lire une fois par jour. Si vous ne savez pas lire, nous demanderons à l’un de nos acolytes de le lire pour vous. » Expliqua-t-il en regardant en avant.

« Il faudra faire ça pendant trois jours sans dormir? » avais-je demandé.

« Oui. Voulez-vous entendre le nom de tous nos dieux et esprits gardiens? »

« Il n’y en aura pas besoin. Kataryna, tu choisis le dieu de la Terre, et Seryanna, le dieu du feu. Je n’aurai d’autre choix que de rester au milieu de la plate-forme d’âme, mais je crois que ces deux-là sont les plus compatibles avec vos éléments, » déclara la princesse Elleyzabelle.

« Dieu de la terre? N’y a-t-il pas de glace? » Demanda Kataryna avec un sourcil levé.

« De glace? Non, la glace est juste de l’eau devenue froide. Pourquoi y aurait-il un dieu de glace? Le dieu du feu contrôle la température de toutes choses. Nous le prions pour que nos lames se réchauffent dans la forge, puis se refroidissent correctement dans l’eau. » Le Grand Prêtre Klen'Ashin'Tark expliqua avec beaucoup de zèle dans le ton de sa voix, presque comme s’il essayait de nous convaincre de la puissance de la divinité qu’il adorait.

« Exactement. En outre, je crois que le Dieu de la Terre t’ira bien. Grand prêtre, aurez-vous la gentillesse de dire à mes chevaliers à quoi elles s’attendent à l’intérieur de ces deux temples? » Lui demanda la princesse d’un ton poli.

« Bien sûr! Dans la salle de prière du dieu du feu, les températures vont monter et descendre toutes les heures, atteignant parfois des valeurs presque insupportables. De nombreux nains ont été forcés de quitter la salle de prière quelques heures après y avoir pénétré. Quant à la salle de prière du Dieu de la Terre, vous serez soumis au silence étrange des vieilles grottes abandonnées. Le déplacement de la terre sera la seule chanson que vous entendrez à part votre cœur qui bat et votre souffle haletant. Un humain a une fois osé rester dans cette chambre pendant plus d’une journée, puis en est sorti complètement fou. Le pauvre homme hurlait qu’il voulait retourner dans un endroit étrange appelé “Japon” pour devenir quelque chose d’étrange appelé “esclave corporatif”. » Il secoua la tête et offrit une prière silencieuse à cet individu.

« Ce devait être un héros humain, » avais-je dit.

« Eh bien, aucun de nous, les nains, ne l’avait vraiment dérangé. C’était un type étrange qui affirmait qu’il gouvernerait un jour le monde et disposerait d’un harem. Dommage qu’il soit impuissant dans la tête. » Il secoua la tête et lui proposa une autre prière silencieuse.

« Cela semble intéressant. Que voulez-vous dire impuissant dans la tête? » Demanda Kataryna avec un sourire narquois sur les lèvres.

« Et bien, l’histoire se passe comme ça. Peu de temps après l’apparition des héros humains, une belle jeune fille naine est tombée amoureuse de lui pour une raison étrange connue uniquement des esprits, mais il ne l’a pas touchée même quand elle s’est jetée sur lui nue. Son corps a réagi, mais son esprit ne semblait pas comprendre le concept de “plaisir sexuel”. À la fin, elle lui donna un coup de pied dans sa virilité et alla trouver quelqu’un d’autre avec qui tomber amoureux. Le pauvre homme, ne comprenant pas ce qui s’est passé, il est venu chercher mon aide et je lui ai dit d’utiliser l’une des salles de prière. »

« Hahaha! Si amusant! » Ris Kataryna.

« Hm? Alkelios a presque fini comme ça aussi… » J’avais plissé le front.

« Non, mon amie, ce gars-là n’aurait jamais fini comme ça. Tout d’abord, contrairement au type insensé dont le souverain nous a parlé, Alkelios a tout à fait été attiré depuis le début. Il avait juste un peu trop de stress accumulé sur ses épaules. C’est tout. » Elle haussa les épaules.

« Oh? Vous connaissez quelqu’un qui a traversé une situation similaire? » Le grand prêtre nous regardait avec de grands yeux curieux.

« Similaire, peut-être… » je hochai la tête. « Mais il s’en est remis. »

« Comment a-t-il réussi ? Puis-je savoir? »

« Nous avons longuement discuté de la façon dont il a vu les choses APRÈS avoir surmonté la lumière du jour ! » Répondit Kataryna en riant.

« L’avez-vous battu? » Le prêtre ne s’attendait pas à une telle réponse.

« Jusqu’à ce qu’il se soit calmé, oui. Sinon, il ne m’aurait pas écouté. »

« Sans elle, je doute que j’aie pu faire quoi que ce soit pour aider mon mari à sortir de cette situation difficile. » Avais-je dit.

« Je crois que cela dépend de l’individu, cependant. Il est beaucoup plus important de les placer dans un état dans lequel ils peuvent écouter ce que vous avez à dire, puis faire un choix sans les peurs qui pourraient les lier. » La princesse Elleyzabelle avait donné son avis sur la question.

« C’est en effet assez fascinant, et il ne semble pas que l’une de vous soit inquiète de passer trois jours dans la salle de prière. » Fit remarquer le grand prêtre.

« S’inquiéter de quoi ?? » Se moqua Kataryna.

« Je suis d’accord. Nous n’avons rien à craindre. » J’ai hoché la tête.

Nous avions continué à échanger des mots inutiles alors que nous traversions les rues étroites et parfois tordues de la capitale naine Exaver. En chemin, nous avions rassemblé de nombreux regards curieux, parmi lesquels les enfants semblaient être les plus enthousiastes à l’idée de nous voir.

Nous étions un spectacle rare pour eux.

Mais ce qui avait fait ressortir cette situation inhabituelle était le fait que le grand prêtre Klen'Ashin'Tark était un nain qui préférait se mêler aux gens du commun plutôt que de rester uniquement dans les milieux des classes supérieures. Même si certains nobles le regardaient de haut parce qu’il guidait les invités de l’empereur à marcher vers le Temple, cela ne nous dérangeait certainement pas. La princesse avait même fait remarquer que ce que faisait ce nain était une chose intelligente. En gagnant les faveurs des gens du peuple, il devenait très difficile pour ses ennemis parmi la noblesse d’essayer de le tuer ou de le forcer à faire quelque chose qu’il aurait pu désapprouver.

Le grand prêtre Klen'Ashin'Tark était un nain intelligent qui se souciait non seulement de lui-même, mais aussi de ceux qui l’entouraient. D’après ce que j’avais pu voir, il était le genre de personne que l’on ne pouvait détester et en même temps qu’on ne pouvait se permettre d’avoir comme ennemi. Si ce nain finissait par nous approuver, les négociations avec l’empire Trindania se dérouleraient en douceur.

La cour du temple avait au centre une plate-forme circulaire de trois mètres de haut. De là-dessus, le grand prêtre effectuait généralement ses cérémonies, qui impliquaient toutes les divinités qu’ils vénéraient. De mon point de vue, il s’agissait simplement d’une grosse dalle de pierre découpée en un cercle parfait aux bords arrondis, rien de plus. Je ne pouvais sentir aucune sorte d’énergie divine émaner de cela ni voir ce qui était si spécial à ce sujet, mais la religion et le culte avaient leur propre façon de faire croire que même les choses les plus insignifiantes avaient une grande valeur.

Les temples eux-mêmes faisaient tous face à la porte d’entrée de la plate-forme de l’âme. Ils avaient été construits en demi-cercle. De gauche à droite, ils étaient disposés comme suit : Temple des esprits des liquides; Temple des Esprits des Métaux; Temple du dieu de la terre; Temple du dieu de feu; Temple des esprits des gemmes; et Temple des Esprits de la Nature.

Quand nous étions arrivés à la cour du temple, je m’étais souvenue des temples du continent des dragons. Ils étaient assez grands pour que même un dragon se sente comme à la maison, avec de grandes arches et des colonnes impressionnantes décorées de scènes sculptées de mythes et de légendes. Cela me donnait l’impression d’être entrée dans une autre ville, gouvernée par des géants plutôt que par des nains, et c’était encore plus impressionnant de constater à quel point le plafond de leur maison était proche du sol.

Des portes en pierre massives nous avaient accueillis à l’entrée de chaque temple aux côtés de deux robustes gardes nains. Alors qu’ils essayaient de paraître intimidants, ils étaient bien en dessous de notre force. Tout au plus, je ne pouvais les voir que comme des alarmes bruyantes au cas où quelque chose se produirait, mais certainement pas une force sur laquelle il faut compter.

« Sire Seryanna, Sire Kataryna, un acolyte arrivera sous peu pour vous accompagner à la salle de prière du temple de votre choix. Là, vous apprendrez comment prononcer correctement les paroles de nos prières. Quant à Votre Altesse, permettez-moi de vous accompagner à mon bureau. Je vais personnellement vous aider avec les prières. Une fois que vos togas seront arrivées, les acolytes partiront et une prêtresse vous aidera à vous changer. » Expliqua le Grand Prêtre Klen'Ashin'Tark avec un regard calme.

« Toga? » Demandai-je en fronçant les sourcils.

« C’est le nom que nous utilisons pour cette tenue particulière. Il s’agit d’un vêtement semi-circulaire drapé autour des épaules et du corps. Chaque nain a une toge de cérémonie pour divers rituels, mais comme vous venez d’arriver sur ce continent et que vous n’êtes pas habitué à nos rituels, je ne m’attendrai pas à ce que vous en ayez une de votre taille, alors j’enverrai quelqu’un pour vous en préparer une pour vous. Il n’est pas nécessaire de prendre des mesures, il suffit de connaître votre taille. » Expliqua-t-il d’un ton calme.

« Donc, en d’autres termes, nous attendrons d’abord dans nos chambres jusqu’à ce que les togas arrivent et ensuite le rituel commencera? » Demanda la princesse Elleyzabelle.

« Effectivement. » Il acquiesça. « Pendant la préparation des togas, nous vous enseignerons à toutes les trois le moyen de prier correctement. » Il nous avait montré un sourire.

« Je comprends. Alors, s’il vous plaît, ouvrez la voie, » déclara la princesse Elleyzabelle avec un sourire courtois.

Le bureau du haut prêtre était situé dans l’espace situé entre le Temple du Dieu de feu et le Temple du Dieu de la Terre. C’était une grande pièce spacieuse avec une petite fenêtre à l’arrière donnant une vue sur un beau jardin de fleurs. La femme du grand prêtre était celle qui s’occupait d’elles.

Peu de temps après notre arrivée à l’intérieur, deux acolytes étaient arrivées pour nous guider, Kataryna et moi, dans nos salles respectives. Bien que réticente, j’avais suivi l’ordre de Son Altesse et je m’étais séparée d’elle. Je ne la verrais qu’à la fin du rituel, dans trois jours.

La salle de prière pour le temple du dieu de feu était juste à l’arrière du temple et dès que j’étais entrée, j’avais senti une vague de chaleur passer sur mon armure. L’acolyte l’avait trouvé insupportable au début et avait eu besoin d’un moment pour s’adapter, mais cela ne m’avait posé aucun problème. Dans mon armure, la température n’était pas supérieure à celle d’une rivière pendant une chaude journée d’été.

La pièce elle-même était de forme circulaire et contenait de nombreux cristaux magiques enchantés par des sorts de feu qui augmentaient la température autour d’eux. Le sol était entouré d’un fossé de lave, et la seule façon de le traverser était de passer par un pont en pierre que l’acolyte évoquait avec sa magie.

Quand je m’étais placée au centre de cette pièce, j’avais levé les yeux et j’avais vu le ciel bleu clair. C’était comme si je regardais de l’intérieur d’un volcan, la température semblait également correspondre.

« Lady Seryanna, c’est la salle de prière du dieu du feu. Je vais maintenant vous expliquer comment utiliser ce livre de prières. Est-ce que ça va si on commence maintenant? » Demanda le nain en me montrant un sourire ironique.

Il semblait être un jeune adulte, mais son sourire était forcé. Il aurait sans doute préféré être ailleurs que dans cette immense marmite. Ses vêtements étaient mouillés et il avait un peu de difficulté à respirer, alors que je ne commençais même pas à transpirer.

« Commençons. » J’avais hoché la tête.

« Merveilleux! » L’homme sourit puis fit apparaître deux pierres que nous pourrions utiliser comme chaises.

Au moment où il avait ouvert son livre, j’avais froncé les sourcils. Même si je pouvais lire les caractères grâce à la Bénédiction de la déesse Ambre qui recouvrait tout le continent, je ne pouvais pas comprendre les mots eux-mêmes. Pour moi, ils ne voulaient rien dire et ressemblaient à du charabia.

***

Partie 3

« Commençons, cette partie est : Myo Sho Fu Mon. Cela signifie “la loi profonde”. Et voici Myoho renge kyo, la loi merveilleuse du sutra du lotus. » expliqua-t-il.

« Hm ? Cette partie… est… Sho Buh Chi E. Jin Jin Mu Ryo. Go Chi E Mon. Nange Nan Nyu ? » avais-je demandé.

« Oui, mais vous avez prononcé Bu “comme Buh, c’est faux. Ici, quand vous voyez ce signe, vous le prononcez comme ça… » expliqua-t-il.

Une heure et demie plus tard, j’avais réussi à comprendre la plupart des symboles étranges et leur prononciation. Le prêtre avait essayé d’expliquer leur signification aussi, mais j’avais trouvé l’idée d’illumination stagnante ou d’illumination conditionnée comme quelque peu illogique. Cependant, je ne lui avais pas dit cela, car je ne voulais pas causer de problèmes.

« Ce n’est qu’en lisant cela tous les jours et toutes les nuits qu’un disciple peut un jour apprendre à dépasser ses propres limites et à conquérir les vies que son âme apporte au monde. L’état mental que l’on atteint à ce stade s’appelle un illuminé. » Expliqua-t-il avec zèle.

« Y a-t-il des illuminés sur ce continent ? » Demandai-je avec curiosité.

« Oui. » Acquiesça-t-il avec un sourire. « Ce sont de puissants guerriers qui suivent les enseignements des dieux et honorent la parole de notre empereur. » Il inclina la tête.

Alors… un éveillé supérieur ? C’est un fait qu’ils voient le monde avec des yeux différents, mais je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils ont atteint une sorte d’état supérieur spirituel. Au moins, je pense qu’aucun d’entre eux n’a… pensai-je en regardant le livre.

« Peut-être que ce n’est qu’un simple guide ? Une histoire qui pourrait aider à mieux comprendre le monde plutôt que de donner une loi trop précise laquelle vous devez obéir. » M’étais-je demandé à voix haute.

« Hm… ce sont des paroles sages, Lady Seryanna, mais je crains qu’elles ne soient trompeuses. Les mots de la religion doivent être obéis sans douter ! » Déclara-t-il avec un sourire heureux.

Obéi ? Ce fut le seul mot qui avait atteint mon esprit quand je l’entendis.

L’obsession de suivre une certaine doctrine était présente aussi bien dans la religion que dans la politique de l’État. Pour ceux qui appartenaient à l’armée, cela faisait partie de leur vie. Nous devions tous obéir à la reine et au roi.

J’avais abandonné cette pensée et m’étais concentrée sur les jours de prière à venir.

Lorsque la toge était arrivée, j’avais été surprise par la finesse du matériau. C’était semblable à la soie d’araignée, mais elle manquait de résistance et je ne sentais aucune énergie magique en sortir. Malgré tout, je doutais fortement qu’un roturier puisse l’acheter. D’après ce que j’avais vu en marchant depuis le palais, le tissu le plus courant était le lin, suivi des peaux d’animaux. Il n’y avait aucun endroit où ils pourraient récolter du coton ou une forêt où ils pourraient élever des araignées.

L’importation était également hors de question, alors peut-être qu’ils avaient d’autres moyens de produire cette soie ?

Mettre la toge était un peu difficile pour moi, alors j’avais demandé à l’une des prêtresses du temple de m’aider. Mes ailes et ma queue me gênaient et avaient rendu la tâche difficile, mais elle avait finalement réussi à l’enrouler autour de moi. Mon dos était nu et l’attrait que je dégageais en le portant me faisait me demander à quel point j’aurais excité Alkelios avec cela. Si j’avais pris une pose plus séduisante et que je lui avais peut-être fait un clin d’œil, il m’aurait prise dans ses bras et m’aurait emmenée dans notre chambre.

« À partir de maintenant, vous resterez ici les trois prochains jours. Si à un moment quelconque vous souhaitez abandonner, il vous suffit de verser votre énergie magique dans ce rocher enchanté. Il nous le fera savoir et nous viendrons vous chercher. » Dit-elle en me tendant la pierre.

Je l’avais regardé curieusement et je m’étais demandé si cela leur servait de balise.

« Merci, mais ça ne servira à rien. » Je lui avais dit et je voulais le rendre, mais elle m’avait arrêtée.

« Cela fait partie du rituel Nundaba, milady. » Dit-elle rapidement et leva ses paumes.

« Vraiment ? »

« Oui. Maintenant, une fois que je ferme la porte derrière moi, le rituel va commencer. Je vous souhaite bonne chance, Sire Seryanna. » La prêtresse fit un salut poli puis sortit de la pièce.

Avant de fermer la porte, elle avait tiré le pont en arrière, coupant l’accès de l’autre côté.

Je n’avais pas vu de sablier quand j’étais entrée, alors j’avais supposé qu’ils devaient en avoir un à l’extérieur. Ici, les températures auraient pu l’endommager.

Sans plus rien à faire, je m’étais assise sur le sol et j’avais commencé à chanter la prière étrange qui m’avait été donnée.

Comme l’avait dit le grand prêtre, la température avait augmenté pendant la première heure et avait continué d’augmenter pendant les quatre heures suivantes, jusqu’à ce qu’elle se stabilise. Il faisait tellement chaud maintenant que l’eau s’évaporait lorsqu’elle touchait sur le sol et elle commençait à bouillir si on la laissait dans un sceau. Pour moi, il faisait juste un peu chaud.

J’étais une dragonne supérieure de la Haute Flamme avec un niveau de pouvoir supérieur à 850. Je ne pouvais absolument pas me permettre de succomber à des températures juste au-dessus de l’ébullition de l’eau. C’était ridicule !

Trois heures plus tard, la température avait augmenté de nouveau et à la fin du deuxième jour, je commençais déjà à transpirer. J’étais assise au milieu d’un four.

Juste un peu plus… juste un jour de plus… pensai-je en me concentrant sur la prière.

La température n’était pas si insupportable, mais il y avait quelque chose dans cet endroit qui, combiné à la prière, me vidait de mon énergie. Cela m’avait affaiblie et m’avait donné l’impression que j’étais dans une sorte de transe. Peut-être que l’épuisement commençait à m’atteindre ?

C’est à ce moment-là que j’avais entendu la porte de cette salle de prière s’ouvrir.

***Point de vue de Mush’Nomv’Azer***

[Juste après que le groupe de la princesse Elleyzabelle ait quitté la salle d’audience]

Ces étrangers étaient vraiment impressionnants. Ils n’avaient pas bronché quand ils s’étaient tenus devant moi et n’avaient pas hésité quand ils avaient senti l’intention meurtrière oppressive de mes gardes. Peut-être que c’était si faible pour eux qu’ils ne l’avaient pas remarqué ?

La princesse était aussi quelque chose d’autre. La façon dont elle se portait et me regardait dans les yeux ressemblait à une reine qui régnait sur d’innombrables royaumes et sur de vastes mers. Je sentais en elle le genre de force que j’avais toujours rêvé de voir en un vrai dirigeant. Malheureusement, il me semblait que je n’avais pas une telle force.

« Votre Majesté, êtes-vous sûr pour ce rituel Nundaba ? » M’avait demandé un des nobles.

C’était un jeune chef de tribu de l’extrême sud.

« Sûr ? Pourquoi ne devrais-je pas l’être ? Ces étrangers, bien qu’ils soient venus peu de temps après notre époque de grande agitation, apportent un bon augure ! » Je hochai la tête et me frottai la barbe.

Si je pouvais ouvrir une nouvelle route commerciale avec le continent Dragon, je pourrais peut-être faire de même avec le continent relliar. Notre économie se développerait et les nains cesseraient d’être appelés des reclus. Si je réussissais alors à ramener les exclus, je pourrais enrichir les connaissances des nains avec des informations recueillies de l’extérieur.

Les anciens dirigeants craignaient le contact avec les autres espèces, mais j’étais pour ce contact. Comme ma femme le disait souvent. « Un État isolé n’a aucun espoir de croissance, car il refuse tout changement, que ce soit de l’intérieur ou de l’extérieur. »

Pendant que je réfléchissais à cela, j’avais remarqué que mon vieil ami, Andu'Yang'Ores, le forgeron le plus en vogue de notre pays, marmonnait quelque chose sous sa barbe.

« Ores, mon ami. Qu’est-ce qui te trouble ? » lui avais-je demandé.

« Votre Majesté, leurs armures et leurs armes, vous avez remarqué ? » m’avait-il demandé.

« Hm ? Elles étaient élégantes et bien faites, en effet. Probablement un vieil héritage ? » Je me demandais.

« J’en doute. Même dans un pays aussi isolé que Trindania, j’en aurais entendu parler, Votre Majesté. Les armes semblaient être constituées de plusieurs pièces mobiles, tout comme les armures, je ne sais pas du tout comment elles ont été reliées ou comment elles fonctionnent. En ce qui concerne les enchantements magiques, disons simplement que nous avons eu de la chance de ne pas avoir décidé de les tester. » Il secoua la tête.

« Chanceux ? Que voulez-vous dire ? » Je fronçai mon front.

Chaque fois qu’Andu'Yang'Ores était vraiment sérieux à propos de quelque chose, surtout lorsque c’était lié à la forge, son accent avait tendance à glisser.

« Votre Majesté, sans vouloir vous offenser, ils rendent nos armes et armures divines comme de simples jouets comparés à eux. Celui qui les a fabriqués a une compétence de forgeron terrifiante ! » Déclara-t-il.

« Est-ce vrai ? Hm… » dis-je en regardant vers la porte et en me frottant la barbe.

Cette nouvelle était troublante d’un côté et intéressante de l’autre. Si les dragons possédaient de telles merveilles de savoir-faire, il valait mieux que les nains s’allient à eux plutôt que de finir par se battre contre eux.

Le rituel de Nundaba comportait une partie de plus qui n’avait jamais été racontée à ceux qui y avaient participé. Fondamentalement, après le premier et le deuxième jour, l’empereur pouvait entrer dans la salle de prière et poser à ceux s’y trouvant quelques questions, mais pas quelque chose qui pourrait les sortir de leur transe. C’était interdit de le faire.

Bien que je ne sois pas autorisé à rester plus de deux minutes, au bout de ce temps, je devais déterminer s’il s’agissait d’amis ou d’ennemis. S’ils étaient ces derniers, après être sortis épuisés de cet endroit, nous pourrions facilement les achever.

La première à interroger était Sire Seryanna.

Le matin du troisième jour, j’avais enfilé une armure enchantée de sorts qui m’aiderait à survivre aux fortes températures qui règnent à l’intérieur.

« Votre Majesté, pour ce que ça vaut, je ne crois pas qu’ils soient mauvais à notre nation. » Dis le grand prêtre Klen'Ashin'Tark.

« S’ils ont également votre soutien, alors vous n’avez rien à craindre ! Kuhahaha! » Je ris et me dirigeai ensuite vers la porte en pierre robuste.

Un des prêtres avait jeté un sort et la porte s’était lentement ouverte.

J’étais entré et j’avais sauté par-dessus la rivière en fusion. Les températures ici étaient si élevées que ma barbe était en sueur. Les enchantements tenaient à peine.

Oi! Oi! N’est-ce pas un peu trop ? avais-je pensé en voyant la lave bouillante dans le fossé.

« Votre Majesté ? » Demanda la dragonne avec une voix faible.

« Oui. C’est moi. Une partie du rituel Nundaba est une petite conversation avec moi. Il fallait garder le secret, mais il n’y a pas de quoi s’inquiéter. » Dis-je avec un sourire alors que je m’approchais d’elle.

« Je vois… » répondit-elle.

Malgré les températures incroyablement élevées ici, elle était toujours là. La sueur sur son corps imbibait complètement la toge et la rendait très transparente. Ses écailles rouges étaient visibles à travers le tissu fin et rendaient difficile pour moi de ne pas la regarder. La façon dont elle me regardait avec ce regard fatigué ne faisait qu’ajouter à son charme. C’était comme si une séductrice essayait de me tenter, ou plutôt un serpent.

« Je serai rapide pour ne pas vous déranger. Je souhaite demander ce que vous pensez de l’empire nain. » Je lui ai dit.

« L’empire nain… Trindania… C’est loin étrange… mais magnifique. C’est faible et simple, mais… les gens ne semblent pas s’opposer à votre pouvoir. Ils vous ont accepté. Ils sont heureux… J’aime ça. » Répondit-elle avec une honnêteté absolue.

Je ne m’attendais pas à une telle réponse… pensai-je.

Normalement, un étranger aurait essayé de me flatter de quelque manière que ce soit pour élever sa propre valeur à mes yeux. Cette dragonne, cependant, ne semblait pas se soucier de ça, elle exprima son opinion honnête et directe.

J’avais déjà eu une bonne impression d’elle.

« Alors, pouvez-vous me dire s’il y a des héros humains sur votre continent ? » avais-je demandé depuis que ma femme m’avait dit que cet être divin leur disait que le Continent Dragon était très effrayant et dangereux pour eux.

« Oui… mon mari et un autre… Ils se sont battus, terrible bataille… Mon mari a gagné, mais j’ai tué l’autre héros humain. » Dit-elle alors qu’elle luttait pour respirer à cause de la chaleur.

***

Partie 4

« Vous l’avez tué… pourquoi ? » avais-je demandé.

« Il était mauvais… même selon les critères d’un héros humain. Il a essayé d’apporter le chaos à Albeyater. »

« Je vois… Alors, qu’est-ce que vous ressentez pour Alkelios ? » J’avais demandé par curiosité en voulant savoir comment de telles espèces différentes pourraient être réunies.

Cette question était plutôt une curiosité personnelle à cause de ma femme.

« Je l’aime. » Répondit-elle simplement.

« Le fait qu’il soit humain ne vous dérange pas ? » avais-je demandé. 

« Moi ? Au début si, mais ensuite c’est passé. Alkelios, de son côté, ça l’a gêné un moment. Les héros humains ont… des morales, des croyances… et un sens commun différent. » Elle avait expliqué.

« Différentes morales, de croyances et de bon sens. Intéressant. Où est-il maintenant ? »

« Je ne sais pas… l’autre héros humain… il a dit qu’il l’avait envoyé dans le temps et dans l’espace. Je l’attends. C’est mon mari, le dragon que j’aime… »

Il y avait quelque chose qui m’avait surpris quand elle avait dit ces mots. Sire Seryanna n’avait pas vu cet Alkelios comme humain ou dragon. Pour une fière et puissante dragonne comme elle, voir cet humain avec un tel respect m’avait impressionné.

« Merci, Sire Seryanna. Je vais vous laisser. » Dis-je en me dirigeant vers la porte.

« Pourquoi ai-je répondu si facilement ? » Elle avait demandé.

« Vous êtes fatiguée, et cet endroit… ce n’est pas un bon endroit pour mentir. » Répondis-je avec un sourire ironique.

En sortant de la pièce, j’avais été touché par l’air frais de l’extérieur.

« Votre Majesté, comment était-ce ? » J’avais été interrogé par le grand prêtre.

« C’était intéressant… J’ai eu ce que je voulais, alors je vais passer à Sire Kataryna. » J’avais hoché la tête.

L’autre dragonne se trouvait dans la salle de prière du temple du dieu de la Terre. Comme son nom l’indique, c’est une pièce où un croyant pouvait se connecter à l’élément de ce dieu.

Pour cet endroit, mon armure régulière était assez bonne. Une fois que je m’étais changé, j’étais entré.

Les grandes stalagmites et stalactites m’avaient accueilli avec une chorale de gouttes d’eau. Un écho sans fin avait rebondi sur les murs de pierre. La pression de l’air ici était étrange, mais la température était à des valeurs normales.

Là-bas, au centre de la pièce, j’avais vu la dragonne aux écailles d’argent lire la prière au dieu de la Terre. Il ne semblait pas que deux jours se soient écoulés pour elle. La toge qu’elle portait sublimait sa beauté naturelle, mais elle restait propre et non perturbée.

« Sire Kataryna ? » J’avais demandé.

Ma voix résonna avec un fort bruit qui me força à me couvrir les oreilles.

Chauves-souris sanglantes sur un sandwich turquoise ! J’avais maudit en serrant la mâchoire, en attendant que le son disparaisse.

« Chut. Ici, le son est si fort que vous pouvez entendre votre battement de cœur. » Me dit la dragonne, pourtant sa voix résonnait à peine.

« Je… je vais essayer. » Même quand on chuchotait, ça restait très bruyant.

« Pourquoi êtes-vous ici ? » Demanda-t-elle alors qu’elle fermait le livre et me regardait dans les yeux avec un regard froid qui glaçait mon âme.

J’avais dégluti « Cela fait partie du rituel de Nundaba. Je dois vous rendre visite à toutes en tant que dirigeant de Trindania. »J’ai dit.

« Je vois. Très bien. » Elle acquiesça.

« Alors… une question. Que pensez-vous de notre continent jusqu’à présent ? »

« De cet endroit ? Hm… faible, ennuyeux, légèrement dangereux ? Ce n’est pas si mal. Peut-être, peut-être pas ? »Dit-elle puis haussa les épaules.

Tout comme les autres dragonnes, celle-ci était aussi complètement honnête avec moi.

« Alors… que pensez-vous d’Alkelios ? » Je rétrécis les yeux.

« Le mari de Seryanna ? Je l’aime. » Répondit-elle sans détour.

« Quoi ? » Je clignai des yeux surpris.

C’était une autre réponse à laquelle je ne m’attendais pas et j’avais presque élevé la voix à cause de cela.

« Euh… vous l’aimez ? Comme dans un ami ? »

« En amoureux. Je veux porter son œuf. »

« Euh… » La brutale honnêteté de cette dragonne m’avait fait perdre mes mots.

« Cet amour, cependant, je ne peux pas le partager… Il appartient à Seryanna. Moi… je ne fais que passer. » Elle m’avait fait un sourire ironique.

Le son de sa voix était empli d’une étrange tristesse. Cela m’avait fait ressentir de la pitié.

Est-elle inquiète de ne pas recevoir cet amour en retour ? Je m’étais demandé cela et ensuite je m’étais souvenu de quelque chose que ma femme m’avait demandé quand je ne savais pas si je devais ou non lui demander de m’épouser.

« Sire Kataryna, vous dites que vous aimez cet homme, n’est-ce pas ? »

« Oui. » Elle acquiesça.

« Alors, de quoi avez-vous peur en choisissant de partager cet amour avec lui ? »

« Peur de perdre ? Je… » Elle s’arrêta et baissa les yeux, elle fronça les sourcils.

« Pensez-vous que Sire Seryanna va vous repousser ? Pensez-vous qu’il ne vous aimera pas en retour ? » avais-je demandé.

« Je… » elle me regarda comme si elle était en transe.

Peut-être que jusqu’à présent, elle n’y avait jamais pensé. Si elle n’avait pas participé à ce rituel Nandaba, elle n’y aurait probablement jamais pensé non plus. Je me suis dit en frottant ma barbe.

« Peut-être que c’est leur complicité ? » J’avais demandé.

Elle secoua la tête.

« Non… j’ai peur de perdre mon amour comme mon amour passé. » Elle répondit.

Oh… c’est encore… inattendu, avais-je pensé.

« Votre ancien amoureux aurait-il voulu vous voir seule pour le reste de votre vie tout en le gardant dans votre cœur ? Je ne dis pas qu’il faut l’oublier, mais aucun homme ne souhaiterait que son amante reste seule après son décès. Du moins, aucun homme qui mérite d’être appelé un homme. Je n’ai pas peur de permettre à ma femme de trouver le bonheur après mon départ. Bien sûr, je souhaite être en deuil, mais je préfère son sourire plutôt que ses larmes. » Dis-je avec un sourire.

Sire Kataryna avait repris chaque mot que j’avais dit, mais je ne pouvais pas dire si cela faisait une différence ou pas. Jusqu’ici, j’avais compris que ces dragonnes n’étaient pas de mauvaises personnes. Elles avaient définitivement gardé leurs mots et s’étaient concentrées sur le rituel sans essayer de tricher ou quoi que ce soit. Leur état d’esprit en était la preuve.

« Pensez à ce que j’ai dit. Peut-être que ça vous aidera. Malheureusement, je ne peux pas rester plus longtemps. » Dis-je puis me dirigeai vers la porte.

Le fait qu’elles aient un tel respect pour un héros humain avait également montré que nous, en tant que nains, risquions de ne pas être opprimés par eux s’ils en avaient l’occasion. Nous ressemblions beaucoup aux humains et il y avait beaucoup de héros humains parmi nous maintenant. Je ne voudrais pas signer un accord par lequel j’aurais gagné la faveur des dragons, mais en abandonnant celle de mon propre peuple.

Après être sorti de la salle, un prêtre avait fermé la porte derrière moi et le Haut prêtre s’était approché de moi.

« Comment était-elle, Votre Majesté ? » Il avait demandé.

Je lui avais montré un sourire, puis j’avais répondu : « Elles ont suivi le rituel comme promis. Elles ne regardent pas de haut notre empire. Elles ont les mêmes inquiétudes que nous, les nains, et pour ce que cela vaut peut-être, je ne peux pas les voir comme des ennemis. »

« C’est une bonne nouvelle, Votre Majesté ! » Il acquiesça puis me fit un sourire.

« Quand je suis venu ici, j’ai vu Son Altesse assise sur la Plate-forme de l’âme et chantant la prière fidèlement. A-t-elle arrêté ? » avais-je demandé.

« Non. » Il secoua la tête.

« D’accord, alors je ne la dérangerai pas. Je vais retourner au palais maintenant. » J’ai hoché la tête.

« Est-ce correct de ne pas l’interroger également ? » Il m’avait demandé.

« Oui. Le rituel Nundaba teste son endurance et sa fierté en tant que noble. Un individu égoïste n’aurait pas accepté de continuer jusqu’au bout, et quelqu’un comme ça n’aurait aucune place à ma table de négociation. Même si les sujets sont bons, si le chef ne vaut rien, tout le groupe va échouer. » Dis-je avec un signe de tête.

« C’est comme vous le dites, Votre Majesté. » Le grand prêtre s’inclina devant moi.

Après avoir parlé avec ces deux-là, j’avais fini par être encore plus curieux à propos de cet homme, Alkelios. Peut-être que dans le futur, je rencontrerais ce héros humain qui avait capturé les cœurs de deux puissantes dragonnes.

La partie la plus difficile du rituel de Nundaba était maintenant terminée et même si elles ne tenaient pas toute la troisième journée, elles pouvaient toujours être considérées comme ayant réussi. Néanmoins, il serait sage que je ne dise pas aux autres chefs de tribus les questions que je leur avais posées. Ils les auraient vus comme inutiles. Mais peu importait ce qu’ils voulaient découvrir, ce qui importait était ce que je voulais trouver à leur propos, et c’était le fait qu’ils n’étaient pas des monstres comme beaucoup le pensaient.

***

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Un commentaire :

  1. Merci pour le chapitre.

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