Le Dilemme d’un Archidémon – Tome 4

Table des matières

***

Prologue

« Maishtre Zagan, s’il te plaît, regarde, beaucoup de glands sont tombés par ici ! »

La jeune fille qui était arrivée en courant avec un bruit de pas tenait des glands de différentes tailles serrés dans ses deux poings. Et en réponse, Zagan la regarda avec une expression confuse. Il n’arrivait pas à décider s’il devait la louer ou être anxieux. Cependant, Zagan n’était pas un homme avec un bon visage selon n’importe quel standard. En fait, il avait une expression si sinistre et neutre que même les adultes tremblaient de peur, mais cette jeune fille lui avait tout simplement souri en réponse.  

Après avoir réfléchi un peu, Zagan hocha la tête avec un « Hmm » et prit l’un des glands des mains de la jeune fille.

« Ce grand est un gland de chêne en dents de scie. C’est extrêmement amer, donc il vaut mieux ne pas le mettre dans la bouche à moins d’avoir faim, » déclara Zagan.

« Tu peux manger des glands ? » La jeune fille le regarda d’un air vide et pencha la tête sur le côté pendant qu’elle l’interrogeait.

« Ouais. Mais je doute qu’il y ait quelqu’un qui apprécierait le goût. De plus, si tu ne fais pas attention en les cuisinant, même les meilleurs te feront vivre quelque chose de terrible, » répondit Zagan.

En vérité, à l’époque où il était enfant de la rue, Zagan était allé dans la forêt et avait essayé de cuisiner les glands qu’il avait réussi à ramasser. Et, au moment où il pensait que son estomac était plein, il avait été agressé par une terrible douleur à l’estomac qui lui avait donné l’envie de mourir.

Lorsqu’il se souvient de son passé, il avait enduré le désir de soupirer sur de tels souvenirs amers pendant tout ce temps, les yeux de la jeune fille brillaient encore plus.

« Maishtre Zagan, c’est incroyable ! Tu sais tout, n’est-ce pas ? »

« Je ne sais pas tout, je sais juste ce que je sais, » répondit-il.

Son souvenir de s’être perdu dans une forêt et d’avoir mâché des glands n’était pas du tout heureux. Et pourtant, en l’entendant, la jeune fille regarda fixement les glands.

« ... Je me demande quel goût ça a. »

« Je peux te dire tout de suite qu’ils ont un goût horrible..., » Zagan avait poussé un soupir et en avait ramassé un quand il avait dit ça. Il pouvait dire que la fille était susceptible de mâcher un gland s’il n’intervenait pas. Alors, même s’il semblait refuser carrément, Zagan s’était dirigé vers la cuisine, avait mis un tablier et avait sorti une poêle à frire. Avant que Néphy n’arrive dans son château, Zagan ne mangeait que de la viande sèche et du lait, mais ce n’était pas parce qu’il ne savait pas cuisiner. Au contraire, avoir une sorte de talent culinaire était une question de vie ou de mort quand il fallait vivre des petits restes de nourriture qu’on pouvait trouver.

« Maishtre Zagan, je t’aime tellement ! » s’exclama la jeune fille en enlaçant Zagan.

« Hmmm..., » Zagan avait fait énormément d’effort juste pour faire un signe de tête déconcerté. Tandis qu’il se tenait là, maladroitement, une jeune fille aux cornes de dragon se mit à trembler à ses côtés. C’était la fille adoptive de Zagan, Foll.

« Laisse-moi t’aider, Zagan, » déclara Foll.

« Je suis désolé pour ça. Je te laisse faire..., » Zagan était sincèrement reconnaissant qu’il y avait quelqu’un pour faire un test de goût. Après tout, savoir cuisiner et préparer un délicieux repas étaient deux choses complètement différentes.

« Sais-tu aussi cuisiner ? » demanda la jeune fille, clairement impressionnée en regardant Foll se mettre au travail dans la cuisine.

« Un peu..., » Néphy était chargée de préparer tous les repas, mais Foll l’aidait depuis son arrivée. Récemment, elle s’était même occupée de plusieurs aliments au menu.

« Grande Schoeurrr, tu es aussi incroyable ! » La jeune fille sauta sur place et fit entendre sa voix, manifestement impressionnée par la révélation.

« Grande Soeur... ! » Foll avait titubé quand on l’avait appelée « Grande Soeur ». Et, dans un virage inhabituel, ses joues rougirent en fixant la jeune fille dans l’émerveillement. C’était tout à fait logique. Après tout, Foll était fascinée par ceux qui l’entouraient, mais elle n’avait jamais fait la même chose pour personne d’autre. Bien sûr, c’était un dragon qui était en vie depuis beaucoup plus longtemps que la plupart des humains, mais elle ressemblait à une petite fille et se comportait comme telle.

« Si mignonne..., » déclara Foll en serrant la jeune fille dans ses bras.

« Hein ? » Les yeux de la jeune fille se plissèrent pendant un moment, mais elle sourit aussitôt d’un « eheheheh » quand elle fit aussi une étreinte envers Foll.

« Grande Schoeurrr, tu es si chaude. »

« Zagan, j’ai l’impression que... c’est bien de laisser des choses comme ça, » déclara Foll en frottant sa joue contre la fille et en poussant un soupir satisfait.

« Mmm... Je suis d’accord, » répondit Zagan.

« Non, ce n’est pas bon ! Tous les deux, reprenez vos esprits tout de suite ! »

Une voix étonnée avait retenti dans la salle, tandis que les deux personnes avaient les yeux partiellement fermés, satisfaits. Ce n’était nul autre que Chastille, entièrement équipée de son Armure Sacrée pour la première fois depuis longtemps.

« Néphy est devenue une enfant ! Il n’y a aucune chance que ce soit bien de laisser des choses comme ça ! » cria Chastille, apparemment au bord des larmes alors que ses cheveux roux se balançaient dans le vent.

La jeune fille qui enlaçait Foll avec un sourire innocent n’avait manifestement pas plus de cinq ans. Cependant, elle avait des oreilles pointues, des cheveux blancs comme neige et des yeux azur. Il était clair comme de l’eau de roche qu’elle était une haute elfe. Et, plus curieusement, elle avait un collier surdimensionné autour du cou.

Oui, l’enfant était bien évidemment la même femme que Zagan ne pouvait s’empêcher d’aimer... Néphy.

Néphy s’était transformée en enfant, l’Archidémon portait un tablier pendant qu’il cuisinait des glands, et Chastille était avec lui. Tout et n’importe quoi au sujet de la situation étaient absolument impossibles.

Le groupe de Zagan se trouvait actuellement dans un village elfique détruit. Plus précisément, c’était la ville natale de Néphy à Norden.

Quant à la cause de l’étrange situation dans laquelle ils s’étaient retrouvés... Eh bien, il y a deux jours — .

***

Chapitre 1 : Notre famille s’est agrandie, alors il est temps de visiter la demeure de ma femme !

Partie 1

« Néphy... n’est pas là ? » Zagan se promenait dans son propre château, à la recherche de l’amour de sa vie. Bien qu’il s’agisse d’un château avec des dispositifs de torture et des squelettes éparpillés un peu partout, grâce au travail acharné de Néphy, il était devenu si beau qu’il était méconnaissable. Depuis que les plafonds fissurés et autres avaient été réparés, c’était aujourd’hui un environnement qui pouvait accueillir plusieurs dizaines de personnes. De plus, de nombreux sorciers parcouraient souvent le château.

Environ un mois s’était écoulé depuis le bal du soir de l’Archidémon Bifrons. Au cours de cet incident, des dizaines de sorciers présents avaient perdu la vie. C’était Zagan qui avait réussi à maîtriser la situation, et c’était pour cela que pas moins de trente sorciers avaient fini par lui prêter serment d’allégeance.

Grâce à cet incident, il avait appris que la fille qu’il aimait, Néphy, était d’une race appelée « les hauts elfes ». Tous les membres de cette race comprenaient le Célestian et pouvaient faire du mysticisme céleste jusqu’à un certain point. Cependant, il ne savait pas grand-chose d’autre. Aller au fond du mystère prendrait beaucoup plus de main-d’œuvre que Zagan n’en avait.

Alors qu’il jetait un coup d’œil dans une pièce, Zagan avait aperçu une vieille femme aux cornes de chèvre remuant une sorte de liquide sirupeux dans un pot en fer.

« Keeheehee, keeheeheeheeheeheeheehee, attend, Valefor. Il n’y en a pas qui consomme mon fondant au chocolat et qui continue à me résister. Keeheeheeheeheeheeheehee. »

Est-ce qu’elle fait des friandises pour Foll... ? Cette vieille femme suspecte était Gremory. Elle possédait le surnom de l’Enchanteresse et était assez puissante pour être considérée comme une candidate pour être un Archidémon. En raison de cela, elle avait été classée première ou deuxième parmi les subordonnés de Zagan... Cependant, elle ressemblait plus à une grand-mère absorbée par la fabrication de friandises pour sa petite-fille à l’heure actuelle.

Le Célestian, le mysticisme céleste, les Épées Sacrées, les Emblèmes de l’Archidémon, et les treize Archidémons. Il y avait beaucoup trop d’obstacles que Zagan devait surmonter.

Les nouveaux sorciers sous son règne soutenaient les recherches de Zagan et allaient et venaient entre le palais de l’Archidémon Marchosias et le château de Zagan pour chercher les informations qu’il désirait.

Les sorciers comprenaient à peine l’idée de coopération, mais la raison pour laquelle ils ne se disputaient jamais sous Zagan était en grande partie à cause d’un individu particulier.

« Mettez-vous au travail, les gars ! Trouvez les livres que mon seigneur cherche ! »

Un majordome ayant le visage terrifiant d’un monstre mangeur d’hommes fit entendre sa voix dans le hall d’entrée. Le bras gauche de l’homme âgé était artificiel et fait d’une armure, et il avait une épée placée très loin de sa taille. Il était l’ennemi naturel des sorciers, un manieur d’Épée Sacrée... l’ex-Archange Raphaël. Puisqu’il servait la maison de Zagan en tant que majordome, il encourageait les sorciers à travailler.

« Le déjeuner d’aujourd’hui est une soupe de porc et d’os avec de l’agneau. Si vous voulez vous installer et le manger, faites votre devoir jusqu’au bout ! » Raphaël s’exclama, alors que sa main saisissait une louche dans la cuisine à la place de son Épée Sacrée. Il semblait qu’il avait terminé ses préparatifs pour le déjeuner et qu’il essayait d’utiliser ce fait pour motiver les sorciers.

 

 

« OOOH! » En réponse, les sorciers haussèrent la voix sans même un soupçon d’agitation.

Son apparence et ses actions passées étaient insupportables, mais la cuisine de Raphaël était superbe. C’était plus que suffisant pour conquérir le cœur des gens qui le mangeaient depuis plus d’un mois. De plus, puisqu’il avait passé une grande partie de sa vie comme Archange, il possédait assez de prouesses au combat pour exterminer tous les sorciers réunis ici dans une bataille frontale. Ainsi, Zagan essaya de voir ce qui se passerait s’il laissait les sorciers agir avec ce vieux majordome, et heureusement, tout s’était très bien passé. Mais il y avait peut-être une autre raison pour laquelle les choses avaient si bien fonctionné...

De façon inattendue, même les sorciers ne mordent pas la main qui les nourrit... Zagan s’était arrangé pour que chacun d’eux reçoive ce qu’ils désiraient en échange de leur aide. Il les payait en or, grimoires, catalyseurs utilisés pour la sorcellerie, etc. Tant qu’ils ne le trahissaient pas, il continuait à les payer à intervalles fixes. Grâce à cela, même si trente sorciers renommés étaient réunis en un seul lieu, pas une seule querelle n’avait éclaté.

« Eh bien, si ce n’est pas mon seigneur. As-tu besoin de quelque chose de ma part ? » Raphaël fit un mouvement de balayage en se penchant, prenant note de l’entrée de Zagan.

« Non, je cherche Néphy. Est-elle dans la cuisine ? » demanda Zagan.

« Si tu cherches Lady Néphy, je crois qu’elle est allée aux archives après son retour de shopping, » répondit Raphaël.

« Non, je suis juste venu de là-bas et je ne suis pas tombé sur elle. Est-ce qu’on s’est manqué ? » Zagan pencha la tête sur le côté dans la confusion de la situation.

« C’est presque l’heure du déjeuner, alors je doute qu’elle ait quitté le château, » répondit Raphaël.

« Compris. Je vais essayer de chercher un peu plus, » déclara Zagan, laissant Raphaël derrière lui alors qu’il poursuivait sa quête pour retrouver Néphy.

Comme il était presque midi, il rencontra des sorciers qui parcouraient sporadiquement les couloirs. Cela dit, les sorciers étaient des solitaires naturels, de sorte que même lorsqu’il les croisait dans le couloir, leurs échanges n’équivalaient qu’à un léger signe de tête, ce qui laissait l’intérieur de son château aussi calme qu’avant.

« Ah, Monsieur Zagan, bonnnnnn matttttiinnnnnnnnn ! »

Celle qui avait fait entendre une voix si bruyante et qui avait provoqué des maux de tête n’était pas une sorcière.

« ... Attends. Qu’est-ce que tu fous là ? » demanda Zagan en saisissant fermement la tête de la fille qui passait à côté de lui. C’était la sirène qu’il avait sauvée pendant le bal de Bifrons. Contrairement aux autres, c’était une chanteuse d’une troupe musicale, et non pas une sorcière.

« Et bien, c’est que... tous les membres du groupe et leurs instruments n’ont-ils pas été complètement englouti lors ce combat sur le bateau ? Bref, je me détendais dans un bar, et la Grande Soeur Manuela m’a dit d’aller dans votre château ! » déclara la sirène.

Cette satanée femme... Est-ce qu’elle prend ma demeure pour une garderie ou quelque chose comme ça ? Zagan fut soudain frappé d’un mal de tête à cause de cette pensée. Même pour plaisanter, il n’était pas question de l’envoyer chercher du travail dans un château d’Archidémon... Peut-être que Manuela avait confiance en Zagan, mais si c’était l’un des autres Archidémons, alors la sirène aurait déjà été transformée en sacrifice ou en rat de laboratoire.

« Je n’ai jamais rien entendu à ce sujet... Honnêtement, je suis surpris que tu sois entrée ici..., » Zagan avait mis en place plusieurs barrières autour de son château. Un sorcier ou un Chevalier Angélique moyen n’aurait même pas remarqué l’endroit, et s’il l’avait vu, il aurait été agressé par une douleur qui l’aurait arrêté juste avant de le tuer. Le fait était qu’une personne ordinaire qui n’était même pas un sorcier survivant n’aurait jamais pu venir ici.

« Tout ce que j’ai fait, c’est suivre Mlle Néphy pendant qu’on discutait..., » déclara la sirène.

« Vraiment... Je suis surpris que tu y sois arrivée, » déclara Zagan.

« Hein ? » s’exclama la sirène.

Ce n’était pas seulement le chemin jusqu’à son château qui était piégé, mais même l’intérieur. Si cette fille avait déclenché l’un des pièges, elle serait morte sur le coup, mais d’une façon ou d’une autre elle ne l’avait pas fait.

« Vous plaisantez, n’est-ce pas ? » La sirène interrogée, avec le visage pâle, après avoir appris la vérité.

« Laisse-moi plutôt te poser une question. Tu crois vraiment qu’un château des Archidémons n’aurait pas de pièges ? » demanda Zagan.

« C’est, vous savez... Puisque c’est quelqu’un comme vous, Monsieur Zagan qui est allé sauver une humble roturière comme moi, alors j’ai pensé que ce serait un endroit sûr ou quelque chose du genre..., » déclara la sirène.

« Ce n’est pas un endroit sûr, espèce d’idiote imprudente. Si un tel Archidémon existait vraiment, ils seraient déjà morts, » répliqua Zagan.

La base d’un sorcier était un trésor de connaissances. Et pour les sorciers, la connaissance égalait le pouvoir, donc laisser leur base exposée était la même chose que de demander qu’on leur vole leur pouvoir. C’est pourquoi un cambrioleur, de toutes les choses, était la plus grande peur d’un sorcier. Naturellement, pour se protéger des voleurs en puissance, les sorciers mettaient en place d’innombrables pièges terrifiants.

Même Zagan, qui était assez indifférent à cet égard, avait mis en place des pièges mortels qui se déclenchaient lorsque des étrangers étaient présents. Plus précisément, ses pièges étaient si meurtriers que Barbatos, un candidat pour être un Archidémon, aurait eu de la difficulté à survivre. Bien que la protection de ses connaissances importait peu à Zagan. Non, ce qu’il voulait vraiment protéger, c’était sa famille... Néphy, Foll et Raphaël.

« C-Ce n’est pas possible ! Ne sommes-nous pas en très bons termes, Monsieur Zagan ? S’il vous plaît, sauvez-moi ! » La sirène gémie alors qu’elle s’accrochait à Zagan, son visage pâle.

« Comme si ça m’intéressait. Je ne connais même pas ton nom, » déclara Zagan.

« C’est Selphy ! S’il vous plaît, souvenez-vous au moins de mon nom de famille ! » déclara Selphy.

Oublie ça, il ne l’avait jamais entendu.

« Pour l’instant, prends ceci, » déclara Zagan en remettant un bijou de la taille d’une perle à Selphy la sirène, et en poussant un soupir.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Selphy.

Honnêtement, Selphy était si ennuyeuse qu’il ne voulait pas vraiment s’impliquer avec elle, mais si elle était la connaissance de Manuela, il ne pouvait pas simplement la laisser mourir. Cette femme était l’amie de Néphy. De plus, ils comptaient souvent sur elle pour trouver des vêtements convenables pour Zagan, Néphy et Foll. Bien sûr, les vêtements bizarres qu’elle leur imposait chaque fois qu’ils baissaient leur garde étaient un problème, mais c’était aussi vrai qu’elle était l’une des rares personnes qui pouvaient parler normalement à Zagan.

Finalement, Selphy hocha vigoureusement la tête de haut en bas. Et tandis qu’il regardait la sirène avec un regard exaspéré présent sur son visage, Zagan inclina soudain sa tête sur le côté.

« Maintenant que j’y pense, qu’est-ce que tu as aux pieds ? Sont-ils artificiels ? » demanda Zagan.

Le bas du corps d’une sirène ressemblait à la queue d’un serpent. Cependant, Selphy avait deux pattes qui poussaient comme un humain ordinaire.

« Ah, ça ? Ce château est terriblement sec, donc ça finit comme ça, » déclara Selphy.

« ... Tu te fais donc pousser des jambes quand c’est trop sec ? » demanda Zagan.

« Bien sûr que si, et alors ? » demanda Selphy.

La tête de Zagan commença à souffrir à nouveau lorsqu’il entendit sa réponse inconsciente.

« Attends, depuis que Manuela t’a dit de venir ici... comptes-tu travailler pour moi ? » demanda Zagan.

« Ouaip ! J’ai entendu dire que vous étiez du genre à être à court de mains, » déclara Selphy.

« C’est vrai que je suis à court de mains, mais... as-tu des connaissances en sorcellerie ? » demanda Zagan.

« Non ! Je veux dire, je n’ai rien d’autre que des chansons dans ma tête ! » Selphy se vantait... C’était logique comme elle était chanteuse, mais ça ne semblait pas du tout utile à Zagan.

Pourtant, n’ayant pas le choix, Zagan indiqua la direction d’où il venait.

« Il y a un majordome nommé Raphaël dans le hall d’entrée. Va voir s’il a un travail pour toi. S’il ne le fait pas, abandonne et rentre chez toi, » déclara Zagan.

Garder cette fille dans les parages semblait plus d’ennuis que cela n’en valait la peine, mais il se sentait mal à l’aise de refuser l’une des victimes de Bifrons. Et donc, il avait décidé de lui donner au moins une seule chance.

« Super ! Merci, Monsieur l’Archidémon ! » Selphy sauta de joie face à son approbation, et tandis qu’il la regardait, Zagan se rappela soudain quelque chose d’important.

« Attends, tu as dit que tu marchais avec Néphy, non ? Sais-tu où elle est allée ? » demanda Zagan.

« Oh, on aurait dit qu’elle se dirigeait vers le jardin, » répondit Selphy.

« Je vois. Je te remercie, » déclara Zagan. Puis, il tourna le dos à Selphy et commença à marcher vers le jardin.

« Wôw... Monsieur l’Archidémon vient de me remercier... »

Il n’avait jamais remarqué que Selphy avait fait entendre une voix désorientée.

***

Partie 2

Quand il arriva au jardin, Zagan trouva une seule bête recroquevillée, se prélassant au soleil. Il bâillait comme s’il trouvait ça confortable, mais pour un chat, c’était un peu... non, c’était étrangement grand. C’était, en fait, un lion de grande taille et avec une fourrure noire.

Quand je le regarde comme ça... il a vraiment l’air d’un chat, hein... ? Zagan, plus que tout autre, ressentait le besoin de caresser sa fourrure de temps en temps, mais il y résistait. Après tout, il ne regardait pas un lion. Non, il faisait face à un candidat Archidémon, un sorcier qui portait le surnom de la Lame Noire, Kimaris.

« Kimry, Kimry..., » une jeune fille s’écria en titubant vers lui. Elle avait l’air d’avoir dix ans. Ses cheveux verts étaient noués par des tresses le long de son dos, elle avait de grands yeux d’ambre, et elle portait la robe indigène d’un pays étranger qui utilisait le blanc et le rouge écarlate comme couleurs principales. Cependant, le plus étrange de tous était les cornes de dragon qui sortaient de ses cheveux.

Oui, c’était la fille adoptive de Zagan, Foll. Sa véritable identité était Apparition Valefor, une ancienne candidate Archidémon.

« Haaah... Excuse-moi, qu’y a-t-il, ma petite dame ? » demanda Kimaris en tournant les yeux vers Foll.

« Les fleurs du parterre fleurissent. Viens voir, » déclara Foll.

« Je vois. Très bien, allons-y, » répondit Kimaris en douceur en utilisant sa voie humaine. Puis, le lion noir commença à marcher vivement sur ses quatre pattes, et Foll monta sur lui comme si c’était parfaitement naturel.

Zagan hésita, se demandant s’il devait les interrompre, mais il cherchait Néphy, alors il les suivit tranquillement. Peu de temps après, le lion s’arrêta près d’une masse de belles fleurs roses.

« Elles ont bien fleuri, n’est-ce pas, ma petite dame ? » demanda Kimaris.

« C’est parce que je leur donnais du sang de serpent tous les jours, » déclara Foll.

« Comme c’est admirable ! Alors, allons-nous les récolter ? » demanda Kimaris.

« Hmm... Ouais, » Foll acquiesça d’un signe de tête quand elle accepta la demande de Kimaris. En réponse, le lion noir se mit à grogner d’une voix grave. De l’extérieur, on aurait dit qu’une fille innocente était menacée par une bête féroce, mais Foll n’avait même pas montré un soupçon de peur. Au lieu de cela, elle avait saisi de toutes ses forces la tige de la fleur qui venait de fleurir. Et puis, au moment où Zagan se demandait ce qu’elle faisait, elle l’avait arraché vigoureusement.

« AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH! »

Immédiatement après, un cri qui lui avait donné envie de se couvrir les oreilles avait retenti. En y regardant de plus près, Zagan remarqua que la racine de la fleur arrachée par Foll avait une forme humaine et que le cri était sorti de sa bouche.

« Regarde Kimry, c’est énorme ! » affirma Foll en poussant un cri de satisfaction.

« Tu l’as bien fait pousser. Pendant un moment, j’ai paniqué et j’ai cru que je ne pourrais pas le neutraliser à temps, » déclara Kimaris.

La racine en forme humaine était assez grande pour emplir les deux mains de Foll. En fait, c’était à peu près la taille d’un bébé humain. Cette plante s’appelait une mandragore. C’était quelque chose qui était souvent utilisé comme ingrédient dans les potions, et dès qu’il avait été retiré de la terre, il criait une malédiction. Toute personne ordinaire qui entendait ce cri mourait, et c’était même assez atroce pour rendre la plupart des sorciers fous.

Kimaris semblait se spécialiser dans la sorcellerie liée au son, il semblait donc chargé de bloquer le cri de la mandragore.

« Tu t’inquiètes trop, Kimry. Le cri d’une mandragore ne peut pas traverser le mana d’un dragon ! » proclama Foll en secouant la tête en signe de dérision.

Foll était peut-être jeune, mais c’était un dragon. Les dragons possédaient une résistance naturelle à toutes les malédictions et à la sorcellerie, ce qui leur permettait de repousser facilement le cri d’une mandragore.

« Ce n’est pas comme si tous les sorciers d’ici avaient le même pouvoir que toi ou moi, ma petite dame. Il y a aussi les subordonnés de Sire Zagan, nous devons donc assurer leur sécurité, » déclara Kimaris.

« Hmm... C’est bien pour ça que je t’ai amené, Kimry, » déclara Foll.

« C’était très admirable de ta part, ma petite dame, » déclara Kimaris.

Après ça, ils s’étaient tous les deux tournés vers Zagan.

« Avez-vous besoin de quelque chose, Sire Zagan ? » demanda Kimaris.

« Oui, je cherche juste Néphy..., » déclara Zagan.

« Je l’ai vue se diriger vers la salle du trône. On aurait dit qu’elle vous cherchait, Sire Zagan, » répondit Kimaris.

« Vraiment... ? Merci pour le tuyau. Alors, je vais aller jeter un coup d’œil là-bas, » déclara Zagan.

Il semblait qu’elle le cherchait aussi, et qu’ils se manquaient encore une fois. Après avoir remercié Kimaris, Zagan s’était tourné vers sa fille. L’adorable jeune fille berçait la grande mandragore comme si elle était précieuse.

« Foll, à quoi cela va-t-il te servir ? » demanda Zagan.

« Une collation, » répondit Foll sans hésitation, ce qui laissa Zagan soudain à court de mots.

« ... Je vois. Est-ce que c’est bon ? » demanda Zagan.

« Hmm... C’est plein de mana sucré et ça a vraiment bon goût ! » déclara Foll.

Maintenant qu’elle en parlait, Zagan se souvient qu’il y avait eu apparemment un incident où un champ de mandragore qu’un sorcier faisait pousser avait été dévoré par un dragon. Ce n’était pas très connu, mais c’était peut-être le plat préféré des dragons.

« Eh bien, c’est bien... se pourrait-il... que tes repas habituels ne te suffisent pas ? » demanda Zagan.

Foll semblait n’être qu’une petite fille, mais sa forme originale était plus qu’assez grande pour convenir à un cavalier humain lorsqu’elle s’élançait dans le ciel. Malgré cela, elle avait encore une petite taille pour un dragon, alors il avait supposé qu’ils l’avaient assez nourrie. Cependant, ses normes humaines en matière de repas l’avaient peut-être induit en erreur.

« Hmm euh. La nourriture de Néphy’s est délicieuse, et j’en mange plus qu’assez. C’est juste que je suis faible, donc je dois renforcer mon mana, » répondit Foll.

Elle se disait faible, mais Foll était assez forte pour battre n’importe quel sorcier ordinaire. Ça voulait probablement dire qu’elle voulait devenir un dragon.

« Zagan, tu en veux aussi ? » demanda Foll en plaçant sa grosse mandragore vers lui.

« ... Peut-être plus tard, » répondit Zagan. Après lui avoir tapoté la tête une dernière fois, il se retourna et se dirigea vers la salle du trône.

***

Partie 3

De retour à la salle du trône, Zagan y trouva Raphaël et Selphy... et il n’avait aucune idée de ce dont elle était coupable, mais Selphy était pâle et tremblait alors que Raphaël saisissait la peau de son cou.

« Mon seigneur, nous avons une intruse. Dois-je m’en débarrasser, ou préfères-tu que je la livre à tes satanés subordonnés ? » demanda Raphaël.

Raphaël était un homme qui avait abattu près de cinq cents sorciers en état de légitime défense, alors il avait créé des malentendus et des préjugés en marchant. Selphy, par contre, était le genre de personne qui n’écoutait manifestement pas ce que les autres disaient. Logiquement, il n’y avait aucun moyen qu’ils puissent faire une conversation convenable.

J’aurais dû prédire que ça finirait comme ça... Normalement, il l’aurait remarqué, mais il n’avait pas vraiment prêté attention aux autres depuis qu’il était à la recherche de Néphy.

« Ah... Il semble que Néphy l’ait ramenée. As-tu un boulot à lui donner ? » demanda Zagan.

« Hmm, donc tu prévois de la mettre au travail ici ? » demanda Raphaël.

« N’est-ce pas possible ? » demanda Zagan.

« Ce n’est pas impossible, mais je ne peux pas garantir sa survie, » déclara Raphaël.

« Eeeeeeeek, » Selphy hurla et trembla, mais Zagan hocha la tête comme si cela n’avait pas vraiment d’importance.

« Si nous informons mes subordonnés que Selphy n’est ni du gibier ni un jouet, personne ne la touchera, » déclara Zagan.

« Alors il n’y a pas de problème. Je graverais ce que cela signifie de travailler pour l’Archidémon Zagan au plus profond de son âme, » déclara Raphaël.

« En fait, je vais rentrer chez moi ! Cela me convient vraiment d’être au chômage ! » déclara Selphy.

« Espèce d’idiote. Tu es déjà au service de mon seigneur. Mets ta vie en jeu et travaille, » déclara Raphaël.

« NOOOOOOOOOOOOOOONNNNN ! » cria Selphy.

En fait, il dit qu’il lui apprendra tout ce qu’elle a besoin de savoir pour faire son travail, d’accord... ? Bien qu’il ait compris le vrai sens des paroles de Raphaël, Zagan était resté silencieux et s’était assis au sommet de son trône. Il aurait pu dissiper le malentendu, mais si elle avait vraiment l’intention de travailler dans son château, il valait mieux qu’elle s’y habitue. C’est pourquoi il avait décidé de laisser tomber. Et au fur et à mesure que ce tumulte s’aggravait...

« Maître Zagan, êtes-vous occupé ? »

Une voix aussi mélodieuse qu’un carillon l’appela. Et quand il tourna son regard vers la source, il vit Néphy debout à l’entrée de la salle du trône. Elle portait sa robe et son tablier monobloc outremer habituels, la tenue d’une femme de chambre, et elle avait un collier grossier autour du cou. Ses cheveux blancs comme neige descendaient jusqu’à sa taille, et ses yeux étaient d’azur comme un lac serein.

Les oreilles pointues de Néphy étaient une caractéristique raciale des elfes, mais si cette fille était une elfe, elle était aussi beaucoup plus que ça. Elle était en fait la descendante d’une ancienne espèce appelée les hauts elfes. Et en plus, c’était la femme que Zagan ne pouvait s’empêcher d’aimer.

Oh, c’est vrai, Néphy me cherchait aussi..., Néphy avait peut-être quelque chose d’important à dire.

Zagan secoua la tête et lui répondit. « Non, j’ai terminé ce que je faisais. Ne t’inquiète pas pour ça. »

« Je vois..., » Néphy inclina la tête sur le côté, clairement perplexe à la vue du visage de Selphy, qui était un amas de larmes et de morve.

« Mizz Néphy, sauvezzzzzzzz-moiiiiiii, » supplia Selphy.

« Ah, j’ai fini par l’engager pour aider Raphaël, » expliqua Zagan.

Pendant un moment après que Néphy eut entendu l’explication de Zagan, elle resta sans expression et le bout de ses oreilles frémit joyeusement. Puis, elle avait frappé ses deux mains ensemble.

« Tant mieux pour vous, Mademoiselle Selphy, » déclara Néphy.

« Est-ce que vous m’écoutez au moins ? » L’expression de Selphy sombra dans le désespoir alors qu’elle se demandait s’il lui restait des alliés dans cet endroit.

« Les préparatifs pour le déjeuner sont terminés, mais le déjeuner aura-t-il lieu plus tard ? » demanda Raphaël à Zagan, ignorant complètement Selphy.

« Ouais. Vous pouvez manger sans nous, » répondit Zagan.

Naturellement, il cherchait Néphy parce qu’il avait des choses à faire avec elle. Et comme il voulait discuter d’un sujet assez délicat qui pourrait prendre du temps, il ne voulait pas faire attendre les autres sorciers.

« Comme tu veux, » dit Raphaël en mettant la main sur sa poitrine et en s’inclinant.

« On dirait que tu m’as cherché, » dit Zagan en faisant signe à Néphy de venir. Zagan avait aussi quelque chose dont il voulait parler, mais il voulait d’abord entendre ce qu’elle avait à dire.

« Oui. Il y a quelque chose... dont j’aimerais vous parler, » déclara Néphy.

« ... Je vois. Pour l’instant, assieds-toi ! » déclara Zagan.

« Compris..., » répondit Néphy alors qu’elle montait sur le trône de Zagan. Et puis, juste comme ça, elle s’était placée sur les genoux de Zagan.

Ignorant Selphy, qui semblait stupéfaite par son action, Néphy inclina la tête sur le côté.

« Comme ça ? » demanda Néphy.

« Hmm, très bien, » déclara Zagan.

« Je compr — Ohhhhh !? » s’exclama Selphy.

Zagan pensait que Selphy faisait une sorte de vacarme, mais le temps qu’il la regarde, Raphaël lui avait déjà scellé la bouche.

Il y avait d’autres chaises dans les coins de la salle du trône, mais Néphy n’avait pas hésité à se placer sur les genoux de Zagan. Et pourtant, elle se penchait toujours vers l’avant pour mettre plus de poids sur ses pieds et ne pas surcharger Zagan, ce qu’il trouvait si charmant. Toutefois, Zagan avait également senti son visage commencer à se contorsionner en raison de la sensation de ses fesses douces et des cuisses.

J’ai l’impression que Néphy aime beaucoup plus se faire gâter dernièrement..., pensa-t-il.

Depuis l’incident avec Bifrons, Néphy avait perdu toutes ses réserves sur le fait de s’asseoir sur les genoux de Zagan. On aurait dit qu’elle n’en doutait même plus.

Après s’être prélassé dans la situation pendant un moment, Zagan fit un signe de tête chaleureux à Raphaël, qui prit Selphy et quitta la salle du trône.

« Sacrebleu. Monsieur l’Archidémon est un homme assez généreux, » déclara Selphy.

« L’étendue des attentions de mon seigneur n’est pas quelque chose que nous pouvons deviner, » déclara Raphaël.

« Alors quoi, n’êtes-vous pas sûr de la profondeur ? » Selphy parlait de quelque chose jusqu’à la fin, mais ce n’était probablement pas quelque chose dont Zagan avait à s’occuper.

Après qu’ils se soient éloignés tous les deux, Zagan regarda Néphy. Elle jouait avec ses cheveux avec ses doigts, apparemment en conflit à propos de quelque chose. Ses oreilles pointues tombaient peu à peu et, après être descendues en arrière avec raideur pendant un instant, elles tombaient tout simplement de nouveau. Il était plutôt évident qu’elle avait trouvé le courage de lui parler, mais il semblait que ses nerfs prenaient le dessus sur elle chaque fois qu’elle essayait de dire ce qu’elle pensait.

Hmm, peut-être que je devrais essayer de la calmer d’une façon ou d’une autre ?

Il n’était pas pressé. Non, il voulait simplement forcer la fille qu’il aimait. Alors, après s’en être inquiété pendant un certain temps, Zagan avait ramassé les cheveux de Néphy. Puis, il avait essayé de les caresser.

« Hein... ? » s’exclama Néphy.

« ... »

Les oreilles de Néphy frémirent de surprise et elle leva les yeux vers Zagan. Apparemment, elle ne s’attendait pas à une telle action de sa part. Et honnêtement, même Zagan ne pouvait pas expliquer pourquoi il avait fait une telle chose, alors ils avaient fini par se regarder en silence.

Maintenant que j’y jette un bon coup d’œil, ses cheveux sont transparents, n’est-ce pas ? Hmm... Comme c’est magnifique ! Le pigment s’était décoloré, et il était fondamentalement transparent. On aurait dit qu’il avait l’air blanc parce qu’ils étaient tout groupés.

Néphy avait penché la tête comme si elle délibérait, puis elle avait hoché la tête comme si elle avait eu une idée brillante. Ensuite, elle s’était penchée vers la poitrine de Zagan et s’était servie de la pointe des cheveux qu’elle faisait bouger pour caresser le cou de Zagan.

Hein ? C’est quoi cette situation ? Je veux dire, je ne peux pas me plaindre, mais..., se demanda Zagan.

Quoi qu’il en soit, Néphy était extrêmement mignonne alors qu’elle essayait de chatouiller Zagan avec une expression sérieuse présente sur son visage. Il voulait juste la serrer dans ses bras tout de suite. Cependant, l’Archidémon s’enfonça simplement sur son trône, jouant avec les cheveux de la femme qu’il aimait pendant que Néphy continuait à lui chatouiller le cou.

Un silence un peu gênant s’était prolongé pendant un certain temps alors que les deux personnes poursuivaient leur action. Et le premier à briser ce silence... fut Zagan.

« Ça chatouille..., » déclara-t-il.

« ... Dois-je arrêter ? » demanda Néphy.

« Non, c’est bon, continue, » répondit-il.

Même Zagan lui-même ne savait pas ce qui était « bien » pour de telles choses, mais il ne se sentait pas mal. Ou plutôt, c’était chaleureux et confortable pour lui. Et après cela, Néphy avait finalement repris courage et avait ouvert la bouche pour parler.

« Maître Zagan, en vérité, je suis venue vous faire une demande sérieuse, » déclara Néphy.

C’était la première fois que Néphy faisait quelque chose comme ça, et elle était si formelle en plus. Désorienté par elle, Zagan se crispa en hochant la tête en reponse.

« Hm... Je t’en prie, j’écoute, » déclara Zagan.

Néphy avait pris une grande respiration quand elle entendit sa réponse. La sensation de sa poitrine gonflée par son souffle doux lui avait été transmise directement, ce qui avait fait que Zagan avait enroulé ses bras autour du dos de Néphy de façon réfléchie.

Le corps de Néphy tremblait d’une secousse, mais elle avait quand même ouvert la bouche, se défendant ainsi contre ses nerfs.

« Pourriez-vous... me permettre de prendre un congé pour un court moment ? » Néphy demandait de quitter les côtés de Zagan, ce qui aurait dû faire sombrer Zagan dans la dépression. Cependant, il était allé droit au but sans être du tout agité.

« Je vois... Alors tu veux aller enquêter sur le village elfique ? » demanda Zagan.

« ... H-Hein ? » La bouche de Néphy s’était ouverte et fermée. Elle était choquée, car Zagan semblait avoir lu dans ses pensées.

« Comment l’avez-vous découvert ? » demanda Néphy.

« Je peux le dire rien qu’en te regardant, non ? » demanda Zagan.

« Est-ce que c’est vraiment le cas... ? » Néphy semblait encore un peu perplexe, mais ses oreilles se levaient comme si elle était soulagée d’une manière ou d’une autre.

En vérité, je la cherchais parce que je voulais l’inviter à y voyager ensemble..., cela faisait déjà un mois, mais grâce à une rencontre fortuite avec Archidémon Bifrons, Néphy avait découvert qu’elle était une haute elfe. De plus, elle avait découvert que la langue céleste qu’elle seule était capable de comprendre était les mots des hauts elfes. Cette révélation lui donna envie de quitter immédiatement le château, mais à cause de tous les nouveaux subordonnés que Zagan avait gagnés, elle avait attendu que les travaux ménagers dans le château puissent être gérés par le personnel.

De temps en temps, ses oreilles m’indiquent clairement qu’elle est troublée..., Zagan voulait satisfaire ses désirs le plus tôt possible, mais il n’avait pas l’habitude de compter sur des étrangers. Il lui avait fallu un certain temps avant d’être convaincu qu’il n’avait rien à craindre de ses nouveaux subordonnés. Et c’était après avoir acquis de telles connaissances que Zagan ait répondu nonchalamment.

« J’ai pensé que c’était le bon moment pour t’y emmener, Néphy, » déclara Zagan.

« En m’y emmenant... vous voulez dire que vous viendrez aussi, Maître Zagan ? » demanda Néphy.

« Il y a des gars comme Bifrons qui courent partout, donc je ne peux pas te laisser partir toute seule, » déclara Zagan, puis il se retourna pour regarder vers la porte que Raphaël avait franchie et il continua. « Heureusement, mes nouveaux subordonnés sont obéissants. Laisser le château entre les mains de Raphaël devrait suffire. »

Si Zagan devait partir pour le village caché, il manquerait au château son maître, donc Raphaël pourrait s’en charger seul.

« Maître Zagan, vous avez déjà tout prévu, n’est-ce pas ? » demanda Néphy.

« Pas tout, » répondit Zagan.

« Je vous accompagnerai... où que vous alliez. Alors... emmenez-moi, s’il vous plaît, Maître Zagan, » déclara Néphy.

« C-C’est d’accord..., » déclara Zagan, lui renvoyant un hochement de tête exagéré. À ce moment précis, une idée lui vint à l’esprit.

Le lieu de naissance de Néphy... hein ?

C’était peut-être un endroit plein de souvenirs douloureux pour Néphy, mais il était ravi à l’idée de visiter l’endroit où elle avait grandi.

Et ainsi, la famille de Zagan avait fini par suivre Néphy lors de sa visite à son ancienne maison.

***

Partie 4

« Hmph... C’est donc ici que Néphy habite ? »

Une fille seule flottait dans le ciel au-dessus du château de Zagan. Ses cheveux étaient argentés, frôlant le blanc, et elle avait des yeux qui brillaient comme la lune. C’était une elfe sombre à la peau basanée qui portait une tenue plutôt risquée. De plus, son visage était étonnamment semblable à celui de Néphy. La fille s’appelait Nephteros. C’était la servante de l’Archidémon Bifrons, une haute elfe qui détestait Néphy.

Néphélia..., cette fille qui avait le même visage qu’elle. Même si elles étaient toutes les deux censées être de hautes elfes, Bifrons accordait plus de valeur à Néphélia, et ce fait avait fait brûler les braises de la haine dans le cœur de Nephteros.

Si elle lançait une attaque-surprise d’ici et y ajoutait sa sorcellerie, même un Archidémon serait incapable de protéger Néphélia. Et à ce moment, Nephteros avait l’occasion idéale de lancer son assaut. Ou c’était le cas, mais...

« Quelle chanceuse femme... ! » Nephteros n’était pas venue pour tuer Néphélia. Si elle lançait une attaque contre le château, elle ne serait plus capable d’atteindre son véritable but. C’est pourquoi tout ce qu’elle pouvait faire, c’était de regarder le château avec énervement.

Nephteros avait quelque chose dans ses bras. Dès que j’aurai fini de livrer ceci, je n’aurai plus rien à faire avec ce château ennuyeux...

Le château sous ses yeux était entouré d’un nombre incalculable de puissantes barrières délicatement disposées autour de lui. Les principes fondamentaux de la sorcellerie consistaient à dessiner des cercles magiques. En lisant et en comprenant les grimoires, ces cercles magiques pourraient être améliorés.

Fait remarquable, la barrière entourant le château de Zagan avait utilisé la forêt environnante et l’avait tissée comme une partie de la barrière. La position d’une grande partie des arbres et des ruisseaux était assez facile à utiliser, mais les ombres projetées par la lune et le soleil, et même le bruit du vent qui soufflait dans la forêt, faisaient toutes partie du cercle magique. En d’autres termes, cela avait été construit de manière à ce que la structure de la barrière change en fonction de l’heure et de la direction du vent.

Toute méthode de perçage ne fonctionnerait pas une seconde fois. C’était une barrière redoutable qui n’avait aucune faiblesse réelle.

Je déteste l’admettre, mais cette sorcellerie est même artistique..., Nephteros, qui avait étudié la sorcellerie avec l’aide de l’Archidémon Bifrons n’avait pas réussi à l’imiter. C’était vraiment la cristallisation de la puissance de Zagan. Elle avait été involontairement fascinée par ça.

Un grand nombre de sorciers s’affairent à l’intérieur de cette belle barrière. Ils étaient probablement les subordonnés de Zagan, et chacun d’entre eux n’avait pas remarqué l’ennemi de son maître dans le ciel juste au-dessus d’eux.

Si elle jetait son « paquet » comme ça, elle pourrait partir, mais...

« Argh..., » Nephteros avait senti une vague de soif sanguinaire frapper son corps pendant qu’elle réfléchissait à ses pensées. Alors qu’elle regarda le château sous ses pieds, elle avait aperçu un vieil homme qui aboyait des ordres aux sorciers. Si elle s’en souvenait bien, c’était un ancien Chevalier Angélique nommé Raphaël.

Eh bien, je suppose qu’un Archidémon n’emploierait pas que des idiots.

Puisqu’il l’avait remarquée, elle n’avait pas le choix. Nephteros déchaîna son mana, ce qui fit osciller légèrement la barrière. Même si Zagan la surpassait de loin en tant que sorcier, c’était une énorme barrière qui couvrait non seulement un château, mais toute une forêt. En raison de sa taille massive, les parties qui pouvaient être comparées aux articulations d’une personne étaient plutôt fragiles. Il y avait donc bien des « lacunes » que la plupart des ennemis seraient incapables de déceler.

En faisant vibrer la barrière, Nephteros avait fait remonter un tel « trou » à la surface. Et juste comme ça, elle s’était faufilée à travers ça et était descendue vers le château.

La vue de sa silhouette alors qu’elle déchaînait une vague de mana et franchissait effrontément la barrière d’un Archidémon était tout simplement sublime. Cependant, la sueur s’était glissée sur son visage au lieu d’un sourire satisfait.

Plus vite ! Je dois passer avant que la barrière ne change ! Nephteros savait qu’elle serait prise dans la barrière si le vent se déplaçait même légèrement. Après tout, franchir sa barrière, c’était un peu comme enfiler le chas d’une aiguille, alors même un léger à-coup la ferait échouer.

Elle ne pouvait pas se permettre d’être impatiente. Cependant, elle avait dû lutter pour passer plus tôt, même une seconde de moins. Et alors qu’elle luttait contre la puissante barrière, Nephteros réalisa enfin à quel point l’Archidémon Zagan était un ennemi terrifiant.

Peu de temps après, les autres sorciers avaient commencé à faire entendre leur voix en la voyant.

« Vous êtes celle de Bifrons... ! »

« Qu’est-ce que vous préparez maintenant !? »

« Calmez-vous ! Sa sorcellerie est puissante. Si vous choisissez la bagarre, elle retournera la situation. »

Nephteros avait atterri devant Raphaël, ne se donnant même pas la peine de regarder vers les sorciers qui faisaient du grabuge.

Celui qui a le plus de pouvoir ici... c’est ce type, hein ? Nephteros ne pensait pas qu’il était plus fort qu’elle. Cependant, c’était quelqu’un que Zagan gardait à ses côtés. Elle ne pouvait pas se permettre d’être laxiste.

En le regardant, Nephteros avait un sourire un peu tendu et secoua ses cheveux argentés d’une manière autoritaire. Et puis, elle avait adopté une attitude résolue et l’avait informé de quelque chose d’assez choquant.

« Je suis venue rendre le manteau de Zagan, mais..., » déclara Nephteros.

À ce moment-là, tout le monde ici présent poussa un soupir en même temps.

« C’est vraiment trompeur. Si vous venez faire ça, entrez par la porte comme d’habitude ! »

« Maintenant que j’y pense, c’était ce genre de fille, hein ? »

« Mmhmm. Elle ne peut pas la remercier honnêtement, n’est-ce pas ? »

« Est-ce que c’est ça ? Admet-elle enfin qu’elle veut s’entendre avec la petite Néphy ? »

« Avec la gentillesse de Néphy, elle voudra certainement passer un peu de temps avec elle. »

Finalement, les sorciers étaient chacun retournés à leur travail comme s’ils s’étaient désintéressés d’elle. Nephteros jeta un coup d’œil vers les sorciers qui disaient ce qu’ils voulaient, mais même si elle gardait une expression calme, les bouts de ses oreilles étaient teints en rouge et frémissaient.

Après que Raphaël l’eut regardée d’un regard froid et calculateur, il lui tourna brusquement le dos. « Suis-moi. »

Elle voulait rendre son manteau rapidement et rentrer à la maison, mais sa fierté ne lui permettait pas de repartir comme ça. Ainsi, Nephteros avait suivi Raphaël à contrecœur.

L’endroit où il l’avait conduite semblait être un salon. Raphaël avait déplacé une chaise et pressa Nephteros de s’asseoir avant de continuer à préparer énergiquement quelques boissons. Peu de temps après, il lui avait offert du thé qui dégageait un parfum apaisant.

« Prends un verre, » déclara Raphaël.

« Ah, merci..., » répondit Nephteros.

Nephteros avait involontairement fini par baisser la tête quand elle avait répondu. Les actions courtoises de Raphaël l’avaient prise au dépourvu. Après cela, Raphaël murmura quelque chose alors qu’il préparait des biscuits pour accompagner le thé.

« Je vais te dire ceci avant que tu ne dises quoi que ce soit, mais mon seigneur est actuellement absent, » déclara Raphaël.

« Hein, il n’est pas là ? » demanda Nephteros.

« En effet, » répondit Raphaël.

Incapable de cacher sa perplexité, Nephteros l’interrogea à nouveau.

« Alors... Euh... Qu’est-ce que c’est que tout ça... !? » demanda Nephteros.

« On m’a ordonné de te donner le minimum d’hospitalité, » répondit Raphaël.

« Ne voulait-il pas dire... m’intercepter et m’attaquer ? » demanda Nephteros.

« Espèce d’idiote. Mon seigneur est un gentleman. Il ne permettrait jamais à une invitée de partir les mains vides, » déclara Raphaël.

Incapable de comprendre ce qu’il disait, Nephteros se mit tout simplement à cligner rapidement des yeux alors que ses oreilles tremblaient légèrement.

« Mais, tout à l’heure, n’avez-vous pas dirigé votre colère contre moi quand j’étais au-dessus du château ? » demanda Nephteros.

« Si quelqu’un de suspect était juste au-dessus de vous, ne seriez-vous pas sur vos gardes ? » demanda Raphaël.

« Suspect, dites-vous... ne s’est-on pas déjà rencontrés ? » demanda Nephteros.

« Je ne suis pas un sorcier. Je n’arrive pas à distinguer le visage de quelqu’un à une telle distance, » répondit Raphaël en secouant la tête tout le temps.

« C’est, euh... désolée. Je ne l’avais pas remarqué..., » déclara Nephteros.

« Ce n’est pas à toi d’y penser. Plus important encore, boit ce foutu thé avant qu’il ne refroidisse, » déclara Raphaël.

« Merci..., » le visage de Nephteros resta perplexe alors qu’elle levait sa tasse de thé.

Pour l’instant... Je suis leur ennemie, d’accord... ? Ce n’est pas comme si Maître Bifrons s’était excusé auprès d’eux ou quoi que ce soit...

Le maître de Nephteros était quelqu’un qui préférait se lever et mourir plutôt que de s’incliner devant un autre. Bifrons était un être qui ne s’excuserait jamais.

C’était peut-être normal pour les Archidémons, alors Zagan l’avait compris. Était-ce pour ça qu’on la traitait avec tant de gentillesse ? Avait-il vraiment l’intention de divertir un ennemi, et non pas de l’abattre ?

Nephteros essaya une bouchée de l’un des biscuits devant elle alors qu’elle réfléchissait à de telles pensées.

« C’est... c’est délicieux..., » déclara Nephteros.

« ... Est-ce que ça t’a plu ? » demanda Raphaël.

« Je suppose qu’il a... C’est vous qui les avez faits ? » demanda Nephteros.

« En effet, » répondit Raphaël.

Nephteros avait poussé un soupir sans le vouloir. Elle pensait qu’ils étaient peut-être empoisonnés ou quelque chose comme ça, mais c’étaient des biscuits tout à fait normaux et délicieux. Les biscuits et le thé étaient si délicieux que Nephteros restait sincèrement perplexe.

 

 

Comment un homme si effroyable a-t-il réussi à faire ces... ?

Le visage de Raphaël était assez terrifiant pour inciter les sorciers à se précipiter et à l’attaquer par peur. Elle ne pouvait pas l’imaginer faire des friandises dans la cuisine.

Nephteros ne connaissait rien à la pâtisserie, mais elle n’était pas sûre de pouvoir en faire de si délicieuses, même si elle le savait. D’un autre côté, elle pensait faire quelque chose de terrible pour harceler Bifrons, mais cet Archidémon verrait sûrement ses plans tout de suite, donc tout effort serait en vain.

Nephteros s’assura de ne pas laisser tomber de miettes sur le manteau de Zagan, qu’elle avait sur ses genoux en mâchant des biscuits, et continua à interroger Raphaël.

« Où est allé Zagan ? » demanda Nephteros.

« Dans la ville natale de Lady Néphy. J’ai entendu dire qu’il faut une journée entière pour l’atteindre avec les ailes d’un dragon. Ils seront de retour dans trois jours au plus tôt, mais je ne sais pas quand ils comptent revenir, » répondit Raphaël.

« Vraiment... ? » Nephteros fixa le manteau de Zagan.

Que dois-je faire ? Même si j’ai fait tout ce chemin jusqu’ici, laisser le manteau et partir est un peu idiot, n’est-ce pas... ?

Cela dit, c’était trop loin pour le poursuivre. Dans le pire des cas, ils pourraient même se croiser. Si cela devait arriver, elle serait encore plus risible. Et pendant qu’elle s’inquiétait de ce qu’il fallait faire, sa tasse de thé s’était vidée.

Secouant la tête à Raphaël, qui lui proposait de remplir son thé, Nephteros se leva de sa chaise.

« Je reviendrai vous voir, » déclara Nephteros.

Pour l’instant, je devrais au moins le remercier pour la dernière fois en personne.

Pendant l’incident sur le bateau, Zagan avait sauvé la vie de Nephteros, mais elle ne l’avait jamais remercié correctement. De plus, grâce au « souvenir » qu’il lui avait offert, elle avait même pu tourmenter Bifrons. Il y avait aussi l’affaire de son manteau, mais elle pensait que le plus important était d’exprimer correctement sa gratitude pour de telles choses.

Si je ne le fais pas, un jour, je finirai comme Maître Bifrons...

L’indifférence occasionnelle était peut-être normale pour les sorciers, mais son désir de ne pas devenir ce genre de personne était au premier plan de ses préoccupations.

« Attends. J’ai quelque chose à te remettre. Peux-tu attendre un moment, » déclara Raphaël à Nephteros, l’arrêtant sur place alors qu’elle se tournait pour partir.

« Hein... ? Compris, » répondit Nephteros, puis elle s’était assise jusqu’au retour de Raphaël.

« Tu peux les prendre avec toi, » déclara Raphaël à son retour.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda-t-elle.

Raphaël avait tendu un paquet. Il était assez petit pour tenir dans la main de Nephteros et était attaché avec un adorable ruban.

« Ce ne sont que des restes. N’y pense pas et prends-les, » déclara Raphaël.

« Par restes... vous voulez dire plus de cookies que je viens de manger ? » demanda-t-elle.

Raphaël répondit par un hochement de tête exagéré. Il semblait avoir entendu Nephteros murmurer qu’ils étaient délicieux, alors il les lui avait préparées en souvenir.

Sa gentillesse avait fait vibrer le cœur de Nephteros. C’était comme si on jouait avec elle jusqu’à la fin.

« Si ça ne te dérange pas, viendras-tu avec moi ? » Nephteros se souvint de la fille qui lui tendait la main pendant qu’elle prononçait ces mots chaleureux, puis secoua la tête pour effacer le souvenir.

C’est moi qui ai choisi de ne pas la rejoindre...

N’avait-elle pas choisi de rester sous les ordres de Bifrons ?

« Je reviendrai..., » répondit sèchement Nephteros, affirmant sa détermination alors qu’elle s’éloignait.

Après avoir atteint le hall d’entrée, elle se dirigea vers le parc. Sur le chemin, elle passa devant plusieurs sorciers, mais contrairement à ce qui se passait auparavant, aucun d’entre eux n’était le moins du monde hostile. Il semble qu’ils aient maintenant reconnu Nephteros comme une invitée.

En jetant un coup d’œil derrière elle, Nephteros avait aperçu Raphaël lui faisant signe de la main avec une expression sévère présente sur son visage. Et elle lui avait fait un signe de la main sans le vouloir.

Qu’est-ce que je fais exactement là... ? Nephteros était incapable d’expliquer ses propres actions, mais curieusement, elle ne se sentait pas mal. Alors qu’elle essayait de quitter l’atmosphère paisible du château de Zagan dans lequel elle s’était complètement absorbée, un autre sorcier s’approcha d’elle en volant de la forêt.

« Merde, merde, merde ! Ce connard de Zagan me laisse encore en dehors des trucs marrants ! Pourquoi est-ce moi qui dois protéger cette pleurnicharde ? Fais chier ! »

C’est quoi ce punk... ?

Il avait l’air d’avoir une vingtaine d’années, avec des cheveux négligés et de grandes poches sous les yeux. C’était un homme mince et grand aux joues décharnées qui donnait l’impression d’être en mauvaise santé. Il y avait aussi beaucoup de bijoux autour de son cou, et ils se balançaient autour de lui pendant qu’il marchait. Elle le croyait sorcier, mais Nephteros ne le connaissait pas.

Cet homme était Barbatos. En fait, Nephteros l’avait déjà rencontré une fois, mais les choses étaient si mouvementées à l’époque qu’elle ne s’en souvenait pas du tout. Afin d’éviter de s’impliquer avec lui, elle avait quitté le chemin. Cependant, Barbatos la fixait fixement.

« Hein ? Attendez, n’êtes-vous pas l’elfe au bal de Bifrons !? » demanda Barbatos.

« ... Qui êtes-vous ? » Nephteros plissa ses sourcils, mais l’homme n’y prête pas attention et commence à lui parler.

« Qu’est-ce que c’est ? Êtes-vous venu pour tuer ce connard de Zagan ? Eh bien, tant pis ! Cet abruti s’est encore enfui quelque part avec sa femme. Kah ! On dirait que vous avez perdu votre temps en venant ici, hein ? » déclara Barbatos.

« Non, ce n’est pas vraiment ça..., » répondit Nephteros.

Les biscuits et le thé étaient tous les deux délicieux, et on lui avait même offert un souvenir. Franchement, elle était heureuse d’avoir une raison de revenir.

Malheureusement, Barbatos n’arrêtait pas de bavarder, et lorsque Nephteros avait recommencé à marcher pour tenter de lui échapper, il l’avait suivie.

Qu’est-ce qu’il a, ce type ?

« Si vous cherchez Zagan, il semble qu’il soit allé dans la ville natale de Néphélia. Pourquoi ne pas livrer toutes les plaintes que vous avez vous-même ? » Nephteros lui avait crié dessus au bout d’un moment pour le chasser.

Elle se sentait mal à l’aise d’avoir imposé un homme aussi ennuyeux à Zagan, mais elle ne pouvait plus supporter ses bavardages.

« Qu’est-ce que c’est ? Par ville natale de Néphy, vous voulez dire le village elfique caché, n’est-ce pas ? Je vois... Il va aussi loin juste pour mettre la main sur un nouveau pouvoir, hein ? C’est pour ça qu’il m’a abandonné ! » s’exclama Barbatos, les yeux grands ouverts en entendant les paroles de Nephteros.

Nephteros se dépêcha de s’éloigner de lui alors qu’il tapait du pied à plusieurs reprises sur le sol.

Avec cela, je peux enfin rentrer chez moi..., Nephteros se sentait enfin soulagée, mais Barbatos avait fini par tout gâcher en disant quelque chose de complètement imprévisible.

« Je vais chercher ce connard de Zagan. Vous avez l’intention de faire la même chose, n’est-ce pas ? Alors, je vous emmène, » déclara Barbatos.

« Non, je ne suis pas vraiment..., » commença Nephteros.

« Merde, ça veut dire que je dois aussi amener le bébé pleurnichard avec moi. Franchement, quelle douleur ! » s’exclama Barbatos.

À ce moment-là, Nephteros réalisa enfin l’un de ses défauts. Maintenant que j’y pense, je ne sais pas comment traiter les gens qui n’écoutent pas du tout les autres.

Son maître, Bifrons, en était un bon exemple, et cet homme en était un autre. Elle n’avait jamais eu l’occasion d’engager une conversation avec d’autres personnes que Bifrons, donc ce défaut avait du sens.

Malheureusement, cette faiblesse revenait pour la mordre maintenant. Malgré ses objections, elle avait fini par être entraînée dans la petite expédition de Barbatos.

Et ainsi, l’homologue sombre de Néphy s’était retrouvée sur sa piste, la tête la première dans une situation qui n’avait absolument rien à voir avec elle.

***

Chapitre 2 : Aimez la demoiselle très sincèrement, et elle vous aimera en retour !

Partie 1

« A-Attendez un peu. Je tombe... Je suis en train de tomber ! » cria Gremory d’une voix rauque. Depuis ce matin, elle avait pris la forme d’une vieille femme.

Zagan et les autres étaient en train de monter sur le dos d’un dragon, planant dans le ciel. Le paysage en dessous d’eux avait changé avec l’écoulement des nuages. En ce moment même, ils apercevaient une forêt qui s’étendait en contrebas. Et en un instant, un désert apparaissait, et ensuite, un magnifique canal.

« Allez-vous bien, Mademoiselle Gremory ? » Néphy cria vers la vieille d’une voix inquiète.  

« Keeheeheehee, vous, les elfes, vous êtes des créatures si gentilles ! Hmmm, comme c’est réconfortant. Je vais bien... Ah, désolée, non, peut-être que non, » répondit Gremory.

Zagan poussa un soupir, se résignant à son sort, alors qu’il attrapait par la nuque la vieille femme qui semblait sur le point de s’évanouir et la releva.

La belle dragonne verte tourna la tête et dirigea ses yeux ambrés vers ceux qui se trouvaient sur son dos.

« Dois-je... un peu ralentir ? » La voix de Foll avait retenti. Cette dragonne verte aux plumes semblables à celles d’un oiseau était la forme originale de Foll. Elle avait encore un petit corps sous forme de dragon, mais même ainsi, son corps était beaucoup plus grand qu’un carrosse, et quand elle déployait ses ailes, elle était à peu près aussi grande qu’une cabane.

Un lion courant dans le ciel s’approcha du bout du nez de Foll. C’était Kimaris.

« Non, ce n’est pas grave. Mlle Gremory a le vertige, c’est tout. Même si tu changes de vitesse, elle dira la même chose, » dit-il.

« Vraiment ? » demanda Foll, puis elle regarda vers l’avant comme si elle avait perdu toute préoccupation pour la vieille femme. Après cela, elle avait accéléré son rythme.

« Eeeeeeeeeeeeeeek! » cria Gremory.

« Si tu voulais faire des histoires, tu aurais dû monter sur le dos de Kimaris en faisant preuve d’obéissance, » déclara Zagan en faisant la grimace à la vieille femme qui criait à côté de son oreille.

Zagan était au centre du dos de Foll, Néphy était à sa gauche et Gremory à sa droite. Cependant, comme Gremory avait renoncé à rester stable avec ses propres forces, Zagan la tenait par la nuque. Ajoutez Foll et Kimaris, et ils étaient cinq pour ce voyage.

Zagan avait imaginé que c’était un voyage en famille avec sa femme et sa fille, mais Gremory avait grogné jusqu’à ce qu’il soit forcé de l’emmener. À cause d’elle, Kimaris avait fini par les rejoindre.

« C’est déraisonnable, Sire Zagan. Bien sûr, j’ai confiance en ma vitesse, mais seulement quand je suis seul. La capacité de Lady Foll à transporter des passagers dépasse de loin la mienne, » répondit Kimaris.

La vitesse de vol de Foll était stupéfiante. Ce qui prendrait normalement trois jours en carrosse avec des chevaux ne lui avait pris qu’une soirée. Il semblait que la seule race qui pouvait voler à une telle vitesse tout en transportant des individus était les dragons.

« Et bien, je comprends ça, mais ne serait-il pas mieux qu’elle prenne une forme plus jeune ? » demanda Zagan.

Il semblait qu’elle tremblait comme une feuille dans le vent sous sa forme de vieille. Même si les sorciers pouvaient manipuler les capacités physiques, un corps vieillissant avait quand même fait des ravages. Il était évident qu’un corps plus jeune contenait plus de puissance.

« Cette forme est la plus légère, vous m’entendez !? Une vieille femme a plus de pouvoir qu’une jeune fille, vous entendez !? Si j’étais plus lourde, ce serait plus dur de voler ! » Gremory regarda Zagan, apparemment au bord des larmes quand elle déclara ça.

« Je vais voler... un peu plus lentement, » déclara Foll.

Eh bien, si l’on mettait de côté le fait qu’une vieille femme ait plus de pouvoir qu’une jeune fille, Gremory semblait essayer d’alléger le fardeau de Foll à sa façon. Une fois que cela était devenu apparent, Foll avait consciemment ralenti.

« Pourquoi es-tu si désireuse de venir avec nous... ? » demanda Zagan d’un ton confus.

« Keehee, pourquoi croyez-vous que je vous suis et que je vous serve ? N’est-ce pas évidemment parce que tant que je suis à votre service, je peux observer les dragons et les elfes autant que je le veux ? Si ces deux-là s’en vont, alors il n’y a pas de sens à attendre derrière — Eeeeeeeek !? » répondit Gremory.

Gremory était une sorcière qui recherchait la nature simple, mais difficile à comprendre de l’immortalité, il était donc naturel qu’elle ait les yeux fixés sur des races comme les elfes et les dragons, qui possédaient une jeunesse perpétuelle. Et il semblait qu’elle était venue observer Néphy et Foll.

Eh bien, je suis comme elle, d’une certaine façon. J’ai besoin de vivre une longue vie.

La durée de vie d’un être humain normal était beaucoup trop courte. Si Zagan voulait vieillir avec Néphy et Foll, il devait l’allonger considérablement. De cette façon, les recherches de Gremory avaient été une énorme aubaine pour lui. Ainsi, Zagan n’avait pas l’intention de maltraiter Gremory. Cependant...

« Quand il s’agit de les aimer, j’admets que vous êtes très doué. Mais, de mon point de vue, vous avez encore un long chemin à parcourir. Contrairement à la grande puissance des elfes et des dragons, les humains sont des êtres délicats, donc —, » déclara Gremory.

Qu’est-ce qu’elle veut dire par « doué », exactement... ? Zagan dirigea un regard exaspéré vers elle pendant qu’elle parlait. Peut-être, l’ayant remarqué, Gremory lui répondit en le regardant d’un air exaspéré.

« Qu’est-ce que c’est ? On dirait que vous avez quelque chose à dire, mon cher Archidémon, » déclara Gremory.

« Qui sait... ? » Zagan haussa les épaules en réponse, et contre toute attente, Gremory lui renvoya une expression sérieuse.

« Écoutez-moi, mon seigneur, car ce sont les paroles de mon mentor. Si vous désirez l’immortalité, alors vous perdrez le “pouvoir de l’amour”, vous savez ? » déclara Gremory.

« A-Amour... quoi ? » Zagan n’avait jamais entendu les mots assemblés comme ça, alors il doutait de ses oreilles.

« J’ai dit le pouvoir de l’amour. Nous, les sorciers, possédons déjà une jeunesse perpétuelle. Si nous visons au-delà de cela, et cherchons la véritable immortalité, alors peu importe à quel point nous sommes dévoués à notre recherche, nous serons éventuellement tourmentés par l’ennui. Et quand cela arrivera, l’utopie que nous cherchions se transformera en prison éternelle, » expliqua Gremory.

Zagan ne pouvait pas simplement rire de ces paroles, car ils semblaient être vrais. Et, après une courte pause, Gremory avait poursuivi son discours.

« La seule chose qui peut guérir la solitude d’une personne quand cela arrive, c’est d’être capable d’aimer autre chose qu’elle-même. Regardez les Archidémons que nous avons maintenant. C’est parce qu’ils ne possèdent aucun pouvoir de l’amour qu’ils se précipitent dans des actes insensés comme Bifrons. Et à cause de cela, son elfe est d’une impuissance pitoyable, » déclara Gremory.

Même si cela semblait vague, Zagan n’avait pas pu nier ce qu’elle disait.

« ... Il semble que la plupart des gens ne mourront pas parce qu’ils sont seuls, mais ils sont aussi incapables de vivre heureux, » déclara Zagan.

C’est ce qu’il lui avait dit lorsqu’il avait égoïstement essayé de tenir Néphy à distance. Tandis qu’il les répétait à Gremory, les oreilles de Néphy tremblaient timidement.

« Vous vous souvenez de ça, Maître Zagan, » demanda Néphy.

« Bien sûr que oui. Tu crois que j’oserais oublier les mots qu’on échange ? » demanda Zagan.

Néphy avait dit qu’elle voulait être à ses côtés même après son abandon. Et à l’époque, il croyait vraiment avoir été sauvé de sa solitude éternelle par ses paroles. Grâce à cela, même Zagan comprenait que les individus ne pouvaient pas vivre seuls. Bien sûr, une personne pouvait survivre, mais elle était incapable de mener une vie épanouissante toute seule.

« C’est embarrassant... ! » Néphy voulait enterrer son visage dans ses mains, mais elles étaient sur le dos d’un dragon. Puisqu’elle devait s’accrocher à Foll avec force, elle avait à la place enfoui son visage dans le manteau de Zagan.

« Hmm, le beau pouvoir de l’amour ! » remarqua Gremory, hochant la tête comme si elle louait Zagan en le faisant.

... J’aurais vraiment aimé qu’on y aille tous les trois en famille.

La vieille femme était bruyante et ennuyeuse, mais il n’arrivait toujours pas à se résoudre à l’éjecter en plein vol.

Et c’est ainsi que le groupe voyagea jusqu’à ce que la nuit commence à tomber et qu’une chaîne de montagnes enneigée s’éleva à l’horizon.

« On y est presque. Une fois que nous aurons franchi ces montagnes, nous serons à Norden, » déclara Zagan.

C’était un endroit rempli de souvenirs misérables de l’enfance de Néphy. Et pourtant, ils continuèrent leur chemin jusqu’à l’endroit où elle avait grandi.

***

Partie 2

Une forêt sombre s’étendait devant le groupe après avoir traversé les montagnes enneigées. Elle n’était pas aussi étrange que celle qui entourait le château de Zagan, mais l’obscurité était due au fait que la forêt était composée de conifères aux feuilles sombres qui étaient serrées les unes contre les autres. Peut-être à cause de la haute altitude, la montagne était couverte de neige, mais les arbres avaient encore des feuilles.

On disait que le village elfique caché était dissimulé dans cette forêt. On ne pouvait pas l’approcher par le ciel, alors Zagan et les autres marcheraient le reste du chemin. Foll avait également repris sa forme de petite fille... et c’était maintenant au tour de Zagan de la transporter.

« ... Je suis fatiguée, » déclara Foll.

« Tu as bien tenu le coup. Dors un peu, c’est tout, » déclara Zagan.

« Ok..., » Foll s’était endormie en quelques secondes.

C’était normal qu’elle soit aussi fatiguée.

Ils avaient décidé de se rendre dans la ville natale de Néphy hier midi. Et après avoir mis de l’ordre dans leurs préparatifs, ils étaient partis tôt le matin aujourd’hui, et maintenant c’était le soir.

Ils avaient pris quelques pauses en cours de route, mais c’était presque une journée entière de vol continu.

« Foll a fait de son mieux aujourd’hui, n’est-ce pas ? » demanda Néphy en se blottissant à côté de lui.

« Elle l’a fait. Il vaudrait peut-être mieux lui préparer un lit maintenant. Trouver ton village natal peut attendre, » déclara Zagan.

« Toutes mes excuses. Si je connaissais son emplacement, nous n’aurions pas à passer tout ce temps à le chercher..., » les oreilles de Néphy se baissèrent alors qu’elle s’excusait.

En raison de son statut d’enfant maudit, Néphy n’avait même pas le droit de quitter le village, alors elle ne connaissait pas vraiment les environs de son village. C’est pourquoi ils avaient dû fouiller soigneusement la zone à partir de maintenant.

« Néphy, n’as-tu même pas pu quitter le village, non ? Alors, considère ça comme une visite touristique. En fait, je m’intéresse beaucoup à la région, donc une promenade me semble une bonne idée, » déclara Zagan en secouant la tête comme si ce n’était pas grave.

J’aimerais vraiment jeter un coup d’œil aux alentours...

Heureusement, cette fois, il avait réussi à le formuler d’une manière qui ne soit pas trompeuse. Néphy le regarda avec surprise, mais le bout de ses oreilles pointues tremblait d’un frémissement d’une manière un peu heureuse tout en marchant à côté de lui.

Et à ce moment-là, une grande ombre s’était soudain jetée sur eux. C’était Kimaris. Il était revenu à sa forme humanoïde.

« Sire Zagan, je crois pouvoir localiser le village de Lady Néphy, » déclara Kimaris.

« Quoi, vraiment ? » demanda Zagan.

« Oui. Il semble qu’il n’y ait pas de sorcellerie en place pour nous retarder, ou peut-être qu’elle a déjà perdu sa fonction. Quoi qu’il en soit, nous devrions pouvoir y arriver en suivant l’odeur de Lady Néphy, » déclara Kimaris.

Zagan hocha la tête et s’enfonça dans la pensée. Le ciel était déjà teint en rouge, donc si une heure s’écoulait, cela deviendrait noir. S’ils passaient trop de temps à se déplacer, Néphy rejoindrait Foll dans les profondeurs du sommeil. En plus, Gremory était déjà sur le dos de Kimaris.

« ... Cela semble être la meilleure façon de procéder. Je compte sur toi, Kimaris, » déclara Zagan.

Zagan voulait essayer de se promener un peu, mais se rendre plus tôt au village caché était la meilleure option. Même s’il était abandonné, le fait d’avoir des bâtiments pour s’abriter de la pluie et du vent serait d’une grande aide.

« S’il vous plaît, laissez-moi faire, » répondit Kimaris, avec un sourire rampant sur son visage. Il avait alors fait un petit signe de tête et commença à marcher devant eux, dégageant un sentiment de fiabilité qui fit penser à Raphaël selon Zagan.

Néphy serra étroitement les ourlets de la robe de Zagan pendant qu’ils marchaient. Il jeta un coup d’œil fugace vers elle, et vit que le bout de ses oreilles pointues s’affaissait.

« Es-tu anxieuse ? » demanda Zagan.

« Oui. En vérité, j’ai juste un peu... peur. Je parle du fait de voir le village tel qu’il est maintenant, » répondit Néphy, son corps tremblant tout le temps.

À sa manière, Néphy s’était réconciliée avec son passé. Cependant, c’était encore un village où elle avait laissé des personnes mourir.

Si Zagan était à sa place, il aurait ri en voyant son état de délabrement, mais il ne pensait pas que Néphy serait capable d’imiter ça... et franchement, il ne voulait pas qu’elle le fasse.

Après y avoir réfléchi un peu, Zagan ajusta la position de Foll sur son dos pour qu’il la porte avec un bras. Puis, il déplaça sa main libre, et il prit celle de Néphy et la serra contre lui.

« Ah... ! » L’expression de Néphy n’avait pas changé, mais le bout de ses oreilles pointues s’était relevé.

Maintenant, j’ai juste besoin de dire quelque chose pour la rassurer..., malheureusement, c’était la tâche la plus difficile pour lui. Zagan n’avait même pas encore dit « Je t’aime » à Néphy, donc il n’y avait aucune chance qu’il dise quelque chose de réconfortant dans cette situation.

Néanmoins, le silence était inacceptable dans l’esprit de Zagan. Peut-être qu’il était guidé par le « pouvoir de l’amour », comme l’avait dit Gremory.

« Tu peux compter sur moi jusqu’au bout. Je trouve cela assez amusant, » proclama Zagan.

Attends, amusant ? N’est-ce pas comme si j’étais ravi de la souffrance de Néphy ?

« Je le ferai ! » répondit Néphy, hochant la tête comme si elle le comprenait complètement. Elle venait peut-être d’avoir agi avec force, mais Néphy au moins semblait un peu plus énergique quand elle parlait.

« ... Sire Zagan, il semble que nous arrivons bientôt à destination, » déclara Kimaris d’une voix pleine de tension.

En regardant vers l’avant, Zagan avait aperçu la lumière rouge du coucher du soleil se déversant à travers une brèche dans la forêt dense. Quand ils regardaient du haut des airs, ils ne voyaient rien comme un trou dans les arbres, mais il y avait toujours d’une certaine façon un espace dégagé devant eux.

Malgré leur découverte fortuite, la voix de Kimaris ne contenait ni soulagement ni joie. Au lieu de cela, elle avait été remplie à ras bord d’appréhension. Après un moment d’hésitation, Gremory grimpa sur le dos de Kimaris et avait saisi sa grande faux à la main.

« Il y a quelque chose ? » demanda Néphy.

« On dirait bien, » répondit Zagan. Il pouvait dire que Néphy avait mis toute sa force à lui serrer la main. Le village caché était autrefois la cible de l’Archidémon Marchosias, qui portait le surnom L’Aîné, et il avait également été attaqué par l’Archidémon Bifrons dans une tentative de capture de Néphy. En d’autres termes, la ville natale de Néphy était déjà impliquée avec deux Archidémons différents.

Pire encore, personne dans le groupe de Zagan ne savait ce qui s’était réellement passé. Ils n’avaient aucune idée des choses cruelles et répugnantes que les deux Archidémons avaient faites. Maintenant qu’ils étaient arrivés jusque-là, ils savaient que les choses ne se passeraient plus comme prévu. Après tout, l’influence des Archidémons aurait pu perdurer...

« Allons-y, » déclara Zagan afin d’encourager ses subordonnés. Puis, il s’avança vers la lumière. La vision qu’il avait eue une fois ses yeux ajustés à la luminosité était plutôt choquante...

« Oh, eh bien, si ce n’est pas Zagan. T’es en retard, mec. On en a eu marre d’attendre et on a déjà vidé une bouteille, mon pote. »

Pour une raison inconnue, son ami indésirable buvait effrontément de l’alcool aux côtés de deux femmes.

***

Partie 3

« Qu’est-ce que vous foutez ici ? » Zagan fut stupéfait par la vue qu’il avait devant lui.

Il y avait trois personnes autour d’un feu de camp dans la ville natale de Néphy. Le groupe de Zagan ne pouvait pas dire qu’il était là à cause de la lumière du soleil qui déclinait, car il y avait même de la soupe qui bouillait dessus.

Cependant, le seul de bonne humeur était Barbatos. Les deux autres semblaient au bord des larmes. C’était une atmosphère terrible.

Zagan avait jeté un coup d’œil au village. Contrairement à Kianoides, il n’y avait que quelques douzaines de maisons qui semblaient être construites dans des formations rocheuses naturelles. Les toits étaient tous faits de paille. Au centre du village, il y avait une place dégagée et un puits délabré.

Zagan avait entendu dire que Bifrons avait fait attaquer cet endroit, mais contrairement a ses attentes, les bâtiments avaient été laissés dans un état correct. Il y en avait quelques-uns qui avaient été brûlés, mais l’endroit ne semblait pas avoir été touché.

Il pensait que l’atmosphère serait plus sacrée, mais en fait, c’était comme dans un village normal.

Je me demande où vivait Néphy. Zagan savait que c’était probablement quelque chose dont Néphy ne voulait pas se souvenir, mais il continuait à regarder autour de lui avec impatience.

« Eh bien, tu sais, tu m’as encore abandonné, alors j’ai pensé que je pourrais peut-être t’offrir une bonne surprise. Heeheeheeheehee ! » Barbatos avait pris une gorgée de son verre et avait ri, clairement de bonne humeur.

« ... Comment êtes-vous arrivé avant nous ? » demanda Zagan.

« Franchement, as-tu oublié mon surnom ? Le purgatoire peut atteindre n’importe où, donc tout ce que j’avais à faire était de plonger un tout petit peu et de regarder autour de moi. Gahahahahahaha ! » répondit Barbatos.

J’ai vraiment envie de cogner ce satané ivrogne..., Zagan s’était préparé à se battre contre un autre Archidémon, mais Barbatos ne faisait que s’amuser sans se soucier de rien.

Incapable de résister à la tentation, Zagan avait commencé à le frapper avec son poing. Cependant, Néphy s’était précipitée pour l’arrêter dans la panique.

« Reprenez-vous, Maître Zagan ! Si vous n’arrêtez pas, Sire Barbatos va mourir ! » déclara Néphy.

« ... Ah, désolé, je l’ai frappé par pur réflexe, » répondit Zagan.

L’expression « mon corps a bougé avant même que je m’en rende compte » faisait certainement référence à de telles situations. Zagan avait saisi Barbatos par le col et lui avait enfoncé son poing dans le visage inconsciemment. D’après les blessures qu’il pouvait voir, il semblait avoir frappé Barbatos une bonne dizaine de fois. Les yeux de Barbatos étaient complètement rabattus alors que sa tête tournait en rond.

 

 

Zagan avait mis de côté son ami stupide comme un sac d’ordures quand une fille était arrivée en courant vers eux.

« Néphy, ça va ? J’ai entendu dire que tu traversais quelque chose de terrible dans ta ville natale, euh... Hein ? Attends, tu viens d’arriver ? » demanda la fille.

La fille portait une Armure Sacrée. Elle avait ses beaux cheveux roux, qui ressemblaient à du cuivre poli, attaché sur le côté, et ses yeux écarlates étaient remplis de larmes. Son corps galbé et tonique était agréable à l’œil et son apparence était en ordre, mais tout était ruiné par la façon dont elle se décomposait rapidement en larmes chaque fois qu’ils se rencontraient.

C’était la seule femme parmi les archanges qui portait une Épée Sacrée, la chevalière Bébé Lala Chastille.

Ce n’est pas une mauvaise personne, mais..., en tout cas, c’était une fille dont les traits décevants avaient toujours été les plus remarquables.

« Je vais bien, Chastille, » déclara Néphy.

« Impossible... Ai-je encore mal compris la situation ? » Chastille avait placé sa main sur sa poitrine bombée en vérifiant la sécurité de Néphy, mais avait immédiatement formé une expression de gène sur son visage.

« Ce n’est pas le cas. Te rencontrer ici me soulage un peu, » déclara Néphy.

C’est logique. Voir quelqu’un de plus secoué que vous ne peut que vous aider à vous sentir mieux..., Néphy ne regardait sûrement pas Chastille de la même manière que Zagan, mais il y avait quelque chose qui suintait d’elle et qui stimulait les tendances sadiques de chacun.

« Hmm... ? » Foll avait ouvert les yeux quand elle avait fait ce bruit. Son regard errant s’arrêta sur Néphy et Chastille se tenant la main, ce qui la fit parler d’une voix emplie d’étonnement.

« Je vois Tête de Poneys... Est-ce que... je suis morte ? » demanda Foll.

« Pourquoi serais-tu morte parce que je suis là !? Juste pour que tu le saches, je suis toujours en vie ! » s’écria Chastille.

« Quoi... ? Alors tout ça n’est qu’un rêve ? » Foll s’était endormie une fois de plus, apparemment soulagée par la révélation.

Zagan pencha la tête sur le côté en voyant Chastille au bord des larmes à cause de son humiliation, puis l’interrogea. « Dis-moi, pourquoi es-tu venue ici ? »

« C’est, euh... Cet homme faisait des histoires, disant que Néphy était en détresse, et que cette fille était avec lui, alors j’ai supposé que c’était quelque chose d’important..., » Chastille marmonna en réponse.

Les mots « cette fille » avaient fait que Zagan avait porté son attention sur la fille qui se serrait les genoux contre elle alors qu’elle se réchauffait près du feu.

« Eh bien, c’est un comportement assez standard pour Chastille, mais —, » murmura Zagan.

« Attends ! Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire !? Ah ! Mais ça fait un moment que tu ne m’as pas appelée par mon nom..., » Chastille avait eu la larme à l’œil en disant cela, mais Zagan avait fait semblant de ne pas le remarquer et avait continué à l’interroger.

« Je comprends pourquoi tu es là, mais qu’en est-il de la subordonnée de Bifrons ? » demanda Zagan.

« S’il vous plaît, laissez-moi tranquille. Cette fois-ci, je n’avais vraiment pas l’intention de me frotter à vous tous, » déclara Nephteros d’une voix pleine de haine de soi.

Où était passée l’attitude autoritaire qu’elle avait la dernière fois qu’ils s’étaient rencontrés ? En ce moment, elle berçait ses genoux comme une orpheline affamée et ses yeux semblaient vacants. Elle n’avait pas l’air d’avoir peur, mais Zagan pouvait dire qu’elle était déprimée.

« Elle est comme ça depuis qu’ils sont venus chez moi. Il semble qu’elle ait traversé quelque chose de douloureux... Au moins, elle n’a pas l’air hostile, alors pouvez-vous essayer de lui remonter le moral ? » Chastille chuchota à Zagan et Néphy.

« Que veux-tu que je fasse exactement ? » Zagan était incompétent quand il fallait parler aux gens, et Néphy était dans le même cas. Il n’y avait aucune chance que l’un d’eux puisse lui remonter le moral.

« Mlle Nephteros..., » Néphy avait essayé de l’appeler en premier, mais Gremory l’avait arrêtée.

« Attendez un peu. Je vais vous montrer l’essence du pouvoir de l’amour, ici et maintenant, » proclama Gremory en s’asseyant à côté de Nephteros.

« Keeheeheehee, avez-vous eu une expérience désagréable récemment... ? Je suppose que c’est bien si vous ne voulez pas en parler. Plus important, que diriez-vous d’essayer des sucreries ? Si vous mangez quelque chose de sucré, vous vous sentirez mieux ! » déclara Gremory alors qu’elle avait sorti un sac de bonbons de nulle part. Il y avait beaucoup de boules de chocolat emballées ensemble à l’intérieur.

Il s’agissait très probablement de restes des bonbons qu’elle avait faits la veille.

« Maintenant que j’y pense, n’y avait-il pas une histoire à propos d’une vieille femme qui a poussé une fille à manger une pomme empoisonnée ? » demanda Chastille, alors qu’un sentiment de malaise l’emplissait.

« Je crois que ce dont tu parles est “Blanche-Neige et les sept nains”. Il y a longtemps, je l’ai vu dans un livre d’images que quelqu’un a laissé dans le coin. Mais on m’a pris pour un voleur peu de temps après, » déclara Zagan en se remémorant de ça.

« Je vois. Nous sommes enfin de retour dans ton village natal, Néphy. Il peut être amusant de ressusciter les idiots qui ont osé faire de telles choses et de les forcer à expier, tu ne trouves pas ? » Zagan acquiesça de la tête à son idée.

« Faire venir quelqu’un hors de sa tombe pour quelque chose d’aussi insignifiant, c’est un peu trop... Mis à part cela, Maître Zagan, je suis surprise que vous soyez au courant d’une telle histoire, » déclara Néphy, alors ses oreilles frémissaient pour souligner son point de vue.

« Bien sûr, la pomme était empoisonnée, mais l’histoire d’une fille qui se remplissait le ventre, puis qui s’enrichissait en dormant était quelque chose que j’enviais à l’époque, » déclara Zagan.

« C’est vrai. Même si cela a été empoisonné, il est naturel de manger tout ce qu’on vous donne à manger, » déclara Néphy.

« Arrêtez d’être si bruyants ! Toutes ces histoires tristes me font mal au cœur ! » Gremory leur avait crié dessus d’un ton qui était un mélange de colère et de sympathie.

Malgré la conversation plutôt étrange, Nephteros était leur véritable centre d’intérêt, et ils pouvaient clairement voir le bout de ses longues oreilles frémir quand elle regardait le chocolat. Elle regardait encore le feu d’un regard creux, mais il était évident qu’elle était intéressée par les sucreries.

Est-ce que les oreilles de tous les elfes bougent en fonction de leurs émotions ? Si c’était vraiment le cas, alors Zagan était content qu’ils soient si faciles à comprendre.

Gremory avait avancé son sac de chocolat avec le sourire aux lèvres. Nephteros avait sûrement entendu ce dont Zagan et les autres parlaient il y a quelques instants, mais elle tendait encore sa main pour prendre un morceau de chocolat. Peut-être que son état mental était sur le point de s’effondrer.

C’est exactement comme une fille qui se fait piéger par une vieille femme louche..., Gremory elle-même était très certainement une sorcière suspecte, donc il n’y avait pas d’autre façon d’interpréter la situation.

« ... N’ai-je pas dit de me laisser tranquille ? » Nephteros ne regarda même pas la vieille femme en murmurant ces mots.

« Keeheeheehee, je ne peux pas faire une telle chose quand une jeune femme fait une expression si peinée devant moi. Qu’en dis-tu ? Il n’y a pas de poison ici, je le jure ! » Gremory s’était donnée en spectacle en lui jetant un chocolat dans la bouche.

Voyant que la vieille femme ne bougeait pas d’un pouce, Nephteros leva la tête pour parler.

« ... Après avoir mangé ça, tu me laisseras tranquille, hein ? » déclara Nephteros en mettant à contrecœur une boule de chocolat dans sa bouche.

« C’est doux..., » déclara Nephteros, ses yeux dorés clignotants de surprise.

« Bien sûr que si ! Que dirais-tu d’un autre ? » demanda Gremory.

« Hmm..., » Nephteros avait enfoncé le chocolat dans sa joue avec un visage complètement découragé.

... Elle va vraiment bien ? Le fait de voir son état dépressif avait même stimulé l’instinct protecteur de Zagan. De plus, Néphy et Chastille avaient toutes deux revêtu des expressions tendues.

« A-Attends ! Ne t’ai-je pas dit de me laisser tranquille !? » cria Nephteros. Elle semblait enfin revenue à la raison après avoir avalé des chocolats de Gremory.

« On dirait bien que tu es pleine d’énergie maintenant, » déclara Gremory en acquiesçant d’un signe de tête satisfait quand elle tendit à Nephteros tout le sachet de chocolats.

« Bon sang... ! » Nephteros avait gémi d’irritation, mais elle ne jeta pas le paquet.

Ça ne veut-il pas dire qu’elle s’est rétablie à sa façon ?

L’elfe sombre continua à grommeler ses plaintes alors qu’elle corrigeait sa posture devant le feu de camp. Le fait qu’elle voulait être laissée seule n’avait pas changé, et elle ne regardait toujours pas dans la direction du groupe de Zagan, mais contrairement à avant, elle n’était pas blottie avec des yeux vides.

« Alors, qu’en pensez-vous ? » demanda Gremory alors qu’elle retournait aux côtés de Zagan.

« Comment veux-tu que je réponde à cette question ? » Oui, elle avait réussi à remonter le moral de Nephteros, mais Zagan n’avait aucune idée de l’influence de l’amour sur ses actions.

« Zagan m’a aussi... appâté avec de la nourriture une fois. La soupe de Néphy... était vraiment délicieuse, » murmura Foll, puis commença à se tortiller sur le dos de Zagan.

Es-tu vraiment obligé d’en parler ? Lorsque Foll entra pour la première fois dans son château, Zagan lui donna de la soupe, ce qui la poussa à rester avec lui. Dire qu’elle avait été appâtée avec de la nourriture était tout à fait exact, mais il ne voulait pas vraiment l’admettre.

Zagan regarda avec désinvolture Nephteros pour tenter de se distraire, puis remarqua que les oreilles de la fille commençaient à trembler.

Je suppose qu’elle est irritée qu’on pense qu’elle a été tentée par la nourriture. Elle ne peut pas vraiment se fâcher, puisque ce serait la même chose que de l’admettre..., Zagan avait découvert qu’elle avait un côté charmant et inattendu en elle alors qu’il continuait à la regarder.

« Keeheeheehee, comme je m’y attendais de l’Archidémon en qui j’ai placé mes espoirs ! Je vois que des techniques de ce calibre sont tout simplement naturelles pour vous, » déclara Gremory avec un rire satisfait.

« Qu’est-ce que le fait d’appâter les gens avec de la nourriture a à voir avec le fait de les aimer ? » demanda Zagan.

Les oreilles de Nephteros avaient recommencé à trembler, mais Zagan n’y avait pas prêté attention. Il savait qu’il pourrait lui offrir de la soupe de Néphy plus tard pour se racheter.

« N’ai-je pas dit que je vous montrerais l’essence du pouvoir de l’amour ? » déclara Gremory. Puis elle montra du doigt Nephteros et continua, « Si quelqu’un mange à satiété, alors il pourra mettre son cœur en paix. C’est ce que j’ai fait, mais même sans le pouvoir de l’amour, n’importe qui pourrait accomplir cela. »

« Eh bien, c’est vrai..., » Zagan avait après tout fait la même chose pour Foll. Finalement, il avait fait un signe de tête, ce qui avait fait que Gremory avait poussé son doigt vers lui à plusieurs reprises.

« Alors, répondez à ceci. Quand vous avez vu une petite fille si grincheuse me prendre des sucreries, qu’est-ce que vous avez ressenti ? » demanda Gremory, puis se glissa lentement à côté de Zagan et lui murmura à l’oreille comme une diablesse, « Vous vous sentiez charmés, n’est-ce pas ? »

« Argh..., » le corps de Zagan s’était raffermi quand il avait réalisé que Gremory avait vu à travers lui.

« Qu’avez-vous pensé quand ses yeux se sont ouverts à cause de la douceur du chocolat ? Et quand elle murmura timidement : “C’est doux...” Et puis, à la fin, qu’en est-il de la façon dont elle a essayé de cacher son embarras avec un “Bon sang... ?”, » demanda Gremory.

Elle avait accentué sa voix sur chaque mot comme si elle essayait de poignarder Zagan. Et le feu qui s’en échappait s’abattit sur Nephteros, l’amenant à se mordre les lèvres et à pousser des gémissements amers. En la voyant réagir comme ça, les lèvres de Gremory s’étaient courbées en un grand sourire.

« “Elle a un côté inattendu et mignon...” Je suis sûre que cette pensée vous est venue à l’esprit, » déclara Gremory.

« Argh, je n’ai pas vraiment ressenti —, » commença Zagan.

« C’est bon, » dit Gremory, en le coupant et en continuant, « C’est justement ça, mon Archidémon. Quand vous voyez quelque chose d’adorable, vous vous sentez détendu, n’est-ce pas ? Quelqu’un serait-il offensé d’aimer la vision d’un lapin qui se gratte la tête ? Est-il étrange d’être fasciné par la vue d’une belle fleur ? Cependant, vouloir aimer de telles choses pour toute sa vie est une tout autre histoire. »

Après quelques secondes, Gremory se remit à parler.

« Écoutez-moi, Archidémon, aimez toute la création. Si vous le faites, le monde lui-même deviendra le vôtre ! » Gremory étendit les bras et cria.

Il y avait quelque chose dans ses paroles que Zagan ne pouvait pas rire comme une idiotie.

« Écoutez-moi, Archidémon. Si vous ressentez de l’amour, une fleur sur le bord de la route deviendra un trésor qui surpassera même une montagne d’or. La capacité d’accumuler de tels trésors... c’est le pouvoir de l’amour ! » proclama Gremory avec un sourire suspect bien visible sur son visage.

Zagan ne comprenait pas une seule chose qu’elle disait, mais elle parlait avec une telle ferveur qu’elle avait l’impression de démêler une vérité fondamentale du monde.

« Alors, Mademoiselle Gremory, par hasard... Est-ce la même chose que les palpitations que je ressens dans ma poitrine quand je vois Maître Zagan se faire tant de soucis pour dire une seule phrase correctement ? » demanda Néphy, clairement déconcertée par l’explication de Gremory.

C’est beaucoup trop précis ! Comment me connaît-elle si bien ? Zagan s’était couvert le visage, réussissant à peine à ne pas s’évanouir.

D’un autre côté, Gremory l’avait regardée avec émerveillement avant de répondre.

« Incroyable ! Dire que l’Archidémon est aimé... Non, bien sûr qu’il l’est ! Vous êtes apte à être à ses côtés parce que vous l’aimez. Alors j’ose dire... Voilà le joli pouvoir de l’amour ! » déclara Gremory.

Ensuite, alors qu’elle se tortillait sur le dos de Zagan, Foll leva la main.

« Dans ce cas, la sensation apaisante que j’éprouve quand je vois Zagan mettre Néphy sur ses genoux et la serrer avec force est la même ou non ? » demanda Foll.

« En effet ! C’est comme la façon, dont ce majordome refuse de vous le montrer et vous couvre le visage, qui est aussi un splendide pouvoir de l’amour, » déclara Gremory.

Néphy s’était couvert le visage et s’était accroupie après avoir été frappée par une contre-attaque inattendue.

« Le comprenez-vous maintenant ? L’acte de réconforter une jeune fille pitoyable n’est pas le pouvoir de l’amour, mais le fait de puiser son charme et de percevoir le fait qu’elle soit adorable l’est. Vous avez à la fois le talent et le pouvoir pour cela. Un jour, vous grimperez sûrement vers les hauteurs, même au-delà de moi, » chuchota Gremory à Zagan avec un regard satisfait sur son visage.

Zagan ne pouvait que gémir en se voyant félicité pour quelque chose dont il ne voulait rien avoir à faire.

Si elle était devenue Archidémon à ma place, le monde n’aurait-il pas été dans le chaos ? 

Il avait commencé à regretter qu’un tel sorcier soit sous ses ordres, mais en même temps, il savait que cela aurait été pire si elle avait été laissée en liberté.

À ce moment-là, Nephteros semblait finalement manquer de patience lorsqu’elle s’était levée.

« Vous, la fomorienne là-bas, j’écoute tranquillement depuis un moment, mais vous avez du culot. Arrêtez ça déjà — Eeek ? » Nephteros essayait de faire pression pour qu’elle arrête, mais elle avait soudain poussé un cri à la place. Zagan leva les yeux pour voir ce qui se passait, et avant qu’il ne s’en rende compte, Gremory était passée d’une vieille femme à une jeune et belle femme. Puis, sous cette forme, elle avait commencé à caresser doucement Nephteros.

Elles avaient l’air bizarres ensemble. Nephteros semblait être tombée en arrière, et Gremory l’enlaçait par-derrière et avait fait parcourir son doigt le long du menton de Nephteros.

« Keehee, votre visage en colère est aussi très beau, n’est-ce pas ? Ne me faites pas plaisir de cette façon. Je vais perdre mon calme ! » déclara Gremory.

« Eeek, que faites-vous... ? » s’écria Nephteros.

« Oh, mon Dieu, votre peau est magnifique. Vos yeux dorés et vos cheveux blancs sont aussi splendides. Keehee, allez, est-ce vraiment suffisant pour vous faire rougir ? » demanda Gremory.

« A-Arrêtez-ça... Laissez-moi... Oh..., » supplia Nephteros.

Lorsqu’il s’agissait de la simple puissance d’un sorcier, Nephteros aurait dû être de loin supérieure, mais le fait d’avoir reçu de telles paroles de louanges de sa part l’avait rendue sans force. Sa peau sombre était teintée d’un rouge vif, et la façon dont sa main tremblait d’anxiété sur sa poitrine lui donnait l’air d’une petite fille nerveuse.

« Laissez-moi partir... Je... vous dis... de... me laisser... partir..., » supplia Nephteros.

« Keeheeheehee, vous êtes vraiment innocente, n’est-ce pas ? Si vous voulez me taquiner, je vous guiderai. Allez-y, appelez-moi “ma sœur chérie”, » déclara Gremory.

 

 

À ce moment-là, Zagan se souvient que Gremory détenait le surnom de l’Enchanteresse.

Nephteros se plaignait de l’humiliation de tout cela, mais son attitude de déplaisir s’était finalement transformée en tremblements de défaite. Et puis, juste au moment où elle ouvrait la bouche pour signaler qu’elle avait succombé...

« Aïe ! » Kimaris frappa impitoyablement la tête de Gremory.

« Mademoiselle Gremory, retiens-toi, s’il te plaît, » déclara Kimaris.

« Espèce de... Ne te mets pas sur mon chemin, Kimaris ! Juste un peu plus et cette fille n’aurait pas pu vivre sans moi ! » déclara Gremory.

Pourquoi ai-je encore amené quelqu’un comme elle... ? Oh, c’est vrai, elle s’est invitée d’elle-même.

Après avoir vu une telle conduite trompeuse, Zagan s’était vu rappeler une fois de plus à quel point Raphaël était loyal et capable.

L’attention de Gremory étant détournée, Nephteros fut libérée de ses bras. Cependant, comme elle avait complètement perdu toute force dans ses jambes, il ne semblait pas qu’elle pouvait se tenir debout.

« Je dois m’excuser auprès de vous aussi, Mademoiselle Nephteros. Une fois qu’elle devient comme ça, c’est difficile de la contrôler..., » Kimaris s’était excusé au nom de Gremory quand il l’avait attrapée avec son bras duveteux. Après l’avoir stabilisée, Kimaris avait fait s’asseoir Nephteros. Puis il avait saisi Gremory par la nuque et la souleva.

Nephteros avait utilisé cette ouverture pour s’éloigner de Gremory et se cacher derrière Zagan. Elle avait même traversé le sol à quatre pattes pour s’enfuir le plus vite possible. Franchement, le spectacle était pitoyable. Se sentant mal à ce sujet, Zagan avait ouvert la bouche pour lui parler.

« Ah... Désolé que la vieille sorcière t’ait embêté, » déclara Zagan.

« Non... Il semble que vous ayez aussi traversé beaucoup de choses, Archidémon Zagan, » répondit Nephteros.

« Ce n’est pas comme ça d’habitude, je le jure..., » Néphy répondit à Nephteros d’une voix lasse. C’est à ce moment-là qu’un étrange sens de camaraderie était né entre eux trois.

D’un autre côté, Gremory et Kimaris s’engueulaient toujours.

« Lâche-moi ! Laisse-moi partir ! » cria Gremory.

« Je le ferai, alors aide-moi à préparer le dîner. Le soleil est déjà couché, et il fera nuit noire d’ici peu, » déclara Kimaris.

Le soleil s’était couché pendant que Gremory déconnait. En entendant ses mots, tout le monde en arriva à la conclusion qu’il était temps de commencer à placer des tentes et à préparer le dîner, mais Chastille fit entendre une voix agitée pour les arrêter.

« Attendez, Barbatos ne bouge plus du tout ! » déclara Chastille.

Zagan pensait qu’ils étaient tous les deux étrangement silencieux, donc c’était logique. Chastille s’occupait de Barbatos, qui ne s’était toujours pas réveillé. La vue fit soudain rappeler à Zagan un certain doute qu’il avait en tête.

« Je me fiche de Barbatos, mais est-ce bien de ne pas lui montrer de l’amour ? » demanda Zagan à Gremory.

« Où est le plaisir de montrer de l’amour à une pleurnicharde qui est favorisé par tout le monde avec peu d’efforts ? En plus, croyez-vous vraiment que j’aimerais un jour une Chevalière Angélique ? » demanda Gremory.

Chastille était restée sans voix à cause de ces mots durs.

***

Partie 4

Le groupe de Zagan avait choisi de dormir dans une maison particulièrement grande qui était encore debout. L’ameublement en argent avait fait apparaître clairement qu’une sorte de noble y vivait autrefois. Cela dit, la manière dont la maison avait été construite était la même que celle des autres maisons, et bien que le plancher soit composé de planches de bois, les murs étaient simplement faits de pierres empilées les unes sur les autres. La mousse poussait le long d’eux, donnant l’impression qu’ils restaient dans une grotte. Malgré tout, y compris le sous-sol, il y avait assez de place pour plus de dix personnes, ce qui était suffisant pour eux.

Zagan avait tenu sa main contre un chandelier d’argent sur le mur, puis avait rassemblé son mana et l’avait allumée. C’était un pouvoir fondamental qu’on ne pouvait même pas vraiment appeler de la sorcellerie.

« Alors c’est... c’est la maison du chef de ces elfes... est-ce bien ça ? » murmura Zagan en regardant le couloir maintenant coloré.

« Oui. C’est le manoir des anciens. Bien que... c’est la première fois que je vienne ici..., » Néphy acquiesça d’un signe de tête quand elle répondit à la question de Zagan.

C’est donc le meilleur endroit pour chercher des indices sur le mysticisme céleste ou les hauts elfes, malheureusement, ils avaient gaspillé toute leur lumière du soleil à cause de Gremory, alors ils avaient dû attendre pour chercher à l’extérieur. Sans autre choix, Zagan, Néphy, Chastille et Nephteros errèrent lentement dans la maison.

« Pourquoi suis-je ici... ? » Nephteros avait prononcé des mots d’insatisfaction. Elle avait été entraînée là-dedans et n’avait aucun moyen de rentrer chez elle toute seule. À cause de cela, elle coopérait à contrecœur avec Zagan.

« Tu peux attendre dans la cuisine avec Foll si tu préfères, » déclara Zagan.

Gremory et Kimaris avaient accepté de s’occuper du souper afin d’assumer la responsabilité du tumulte qui s’était produit plus tôt. Foll faisait une pause dans la cuisine, en mangeant quelques douceurs en attendant. Et comme Barbatos ne se réveillait pas, ils l’avaient jeté dans la première pièce qu’ils avaient pu trouver et l’avaient laissé pourrir.

« Non, ce n’est pas comme si tout ça était mauvais. D’ailleurs, ce serait ennuyeux de rester assise et de ne rien faire, » répondit Nephteros, tremblant en réponse à la question de Zagan. Il semblait que la terreur de Gremory qui se jouait d’elle n’était pas si facile à oublier. Honnêtement, Zagan avait l’impression qu’elle disait « pour l’amour de Dieu, n’importe où sauf dans la cuisine ».

« Eh bien, détends-toi. Bien sûr, Bifrons me tape sur les nerfs, mais je ne t’en tiendrai pas rigueur. Je m’occuperai de toi jusqu’à notre retour, » déclara Zagan en haussant les épaules.

Barbatos était fautif pour sa situation difficile actuelle, mais en tant qu’Archidémon, Zagan avait pensé qu’il valait mieux être au moins un peu généreux.

« À propos de Maître Bifrons... Euh..., » les oreilles sombres de Nephteros frémissaient pendant qu’elle pendait sa tête.

Zagan n’avait pas été en mesure de saisir ce qu’elle avait dit au-delà de ses paroles initiales. Il pencha la tête sur le côté dans la confusion, dans l’intention de lui demander de parler plus fort, mais Chastille parla en premier.

« Quel bâtiment étrange ! J’ai l’impression que l’aura de mon Épée Sacrée est en train de s’amplifier rien qu’en étant ici..., » déclara Chastille en touchant les murs autour d’elle.

« Es-tu sûre de ça ? » Les yeux de Zagan s’étaient élargis en entendant quelque chose de si inattendu.

« On dirait que Norden est une terre sacrée. Même les cathédrales de l’église sont loin d’être aussi propres spirituellement..., » proclama Chastille, la poitrine pleine de fierté. Il semblait que l’énergie que possédaient les Épées Sacrées, semblable au mana, s’appelait « aura ».

« Je suis sûre que je pourrai puiser le vrai pouvoir de mon Épée Sacrée dans cet endroit. Et cette fois-ci, je porte mon Armure Sacrée, donc je n’aurai peur d’aucun ennemi ! » proclama Chastille, hochant la tête à plusieurs reprises tout en admirant l’endroit pendant tout ce temps.

« Les ennemis les plus probables ici ne seraient-ils pas les fantômes des elfes dont nous utilisons les lits ? » demanda Nephteros.

« Eeek, les fantômes !? » Chastille hurla, devenant complètement pâle en un éclair.

« J’espère vraiment que ce n’est pas vrai... mais... as-tu peur des fantômes ? » demanda Zagan d’une voix exaspérée.

« Ce sont des morts qui sortent de nulle part ! » s’écria Chastille.

« Faire face aux fantômes et aux morts-vivants ne fait-il pas partie de ton travail en tant que Chevalier Angélique ? » demanda Zagan.

L’Église ne s’était pas seulement battue contre des sorciers. C’était aussi leur travail de répondre aux préoccupations et aux griefs de leurs fidèles. Et comme les sorciers asservissaient souvent les fantômes et les morts-vivants, les Chevaliers Angéliques devaient aller les combattre.

Pour un Archange entre toutes autres personnes, d’avoir peur des fantômes... Comme c’est pathétique. Chastille n’avait pas pu cacher ses mains tremblantes pendant qu’elle répondait à sa question.

« Un travail est un travail, mais les choses effrayantes font peur. Qu’est-ce qu’il y a de mal à ça ? » demanda Chastille.

Même Nephteros avait été déçue par cette réponse.

« ... N’as-tu même pas une notion de respect de soi ou d’orgueil ? » demanda Zagan.

« Je crois qu’être trop fière est la recette du désastre, » répliqua Chastille.

Eh bien, ça lui allait bien, pour elle, la petite pleurnicheuse et docile. En vérité, Zagan était vraiment curieux de savoir comment une telle personne était devenue Chevalier Angélique.

Oh, c’est vrai, elle a été choisie par son Épée Sacrée. Son sens des responsabilités était fort et elle était probablement incapable de se libérer de son fardeau en dépit d’un meilleur jugement. Peut-être Gremory avait-elle dit qu’il n’y avait « pas besoin de lui montrer de l’amour » en raison de ses fortes convictions.

« Est-ce que c’est si... ? » Nephteros hésita dans sa réponse. Il semblait que la réponse plutôt digne de Chastille l’avait laissée perplexe. Son ton montrait qu’elle n’était pas sûre de comprendre son point de vue ou de le mépriser.

Cette fille... On dirait qu’elle est mauvaise pour faire face aux réponses inattendues, hein ? En y repensant, elle avait été assez secouée quand Zagan n’avait pas été du tout trompé par ses agissements envers Néphy. Après avoir pris cela en considération, Zagan était certain que son attitude arrogante n’était qu’un acte. Et avec cela à l’esprit, il était clair que Nephteros était tout à fait adorable.

C’est mauvais, ça. J’ai trop pensé à l’amour à cause de Gremory. Elle était vraiment terrifiante. Gremory avait même réussi à infecter le Zagan toujours aussi apathique...

« Maintenant que j’y pense, il me semble que tu ne peux pas vraiment gérer Foll, n’est-ce pas ? » Zagan marmonna à Chastille alors qu’elle se ressaisissait.

« Ce n’est pas comme si je la détestais ou quoi que ce soit, ok ? C’est juste que chaque fois que je la rencontre, elle me fait une farce..., » répondit Chastille.

« Mais son surnom est Apparition..., » déclara Zagan.

« Eeek ! »

Quand Foll se faisait passer pour Valefor, elle portait une armure digne d’un géant. En raison de sa petite taille, l’intérieur était en grande partie vacant, ce qui l’avait aidée à gagner son surnom.

« Je vois... C’est pourquoi elle est si douée pour cibler mes faiblesses..., » déclara Chastille alors qu’elle avait pâli et s’était mise à trembler.

Peut-être qu’il aurait mieux valu ne pas en parler..., pour le moment, Zagan décida de surveiller Chastille attentivement pendant qu’il continuait à vérifier l’état de la maison.

« On dirait qu’il n’y a pas de pièges faits de sorcellerie ici, » annonça Zagan.

Les elfes évitaient les conflits quand c’était possible, mais chacun d’eux possédait une quantité extraordinaire de mana. C’est pourquoi Zagan avait supposé qu’ils avaient installé des pièges pour se protéger et protéger leurs secrets. Cependant, curieusement, il n’avait pas réussi à trouver quoi que ce soit de ce genre.

« Je n’ai jamais vu les habitants de mon village utiliser la sorcellerie. Peut-être que j’ai tort, et qu’ils me le cachaient, mais je ne pense pas que quelqu’un savait comment le faire, » déclara Néphy avec des yeux baissés.

Outre la sorcellerie, il y avait aussi le pouvoir du mysticisme, mais seuls de hauts elfes comme Néphy et Nephteros pouvaient l’exercer.

« Vraiment ? Mais comment se sont-ils défendus ? Ce n’est pas comme s’ils avaient pu éviter tous les monstres ici, » déclara Zagan.

Les monstres étaient des créatures vivantes qui possédaient du mana et différaient grandement en apparence des humains et des animaux. Parmi eux, il y en avait qui pouvaient même comprendre la parole humaine, et on disait que ceux-là étaient étroitement liés aux démons. Cependant, tout ce qu’ils possédaient, c’était une envie de destruction et de faim, de sorte qu’il n’y avait aucun moyen de les réfréner.

Leur population s’était amincie autour de la ville de Kianoides, mais les monstres attaquaient naturellement tout autour d’eux, et les elfes ne faisaient pas exception. Il avait été dit que de tels êtres peuplaient même les zones que les humains du nord ne pouvaient pas atteindre.

Au lieu de répondre à cette question, Néphy avait simplement ouvert une porte à proximité. Il semblait qu’il menait à un salon avec une grande table entourée de sièges en pierre. Malheureusement, tous les sièges étaient maintenant recouverts de mousse. Ce n’était évidemment pas un entrepôt, mais ça puait encore la boue. Et à y regarder de plus près, l’odeur n’était pas si surprenante, car les sièges en pierre sortaient du sol. Il semblait que les pierres avaient été enterrées directement dans le sol.

Il s’agissait d’une sorte de barrière... Ou bien, c’était peut-être un moyen de créer l’aura spirituelle que Chastille avait mentionnée.

Les fissures rampaient entre les planches. Même Zagan, dont le château était jadis rempli d’appareils de torture et de squelettes, avait du mal à croire que des gens y aient réellement vécu. Et sur un mur dans cette pièce... il y avait un seul arc.

« Tout le monde utilisait un arc comme ça quand il était temps de chasser, » déclara Néphy en levant l’arc.

Zagan avait laissé échapper un « Hm » d’admiration comme il l’avait déjà fait plusieurs fois au cours de la journée. Le corps principal de l’arc était en bois, mais il y avait des ornements en argent. Il semblait très utile, mais...

« Ces symboles sont en Célestian, n’est-ce pas ? » Zagan avait repéré des symboles similaires à ceux d’une Épée Sacrée sur le manche.

« Oui. Je ne comprends pas très bien ce que cela signifie, mais il est écrit Exousiai..., » répondit Néphy d’un signe de tête.

« Ça veut dire “Le fléau du mal”. C’est un charme qui éloigne les mauvais esprits, » déclara Nephteros en rentrant dans leur discussion.

« ... Vas-tu nous aider ? » demanda Zagan, clairement confus.

« Êtes-vous sûre que c’est bon que vous nous le disiez ? » demanda Néphy.

« ... Ce n’est pas comme si Maître Bifrons m’avait donné l’ordre de me taire. Et vous repartirez dès que vous aurez fini d’enquêter sur cet endroit, n’est-ce pas ? Dans ce cas, je rentrerai plus vite à la maison si je vous aide, » affirma Nephteros avec arrogance. Cependant, ses oreilles qui se tortillent et se balançaient lui avaient révélé ses vraies intentions.

Cette fille est très facile à comprendre...

« Y a-t-il un problème ? » Nephteros fixa Zagan en réponse à son regard observateur.

« On dirait que je suis le seul que tu traites froidement. N’en as-tu pas marre de ça ? » demanda Zagan.

« Hein ? Est-ce vraiment le cas ? » Nephteros semblait ignorer son propre comportement.

« On aurait dit que tu agissais d’une manière beaucoup plus décontractée avec Néphy et Gremory..., » déclara Zagan.

« Vous avez peut-être raison. Mais je n’en avais pas vraiment conscience. C’est juste que..., » déclara Nephteros.

« Quoi ? » demanda Zagan.

« Vous êtes... un Archidémon, » déclara Nephteros.

Est-ce que ça voulait dire qu’elle devait lui rendre hommage ? Ou peut-être qu’elle le craignait ? Pour une raison ou une autre, cette pensée le dérangeait.

« Je ne suis pas ton maître. Je ne dis pas de corriger ton ton, mais tu es une invitée. Il n’y a pas besoin de se fatiguer en traitant ainsi avec moi... pour l’instant, » remarqua Zagan en haussant les épaules vers elle pendant qu’il parlait. C’était une tout autre histoire quand elle était la servante de Bifrons, mais pour le moment, elle n’était qu’une invitée qui avait été entraînée dans les affaires de Zagan. Vu les circonstances, c’était sa responsabilité de bien la traiter. Et après l’avoir informée de ses réflexions sur le sujet, Nephteros se détendit un peu.

« Je comprends... Alors, je vais parler d’une manière un peu plus décontractée, » déclara Nephteros.

« Ça m’a l’air bien, » déclara Zagan.

Les oreilles de Néphy frémirent joyeusement lorsqu’elle entendit leur échange. Voyant cela, Nephteros lui répondit en aboyant ses prochains mots.

« Quoi ? As-tu des plaintes à formuler ? » demanda Nephteros.

« Pas du tout ! Merci beaucoup, Mademoiselle Nephteros. Avoir quelqu’un qui comprend le Celestian est d’une grande aide. Je compte sur vous, » déclara Néphy.

« Ça ne me rend pas heureuse du tout ! » Nephteros nia tout sentiment de joie, mais ses oreilles tremblantes lui donnèrent une fois de plus l’impression de ne pas dire ses vrais sentiments.

C’est comme une rivalité entre frères et sœurs ou quelque chose du genre..., Nephteros avait déjà essayé de faire du mal à Néphy, mais Néphy avait mis cela de côté et essayait de l’accepter. Se battre et se réconcilier par la suite, c’était de la rivalité entre frères et sœurs. Cette vue avait soudain fait que Zagan s’était souvenu de quelque chose.

« Je veux la sauver. Et puis, je veux lui apprendre en tant qu’aînée... » Quand Nephteros chantait son mysticisme céleste, ses souvenirs affluaient dans Zagan. C’est pourquoi il savait qu’elle ne détestait pas du tout Néphy. En fait, elle avait même voulu sauver Néphy après avoir vu comment les habitants de son village la traitaient. Ses réactions actuelles lui avaient fait croire que ces sentiments étaient encore en elle. Non, c’était peut-être mieux de dire que ces sentiments avaient été ravivés après tout le temps qu’elles avaient passé ensemble.

« Il s’agit probablement d’une arme construite sur les mêmes concepts qu’une Épée Sacrée... Bien qu’en comparaison, cela fonctionne beaucoup plus comme un jouet. Le simple fait de tirer la ficelle permettra à n’importe qui de tirer une flèche en mana. Eh bien, s’ils peuvent vraiment utiliser le mana, de toute façon. »

« Je vois. L’arc lui-même doit être très ancien, alors..., » commente Zagan.

« Je pense que tu as raison. Cela n’a probablement pas été fait par les habitants de ce village. Je dirais que c’est d’un âge où les hauts elfes comme moi et... cette fille ici présente étaient encore communs, » déclara Nephteros.

« Est-ce quelque chose de valeur ? » Néphy pencha la tête sur le côté quand elle posa cette question.

« Je dirais que les mots “arme légendaire” correspondent le mieux. Si l’Église mettait la main dessus, ils l’inscriraient probablement comme un nouveau trésor sacré ou quelque chose comme ça, » répondit Zagan.

« Euh, ça ne le mettrait pas au même niveau que les Épées Sacrées ? » demanda Chastille. Leur découverte semblait l’avoir étonné.

« Ce n’est pas tout à fait à ce niveau, mais ce n’est probablement qu’un pas en dessous. Au moins, c’est beaucoup plus puissant que ton Armure Sacrée, » déclara Zagan.

Les épaules de Chastille se baissèrent.

« Argh, je suis enfin arrivée complètement équipée et ça arrive..., » déclara Chastille.

Il était logique qu’un village elfique caché ait des artefacts si puissants qui traîneraient dans la zone. Quoi qu’il en soit, Nephteros semblait très fière d’avoir élucidé le mystère. Même l’hostilité qu’elle pointait habituellement vers Néphy s’était calmée.

Peut-être que je m’inquiète trop... C’était peut-être déraisonnable à l’heure actuelle, mais peut-être qu’un jour viendra où elles pourront passer du temps ensemble avec bonheur.

Après avoir regardé fixement le corps de l’arc pendant un moment, Chastille fit un signe de tête admiratif et prit la parole. « Si je me souviens bien, les légendes disent que les elfes sont les maîtres de l’arc. C’est une race qui a une grande quantité de mana innée, alors peut-être que ce type d’arme leur convient mieux. »

« ... Merci pour l’explication. Crois-tu que tu puisses t’éloigner un peu plus de moi ? » demanda Nephteros. En un rien de temps, Chastille avait commencé à s’accrocher à l’ourlet de son manteau.

« Mais la pièce là-bas est si sombre ! Je n’arrête pas de penser que quelque chose va sortir de là soudainement, alors j’ai juste..., » répondit Chastille.

« Es-tu vraiment une Archange ? Tu dis que l’Église te place au même niveau que ce majordome ? » Nephteros semblait vraiment étonnée par ce fait. Cependant, elle ne s’était pas débarrassée de la main de Chastille malgré son dédain plutôt évident. Au lieu de cela, elle avait simplement rendu l’arc à Néphy, puis elle était partie.

« Dites-moi, combien de temps comptez-vous rester là ? On doit finir de regarder dans toutes les pièces avant que les autres finissent de préparer le dîner. Vous en souvenez-vous ? » demanda Nephteros.

« A-A-A-A-A-A-Attendez moi ! » cria Chastille.

Nephteros marchait devant le groupe avec Chastille toujours accrochée à elle.

Zagan et Néphy avaient échangé des regards confus avant de les suivre avec des sourires légèrement amers bien visibles sur leur visage.

***

Partie 5

« Même un endroit aussi délabré contient de l’alcool, hein ? » Zagan poussa un soupir d’admiration en buvant du vin d’une bouteille qu’il avait trouvée dans la cave. Cela semblait être un vin assez bien vieilli, et sa maturité raffinée emplissait toute sa langue.

Il était actuellement dans l’une des chambres du manoir des anciens du village. Elle était assez vide, avec seulement une table d’appoint simple à côté d’un cadre de lit en bois et une petite étagère avec plusieurs livres écrits à la main doublant chaque rangée. Après les avoir parcourues, il s’était vite rendu compte qu’il s’agissait de journaux écrits dans la langue des elfes.

Le lit était rempli de paille au lieu de coton. Zagan avait essayé de s’y asseoir, et il avait trouvé ça très agréable. Habituellement, il dormait sur son trône, donc dormir sur le dos était un bon changement de rythme. De plus, c’était la première fois que la chambre de Néphy était complètement séparée de la sienne, ce qui lui permettait de se détendre davantage. Quand on regarde au château, la chambre de Néphy était directement au-dessus de la salle du trône. Cela signifiait qu’elle devait traverser la salle du trône pour se rendre dans n’importe lequel des espaces communs, de sorte qu’il devait être prêt à la rencontrer à tout moment.

Zagan se souvient de ce qui s’était passé pendant le dîner alors qu’il s’asseyait là et s’adonnait au vin. En fin de compte, il n’y avait pas de pièges dans le manoir qui utilisaient la sorcellerie ou le mysticisme. Après être retournés se réunir de nouveau avec le reste de leur groupe, les membres de l’équipe de recherche avaient trouvé le dîner qui leur avait été servi dans l’une des grandes pièces du manoir. L’équipe de cuisine avait réussi à préparer un bon dîner avec les ingrédients qui restaient dans la cuisine. Mais comme Foll avait décidé d’« aider » aux préparatifs, il restait à peine assez de nourriture pour remplir les ventres de tout le monde.

Gremory avait encore joué avec Nephteros pendant qu’ils mangeaient. Zagan ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle l’avait fait exprès pour soulager l’esprit de Néphy.

« Néphy... avait l’air assez perplexe, » déclara Zagan en soupirant tout en regardant le liquide rouge vif dans son verre.

Son visage... ou plutôt, ses oreilles lui avaient dit qu’elle ne savait pas vraiment comment réagir, et cela l’inquiétait beaucoup plus que l’état de sa ville natale. Il semblerait que Gremory et Kimaris aient également compris sa situation difficile. C’était assez surprenant, car ils ne la connaissaient que depuis peu.

Zagan était, bien sûr, inquiet pour elle, mais il savait que c’était irritant de demander à quelqu’un s’il allait bien alors qu’il ne l’était manifestement pas. À cause de tout cela, leur repas s’était terminé sans que Zagan ait eu un mot à dire. Et après ça, ils s’étaient tous séparés et étaient allés se reposer dans leurs chambres. Pour le meilleur ou pour le pire, l’endroit avait plus de huit chambres à coucher, alors chacun avait la sienne.

Chastille, étonnamment, avait fini par prendre le dîner pour Barbatos. Cet ami indésirable de Zagan ne s’était pas encore réveillé au moment du dîner. Peut-être l’avait-il frappé un peu trop fort.

« Cet homme est peut-être une vraie ordure, mais il a aussi un bon côté qu’il montre de temps en temps. Bien sûr, je suis coincée ici à cause de ses bouffonneries, mais j’ai pu vous rencontrer toi et Néphy grâce à ça, » avait dit Chastille. Barbatos avait protégé Chastille sous les ordres de Zagan, donc il avait lui aussi sa part de responsabilité. Mais il était surpris que Chastille ait cessé de le haïr.

Barbatos n’a plus non plus l’air si dérangé par ça..., eh bien, tout bien considéré, c’était probablement un bon signe.

« Plus important encore, Néphy..., » Zagan avait enfin sa propre chambre, mais tout ce qu’il voulait, c’était parler à Néphy. Malheureusement, il ne savait pas quoi dire quand Néphy était si clairement bouleversée. De plus, il y avait aussi le fait qu’elle voulait probablement qu’on la laisse seule, mais à quoi bon l’inviter, dans ce cas-là ?

« ... Comme c’est ridicule. Je n’ai aucune raison de m’inquiéter, n’est-ce pas ? » Zagan secoua la tête en essayant de se vider l’esprit après s’être inquiété de ces pensées pendant plus d’une demi-heure. Puis, il avait pris la bouteille de vin à la main et se leva.

Si je ne trouve rien à dire, je resterai à ses côtés ! Zagan et Néphy étaient tous deux terribles pour exprimer leurs sentiments par des mots. C’est pourquoi ils se blottissaient habituellement l’un contre l’autre lorsqu’ils étaient troublés. Pourquoi avait-il hésité alors que la réponse était si évidente ?

Oh, il y a quelqu’un ici..., il ne s’en rendait pas compte parce qu’il était perdu dans ses pensées, mais il y avait quelqu’un qui faisait les cent pas devant sa porte. Après avoir fait plusieurs pas vers la droite, il avait fait demi-tour et avait marché vers la gauche. Zagan pouvait dire qu’il répétait ce cycle depuis un certain temps déjà.

Néphy... Non, ce ne sont pas ses pas..., Néphy prenait toujours grand soin de marcher en silence, alors Zagan l’aurait su tout de suite si c’était elle. Pourtant, de tels pas si légers n’appartenaient certainement pas non plus à Kimaris ou à Barbatos, ce qui signifiait qu’il s’agissait probablement d’une femme. Cela dit, ils n’étaient pas assez légers pour être ceux de Foll ou assez fort pour être ceux de Chastille. Peut-être, Gremory pouvait correspondre, car elle pouvait transformer son corps comme elle le voulait, mais elle n’était pas non plus très docile. Dans cette affaire, la seule suspecte restant était...

« Que fais-tu ici... ? Nephteros !? » demanda Zagan.

« Ahh !? » Nephteros s’était complètement raidie, avec un regard de surprise présente sur son visage, quand Zagan ouvrit sa porte.

Voir cette expression sur quelqu’un qui a le même visage que Néphy est plutôt rafraîchissant..., quoi qu’il arrive, Néphy ne ferait jamais ce genre de tête. La bouche de Nephteros s’était ouverte et fermée pendant un certain temps, car elle était incapable de dire quoi que ce soit, mais finalement, elle avait brossé ses cheveux argentés en arrière dans une tentative de maintenir les apparences.

« Je passais juste par hasard, » répondit Nephteros.

« Oh, c’est gentil..., » Zagan avait décidé d’épargner sa dignité et de la laisser mentir. Et bien que Nephteros ait détourné son visage, il pouvait dire qu’elle avait quelques affaires avec lui de la façon dont elle lui jetait des regards fugaces.

Je veux aller à Néphy tout de suite..., Zagan voulait se débarrasser de Nephteros, mais il avait décidé de la traiter comme une invitée plus tôt, et une invitée méritait un peu de courtoisie. Sans autre choix, Zagan avait essayé d’aller droit au but.

« Veux-tu quelque chose ? » demanda Zagan.

« Euh, eh bien..., » Nephteros grimaça et se mit à marmonner. La question semblait l’avoir mise dans tous ses états.

Quelle fille gênante... ! comme l’exhorter n’avait rien fait pour améliorer sa situation, Zagan fixa simplement Nephteros du regard et attendit qu’elle réponde. Finalement, elle avait semblé réaliser qu’il attendait qu’elle agisse. Et puis, elle avait tendu ce qu’elle portait dans ses bras, avec un regard contradictoire sur son visage.

« Je suis venu te rendre ton manteau, » déclara Nephteros.

« Mon manteau ? » Zagan se souvenait de ce qu’elle disait quand les mots sortaient de sa bouche.

Maintenant que j’y pense, je lui ai donné ça quand elle a perdu ses vêtements sur le bateau, non ? Zagan avait sauvé Nephteros quand elle avait été transformée en monstre par les pensées résiduelles du Seigneur Démon. Et à cette époque, il lui avait prêté le manteau en question.

« C’est bizarre. Es-tu venue jusqu’ici juste pour le rendre ? » demanda Zagan.

« N’est-ce pas toi qui m’as dit que je devais le rendre moi-même ? » demanda Nephteros.

« L’ai-je fait ? » Zagan se concentrait à l’époque sur la préparation de son « cadeau » à Bifrons, donc il ne se souvenait pas vraiment de ce qu’il disait. En tout cas, elle l’avait amené jusqu’à lui. Il se devait de l’accepter gracieusement.

« Hm ? C’était toujours aussi... joli ? » Néphy l’avait réparée plusieurs fois, mais le tissu était assez vieux. De plus, il se souvenait qu’il avait été lourdement endommagé lors de sa bataille contre le Seigneur Démon de la Boue. Et, comme Zagan inclinait la tête sur le côté en raison de la confusion, Nephteros détourna son regard de lui. Le bout de ses oreilles commençait à rougir.

« Le fait de réparer des vêtements en lambeaux, c’est le moins que je puisse faire, » déclara Nephteros.

« L’as-tu réparé pour moi ? Bon travail, » dit Zagan en essayant le manteau, avec un sourire tendu sur son visage.

« Wôw, pas mal. Si tu en as assez de Bifrons, viens dans mon château. Il y a toute une montagne de travail qui attend, » déclara Zagan.

« ... Me prends-tu pour une blanchisseuse ? » demanda Nephteros.

« Non, tu en sais aussi beaucoup sur le mysticisme céleste, donc tu serais bien plus que ça, » déclara Zagan.

« Eh bien, j’y réfléchirai, » répondit Nephteros, comme si elle ne détestait pas entièrement l’idée. Dans tous les cas, Zagan ne pouvait sentir aucun enthousiasme ou mépris dans ses paroles.

« Je suppose que les choses vont bien avec Bifrons ? » demanda Zagan.

« Je me le demande..., » Nephteros avait sorti un morceau de papier du manteau en disant ça. À première vue, il semble que ce soit l’invitation que Bifrons eût envoyée à Zagan, mais il y avait un mécanisme unique qui y était intégré. C’était quelque chose qui faisait surgir un poing de mana sur Bifrons chaque fois qu’ils mettaient Nephteros en colère.

« Oh, ouais. Permets-moi de te remercier pour cette petite babiole. Cela a enseigné à Maître Bifrons l’importance d’un espace personnel, » déclara Nephteros.

« Ça, c’est inattendu. Es-tu sûre qu’il a retenu la leçon ? Ce n’est pas vraiment le genre d’apprentissage..., » déclara Zagan.

« La tête de Maître Bifrons a déjà été explosée plusieurs fois. C’est comme on dit : la peur est un puissant facteur de motivation, » affirma Nephteros en secouant la tête, exaspérée.

« Hmmmm..., » Zagan ne s’attendait pas à cette réponse.

Bifrons ne pouvait toujours pas se défendre ? Bifrons était un Archidémon. Bien sûr, Zagan avait mis en place un piège assez complexe, mais quelqu’un d’aussi puissant aurait déjà dû le surmonter. En plus, il aurait pu confisquer la lettre si c’était vraiment le cas. Le fait que Bifrons ne l’avait pas déjà fait signifiait qu’il voulait qu’il soit en place. Peut-être que Bifrons avait-il réellement appris « l’importance de l’espace personnel », comme le disait Nephteros.

... Bien qu’il soit aussi possible que Bifrons ait eu un fétiche bizarre.

« Eh bien, c’est une chance, n’est-ce pas ? La prochaine fois, je prendrai des mesures pour t’empêcher d’être utilisée comme cobaye, » déclara Zagan, avec un sourire fugace sur son visage.

Nephteros s’était raidie puis elle le fixa avec émerveillement. Elle était rapidement devenue rouge vif et s’était cachée dans l’embarras.

« Ce ne sont pas tes affaires. Vraiment, je suis surprise que tu sois si... je veux dire, je suis surprise que tu sois si hospitalier. C’est moi qui ai essayé de faire du mal à Néphy, tu t’en souviens ? » demanda Nephteros.

« Néphy et moi n’avons pas le temps de nous attarder sur une gosse qui fait une crise de colère, » déclara Zagan. Il avait l’air prêt à éclater de rire.

« Une gosse ? Je ne sais pas quel âge tu as, mais je suis plus vielle que Néphélia, compris ? » demanda Nephteros.

« Je vois, » marmonna Zagan d’un signe de tête, puis il continua, « Maintenant que j’y pense, quel âge as-tu ? » Zagan savait que c’était impoli de demander son âge à une dame, mais il n’était pas du genre à être lié par les normes sociales.

« J’ai... j’ai... Hein ? Je... ai... ? » Nephteros avait été intimidée par sa question plutôt directe. Elle avait commencé à bercer sa tête, clairement confuse et incapable de trouver une réponse.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Zagan.

« Non... Ce n’est... rien, » affirmait Nephteros avant de se retourner contre Zagan.

« Plus important encore, même si tu es un Archidémon, tu devrais savoir qu’il est impoli de demander son âge à une dame, » déclara Nephteros.

« C’est toi qui as abordé le sujet. Je ne m’intéresse pas à ton âge..., » répondit Zagan en levant les deux mains pour se rendre.

« Hmph..., » les cheveux d’argent de Nephteros se balançaient pendant qu’elle se moquait de lui et marchait dans le couloir.

« Ce n’est pas possible... Ne connaît-elle pas son âge ? » Zagan se le murmura à lui-même. C’était mauvais signe.

Zagan était resté figé sur place, craignant le pire, pendant un bon moment après cet échange.

***

Partie 6

« ... Je n’arrive... pas à dormir, » marmonna Néphy d’un ton perplexe pour la millionième fois cette nuit-là. Elle avait obtenu sa propre chambre, mais n’arrivait pas à dormir à cause de toutes les pensées qui lui traversaient l’esprit.

« ... Maître Zagan, » Néphy l’appela désespérément. Cependant, ce n’était pas son château. Il avait son propre lit pour une fois, donc il dormait probablement profondément.

Est-ce hors de question de dormir dans le même lit que lui ? Cela le dérangerait-il ? Il lui avait permis de s’asseoir sur ses genoux à plusieurs reprises, mais ils n’avaient dormi que deux fois dans les bras l’un de l’autre. Il y avait eu la soirée où Zagan avait acheté Néphy, et la nuit où Zagan lui avait révélé son passé.

De temps en temps, Néphy découvrait que son lit était froid. Et chaque fois que cela arrivait, elle priait pour dormir sous les mêmes couvertures que lui afin de se coller contre son corps chaud et réconfortant. Malheureusement, Zagan dormait toujours sur son trône, ce qui les séparait.

J’ai l’air bien trop gâté..., Néphy secoua la tête d’un air agité alors que ses pensées commençaient à se déchaîner. Elle était plutôt inquiète de ce que Zagan penserait d’elle si elle agissait selon ses désirs. Elle avait choisi de croire qu’il ressentait exactement la même chose, mais cela ne voulait pas dire qu’il allait lui rendre la pareille.

Bien sûr, quoi qu’elle fasse, Zagan l’accepterait. Elle le savait bien. Cependant, il était encore difficile d’aller de l’avant.

Les oreilles de Néphy devinrent complètement rouges quand elle commença à se tordre dans son lit. Elle pouvait difficilement contenir son imagination.

« Je n’arrive vraiment pas à dormir..., » Néphy avait abandonné après s’être tordue et retournée quelques fois de plus et s’était levée de son lit. Après avoir tendu la main vers la table de chevet, elle avait claqué ses doigts fins, allumant la bougie dessus. C’était de la sorcellerie de base que Zagan lui avait apprise.

Ensuite, Néphy avait essayé d’ouvrir la fenêtre. Bien qu’il s’agisse d’une fenêtre, elle était faite de simples planches de bois, et il n’y avait rien comme du verre serti dedans. En utilisant le poteau fixé à chaque planche, vous pouvez les tirer sur le côté pour les ouvrir.

Le clair de lune pénétrait dans la pièce tandis que Néphy regardait fixement l’une des maisons du village en ruines. Il se trouvait que c’est là qu’elle avait grandie.

« ... Bizarre. Je ne ressens rien particulièrement, » déclara Néphy en tenant sa main sur sa poitrine. Son pouls était le même que d’habitude, sa respiration était normale et elle ne se sentait pas du tout nerveuse.

Je pensais que ça ferait plus mal..., même Zagan semblait assez inquiet pour elle, c’est pourquoi il l’avait suivie. Et pourtant, elle était si calme que son retour était inattendu. Si des cadavres d’elfes étaient éparpillés, elle aurait au moins ressenti de la douleur dans son cœur, mais il n’y avait même pas de traces de sang, et les bâtiments étaient en grande partie intacts. C’était comme si les résidents venaient de disparaître.

La tranquillité de tout cela lui avait fait douter qu’elle y ait réellement vécu il y a seulement quelques mois. Non, c’était un peu plus important. C’était plus comme si elle était redevenue comme avant de rencontrer Zagan.

« Oh, je vois. Je me sentais comme ça tout le temps, » déclara Néphy.

Elle avait été élevée dans un environnement où de grandes attentes avaient entraîné de grandes souffrances. Personne ne voulait même la regarder, et sa simple présence était considérée comme une influence maléfique.

C’est pourquoi Néphy s’était isolée du monde. Si elle arrêtait de penser, la douleur diminuerait un peu. Si elle s’arrêtait de bouger, la douleur devenait plus facile à gérer. En échange de ne pas ressentir de douleur, elle n’était plus capable de ressentir de la joie. Tout ce qu’elle avait fait, c’est de rester assise et de prier pour que sa vie insignifiante s’achève rapidement.

Son cœur s’était arrêté. Elle était redevenue une coquille vide. Cependant, ce n’était pas bon. Elle se devait d’accepter son passé. Sinon, retourner dans sa ville natale était inutile. Si elle continuait à céder à ses horribles souvenirs, elle ne ressentirait plus jamais la chaleur de l’amour de Zagan et du reste de sa famille.

« Je ne veux pas que..., » Néphy ne voulait plus mourir. En fait, il n’était pas exagéré de dire que sa vie n’avait commencé qu’au moment où elle avait rencontré Zagan. Elle voulait vivre pour lui. Elle voulait continuer sa vie avec Zagan, Foll, Chastille, Manuela, Raphaël, Gremory, Kimaris, et même Barbatos. C’est pour cela qu’elle devait tout simplement se débarrasser de son passé.

Et, alors qu’elle continuait à fixer la maison où elle vivait pour affirmer sa détermination...

« Hein... ? » Néphy avait aperçu une faible lumière dans son ancienne maison.

Quelqu’un... est toujours là ? Les fenêtres étaient les mêmes que celle à travers laquelle Néphy regardait, donc une petite quantité de lumière s’était infiltrée à travers les espaces dans les planches de bois. Il se passait quelque chose.

Pour elle, ça aurait pu être un voyageur ou un bandit, mais ce n’était pas un phénomène naturel.

« Je dois immédiatement prévenir Maître Zagan..., » Néphy avait commencé à se diriger vers la chambre de Zagan quand ses pieds s’étaient soudainement arrêtés.

Est-ce que c’est vraiment bien, je me demande... ? Zagan avait-il vraiment besoin de savoir ? S’il l’écoutait et enquêtait sur son ancienne maison, ne ferait-il pas tout le travail pendant qu’elle s’asseyait et se détendrait ? Comment exactement surmontait-elle son ancien moi faible si elle le laissait la protéger encore et encore ?

« ... Mes excuses, Maître Zagan. Pardonnez-moi d’agir de mon plein gré, » déclara Néphy en secouant la tête.

Et à ce moment-là, pour la toute première fois, Néphy s’était avancée sur ses deux pieds, sans personne pour la soutenir.

***

Partie 7

Néphy s’était glissée dans ses bottes, puis elle avait pris une plume et avait commencé à griffonner ce qui s’était passé et ce qu’elle allait faire. Elle était fermement décidée à suivre son plan, mais elle n’était pas certaine de ce qu’il allait se passer à la fin. Disparaître sans un mot aurait été de mauvais goût, alors elle avait fini d’écrire une note avant de sauter par la fenêtre.

Il fait vraiment froid..., Néphy portait sa tenue de femme de chambre habituelle près des montagnes enneigées, ce qui la laissait manifestement tremblante.

« Il y a six mois, je n’aurais même pas pu sentir le froid..., » murmura Néphy.

Ça voulait-il dire qu’elle s’était affaiblie ? Eh bien, je peux accepter ce genre de faiblesse.

Honnêtement, elle voulait que Zagan développe le même type de faiblesses qu’elle. Cet homme était beaucoup trop fort. Il avait un peu appris à compter sur les autres récemment, mais il y avait encore des parties de lui qui voulaient s’occuper de tout par lui-même. Et Néphy croyait qu’être capable de tout faire entraînait plus de soucis. Elle souhaitait qu’il soit plus faible pour qu’il soit forcé d’accepter l’aide de toutes sortes d’individus. Sinon, la gratitude de tout le monde ne lui parviendra jamais.

« Je veux devenir assez forte pour que Maître Zagan compte sur moi..., » marmonna Néphy alors qu’elle faisait les premiers pas vers l’atteinte de cet objectif. Après avoir traversé l’espace dégagé, elle s’était précipitée vers son ancienne maison. Mais elle n’y avait jamais vraiment été chez elle. En fait, elle ne pouvait rester que dans un coin de l’entrepôt. La seule fois où elle avait le droit d’entrer dans d’autres pièces, c’était pour aider à faire le ménage ou à accomplir d’autres tâches ménagères.

Elle ne savait absolument rien des autres résidents. Et la famille, les gens avec qui elle avait vécu pendant les seize premières années de sa vie n’étaient même pas ses connaissances.

La main de Néphy s’était mise à trembler légèrement lorsqu’elle s’était déplacée pour ouvrir la porte, mais cette fois-ci, ce n’était pas à cause du froid. Elle avait peur. Cependant, assez curieusement, elle avait été soulagée par la vue.

Ce n’est pas grave. Je ne suis plus la même personne..., ses émotions fonctionnaient correctement, ce qui signifiait qu’elle était prête à faire face à tout ce qui se trouvait au-delà de cette porte. Tenant sa poitrine de la main gauche, Néphy avait pris une grande inspiration et avait tourné la poignée de la porte.

« ... Hein ? » s’exclama Néphy.

De l’air chaud s’était échappé de l’autre côté de la porte. En y regardant de plus près, Néphy avait remarqué que la cheminée était allumée. Il semblait que c’était la source de lumière qu’elle avait vue de sa chambre.

Souhaitez-moi bonne chance, Maître Zagan..., pensa Néphy en regardant le manoir de l’aîné.

Elle savait que Zagan serait furieux quand il l’apprendrait, mais c’était un problème que Néphy devait affronter toute seule. Néphy avait donc fait un pas dans la maison où elle vivait avant.

L’endroit ressemblait en grande partie au manoir de l’aîné. Le sol était fait de planches de bois, mais les murs n’étaient que des pierres recouvertes de mousse empilées les unes sur les autres. Étonnamment, malgré les fenêtres simplistes, il n’y avait même pas de courant d’air. La pièce était très chaude, ce qui avait probablement servi à repousser l’air froid, mais Néphy savait que cela changerait rapidement si la cheminée s’éteignait.

L’intérieur de la pièce n’avait pas changé du tout. Il y avait plusieurs peintures accrochées sur chaque mur, et un petit autel avait été installé près de l’entrée à laquelle ils avaient l’habitude d’offrir des prières à l’heure du repas. À part cela, il y avait une seule table délabrée autour de laquelle se trouvaient quatre chaises en bois. On dirait que l’endroit appartenait à une famille de quatre personnes.

Elle n’avait pas fait le tour de la maison assez souvent pour s’en rendre compte, mais rien ne semblait déplacé. En fait, elle ressemblait exactement à celle où les humains avaient attaqué le village, alors que Néphy interrogeait sa mémoire.

Les résidents de cette maison sont probablement tous morts..., Néphy trouvait cela malheureux, même si elle savait que ces individus la maudissaient de leur dernier souffle. Elle ne les connaissait peut-être pas assez pour les pleurer, mais elle avait pitié d’eux.

Après avoir réfléchi à ses pensées pendant un moment, Néphy inspecta le reste de la maison. Et malgré le fait que la cheminée était allumée, il n’y avait même pas de traces de pas découvert.

Elle regardait autour d’elle avec agitation, faisant de son mieux pour trouver une piste, quand l’un des tableaux sur le mur avait soudain attiré son attention. Il n’y avait qu’un seul artiste dans tout le village, et il donnait toujours aux familles un tableau pour accompagner chaque nouveau bébé. C’est pourquoi il aurait dû y avoir autant de tableaux que d’enfants dans cette maison, mais...

« Ma peinture... n’est pas là ? » Néphy n’avait jamais eu l’occasion d’y jeter un coup d’œil de près, ce qui lui avait échappé. Peut-être ne voulaient-ils pas accrocher le tableau d’un enfant maudit, ou peut-être l’artiste lui-même refusait-il d’en faire un. Cependant...

« Où suis-je née exactement ? » se demanda Néphy.

Cela devait être sa ville natale, mais elle n’avait pas trouvé de preuve définitive qu’elle était née et avait grandi ici. Jusqu’à présent, elle avait cru que les habitants de cette maison étaient ses parents de sang, mais était-ce vraiment le cas ? Sa propre famille l’aurait-elle détestée sans raison ?

À quoi je pense ? Mes liens parentaux sont un mythe..., même Zagan avait toujours été seul, forcé de se débrouiller seul dès son plus jeune âge. Et en plus de ne pas savoir les visages de ses parents, il ne connaissait même pas leurs noms. S’ils étaient encore en vie, ils n’auraient aucun lien avec lui.

Certes, de tels liens inconstants n’étaient rien d’autre qu’une illusion. Ou du moins, c’est ce que Néphy croyait.

Être avec tous ces gens qui ne sont pas liés à moi par le sang... c’est bien mieux.

Zagan, qui était un parfait inconnu, fut le premier à faire en sorte que Néphy se sente vraiment aimée. Et les premiers à l’appeler une amie furent Chastille et Manuela, qu’elle venait tout juste de rencontrer. Après cela, Foll était devenue une sorte de fille, ce qui lui avait donné l’impression de faire partie d’une famille pour la toute première fois.

Pas un seul d’entre eux n’était lié à elle par le sang. Il n’y avait aucun lien de ce genre entre eux, et ce n’était pas une obligation.

Je dois... trouver qui je suis vraiment..., et juste au moment où elle pensait cela, le tableau qu’elle regardait commençait à se déformer.

« Hein... ? » Néphy regarda quatre ombres s’échapper du tableau devant elle. Elle pouvait immédiatement dire qu’il s’agissait des visages de la famille qui vivait ici.

Une illusion ? Néphy déplaça son regard autour d’elle, mais ne trouva pas l’origine. Zagan aurait probablement été capable d’identifier l’emplacement du sorcier en un coup d’œil, mais Néphy était loin d’être aussi habile que lui. Pour ce qui est de la sorcellerie, même les sorciers qui travaillaient au château l’avaient surpassée. Cela dit, le mysticisme n’était pas une puissance qui manifestait toujours le résultat désiré, ce qui en faisait un élément totalement inconnu. Il n’y avait aucune garantie qu’elle était leur meilleure même avec cela ajouté dans le mélange.

Chacune des illusions s’était assise autour de la table, puis se mit à rire joyeusement. C’était le portrait craché d’une famille heureuse.

Je n’ai jamais vu ce regard sur leur visage..., Néphy n’avait jamais eu que mépris ou dégoût dirigé vers elle. Elle n’aurait pas pu les imaginer rire joyeusement.

« Ils ont l’air si heureux..., » marmonna Néphy. Et puis, cette scène heureuse avait commencé à fondre en réaction. L’illusion suivante était une illusion remplie de cadavres. Leurs visages jadis souriants étaient souillés par le sang rouge vif qui coulait de leur tête, et leurs bouches laissaient sortir des mots de douleur et de ressentiment.

« Pourquoi ne nous avez-vous pas sauvés ? » demandèrent-ils. « Je ne veux pas mourir. » Ils gémissaient. « Néphy aurait dû mourir à la place, » ils se plaignaient.

« Vous avez le droit de m’en vouloir..., » Néphy savait qu’elle aurait pu les sauver si elle avait lutté contre les envahisseurs humains. Mais au lieu de cela, elle avait permis qu’ils soient massacrés, et c’est quelque chose qu’elle allait regretter pour le reste de sa vie.

Témoin de l’agonie qu’ils avaient vécue, Néphy souffrait. S’ils s’étaient rencontrés dans d’autres circonstances, ils auraient sûrement pu s’entendre. Ou peut-être, comme elle était maintenant, aurait-elle pu développer une véritable relation avec eux.

« Cependant..., » Néphy marmonna lorsque l’image des cadavres fut gravée dans son esprit, puis poursuivit : « Si c’était si douloureux, pourquoi ne vous êtes-vous pas protégés les uns et les autres ? »

Je risquerais ma vie pour protéger Zagan ou Foll, alors ces individus n’auraient-ils pas dû faire la même chose ? Néphy n’aurait jamais voulu se recroqueviller et mourir comme ces elfes. Et tandis qu’elle rejetait leurs souvenirs avec de telles pensées, l’illusion des cadavres se brisa comme du verre, et les ténèbres l’enveloppèrent à nouveau. Sauf que cette fois, même la lumière de la cheminée avait disparu.

Il fait froid..., la pièce jadis chaude s’était refroidie à l’extrême. Le changement soudain avait même amené Néphy à se demander si la cheminée avait vraiment été allumée. Elle regarda vers elle, mais ne sentait pas la chaleur qui s’en dégageait. Même si un feu était éteint avec de l’eau, la chaleur du bois de chauffage aurait quand même dû rester. Et à ce moment-là, tout s’était mis en place dans sa tête.

Ai-je... été attiré ici... ? En fin de compte, il aurait peut-être été préférable d’alerter au moins Zagan avant de venir ici. Cependant, Néphy n’avait pas regretté sa décision.

Le coupable doit être quelque part par ici..., Néphy s’était mise sur la défensive en jetant un autre coup d’œil dans tout l’endroit, mais elle n’avait été rencontrée que par un rire moqueur.

« Kufufufu, comme c’est courageux... ! »

Néphy était horrifiée par cette voix, qui était accompagnée d’une ombre qui s’étendait du sol. Sur le dessus de la pièce étant faiblement éclairée, l’ombre portait une cagoule, de sorte qu’elle ne pouvait pas dire si c’était un homme ou une femme. Cependant, d’après leur voix, elle savait que c’était quelqu’un de beaucoup plus âgé.

Cette personne est beaucoup plus forte que moi... ! Néphy se mit encore plus sur la défensive alors qu’elle se concentrait sur la sortie. Elle avait appris les bases de la sorcellerie et pouvait utiliser le mysticisme en toute liberté dans ce lieu spécifique, ce qui signifiait que le mysticisme céleste n’était pas hors de question. Si elle se battait sans se soucier de sa propre sécurité, elle pourrait vaincre même un sorcier habile. Malheureusement, elle pouvait dire à la personne qui était devant elle était bien plus que ça.

Je dois survivre et retourner aux côtés de Maître Zagan..., sinon, il se sentirait responsable de sa mort et se reprocherait de ne pas être à ses côtés. Néphy voulait être le pilier du soutien de Zagan, donc elle ne pouvait pas le faire souffrir.

C’est pourquoi la priorité numéro un de Néphy était de revenir à ses côtés. La véritable identité de l’ombre, ainsi que la raison pour laquelle elle l’avait attirée seule, n’était pas pertinente face à ce désir.

Malheureusement, je dois rester debout et me battre..., cela n’aurait servi à rien qu’elle parte seule si elle avait essayé de s’enfuir simplement parce que son adversaire était plus fort qu’elle.

Elle devait se battre, survivre et revenir vivante. C’est le résultat que Néphy souhaitait. Et étant arrivée à cette conclusion, elle avait ouvert la bouche pour parler.

« Pourquoi... m’avez-vous montré ça ? » demanda Néphy.

« Hmm... Tu ne vas pas t’enfuir ou quoi que ce soit, hein ? » répondit l’ombre de façon inattendue. Après ça, elle pouvait dire à sa bouche qu’elle avait un sourire déformé avant de dire : « Alors, comment était-ce ? Je parle du visage de ceux qui t’ont tourmenté avant d’être punis. »

« ... C’était le pire sentiment possible, » répondit Néphy. Elle avait l’impression qu’elle avait tué les mêmes personnes deux fois.

Ce n’est pas un endroit où je peux plier un genou et céder..., Néphy n’avait été autorisée à s’effondrer qu’en présence de Zagan. Et comme elle était venue ici sans sa permission, elle n’avait pas eu le droit de s’effondrer et de pleurer.

L’ombre avait alors sorti une main qui ressemblait à une branche morte et toucha sa propre mâchoire avec elle.

« Comme c’est intéressant ! Tu es étonnamment simple pour quelqu’un qui a été forcé d’enfermer ses émotions toute sa vie. Je sens aussi une forte volonté de vivre en toi... Tu aurais dû obtenir un fragment de mysticisme céleste, non ? Et pourtant, tu n’es pas du tout arrogante... Très intéressant, en effet, » déclara l’autre.

Il a tout vu à travers..., pensa Néphy en se mordant les lèvres. Il semblait que cette ombre savait tout sur elle. Bifrons n’était clairement pas le seul à les surveiller, elle et Zagan.

« Hm... Tu pleures vraiment la mort d’une telle racaille ? Incroyable. Tu crois en la seconde chance, même pour les méchants les plus odieux... et tu t’affliges de la perte de ces possibilités. Comme c’est noble, » déclara l’autre.

Néphy était déconcertée par les idées que l’ombre exprimait et cela lui donnait l’impression de presque arracher son esprit.

« Mais... qu’est-ce que vous êtes ? » Néphy avait forcé cette question alors qu’elle tremblait de peur. Cependant, l’ombre avait simplement répondu d’un ton insouciant.

« Oh mon Dieu, mes excuses. À mon âge, je n’ai pas souvent l’occasion de rencontrer de nouvelles personnes, » déclara l’autre.

L’ombre avait enlevé son capuchon en disant cela, révélant une vieille femme aux cheveux blancs. Elle possédait un regard sévère qui dépassait tout ce que Gremory n’avait jamais fait à Néphy, ce qui était accentué par ses yeux trop familiers et azur.

Ce n’est pas possible... Est-elle... ? Néphy avait dégluti face à ces yeux et ces oreilles qui semblaient si semblables aux siens.

« C’est moi qui porte le destin de ce village, le..., » déclara la vieille femme.

Néphy l’avait coupée et avait agi. Cette vieille femme était trop dangereuse. Bifrons était amical par rapport à elle.

Esprits de la forêt, répondez à mon appel ! Les racines des arbres autour du village s’étendaient loin sous terre, alors l’appel de Néphy les avait rejoints même si elle se trouvait à l’intérieur d’un bâtiment.

Les racines avaient traversé les planches l’une après l’autre en raison du mysticisme de Néphy. La seule attaque qu’elle pouvait utiliser avec sorcellerie était une lame de feu, et le Mysticisme céleste l’obligeait à chanter, donc c’était sa seule option. Malheureusement, les racines n’avaient rien capté.

« Elle est partie... ? »

La vieille femme bougea avant de disparaître de sa vue.

Ce n’était pas son vrai corps ? Même aujourd’hui, la terre avait obéi à la volonté de Néphy, mais elle ne trouvait aucune trace d’elle.

Ça veut-il dire que la menace a disparu ? L’adversaire de Néphy avait un pouvoir qui dépassait largement le sien, mais elle l’avait laissée seule.

« Suis-je devenu une personne plus forte maintenant ? »

Elle n’en avait pas l’impression. Néphy avait tenu tête à la vieille femme, mais il semblait qu’elle ne lui avait même pas accordé son attention. Stupéfaite de la situation, elle était restée un moment sans bouger avant de reprendre ses esprits.

« C’est vrai. Je dois le signaler à Maître Zagan..., » Néphy pensait que Zagan avait besoin de savoir pour cette mystérieuse vieille femme. Elle se tourna donc vers la porte d’entrée, mais se trouva interrompue par un rire menaçant. C’était un gloussement profond, sombre et effrayant qui faisait écho dans la tête de Néphy et déformait sa vision. Cependant, il n’y avait personne autour d’elle qui pouvait en être la source, ce qui la laissait perplexe.

Est-ce qu’elle a organisé ça avant de partir... ? Néphy était capable d’écraser toute la maison et de l’enfoncer sous terre, mais elle n’était pas sûre que cela ferait quoi que ce soit. De plus, il était possible que la chose que Zagan cherchait se trouve ici, dans cette maison, alors elle ne pouvait pas prendre ce risque.

Pourtant, Néphy ne voyait pas d’autres options. Alors, elle était lentement sortie de la maison sur la défensive. Pour une raison quelconque, le rire s’était arrêté dès qu’elle était sortie.

Qu’est-ce qui se passe ? Elle avait eu des vertiges au début, mais maintenant elle allait bien. Agréablement surprise par la tournure des événements, elle se mit à marcher vers le manoir de l’aîné, mais...

« H-Hein ? » Les pieds de Néphy s’étaient déformés, la laissant incapable de marcher correctement. Attends, je suis au moins debout ? J’ai l’impression de ramper à la place... Mon corps ne bouge pas comme je le voudrais...

La nuit se rafraîchissait, mais Néphy parvenait quand même à avancer jusqu’au manoir de l’aîné.

« Maiztre... Zzagan... » Néphy parlait avec un zozotement, probablement à cause du froid, alors qu’elle tendait la main vers la poignée de porte. Cependant, elle s’était trouvée dans l’impossibilité de l’atteindre. En regardant de plus près, elle avait remarqué que ses mains étaient complètement cachées à l’intérieur de ses manches et que ses bottes étaient soudainement surdimensionnées.

Quelque chose ne va pas avec mon corps... ? Néphy ne comprenait pas ce qui se passait, ce qui la rendait d’autant plus désespérée lorsqu’elle frappait à la porte de Zagan.

« Maiztre... Zzagan... »

Étonnamment, la porte s’était ouverte avant même qu’une seconde ne passe.

« Néphy ! » rugit Zagan. Il étendit les bras pour enlacer Néphy, mais s’était immédiatement raidi, avec une expression choquée sur son visage.

« Es-tu vraiment Néphy ? Qu’est-ce qu’il a, ce corps ? » demanda Zagan.

« Hein... ? » Néphy regarda à nouveau son corps en bas, et elle réalisa alors que ses vêtements étaient beaucoup trop grands pour elle. Confuse, elle avait essayé de toucher son propre visage, qui était étrangement moelleux et extensible. Et comme dernier test, elle avait déplacé sa langue à l’intérieur de sa bouche, ce qui avait montré clairement que toutes ses dents n’étaient pas encore sorties. Après avoir confirmé tout cela, elle avait finalement compris la vérité.

 

 

Néphy était devenue une petite fille.

***

Chapitre 3 : Le dilemme d’un Archidémon : Comment aimer votre épouse elfe enfant.

Partie 1

« Wôw ! Elle est redevenue une enfant, hein ? » déclara Barbatos en essayant de toucher les joues de la petite Néphy.

Il était encore tard la nuit. Zagan s’était immédiatement précipité dehors quand il s’était rendu compte que Néphy avait disparu, mais il l’avait trouvée de l’autre côté de la porte, apparemment rajeunie. Incertain de la façon de faire face à la situation, Zagan avait rassemblé tout le monde dans le salon. Il avait réussi à avoir Foll, Chastille, Nephteros, et Barbatos.

Gremory et Kimaris n’étaient pas là. Tous les deux étaient allés enquêter sur la maison que Néphy avait visitée. C’était parce que la sorcellerie qui manipulait l’âge était le domaine d’expertise de Gremory, et Kimaris pouvait suivre les gens par l’odeur. Ils avaient laissé la fenêtre ouverte pour qu’ils puissent faire un rapport dès qu’ils auraient trouvé quelque chose.

Zagan baissa les yeux vers ses genoux… où la petite Néphy dormait profondément. Sa tenue de femme de chambre habituelle était trop ample pour être portée, alors elle s’était changée en vêtements d’enfants qu’ils avaient trouvés dans le manoir. Il était assez vieux, mais toujours mignon, avec de la dentelle froufrou décorant le col et la jupe. Ça ressemblait plus à une tenue de soirée qu’à quoi que ce soit d’autre, mais ils ne pouvaient pas se permettre de refuser ça.

Foll caressait doucement la tête de Néphy. D’après son apparence, elle avait l’air d’avoir cinq ou six ans. Il était difficile de juger de l’âge d’un enfant, mais il était certain qu’elle avait moins de dix ans, ce qui la laissait plus jeune que Foll.

 

 

Néphy avait essayé de son mieux d’expliquer la situation, mais marcher dans le froid l’avait laissée essoufflée. Elle avait fini par s’assoupir avant qu’ils n’aient des informations pertinentes. Heureusement, elle avait laissé un indice avant…

« Cette note a été laissée dans la chambre de Néphy. “J’ai vu une lumière dans ma maison, alors je vais enquêter”, » déclara Zagan.

« Pourquoi diable est-elle partie toute seule ? Ne demande-t-elle pas toujours l’avis de Zagan avant de faire quelque chose ? » demanda Barbatos, avec une expression perplexe bien visible sur son visage. Même Barbatos, plus que tout autre, semblait comprendre assez bien Néphy.

Puis, Chastille avait pris la note de la main de Barbatos.

« Tu ne comprends vraiment pas, n’est-ce pas ? C’était son ancienne maison, un endroit plein d’horribles souvenirs. Ne comprends-tu vraiment pas le sentiment de honte et d’embarras qu’elle a dû ressentir ? » demanda Chastille en arrachant le mot des mains de Barbatos.

« Pas question que je comprenne ce genre de conneries, » répliqua Barbatos.

Chastille avait fusillé du regard Barbatos en réponse, mais cela n’avait pas eu beaucoup d’effet.

Tout est de ma faute. J’aurais dû la garder à mes côtés en tout temps…, bien sûr, Zagan savait que Néphy avait dû réfléchir avant d’agir, mais cela ne l’avait pas aidé à se sentir mieux. Il voulait saluer sa détermination, mais il aurait aimé qu’ils puissent tout simplement discuter et travailler ensemble dès le début. Alors, les choses ne se seraient pas si mal passées.

« Zagan, tu peux faire que Néphy redevienne comme avant ? » demanda Foll.

« Je vais te montrer que je le peux, » répondit immédiatement Zagan. Cependant, il n’en était pas si sûr. Et il semblait qu’il n’avait pas réussi à cacher ce malaise, alors que Barbatos plissa ses sourcils.

« Attends un peu. Si tu pouvais arranger les choses, elle serait déjà redevenue normale… Tu ne peux pas briser cette sorcellerie, n’est-ce pas ? » demanda Barbatos.

« … Ce n’est pas de la sorcellerie, » déclara Zagan.

« Tu viens de dire quoi ? » demanda Barbatos.

C’était la raison pour laquelle Zagan faisait une expression si sinistre.

« Néphy n’a pas été transformée en enfant par la sorcellerie. C’est du mysticisme, ou si ce n’est pas cela, quelque chose d’encore plus ancien, comme un dragon ou la malédiction d’un dieu, » déclara Zagan.

En d’autres termes, c’était quelque chose que même le Tueur de Sorciers Zagan ne pouvait pas surmonter.

« Ce n’est pas une malédiction de dragon. C’est autre chose. Peut-être quelque chose d’encore plus puissant…, » affirma Foll en posant sa main sur le front d’une Néphy endormie. Elle était peut-être jeune, mais Foll était encore un dragon, donc elle avait probablement raison.

« … Je pense que c’est du Mysticisme, » déclara Nephteros.

« En es-tu certaine ? » demanda Zagan.

« Je ne peux pas le dire avec certitude, mais c’est assez similaire… C’est quand même étrange. Les seuls hauts elfes vivants dans le monde, sans parler de ce village, sont Néphélia et moi, » déclara Nephteros.

« Penses-tu que tu peux le casser ? » demanda Zagan.

« Ce serait très difficile. Maître Bifrons ne m’a jamais rien appris de tel. Tu peux peut-être lui demander de l’aide, mais…, » Nephteros était plutôt vague, mais son expression disait qu’elle pensait qu’il valait mieux ne pas consulter Bifrons.

Ça me convient très bien. Je ne veux pas vraiment finir endetté envers ce type…, même s’il était allé auprès de Bifrons, il n’y avait pas de confiance en cet Archidémon louche. Bifrons enlèverait probablement Néphy sous prétexte de l’examiner.

« Cela prendra un certain temps, mais je vais essayer d’y jeter un coup d’œil… Je déteste dire ça, mais cette vielle… Gremory est probablement votre meilleure chance, » proclama Nephteros en reconnaissant à contrecœur la femme qui l’avait harcelée plus tôt.

Il était certainement vrai que Gremory pouvait changer son âge à l’aide de la sorcellerie, ce qui faisait d’elle leur atout le plus précieux dans cette affaire. La réponse de Nephteros avait été judicieuse, ce qui avait surpris Zagan et l’avait fait tourner un regard chaleureux vers elle.

« Hm ? Qu’est-ce que tu veux ? » demanda Nephteros.

« Mmm… Je ne m’attendais pas à ce que tu veuilles vraiment aider Néphy, » déclara Zagan.

« Ne te méprends pas ! J’ai une dette envers toi, alors c’est ma façon de te rembourser ! En plus, je ne peux pas vraiment partir après t’avoir mis de mauvaise humeur plus tôt, non ? » déclara Nephteros, alors que ses oreilles devenaient rouge vif pendant qu’elle continuait à bouger.

« Franchement, t’es une fille plutôt problématique…, » marmonna Barbatos d’un ton exaspéré.

« … Qu’est-ce que tu essaies de dire ? » demanda Nephteros en le regardant fixement, mais Barbatos haussa simplement les épaules en guise de réponse.

« Je te comprends tout à fait ! » déclara Chastille en serrant l’épaule de Nephteros d’un regard ardent. Elle semblait penser qu’elle avait trouvé une âme sœur.

« Que je trouve cet homme irritant et que j’ai envie de le tuer ? » demanda Nephteros

« Ça aussi, mais je parle du fait que tu es une personne vraiment gentille au fond de ton cœur ! » déclara Chastille.

« Qu… Qu-Qu-Qu-Quoi !? » Les oreilles de Nephteros étaient teintes en rouge vif quand elles commençaient à battre des bras. Il semblait qu’elle était complètement désorientée, puisqu’elle n’était même pas capable de répliquer froidement comme elle le faisait d’habitude.

« Oh, franchement, pourquoi me détestes-tu autant ? Je t’ai sauvé la peau une tonne de fois, rappelle-toi… ? » Barbatos marmonnait quelque chose, apparemment déprimé, mais cela n’avait pas vraiment d’importance.

Je vois. Si Nephteros fait un petit faux pas, elle finit comme Chastille, hein ? Bien sûr, elle ne s’effondrait pas comme un pleurnichard, mais la façon dont elle avait l’air quand Gremory jouait avec elle rappelait à Zagan le visage en larmes de Chastille.

La personne en question semblait gênée de ce fait, puisqu’elle s’était contractée avec un visage pâle, puis elle avait secoué la tête.

« Je n’aime pas être malmenée comme toi ! » déclara Nephteros.

« … N’est-ce pas un peu grossier ? » Chastille avait l’air déprimée. Il semblait qu’être rejeté par une camarade potentielle était beaucoup trop dur à supporter pour elle.

À ce moment précis, Gremory et Kimaris reviennent de chez Néphy.

« Nous sommes de retour, mon Archidémon, » dit Gremory.

« … Comment était-ce ? » demanda Zagan. Malheureusement, tous les deux secouèrent la tête.

« Il y a des traces de quelque chose qui a été utilisé, mais le lanceur de sorts est parti depuis longtemps, » déclara Gremory.

« Leur odeur a aussi disparu, donc je n’ai pas pu le suivre. Je suis désolé, » déclara Kimaris.

Ils faisaient face à un adversaire qui pouvait transformer Néphy en enfant avant même qu’elle ne s’en rende compte, donc il n’était pas surpris qu’ils aient couvert toutes leurs traces.

« Bon travail. Il y a quelque chose que j’aimerais que vous m’aidiez à commencer demain, alors reposez-vous un peu, » déclara Zagan en remerciant les deux individus alors qu’il poussait un soupir.

« Hm…, » Gremory hocha la tête alors qu’elle ajusta la faux sur son épaule, mais il était clair pour Zagan que quelque chose clochait.

« Quelque chose te tracasse, Gremory ? » demanda Zagan.

« … Seulement un peu. C’est juste que les traces de pouvoir que j’ai vues me semblaient terriblement familières, » déclara Gremory.

« Vraiment ? » demanda Zagan.

« C’est juste une intuition. Je ne connais pas vraiment sa vraie nature, mais…, » Gremory s’était arrêtée avant de secouer la tête et de dire : « Eh bien, je vous rappellerai tout de suite si je me souviens de quelque chose. Ne vous faites pas trop d’illusions. »

« Non, je compte sur vous, » déclara Zagan, affirmant sa conviction. Même s’ils étaient incapables de briser la malédiction elle-même, la sorcellerie de Gremory avait le potentiel d’aider à guérir Néphy.

Gremory et Kimaris furent surpris par la réponse de Zagan, alors ils le regardèrent avec émerveillement pendant un moment avant de répondre.

« Keeheeheehee, vous êtes une sacrée pipelette, n’est-ce pas ? Si mon Archidémon compte sur moi, je ne peux pas me permettre de faire des concessions, » déclara Gremory.

« Je ferai aussi tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider, » proclama Kimaris.

« Vous comptez sur eux… ? » Nephteros les regarda tous les deux attentivement en disant ça. Sa voix était presque envieuse. Et honnêtement, Zagan pouvait comprendre ce sentiment. Après tout, il n’avait appris que récemment la joie de compter sur les autres et qu’eux puissent compter sur lui en retour. Heureusement, cette leçon lui avait aussi fait comprendre qu’il devait montrer sa sincérité aux autres, et c’est pourquoi Zagan répéta les mêmes paroles à Nephteros.

« Je compte aussi sur toi, Nephteros. Tu es la seule d’entre nous qui s’y connaisse en Mysticisme, » déclara Zagan.

« … J’ai déjà accepté de coopérer, n’est-ce pas ? » Nephteros détourna le visage en disant cela, mais Zagan pouvait dire que ses oreilles tremblaient de joie.

Je ne sais pas qui est assez stupide pour s’en prendre Néphy, mais je ne manquerai pas de le leur faire regretter.

En général, la colère était un facteur de motivation principal, et Zagan était positivement bouillonnant. Il avait du mal à contenir la rage ardente qui coulait dans ses veines, et il attendait avec impatience l’occasion de la diriger directement sur la source de toutes ses frustrations.

Cependant, malheureusement pour Zagan, les choses ne s’étaient pas du tout déroulées selon son plan.

***

Partie 2

« Maiztre Zagan ! Qu’est-ce que c’est ? » demanda Néphy en déterrant une grenouille qui hibernait dans la forêt.

« Cette créature… est connue sous le nom de grenouille. C’est comestible, donc on peut au moins l’utiliser comme ration d’urgence, » répondit Zagan.

« Je ne pourrais jamais ! » s’écria Néphy.

« Seulement si tu meurs de faim. On dirait qu’elle hiberne encore. Alors remets-la où tu l’as trouvée pour l’instant, » déclara Zagan.

« Hiberne… ? » demanda Néphy.

« Ce genre de créature ne peut pas accumuler beaucoup de nourriture en hiver, ce qui l’oblige à dormir pendant la majeure partie de l’hiver, » déclara Zagan.

« Maiztre Zagan est incroyable ! Vous savez tout, n’est-ce pas !? » s’écria Néphy.

« … Pas vraiment, » déclara Zagan.

Le lendemain matin, l’esprit de Néphy avait régressé pour correspondre à son apparence. Au matin, elle avait complètement oublié ce qui s’était passé la nuit précédente. Cela dit, ce n’était pas comme si elle avait oublié Zagan et les autres. En fait, elle était très attachée à eux.

« Néphy, allons l’enterrer, » déclara Foll, juste à côté de Néphy.

« Oui, Grande Soeur ! » Néphy répondit en titubant derrière Foll. Il semble que le changement de Néphy les ait rapprochées. Foll avait aussi l’air d’aimer qu’on l’appelle Grande Sœur, et elle continuait à mener Néphy par la main partout.

Zagan lisait un livre à l’ombre d’un arbre tout en veillant sur eux deux. Contrairement à la gravité de la situation, la scène qui se déroulait devant lui ressemble à un pique-nique familial.

Pour l’instant, c’est une bonne chose que Néphy ne soit pas si déprimée que ça…, heureusement, elle n’avait pas oublié Zagan et les autres, ou peut-être que ce n’était pas vrai.

Zagan avait jeté un coup d’œil derrière lui. Maintenant qu’il faisait jour, les autres avaient commencé à enquêter sur le village. Aucun d’eux ne savait exactement ce qui était arrivé au corps de Néphy, alors Zagan et Foll avaient fini par rester à ses côtés.

Barbatos, qui avait des ombres profondes sous les yeux et dont la parole et la conduite étaient irréparables. Gremory, qui avait repris la forme d’une vieille femme et était beaucoup trop indigne de confiance. Kimaris, qui avait le visage d’un lion qui pouvait tuer une bête d’un seul regard. Nephteros, qui lors de leur première rencontre, n’avait jamais fait que froisser les autres. Et Zagan, qui, inutile de dire, n’avait pas du tout un visage qui attirait les enfants. Au mieux, la seule personne en qui un enfant pouvait avoir confiance lors d’une première rencontre était la pleurnicheuse, Chastille. Aucun enfant ne survivrait dans un environnement aussi hostile.

Zagan regarda comment allaient ses compagnons. Peut-être l’ayant remarqué, Chastille s’approcha de lui avec une expression d’ennui présente sur son visage.

« Comment ça se passe ici, Zagan ? » demanda Chastille.

« Foll s’en sort très bien avec Néphy. Malheureusement, je n’ai rien trouvé de particulièrement utile, » répondit Zagan.

Bien sûr, ce n’était pas comme si Zagan faisait du baby-sitting. À côté de lui, il y avait une pile de documents qu’il avait trouvés dans le manoir. C’étaient les journaux des anciens du village qui s’étendaient sur plusieurs générations.

« Tu sais lire l’écriture elfique ? » Chastille marmonnait d’admiration.

« Le Célestian est une autre histoire, mais oui, je peux comprendre leur langue commune dans une certaine mesure, » répondit Zagan. Puis, il avait posé une question à Chastille : « Est-ce que tout va bien de ton côté ? »

« Désolé, mais ma connaissance des elfes et de la sorcellerie n’est comparable à aucune d’entre vous. Je serai probablement plus utile comme garde du corps de Néphy…, » Chastille répondit d’une manière digne qui lui donna l’air tout à fait faussé avec son caractère habituel de pleurnicheuse. Et après cela, elle déplaça son regard vers le bas et dit : « Penses-tu qu’il y ait des indices dans ces journaux elfes ? »

« Eh bien, en ce moment, je cherche les dossiers de ceux qui ont quitté le village ou des descriptions d’hérétiques qui ont idolâtré la sorcellerie. Ils ne peuvent pas être si communs dans un village elfique. Et puisqu’ils ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour venir nous chercher ici, il est naturel de croire qu’ils ont un lien avec cet endroit, » déclara Zagan.

D’après ce que Nephteros et Gremory avaient dit, le coupable était certainement un elfe.

« Je comprends tout ça, mais en quoi le fait d’en trouver une description nous aiderait-il ? » demanda Chastille, avec une expression confuse sur son visage.

« La plupart des elfes ne peuvent pas survivre dans le monde. S’ils quittaient le village, ils devraient créer une sorte de barrière avec la sorcellerie. Et dans ce cas, je peux suivre la sorcellerie tant que je découvre ce que c’est, » expliqua Zagan.

Les elfes étaient pourchassés par les gens ordinaires et les sorciers. La mise aux enchères de Néphy en était un exemple. La seule façon pour eux de se protéger était de maîtriser la sorcellerie et d’utiliser leurs énormes quantités de mana. Et s’ils utilisaient la sorcellerie, Archidémon Zagan serait certainement capable de les coincer.

En d’autres termes, les documents qu’il lisait étaient ses meilleures pistes. Cependant…

« Pourquoi fais-tu cette tête ? » demanda Chastille.

« Hmm…, » Zagan poussa un gémissement perplexe en feuilletant les pages de l’un des livres.

« Aucune d’entre elles ne mentionne le moindrement Néphy, » répondit Zagan.

« Ne s’agit-il pas seulement de journaux d’avant la naissance de Néphy ? » demanda Chastille en le regardant avec émerveillement.

« Ils ne le sont pas. Les journaux se terminent par une description de la façon dont les humains ont envahi leur territoire. Je suppose qu’ils l’ont griffonnée juste avant que le village ne soit détruit. Et je sais pertinemment que Néphy était là quand c’est arrivé, » répondit Zagan.

« J’ai entendu dire qu’on appelait Néphy une enfant maudite ici, non ? Alors, n’est-il pas sûr de conclure qu’on l’ignorait ? » murmura Chastille, profondément enfoncée dans ses pensées.

« Si j’avais été à leur place, j’aurais surveillé une gamine aussi dangereuse. Le fait qu’ils ne l’aient pas fait montre clairement qu’ils comprenaient le pouvoir de Néphy. Je veux dire, ils l’ont même suppliée de les aider à la fin, n’est-ce pas ? » déclara Zagan.

« Tu as raison… S’ils l’avaient vraiment trouvée dangereuse, ils auraient porté plus d’attention à elle…, » murmura Chastille en rassemblant ses pensées. Puis, un regard de compréhension avait été visible d’un coup sur son visage, et elle avait dit. « Attends, n’y aurait-il pas un journal entièrement consacré à la surveillance de Néphy ? Je suis sûre que les elfes la détestaient, mais se comporter en public était probablement mal vu, non ? N’est-il pas possible qu’ils aient caché des informations sur elle aux autres villageois ? »

La bouche de Zagan s’était ouverte en raison de la surprise. Il ne s’attendait pas à entendre des paroles aussi sages de sa part.

« Hein ? Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Chastille.

« Non, c’est juste que… Je suis surpris que tu aies eu une si bonne idée, » déclara Zagan.

« Pour qui me prends-tu ? » s’exclama Chastille alors que son visage était en état de choc et empli de colère.

« Essaie de dire ça après avoir cessé d’être un pleurnichard, » déclara Zagan.

« J’essaie juste de garder mes visages public et privé séparés, c’est tout. Et j’ai jugé que la situation actuelle faisait partie de mon devoir public, » déclara Chastille.

En d’autres termes, bien qu’étant un Chevalier Angélique assez capable, cette fille est une épave complète dans sa vie privée ? 

Zagan avait été laissé au bord du gouffre par sa réponse. En y repensant, elle semblait en fait très digne et prudente quand ils s’étaient battus pour la première fois. À cette époque, elle avait défié Zagan en raison de sa mission en tant que Chevalier Angélique. Et puis, quand Néphy l’avait retrouvée en ville, c’était une vraie pleurnicheuse. C’est à ce moment-là qu’elle avait été relevée de ses fonctions de Chevalier Angélique, ce qui avait du sens grâce à toutes les nouvelles informations qu’elle venait de fournir. Par la suite, elle n’avait rencontré Zagan que lorsqu’elle n’était pas en service, ce qui lui avait valu le statut de pleurnicheuse.

La capacité de Chastille à séparer si clairement les deux parties d’elle était digne d’éloges, mais on se demandait pourquoi elle ne pouvait pas au moins garder un peu de son calme en privé. Mais ça n’avait pas eu d’importance en fin de compte. En fait, sa double personnalité s’était avérée très utile dans ce cas.

« J’ai une requête. Apporte-moi tous les livres elfes que tu peux trouver dans le manoir de l’aîné. Cherche tout ce qui est écrit en elfique et apporte-le ! » Zagan leva les yeux de son livre en lui demandant cette faveur.

« Donc tu dis qu’il pourrait être caché à la vue de tous, hein ? » demanda Chastille.

« Exactement. Comme c’est malin, Chastille, » déclara Zagan.

« E-Euh, merci… Hehehehe…, » le visage de Chastille se détendit un instant, mais elle reprit immédiatement son calme et courut au manoir de l’aîné.

Je n’arrive pas à croire qu’elle se comporte comme ça et qu’elle m’aide beaucoup… Quelque chose ne va pas dans ce village.

Des phénomènes complètement inconnus et anormaux se produisaient à gauche et à droite. Cependant, si Chastille se débarrassait volontiers de son caractère de pleurnichard et prenait cela au sérieux, il n’y avait aucun moyen pour Zagan de s’amuser de ça. Et ainsi, il continua à parcourir la pile de journaux à ses côtés.

Malheureusement, il n’avait trouvé le nom de Néphy nulle part, même après avoir parcouru cinquante ans de journaux intimes. Et tandis qu’il s’asseyait là, perplexe devant cette tournure des événements, il sentit quelque chose peser sur sa tête.

« Hehehehe… »

Zagan leva les yeux et aperçut une petite Néphy avec un énorme sourire sur son visage.

Pourquoi es-tu si mignonne !? Le sourire de Néphy illuminait son cœur jadis sombre. Zagan pouvait à peine se contenir. L’envie de la protéger débordait à l’intérieur de lui. Et à cause de cela, son corps avait ignoré son esprit et il avait fini par l’emmener sur ses épaules.

« Wooow, c’est vraiment trop haut ! » s’écria Néphy.

« Zagan, moi aussi ! » s’exclama Foll

« Gaaah, bien bien ! » déclara Zagan en déplaçant Néphy sur son épaule gauche afin de faire de la place à sa droite pour Foll. Et puis, il avait fait un tour sur lui-même avec les deux enfants là-haut.

 

 

Kimaris, qui investiguait sur les autres maisons du village, semblait vouloir les rejoindre, mais il avait fini par se contrôler.

« C’était amusant, » déclara Foll.

« Ça l’était ! Grande Sœur ! » répliqua Néphy.

Foll poussa un soupir de satisfaction, et Néphy rebondit à côté d’elle. Après un moment de silence, Néphy avait commencé à parler avec un sourire plâtré sur son visage.

« Maître Zagan, j’ai fait une couronne de fleurs avec Grande Sœur Foll ! C’est pour vous ! » déclara Néphy.

« Ouais, merci…, » répondit Zagan d’un ton déconcerté. C’était le premier cadeau qu’il recevait de Néphy, ce qui signifiait qu’il devait le protéger. Et ainsi, Zagan avait utilisé la sorcellerie pour empêcher les fleurs de se faner. Cependant, pendant qu’il faisait cela, la petite Néphy leva les yeux vers lui avec un regard inquiet sur son visage.

« Vous sentez-vous mieux maintenant, Maître Zagan ? » demanda Néphy.

« Ai-je… l’air mal en point ? » demanda Zagan.

« Ouais. D’habitude, vous avez l’air de vous amuser, mais vous aviez l’air très triste tout à l’heure, Maître Zagan, » déclara Néphy.

C’était évidemment parce qu’il était difficile de rester heureux quand la fille qu’il aimait souffrait d’une sorte de malédiction.

« Alors, voici un porte-bonheur pour vous remonter le moral, » déclara Néphy en s’allongeant avec ses petits bras pour attraper les joues de Zagan. Après s’être fermement agrippée à lui, elle se frotta le front contre le sien. La sensation n’était que trop familière. Ou bien, bien sûr, puisqu’il avait fait quelque chose de semblable dans le passé lorsqu’il essayait d’aider Néphy.

Cette fille est vraiment la même au fond, hein ? Même après avoir rétréci, perdu ses souvenirs les plus récents et vu sa personnalité réduite à celle d’une enfant innocente, Néphy était toujours Néphy. Et cela rendait Zagan extrêmement heureux.

« Quel charme utile ! Je vois. Je me sens vraiment mieux maintenant, » déclara Zagan.

« Vraiment ? Hehehehe…, » déclara Néphy en souriant.

Cette Néphy sourit vraiment beaucoup, n’est-ce pas ?

C’était comme si elle ne savait rien du rejet ou de la perte qu’elle avait vécus. Elle était la définition même d’une petite fille pure. C’était peut-être sa vraie nature depuis le début, et elle s’était rétractée à cause des années d’abus qu’elle avait subies dans le village. Il était heureux qu’elle ait retrouvé son sourire, mais le fait qu’il ne soit revenu que parce qu’elle était devenue une enfant avait laissé Zagan plutôt amer.

Pour tenter de bannir de telles pensées, Zagan essaya de toucher la couronne de fleurs que Néphy avait faite pour lui. Quand il l’avait fait, il avait remarqué qu’il était fait de belles fleurs violettes.

« Je suis surpris que des fleurs aussi délicates fleurissent par ce temps, » déclara Zagan.

La saison commençait à s’approcher de l’hiver, et cela même à Kianoides, ce qui signifiait que Norden, un pays typiquement froid, était déjà en plein hiver. C’est pourquoi Zagan était si surpris que des fleurs soient en fleurs.

« Ce sont des violettes. Elles ne sont pas en saison en ce moment, » dit Foll en penchant la tête sur le côté dans la confusion.

« … Qu’est-ce que tu veux dire ? » demanda Zagan d’un ton qui indiquait clairement qu’il était aussi perplexe que Foll. En réponse, Foll avait dû montrer du doigt le ciel. Et quand il leva les yeux, il vit… un essaim de papillons qui voltigeaient.

« … Hein ? » Zagan s’était levé quand une expression choquée était apparue sur son visage, puis avait dit, « Des papillons… dans ce temps froid ? »

Les papillons étaient une race étroitement liée aux fées, ce qui faisait de leurs ailes des catalyseurs idéaux pour la sorcellerie. C’est pour ça que Zagan les connaissait. Contrairement à la plupart des créatures, elles ne pouvaient pas survivre à un hiver rigoureux. S’il ne s’agissait que d’un seul, il était possible qu’il se soit réveillé par erreur, mais un essaim entier était une tout autre histoire. Après tout, les papillons étaient tellement sensibles au froid qu’ils ne pouvaient même pas éclore s’ils n’étaient pas dans un climat chaud.

Foll regarda autour d’elle, clairement confuse. Et comme Zagan suivait son regard, il remarqua quelque chose d’assez étrange. La veille au soir, les maisons n’avaient tout simplement pas d’habitants à l’intérieur et ne montraient aucun signe de dépérissement. Cependant, ils étaient maintenant envahis par le lierre et la mousse. De plus, des fleurs de toutes les couleurs fleurissaient sur le sol, des papillons voltigeaient à la recherche de nectar, et un vent printanier chaud balayait ses joues. Il n’y avait aucune chance pour que ça ait un sens. Un tel changement n’aurait pas pu se produire dans le temps qu’il lui avait fallu pour lire tous ces documents.

« Le temps ici est devenu fou… Non, l’écoulement du temps lui-même est bizarre. Nous devrions rapidement partir…, » Foll l’en avait informé d’une voix lugubre.

***

Partie 3

Après avoir remarqué l’irrégularité, Zagan avait convoqué tout le monde. Nephteros, Barbatos, Kimaris et Gremory étaient réunis. Chercher pendant qu’elle était sous la forme d’une vieille femme semblait insupportable pour son dos, alors elle était actuellement dans une forme plus jeune et plus belle.

Chastille, qui était chargée de fouiller le manoir, n’était pas revenue. Elle venait juste de commencer à chercher, ce qui excusait largement son absence, mais Barbatos avait dit qu’elle avait trouvé quelque chose d’intéressant. Pour l’instant, son ombre était liée à elle, donc c’était bien même s’ils ne l’avaient pas rappelée de force.

Le sang de haute elfe de Néphy aurait dû la protéger contre la sorcellerie, mais elle a quand même été transformée en enfant. J’aurais dû réaliser que quelque chose de plus fort était en jeu…, Zagan s’était reproché d’avoir raté l’évidence. D’une certaine façon, il n’avait même pas réalisé que quelque chose n’allait pas jusqu’à ce que Foll le lui montre.

Zagan avait essayé de toucher le sol. Même maintenant, ce qui était sur terre avait repoussée alors que de nouvelles pousses surgissaient, ici et là. Le soir, la zone où ils se trouvaient serait sans doute complètement couverte de mauvaises herbes. Il pouvait sentir le flux de mana, et cela lui disait que ce phénomène n’était pas « créé » comme lorsqu’une personne faisait usage de la sorcellerie. C’était clairement contre nature, mais c’était aussi naturel de la même façon que la terre s’était transformée au cours des mois et des années. C’était comme regarder pousser une mer d’arbres à un rythme accéléré.

« C’est donc ça aussi le mysticisme ? Comme c’est gênant. Pour l’instant, devrions-nous sortir d’ici ? » déclara Zagan. Il s’était spécialisé dans la rupture de la sorcellerie, ce qui signifiait qu’il était totalement hors de son élément. De plus, si la barrière autour de cette terre était responsable de la transformation de Néphy en enfant, il y avait une chance qu’en s’en éloignant, elle redeviendrait normale. Et honnêtement, même si cela n’avait pas fonctionné, il aurait peut-être été préférable que ses subordonnés cherchent refuge ailleurs.

« Non, c’est probablement inutile. On dirait que la barrière couvre déjà tout le village. Cependant, quelqu’un comme le Purgatoire peut se faufiler…, » Gremory corrigea la position de la grande faux sur son épaule et secoua la tête en refusant la suggestion de Zagan.

« Vraiment ? » demanda Zagan.

« Peut-être que si c’est juste moi. Cependant, transporter un groupe de personnes à travers tout ça serait assez difficile…, » répondit Barbatos, haussant les épaules tout le temps. La façon dont il avait dit ça donnait l’impression qu’il avait déjà essayé et échoué.

Pas de chance, hein ?

« Mon odorat a été limité. Il est probable que nous finirons par être ramenés ici même si nous essayons de nous enfuir. Celui qui fait ça a le contrôle total…, » Kimaris se tenait le visage tendu alors qu’il transmettait ses pensées.

« Même mon Œil maléfique de Balor est scellé. C’est probablement la même chose pour le souffle de Valefor…, » Gremory possédait un mauvais œil qui pouvait transformer en cendres tout ce qu’elle regardait. C’était une capacité que certains fomoriens possédaient et qui était différente de la sorcellerie par sa nature, et à certains égards, elle était encore plus puissante que le mysticisme.

« Je vois. On a été emprisonnés dans ce village, hein ? » déclara Zagan.

Tout le monde s’était tu alors qu’il exprimait ses réflexions collectives sur la question. Néphy était la seule qui ne comprenait pas vraiment, et elle avait incliné la tête sur le côté avec curiosité.

« … Qu’est-ce qu’on va faire, Zagan ? » demanda Barbatos. Cependant, au lieu de répondre à sa question, Zagan avait simplement posé sa main sur le sol et avait examiné le flux de mana une fois de plus.

C’est assez complexe, mais ce n’est pas comme si je ne pouvais pas non plus le lire…, d’après ses constatations, il y avait probablement un « écart » quelque part. Et le fait que Barbatos ait pu s’échapper avait corroboré sa théorie.

« Au fait, Barbatos, tu te souviens de ce qu’on a mangé au petit-déjeuner ? » Zagan avait interrogé Barbatos pour obtenir des détails.

« Hein ? Qu’est-ce que tu fous… ? » Barbatos fit entendre une voix de colère, mais se tut quand il vit l’expression sérieuse sur le visage de Zagan. Puis, il avait réfléchi et avait dit. « Des restes de soupe et de pain d’hier, et de la salade de plantes sauvages, n’est-ce pas ? Qu’est-ce qu’il y a ? »

« Hm… Alors Kimaris, peux-tu parler de ce qui s’est passé depuis que Néphy a fini comme ça ? » demanda Zagan.

« Sire Zagan, vous nous avez dit, à moi et à Mademoiselle Gremory, d’enquêter sur l’ancienne maison de Lady Néphy parce que mon nez est utile pour traquer les créatures. Et Mademoiselle Gremory est bien versée en sorcellerie qui manipule l’âge. Et dès que nous avons trouvé quelque chose d’étrange, nous devions rentrer sans nous engager dans des hostilités…, » répondit Kimaris avec une expression perplexe.

« Foll. Avant de venir ici, tu as travaillé sur un parterre de fleurs avec Kimaris, non ? Qu’est-ce que tu as déterré à l’époque ? » Zagan avait fini les choses en interrogeant Foll.

« Euh… ? Une mandragore. C’est savoureux comme collation, et ça renforce aussi le mana, alors je les faisais pousser avec Kimry, » répondit Foll.

« C’est vrai. La prochaine fois, essayons d’en faire pousser de jolies fleurs avec un meilleur sol, » déclara Kimaris.

« Hmm…, » Foll ronronna et hocha joyeusement la tête de Kimaris tandis que Zagan brossait doucement la tête de sa fille bien-aimée.

« Quel est l’intérêt de toutes ces questions ? » demanda Barbatos d’un ton agité.

« Voyons voir. Pour l’instant, je peux dire que tous nos souvenirs sont intacts. Seule Néphy est une exception…, » les souvenirs récents de Néphy étaient tous vagues. S’il y avait eu une sorte d’influence malveillante, cela aurait probablement aussi modifié leurs souvenirs des derniers jours. Zagan avait vérifié chacun d’entre eux juste pour s’en assurer, mais il semblait qu’il n’y avait rien d’inhabituel dans leurs souvenirs. Peut-être était-ce dû à leur race, car chacun dans son groupe était différent ?

Peu importe la raison, ils semblaient bien mentalement. En plus, il ne pouvait pas dire si leurs corps tenaient le coup. Cependant, les sorciers avaient naturellement résisté aux effets de la vieillesse, donc ce n’était pas vraiment un problème.

Après avoir confirmé tous ces faits, Zagan avait expliqué sa conclusion comme si ce n’était pas grave.

« Eh bien, nous avons les moyens de le percer par la force. Pour l’instant, poursuivons notre enquête, » déclara Zagan.

Une distorsion temporelle était certainement une chose à surveiller avec prudence, mais il n’y avait aucune trace d’une autre menace. Dans ce cas, faire des histoires ne servirait à rien. C’est la réponse à laquelle Zagan était arrivé.

« La force pure ? Ce n’est pas une barrière faite par sorcellerie, n’est-ce pas ? Vous pouvez faire quelque chose ? » demanda Gremory.

« Qui s’en soucie si ce n’est pas de la sorcellerie ? On peut encore percer avec la sorcellerie, non ? » demanda Zagan.

Bien sûr, Zagan ne pouvait pas le dévorer, mais ce n’était pas son seul talent. Il n’avait pas seulement perdu ses journées dans son château après avoir appris le mysticisme céleste. En fait, il avait mis au point au moins un moyen de faire face à des situations aussi délicates.

Cet endroit finira probablement en terre brûlée où même pas un seul brin d’herbe ne poussera, mais ce n’est pas comme si une personne vivait encore ici…, le seul doute dans son esprit était de savoir si c’était vraiment bien de brûler la ville natale de Néphy. C’est pourquoi il voulait essayer de rassembler quelques indices supplémentaires. Et aussi, Zagan était venu ici pour enquêter sur le lien entre le mysticisme céleste et les Épées Sacrées, donc regarder autour de lui ne pourrait pas faire de mal.

« Vous savez, mettre ça ainsi, cela fait vraiment mal. Vous faites comme si ce n’était pas si grave que ça, » dit Gremory, l’air visiblement déprimé.

« C’est ainsi, c’est tout. Quitter cet endroit n’est pas si difficile. En plus, même si c’était le cas, tu m’aiderais, donc je n’étais en aucun cas inquiet, » déclara Zagan.

En vérité, il s’agissait d’une barrière extrêmement puissante qui avait peut-être même transformé Néphy en enfant, ce qui signifiait qu’il y avait une chance que la même chose arrive un jour à Zagan et les autres. Cependant, ce pouvoir avait simplement piqué le sens de la curiosité de Zagan. Il souhaitait prendre son temps et étudier sa structure.

Mais je suppose que je vais devoir mettre fin aux choses plus tôt s’ils commencent à devenir nerveux…, quoi qu’il en soit, cette situation n’était pas quelque chose dont ils avaient beaucoup de s’inquiéter. Et, alors que les subordonnés de Zagan se détendaient en raison de son manque de tension, Nephteros avait pris la parole pour contester sa détermination.

« Arrêtez-vous là. Je sais ce que vous pensez, mais je ne peux rien faire contre cet obstacle. Le mysticisme céleste n’est pas tout-puissant, donc si vous avez l’intention de dépendre de moi ici…, » déclara Nephteros.

« Je te l’ai déjà dit, tu te souviens ? Tu es une invitée. Une invitée n’a pas besoin d’être troublée pour des choses aussi insignifiantes ! » Zagan avait tapoté Nephteros sur la tête à plusieurs reprises en disant ça.

« Hein… ? Quoi ? » Nephteros avait fait une sorte de visage compliqué, mais elle n’avait pas repoussé la main de Zagan.

« Grande Soeur Nephterosh est comme moi…, » déclara Néphy en tirant sur l’ourlet de la jupe de Nephteros.

« Quoi ? Comment ? Comment ? » demanda Nephteros.

« Tu es contente que Maître Zagan te caresse la tête ! » déclara Néphy.

« Non, ce n’est pas vrai ! » proclama Nephteros en serrant la main de Néphy.

« D-D-Désolée… Je pensais… que tu serais heureuse…, » sanglota Néphy, apparemment choquée par les actions de Nephteros.

« Attends, ce n’est pas une raison pour pleurer ! Je ne suis pas fâchée ou quoi que ce soit du genre, je le jure ! Écoute, tu peux demander à Zagan de te caresser la tête pour que tu te sentes mieux, non ? » Nephteros devint pâle et paniquée quand des larmes apparurent sur le visage de Néphy. Puis, elle avait levé Néphy dans ses bras et avait tendu ses mains vers Zagan dans un appel à l’aide.

« Écoute-moi, Néphy. Nephteros ne te déteste pas. Même quand elle est heureuse, elle a tendance à se sentir gênée si les autres le lui signalent. Tu ferais bien de sympathiser avec son état, » déclara Zagan.

« Vraiment ? » demanda Néphy.

« Oui, il a raison…, » Nephteros répondit d’un signe de tête réticent quand Néphy dirigea ses yeux innocents vers elle.

« J’aime vraiment, vraiment, vraiment beaucoup Grande Soeur Nephterosh ! » s’exclama Néphy, avec un sourire éclatant et énergique sur son visage.

« Argh… Ce… euh… Euh… Bon sang…, » Nephteros poussa un soupir exaspéré après un moment de tergiversation. La vision d’elle qui était incapable de résister à la Petite Néphy était mignonne. Surtout si l’on considère l’indifférence avec laquelle elle la traitait normalement.

« On dirait que tu ne peux pas t’occuper des petits enfants, hein ? » Zagan l’avait taquinée à cause de cette faiblesse. En réponse, elle lâcha simplement un grognement avec un « Hmph », et abaissa Néphy au sol avant de prendre la parole.

« … Ce n’est pas vrai. Je me sens mal pour eux. Les enfants naissent libres de tout péché, n’est-ce pas ? Même toi, tu as fait semblant de laisser tomber une pomme pour aider un enfant sur le bord de la route, n’est-ce pas ? » répliqua Nephteros.

« … Attends un peu. Comment sais-tu ça ? » Le visage de Zagan s’était raidi en entendant son marmonnement si nonchalamment.

L’autre jour, lorsque Zagan s’était rendu à Kianoides avec Néphy, il avait vu un enfant sans abri assis au coin d’une rue. Et en voyant cette figure se chevaucher à celle de son passé, il donna une pomme à l’enfant. Néphy l’avait remarqué, puisqu’elle était juste à côté de lui, mais elle aurait dû être le seul témoin.

Nephteros s’était soudain couvert la bouche comme si c’était un lapsus, mais il était déjà trop tard. Forcée d’avouer ses méfaits, elle répondit à sa question sur un ton timide.

« Maître Bifrons a préparé une boule de cristal pour vous surveiller tous, et c’est ce que j’ai vu quand j’ai jeté un coup d’œil…, » déclara Nephteros.

« Ce type est toujours un voyeur ? » demanda Zagan.

« C’est… C’est vrai ! Je l’ai repéré par hasard en regardant Maître Bifrons ! » déclara Nephteros.

Ne me dis pas que Nephteros regardait parce qu’elle voulait s’entendre avec Néphy ? Zagan lui avait jeté un regard plein de suspicion quand il avait entendu son ton agité.

Peu importe la façon dont il le regardait, Zagan pensait que cette affaire ne concernait pas Bifrons. Si Bifrons était impliqué, ils ne seraient pas restés spectateurs tout le temps. Mais il se demandait pourquoi Nephteros ne s’entendait pas avec Néphy alors qu’elle était si inquiète pour elle.

En bien, je ferais mieux d’arrêter maintenant. J’ai l’impression que cette fille sera plus têtue si je continue à la taquiner…, c’était peut-être la principale différence entre elle et Chastille, qui pouvait supporter d’être taquinée pendant des siècles, mais qui allait rebondir à l’improviste.

La capacité de Chastille à se remettre des insultes était autre chose. Elle avait pour elle une robustesse qui ressemblait à celle d’une mauvaise herbe. Et à cause de cela, les gens qui la taquinent oubliaient souvent comment se retenir et s’amusaient à ses dépens.

D’un autre côté, Nephteros ne donnait pas l’impression d’être une cible aussi facile. Mais ça rendait les taquineries plus amusantes. Pourtant, Zagan était celui qui l’avait étiquetée comme son invitée, alors il savait qu’il devait en finir.

« Eh bien, je ne m’intéresse pas à ce que tu fais, alors dit à Bifrons de faire preuve de modération. La prochaine fois, je ne laisserai pas les choses finir si facilement…, » Zagan haussa légèrement les épaules quand il répondit.

« Je vais faire passer ce message…, » Nephteros hocha la tête. Cependant, Zagan avait l’impression d’entendre son marmonnement. « Toutes mes excuses, Maître Bifrons…, » à elle-même.

« Hohoo, donner une pomme à un enfant dont tu ne connais même pas le nom. Je vois. Mon Archidémon est très généreux, n’est-ce pas ? » Gremory avait fait un sourire espiègle alors qu’elle avait fait une remarque sur leur échange.

« Je l’ai fait sur un coup de tête. Il n’y a pas assez de nourriture dans le monde pour nourrir tous les pauvres gosses que je vois, » déclara Zagan.

***

Partie 4

Il exagérait, et si quelqu’un lui demandait s’il recommencerait, sa réponse honnête serait oui. Cependant, il serait un menteur s’il disait qu’il voulait sauver tous les enfants du monde. Zagan n’était pas un saint qui se souciait de tous les innocents du monde. En fait, il n’avait aucun scrupule à frapper un enfant qui le suppliait sans vergogne de lui donner à manger tout en faisant comme s’ils méritaient sa charité.

« Mais avec le temps, ne seriez-vous pas récompensé ? » Gremory acquiesça d’un signe de tête en faisant cette affirmation.

« Ne sois pas stupide. Qu’est-ce que j’obtiendrai d’un gamin qui rampe sur le bord de la route ? » demanda Zagan.

De tels enfants n’avaient pas beaucoup d’utilité. Leur valeur principale était de servir de sacrifice, mais Zagan méprisait la sorcellerie qui était alimentée par la vie humaine. Et franchement, prendre leur vie pour une seule pomme semblait injuste.

Gremory éclata de rire en entendant la réponse de Zagan. Et puis, elle avait ouvert son manteau et s’était retournée sur place. Quand elle s’était finalement arrêtée, elle avait à peu près la même taille que Foll. Cela avait fait croire à Zagan qu’elle était revenue à sa forme de vieille femme, mais…

« Keeheeheehee, c’est la récompense dont je parlais…, » Gremory avait pris la forme d’une fillette de dix ans. Elle avait des cornes de chèvre tordues, mais ses mains avaient l’air toutes molles, et ses traits du visage étaient très attendrissants. De plus, la façon dont elle clignait des yeux étincelants était la définition même de l’innocence pure. Il était difficile de croire que la vieille femme rebelle était autrefois si charmante.

Néphy et Foll applaudirent à la vue.

« Mish Gremory, c’est incroyable ! » s’exclama Néphy.

« C’est trop cool, Gremory. Apprends-moi à faire ça ! » demanda Foll.

« Fufu. C’est vrai, c’est vrai. Félicitez-moi encore plus ! Je suis reconnue comme un génie, même parmi les fomoriens, alors vous avez de la chance d’assister à une démonstration de mon talent ! » Gremory gonfla sa poitrine d’orgueil alors qu’elle était couverte d’éloges par les deux filles.

Comment quelqu’un d’aussi mignon est-il devenu cette vieille chauve-souris ? Gremory avait totalement déconcerté Zagan et il commença peu à peu à douter que cette jeune fille et cette vieille dame soient une seule et même personne. Mettant de côté le visage sinistre de Zagan, Gremory avait fait signe à Néphy et Foll de la rejoindre.

« Vous deux, tendez-moi l’oreille. Vous m’écoutez ? Mrmrmrmrmrmrmr…, » déclara Gremory.

« Oui ! Compris ! » déclara Néphy.

« Quel est l’intérêt de faire ça ? » demanda Foll.

Malgré les protestations de Foll, les trois fillettes s’étaient alignées, avec Néphy en leur centre, et s’étaient alignés devant Zagan. Et puis, les trois jeunes filles avaient parlé à l’unisson.

« Je t’aime tellement, papa ! »

« H-Hnnngh… ! »

Si mignonne ! Je veux juste les serrer dans mes bras ! Zagan était tombé à genoux. C’était quelque chose qui ne s’était jamais produit, quelles que soient les épreuves auxquelles il avait dû faire face. Zagan avait tenu bon lorsqu’il avait combattu un Archange de front, lorsqu’il s’était retrouvé face aux douze Archidémons, lorsqu’il avait combattu la chimère démoniaque, et même lorsqu’il avait sous les yeux le Seigneur Démon de la Boue. Mais le voici, réduit à un tel état en raison d’une seule phrase.

Maintenant que j’y pense, on ne m’a jamais appelé « papa », hein ? C’était logique, puisque la seule fille de Zagan était Foll, et qu’elle ne l’appelait que par son nom. Malheureusement, à cause de cela, il n’avait jamais connu le pouvoir destructeur de ce mot.

L’une d’entre elles était Gremory, mais il avait toujours le désir de les élever tous les trois avec amour. Après tout, s’il faisait assez d’efforts, ne serait-il pas possible d’élever Gremory comme une fille tranquille ? Il était allé si loin qu’il hébergeait même de telles illusions irréalistes.

Néanmoins, Zagan était un Archidémon. Alors même que son corps tremblait, il se leva.

« Hé, qu’est-ce que tu prépares... Gremory ? » demanda Zagan.

« Keeheeheehee, vous ne vous souvenez pas de ce que j’ai dit ? C’est une récompense que vous pouvez recevoir des enfants. Les paroles de gratitude honnêtes sont très satisfaisantes, n’est-ce pas ? » déclara Gremory en s’accrochant à sa jambe. Puis, elle avait ri et lui avait souri.

S’il n’y avait eu que Gremory, alors il l’aurait repoussée pour agir comme une idiote, mais la présence de Néphy et Foll lui avait donné envie de les enlacer toutes. C’était absolument impossible de les chasser.

 

 

« Zagan, tu veux que je t’appelle “papa” ? » Foll pencha la tête sur le côté quand elle lui posa cette question.

« Argh… Je ne peux pas dire que je déteste l’idée…, » Zagan avait lâché une réponse docile.

« Compris. Je vais m’entraîner…, » Foll hocha la tête comme si elle délibérait de la question en lui répondant.

Foll était la seule vraie enfant parmi les trois filles, ce qui avait dû la rendre assez confuse sur toute la situation… Mais ça ne voulait pas dire qu’elle trouvait ça moins embarrassant. Zagan pouvait voir que ses joues devenaient rouges.

« Hehehehe, donc Maître Zagan est mon père, non ? Je pensais que je n’en avais pas…, » Néphy frotta innocemment son visage contre la jambe de Zagan en disant ça. Et en entendant ces paroles, Zagan fut complètement déconcerté.

« Comment ça, Néphy ? Tu ne connais pas tes parents ? » demanda Zagan.

« Euh, je ne sais pas vraiment… C’est juste que Maître Zagan a été la première personne à me tenir la main et à me traiter comme un parent…, » déclara Néphy.

Néphy n’avait-elle actuellement que des souvenirs de ses cinq ans ? Cela s’additionnerait, puisqu’elle était persécutée à l’époque, mais elle ne savait même pas que ses parents se sentaient mal à l’aise vis-à-vis d’elle. Elle comprenait bien le concept des relations parentales et des familles, de sorte qu’elle ne devait pas savoir qu’elle ne les avait jamais rencontrées. Et tandis que Zagan ruminait sur ce fait, Néphy le regarda avec anxiété.

« Ai-je… encore dit quelque chose de mal ? » demanda Néphy.

« Non, pas du tout. Est-ce que je t’ai déjà grondé avant ? » Zagan aligna sa vue avec celle de Néphy en s’agenouillant sur un genou, puis parla comme s’il la réprimandait. Et, tandis que le bout des oreilles de Néphy tremblait joyeusement, elle lui enroula les bras autour du cou et le serra dans ses bras pour l’embrasser.

« Maître Zagan, je t’aime tellement ! » déclara Néphy.

Zagan lui caressa les cheveux en réfléchissant à ce qu’elle avait dit il y a quelques instants.

« Ai-je… encore dit quelque chose de mal ? » Selon lui, ce n’était pas une déclaration qu’un jeune enfant devrait répéter si souvent.

C’est probablement quelque chose qu’elle s’est habituée à dire parce qu’elle se reprochait pour la façon dont les autres elfes la traitaient…, en d’autres termes, Néphy était revenue à ses manières par défaut de l’époque. La raison pour laquelle elle pouvait sourire constamment était parce que c’était avant qu’elle ne ferme son cœur pour de bon.

Pourquoi suis-je détesté ? Que dois-je faire pour que tout le monde m’aime ? À l’époque, elle avait sûrement de telles pensées. Et si elle avait grandi sous la garde de Zagan à partir de ce jour-là, Néphy aurait pu vivre sans le fardeau de ses souvenirs plus douloureux. Après tout, même les souvenirs d’enfance de Zagan étaient devenus flous à l’adolescence.

« Petite Néphy, les enfants ne font rien de mal. Ils font simplement les mauvaises choses quand on ne leur enseigne pas correctement. C’est pourquoi vous n’avez rien à craindre d’ici…, » Kimaris s’était accroupi devant Néphy et lui sourit en disant cela. Peut-être en était-il arrivé à la même conclusion que Zagan.

« … Vraiment ? » demanda Néphy.

« Bien sûr que oui, » répondit Kimaris.

« Alors, est-ce que je peux demander quelque chose d’égoïste ? » Néphy le supplia en jouant avec ses doigts, et Kimaris lui sourit en réponse.

« Je vous en prie, demandez tout ce que vous voulez, » déclara Kimaris.

Le visage de Néphy s’était éclairci grâce à sa réponse. Et puis, elle lui avait parlé avec un grand sourire sur son visage. « Je peux… caresser ta crinière, Shire Kimry ? »

« Caresser… ? » Kimaris la regarda avec émerveillement. Jamais dans ses rêves les plus fous il ne s’était attendu à une telle demande.

« Je suppose… que je ne peux pas ? » demanda Néphy.

« Non, ça ne me dérange pas. Allez-y, » déclara Kimaris.

« Superrrr, merci ! J’aime aussi Shire Kimry ! » déclara Néphy quand elle commença à caresser sa crinière. Puis, elle l’avait touché jusqu’au menton, ce qui avait fait que Kimaris avait laissé échapper une voix qui était un mélange de bonheur et d’embarras.

« Je vais… devoir rester sous cette forme pendant un moment, hein ? » demanda Kimaris.

« Désolé, Kimaris…, » Zagan y repensa, et il réalisa rapidement que Kimaris passait beaucoup de temps dans le château sous sa forme de lion. Il avait toujours supposé que c’était parce que Foll l’aimait ainsi, mais peut-être que Kimaris aimait simplement passer du temps avec les enfants.

« Qu’est-ce que vous foutez, anciens candidats Archidémon ? Ce n’est pas le moment de faire l’imbécile avec les gosses ! Ne vous souvenez-vous pas de la situation dans laquelle nous sommes ? » Barbatos les avait réprimandés avec un grognement.

« Shire Boboto, tu es en colère ? » Néphy avait fait une tête étonnée en entendant ses plaintes.

« C’est Barbatos, » répliqua Barbatos.

« Oui, Shire Boboto, » déclara Néphy.

« Argh… Peu importe, c’est très bien, » déclara Barbatos, renonçant à la corriger. Il semblait que son nom était difficile à prononcer.

Ne t’es-tu pas aussi adouci ? Peut-être qu’il se sentait seul parce que personne ne faisait attention à lui. La réaction de Barbatos avait été si décevante que ses véritables sentiments avaient été mis en doute. Et alors même qu’il faisait la grimace, il s’était accroupi devant Néphy.

« Tu m’entends, petite morveuse ? On dirait que Zagan ne peut pas jouer les durs devant toi. C’est le moment d’être égoïste et de lui causer toutes sortes d’ennuis, tu m’entends ? » déclara Barbatos.

« Tu ne peux pas embêter Maître Zagan ! » déclara Néphy.

« Oh, franchement, ce lion ne t’a pas dit de demander ce que tu voulais ? Les gosses comme toi existent pour déranger les adultes. Et je parie que ce type sera plus heureux si tu le fais. N’est-ce pas ? Ne veux-tu pas aussi rendre Zagan heureux, argh ? » Zagan avait impitoyablement enfoncé son poing dans la tête du méchant qui tentait de corrompre une fille si pure.

« Écoute-moi, Néphy. Ne suis pas les paroles d’adultes suspects, d’accord ? » déclara Zagan.

« Oui, Maître Zagan ! Mais Shire Boboto n’est-il pas aussi une bonne personne ? » demanda Néphy.

« Je n’en suis pas si sûr…, » Zagan regarda Barbatos d’un air noir, qui avait fini avec un grognement inconfortable. Et pendant que tout cela se passait, Nephteros s’était finalement remise de ses troubles, et elle avait poussé un soupir.

« Êtes-vous tous… vraiment en train de vous calmer, hein ? » Nephteros se parlait probablement à elle-même, mais en entendant cela, Gremory avait eu un large sourire.

« Hé, Grande Sœur, joue avec moi ! » déclara Gremory.

« Joue ! » Foll se leva et l’enlaça, suivant l’exemple de Gremory.

« Ah, h-hey, qu’est-ce que tu fais ? Arrêtez ! Arrêtez ça ! » Nephteros protesta.

« Grande Soeur, joue avec moi ! » Néphy s’était fait entendre quand elle avait rejoint les deux autres filles.

« Argh, petite…, » Nephteros voulait protester à nouveau, mais elle se souvenait qu’être froide avec Néphy l’avait réduite aux larmes il y a quelques instants. Et bien qu’elle avait eu l’air extrêmement en conflit à ce sujet, elle avait fini par affaisser ses épaules pour signifier sa démission.

« … Qu’est-ce que vous voulez faire ? » demanda Nephteros.

« Jouons au loup ! » déclara Gremory.

« Allons chanter ! » déclara Foll.

« Allons cueillir des fleurs ! » déclara Néphy.

« Réduisez un peu la liste ! » Nephteros se moqua d’elles avec colère, ce qui fit rire les trois petites filles, bien qu’elle ne soit pas si fâchée que ça. Bien sûr, il y avait une expression amère sur son visage, mais elle voulait vraiment passer du temps avec elles.

« Qu’est-ce qui se passe ici ? » Chastille remarqua ça en sortant du manoir de l’aînée.

Gremory s’était transformée en petite fille, Kimaris servait de chaise à trois petites filles, Barbatos s’était effondré et Nephteros jouait avec elles.

Vu le point de vue de Chastille, c’était vraiment une situation foireuse. Cependant, Zagan secoua simplement la tête comme si ce n’était pas grave.

« Tout le monde a besoin d’un peu de repos de temps en temps, » déclara Zagan.

« Un temps d’arrêt, tu dis ? Ne sommes-nous pas en danger en ce moment ? » demanda Chastille.

« Oh, non, non. Ne t’inquiète pas. Nous sommes en parfaite sécurité. Je ferai exploser ce village en morceaux quand on voudra sortir de cette barrière, » annonça Zagan de façon décontractée.

« Tu vas le faire sauter… ? N’est-ce pas la ville natale de Néphy ? » demanda Chastille.

« Et… ? Eh bien, penses-y comme notre dernier recours. Plus important encore, as-tu trouvé quelque chose ? » Zagan l’avait appelée plus tôt, mais Chastille avait continué son enquête sur le manoir au lieu de répondre à son appel. Ça devait vouloir dire quelque chose.

« Oui, » Chastille avait fait un signe de tête. Puis, poursuit-elle, « j’ai trouvé un compartiment caché dans la chambre de l’aîné du village. Et voici ce que j’ai trouvé stocké à l’intérieur…, » Chastille avait sorti un seul livre de son dos. C’était écrit à la main, tout comme les journaux du village, mais en voyant le titre, Zagan avait plissé les yeux.

« Comprends-tu le sens des mots sur la couverture ? » demanda Zagan.

« Non, je ne peux pas lire la langue elfique… Est-ce quelque chose d’important ? » demanda Chastille.

« Eh bien, oui…, » Zagan était excité par la vue. Et bien sûr, il l’était, puisque c’était exactement ce qu’il cherchait. Néanmoins, il se demandait s’il était vraiment d’accord pour qu’il regarde le contenu. Il avait souffert face à cette décision, mais il avait finalement décidé qu’il ne pouvait pas laisser passer l’indice que Chastille avait trouvé. Ce n’était pas le moment d’hésiter. Et ainsi, Zagan avait accepté le journal.

« Ce livre était-il la seule chose que tu as trouvée ? » demanda Zagan.

« Non, c’était caché à côté…, » Chastille tenait un pendentif en disant ça. Bien que, peut-être que « pendentif » n’était pas un mot approprié. Il ressemblait plus à une pointe de flèche qui avait été suspendue. Il n’était pas si grand, mais il avait dix joyaux sertis à sa surface et un symbole comme celui d’un arbre sculpté en son centre.

« Ce n’est pas un symbole utilisé pour la sorcellerie, mais j’ai déjà vu ça avant. Si je me souviens bien, c’est l’arbre de vie, et c’est un symbole qui représente le Célestian… As-tu trouvé ça à côté de ce journal ? » Zagan hocha la tête quand il interrogea Chastille.

« Oui, on dirait une antiquité, mais je ne sais pas ce que ça vaut, » répondit Chastille en acquiesçant de la tête à Zagan.

« Pourquoi ne me le donnes-tu pas… ? » demanda Zagan.

« Oh, OK…, » déclara Chastille.

Cela avait l’air d’être en argent, mais ce n’était pas le cas. La chose était dotée d’un mana terriblement puissant, et le taper avec son ongle suffisait à convaincre Zagan qu’il était beaucoup plus robuste qu’une épée normale. C’était si fort qu’on avait presque l’impression qu’il était fait en pétrissant ensemble le mana lui-même…

« Est-ce du mithril ? » se demanda Zagan à voix haute.

« Du mithril, tu dis ? Tu veux dire la substance que l’on dit être au même niveau que le métal des dieux utilisé dans les légendes, l’orichalque ? » demanda Chastille.

« Ouais. C’est la première fois que je vois la vraie chose. J’aurais dû savoir qu’un village elfique caché en avait dans le coin, » déclara Zagan.

« Hé, attends, c’est vraiment du mithril !? » Barbatos s’était levé dès qu’il les avait entendus parler de cette substance rare.

« Ferme-la. Ceci appartient probablement à Néphy, » déclara Zagan. Mais il devait faire attention, car quelqu’un aurait pu le piéger.

Je suppose que je trouverai si c’est dangereux avant de le remettre à Néphy.

« Oh, bon, laisse-moi au moins jeter un coup d’œil ! En fait, où diable as-tu trouvé ce truc ? » demanda Barbatos.

« Je l’ai trouvé. Interroge au moins la bonne personne ! » déclara Chastille avec une expression exaspérée bien visible sur son visage.

« H-Hey, Zagan ? C’est… elle qui l’a trouvé, c’est ça ? Cette pleurnicharde, je veux dire…, » Barbatos avait l’air complètement décontenancé par les mots de Chastille.

« Oui, c’est elle, d’accord, » déclara Zagan.

« Cette barrière doit réécrire les lois de l’univers ! C’est la seule façon d’expliquer qu’elle est vraiment utile pour changer, » répliqua Barbatos.

« Comment oses-tu… ne crois-tu pas que tu vas trop loin ? » demanda Chastille.

« Et elle ne pleure pas, même si je l’ai insultée !? » Barbatos tomba à genoux, agissant comme si quelque chose qui dépassait son entendement s’était produit.

« Je suis en plein milieu de mes devoirs professionnels en ce moment. Ne crois-tu pas qu’il est temps que tu deviennes sérieux ? Je ne déteste pas qu’on me taquine, mais il y a un temps et un lieu pour tout, » affirma Chastille.

Aime-t-elle vraiment qu’on la taquine ? Zagan n’en croyait pas ses oreilles, mais ses paroles semblaient choquer encore plus Barbatos.

« Je n’y crois pas ! Qu’est-ce que c’est que ce sentiment ? Est-ce que… je tremble ? » Barbatos grognait et marmonnait à plusieurs reprises de manière conflictuelle. Il semblait troublé par sa nouvelle connaissance des sentiments de Chastille.

« Je vais me pencher là-dessus. Je te laisse Néphy et les autres, » déclara Zagan en se levant et en regardant Chastille.

« Ça me va, mais dis-moi une chose avant de partir. Sais-tu lire la langue des elfes, non ? » demanda Chastille.

« Ouais. Et ? » demanda Zagan.

« Quel est le titre de ce livre ? » répliqua Chastille d’un ton digne.

Zagan fut surpris par sa question, mais il reprit rapidement son sang-froid et décida qu’elle méritait une explication après s’être donné la peine de la trouver.

« Nephilim. Ça veut dire celui qui est tombé du ciel. Je pense… que c’est la racine du nom de Néphy, » déclara Zagan.

Autrement dit, Chastille avait trouvé un journal sur Néphy.

***

Partie 5

Le journal avait commencé par la préface suivante.

Aujourd’hui, il n’y a que moi qui le sache, mais il y avait autrefois un diable dans ce village. Le diable a quitté le village il y a longtemps, mais juste une fois, il est revenu pour une seule journée. Et quand c’est arrivé, le diable a laissé un bébé. Cette enfant est peut-être le signe avant-coureur d’une calamité, c’est pourquoi je documente toutes ces informations. Si le diable revient vraiment un jour, je prie pour que cela vous aide à le vaincre.

— Mois du Dragon, Jour de l’Eau.

Il s’est passé quelque chose de terrifiant. Ce diable est revenu au village.

C’est la faute de cette maudite et répugnante enfant maudite. Quel genre d’ennuis va-t-il arriver à ce village ?

Quand j’étais enfant, ce diable était déjà une calamité qui rongeait ce village comme un parasite. Beaucoup de mes frères ont perdu la vie quand ils ont été utilisés comme sacrifices ou sujets d’essai.

J’ai l’impression de les entendre encore quand je ferme les yeux. Il n’y a pas eu un seul jour où leurs cris ont cessé. Ils me traversent l’esprit, me hantent sans cesse.

Comment ce diable ose-t-il amener un bébé dans ce village ! Bien sûr, il m’a dit que je pouvais faire bouillir ou brûler ce bébé comme bon me semble avant de partir, mais c’est beaucoup trop suspect.

Le bébé portait un pendentif en mithril inspiré de l’Arbre de vie. Il semblait être une œuvre d’art, mais je ne connais pas sa véritable nature, alors je l’ai confisquée.

Je sais que le bébé ne porte pas de péché, mais il est aussi clair pour moi que l’enfant peut devenir un autre démon. J’ai hésité en réfléchissant à ce que je devais faire, mais j’ai finalement décidé de tuer le bébé.

C’est pour le bien de tous. Même si je déteste ça, je dois agir dans le meilleur intérêt de notre village.

Cependant, je n’ai pas pu le tuer. Cette chose était déjà un diable. Les arbres de la forêt se sont précipités vers moi comme s’ils possédaient leur propre volonté, arrachant mon bras qui tenait la lame.

Quel enfant terrifiant ! J’ai pensé à essayer de l’affamer, mais la forêt l’a quand même maintenu en vie.

Je me suis rendu compte que nous n’avions aucun moyen de tuer cette chose, alors j’ai confié le bébé aux archers les plus compétents du village, les Neruels. J’ai pitié d’eux, mais dans le pire des cas, ils sont les seuls à avoir assez de pouvoir pour se protéger.

— omis —

***

— Mois du Lion, Jour du Feu.

Cinq ans se sont écoulés depuis l’arrivée de l’enfant maudite.

La chose grandit assez vite. Les Neruels l’ont confiné à la cave, mais quand elle émerge de temps en temps, il y a toujours un sourire étrange présent sur son visage. C’est répugnant.

Les habitants du village se sont demandé s’il fallait l’enchaîner, mais je sais qu’il est inutile de l’attacher.

Je les ai rejetés à l’époque en disant qu’il serait injuste de faire une telle chose, mais il est clair comme de l’eau de roche que ma décision suscite l’insatisfaction.

La seule chance est peut-être le fait que la forêt est silencieuse depuis que j’ai perdu mon bras. Grâce à cela, le voile de la peur sur le village est mince.

C’est certainement l’avantage de donner l’ordre strict qu’il ne faut pas lui faire de mal. Tout le monde est heureux parce qu’ils pensent qu’elle n’a aucun pouvoir.

Oui, je n’ai même pas dit aux Neruels comment j’ai perdu mon bras. Personne d’autre n’a besoin de connaître ce cauchemar.

Même si les gens du village la détestent, ils n’ont pas l’air d’en avoir peur. C’est bien pour eux de ne pas savoir que c’est un diable avec assez de pouvoir pour anéantir notre village en un seul souffle. Ils seront plus heureux comme ça. Mon seul souci qui me reste est de savoir combien de temps cette chose restera docile…

— omis —

***

— Mois de la Sylphe, Jour de la Terre.

Dix ans se sont écoulés depuis l’arrivée de l’enfant maudite.

Elle ne sort plus, et ce sourire étrange a disparu. Les habitants du village ont cessé de se soucier de son existence, et le fardeau des Neruels semble s’être considérablement allégé.

C’est bien que cela soit paisible, mais je ne peux pas me détendre. J’ai récemment trouvé le cadavre d’un oiseau étrange près du village.

C’est probablement un familier de sorcier. Et c’est la troisième fois que j’en vois une dans le mois de la Sylphe..

Quelque chose de l’extérieur essaie peut-être d’envahir notre village. Et quand j’y pense, le diable me vient à l’esprit.

Peut-être que maintenant que l’enfant maudite a grandi, il vient la récupérer ? Je peux spéculer autant que je le veux, mais je n’ai aucun moyen de savoir quelles sont ses véritables intentions.

Est-ce le résultat que le diable désirait ? Où n’est-il pas allé comme il l’a voulu ? Je ne sais pas, je ne sais pas. Cependant, je sais qu’une terrible calamité nous attend dans un avenir proche.

Je ne peux pas permettre que cela se produise. Mais, je crois aussi… qu’il y a l’option d’avoir l’enfant maudite en conflit avec le diable…

***

Partie 6

« … Je ne peux même pas supporter de regarder ça…, » Zagan avait fermé le livre, ce qui lui avait même donné la nausée, après l’avoir terminé. Il était actuellement dans la chambre de l’aîné du village. Le journal n’était pas si long que ça, et il avait fini de le lire en une minute.

L’auteur était clairement l’aînée, et elle expliquait comment Néphy était devenue la fille déprimée qu’il avait rencontrée pour la première fois. Tout cela parce que personne n’avait réalisé que la petite fille montrait un sourire pur dans l’espoir de s’entendre avec les autres.

Il semble que ce joli sourire leur paraissait étrange à cause de leur paranoïa.

Eh bien, c’était peut-être raisonnable, étant donné que leur première rencontre s’était terminée par la perte d’un bras, mais l’aîné recevait tout simplement ce qu’il méritait pour avoir en premier lieu essayé de tuer Néphy.

Tandis que Zagan poussait un seul soupir, il lança le journal en l’air. Et sans bruit, il s’était transformé en cendre et s’était dissipé avant de toucher le sol. Il avait de la peine pour Chastille, qui avait fait tout son possible pour la retrouver, mais Zagan ne voulait pas que Néphy le voie un jour. De plus, il pouvait mémoriser le contenu d’un livre en ne le lisant qu’une seule fois, de sorte qu’il n’était pas nécessaire de laisser traîner une chose aussi désagréable.

Dois-je réduire ce village en cendres après notre enquête ? Au début, Zagan pensait attendre que Néphy parvienne à comprendre ses sentiments, mais il ne pensait plus que c’était une bonne idée. Mais il n’avait pas l’intention de dire que c’était pour le bien de Néphy. S’il utilisait une telle excuse, il ne serait pas différent de celui qui avait écrit ce journal. Les sorciers comme lui détestaient les gens qui prétendaient agir pour le bien commun.

Zagan n’aimait pas ça du tout, et il ne pouvait pas leur pardonner, donc la seule option qui restait était de les effacer de la surface de ce monde. Même s’ils étaient déjà morts, il éliminerait toutes les traces.

Zagan avait trouvé Chastille et Barbatos qui l’attendaient alors qu’il sortait du manoir de l’aîné. Il semblerait qu’ils étaient curieux de connaître le contenu du journal. Et, en regardant le visage de Zagan, ils avaient reculé d’un cran.

« H-Hey… Tu as déjà fini de lire ? Alors, c’était quoi ce livre ? » demanda Barbatos.

« C’est des cendres maintenant, » répondit Zagan.

« Hein ? » Barbatos était à court de mots et Chastille affichait une expression inquiète.

« C’est probablement mieux… de ne pas demander ce qui était écrit dedans, hein ? » demanda Chastille.

« Eh bien, j’ai réussi au moins à y trouver plusieurs indices, » répondit Zagan en haussant les épaules comme si ce n’était pas grand-chose.

« Des indices ? » Chastille inclina la tête sur le côté, ce qui provoqua un signe de tête de la part de Zagan.

« On dirait que Néphy n’est pas née dans ce village. Une enfant abandonnée… Non, ce n’est pas tout à fait exact, mais il semble qu’elle ait été amenée dans ce village quand elle était bébé. Et en plus, celui qui l’a déposée était considéré comme un diable par ce village, c’est pourquoi ils l’ont tous maltraitée. »

Bizarrement, Chastille avait souri de soulagement en entendant ces mots. « Je vois. Alors c’est une bonne nouvelle. »

« … Comment ça ? » Zagan répondit involontairement d’un ton critique, ce qui fit acquiescer Chastille.

« Ça veut dire que la vraie famille de Néphy ne faisait pas partie de ce village, non ? Je ne sais pas si elle se sentira mieux, mais le fait que sa famille soit encore en vie est une bonne nouvelle, n’est-ce pas ? » demanda Chastille.

« Je suis surpris que tu puisses voir les choses de cette façon. Je veux dire, même s’ils sont vivants, ça veut juste dire qu’ils l’ont abandonnée, non ? » Zagan la fixa d’un air émerveillé en lui répondant.

En réponse, Chastille avait cligné des yeux, comme si elle disait : « Est-ce à toi de parler ? »

« Même toi, tu as essayé de garder Néphy à distance une fois, n’est-ce pas ? Pourquoi n’était-ce pas le cas ici ? » Chastille avait répondu d’une manière concrète.

Zagan avait une fois blessé Néphy et l’avait tenue à distance. C’était parce qu’il avait peur en rencontrant les douze Archidémons. À l’époque, il savait qu’il deviendrait un jour un allié de ces monstres. Cependant, il souhaitait épargner à Néphy un tel sort. Zagan voulait que Néphy vive sous la lumière du jour. C’était une pensée stupide provoquée par sa propre faiblesse. Après tout, un vrai homme protégerait absolument tout ce qui lui est cher, y compris Néphy elle-même.

En d’autres termes, elle essaie de dire que les parents de Néphy ont peut-être aussi fait la même erreur… ? Zagan avait involontairement formé un sourire amer.

« C’est un point de vue assez optimiste, » déclara Zagan.

« En te voyant tous comme tu es, je veux croire que c’est le cas…, » l’opinion de Chastille était tout à fait inhabituelle. C’était comme de placer tout le monde dans le même panier.

« Hein ? Ne vas-tu pas les traquer et te venger ? » demanda Barbatos en plissant ses sourcils.

« … Pourquoi n’as-tu jamais eu que des idées aussi dégoûtantes ? » demanda Chastille.

« Selon toi, les sorciers, c’est quoi ? » demanda Barbatos.

Zagan se sentit étrangement soulagé en les voyant se chamailler.

Ces deux-là se complètent, n’est-ce pas ? Honnêtement, il avait l’impression qu’ils tenaient habilement un numéro d’équilibriste. Et en même temps, Zagan s’était rendu compte que la colère qu’il nourrissait depuis qu’il avait lu le journal s’amenuisait.

« Eh bien, je suppose que je vais me limiter à faire sauter le manoir de l’aîné, » déclara Zagan.

« Pourquoi s’embêter ? » s’enquit Barbatos.

« Je suppose que c’est pour me distraire, non ? » répondit Zagan avec résolution. Barbatos était resté abasourdi. Et Chastille s’était mise à rire à côté de lui.

« Déjà des blagues, hein ? Ça doit vouloir dire que tu es revenu à la normale maintenant, » déclara Chastille.

« Hein… ? Mais je ne faisais pas de blague, » déclara Zagan.

« Quoi ? Ce n’était pas une blague ? » Chastille avait été choquée pour une raison inconnue, mais Zagan avait l’impression qu’il comprenait ce qu’elle voulait dire.

L’ai-je fait s’inquiéter quand à mon état d’esprit ? Eh bien, Zagan était conscient qu’il devait sembler sur les nerfs, alors peut-être que le désir de Chastille de le réconforter avait du sens.

Même si c’est une pleurnicheuse inutile, elle sait quand il faut être sérieuse. Au moins, elle avait combattu Zagan une fois pour des motifs égaux.

« Il y avait un autre indice dans le journal. Il est probable que le “diable” ou quoi que ce soit du journal est celui qui a attaqué Néphy, » déclara Zagan.

« Hein… ? Attends un peu. Si c’est vrai, alors ce “diable” ou quoi que ce soit d’autre ne serait-il pas un parent de Néphy ? » demanda Chastille.

« La possibilité existe, mais je n’ai aucune preuve. Pour ce qu’on en sait, elle a été enlevée quand elle était bébé, non ? » demanda Zagan.

« C’est… C’est… vrai…, » Chastille acquiesça sans réfuter sa déclaration.

« Mais alors, pourquoi ce type est-il le coupable ? » Barbatos pencha la tête sur le côté quand il interrogea Zagan.

« Un processus d’élimination. Il n’y a presque pas d’autres suspects quand il s’agit d’individus qui peuvent aller et venir d’un village caché dont même les Archidémons ignoraient l’existence. En plus, ils doivent aussi être des elfes. Le “diable” dont parlait le journal était certainement un autochtone, » expliqua Zagan.

« Hm… Le seul sorcier elfes célèbre qui me vienne à l’esprit est la “Reine des fées” Titania, » déclara Barbatos en se caressant le menton, plongé au fond de sa pensée. Zagan avait déjà entendu ce nom auparavant.

« Veux-tu parler de l’elfe qui a défié l’Archidémon Orias et a perdu ? » demanda Zagan.

L’Archidémon Orias était toujours en vie. En fait, cet Archidémon aurait dû être présent au rassemblement où Zagan avait rejoint leurs rangs.

« Ouais. Titania était déterminée à créer un pays elfes, alors elle a dirigé une armée d’acolyte utilisant la sorcellerie elfes et s’est battue contre Orias. C’est toujours considéré comme la plus grande bataille contre les Archidémons de l’histoire, » déclara Barbatos.

Il n’aurait certainement pas été difficile pour une elfe aussi habile de transformer Néphy en enfant ou de former la barrière qui entourait le village. Cependant, Zagan secoua la tête.

« Titania n’est-elle pas morte il y a plusieurs centaines d’années ? » demanda Zagan.

« Oui, mais je n’ai jamais entendu parler d’autres sorciers elfes. La plupart d’entre eux gardent leur identité secrète, puisqu’ils se font tuer quand on les découvre, » déclara Barbatos.

C’était la même chose que Foll cachant le fait qu’elle était un dragon. Les elfes étaient utilisés comme sacrifices et catalyseurs, et même une seule mèche de cheveux ou une seule goutte de sang présentait une valeur extraordinaire, assez de valeur pour que cela vaille la peine de regarder la mort dans les yeux pour obtenir un maigre montant. Sorcier ou non, il y avait d’innombrables personnes qui voulaient mettre la main dessus. Et à cause de cela, un sorcier elfes ne dévoilerait jamais son identité.

Je suppose que j’essaierai de contacter Orias dès qu’on sera sortis d’ici…, Zagan n’en avait pas vraiment envie, mais cet Archidémon semblait familier avec les sorciers elfes. Et s’il était peut-être impliqué dans leur situation difficile actuelle, ce serait bien de le tuer en réponse. Après tout, rien ne changeait le fait que Zagan était furieux.

« Je peux traquer le coupable quand je veux. Plus importants encore, comment vont Néphy et les autres ? » demanda Zagan alors qu’il se retirait de ses pensées meurtrières.

« Si tu cherches Néphy, elle est là-bas, » dit Chastille en montrant du doigt la place au milieu du village. Tandis qu’il regardait, Zagan aperçut trois jeunes filles appuyées contre Kimaris sous sa forme de lion.

***

Partie 7

« Hmm. Donc elle dort, » déclara Zagan.

Chastille et Barbatos retournèrent au manoir pour ramasser les objets de valeur avant que Zagan ne les réduise en pièces. Ce n’était pas comme s’il avait l’intention de le détruire tout de suite, mais il était heureux qu’ils fassent tout le nécessaire pour quand cela arrivera, alors il ne les avait pas arrêtés.

Kimaris était recroquevillé sous un grand arbre au milieu du village, et les trois petites filles à côté de lui dormaient toutes profondément. Nephteros était assise à côté d’eux, serrant ses genoux dans ses bras. Il semblait qu’elle était épuisée, car elle avait l’air épuisée.

« … Hé, c’est ta famille là-bas, non ? Pourquoi dois-je être leur baby-sitter ? » Nephteros interrogea Zagan avec un reflet de gêne sur son visage. Même si elle avait découvert qu’elle était coincée à faire du baby-sitting, elle aurait pu s’enfuir, mais elle était quand même restée.

« Eh bien, désolé pour ça. Tu as mes remerciements, » répondit Zagan, ce qui fit que Nephteros le regarda avec émerveillement.

« J’y pense depuis un bon moment, mais tu es vraiment un Archidémon atypique, hein ? » déclara Nephteros.

« Cependant, j’ai essayé d’être plus arrogant et audacieux…, » déclara Zagan.

« Une personne vraiment arrogante ne ferait pas des remerciements aux autres, » déclara Nephteros.

Zagan haussa simplement les épaules en réalisant que Nephteros avait raison. Et puis, il regarda les petites filles qui semblaient dormir confortablement.

Elles sont toutes si mignonnes quand elles dorment…, Néphy et Foll étaient déjà des anges, mais même Gremory avait l’air adorable, ce qui le surprenait. Et, tandis qu’il les regardait avec une expression charmante, Nephteros leva les yeux vers Zagan comme si elle avait quelque chose à dire.

« Quoi ? As-tu quelque chose à dire ? » demanda Zagan.

« Pas vraiment. Ce n’est pas comme si je me plaignais ou quoi que ce soit, mais…, » déclara Nephteros.

« Si tu as quelque chose en tête, essaie d’en parler. On ne sait jamais, cela pourrait s’avérer utile dans cette situation, » affirma Zagan dans une tentative d’apaiser la tension de Nephteros. Il avait l’intention de dire cela sur un ton aussi doux que possible, mais ce n’était pas comme si n’importe qui d’autre que Néphy pouvait bien lire entre les lignes, alors il devait juste espérer qu’elle y réussisse un peu.

« Mais ça n’a rien à voir avec ce village…, » Nephteros avait ouvert la bouche pour parler, apparemment toujours sur les nerfs.

« Ça ne me dérange pas. Parle, » exhortas doucement Zagan. Encouragée par ses paroles, Nephteros commença timidement à parler.

« Te souviens-tu quand tu avais à peu près le même âge que ces enfants ? » demanda Nephteros.

C’était une question complètement aléatoire, donc la tentative de Nephteros d’éviter de la poser avait du sens.

« Voyons voir. Tout ce dont je me souviens ne vaut rien, mais je me souviens d’eux, oui, » répondit Zagan, hochant la tête vers Nephteros malgré sa confusion.

« … Par exemple ? » demanda Nephteros.

« Comme quand je n’ai pas réussi à m’enfuir après avoir volé de la nourriture et que j’ai failli me faire battre à mort, ou quand j’ai passé une semaine entière sans rien manger et que j’ai réussi à trouver du pain moisit, mais cela m’a laissé errer à la frontière de la mort à cause de la maladie, ou quand j’ai été attiré par un sorcier, enlevé et presque utilisé comme un sacrifice. Ce genre de choses, en gros…, » Zagan avait essayé de parler de divers souvenirs, mais tous avaient fini par pointer du doigt la nourriture à la fin. Comme c’est embarrassant !

« Est-il normal d’avoir seulement des souvenirs d’expériences de mort imminente ? » demanda Nephteros.

« Hm… Eh bien, j’ai eu tellement d’expériences de ce genre que j’ai tout simplement dû devenir sorcier. Je suppose que ce n’est probablement pas normal du tout, hein ? » Zagan n’avait rien compris de la bonne manière à ce sujet, mais il n’y avait personne pour le signaler.

« Puis-je… parler d’un truc un peu bizarre ? » demanda Nephteros alors qu’elle continuait à serrer ses genoux.

« Vas-y, » répondit instantanément Zagan. Il pouvait dire qu’elle s’inquiétait de quelque chose. Mettant de côté la question de savoir s’il pouvait lui donner des conseils, Zagan savait qu’il pouvait au moins l’écouter. Et lorsqu’on lui avait dit d’aller de l’avant, Nephteros avait commencé à parler d’une voix effrayée.

« Je ne me souviens de rien quand j’avais leur âge, » déclara Nephteros.

« As-tu perdu la mémoire ? » demanda Zagan en plissant son front.

« … Je ne sais pas. Pour être honnête, je n’y avais jamais pensé jusqu’à maintenant, » déclara Nephteros.

Servir sous les ordres d’un Archidémon ne lui avait pas donné l’occasion de s’impliquer auprès des enfants, alors c’était peut-être tout naturel.

« Et aussi, pourquoi Néphy a-t-elle le même visage que moi… ? » demanda Nephteros.

Zagan était en fait celui qui voulait poser cette question, mais il semblait qu’elle ne connaissait pas la réponse elle-même.

« Qui suis-je… ? » demanda Nephteros d’une voix tremblante, prête à éclater en larmes à tout moment.

 

 

Demande ça à quelqu’un comme Chastille, pas à moi…, Zagan n’était même pas douée pour réconforter Néphy. Il ne savait pas quoi dire dans ces moments-là. Alors, après s’en être inquiété pendant un certain temps, il s’était contenté de renifler d’un ton ennuyeux.

« Comme c’est inutile ! » déclara Zagan.

« … » Nephteros affaissa silencieusement ses épaules tandis que Zagan continuait à parler.

« Quel genre de réponse attends-tu ? Franchement, même moi, je ne sais pas qui je suis ni où je suis né. Mais quand même, ne suis-je pas juste moi ? Je veux dire, comment une personne peut-elle être quelqu’un d’autre que ce qu’elle est en ce moment ? » demanda Zagan.

Nephteros fixa Zagan avec une expression vide. Elle était restée confuse, ne sachant pas s’il se moquait d’elle ou s’il la réprimandait, et peu de temps après, elle avait ouvert la bouche pour essayer de comprendre ce qui se passait.

« Se pourrait-il… que tu essaies de me réconforter ? » demanda Nephteros.

« Prends-le comme tu le veux, » répondit Zagan nonchalamment. Cependant, à l’instant suivant, il avait ouvert en grand les yeux, et il avait été surpris. Il fut stupéfait par la vue de la bouche de Nephteros se détachant et formant un doux sourire.

« Je vois. J’ai l’impression de comprendre enfin pourquoi Néphélia a dit que la façon dont tu t’inquiètes des choses est mignonne, » déclara Nephteros.

« … Tu crois que je ne vais pas te tuer juste parce que tu es une invitée ? » répondit Zagan d’un ton clairement agité.

« Pour l’instant, je suppose que je devrais te remercier. Je me sens… juste un peu mieux maintenant, » déclara Nephteros en se levant avec un sourire amer. Zagan avait trouvé son expression de gratitude très embarrassante, alors il n’avait fait que hausser les épaules.

« Au fait, qu’est-ce que c’est ? » Nephteros plissant ses sourcils tout en interrogeant Zagan.

« Qu’est-ce que tu veux dire… ? Oh, ça ? » s’exclama Zagan en réalisant que Nephteros montrait le pendentif en mithril. C’était celui qu’ils avaient trouvé à côté du journal sur Néphy. En un rien de temps, la chaîne était sortie de sa poche, et elle se balançait.

Maintenant que j’y pense, je n’ai pas encore examiné cette chose…, Zagan avait sorti le pendentif de sa poche quand il réalisa son erreur.

« C’était caché dans le manoir de l’aîné. Je ne l’ai pas encore examiné, mais il semble qu’il y ait un mécanisme qui y soit lié, » déclara Zagan.

« Vraiment ? Puis-je jeter un coup d’œil ? » demanda Nephteros.

« Ça ne me dérange pas, mais ne le casse pas, d’accord ? » déclara Zagan.

« Je ne le ferai pas, » répondit Nephteros d’un ton exaspéré. Puis, elle avait pris le pendentif et commença à l’examiner, et au bout d’un moment elle plissa les sourcils.

« On dirait que ça s’ouvre ici. Es-tu sûr que c’est fermé ? » demanda Nephteros.

« Quoi, vraiment ? » Zagan avait regardé de plus près le pendentif après qu’on lui ait fait remarquer ce fait. C’est à ce moment-là qu’il avait remarqué que le pendentif avait un petit trou dans celui-ci.

« Peux-tu l’ouvrir ? » demanda Zagan.

« Je vais essayer…, » déclara Nephteros en essayant de le gratter avec ses ongles plusieurs fois. Finalement, elle avait semblé trouver un fermoir et l’avait enfoncé, ce qui avait ouvert le pendentif d’un simple clic. Et à l’intérieur, il y avait un seul portrait et une courte inscription.

« Est-ce que c’est... Néphy et sa mère ? » demanda Nephteros.

Le portrait était une peinture d’un bébé aux cheveux blancs tenu dans les bras d’une jeune elfe. La femme plus âgée était probablement la mère de Néphy, car elles se ressemblaient. Elle possédait aussi des cheveux blancs et des yeux d’azur… ce qui ne pouvait que signifier qu’elle était une haute elfe.

Ce n’était pas si surprenant, mais l’inscription posait un énorme problème. Étonné par cette vue, Zagan l’avait lue à haute voix dans l’espoir d’être corrigé.

« À ma fille bien-aimée, Néphélia — Titania, » avait lu Zagan.

C’était le nom de l’elfe qui avait défié l’Archidémon Orias il y a des centaines d’années et qui en avait péri.

***

Chapitre 4 : Ils disent qu’aucun enfant ne sait combien ils sont précieux pour leurs parents, mais les parents ne comprennent pas non plus les sentiments de leurs enfants.

Partie 1

« Titania… hein ? » murmura Zagan en tenant le pendentif que Nephteros avait ouvert plus tôt.

C’était le soir, ils avaient déjà fini le dîner, et Néphy et Foll bavardaient devant la cheminée avec des glands étalés devant elles. Les glands que Zagan avait cuisinés cette nuit-là sur un coup de tête étaient populaires d’une façon inattendue. Il avait utilisé du miel pour cacher le fait qu’ils n’avaient pas vraiment d’assaisonnement, mais il semblait que leur curiosité leur avait fait oublier le goût fade.

Barbatos se noyait pour ainsi dire dans l’alcool à une table voisine, et Chastille essayait de l’arrêter. Nephteros était sur une autre chaise, perdue dans ses pensées pendant qu’elle regardait la cheminée. Elle était un peu anxieuse à cause de ce qu’ils avaient discuté pendant l’après-midi, mais il semblait qu’elle s’était presque complètement rétablie. S’il traînait davantage, Zagan aurait été obligé de s’occuper d’elle dans son château pendant un certain temps.

Kimaris et Gremory n’étaient pas là. Après une sérieuse tournée de pierre-feuille-ciseaux, cela avait décidé que le nettoyage après le dîner serait laissé à leur discrétion. Et ainsi, ils étaient coincés à laver la vaisselle tout en se plaignant de l’exiguïté de la cuisine.

Après avoir vérifié l’état de ses compagnons, Zagan poussa un soupir. Qu’est-ce que je fais ?

Il n’y avait pas grand-chose en termes de bâtiments dignes d’être mentionnés qui restaient dans le village. Et parce que Barbatos et les autres les avaient tous étudiés pendant la journée, tous les livres et biens notables étaient déjà rassemblés devant lui. Il ne restait plus qu’à s’échapper et à ramener Néphy à la normale.

Cependant, Zagan s’inquiétait de deux choses. Le premier était le nom inscrit dans le pendentif, Titania. Ce sorcier était décédé il y a plusieurs centaines d’années, mais le pendentif indiquait que Néphy était sa fille. En d’autres termes, Néphy était la fille de Titania, mais l’écart dans le temps n’avait aucun sens. Après tout, elle avait combattu un Archidémon. Les chances de survie de Titania pendant si longtemps après cela sans que personne ne le sache étaient plutôt minces. En général, les Archidémons ne s’intéressaient pas aux autres, mais ils n’avaient aucune pitié ou sympathie pour leurs ennemis.

Il y avait toujours une chance qu’Orias l’ait capturée, mais dans ce cas, elle aurait été utilisée comme un sacrifice ou un sujet d’essai. Zagan était sûr qu’elle n’aurait jamais eu la chance d’avoir un enfant ou l’endurance nécessaire pour en avoir un, dans ces circonstances.

Cependant, il y avait toujours la possibilité qu’Orias était comme Zagan et soit tombé amoureux de Titania au premier regard. Malheureusement, aucun des Archidémons ne semblait si gentil. Et avec cette possibilité exclue, il ne restait plus qu’une seule explication, mais…

Si j’ai raison, tuer Orias pourrait être une mauvaise idée…, il y avait quatre-vingts ou quatre-vingt-dix pour cent de chances que le coupable cette fois-ci soit Orias. Ses liens avec Titania lui auraient permis d’apprendre l’existence de ce village. Cela avait dû être fait pour que Néphy, une enfant, puisse apprendre à maîtriser son pouvoir dès son plus jeune âge. Selon Chastille, l’aura de ce village était forte. De plus, il avait prêté son pouvoir à Néphy avec peu d’efforts de sa part. Même plusieurs candidats Archidémon rassemblés auraient du mal à lui jeter un sort en ce moment.

Zagan pensait à sa situation difficile, réalisant qu’il lui serait difficile de faire tomber quelqu’un à son niveau sans force mortelle. En plus, vaincre Orias suffirait-il à ramener Néphy à la normale ? Il y avait beaucoup de problèmes qui lui tourmentaient les pensées quand il pensait à son premier problème. Quant à l’autre problème…

Zagan jeta son regard sur Foll et Néphy, qui se souriaient l’une à l’autre. Les émotions de Néphy étaient généralement évidentes en raison du mouvement de ses oreilles, mais il était très rare que quoi que ce soit apparaisse sur son visage. Elle n’avait probablement pas pu le faire en raison de son éducation, mais Zagan avait l’impression que ses muscles faciaux se relâchaient progressivement au fil du temps.

Pourtant, c’était la première fois que Zagan la voyait sourire avec éclat. La cause directe de la perte d’expression de Néphy était évidemment le traumatisme quand elle avait été abandonnée dans ce village. Cependant, la façon dont les elfes l’avaient maltraitée avait également joué un rôle clair. Après avoir feuilleté le journal de l’aînée, Zagan pouvait comprendre pourquoi Néphy avait perdu son sourire.

Maintenant, entre cette Néphy et la vraie Néphy, laquelle des deux est la plus heureuse ? Cette jeune fille était encore Néphy. Elle avait toujours le désir de réconforter ceux qui étaient troublés, même lorsqu’elle était enfant. Et ce n’est pas comme si elle avait perdu tous les souvenirs du temps qu’elle avait passé avec Zagan et les autres.

Par-dessus tout, Zagan voulait protéger le sourire de Néphy, et il savait que son retour à la normale le ferait disparaître. Les sorciers vivaient longtemps. Avec une dizaine d’années de plus, Néphy retrouverait son état antérieur, alors il y avait aussi l’option d’attendre qu’elle grandisse. Dix ans n’étaient pratiquement rien pour lui, et de cette façon, elle pouvait préserver son sourire.

Après avoir vu le contenu déchirant de ce journal, il ne pouvait s’empêcher d’attendre. Et pendant que Zagan se creusait la tête à ce sujet, Gremory et Kimaris étaient revenus de la cuisine. Il semblait que c’était difficile de revenir sous son autre forme, alors Gremory était encore sous la forme d’une petite fille. Kimaris avait aussi pris sa forme de lion pour divertir les filles.

« Nous en avons fini avec le nettoyage, » annonça Gremory.

« Oh, bon travail, » déclara Zagan.

« Hein… ? Qu’est-ce que c’est ? Vous faites une tête terriblement troublée. Est-ce vraiment si difficile de franchir la barrière autour du village ? » demanda Gremory. Zagan s’était rendu compte qu’il devait être l’expression idéale pour que Gremory lui accorde de la considération.

« Connais-tu l’Archidémon Orias ? » demanda Zagan, haussant les épaules en levant le pendentif.

« Eh bien, je connais au moins son nom… se pourrait-il être… ? » Le visage de Gremory s’était baissé en crachant une réponse.

« Oui, Orias a probablement causé tout ça. Donc, je m’inquiétais de savoir si je devais le tuer, » déclara Zagan.

« Ah… Comme je le pensais…, » Gremory avait mis la main sur son visage, se perdant dans ses pensées en entendant sa réponse.

« Quoi ? Est-ce quelqu’un que tu connais ? » demanda Zagan.

« Ah… Euh…, » Gremory trébucha sur ses mots alors qu’elle cherchait désespérément une réponse.

« L’Archidémon Orias est le professeur de Mlle Gremory, » avait répondu Kimaris à la place de Gremory.

« Vraiment ? » s’exclama Zagan, faisant presque tomber le pendentif en entendant cela.

« … Euh, ouais…, » murmura nerveusement Gremory.

« Tu… as remarqué que c’était déjà Orias, n’est-ce pas ? » demanda Zagan en regardant la sueur couler sur son front.

« J’ai juste pensé… que ça pourrait être le cas, » déclara Gremory.

La sorcellerie de Gremory et la malédiction jetée sur Néphy avaient beaucoup de choses en commun. Remarquer la connexion aurait dû être simple, mais Zagan avait été distrait par le fait que Néphy s’était transformée en enfant, ce qui lui avait fait passer à côté de ça.

« Laisse-moi te dire une chose. Je ne savais rien de tout ça. Cela fait presque cent ans que je n’ai pas rencontré Orias. Oh, et je n’ai pas non plus divulgué d’informations, » déclara Gremory en agitant les mains dans un air agité.

« Ce n’est pas comme si je t’interrogeais sur des actes répréhensibles, » déclara Zagan. Il comprenait pourquoi Gremory gardait cette information pour elle. Si l’on savait qu’une personne apparentée au coupable se trouvait dans l’espace scellé, elle serait instantanément étiquetée comme étant une ennemie. C’est pourquoi il n’avait pas l’intention de la critiquer pour ses actions. Au lieu de cela, Zagan lui avait posé une question.

« Quel genre de sorcier est Orias ? » demanda Zagan.

« Voyons voir… La sorcellerie que j’utilise pour manipuler mon âge est quelque chose que j’ai appris de mon professeur, donc Orias peut utiliser la même chose. Et aussi… Ah, c’est vrai, mon professeur est probablement un elfe, » déclara Gremory.

« … En es-tu certaine ? » demanda Zagan.

« Ouais. Orias portait toujours une cagoule, donc je n’ai jamais vu son visage, mais j’ai vu ce qu’il y avait en dessous juste une fois. Les oreilles étaient indubitablement celles d’un elfe, » déclara Gremory.

« Je vois…, » répondit Zagan.

« Mais, Sire Orias aurait tué la reine des fées Titania, non ? Est-ce qu’un autre elfe ferait vraiment quelque chose comme ça ? » demanda Kimaris d’un ton perplexe.

« … N’est-il pas naturel pour les elfes de discriminer leur propre espèce ? » Zagan savait que ça avait l’air dur, mais la lecture de la façon dont Néphy avait été traitée par les villageois l’avait mis en colère.

Kimaris avait gémi en réponse, comme s’il n’était pas du tout convaincu, mais Zagan hocha simplement la tête.

« Tout prend tout son sens maintenant. Je te remercie, » avait dit Zagan, exprimant sa gratitude.

« Qu’est-ce que c’est ? N’allez-vous pas te fâcher et dire que j’aurais dû vous le dire plus tôt ? » demanda Gremory en le regardant avec émerveillement.

« Je suis l’idiot qui ne l’a pas remarqué plus tôt. Ce n’est pas comme si c’était ta faute, » déclara Zagan.

« Cette forme que j’ai actuellement semble très pratique devant mon Archidémon, hein ? » fit remarquer Gremory en baissant les yeux de sa propre silhouette enfantine.

« … Laisse-moi te dire que je suis prêt à tuer des enfants s’ils deviennent mes ennemis, » déclara Zagan.

« Keeheeheehee ! Alors je vais marcher doucement, » déclara Gremory en riant avec joie en partant rejoindre Foll et Néphy devant la cheminée. Et même en la regardant d’un air agacé, il hocha la tête légèrement.

Avec ça, je sais comment m’y prendre avec Orias…, le seul problème qui restait était Néphy. Tandis que Zagan commençait à gémir en regardant le pendentif, quelqu’un avait tiré sur l’ourlet de sa robe. En se retournant pour les regarder, il remarqua que Néphy s’était soudain approchée de lui avec une expression d’inquiétude.

« Néphy ? Tu ne devrais pas jouer avec Gremory et Foll ? » demanda Zagan.

« Maître Zagan, s’est-il passé quelque chose ? Tu fais une tête très troublée…, » demanda Néphy en secouant la tête énergiquement pour nier sa question. En fin de compte, cette enfant était vraiment Néphy. Il semblait qu’il n’y avait aucun moyen de lui cacher quoi que ce soit. Zagan acquiesça d’un signe de tête lorsqu’il se résigna à son sort.

« Voyons voir… Néphy, si quelque chose de mal arrivait et que tu avais la chance de le refaire, que ferais-tu ? » demanda Zagan.

Ce n’était pas comme s’il confiait la réponse au problème à Néphy elle-même, mais il voulait au moins entendre ses pensées.

« Le refaire… signifie que ça n’est jamais arrivé, n’est-ce pas ? » demanda Néphy.

« C’est bien ça. Pour faire en sorte que ça n’arrive jamais, et tout recommencer, » déclara Zagan.

Après ça, Néphy commença à s’interroger profondément avec un joli gémissement comme si elle était confrontée à un problème difficile. Je vois. Le visage de quelqu’un qui se soucie des choses peut être adorable, hein ? Zagan doutait fort qu’il ait l’air aussi mignon, mais il pensait au moins que Néphy avait raison. Et peu de temps après, Néphy avait commencé à mettre ses pensées en mots.

« Aujourd’hui, alors que je cherchais des glands avec Grande Soeur Foll, j’ai eu très peur quand j’ai vu des insectes, » déclara Néphy.

En y repensant, Zagan s’était souvenu avoir entendu Néphy crier pendant qu’elle ramassait des glands. Il semble qu’elle ait paniqué en apprenant qu’un insecte était en train de manger un gland. Zagan avait fait une note mentale pour brûler ce gland en cendres plus tard.

« Je n’aimais pas ça, mais si je faisais en sorte que ça n’arrive jamais, ça ne voudrait-il pas dire que je ne serais jamais allé chercher des glands avec Grande Soeur Foll ? Je pense… que j’aimerais encore moins cela, » répondit Néphy.

« Même si tu pouvais encore aller chercher des glands avec Foll ? » demanda Zagan.

« Quand j’allais pleurer, Grande Soeur Foll a pris le gland et l’a jeté très loin pour me remonter le moral. N’est-ce pas quelque chose que j’ai vu parce que j’ai vécu quelque chose de mal ? » demanda Néphy.

Voyant Néphy faire de son mieux pour lui répondre, Zagan la hissa et la déposa sur ses genoux. Et quand il l’avait fait, Néphy avait souri joyeusement avec un « Ehehehe ».

« Je vois. C’est exactement ce que tu dis. Même les souvenirs douloureux sont des expériences formatrices, » déclara Zagan.

« Oui ! » Néphy lui répondit avec un grand sourire.

« Tu te souviens quand tu m’as dit que tu m’aimais, Néphy ? Je ressens la même chose pour toi. Mais, en fin de compte, je pense que cela inclut tout, et donc aussi les souvenirs douloureux que nous partageons ainsi que la route que nous avons parcourue ensemble…, » Zagan déclara d’un ton grave.

Il ne s’agissait pas seulement des problèmes du village caché. C’était aussi quand Zagan lui avait fait du mal, et même quand elle avait été blessée par Nephteros. Malgré tous les problèmes, ces moments passés ensemble avaient été de précieux souvenirs pour Zagan. Alors, alors qu’il lui caressait doucement la tête en parlant, Néphy le regarda avec curiosité.

 

 

« Néphy, je t’aime. C’est pourquoi je ramènerai la Néphy que j’aime, » déclara Zagan. Il avait enfin trouvé sa réponse, alors il avait continué en disant : « À partir de maintenant, tu vas sûrement vivre des souvenirs plus douloureux. Mais tu auras toujours ta place à mes côtés. C’est pourquoi, euh, comment dire… »

Néphy avait écouté attentivement, toute son attention concentrée sur Zagan alors qu’il luttait pour trouver les mots pour exprimer ses sentiments. Et au fur et à mesure qu’il en prenait conscience, Zagan se débattait de plus en plus. Pourtant, il avait fini par terminer ce qu’il disait sans hésiter.

« Pourrais-tu rester avec… ? Non, c’est un peu faux. Reste avec moi, Néphy. Tu es à moi. C’est pourquoi… à partir de maintenant, je ne laisserai plus personne se mêler de tes affaires, et je ne te laisserai plus rien perdre, » déclara Zagan.

C’était sûrement un sujet difficile à comprendre pour Néphy telle qu’elle l’était maintenant. La petite Néphy le regarda d’un air émerveillé, mais hocha la tête peu après.

« Oui ! Je suivrai le Maître Zagan partout ! » déclara Néphy.

« … Gentille fille, » déclara Zagan.

Après qu’il lui ait caressé la tête une dernière fois, Néphy était descendue de ses genoux. Et, après s’être étiré légèrement, Zagan avait appelé les autres personnes dans la pièce.

« Les gars, il est temps de faire sauter cet endroit. Préparez-vous à rentrer chez vous, » déclara Zagan.

« Hein !? » Chacun d’entre eux avait laissé échapper une voix abasourdie.

« Tu veux dire maintenant ? Il fait déjà nuit dehors ! » Barbatos se plaignait comme s’il voulait continuer à boire, mais Zagan ne s’en souciait pas.

« Si l’alcool te plaît, ramène-le avec toi. J’attendrai trente minutes, alors faites vite, » déclara Zagan.

« Zagan, j’ai sommeil…, » Foll s’approcha de lui en se frottant les yeux.

« Alors, dors un peu. Kimaris, je te laisse Foll et Néphy, » déclara Zagan.

« Comme vous le voulez, » répondit Kimaris, alors qu’il plaçait Foll sur son dos avec un sourire tendu.

« Mon Dieu, où est passée votre expression troublée ? » Gremory appela Zagan d’un ton exaspéré.

« C’était juste une erreur de jugement momentanée. Ne t’inquiète pas pour ça, » déclara Zagan.

En partant de là, Gremory avait commencé à rassembler des livres, des arcs et toutes sortes d’objets d’intérêt avec son petit corps.

« Tu en as vraiment parlé soudainement, n’est-ce pas ? Y a-t-il une raison de se dépêcher maintenant ? » marmonna Nephteros d’un ton surpris.

« Il n’y a aucune raison de se dépêcher, mais je n’ai aucune raison de rester en observation plus longtemps, » déclara Zagan.

Orias était probablement encore tout près et observait l’état du groupe de Zagan. Puisque Zagan avait décidé d’un plan d’action, il n’était plus nécessaire de suivre le courant.

« On dirait que tu es enfin redevenu toi-même, hein ? » dit Chastille d’un ton curieux.

« Est-ce que je l’ai fait ? » demanda Zagan.

« Ouais. Alors, que dois-je faire ? » demanda Chastille.

« Protège Néphy et Foll. C’est plus que suffisant, » proclama Zagan en caressant la tête de Néphy.

« Je m’occuperai du reste moi-même, » continua Zagan.

Peu importe qui était son adversaire, quelles que soient leurs attentes, le fait qu’ils se soient mêlés de Néphy était une vérité inébranlable. En tant que tel, Zagan devait être celui qui ferait tomber le marteau de la colère sur eux.

***

Partie 2

En sortant, le groupe avait remarqué que l’air était chaud. Ils avaient terminé de rassembler tout ce qui était nécessaire, et tous les membres étaient maintenant présents sur la place devant le manoir. Ils ne savaient pas ce qui allait se passer d’ici, alors Gremory avait arrêté de jouer et avait pris sa forme adulte.

« Alors, quel est le plan ? Je croyais que tu ne pouvais pas dévorer cette barrière ? » demanda Barbatos, ce qui provoqua un signe de tête de la part de Zagan.

« Qu’il s’agisse de sorcellerie ou de mysticisme, de mana ou d’aura, il n’y a pas de changement dans le fait que le flux du pouvoir est manipulé. Si elle est réduite en cendres, une simple barrière ne pourra pas se maintenir, » annonça Zagan.

« Hein… ? Je ne comprends pas vraiment la théorie derrière la sorcellerie, mais est-ce bien de faire une telle chose ? L’Aura est le pouvoir de la nature elle-même, tu sais ? » Chastille pencha la tête sur le côté dans la confusion quand elle posa cette question.

« C’est pourquoi je vais transformer toute la région autour de nous en terre brûlée. Je tue la nature elle-même, après tout, » acquiesça Zagan, car son choix était évident.

« Réfléchis, Zagan ! C’est le Norden, une terre sainte que même l’Église a peur d’envahir ! Ne serait-ce pas un blasphème que de la transformer en terre brûlée ? » Chastille, qui était encore en mode travail, devint complètement pâle en réalisant ses intentions.

« Nous sommes en train de franchir une barrière née du mysticisme, qui vient de ton cher dieu, alors n’est-il pas évident qu’il s’agit d’un blasphème ? » demanda Zagan.

« Gaaaaaaaah ! Les sorciers sont vraiment des méchants ! » Chastille s’était mise à se débattre en larmes en disant ça.

« Bon sang, quelle emmerdeuse ! Si tu veux le faire, fais-le vite ! » Barbatos cria en maintenant les bras de Chastille derrière son dos pour la calmer.

« C’est ce que je vais faire, » déclara Zagan en serrant lentement le poing, un doigt à la fois, puis en levant la main vers le ciel.

« Brûlez en cendres — Le phosphore du Ciel, » déclara Zagan.

Un cercle de magie noire tissé de mana avait pris forme dans sa main droite. C’était la sorcellerie qui avait fait brûler le mana qu’il avait aspiré sans discernement, conduisant le mana… non, l’essence même de la vie elle-même à brûler en cendres. C’était le pouvoir que Zagan avait donné naissance pour tuer les démons. S’il le balançait deux fois, même les pensées résiduelles du Seigneur Démon pourraient être détruites.

« Je vois. Vous utilisez le pouvoir qui a détruit le Seigneur Démon de Boue, hein ? Si c’est ça, alors même la barrière des elfes n’a aucune chance, » déclara Gremory, souriant largement en voyant sa prestation.

Zagan avait enfoncé son poing dans le sol, ce qui avait fait un tremblement terne qui avait été suivi par des flammes noires éclatantes. Et, après qu’elles se soient répandues comme pour engloutir la terre, cela s’était éteint. Cependant, tout ce qui était touché par les flammes était devenu noir et s’était effondré en cendres. Les flammes avaient même englouti le manoir de l’aîné et l’avaient réduit à néant… Ou bien, ils auraient dû.

« Mon Dieu… Je vois un homme qui ne connaît rien à la retenue. »

La voix d’une femme rauque résonnait d’en haut. Les yeux levés, ils aperçurent une ombre vêtue au-dessus du manoir de l’aîné.

L’Emblème de l’Archidémon sur la main droite de Zagan résonnait.

L’Emblème de l’Archidémon résonne…, cela signifiait que celui qui était sous ses yeux était sans aucun doute un Archidémon.

Néphy s’accrocha au dos de Zagan avec un regard effrayé.

« Espèce d’enfoiré… Depuis combien de temps es-tu là-haut ? » demanda Barbatos en se mettant sur la défense, lui ainsi que les autres. Cependant, Zagan avait posé sa main sur l’épaule de Barbatos et l’avait retenu.

« Eh bien, regardez qui a finalement décidé de se montrer…, » déclara Zagan.

L’ombre voilée flottait dans les airs. Parce qu’il faisait déjà nuit, il n’y avait pas d’ombre en dessous, donc personne n’était sûr si elle était vraiment là ou non. Malgré tout, cette personne rôdait autour de Zagan et des autres tout le temps.

« Gremory, il n’y a pas de malentendu que c’est bien ton professeur, non ? » Zagan interrogea Gremory tout en gardant ses yeux tournés sur la silhouette.

« O-Oui… Sans aucun doute, » Gremory, qui agissait habituellement à sa guise, avait des sueurs froides qui coulaient sur ses joues alors qu’elle répondait d’une voix tremblante.

À ce moment-là, Zagan concentra son attention sur les traces de son Phosphore du Ciel qui avait disparu avant d’atteindre le manoir. Il ne semble pas qu’il ait été bloqué directement… Est-ce qu’une sorte de sorcellerie a été utilisée pour entraver le flux de mana ?

Par exemple, c’était comme s’ils avaient séparé cette zone du reste. Le Phosphore du Ciel n’avait pu brûler que tous ce qui se trouvait dans un seul endroit avant qu’il ne disparaisse, ce qui en faisait le pouvoir parfait. Il semblait qu’elle avait enquêté à fond sur ses capacités et s’était préparée à cette confrontation.

Ça veut dire qu’elle regardait le bal du soir de Bifrons… 

Zagan n’avait utilisé le Phosphore du Ciel que deux fois dans le passé. Une fois quand il avait combattu la chimère démoniaque, puis encore une fois au bal du soir de Bifrons. Au bal du soir, il l’avait utilisé plusieurs fois pour achever le Seigneur Démon de Boue. Il y avait quelques survivants qui ne s’étaient pas enrôlés comme subordonnés de Zagan, donc c’était probablement l’endroit d’où l’information avait fuité.

Quoi qu’il en soit, Zagan était maintenant convaincu que cet adversaire ne pouvait pas être déchiré par le Phosphore du Ciel. Et c’était à partir de cette conclusion qu’il avait commencé à parler.

« Ça fait longtemps… Je suppose que tu es l’Archidémon Orias, non ? » demanda Zagan.

Et en réponse, l’ombre vêtue avait fait un signe de tête exagéré avant de parler.

« En effet. Je suis Orias, Archidémon Zagan, » répondit Orias.

L’ombre vêtue… Orias, lui répondit tranquillement. Zagan s’adressa ensuite à Orias comme s’il parlait à un ami proche.

« Désolé, mais j’aimerais réduire cet endroit en miettes. Peux-tu t’écarter ? » demanda Zagan.

« Mon Dieu… Tu as certainement obtenu du pouvoir à un rythme effrayant, n’est-ce pas ? Le pouvoir d’un tyran est tout à fait terrifiant, » Orias regarda avec pitié la région brûlée en disant cela, ignorant complètement la question de Zagan. Il semblait qu’Orias n’avait pas l’intention de s’écarter. Et ainsi, Zagan avait plissé ses sourcils avec un « Hmm ».

« Étais-tu contre le fait que j’hérite du titre ? » demanda Zagan.

« Je ne m’y suis pas opposé, mais j’ai prévenu que ce serait dangereux. Mais personne ne s’est donné la peine de me prêter une oreille. Je suppose que c’est tout à fait naturel, puisque les Archidémons sont fondamentalement égoïstes dans l’âme, » déclara Orias.

En bref, contrairement à Bifrons, Orias était clairement conscient que Zagan représentait un facteur de risque. Il n’était que normal d’éliminer de tels facteurs.

Il semblait que deux Archidémons allaient s’affronter sur cette terre, un fait qui n’avait pas échappé aux compagnons de Zagan. Chacun d’entre eux avait de la sueur qui coulait en raison de l’atmosphère tendue. Si un sorcier commun était présent, ils se seraient sûrement évanouis dans cette ambiance.

« Répondras-tu à une question ? » demanda Zagan en choisissant soigneusement ses prochains mots.

« Penses-tu que j’ai une telle obligation ? » demanda Orias.

Zagan avait commencé à étouffer. Ces mots avaient dû être tissés avec du mana. Et, comme sous l’impulsion de sa lutte, des fissures avaient couru le long des murs de pierre de la maison et le bruit de la foudre avait retenti.

Zagan pouvait dire que plusieurs personnes derrière lui n’avaient pas pu le supporter et étaient tombées à genoux. Bifrons était un Archidémon qui portait un vague sentiment d’étrangeté, mais Orias était plus direct et impitoyable. Et devant elle, Zagan avait fait un pas en avant avec un sourire provocateur sur son visage.

« Non, je te demanderai de me répondre. Même si tu dis que tu ne veux pas, je te traînerai de là et je te l’arracherai de tes lèvres, » déclara Zagan.

En désaccord total, Zagan rassembla du mana et le frappa directement vers Orias. Un tourbillon de pouvoir avait éclaté entre les deux Archidémons, ce qui avait fait flotter en l’air même les arbres qui étaient enracinés dans la terre.

« Attends, Zagan ! Celui-ci est trop dangereux ! Je vais… aussi me battre ! » s’exclama Chastille malgré son visage pâle et clairement effrayé.

Jetant un coup d’œil vers l’arrière, Zagan remarqua que sa main tremblait en saisissant la poignée de son épée gainée.

« Ne panique pas. Nous ne faisons que parler. Ne dégaine pas ta lame, sache simplement que celle-ci n’est pas une putain de brute incapable de converser, » répondit Zagan à Chastille d’un ton désinvolte.

« Une provocation bon marché. Mais, très bien. Essaye de demander ce que tu veux. Cependant, je ne répondrai pas forcément, » Orias avait plissé ses yeux en répondant à Zagan.

Un claquement avait retenti alors que les pierres et les arbres flottant dans l’air se déchiraient. Leurs fragments avaient effleuré la joue de Zagan et avaient dessiné une légère ligne de sang. Pendant ce temps, Zagan avait souri comme s’il aimait ça, et pointa son doigt derrière lui… vers Gremory, qui était à genoux et haletait.

« Ces conneries absurdes appelées “pouvoir de l’amour” ou quoi que ce soit d’autre dont Gremory a parlé… dis-moi, ça vient de toi ? » demanda Zagan.

Gremory avait arbitrairement suivi ce qui était censé être un voyage en famille, joué avec Nephteros tout en divaguant sur le pouvoir de l’amour, et s’était transformé en petite fille pour déranger Zagan autant qu’elle le voulait. Il était curieux de savoir pourquoi elle était allée si loin.

« Hein… ? » Orias fit entendre une voix idiote alors que s’évanouissait la présence écrasante qui dominait la région.

Gremory posa les mains sur l’arrière de sa tête et siffla légèrement, son visage encore trempé de sueurs froides.

« Euh… Il semble que ma disciple t’ait troublé. Désolé, » Orias s’était excusé avec une légère inclinaison de la tête après s’être raidi pendant un moment.

Des excuses !? Zagan ne s’attendait pas à ce qu’un Archidémon baisse la tête, alors il était à court de mots.

« Mlle Gremory, peu importe comment tu le dis, embarrasser ton estimée professeur dans un tel endroit est vraiment un peu…, » Kimaris murmura ces mots, détruisant tout sentiment de tension.

« Guuuh, aaagh, Zagan ! Tu n’as pas besoin de tout lui dire ! » cria Gremory.

« Ferme ta bouche, » Orias l’avait coupée.

« Eeek..., » Gremory s’était immédiatement calmée après s’être fait gronder par son professeur. Eh bien, Zagan ne s’attendait pas non plus à ce que ce soit une affaire aussi sérieuse et s’en était senti un peu désolé. Il s’attendait à ce qu’Orias dise : « Te moques-tu de moi ? » tout en se précipitant pour attaquer…

« Je suis vraiment désolée, » déclara Gremory.

« … Non, c’est bon tant que tu le comprends, » déclara Orias.

Zagan ne pouvait rien faire d’autre que secouer maladroitement la tête en retour. Et puis, Orias avait parlé comme pour se revitaliser.

« Je rattraperai les actions de ma disciple à une date ultérieure. Désolé, mais je ne peux pas te laisser quitter cet endroit. Ne peux-tu pas rester ici et vivre tranquillement ? » demanda Orias.

En réponse à la vieille femme, qui parlait comme si elle menaçait un élève turbulent, Zagan avait souri comme s’il avait entendu une bonne blague.

« Je refuse, » déclara Zagan.

« Comme c’est malheureux. Je ne voulais pas vraiment transformer cet endroit en champ de bataille…, » déclara Orias en poussant un profond soupir. Et ce soupir marqua le début de leur bataille.

***

Partie 3

« “Vous êtes celui qui brille comme les étoiles. Celui qui embrassez l’équilibre et arbitrez le bien et le mal”, » Orias avait fredonné ce sort, qui avait fait pâlir Nephteros.

« Impossible… C’est mon…, » s’exclama Nephteros.

Asteri Ekrexis… C’était le mysticisme céleste que Nephteros essayait d’utiliser avant. C’était aussi une puissance qui n’était censée être utilisable que par Néphy et Nephteros, les deux hautes elfes. Et tandis qu’il regardait les lumières, qui flottaient autour de l’Archidémon comme des lucioles, Zagan parlait comme si la situation n’était pas grave.

« Même si l’atavisme chez les hauts elfes ne se produit qu’une fois tous les cent ans, les elfes et les sorciers possèdent tous deux une jeunesse perpétuelle. Ce n’est pas si étrange pour une haute elfe d’avoir plusieurs centaines d’années, » déclara Zagan.

« Ce n’est pas le moment ! Si on encaisse ça, il n’y aura même plus de cendres, bon sang ! » cria Barbatos en déclenchant la sorcellerie de feu. Non, plutôt que du feu, c’était un rayon de chaleur. Les pierres touchées par la bande incandescente avaient fondu comme si elles étaient faites de boue, et les arbres tombés avaient été brûlés en un clin d’œil. Cette personne était encore l’une des rares personnes qui avaient été vues comme un candidat Archidémon à un moment donné, et on pourrait même dire que son pouvoir avait dépassé celui de Zagan quand ils avaient partagé cette position. Sa sorcellerie était une frappe comparable au souffle d’un dragon, mais… au moment où il touchait la lumière du mysticisme céleste, le rayon de chaleur avait disparu.

« Tu plaisantes, c’est ça ? » Barbatos marmonna sous le choc, et Zagan secoua la tête en réponse.

« Abandonne tout ça. Même ce démon de boue n’a rien pu faire face à ce pouvoir. C’est probablement impossible pour la sorcellerie commune de la percer, » déclara Zagan.

« Sorcellerie commune… C’était l’un de mes atouts ! » hurla Barbatos. C’était une sorcellerie puissante, mais tout à fait commune. À moins que ce ne soit la sorcellerie qui se concentre uniquement sur l’offense aussi puissante que le mysticisme céleste ou la sorcellerie de Zagan, il serait impossible de percer les défenses d’Orias. Et malheureusement, cela signifiait qu’un sorcier ordinaire ne possédait aucun moyen d’attaquer Orias.

« “Quoi qu’il en soit, l’équilibre est rompu. L’ordre est perdu, et la terre est teinte dans le sang. Cela mérite donc d’être puni. Par le marteau qui pardonne tout péché,” » Orias passa au verset suivant du sort au fur et à mesure que leur conversation se déroulait. Les lumières qui la protégeaient avaient changé de direction et il avait plu sur Zagan et les autres.

« Restez derrière moi, » déclara Zagan en levant le bras et en aboyant des ordres à ses compagnons. Et puis, un seul cercle magique brillant avait flotté au sommet.

« L’Écaille du Ciel ? Mais comment une seule attaque fera-t-elle quoi que ce soit… ? » demanda Barbatos.

En contrepartie de la sorcellerie du Phosphore du Ciel, cela absorbait sérieusement le mana de son environnement et continuait à s’amplifier en intensité. Avec le temps, il pourrait devenir un bouclier capable de résister à un seul coup de mysticisme céleste, mais malheureusement, sa taille était à peine assez grande pour tenir dans sa paume.

Comme les lumières créées par Orias dépassaient facilement la centaine, le bouclier de Zagan était beaucoup trop fragile pour se protéger, sans parler du reste de ses compagnons. Mais malgré cela, Zagan ne montra aucun signe de panique et secoua simplement la tête.

« Eh bien, il suffit de regarder, » déclara Zagan en utilisant le petit cercle magique pour repousser les lumières tombantes une par une. Cependant, ce n’était qu’une vaine lutte à la fin. Les lumières se déployaient comme pour envelopper Zagan. Et quand il l’avait fait, Orias avait continué à chanter le sort, se dirigeant vers le dernier verset de son mysticisme céleste d’une voix en plein essor.

« “Les lumières des cieux sont toutes des étoiles. Tout cela brille au loin et s’enflamme dans une conflagration. Sans compassion, sans chagrin, il ne fait que juger et détruire. C’est la prière de l’expiation” — Asteri Ekrexis ! » acheva Orias.

Les lumières descendant sur Zagan avaient convergé sur un seul point et avaient ensuite explosé. Et tout de suite après, une lumière intense avait jailli comme pour percer le ciel.

Le mysticisme céleste utilisé par Néphy avait tout effacé solennellement, mais celui d’Orias avait plutôt provoqué une violente explosion.

« Hmm… C’est donc la forme complète du mysticisme céleste que tu as essayé d’utiliser la dernière fois, hein ? Quelle opportunité ! Étudie-le à ta guise, Nephteros, » murmura Zagan avec beaucoup d’intérêt lorsqu’il regarda la lumière vive. Il parlait avec désinvolture alors que la lumière augmentait sans même laisser une seule égratignure, ou même une tache de suie, sur eux…

« Est-ce… la sorcellerie qui a frappé Maître Bifrons ? » Nephteros avait dégluti de manière audible quand elle aperçut le spectacle. Une version simplifiée de cette sorcellerie avait été plantée dans le papier que Nephteros portait. Comme elle l’avait dit, cela possédait assez de pouvoir pour même frapper un Archidémon et le tuer.

« Ridicule… est-ce un… dragon ? » Orias avait ouvert les yeux en disant cela. Elle avait vu qu’un énorme dragon protégeait Zagan et les autres. Cela dit, ce n’était pas un dragon vivant, qui respirait, mais un dragon fait de lumière tissée de mana.

« Si jolie… Il ressemble à Papa, » Foll avait fait entendre une voix pleine d’étonnement dans le dos de Kimaris.

« L’Écaille du Ciel — La Forme du Dragon… Pensez-y comme à un golem formé par l’Écaille du Ciel, » déclara Zagan, caressant la tête de Foll tout le temps. Le mana qui composait le corps du dragon était attiré par l’Écaille du Ciel, ce qui signifiait que même la mystique céleste ne suffisait pas à percer cette armure. Mais ce qui était encore plus impressionnant que son intensité, c’était le fait qu’il absorbe à la fois le mana et l’aura et s’en servait pour se renforcer. Cela signifiait que toutes les attaques qui utilisaient l’une ou l’autre de ces sources seraient affaiblies. Qu’il s’agisse de sorcellerie ou d’Épée Sacrée, ils seraient incapables de faire surgir même la moitié de leur pouvoir original tant qu’il resterait en place.

« Est-ce… une formule magique de dragon ? » demanda Barbatos en poussant un gémissement.

« Ouais. Foll me l’a appris, » répondit Zagan. Ce n’était pas comme si Zagan gardait Foll à ses côtés justes parce qu’elle était mignonne. Même si elle était encore enfant, il y avait beaucoup à apprendre de l’un des rares dragons vivants. C’est pourquoi Foll était la fille bien-aimée de Zagan, sa collègue dans l’apprentissage de la sorcellerie, et aussi son professeur.

« L’Écaille du Ciel était après tout à l’origine une sorcellerie basée sur l’écaille d’un dragon. Cette forme n’est qu’une évolution naturelle, » affirma Zagan en caressant le cou du golem-dragon. Il ne se contentait pas de faire de la sorcellerie qui était simplement solide. Utilisant cette forme comme base, il avait créé l’Écaille du Ciel pour renforcer sa théorie. En levant les yeux vers le dragon, qui résista magnifiquement à Asteri Ekrexis, Zagan hocha la tête en signe de satisfaction.

 

 

Le mysticisme céleste est vraiment puissant, mais cela dit, ce n’est pas comme s’il dépassait complètement la sorcellerie…, en fin de compte, il avait simplement une structure différente. S’ils étaient utilisés correctement par des personnes compétentes, l’un ou l’autre pourrait être le plus fort. Zagan était incapable d’utiliser le mysticisme céleste, mais il était capable de créer une sorcellerie capable de le supporter.

« Eh bien, cela ne se compare probablement pas vraiment au Sage Dragon Orobas, mais il y a aussi des dragons avec cette forme, » affirma Zagan. Il ne savait pas à quoi cela ressemblait pour Foll, qui connaissait le vrai Orobas, mais c’était la forme d’un dragon puissant dans l’esprit de Zagan.

« Papa, c’est trop cool…, » les yeux ambrés de Foll brillaient, et pour une raison inconnue, elle avait pris alors une grande respiration en disant cela. Foll semblait penser que c’était le bon moment pour appeler Zagan comme ça.

« … Hmm ! » Zagan se sentait prêt à tomber à genoux alors qu’il se serrait désespérément la poitrine pour résister à son sentiment. Puis, il lui rendit le sourire et regarda Orias.

« Je le répète encore une fois… Je veux faire sauter cet endroit. Peux-tu t’écarter ? » demanda Zagan.

« … Je vois. Même moi, je ne peux pas te battre, hein ? » Le visage d’Orias s’était tordu de mécontentement quand elle l’avait fait savoir. L’acte de brosser les étincelles qui étaient tombées autour de lui ne pourrait pas être appelé un combat. C’est pourquoi Zagan n’avait pas l’intention de se battre. Comme il l’avait déclaré, il voulait faire sauter le manoir de l’aîné et ne faisait qu’attendre qu’Orias se mette à l’écart. S’il s’agissait d’un combat, Zagan n’apaiserait pas du tout ses attaques jusqu’à ce qu’il étouffe la vie de son adversaire.

Mais, je suppose que j’ai attendu assez longtemps, hein ? Zagan avait pointé le manoir du doigt avec un doigt. Et puis, la tête du dragon s’était tournée vers lui en réponse.

« Je suis du genre à toujours tenir parole. Je ne te donnerai pas un troisième avertissement, » proclama Zagan. Et ensuite, il prononça un seul mot comme s’il portait un jugement : « Feu ! »

« Argh… » Orias avait ouvert en grand ses yeux et sauta du toit pendant que le dragon crachait son souffle sur le manoir. Immédiatement après, le bâtiment avait été percé par la lumière et s’était désintégré. Puisqu’elle le protégeait, il était probable qu’Orias avait formé des défenses autour de lui, mais le souffle de lumière avait facilement balayé le tout. Et en même temps, le corps du dragon-golem s’était dispersé et avait disparu.

L’Écaille du Ciel était une sorcellerie qui augmentait sa force en absorbant le pouvoir qui l’entourait. Tissé sous la forme d’un grand dragon, il avait mangé tout le mana et l’aura environnant, y compris le mysticisme céleste, pour gonfler en puissance et se transformer en souffle de feu.

Peu de temps après, après que la lumière se soit éteinte, il ne restait plus que le sol vitrifié qui s’étendait à l’endroit où se trouvait autrefois le manoir.

Hmm. Comme c’est rafraîchissant…, c’était la maison de l’elfe qui avait blessé Néphy. Honnêtement, il pensait que ce serait bien de les faire revivre comme des morts-vivants et de les tourmenter un peu plus, mais Néphy ne souhaitait pas une telle chose. C’est pourquoi il avait décidé de se contenter d’anéantir les preuves de leur existence.

« Hmm… Je suppose que c’est à peu près tout ce que cela peut faire, » déclara Zagan.

« C’est… à peu près tout, tu dis ? Es-tu en train de dire que la force destructrice de cette attaque fait toujours défaut d’une manière ou d’une autre ? » marmonna Nephteros en tremblant.

Zagan avait pointé dans la direction où le souffle avait été tiré. Au loin, éclairée par le clair de lune, se trouvait de la terre vitrée qui s’était arrêtée après un point. Et une fois qu’ils regardaient au-delà, ils pouvaient voir la même forêt paisible qu’avant.

« La limite de la barrière est probablement quelque part par là. Le golem-dragon est incapable de détruire cette barrière. Je n’ai aucune objection à sa force défensive, mais sa puissance destructrice fait toujours défaut, alors, oui, » déclara Zagan.

« Comme c’est terrifiant… ! » marmonna Nephteros alors qu’une ligne de sueur coulait le long de sa joue.

Finalement, Zagan regarda Orias, qui était parvenu à échapper à son souffle. Il était peu probable qu’elle s’en soit tirée indemne à si faible distance, mais même maintenant, Orias avait refusé d’enlever sa capuche.

« Désolé d’avoir fait du tapage. On s’en va maintenant, alors pourquoi ne pas défaire la barrière par ici ? » demanda Zagan.

« Je crois vous l’avoir déjà dit que je ne peux pas tous vous laisser quitter cet endroit, » déclara solennellement Orias.

« Tu peux insister sur tout ce que tu veux, mais est-ce d’accord ? » Zagan demanda la confirmation comme s’il montrait sa miséricorde, ce qui laissa Orias le regarder avec émerveillement.

« … Quoi ? » s’exclama Orias.

***

Partie 4

« Que tu retires ou non la barrière, nous quitterons cet endroit. Es-tu sûre que c’est bien de continuer à nous contrarier ? » s’enquit Zagan. Il n’avait montré qu’une défense jusqu’à présent, ce qui signifiait qu’il n’avait même pas commencé à attaquer. Il n’y avait aucune chance que son collègue Archidémon n’ait pas été mis au courant de ce fait.

« Ne me force pas à me répéter, » déclara Orias en déglutissant de façon audible, refusant de s’écarter. Puis, elle posa les mains sur le sol et se mit à murmurer quelque chose.

La mystique céleste à nouveau… ? Non, on ne dirait pas…, le sceau sur la main droite de Zagan avait commencé à chauffer. Il semblait qu’elle utilisait l’Emblème de l’Archidémon pour faire quelque chose.

J’ai un moyen de le sceller avant qu’il n’arrive, mais…, Zagan avait la possibilité d’utiliser la résonance pour rendre le sceau impuissant. Cependant, il avait aussi envie de profiter de l’occasion pour voir un autre Archidémon devenir sérieux. Et ainsi, il croisa les bras et décida d’attendre la fin de ce qu’Orias était en train de faire. Et en voyant cela, Barbatos avait crié en état de choc.

« Oh, voyons ! On est dans la merde, Zagan ! Tue dès maintenant ce bâtard ! » cria Barbatos.

L’ignorant, Zagan continua d’attendre, ce qui lui fit finalement remarquer qu’il reconnaissait le cercle magique qui s’étendait sous les pieds d’Orias.

« Je vois… le cercle magique pour invoquer les démons, hein ? » déclara Zagan.

Barbatos avait utilisé tout le hall d’entrée d’un château pour créer le cercle magique, et cela lui avait pris plusieurs mois, mais Orias l’avait fait dans l’espace entre ses deux mains sans préparation.

Quand il s’était retrouvé face à face avec un vrai démon, la seule option de Zagan avait été d’utiliser l’Emblème de l’Archidémon pour le renvoyer. S’il avait essayé de le combattre à ce moment-là, il aurait péri. Et ce démon réapparaissait devant Zagan. Le miasme sortait du cercle magique, et le teint de tous les autres sorciers présents changea.

« Je me joins à vous, Sire Zagan ! » Kimaris poussa un hurlement pendant que l’atmosphère se déformait.

« Tch, ne m’en voulez pas pour ça, professeur ! » déclara Gremory.

« Je vais t’aider, » déclara Foll.

Gremory avait libéré son mauvais œil et Foll l’avait assorti avec son souffle de dragon. Tous les trois avaient libéré les pouvoirs propres à leur race et avaient tissé la sorcellerie en eux comme une attaque. Chacun d’entre eux possédait un pouvoir destructeur qui rendait le rayon de chaleur de Barbatos tel un jeu d’enfant. Cependant, tous les trois étaient devenus pâles. Avant que ces attaques n’atteignent Orias, elles avaient toutes disparu, apparemment obstruées par un mur invisible.

« Le miasme… est devenu un rempart !? »

Même eux trois réunis n’avaient pas réussi à percer le mur épais de miasme.

« Alors, s’il s’agit de mysticisme céleste —, » Nephteros étendit les mains pour aider. Et, alors qu’elle chantait un sort en Célestian, plusieurs piques de cristal jaillirent du sol. Elles avaient certainement percé le mur du miasme, mais…

« Se sont-elles arrêtées ? » demanda Nephteros.

Juste avant que les lances de cristal n’atteignent Orias, elles s’étaient arrêtées. La sueur coulait sur le front de Nephteros, et un sentiment de panique en raison de son impuissance se glissa sur son visage.

« Ce n’est pas bon… Argh… L’hégémonie de mon mysticisme… est en train d’être arrachée… Agh ! » Nephteros résistait clairement, mais les cristaux ne bougeaient pas d’un pouce. L’instant d’après, les cristaux changèrent de direction et tombèrent sur le groupe de Zagan.

« Brillance — Épée Sacrée Azraël ! » Chastille se dirigea de force vers le font et fit jaillir de son Épée Sacrée la Lumière de la Purification. C’était la première fois que Zagan la voyait tirer sa pleine puissance avec son Armure Sacrée et son Épée Sacrée équipées.

« HYAAA ! » Chastille avait rugi, déchaînant plus de dix frappes pour briser les lances de cristal.

Hm… Donc quand elle est équipée, elle peut même détruire le mysticisme céleste, hein ? Zagan admirait sa force, mais l’expression de Chastille restait sévère.

« Argh, la barrière se répare déjà toute seule…, » Chastille s’était plainte.

En y regardant de plus près, il était clair que les trous faits par Nephteros dans le mur de miasme se réparaient d’eux-mêmes pour protéger Orias. En l’état actuel des choses, même si Chastille la coupait, elle n’atteindrait jamais l’Archidémon.

« Hm… Dans ce cas, je suppose qu’il n’y a rien à faire, » déclara Zagan d’un ton de reddition. Un Archidémon était juste devant eux, tissant effrontément ensemble un cercle magique, ce qui était plutôt approprié pour quelqu’un de sa stature. Après tout, il n’y avait aucune chance que quelqu’un avec son pouvoir s’expose.

« Ne peux-tu pas percer ça, Zagan ? » Chastille lui répondit sévèrement, ne croyant clairement pas ses paroles.

« Non, c’est inutile. Ce n’est pas de la sorcellerie, donc je ne peux pas la dévorer. De plus, le golem-dragon est une sorcellerie défensive, donc il est seulement capable d’afficher cette force destructrice après avoir été attaqué. »

Le golem-dragon était, en fait, une sorte de barrière. Il ne pouvait pas lancer une attaque tout seul.

« Et le Phosphore du Ciel ? » demanda Chastille.

« Tu as oublié qu’elle s’est défendue ? Penses-tu qu’un Archidémon est assez bête pour se faire frapper par une sorcellerie qu’il a déjà évitée auparavant ? » demanda Zagan.

Bref, Zagan n’avait aucun moyen d’empêcher Orias d’invoquer un démon. Et bien, il faut la garder en vie, après tout. Si c’était bien de la tuer, alors j’ai une méthode, mais…

« Et bien, c’est une opportunité. Je vais te demander de me montrer le pouvoir d’un démon, » déclara Zagan en haussant les épaules pendant qu’il parlait.

« … S’il te plaît, arrête tes blagues. As-tu oublié ? Ce n’est pas quelque chose que les mains humaines peuvent gérer. Même le Sage Dragon Orobas a dû sacrifier sa vie pour en vaincre une ! »

Entendre le nom d’Orobas avait fait trembler Foll.

« Tu as raison. C’est un ennemi que même un dragon légendaire ne pourrait vaincre. Si nous pouvons nous enfuir sans avoir à nous battre, alors nous devrions le faire, » déclara Zagan en faisant un signe de tête à Chastille.

« Alors…, » déclara Chastille.

« Cependant, lorsque l’un d’eux finit par apparaître devant tes yeux, que comptes-tu faire ? » demanda Zagan.

« Argh…, » répliqua Chastille.

Un démon était déjà apparu dans ce monde. Orobas et Raphaël l’avaient combattue et avaient perdu quelque chose de beaucoup trop grand dans le processus. Étant donné leur force, si les démons apparaissaient un jour en tant que groupe, alors le monde serait sûrement en péril, et cette fille devrait les affronter de front.

« C’est pourquoi… Je pense que c’est une chance pour nous d’en apprendre plus sur les démons. Tu n’es pas un sorcier, mais tu ne devrais pas gâcher une occasion de recherche comme celle-ci, » déclara Zagan en posant la main sur la tête de Chastille avec un bruit sourd. Puis, il regarda Orias et regarda un mana sombre accompagné d’un « quelque chose » grotesque ramper hors du cercle magique. Chastille essaya d’avancer vers l’avant avec son Épée Sacrée à portée de main, mais ses mains tremblaient. Les autres sorciers réagissaient à peu près de la même façon. Même Nephteros n’arrivait pas à faire entendre sa voix.

Peu de temps après, une silhouette étrange était apparue. Elle avait un corps mince comme du papier, et bien qu’il ait une tête, cela ne semblait pas avoir de visage. Ses membres prenaient la forme d’une sorte de roue à aubes torsadée qui ne ressemblait à aucun type de créature vivante. Et par-dessus tout, c’était grand. Orias était monté sur son épaule, assez haut pour regarder vers le bas la limite forestière de la région.

« H-Hey, comparé à la dernière fois, c’est…, » Barbatos sursauta et ouvrit la bouche pour parler.

« Oui, tu as raison, » dit Zagan en acquiesçant d’un signe de tête.

Celui-ci est beaucoup plus puissant que celui du cercle magique de démon de Barbatos…, c’était peut-être à cause du pouvoir de l’Emblème de l’Archidémon, mais tout ce qu’on pouvait faire face à une telle chose était de pâlir et d’ouvrir la bouche sous le choc.

« Ne crois pas que tu peux arrêter ça avec l’Emblème de l’Archidémon. Si tu ne peux pas vaincre cela, ton avenir sera perdu, » déclara Orias en riant. Elle possédait aussi un sceau, donc même si Zagan lui faisait perdre le contrôle du démon, elle pouvait simplement le retrouver. Cependant, cela ne voulait pas dire qu’il ne se battrait pas.

« Puisque c’est un démon, je suppose que c’est bien de le tuer…, » déclara Zagan, alors que son corps le démangeait d’aller se battre.

Le démon avait commencé à bouger. Et juste au moment où Zagan pensait qu’il était sur le point de frapper avec ce qu’il avait pour un bras, un nombre incalculable de lances avaient jailli hors de son corps.

« C’est quoi ce bordel !? » Barbatos avait crié en voyant une attaque aussi imprévisible sortir de son corps quelque peu humain, mais à ce moment-là, Zagan avait déjà sa main gauche levée.

« L’Écaille du Ciel — Forme du Dragon. »

Il tissa le dragon de lumière en un instant, et son corps se dressa pour protéger le groupe de Zagan. Les pieux du démon étaient obstrués par l’écaille de lumière, et même pas un seul n’avait pu atteindre Zagan.

Pour l’instant, il semble que même l’attaque d’un démon puisse être atténuée…, c’était une agréable découverte, car cela signifiait que même les démons utilisaient la même source de pouvoir que les humains.

« Avec ce pouvoir, même si tu peux arrêter un démon, tu ne pourras jamais le vaincre ! » Orias s’était mis à rugir. On aurait dit qu’Orias lui disait de lui montrer qu’il pouvait le vaincre.

« Cela va sans dire, » déclara Zagan en levant la main droite. Il n’avait pas serré le poing, choisissant de sortir les doigts comme s’il grattait l’air à la place. Le mana convergea du bout de ses doigts et tissa un cercle magique. Et en voyant cela, Gremory et Kimaris avaient vu leurs visages se raidir.

« Ahhh… Que tout le monde recule ! » cria Gremory.

« Lady Foll, Lady Néphy, tenez ma crinière ! » cria Kimaris.

Gremory avait saisi Nephteros par-derrière et sauta vers l’arrière en la portant, et Kimaris plaça Néphy et Foll sous ses bras alors qu’il s’éloignait de Zagan.

« Hé, Pleurnicharde, ça a l’air mauvais. Va-t’en de là, » déclara Barbatos.

« Ne me traite pas de pleurnicharde ! » cria Chastille. Elle avait sûrement aussi senti le danger de son côté, puisqu’elle avait sauté vers l’arrière avec son Épée Sacrée toujours à sa disposition.

Après avoir confirmé que tout le monde s’était échappé de sa portée effective, Zagan avait fait basculer sa main droite vers le bas.

« Le phosphore du Ciel — Grande fleur quintuple. »

Cinq brins noirs étaient sortis des doigts de Zagan. Ils ressemblaient à la fois à des lames exceptionnelles et à une grappe d’amaryllis. Les cinq lames avaient tiré dans toutes les directions, coupant à travers les lances du démon et perçant son corps.

« … Qu-Qu-Qu-Qu-Qu-Quoi!? » Orias bégayait.

Par la suite, une fleur noire s’était épanouie. Le haut du corps du démon, percé de cinq lames, s’était rompu. L’entité contre laquelle Zagan ne pouvait rien faire, mais se recroqueviller avait été annihilée par une seule frappe.

« Ridicule… Qu’est-ce que tu as fait ? » murmura Orias en tombant à terre.

« Ce n’est vraiment rien de bien impressionnant. Tout ce que j’ai fait, c’est d’y enfoncer cinq Phosphores du Ciel à la fois, » déclara Zagan.

Contrairement au feu qui s’était propagé sans discernement, la forme de la lame s’était condensée et avait donné au Phosphore du Ciel une zone d’effet ciblée. Et il l’avait utilisée cinq fois. Cependant, ce n’était pas aussi simple qu’il le dît.

Quand j’ai combattu le Seigneur Démon de Boue, tout ce qu’il pouvait atteindre était sa surface extérieure, mais c’est différent…, à l’époque, s’il avait pu atteindre son centre, ils n’auraient pas été poussés dans une situation aussi difficile. Afin de compenser cela, il avait continué à apporter des améliorations au sort, et ce qu’il est arrivé à ce qu’il était la Grande fleur quintuple.

Gremory et Kimaris avaient tous deux assisté à son essai. Et grâce à cela, ils savaient qu’en se faisant prendre dans la zone d’effet, ils risquaient de mourir. Après tout, comme c’était un sort qui brûlait sa cible de l’intérieur, tout ce qu’il frappait finissait par éclater. Ce faisant, cela ressemblait à une fleur en fleuraison, d’où le nom de Grande fleur quintuple.

« Oups, on dirait qu’il y avait trop de puissance et que cela a fini par franchir la barrière…, » déclara Zagan.

Les restes de ce qui avait achevé le démon avaient même semblé faire tomber la barrière du village. Orias était descendu jusqu’au sol et avait baissé ses épaules. Comme on pouvait s’y attendre, elle ne semblait pas avoir plus d’atout dans la manche pour continuer à jouer. Tout ce qu’elle avait fait, c’était se mordre les lèvres, incapables de parler. En d’autres termes, même un puissant Archidémon n’avait pas pu rivaliser avec Zagan.

« Tue-moi, c’est tout. Tu as gagné… et j’ai perdu, » déclara Orias.

« En effet. C’est certainement la bonne façon de procéder, mais j’ai encore une chose à faire avec toi, » déclara Zagan.

« Une chose à voir… dis-tu ? » demanda Orias.

« Ce n’est pas si grave, mais…, » Zagan enleva le capuchon d’Orias, puis continua : « Tu n’es pas vraiment Orias, n’est-ce pas, Titania ? »

Le visage sous le capuchon était celui d’une vieille femme, mais elle ressemblait très nettement à Néphy.

***

Partie 5

« Elle est… Titania ? Attends, n’a-t-elle pas été tuée par Orias ? » demanda Barbatos.

À la fin de la bataille, Barbatos et les autres étaient revenus vers Zagan, et ils ne pouvaient pas croire ce qu’il disait.

« Tu n’as pas été vaincu par Orias. Tu l’as vaincu et tu as pris son Emblème de l’Archidémon, non ? » demanda Zagan.

Bien sûr, les Archidémons qui connaissaient personnellement le vrai Orias l’auraient compris, mais la plupart des sorciers s’intéressaient peu aux affaires des autres. Les autres Archidémons n’avaient sûrement pas fait attention à un Archidémon qui avait été vaincu par un petit sorcier.

« Alors pourquoi n’a-t-elle pas créé un pays pour les elfes ? N’était-ce pas pour ça qu’elle s’est battue avec un Archidémon ? » Barbatos avait exprimé ses doutes.

« Elle a probablement perdu l’occasion de le faire. Non, il est plus juste de dire que le sens lié à sa création a été perdu, non ? » demanda Zagan.

Titania avait peut-être vaincu Orias, mais cela lui avait coûté tout ce qu’elle avait. Ses camarades, sa raison de vivre, et tout le reste. C’est ce que cela signifiait de faire d’un Archidémon un ennemi.

Elle a probablement pris Gremory comme disciple parce qu’elles font toutes les deux partie d’une race mourante…, Les Fomoriens étaient presque aussi rares que les elfes. Si on fouillait tout le continent, ils n’en trouveraient même pas une centaine. Zagan avait supposé qu’une sorte de sympathie s’était manifestée à Orias à cause de sa solitude.

« Tout ce qui vient d’ici n’est que conjecture, mais tu es probablement née dans ce village. Je ne sais pas comment tu as été traitée ici, mais après avoir combattu Orias, tu as décidé que c’était encore mieux ici que dans le monde extérieur. C’est pourquoi tu es venue leur confier Néphy. Ai-je tort ? » demanda Zagan.

« …, » Orias ne répondit pas, mais son silence rendit sa réponse évidente.

« Mais, dans ce cas, pourquoi a-t-elle fait de Néphy une enfant ? Pourquoi nous a-t-elle enfermés ici ? » demanda Chastille en penchant la tête sur le côté.

« Ne comprends-tu pas ? » Zagan avait fait une expression exaspérée quand il avait répondu.

« Oh, vas-y ! Ne sois pas si méchant !? » Chastille se plaignait. Il semblerait que son caractère de pleurnichard soit de retour maintenant que leur conflit avait été résolu.

« Néphy est la fille de cette femme…, » proclama Zagan.

Cette phrase avait poussé Orias à pousser un soupir de résignation.

« Mon Dieu, qu’est-ce que c’est que ça ? C’est la première fois que je sens que bluffer ne sert à rien, » déclara Orias en regardant Néphy. Puis elle avait poursuit. « Petite Dame, est-ce que tu profites de ta vie avec ces gens ici ? »

« Oui. Maître Zagan, Grande Soeur Foll et tous les autres sont très gentils avec moi, » déclara Néphy.

Ce fut certainement une conversation difficile à suivre pour Néphy dans sa forme actuelle, car elle ne pouvait pas connaître sa relation avec la vieille dame avant elle.

En fait, elle prend peut-être la forme d’une vieille femme pour cacher ce fait…, le portrait du pendentif montrait une jeune femme et, en tant qu’enseignante de Gremory, elle avait probablement la capacité de manipuler son âge à volonté.

« D’accord, c’est bien. Tu vois, mamie ici présente pensait que ce serait merveilleux de faire en sorte que ces moments de plaisir durent éternellement, » répondit Orias d’un signe de tête doux.

« Ça… me rend très heureuse, mais ce n’est pas bon. Maître Zagan a beaucoup de travail. Aussi, je veux grandir rapidement et l’aider…, » déclara Néphy avec une expression troublée.

« J’étais sûre que ce serait le cas, mais je voulais te forcer à passer ces moments amusants, quelle que soit ton opinion, » affirma Orias en faisant signe à Néphy, puis en disant : « Viens maintenant par ici. Il est temps de rentrer à la maison, non ? J’enlèverai la malédiction de la princesse. »

Alors qu’Orias touchait son front, Néphy s’effondra doucement sur place. Et puis, Orias avait mis une robe sur ses épaules.

« Elle retrouvera sa forme originale dans une trentaine de minutes, » déclara Orias en regardant Zagan. Puis elle lui avait dit. « C’est comme tu dis. J’ai vaincu Orias, mais j’ai tout perdu. Même si j’ai quitté ce village parce que je voulais créer un paradis pour ceux qui étaient opprimés, tout le monde est mort à cause de moi. »

Personne au monde ne pouvait comprendre le désespoir qu’elle ressentait à l’époque.

« Orias était un nom pratique qui m’a permis de mettre de côté mon lien avec les elfes. Après cela, eh bien, tu peux imaginer ce que tu voudras, » affirma Orias en montrant l’Emblème de l’Archidémon à sa main droite. Alors, avec un soupir fatigué, elle déclara. « Alors, as-tu gardé en vie cette vieille femme décrépie pour parler de telles absurdités ? »

« Pas du tout. Eh bien, entendre tes vieilles histoires n’est pas si mal non plus…, » déclara Zagan.

Oui. Le vrai problème était encore à venir. Zagan se tenait devant Orias. Alors qu’il levait la main droite, assez forte pour massacrer même un démon, Chastille et les autres devinrent pâles.

« Attends, Zagan ! Cette personne n’est-elle pas, euh... La mère de Néphy ? La tuer signifierait…, » Chastille s’était mise à gémir, mais Zagan n’y avait pas prêté attention et il avait baissé le bras.

« Argh…, » le corps d’Orias s’était raffermi, mais l’instant d’après, son visage avait été rempli de confusion. Zagan posa la main sur sa poitrine et s’agenouilla devant Orias.

« Titania. Je suis amoureux de votre fille. S’il vous plaît, donnez-moi la main de votre fille, Néphy, » déclara Zagan.

« Hein, euh, Hmm… ? » Orias — non, la bouche de Titania s’était ouverte avec un pop. Elle avait émis un son déconcerté qui n’était pas digne d’un Archidémon, mais finalement, elle avait murmuré comme si elle n’arrivait pas à le croire. C’était la vraie raison pour laquelle Zagan ne l’avait pas combattue. En fin de compte, la seule chose que Zagan avait attaquée, c’était le démon. Il n’avait pas infligé une seule blessure à Orias elle-même.

La seule personne autorisée à tuer le sang de Néphy est Néphy elle-même…, eh bien, tuer ses propres parents était un problème en soi, mais malheureusement, Zagan ne possédait pas une telle sensibilité correcte.

Le principal problème était de savoir si Zagan possédait assez de pouvoir pour forcer un Archidémon à capituler sans vraiment se battre, mais cela ne s’était pas avéré trop difficile.

« Tu me demandes de te donner la main de ma fille… ? Veux-tu dire que tu veux prendre Néphy pour épouse… ? » répondit Orias d’un ton empli de doute.

« C’est bien ça, » déclara Zagan.

« Est-ce… quelque chose pour lequel tu as besoin de ma permission ? » demanda Titania.

« Tu es vivante, et tu souhaites le bonheur de Néphy. Ai-je besoin d’une autre raison ? » demanda Zagan. Il ne comprenait pas très bien le concept des relations parents-enfants. Cependant, si Foll devait un jour trouver un amoureux, alors Zagan lui-même ne le permettrait jamais à moins qu’il ne les approuve. Et dans ce cas, il pensait qu’il devait rendre hommage au parent de Néphy.

« Cet enfant… t’appartient déjà, n’est-ce pas ? Permets-moi quand même de dire ceci…, » déclara Orias en riant. Et puis, elle avait baissé la tête.

« S’il te plaît, prends soin de ma fille, » déclara Titania.

Et avec cela, le rideau s’était levé sur la visite de Néphy chez elle.

 

***

Épilogue

« Maintenant, je vais prendre congé avant que Néphélia ne se réveille, » déclara Orias.

« Oh, attends un peu, » Zagan avait fait arrêter Orias quand elle avait mis son capuchon et s’était retournée pour s’éloigner.

« … As-tu toujours besoin de quelque chose ? » demanda Orias avec une expression perplexe.

« Tu viens d’être vaincu par un autre Archidémon. Crois-tu que tu peux t’en aller comme ça ? » Zagan répondit avec étonnement.

Le fait d’entendre de telles paroles, qui gaspillait complètement toute la sincérité quelques instants plus tôt, avait fait raidir tout le monde.

« Z-Zagan, c’est la mère de Néphy. La traiter encore moins bien, c’est…, » commença Chastille.

« Je ne suis pas vraiment du genre à parler, mais mon professeur n’est pas vraiment une méchante ici, vous savez ? Elle est peut-être bizarre, mais elle ne vous ferait jamais de mal, ou comment dire…, » déclara Gremory.

Dans un virage inhabituel, Chastille et Gremory étaient tous deux d’accord pour tenter de l’arrêter. Cependant, Zagan les avait fait taire d’un seul regard.

« Des sanctions sont imposées aux vaincus. Il n’y a pas d’exceptions, qu’il s’agisse d’un Archidémon ou d’un parent, » déclara Zagan.

Pour protéger Néphy et Foll, Zagan devait continuer à démontrer que c’était une mauvaise idée de faire de lui un ennemi. Barbatos, Raphaël, et même l’Archidémon Bifrons, ne s’en était pas tirés sans une forme de punition… Bifrons était même déjà mort plusieurs fois. C’est pourquoi Zagan ne pouvait pas céder sur ce point. Tout le monde ne croirait pas que ce que Zagan faisait était correct. Cependant, même si c’était faux, ils n’avaient pas été en mesure de réfuter son point de vue. Personne n’avait appelé pour l’arrêter à ce moment-là.

Le seul qui avait réagi, c’était Barbatos, qui avait ricané comme s’il regardait une sorte de farce. Et donc, Zagan avait décidé de le frapper au visage plus tard.

« C’est un raisonnement évident pour un sorcier, n’est-ce pas ? J’en ai aussi marre de cette longue vie. Si tu es prêt à assurer la sécurité de Néphélia, alors je n’ai aucune objection, » Orias n’avait montré aucun signe de résistance et s’était présentée devant Zagan en disant cela.

« Comme c’est gracieux ! Alors, je te ferai prendre ta punition, » déclara Zagan. Puis, il regarda Barbatos et il déclara. « Hé, Barbatos. Donne-moi ça. »

« … T’as vraiment les nerfs solides, hein ? » Barbatos semblait comprendre ce qu’il disait et avait mis sa main dans l’ombre en répondant. Et ce qu’il avait sorti… c’est une bouteille d’alcool. Prenant la bouteille, Zagan avait parlé à Orias une fois de plus.

« Tu viens de ce village, n’est-ce pas ? L’alcool ici n’est pas si mauvais… mais cette crise de rage a fait exploser la brasserie, » déclara Zagan.

« Et qu’en est-il ? » demanda Orias, plissant ses sourcils comme si elle ne savait pas où Zagan voulait en venir.

« Obtiens en plus de cette liqueur et apporte-la en hommage à mon château. C’est ta punition, » déclara Zagan.

« Tu veux que j’aille dans ton château ? » Orias répéta sa demande comme si elle cherchait ses vraies intentions, et son regard se dirigea naturellement vers Néphy.

« Ce n’est pas possible… tu me dis de rencontrer Néphélia ? » demanda Orias.

« Qui sait ! Même si tu rencontrais Néphy par hasard dans mon château, je ne m’en plaindrais pas, » déclara Zagan.

« … Et combien de temps ai-je pour accomplir cette tâche ? » demanda Orias, avec un sourire amer bien visible sur son visage.

« Je n’ai pas beaucoup de temps libre, donc je n’ai pas l’intention d’attendre très longtemps, » déclara Zagan.

« Comme c’est strict, » répliqua Orias.

« C’est ta punition, après tout, » déclara Zagan.

« Les vaincus obéiront au vainqueur. Telle est la providence du monde, » déclara Orias en inclinant la tête de manière exagérée.

Il ne savait pas combien de temps il faudrait à Orias pour mettre de l’ordre dans ses sentiments après avoir déjà abandonné sa fille une fois. De plus, même si Néphy se réunissait avec elle, ça pourrait finir en tragédie.

Pourtant, si elle a prié pour le bonheur de Néphy, alors elle a le droit de la rencontrer…, c’était pourquoi Zagan lui avait donné l’occasion de le faire.

« … Je n’aurais jamais pensé que le jour viendrait où mon courage serait mis à l’épreuve, » la silhouette d’Orias avait disparu comme une ombre quand elle avait laissé ces mots d’adieu derrière elle. Et après que sa présence eut complètement disparu, Barbatos avait pris la parole sur un ton exaspéré.

« Tu ne changes vraiment jamais, hein ? » déclara Barbatos.

« Ferme-la. Pourquoi ne vois-tu pas une autre façon de le faire ? » demanda Zagan.

« N’était-ce pas correct de la tuer ? » demanda Barbatos.

« Dans ce cas, je vais commencer par te tuer, » répondit Zagan d’un air accusateur.

« Je n’ai pas l’intention de te déplaire, Maître, » répliqua Barbatos en se moquant de lui.

« Barbatos, tu savais ? Je parle du fait que Zagan ferait ça…, » demanda Chastille avec un regard de choc.

« Eh bien, pourquoi penses-tu que je sois encore en vie ? » Barbatos avait également été laissé à la condition qu’il apporte de l’alcool en guise d’hommage. Il n’était pas assez stupide pour ne pas réaliser ce qui se passait quand les choses allaient exactement dans le même sens. Cependant, la seule à faire une expression surprenante ici était Chastille.

« T’es trop bête, Tête de Poney. Comment ne l’as-tu pas réalisée alors que tu connaissais Zagan depuis plus longtemps que moi ? » Foll avait parlé en étouffant un bâillement.

« Hein ? » s’exclama Chastille.

Foll avait aussi écouté la farce à mi-chemin tout à l’heure en se reposant sur le dos de Kimaris. Eh bien, vu que c’était le soir et normalement le moment pour elle d’être au lit, c’était tout à fait logique.

« Alors, et toi, Kimaris ? Tu ne le savais pas, n’est-ce pas ? » demanda Chastille.

« Non, mais vu la personnalité de Sire Zagan, j’ai pensé que ce serait un peu tiré par les cheveux qu’il tue, Mlle Orias, » avait déclaré Kimaris en regardant Chastille avec une expression de déception. Chastille se recroquevillait peu à peu en étant en larmes. Et puis, elle avait appelé Gremory comme si elle s’accrochait à son dernier espoir.

« Argh, Gremory, dis quelque chose aussi ! Ne paniquais-tu pas aussi ? » demanda Chastille.

Dans un virage inhabituel, les joues de Gremory rougirent alors qu’elle couvrait son visage en réponse à cette question.

Donc même elle possède toujours la notion générale de honte, hein… ? C’était en quelque sorte un soulagement, et Gremory parla alors d’une voix larmoyante.

« Oublie ça, c’est tout. J’ai perdu mon sang-froid parce que ça concernait mon professeur. Si je finis par avoir la même réaction que celle-ci encore et encore… alors… Il… Il faudrait que je meure, » déclara Gremory.

« Était-ce vraiment quelque chose qui vaut la peine de mourir pour ça !? » Chastille avait gémi, éclatant en larmes à ce moment-là.

Ah, on dirait que les heures de bureau sont terminées…, La vaillante Archange était certainement fiable, mais à la fin, Zagan ne pouvait pas vraiment se détendre si elle n’agissait pas comme d’habitude. Et grâce à ses pleurs, Néphy avait commencé à remuer dans les bras de Zagan.

« Hm… Hm… ? » murmura Néphy.

« Néphy ! » Zagan l’avait appelée, ce qui avait fait que tout le monde s’était rassemblé.

« Maître Zagan… Euh… ? Hm, qu’est-ce… qu’il m’est arrivé… ? » Néphy n’avait pu faire entendre qu’une voix désorientée parce que ses souvenirs étaient en désordre.

« Néphy, tu ne te souviens pas de ce qui s’est passé ? » demanda Zagan, mais les oreilles de Néphy tremblaient de confusion. En regardant sa réaction, il avait eu l’impression que Néphy était redevenue normale. Elle avait déplacé son regard vers le bas comme si elle cherchait dans ses souvenirs, et puis elle avait été prise de court.

« C’est exact, Maître Zagan ! Un sorcier rôde dans la zone. À en juger par son pouvoir… c’est probablement un Archidémon…, » déclara Néphy.

Après ça, Zagan se sentait soulagé, mais déçu.

Je suppose qu’elle ne se souvient pas du temps où elle était petite…, la jeune fille qui pouvait rire innocemment et lui dire qu’elle l’aimait était partie. Était-ce vraiment bien ? De tels doutes flottaient dans l’esprit de Zagan, mais il secoua la tête comme pour se débarrasser de toutes ces pensées.

« Celui-ci n’était pas un ennemi, alors tu n’as plus à t’inquiéter, » déclara Zagan en caressant la tête de Néphy.

C’était juste un rêve dans son esprit. Cependant, Néphy cligna des yeux quand elle regarda la poitrine de Zagan. Là, elle aperçut la couronne qu’il avait reçue de la petite Néphy.

« C’est ce que j’ai fait avec Grande Soeur Foll…, » déclara Néphy en tendant timidement la main vers la couronne. Il semblait y avoir des parties dont elle se souvenait vaguement.

« Maître Zagan, avons-nous… parlé de quelque chose de très important ? » demanda Néphy, l’air plutôt décontenancé.

« Quelque chose de très important… ? Non, je ne pense pas…, » Zagan inclina la tête sur le côté quand il répondit, mais Néphy secoua la tête pendant que ses cheveux blancs se balançaient.

« Non, il devait y avoir quelque chose. Si je me souviens bien, nous étions devant une cheminée, et vous avez dit quelque chose…, » déclara Néphy.

« Hein ? » s’exclama Zagan.

Devant une cheminée… Quelque chose de très important…, ces mots avaient fait que Zagan s’était remémoré qui s’est passé plus tôt.

« Néphy, je t’aime. C’est pourquoi je vais reprendre la Néphy que j’aime. » C’est à ce moment que Zagan, qui n’avait jamais pu dire les mots « Je t’aime », avait d’abord transmis ses sentiments à Néphy. Et quand Zagan avait commencé à paniquer, le premier à bouger avait été Kimaris.

« Mlle Gremory, peut-on parler là-bas ? » demanda Kimaris.

« Lâche-moi, Kimaris ! Ne me fais pas rater une fois dans ma vie une démonstration du pouvoir de l’amour ! Je te dis de me lâcher ! » cria Gremory.

Kimaris éloigna avec Gremory qui gémissait d’une manière inesthétique. Ensuite, Chastille avait bloqué la vision de Foll de ses deux mains.

« Tête de Poney. Je ne peux pas voir, » déclara Chastille.

« Désolée, mais c’est trop tôt pour que tu regardes. Le Seigneur Raphaël ferait sûrement la même chose, » déclara Chastille, bloquant apparemment la vision de Foll à la place du majordome qui l’attendait au château. Et ainsi, elle avait emmené Foll plus loin. Le dernier qui restait, Barbatos, semblait n’avoir aucun intérêt dès le début et s’appuyait contre un arbre tapotant sur une bouteille d’alcool.

Avec tous ses chemins de retraite coupés avant même qu’il ne s’en rende compte, Zagan avait poussé un gémissement.

« Ah, euh, Néphy. À cette période…, » déclara Zagan.

« Oui ? » Les yeux azurés de Néphy regardaient directement les siens quand elle lui répondait.

Si je m’enfuis d’ici, j’ai l’impression que je ne pourrai jamais lui dire ce que je ressens…, il serait bien trop pitoyable pour lui de s’enfuir quand il avait déjà chargé Orias de quelque chose de si difficile. Et ainsi, Zagan avait rassemblé sa détermination.

« Néphy, » déclara Zagan.

« Oui ? » demanda Néphy.

« Attends s’il te plaît… environ dix secondes, » déclara Zagan.

« … D’accord, » hocha la tête, faisant presque un sourire amer. Si Zagan avait pu dire à Néphy qu’il l’aimait, il ne l’aurait pas fait attendre si longtemps, donc son retard était tout naturel.

Zagan avait pris une grande respiration pour se calmer, mais dix secondes, c’était beaucoup trop court. Quand il avait pris son troisième souffle, le temps était déjà écoulé. Et puis, en ouvrant les yeux en un clin d’œil, il avait dit…

« Néphy ! » déclara Zagan.

« O-Oui, » répondit-elle.

« … Je ne le dirai qu’une fois, compris ? » proclama Zagan en la tenant dans ses bras. Puis, il murmura à ses oreilles pointues.

« Je t’aime, Néphy. Je t’aime depuis si, si longtemps…, » Zagan l’avait déclaré avant de rapidement réaliser qu’il aurait dû le dire d’une manière plus éloquente. Cependant, Néphy avait simplement mis sa force dans ses bras et avait serré le dos de Zagan.

Une douce odeur se dégageait. Elle était douce et mince, mais même ainsi, la façon dont elle avait mis tous ses efforts pour l’enlacer avait fait battre le cœur de Zagan comme un tambour. De plus, Zagan pouvait dire que le cœur de Néphy battait aussi rapidement.

« Oui. Je m’en souviens ! » Néphy répondit joyeusement. Et Zagan pouvait dire que son visage devenait rouge à cause de ses paroles.

Bon sang, Néphy se souvient-elle vraiment de tout ? Dans ce cas, il aurait mieux valu qu’il ne dise rien. Cependant, en regardant la façon dont ses oreilles sautaient joyeusement de haut en bas, il ne pouvait pas se fâcher contre elle.

Est-ce qu’elle voulait… l’entendre encore une fois ? Peu importe la réponse à cette question, elle savait qu’elle était aimée maintenant. Ainsi, Néphy approcha sa bouche de l’oreille de Zagan et lui murmura à l’oreille.

« Je vous aime aussi, Maître Zagan. Je vous aime tellement. Je suis vraiment, vraiment amoureuse de vous, » répondit Néphy.

Cette attaque-surprise avait fait frotter la joue de Zagan contre celle de Néphy. Chastille, d’un autre côté, les regardait fixement et rougissait jusqu’aux oreilles. Gremory était de bonne humeur, réclamant quelque chose. Barbatos laissait échapper un gémissement ostentatoire. Et Foll donnait des coups de pied aux tibias de Chastille.

Franchement, ils ruinaient tous l’atmosphère. Mais quand même, Zagan avait envie de tout pardonner.

Malheureusement, Zagan n’avait pas remarqué un fait important à ce moment-là.

Nephteros était introuvable…

« … Hmm. Vous aviez des affaires avec moi ? » s’enquit Orias.

Dans la forêt dense.

Nephteros effaça sa présence et poursuivit Orias. Peu de temps après, sa poursuite fut remarquée, et Orias arrêta de marcher et l’appela. Comme Nephteros se révéla, Orias hocha la tête pour comprendre.

« Vous êtes… Je vois. Vous n’êtes pas la subordonnée de Zagan, mais celle de Bifrons, exact ? » répliqua Orias sans aucune trace d’hostilité dans sa voix. Mais même ainsi, Nephteros se sentait prête à tomber à genoux quand leurs yeux s’étaient croisés.

Zagan a réussi à vaincre ce monstre si facilement… ? Tous les autres résidents du village réunis n’avaient même pas pu lever le petit doigt sur Orias, mais il l’avait vaincue tout seul. Comme c’était terrifiant. Et une déglutition audible fit résonner l’intérieur de sa gorge en raison de la peur de Nephteros. Elle se détestait d’avoir créé une situation où elle rencontrait un Archidémon toute seule. Ce n’était pas comme si Nephteros était sous la protection de Zagan. Si elle déplaisait à quelqu’un qui n’avait aucune raison de la garder en vie, alors elle mourrait sûrement.

C’était comme ça qu’étaient les Archidémons, et Orias était l’un d’entre eux. Pourtant, Nephteros avait rassemblé sa volonté et avait ouvert la bouche pour parler.

« S’il vous plaît, pardonnez mon manque de courtoisie. Je suis venue… parce qu’il y a quelque chose que j’aimerais vous demander, » déclara Nephteros.

« Je suis de bonne humeur en ce moment. Il n’y a pas besoin d’agir humblement, » déclara Orias en haussant les épaules.

« Je vois, » dit Nephteros, pâlissant et tremblant pitoyablement, malgré le ton doux d’Orias. Cet Archidémon était certainement effrayant. Cependant, le fait d’apprendre la réponse à ce qu’elle voulait demander était aussi assez effrayant.

« Allez-y, continuez. Parlez. Il semble que Zagan a pris goût à vous, alors je ne vous ferai aucun mal, » déclara Orias sur un ton réconfortant. D’une manière ou d’une autre, ses paroles semblaient presque emplies de pitié.

« Vous êtes… la mère de Néphélia, n’est-ce pas ? » demanda Nephteros alors qu’elle parvenait enfin à rassembler sa détermination.

« … C’est ce que je suis. Mais, si possible, je préférerais que vous n’en parliez pas, » déclara Orias.

« Toutes mes excuses. Mais c’est une question importante, » répondit Nephteros d’un salut rapide. Puis elle avait demandé : « Avez-vous… eu d’autres enfants ? »

« Hmm… ? Je ne comprends pas vraiment le sens de votre question. Qu’est-ce que vous voulez dire ? » demanda Orias.

« J’ai le même visage que Néphélia. J’ai les mêmes cheveux blancs, et je connais bien le Célestian, » répondit Nephteros en avalant nerveusement toute la salive dans sa bouche. Et puis, tout en touchant son propre visage, elle poursuit. « Mais je n’ai pas de souvenirs… Je ne me souviens de rien de mon enfance… ou de ma famille… »

Par-dessus tout, elle avait peur de n’avoir jamais douté de ce fait auparavant. Sa voix tremblait d’une manière inesthétique alors que son visage se tordait, prêt à éclater en larmes à tout moment.

« Juste… qu’est-ce que je suis ? » demanda Nephteros .

Et en réponse, Orias avait dit…

***

À suivre…

***

Illustrations

 

..

***

Histoires courtes en prime

Un témoignage de gratitude

« Soyez reconnaissants. J’ai fait tout mon possible pour vous livrer ceci… Pourquoi suis-je la seule à être hautaine ? C’est un Archidémon, non ? Alors… merci pour le manteau. Je n’oublierai pas la dette que je vous dois pour m’avoir sauvé la vie… C’est aussi étrange d’être trop modeste, bien que… » Nephteros marmonnait pour elle-même dans la forêt à la périphérie de Kianoides. Le manteau de l’Archidémon Zagan était soigneusement bercé dans ses bras. Il y a quelques jours, Nephteros avait été sauvée par lui lors d’un certain incident, et elle avait fini par lui emprunter son manteau.

C’est lui qui m’a dit de le rendre, je n’ai donc pas le choix… Cependant, la personnalité de Nephteros se mettait en travers du chemin. Elle ne savait pas comment exprimer sa gratitude à un autre. C’est pourquoi elle se tenait simplement à l’extérieur du château de Zagan pour réfléchir. Elle marmonnait toute seule, s’exerçant à ce qu’elle lui dirait.

Nephteros faisait cela depuis une minute entière quand elle avait soudain regardé le manteau dans ses mains.

« Attendez, ce manteau est terriblement abîmé, n’est-ce pas… ? » Nephteros pensait qu’il était trop miteux pour être porté par un Archidémon.

Que fait Néphélia ? Essaie-t-elle de faire honte à son maître… ? Et alors que cette pensée lui traversait l’esprit, elle avait réalisé que ce n’était pas le cas.

« … Je vois. C’est parce qu’il m’a sauvée. »

Zagan avait combattu le Seigneur-Démon, un être qui surpassait de loin la puissance humaine… Ou plutôt, il avait combattu ses pensées résiduelles. S’il n’avait pas essayé de sauver Nephteros pendant la bataille, son manteau n’aurait sûrement pas fini dans un état aussi délabré.

« Je suppose que je vais au moins réparer ça. »

La sorcellerie, qui permettait de rendre à quelque chose son état d’origine, était extrêmement courante. Le degré de succès était clairement visible en fonction des capacités du sorcier, c’était donc une bonne mesure de sa force. Et lorsqu’elle avait levé le doigt pour invoquer sa sorcellerie, pour une raison quelconque, Nephteros avait baissé la main.

« Il y a quelque chose de mal à s’appuyer sur la sorcellerie tout le temps. »

La sorcellerie pouvait rendre l’impossible possible, mais si elle s’y fiait trop, elle deviendrait plus semblable à son maître, Bifrons. Elle ne voulait pas être comme ça, c’est pourquoi elle se rendit dans la ville de Kianoides.

« Cette ville est assez grande, alors quelqu’un va vendre les outils dont j’ai besoin pour réparer ça, n’est-ce pas ? »

Ce n’est pas comme si elle voulait impressionner l’Archidémon et recevoir des éloges de lui, mais Nephteros avait décidé de relever le défi de la couture pour la première fois de sa vie.

… Malheureusement, il lui avait fallu un mois entier pour arriver à un point où elle était satisfaite de son travail.

La menace de la tarte aux poissons

« Oh ? Il est rare de vous trouver en train de cuisiner, Lady Chastille. »

Chastille avait hoché la tête d’un air vantard alors que ses trois subordonnés le lui faisaient remarquer.

« Hm. Je vais aller à une petite assemblée à l’orphelinat, alors j’ai pensé que ce serait bien de faire goûter aux orphelins un peu de cuisines maison… Bien que, pour être honnête, je ne pense pas pouvoir cuisiner aussi bien que Néphy, » déclara Chastille.

Sa voix s’était éteinte à la fin, mais après avoir entendu la réponse de Chastille, les trois chevaliers l’avaient regardée avec tendresse, le sourire aux lèvres.

« C’est merveilleux. Je suis sûr que les enfants seront ravis. Que faites-vous ? »

« Je fais une tarte aux poissons. »

Les chevaliers s’étaient figés en entendant sa réponse.

« Lady Chastille, je suis tout à fait conscient que c’est impoli de ma part de demander, mais savez-vous ce qu’est ce plat ? »

« Bien sûr. C’est une tarte aux pommes de terre avec du poisson blanc. C’est la première chose qui me vient à l’esprit quand je pense à la cuisine de ma mère, » répondit Chastille.

Elle n’avait que partiellement raison. C’était une tarte aux pommes de terre circulaire avec une tête de poisson qui dépassait en plein milieu. Sa seule vue était suffisamment terrifiante pour faire pleurer un enfant.

« Je n’en ai peut-être pas l’air, mais je viens d’une maison noble… Eh bien, notre maison est complètement en ruine maintenant, mais à cause de cela, ma mère s’est occupée de tous les travaux ménagers. Sa cuisine était assez mauvaise, mais c’est un plat que nous avons toujours apprécié. »

Chastille croyait vraiment que le goût de la nourriture d’une mère était le goût de la maison. C’est pourquoi elle était sûre que les enfants seraient heureux de goûter à la cuisine de sa mère. Et lorsqu’elle le leur avait fait savoir, les trois chevaliers s’étaient couvert le visage, manifestement incapables de le supporter plus longtemps.

« Lady Chastille ! Nous vous informerons des aliments que les enfants apprécieront, alors reconsidérez votre décision ! »

« Hein ? Mais… »

« Regardez ! Nous sommes tous les trois connus comme les trois oncles idiots parmi les enfants de la ville, alors nous nous entendons bien avec eux ! »

« Est-ce que c’est si… ? Alors, faites-le. Je serai heureux tant que les enfants s’amuseront. »

Il est peu connu que ces chevaliers protégeaient la ville d’une menace autre que les simples sorciers en ce beau jour.

Surstimulation

« Keeheehee, comment ça va, Valefor ? Comment est le goût du nostrum que j’ai concocté dans la marmite même de l’enfer ? »

« Hm, c’est savoureux… Gremory, tu es douée pour faire des bonbons ! » s’exclama Foll en engloutissant les pâtisseries que Gremory lui avait données avec un soupir de satisfaction. Puis, elle pencha la tête sur le côté en voyant Gremory hocher la tête à plusieurs reprises.

« Maintenant que j’y pense, pourquoi es-tu toujours en forme de grand-mère, Gremory ? »

« Hm, je vois que vous êtes toujours un dragon. C’est une question judicieuse… » Gremory étendit les deux bras de façon exagérée en disant cela, puis elle fit la déclaration suivante avec un regard triomphant : « C’est parce que je souhaite simplement aimer toutes les mignonnes espèces rares. Ce n’est pas comme si je voulais être aimée par elles. »

Incapable de comprendre du tout ce qu’elle disait, Foll pencha la tête encore plus loin. Gremory, en revanche, ne fit pas attention à elle et continua à parler.

« En d’autres termes, je souhaite simplement continuer à regarder de belles créatures dans une affaire à sens unique. Pour le dire de manière un peu extrême, je n’ai pas besoin d’être ici. Je ne dois être moi-même qu’un élément de fond, comme un arbre ou un rocher, dans les moments dramatiques. Cependant, me transformer en un objet inanimé m’empêcherait de les regarder sous l’angle que je souhaite. C’est pourquoi j’ai choisi cette forme. »

« Je ne comprends pas. Tu ne veux donc pas te démarquer ? » demanda Foll.

« Vous pouvez l’interpréter ainsi. Personne ne s’arrêtera pour prêter attention à une vieille femme flétrie qui passe devant eux. C’est pourquoi je suis capable de me rapprocher autant que je le veux de ceux que je souhaite aimer ! »

L’explication de Gremory n’avait rien fait pour atténuer la confusion de Foll.

« Mais je t’aime bien, Gremory. Ce serait triste si tu te transformais en arbre ou en pierre, » déclara Foll.

« Hnnngh ! » Gremory avait laissé échapper un jet de sang de son nez en tombant. Voyant cela se produire juste devant elle, Foll avait affaissé ses épaules avec un regard pâle sur son visage.

« S-Superbement… fait. Un acte aussi pur… est bien trop… stimulant… pour moi… » Gremory s’arrêta complètement de bouger, mais son expression était plus qu’extatique.

« Eh bien, peu importe… » dit Foll, qui avait fini par grignoter en silence les pâtisseries pendant qu’elle aidait Gremory.

La sirène de l’ivresse

« Gaaaaaah ! Que…, qu’est-ce que vous dites exactement que j’ai fait de mal ici !? »

Néphy avait entendu une voix familière venant d’un bar et s’était arrêtée alors qu’elle se promenait dans Kianoides avec Manuela.

« Qu’est-ce que c’est que ce vacarme ? »

« Qui sait ? Et qui s’en soucie, vraiment. Aucune personne décente ne se vautrerait ici en plein milieu de la journée. Allons-y, Néphy, » déclara Manuela.

« Veux-tu patienter un instant ? Je crois que je reconnais cette voix… » Néphy avait ignoré la suggestion de son amie et avait jeté un coup d’œil à l’intérieur du bar. Et là, elle aperçut une sirène qui se noyait dans l’alcool.

« Vous êtes… celle qui chantait au bal du soir sur le bateau ? » demanda Néphy.

« Hwah ? Ah, vous êtes la… »

La sirène avait jeté sa bouteille vide et s’était accrochée à Néphy.

« Waaah ! Écoutez-moi, Mlle Néphy ! Tous les magasins ici disent qu’un chanteur ne leur conviendrait pas et ne m’engagerait pas du tout ! Je suis au chômage ! Et complètement fauchée ! »

En entendant le terme, et voyant que la sirène avait empilé une montagne de nourriture et de boissons, le personnel avait bloqué la sortie.

« Bon sang… C’est pour ça que je t’ai dit de ne pas t’en mêler…, » déclara Manuela.

La sirène s’était mise à hurler en entendant la déclaration impitoyable, mais juste, de Manuela.

« Waaah ! Videz toutes les bouteilles que vous avez ! Je vais plonger dedans et, genre, respirez dedans ! » cria la sirène.

« On pourrait tout à fait vendre ça comme étant mariné par une sirène… Attendez, votre espèce peut-elle respirer dans ce truc ? »

« Si vous êtes prêt à me payer, alors tout est bon ! »

Ce n’était pas une source de revenus fiable pour une sirène, peu importe comment on la regardait…

Manuela se grattait la tête et elle avait porté son attention sur Néphy.

« La place de Zagan est à court de main d’œuvre à cause de tous les nouveaux habitants, n’est-ce pas ? N’avez-vous pas un travail qu’elle peut faire ? » demanda Manuela.

« … Je vais essayer de demander, » déclara Néphy.

« Vraiment ? Allez-vous vraiment me diriger vers un emploi !? Je nettoierai même les toilettes ou tout ce que vous voulez ! » s’exclama la sirène.

Et ainsi, Néphy avait fini par ramener la sirène au château.

***

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Un commentaire :

  1. C’est tres mechant de nous laisser un tel suspens après une tel scène

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