Kimi to Boku no Saigo no Senjo – Tome 12

***

Prologue 1 : Un ciel d’étoiles voilées

Le chemin de fer continental traversait le pays. Alors que le train express fonçait vers l’Empire, le plus grand territoire du monde, une jeune fille aux cheveux blonds et clairs appuyait sa main sur la fenêtre tout en regardant le paysage défiler.

« – »

Son visage doux et serein paraissait digne lorsqu’on le regardait de côté. Ses cheveux flottaient dans le vent du soir qui entrait par la fenêtre légèrement entrouverte.

C’était une scène pittoresque.

Si un artiste était passé par là, il n’y a aucun doute qu’il aurait fait une démonstration galante en produisant une toile pour dessiner la jeune fille.

Cependant…

Ce n’était pas comme si un peintre lui tomberait dessus au cours d’un tel voyage. Au lieu de cela, c’est une tout autre personne qui s’était présentée à elle…

« Lady Alice, j’ai un rapport à vous faire. » Un vieux serviteur du nom de Shuvalts s’était approché d’elle depuis le wagon suivant. L’homme vêtu d’un costume chuchota pour qu’elle seule puisse l’entendre. « La Fondatrice est apparue dans l’Empire. »

« … Comme nous le pensions. »

« Il semble que le septième point de contrôle de l’Empire ait été détruit et que sa bataille contre les forces impériales ait commencé. Toute la zone est actuellement en état d’alerte. »

« … Oui, bien sûr. »

Elle n’était pas arrivée à temps.

Aliceliese Lou Nebulis IX serra les dents, frustrée par la situation.

… C’est un peu la définition du dictionnaire du pire scénario.

La Fondatrice ne tardera pas à mettre le feu à l’Empire.

L’Empire était censé être son ennemi. En fait, en tant que princesse de la souveraineté de Nebulis, le plus grand souhait d’Alice était de renverser l’Empire. Mais la Fondatrice allait trop loin.

La Fondatrice — une sorcière aux croyances ancestrales — était susceptible de raser tout ce qui se trouverait sur son chemin en même temps que l’Empire, qu’il s’agisse d’un impérial ou non. Cela signifiait que les villes neutres situées à proximité deviendraient elles aussi des victimes de sa destruction. Des dommages incalculables seraient infligés aux passants, ce qui ne mènerait jamais à la paix qu’Alice souhaitait.

Et Rin et Sisbell sont tous deux dans la capitale impériale en ce moment.

Si la Fondatrice assiège la capitale, elles seront aussi victimes. Ce n’est pas une plaisanterie !

Il y avait également une autre personne — l’épéiste qu’Alice considérait comme son rival se trouvait également dans la capitale.

« … Si elle touche à un cheveu d’Iska, je ne lui pardonnerai pas, même si elle est la Fondatrice. »

« Excusez-moi ? »

« Oh, ce n’est rien », répondit-elle au vieux serviteur en toussant pour s’éclaircir la gorge. De toute façon, l’attaque de la Fondatrice sur la capitale allait poser d’énormes problèmes.

« Shuvalts. »

« Oui, Votre Altesse ? »

« Je sais que je l’ai dit maintes et maintes fois, mais ce sera la dernière fois : je vais arrêter la Fondatrice. »

« Et aussi les Zoa — je le sais. »

« Oui. Je les commanderai à la place de Sa Majesté. Et s’ils n’écoutent pas, je les ramènerai par la force — même si je dois les attacher avec une corde et les traîner jusqu’à la Souveraineté. »

À ce moment précis, Alice servait de mandataire à la reine. En tant que seconde de la reine, elle avait le droit de donner des ordres, et il était de son ressort de donner des ordres non rejetable, même à la famille royale.

Mais les Zoa n’accepteront certainement pas de s’y soumettre.

Je suis après tout face au Seigneur Masqué.

La famille Zoa avait pratiquement déclaré qu’elle allait anéantir l’Empire. Contrairement à Alice, qui souhaitait simplement se débarrasser du régime impérial, les Zoa voulaient anéantir l’Empire. Ils souhaitaient une guerre à grande échelle qui anéantirait la nation.

Les Zoa, qui avaient attendu tout ce temps le réveil de la Fondatrice, ne laisseraient jamais cette occasion leur échapper. Même si Alice tentait de les arrêter, ils auraient probablement recours à n’importe quel moyen pour réaliser leurs plans.

« La situation semble poser quelques difficultés… »

Elle poussa un léger soupir et leva le visage pour regarder à nouveau par la fenêtre.

« – »

« Lady Alice, vous avez également regardé dehors tout à l’heure. Y a-t-il un problème ? »

« C’est juste le ciel. »

Pour être plus précise, elle contemplait la couche de nuages qui obscurcissait le ciel nocturne.

Le spectacle inquiétant des nuages noirs…

Les étoiles scintillantes étaient obscurcies, ce qui lui donnait un sentiment d’inquiétude. Un ciel d’étoiles cachées la mettait tout simplement sur les nerfs. Cette nuit-là, le cœur d’Alice bat très fort.

Est-ce dû aux nerfs ?

Parce que je dois lutter contre la Fondatrice ?

Elle ne savait pas.

Tout ce qu’elle sait, c’est qu’à mesure qu’elle s’approchait de l’Empire, son malaise grandissait.

Mais qu’est-ce que c’est ?

Qu’est-ce que cette anxiété ?

***

Prologue 2 : Une nuit sans lune

Un sentiment d’inquiétude s’emparait d’elle. Les nuits sans lune sont porteuses de mauvaises nouvelles.

« … Comme si c’était vrai. Combien de temps vais-je laisser une telle superstition m’affecter ? »

Le chemin de fer continental traversait le pays, et un gigantesque véhicule ressemblant à un wagon roulait à toute allure sur l’autoroute qui le longeait. Il se dirigeait vers le poste de contrôle impérial.

Avec ce véhicule impérial et ses faux papiers d’identité datant de l’époque où elle faisait partie des forces impériales, elle pourrait facilement passer la frontière. Elle n’aurait pas dû s’inquiéter de quoi que ce soit, et pourtant…

« … Quelque chose ne va pas. »

Elle leva les yeux vers le ciel nocturne visible depuis la fenêtre. La pleine lune était recouverte d’une fine couche de nuages sombres. C’est de là qu’était né son malaise. Elle se sentait inquiète.

« Bonsoir, Shanorotte », déclara un homme depuis l’appareil de communication situé à la place du conducteur. Il s’agissait d’un membre des Zoa, l’une des trois familles royales de la souveraineté de Nebulis. Il s’agissait du Seigneur Masqué, l’actuel représentant du chef de famille.

« Je suppose que votre promenade nocturne se déroule bien ? »

« Bonsoir, Seigneur Masqué. Oui, c’est très agréable. C’est tellement rafraîchissant de pouvoir sentir la brise nocturne alors que je roule vers l’horizon. »

Lorsqu’elle entendit la voix de son chef, les yeux de l’espionne blonde s’adoucirent rapidement.

Shanorotte Gregory.

Bien que son ton semble décontracter, elle était plus grande que la moyenne des hommes adultes et avait une carrure musclée due à l’entraînement. Elle s’était servie de ces caractéristiques physiques pour infiltrer les forces impériales. L’agente avait ainsi pu monter en grade et était devenue commandante. Ainsi, elle avait fourni des renseignements volés à la famille Zoa pendant tout ce temps.

Cependant, son identité avait été révélée au cours de l’affrontement visant à sécuriser un vortex, et elle était sur le point de retourner à la Souveraineté. Aujourd’hui, elle était ici.

« Je sais que c’était une demande soudaine, mais vous nous avez beaucoup aidés en acceptant cette mission. »

La voix du Seigneur Masqué était portée par le vent du soir qui entrait par la fenêtre. Il avait l’air excité. Elle pouvait presque imaginer son expression satisfaite à travers la communication.

« Voici le dernier rapport : notre révérende fondatrice a attaqué le septième poste de contrôle frontalier. Les choses se déroulent comme prévu… En fait, elles se déroulent bien mieux que prévu. »

« C’est le cas. C’est l’occasion rêvée d’en profiter. »

Il y a un siècle, l’ancienne Grande Sorcière avait réduit la capitale impériale en une mer de flammes. Sa résurrection signifiait que l’Empire tout entier serait probablement mis en état d’alerte, ce qui était l’occasion rêvée pour la famille Zoa.

« Kissing et moi la suivons. Nous approchons de la frontière impériale. »

« Je connais bien le point de rendez-vous, très bien même. »

« C’est vrai. C’est le moment de briller, ma chère Shanorotte. J’aimerais que vous nous guidiez. »

Shanorotte connaissait l’Empire mieux que quiconque. En fait, elle était persuadée d’en savoir plus sur les systèmes de défense utilisés à la frontière et dans les villes que n’importe quel Impérial, et tout cela grâce au temps qu’elle avait passé en tant que capitaine impériale.

« La famille Zoa envahira la capitale pendant que notre révérende fondatrice attaquera. Et nous libérerons le chef de la maison ainsi que le reste de notre parenté… est-ce bien cela ? »

« Oui, nous le ferons. Shanorotte, où pensez-vous que nos semblables sont détenus ? »

« Dans une prison appelée la Potence Divine. »

Il s’agissait d’une prison souterraine où n’étaient enfermées que des sorcières. La prison de fer ne laissait pénétrer aucun rayon de lumière. Des centaines de sorciers et sorcières, prisonniers de guerre, y étaient détenues à la suite des nombreuses batailles menées contre les forces impériales.

« Les capacités de Lady Kissing devraient nous permettre d’infiltrer facilement la prison. Nous pourrons alors libérer rapidement nos semblables emprisonnés pour former une puissante équipe de renforts. »

« Et vous croyez que nous pourrons alors raser la capitale ? »

« Bien sûr. Je connais l’emplacement de la prison, alors laissez-moi simplement vous indiquer le chemin. »

« Magnifique. »

Elle entendit des applaudissements.

« Comme c’est merveilleusement rassurant, Shanorotte. J’attends donc avec impatience notre union. »

« Mais je dois m’excuser, Seigneur Masqué. Je crains de ne pas atteindre la frontière avant demain après-midi au rythme où je vais… »

« Nous dégagerons le chemin des forces impériales errantes pendant que nous attendrons. »

« Oui, monsieur. »

La communication fut coupée. Seul le son rythmé du moteur en marche et le vent qui se levait demeurèrent.

« Je suis heureuse de savoir que le Seigneur Masqué est de bonne humeur pour une fois. »

Elle se souvint de la conversation. Même si le Seigneur Masqué semblait toujours arborer un sourire placide, il s’agissait simplement d’une stratégie. Le sourire n’était jamais réel.

Mais Shanorotte était sûre que son sourire d’aujourd’hui était sincère.

Son vœu tant attendu était sur le point de se réaliser. Il tentait d’exaucer le grand désir de la famille Zoa de réduire l’Empire en cendres, et sa joie irrépressible se lisait clairement dans sa voix, même à travers l’appareil de communication.

Son souhait se réalisera bientôt.

Une fois que la Fondatrice aurait attaqué l’Empire, il profiterait du chaos pour entrer dans la capitale.

Oui.

Il devrait être à portée de main, et pourtant…

Pourquoi se sent-elle si mal à l’aise ?

« Hmm… Je suppose que c’est à cause de la lune. »

À l’horizon, la pleine lune avait disparu derrière les nuages sombres.

Elle n’aimait pas cela.

La lune avait disparu —, et le meilleur moment pour être un Zoa, le foyer de la lune, était éclipsé par les nuages menaçants dans le ciel, par les nuages qui semblaient présager quelque chose.

« Haah... Je suppose que ce que tout le monde dit est vrai. J’ai peut-être une grande carrure, mais mon cœur est petit. Je ne peux pas supporter l’anxiété. Je sais, je sais. Au moins, je suis un peu consciente de mes limites. »

L’autoroute s’étendait à l’horizon. Shanorotte examina la route menant à l’Empire et expira.

« Tout devrait bien se passer. Le Seigneur Masqué et Lady Kissing sont là, ainsi que la révérende Fondatrice. Il n’y a aucune chance que la lune disparaisse. »

***

Chapitre 1 : Le jour où les fantômes ont disparu

Partie 1

Cela avait jailli des profondeurs de la capitale.

L’événement avait été accompagné d’un intense tremblement de terre à une profondeur de plus de deux mille mètres sous la surface, dans un puits sous le bureau du Seigneur. Un grondement avait retenti, comme si toute la croûte de la planète se fendait, et une secousse capable de retourner le terrain avait surgi des profondeurs.

« Encore !? »

« Qu’est-ce que c’est ? Pourquoi ça ne s’arrête pas ? »

Leur tireur d’élite, Jhin, fixa le sol tandis que Sisbell, derrière lui, s’appuyait sur le mur. Elle luttait pour rester debout. Même Néné et la capitaine Mismis, toutes deux des soldates impériales entraînées, ne parvenaient pas à rester debout et évitaient de justesse de tomber.

« Votre Excellence ? »

« – »

Alors que Risya relevait le centre de ses lunettes, l’homme bête argenté qui se trouvait devant elle ne faisait que regarder le sol en silence. Deux oreilles protubérantes se dressaient au sommet de la tête de la bête et une queue sortait de sa croupe — c’était le Seigneur Yunmelngen.

Le Seigneur, qui était à la fois l’autorité suprême de l’Empire et le premier humain à être entré en contact avec l’énergie astrale il y a un siècle, fixait le sol avec de grands yeux de félin.

« L’épicentre est probablement l’Assemblée impériale. Les Huit Grands Apôtres doivent être pressés… Je me demande ce qu’ils ont manigancé. » Les yeux du seigneur Yunmelngen se rétrécirent. Des canines jaillirent de la bouche du Seigneur tandis que l’homme bête grimaçait. « Je sens une odeur très désagréable. C’est la même que celle d’il y a un siècle. Je sens la puissance dangereuse qui a tout gâché s’approcher de nous. »

Le Seigneur poursuivit : « La vilaine princesse a donc bel et bien accepté le pouvoir calamiteux. Viens avec moi, Successeur de l’Acier Noir. »

« Hein ? » Iska ne savait pas quoi dire lorsqu’on l’appela brusquement.

Le successeur de l’acier noir…

Il savait que certains membres des forces impériales l’appelaient ainsi. Il pensait que ce surnom provenait simplement de son apprentissage auprès de Crossweil, le Gladiateur de l’Acier Noir, mais son maître n’avait pas non plus expliqué la raison de ce nom.

Mais aujourd’hui, il savait que c’était mieux ainsi.

Après avoir vu les événements d’il y a un siècle grâce au pouvoir d’illumination de Sisbell, il avait appris la véritable raison de ce nom.

« Crow, qu’est-ce que c’est ? »

« C’est un espoir. Nous pourrions être en mesure de vaincre la calamité au cœur de la planète grâce à cela. »

Il était le successeur, car les épées astrales lui avaient été transmises.

Mais je n’ai aucune idée de ce qu’est cette calamité.

S’agit-il d’un phénomène surnaturel ? Ou… ?

« Tu devras le voir par toi-même. »

L’homme bête jeta un coup d’œil à Iska, comme s’il pouvait voir à travers lui.

« Je te montrerai l’ennemi que tu devras affronter. Mais le véritable ennemi n’est pas là. Il s’agit simplement d’une sorcière qui se noie dans son pouvoir. »

+++

L’assemblée impériale.

Connu également sous le nom de « Intention cachée », son nom provenait du fait que le bâtiment du gouvernement n’avait jamais été mentionné sur la moindre carte. L’espace situé à cinq mille mètres sous terre, dans la partie la plus profonde de l’Empire, avait autrefois un autre nom.

« Le Nombril de la Planète. C’est ainsi que s’appelait autrefois ce point d’excavation. »

La voix charmante de la sorcière résonna tout autour. Ses paroles s’enchaînaient comme celles d’un ménestrel qui récitait de mémoire.

« Après avoir confirmé l’existence du pouvoir astral grâce aux archives laissées par les Astrals, vous avez commencé à creuser à cinq mille mètres sous la surface, prétendant qu’il s’agissait d’une nouvelle forme d’énergie… Je suppose que vous aviez raison. Vous êtes tous très sages. Jusque-là, vous aviez fait ce qu’il fallait. »

Elletear Lou Nebulis.

La sorcière ne portait plus les vêtements de la première princesse de la famille Lou. Au lieu de cela, elle avait revêtu une robe de mariée d’un noir de jais. On aurait dit qu’un nuage de brume sombre s’était formé autour d’elle. Bien que la majeure partie de sa peau ait été exposée de façon séduisante par le vêtement, la vue de la robe donnait tout de même froid dans le dos.

« Mais quelle honte ! Il semblerait que vous n’ayez jamais appris de vos erreurs passées. Vous n’avez pas su contenir les pouvoirs astraux il y a un siècle et vous vous êtes attiré des ennuis en créant les mages astraux. Et maintenant, afin d’acquérir un pouvoir encore plus grand, vous avez tenté de l’obtenir à votre tour. »

« – »

« Une substance qui ressemble beaucoup au pouvoir astral, mais qui ne l’est pas non plus, et que les Astrals appelaient avec crainte la Grande Calamité Planétaire. Je suis sûre que vous l’avez désirée ardemment. Après avoir été réduits à n’être que de simples cybercerveaux, vous avez pensé que si seulement vous aviez ce pouvoir, vous pourriez vous donner de nouvelles formes. Mais regardez-vous maintenant, pauvres êtres… » Elle marqua une pause. Puis elle posa une main sur sa poitrine généreuse, ce qui aurait pu susciter la jalousie de la déesse de la beauté elle-même, avant de poursuivre. « J’ai été choisie par elle. Pas vous, mais moi. »

C’était un spectacle glaçant — ses cheveux émeraude ondulés flottaient, mais aucun vent ne soufflait. Ce n’était pas à cause d’une force extérieure, mais à cause de l’énorme puissance qui émanait d’elle.

Un jet de noirceur d’encre obstruant toute lumière avait alors jailli des pieds d’Elletear.

« Belle. »

Les moniteurs alignés sur le mur se mirent à parler.

« Il semblerait que la recherche du pouvoir vous ait corrompu. S’il s’agissait d’un poème épique, vous seriez le monstre que le héros tuerait. Cependant, il y a une chose qui vous empêche de devenir ce monstre — un rêve. »

« Un rêve de créer un paradis pour tous les mages astraux. »

« Vous ne cherchez pas le bonheur pour vous-même. »

« En fait, vous êtes prête à ce que les autres vous craignent, à ce que les autres croient que vous êtes une horrible sorcière. »

« Et imaginez la détermination qu’il vous a fallu pour abandonner votre apparence divine. Vous êtes prête à aller si loin pour sauver les faibles. »

« Quelle belle conviction ! Quels beaux et nobles principes ! »

Des applaudissements retentirent dans l’espace. Sans Luclezeus, il ne restait plus que sept vénérables sages, et chacun commença à donner son avis.

« Comme c’est généreux de me faire des compliments », dit Elletear, enveloppée de brume.

Les coins de sa bouche se retroussent. Son sourire froid n’exprimait aucune chaleur, seulement du mépris.

« En guise de remerciement, je vous efface de l’existence sans vous tourmenter ? »

La sorcière déclarait la guerre.

Et les huit grands apôtres répondirent :

« Pensez-vous que l’oiseau en cage est heureux dans son enfermement ? »

« Qu’avez-vous dit… ? »

« Nous vous souhaitons un bon séjour derrière les barreaux. »

Le sol se divisa.

Elletear se tenait au milieu de la salle lorsque les quatre coins de la salle de l’assemblée se fissurèrent. Des tours déformées d’un brun noirâtre apparurent à chaque coin, poussant comme des plantes à partir du sol.

« … Qu’est-ce que c’est que ça ? »

Les yeux d’Elletear s’écarquillèrent en regardant les quatre tours.

Fausse barrière — Noyau de la planète.

De l’électricité sortait de l’extrémité des tours, entourant le sol de l’assemblée pour créer une zone qui scellait le pouvoir astral. En d’autres termes, il s’agissait d’une cage pour le pouvoir astral.

« Nous vous rendrons vos paroles, Elletear. »

« Peut-être est-ce vous qui avez succombé à votre propre pouvoir, vous qui avez perdu votre sagacité originelle ? »

Bzzzzz…

Alors qu’Elletear tentait de toucher la barrière, des étincelles jaillirent du bout de ses doigts.

« Comme vous l’avez dit, vous n’avez pas mangé depuis plus d’un mois, vous n’avez pas bu une gorgée d’eau depuis une semaine et, dernièrement, vous n’avez même pas eu besoin de respirer. »

« Il a pris possession de votre corps, ce qui signifie que vous n’êtes plus une humaine, mais une puissance astrale. »

« Ce qui est le plus favorable pour nous. »

Ils pouvaient la capturer. Elletear était devenue une masse de puissance astrale sinistre. Aussi vicieux que soit son pouvoir, elle ne pouvait pas l’utiliser dans la zone isolée où le pouvoir astral avait été neutralisé.

« Nous pensions que cela pourrait arriver. »

La lumière des sept moniteurs s’intensifia.

« Vous, un sujet expérimental, vous êtes échappée de l’enceinte de la scientifique. Nous avons donc commencé à nous préparer au pire des scénarios. »

« Nous avions prévu que vous vous retourneriez contre nous si vous réussissiez à l’assimiler. »

« Nous avons donc préparé cette contre-mesure. »

« Vous avez volé tout droit dans votre cage, petit oiseau. »

« – »

La barrière était comme un rideau noir. La belle femme aux mèches émeraude qui se tenait à l’intérieur fixait les écrans.

« Ah-ha ! Ha-ha ! Ah-ha-ha-ha-ha-ha ! »

Soudain, elle se mit à rire. Le ricanement séduisant qui franchissait ses lèvres ensorcelantes aurait donné des frissons à tous ceux qui l’auraient entendu.

« Pensez-vous que je suis un pouvoir astral ? Non, je suis une sorcière. »

Shwoo…

À ce moment-là, de la fumée s’éleva du sol. Un flux noir entoura Elletear, formant quelque chose qui ressemblait à un cocon ou à une chrysalide.

« Quoi ? »

Elle commença à changer, à évoluer. Le pouvoir que les huit Grands Apôtres avaient tant désiré et qui habitait désormais le corps de la princesse transformait sa forme même. D’une mage astrale, elle devenait un monstre.

« Oh, vous êtes des imbéciles. »

Crick… crack…

Ils entendirent le bruit désagréable de quelque chose qui se brise en morceaux — en fait, le son perçant provenait des quatre tours qui la retenaient prisonnière. Des fissures s’étaient formées dans les pierres noires, et les huit Grands Apôtres ne pouvaient que les regarder grossir.

C’est alors que les tours commencèrent à se briser.

« Impossible… ! »

« Nous ne pouvons pas la contenir même avec cette barrière !? »

Les tours s’effondraient. Le bruit du verre qui se brise retentit tandis que la barrière de puissance astrale fut réduite en miettes, et en son centre…

Un monstre noir de jais à forme humaine se tenait là.

Une vraie sorcière.

Elle s’était transformée en particules noires en suspension dans l’air, comme si le ciel nocturne s’était condensé et avait pris forme humaine. Elle n’avait ni yeux, ni bouche, ni nez. Des centaines de perles de lumière semblaient suspendues dans le corps noir semi-transparent du monstre.

« Je suis une méchante, méchante sorcière, après tout. »

Et elle ne parlait pas du type de mage astral. Elle s’était transformée en un symbole de malice, un mal qui apporterait la calamité au monde. Même les huit Grands Apôtres, qui avaient vu le Seigneur transformé et grotesque, retinrent leur souffle devant ce monstre qui dépassait toute raison humaine. Ils fixèrent la sorcière, qui avait obtenu pour elle-même le pouvoir le plus vil de la planète.

« Quelle forme repoussante… ! »

« Hahaha ! »

La sorcière écarta les bras. Elletear, qui avait complètement abandonné son humanité, semblait étrangement enjouée tandis qu’elle parlait d’un ton envoûtant.

« Charmant. Qu’il est merveilleux de voir les huit Grands Apôtres si troublés alors qu’ils ne se soucient pas de la peur, du trouble, du remords, de l’agonie ou d’autres douleurs causées en marchant sur les autres. En fait, j’aimerais diffuser cela au monde entier… Oh là là, mais si je faisais cela, je serais également exposée au monde entier. Pensez-vous que je ferais pleurer les enfants ? »

Fwoosh !

Sans crier gare, les écrans abritant les Huit Grands Apôtres s’ouvrirent.

***

Partie 2

Les câbles d’alimentation reliés à chacun des moniteurs — à l’exception du huitième qui était celui de Luclezeus — se détachèrent, et même les vis qui maintenaient l’électronique en place s’envolèrent et tombèrent au sol. Les lettres V, E, A, P, N, O et W… Vittgenshla, Etienne, Alleten, Promestius, Novalashlan, Ovan et Wizeman — les dirigeants de l’Empire — disparurent des écrans.

« Oh ? Oh là là, ha-ha. » La voix de la vraie sorcière s’éleva, emplie de jubilation.

Le mur de la salle de réunion se fendit en deux et de la vapeur commença à s’échapper de la fissure. Au-delà des vapeurs, qui étaient remplies de l’éclat divin de la puissance astrale, un objet d’argent s’éleva, déchirant le mur.

« Un soldat astralnomique. N’est-ce pas l’une des expériences ratées de Kelvina ? Un réceptacle des plus hideux pour y placer vos cybercerveaux. »

Le géant était composé à moitié de puissance astrale, et à moitié machine. C’était un robot pseudovivant qui marchait sur deux jambes. Sa forme entière se soulevait et s’abaissait lorsqu’il respirait, comme un véritable animal, et la façon dont il crachait de la vapeur d’énergie astrale était exactement la même que celle d’un être vivant.

Il fonctionnait à l’énergie astrale.

« Nous en sommes bien conscients, Elletear. »

« La calamité en vous ressemble à la puissance astrale, mais elles sont en fait opposées, comme le feu et l’eau. En d’autres termes, l’énergie astrale est comme un poison pour vous en ce moment. »

En effet.

En fait, Kelvina, qui était devenue un « ange malveillant » grâce au pouvoir de la calamité, avait été éliminée exactement de cette façon. Iska et Rin l’avaient jetée dans une fournaise de puissance astrale.

« Cet élément présent dans un ange malveillant et une sorcière ne peut coexister avec le pouvoir astral de cette planète.

« Lorsqu’il est exposé à une grande quantité d’énergie astrale… voilà le résultat. L’énergie astrale n’a pas d’effets néfastes sur les humains, mais elle est comme un poison pour moi. »

Elletear était la dernière forme d’une vraie sorcière. Elle s’était transformée en un être qui détestait l’énergie astrale plus que tout au monde.

« Vous, la princesse officielle des mages astraux, serez purifiée par l’énergie astrale et disparaîtrez. Quelle belle fin ! »

« Vous pouvez retourner dans la planète d’où vous venez. »

Le géant tendit la main. D’une fissure en forme de croix sur sa paume jaillit un geyser de vapeur, ainsi que ce qui semblait être une lumière astrale débordante. La lumière se condensa et, en un rien de temps, une lumière aveuglante avait jailli à une vitesse à laquelle il était impossible de réagir.

« Éclat de la Nuit. »

La bande de lumière clignota, accompagnée d’un son aigu. Le gigantesque jet de lumière n’était pas tant un faisceau qu’un pilier d’énergie astrale pure qui brûlait la sorcière de l’ombre et l’air lui-même.

Il ne resta plus aucune trace d’elle.

L’Éclat de la Nuit, une forme extrêmement pure d’énergie astrale, était presque à l’échelle d’un vortex de taille moyenne. La lumière avait tout emporté et n’avait laissé qu’un gigantesque trou dans le mur.

La salle de réunion redevint silencieuse.

Le mur s’effondra et les débris tombèrent sur le sol.

« Oh, quel plaisir ! »

Un rire séduisant retentit dans l’espace.

« C’était tellement amusant que j’en avais presque peur. Je méprise vraiment les forts qui tyrannisent les faibles, mais je pense que je pourrais m’habituer à quelque chose d’aussi excitant que cela. »

Les ténèbres s’accumulèrent dans le vide. La sorcière, qui avait été anéantie par le rayon de lumière, convergea dans un tourbillon de brume et reprit une forme humanoïde.

« Argh ! »

« Elle s’est soustraite à la lumière !? »

Il y eut un murmure. Leur agitation était perceptible à travers le gigantesque soldat.

« Soustraite ? Bien sûr, je n’ai rien fait de tel. En fait, c’était très douloureux, bien que je n’aie plus guère de sens de la douleur aujourd’hui. Je suppose que c’était comme être aspergé d’eau bouillante par le haut. »

La sorcière s’entoura de ses bras.

« … Et alors ? Est-ce tout ? » Elle avait l’air indifférente.

Sa déclaration suscita un sentiment que les huit Grands Apôtres n’avaient pas connu depuis un siècle : une peur.

« Ce n’est pas suffisant. C’est loin d’être suffisant. Croyez-vous vraiment qu’une énergie astrale aussi dérisoire puisse me faire quoi que ce soit, compte tenu de ma grande compatibilité avec la calamité de cette planète ? »

« Impossible ! »

« C’était une énergie astrale équivalente à celle d’un vortex… ! »

Si les pouvoirs astraux normaux étaient comme une balle en caoutchouc, l’Éclat de la Nuit était l’équivalent d’un gigantesque missile. Et le fait que le soldat astralnomique bien-aimé des Huit Grands Apôtres n’ait pu la vaincre malgré son armement suprême avait plongé les dirigeants de l’Empire dans le désespoir le plus total.

Cela signifiait que ni l’Empire ni la Souveraineté n’avaient les moyens de vaincre Elletear.

Les balles et l’artillerie ne pouvaient tout simplement pas fonctionner sur elle. Même sa faiblesse singulière — l’énergie astrale — n’avait aucun effet. Elle s’était moquée de l’Éclat de la Nuit pour son inefficacité.

Il en allait de même pour la Souveraineté. Même si tous les mages astraux de la souveraineté de Nebulis déchaînaient leurs pouvoirs sur elle en même temps, Elletear l’emporterait sans problème.

« Il vous faudra plus que cela si vous voulez me faire du mal. »

« Hunh !? »

« Impossible… Vous avez déjà évolué à ce point… »

« Regardez ça, il faut faire comme ça. »

Un éclair noir — c’est tout ce qu’on pouvait dire — avait jailli d’Elletear et une vague de lumière dépassa facilement la luminosité de l’Éclat de la Nuit. Elle frappa le soldat astralnomique avant de le souffler au loin. Transpercé par la vague de lumière, il se brisa en dizaines, puis en centaines de pièces détachées qui s’envolèrent dans les airs.

Puis toutes ces pièces tombèrent comme une pluie.

Ce qui restait du soldat tomba en tas de débris sur le sol de la salle de l’assemblée.

« Oh, quelle façon décevante de terminer les choses ! J’ai entendu dire que son armure était aussi solide que la croûte de la planète. Je me demande si les murs du palais royal sont aussi faibles ? »

Elle croisa les bras.

Le soldat qui l’avait regardée de haut jusqu’alors n’était plus que des débris éparpillés sur le sol. Les huit Grands Apôtres qui se trouvaient à l’intérieur avaient probablement été éradiqués dans le processus.

« Quelle déception ! Chers sages pitoyables, comme j’aimerais vous voir paniquer plus longtemps. »

Elle leur tourna le dos. Le tas de ferraille qui jonchait le sol ne l’intéressait pas. Les dirigeants qui avaient régné en secret sur l’Empire pendant plus d’un siècle avaient connu une fin brutale.

« C’est du moins ce qu’il semblerait. »

Clac…

Quelque chose marcha sur les débris dans la salle de l’assemblée. Elletear se retourna et découvrit un homme debout, tenant une fine épée. Le soldat impérial aux cheveux roux portait un uniforme de combat qui semblait être un croisement entre un manteau et une armure.

« Oh, Joheim. » Le monstre à forme humaine — Elletear — laissa résonner sa voix en s’adressant à lui. Elle semblait heureuse, ravie même. Alors qu’un soldat impérial aurait normalement été un ennemi, lorsqu’elle s’adressait à lui, elle avait l’air d’une jeune fille excitée de voir son bien-aimé.

« Je croyais que vous surveilliez la surface ? Ou bien êtes-vous venu ici parce que vous vous inquiétiez pour moi ? Pensiez-vous que j’allais perdre face aux Huit Grands Apôtres ? »

« En partie. »

« … ? »

« Elletear, je ne connais personne de plus intelligent que vous. Je n’ai pas l’intention de jouer à faire semblant de m’inquiéter pour vous. »

Le soldat roux s’avança vers elle — le Saint Disciple du premier siège, le chevalier « Flash » Joheim. Le chevalier, qui faisait partie des membres clés des forces impériales et qui avait pourtant juré fidélité à Elletear en secret, regardait droit devant lui, fixant les restes du soldat astralnomique.

« Ne sous-estimez pas les Huit Grands Apôtres. »

Des gravats et des pièces de machines étaient empilés devant lui.

Il regarda tout cela de haut.

« Ils ont survécu plus d’un siècle simplement pour détenir le pouvoir sur cette planète. Leur ambition et leur persévérance sont profondes. Ils feraient n’importe quoi pour garantir leur survie. La dignité n’existe pas chez eux. Même si cela signifie… »

Crack.

Il donna un coup de pied dans des gravats devant sa chaussure.

En dessous se trouvaient des fragments des sept moniteurs. Ils brillaient encore faiblement.

« Par exemple, ils peuvent faire semblant d’être morts sous tous ces décombres. »

« — !? »

Les fragments du moniteur clignotèrent précipitamment. Il était clair qu’ils étaient toujours là. Leur déconfiture face aux propos de Joheim s’était manifestée par ce clignotement.

« Regardez. Même lorsqu’ils ont été brisés en morceaux comme ça et qu’ils ne peuvent plus parler ou projeter leurs formes, ils essaient toujours de rôder. Ils ont probablement prévu de se connecter à une autre machine pour se restaurer dès notre départ. »

Les huit Grands Apôtres étaient des cybercerveaux, c’est-à-dire qu’ils n’avaient pas de corps organique.

Même sans soldat astralnomique, s’ils avaient une machine à laquelle se connecter, ils seraient capables de se réanimer.

« Je vous remercie… » Elle soupira à la fois d’admiration et d’exaspération. « Franchement… Jusqu’où vont-ils tomber ? Leurs corps se sont déjà désagrégés, et pourtant ils s’accrochent à ce monde comme à des pensées éphémères. »

Les sept moniteurs clignotaient sans cesse. On aurait dit qu’ils suppliaient Elletear de les laisser tranquilles.

« Je suis une sorcière maléfique. Bien que je ne sois plus attachée à la Souveraineté… il y a quelque chose que je souhaite encore faire en tant que mage astral. Je suis sûre que vous savez de quoi il s’agit, car il y a un siècle, c’est vous qui avez fait couler le sang de tant de mages et leur avez causé tant de soucis », dit la princesse des mages astraux en regardant les huit grands apôtres, les sept moniteurs incandescents et brisés. « Je vais donc vous mettre en pièces en l’honneur de la colère de tous les mages astraux du monde entier. »

« — ! »

« … C’est ce que je voudrais dire, mais il semblerait que ce ne soit pas nécessaire. »

Au lieu de cela, elle se retourna. Elle fit signe à Joheim de la main et tourna le dos aux restes du soldat astralnomique. Le monstre à l’apparence humaine sortit tout simplement de la salle.

Elle laissa derrière elle les sept moniteurs éclatés.

A-t-elle cessé de s’en occuper ? Ont-ils été épargnés ?

Après le départ d’Elletear et de Joheim, le silence régnait dans la salle.

Clack…

Un petit débris tomba du plafond en béton fissuré au-dessus de leur tête.

« Argh ! »

Oui.

Avec l’Éclat de la Nuit que les Huit Grands Apôtres avaient déchargé et l’explosion d’énergie astrale d’Elletear, la salle était à bout de souffle.

Et elle commençait à s’effondrer.

Cela commença par de petits fragments, puis cela prit de l’ampleur jusqu’à ce que les débris deviennent de plus en plus massifs. C’est à ce moment-là qu’ils entendirent la voix de la sorcière, surgie de nulle part.

« Adieu, criminels du passé.

« Le Nombril de la Planète et l’assemblée impériale, le symbole même de l’autorité — vous avez toujours voulu en finir ensemble, n’est-ce pas ? »

Finalement, tout s’était effondré.

Des centaines de kilos, puis plusieurs tonnes de gravats. Le plafond s’écroula et la pluie grise de cailloux écrasa les sept moniteurs brisés, sans laisser de trace.

L’Assemblée impériale et les huit Grands Apôtres disparurent de la planète.

***

Chapitre 2 : La chanson jouée par la sorcière au dernier jour du monde : « Désolée d’être si puissante »

Partie 1

Autrefois, des frères et sœurs portaient le nom de Nebulis.

Les trois s’étaient rendus dans la plus grande nation du monde, l’Empire, pour faire fortune, mais ils avaient été recouverts d’énergie astrale dans le Nombril de la Planète, le site minier le plus profond du monde. Deux d’entre elles étaient devenues des sorcières et le troisième individu, un sorcier.

La jumelle aînée, Eve, fut plus tard connue sous le nom de Fondatrice. La plus jeune, Alicerose, fut connue sous le nom de Nebulis I. Et leur jeune frère, Crossweil, resta dans l’Empire pour servir le Seigneur en tant que Gladiateur de l’Acier Noir.

Et deux d’entre eux s’étaient retrouvés pour la première fois depuis un siècle.

Territoire impérial, septième point de contrôle.

Le poste de contrôle à la frontière du pays était actuellement envahi par de la suie qui emplissait l’air. La rambarde de la clôture avait été pliée comme s’il s’agissait d’un bonbon mou. Des chars impériaux étaient renversés sur le sol et des fusils avaient été abandonnés par les soldats impériaux qui avaient fui.

Une seule sorcière avait provoqué cette destruction.

« Tu veux me parler ? »

Il ne restait plus un seul membre des forces impériales. Dans une étendue de ciel bleu si profonde qu’elle semblait pouvoir l’avaler, flottait une jeune fille bronzée.

« De quoi veux-tu maintenant parler, Crow ? »

La Fondatrice Nebulis.

Tandis que ses cheveux dorés et ternes flottaient au vent, la plus grande et la plus ancienne des sorcières regardait le sol. En bas se tenait son jeune frère, avec lequel elle s’était battue et dont elle s’était séparée.

Crossweil Gate Nebulis.

Le premier maître des épées astrales n’avait qu’une chose à dire :

 

 

« Une réflexion. »

« Une réflexion ? »

« Rien ne se passe comme prévu… Yunmelngen et moi l’avons compris, et de manière très aiguë, depuis un siècle. » Il laissa échapper un soupir. « Je me demande quand j’ai dit cela. Yunmelngen et moi n’avons pas encore changé l’Empire. Mais nous avons fondé l’espoir d’y parvenir. »

« Et ? »

« Il s’est passé beaucoup de choses dans ce pays pendant que tu dormais. Même après avoir brûlé, l’Empire a repris vie. En fait, ils ne se sont pas contentés de le reconstruire, ils ont accéléré ses progrès technologiques. De ton point de vue, la capitale pourrait même ressembler à une ville du futur. »

« Et pourquoi penses-tu qu’ils ont fait cela ? » Les mots de sa sœur étaient comme des épines. « Viens-en au fait, Crow. L’Empire ne s’est développé que parce qu’ils craignent les sorciers, non ? C’est simplement la preuve qu’ils considèrent toujours les sorciers et les sorcières avec hostilité. »

« Tu as raison. Je ne peux pas le nier. »

Il soupira à nouveau. Soudain, il quitta le ciel du regard.

« En fin de compte, c’était un mauvais calcul de ma part et de celle de Yunmelngen. Depuis le jour où la capitale a été réduite en cendres, les impériaux ont détesté les sorciers et les sorcières. Et ils ont commencé à les craindre… C’est pourquoi Yunmelngen et moi sommes restés dans l’Empire et avons attendu. »

Le temps guérirait toutes les blessures. Il guérirait la peur profondément ancrée dans l’Empire contre les mages. Et la puissante haine que la Souveraineté éprouvait à l’égard des forces impériales. Les deux s’estomperont probablement.

Même si cela ne se produisait pas dans une ou deux décennies, ils avaient cru que les choses changeraient peut-être dans cinquante ans, dans soixante-dix ans ou peut-être même dans cent ans.

« Nous avons réalisé plus tard que cela ne se passerait pas comme nous l’avions prévu. »

Il s’était répété, non pas pour le bien de sa sœur, mais pour le sien.

« Les combats entre l’Empire et la Souveraineté se sont intensifiés de jour en jour et ont commencé à donner lieu à des escarmouches dans le monde entier. Au lieu de s’estomper, la rage a été transmise aux générations suivantes. Je n’ai pas pu empêcher cela. »

Leur plus grande erreur d’appréciation avait été l’état de santé du Seigneur Yunmelngen. Après avoir été possédé par la calamité planétaire, comme la Fondatrice, le Seigneur avait immédiatement sombré dans le sommeil après sa succession au trône et ne s’était réveillé que quelques jours par an.

« La seule chose que je pouvais faire était de lui dire quel jour on était quand il se réveillait et ce qui s’était passé dans le monde pendant qu’il dormait. En fin de compte, les Huit Grands Apôtres ont conservé leur pouvoir, et les forces impériales ont continué à s’étendre. »

La même chose s’était produite dans la Souveraineté. Après la mort de la première reine, Alicerose, la lignée de Nebulis s’était divisée en trois familles. Les trois familles royales avaient chacune des terres sous leur supervision et possédaient des corps astraux, et elles accumulaient de la puissance afin de combattre les forces impériales.

« Crow. » La voix de la Fondatrice était dure. « Ce n’est pas une réflexion. C’est une confession. »

« … »

« Je crois que tu m’as déjà dit que tu resterais dans l’Empire, et j’ai répondu : “Es-tu toujours obsédé par ce rêve ?” Il semble qu’il t’ait fallu un siècle entier pour te réveiller. »

Hmph. Le soupir qui sortit de sa bouche se fondit dans le vent déchaîné.

« Crow, toi et Yunmelngen vous êtes trompés dès le départ en voulant changer l’Empire de l’intérieur. »

« Je suppose que c’était le résultat final. »

« Oui, » dit-elle. « Alors, reste en dehors de mon chemin à partir de maintenant. »

L’Empire était immuable. Lord Yunmelngen n’avait pas pu le changer en un siècle. La peur profondément enracinée que l’Empire avait des sorciers et des sorcières n’était pas quelque chose qui pouvait être dissipé si facilement. Tant qu’elle subsisterait, la persécution des mages astraux se poursuivrait.

C’est pourquoi…

« J’anéantirai l’Empire. »

« Ce n’est plus nécessaire. »

Le temps s’était arrêté. Ils avaient tous deux parlé au même moment, et la fille bronzée qui flottait dans le ciel s’était figée, oubliant même de cligner des yeux.

Il n’était pas d’accord avec elle. Les mots qu’il avait prononcés étaient si différents de ce à quoi elle s’attendait que, pendant un instant, son cerveau avait cessé de fonctionner.

« … Quoi ? »

« Je n’ai pas encore terminé, bien au contraire. Ce n’est que le début. »

Crossweil se mit en mouvement. La Fondatrice n’eut besoin que d’un coup d’œil pour voir que l’épée qu’il tenait dans sa main gauche n’était qu’une copie de la véritable épée astrale noire.

« Une réplique ? » demanda-t-elle.

« C’est vrai. J’ai supplié les Astrals de le faire pour moi. Les vraies sont avec Iska, après tout. »

« … »

Iska.

Crossweil ne put s’empêcher de remarquer que ses sourcils s’étaient froncés en entendant le nom du garçon.

« J’ai appris que tu t’étais battue contre mon élève idiot. »

« … Que veux-tu dire ? »

« Tu as été surprise, n’est-ce pas ? »

« À propos de quoi… ? »

« À tes yeux, comment était-il ? »

« Tsk. » La fille qui flottait dans les airs ouvrit grand les yeux. Pendant un moment, elle fixa l’éther comme si elle essayait de se souvenir de quelque chose, puis elle reprit ses esprits et se pinça immédiatement les lèvres.

« Je ne me souviens pas de lui. »

« Tu ne te souviens plus ? Je suis certain qu’il était différent des autres soldats impériaux. Par exemple — ! »

« Rendormez-vous, Nebulis. »

« La prochaine fois que vous vous réveillerez, je parie que le monde sera meilleur. »

« T’a-t-il traitée de sorcière ? »

« – »

« Et pourquoi s’est-il battu ? Il ne t’a pas défié pour se venger comme l’auraient fait les forces impériales ou d’autres membres de l’Empire, n’est-ce pas ? »

« – »

« Je ne crois pas. Et je suis presque sûr que tu as compris pourquoi je lui ai confié les épées astrales. »

Crossweil n’avait pas réussi à changer l’Empire, et c’est parce qu’il ne pouvait pas attirer l’attention sur lui en tant que sorcier doté de pouvoirs astraux.

Il avait compris que le seul à pouvoir changer l’Empire était un impérial. C’est pourquoi il avait besoin d’un successeur.

« Yunmelngen et moi n’avons pas pu le faire, mais lui — ! »

« Croooow ! »

L’air trembla. La jeune fille hurlait aussi fort qu’elle le pouvait, et le son même de sa voix s’était transformé en une gigantesque onde de choc invisible qui repoussait tout loin d’elle.

« … Crow… » Elle serra les dents. « Tu ne peux pas oser me dire la même chose qu’à l’époque… Même après avoir fait tout ce chemin… tu n’oseras pas me dire d’attendre à nouveau. Et tout cela parce que tu as trouvé une mince parcelle d’espoir dans l’Empire, un endroit qui n’a pas changé depuis un siècle. »

« C’est exactement ce que je dis. »

« Croooow ! »

La main droite de la fondatrice Nebulis fendit l’air. C’était du vent astral. La bourrasque emporta les voitures comme des feuilles mortes, puis se transforma en un gigantesque front d’air qui se dirigea droit sur Crossweil.

Il coupa le vent avec sa lame noire.

« – »

Le bras toujours levé en l’air, la Fondatrice s’arrêta comme si elle était figée.

Mais elle n’était pas surprise. Après tout, elle avait déjà vu cela se produire par le passé.

« Ce n’est donc pas uniquement pour l’apparence. »

« Non, on dirait qu’elle a la même puissance, mais qu’elle n’a pas la fonction la plus importante des épées astrales. »

Crossweil était sans expression alors qu’il tenait la poignée noire de l’épée. « Cette épée ne peut pas lutter contre la Calamité Planétaire. Seules les véritables épées astrales peuvent le faire. Je sais que je n’ai pas besoin de te le dire, mais je tiens à ce que ce soit clair », dit-il d’un ton détaché.

Il regarda le ciel, sa sœur, qui continua de flotter dans les airs.

« Selon Yunmelngen, en tant que petit frère, il est de mon devoir d’arrêter la grande sœur la plus féroce du monde. »

Aux confins du territoire impérial, les deux individus qui étaient depuis longtemps frères et sœurs s’affrontèrent.

Cependant, ils n’avaient aucun moyen de savoir qu’à cet instant, les Huit Grands Apôtres, ceux-là mêmes qui tiraient les ficelles de l’Empire et de la Souveraineté, et l’Assemblée impériale elle-même n’existait plus.

Et… ils n’avaient aucun moyen de savoir qu’une véritable sorcière commençait sa croisade pour effacer indistinctement l’existence de l’Empire et de la Souveraineté du monde dans sa quête impitoyable de l’égalité mondiale.

 

***

Partie 2

Empire, huitième point de contrôle (nord-est).

En temps de paix, une file d’une douzaine de véhicules privés aurait pu être aperçue dans la zone d’inspection, mais le poste de contrôle était pratiquement désert.

La grande sorcière Nebulis avait frappé.

La Grande Sorcière s’étant réveillée après un siècle de sommeil et ayant attaqué le septième point de contrôle, tous les civils avaient été évacués de la zone.

« Parfait. Ils ont pris la bonne décision. »

Clac… clac…

En même temps que l’écho ordonné des pas, un homme masqué avait franchi la porte du poste de contrôle.

« Maintenant, si vous voulez savoir ce qu’il y a de plus merveilleux, c’est qu’ils ont eu parfaitement raison de choisir de quitter l’Empire. À partir d’aujourd’hui, le territoire impérial deviendra une mer de flammes. Au lieu de passer par ce point de contrôle pour entrer dans l’Empire, ils ont fui vers les villes neutres. Quelle sage décision ! »

Le son d’une sonnerie — l’alarme d’avertissement — retentit. Dès que l’homme masqué franchit le portail, les capteurs du poste de contrôle se mirent à clignoter en rouge vif.

Il s’agissait d’un capteur d’énergie astrale à grande échelle. L’homme masqué ne montra aucun signe de perturbation par la clameur et continua à marcher.

« Et grâce à cela, nous sommes libres de nos mouvements. Il serait très irritant que des civils fassent du tapage pendant notre escarmouche contre les forces impériales, après tout. »

Une dizaine d’hommes et de femmes le suivirent. Bien qu’ils soient déguisés en civils en costume, les détecteurs d’énergie astrale continuaient à sonner sur leur passage. L’alarme était stridente et frappante par son hurlement.

« Je m’excuse de t’avoir fait attendre, cher oncle. »

Une jeune fille portant un bandeau s’avança gracieusement vers lui. Elle devait avoir treize ou quatorze ans. Ses longs cheveux noirs avaient un beau reflet et sa robe était magnifique et ornée. Bien que ses yeux soient couverts, son nez et sa bouche délicats la rendaient aussi charmante qu’une poupée.

La sonnerie se mit à retentir encore plus fort. L’alarme indiquait clairement que cette fille possédait plus d’énergie astrale que l’homme masqué et ses subordonnés réunis.

« J’ai déjeuné », dit-elle.

« C’était très rapide, Kissing. Tu aurais pu prendre ton temps, tu sais. »

L’oncle.

Le Seigneur Masqué s’était tourné vers la jeune fille aux cheveux noirs, Kissing.

« Nous avons besoin d’une pause. Il faudra du temps à Shanorotte pour nous rejoindre ici, et nous ne pourrons pas envahir la capitale impériale avec autant d’assurance sans ses conseils. »

« La rencontrerons-nous ici ? »

Kissing avait l’air légèrement hésitante, ce qui était très inhabituel pour elle. Elle semblait avoir des réserves sur ce que son oncle — la personne la plus chère au monde pour elle — venait de lui dire.

« – »

« Qu’est-ce que c’est, Kissing ? Si tu as quelque chose à l’esprit, n’hésite pas à le dire. »

« Il y a trop de bruit ici. »

« Ah oui, je suppose que tu as raison. Tu peux désactiver le capteur, ainsi que la porte… Hmm ? C’est étrange. » Le Seigneur Masqué posa une main sur son menton et réfléchit à quelque chose. Kissing le regarda avec curiosité. « Nous avons activé les alarmes, après tout. Je m’attendais à ce que les soldats impériaux se précipitent… Ont-ils vraiment évacué toutes les personnes du poste de contrôle ? »

Les forces impériales n’avaient pas encore montré le bout de leur nez. Vu la clameur de l’alarme, les soldats impériaux de garde auraient dû naturellement accourir, mais pas un seul n’était apparu.

« Notre révérende fondatrice attaque le point de contrôle voisin. Je comprendrais qu’ils envoient des renforts, mais il semble plutôt stupide de laisser cet endroit sans surveillance. »

La Fondatrice était en train d’attaquer le septième point de contrôle. Pour cette raison, la Souveraineté de Nebulis avait envoyé des assassins à un autre endroit afin d’infiltrer l’Empire pendant qu’elle créait une ouverture. C’était un vieux truc que les forces impériales auraient dû pouvoir anticiper.

« Et il s’agit toujours de la frontière, après tout. Il devrait y avoir au moins un ou deux soldats ici pour communiquer avec le reste des forces. Mais à quoi pensent donc les impériaux ? »

Il se dirigea vers la zone d’inspection, suivi de ses subordonnés et de Kissing. L’alarme continuait de retentir, essayant d’avertir les autres d’un nombre sans précédent de membres du corps astral tentant d’envahir les lieux.

Cela dura quelques secondes… puis quelques minutes…

Quel que soit le temps d’attente, aucun soldat ne montra le moindre signe d’assaut.

Pourquoi ?

Puis leur malaise s’amplifia, se transformant en une véritable suspicion.

« S’agit-il de personnes ? »

Au moment où l’un des subordonnés déclara cela, ils remarquèrent un tas de corps éparpillés autour de la zone d’inspection. Plus ils s’approchaient, plus la scène devenait saisissante. Et c’est là que le Seigneur Masqué vit quelque chose de très particulier.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? »

Il s’agissait de soldats impériaux qui s’accrochaient encore à leurs armes. Certains étaient encore assis sur le siège du conducteur de leur véhicule, mais pas un seul ne bougeait ou n’ouvrait les yeux.

Toute la force avait été décimée.

Qu’est-ce que cela peut signifier ?

Que s’est-il passé ?

« Qu’est-ce que c’est… ? » Même Kissing exprima sa confusion.

Ils étaient prêts à combattre les forces impériales dès leur arrivée, mais quelqu’un d’autre les avait précédés et avait anéanti leur ennemi centenaire. Et surtout, ils avaient vaincu les soldats à la frontière.

« Mon oncle, que penses-tu qu’il se soit passé ? »

« Attends ici, Kissing, bien que je doute qu’ils fassent semblant d’être morts. » Le Seigneur Masqué s’avança seul dans la zone.

Il les observa. La chose la plus étrange qu’il remarqua fut que pas un seul soldat ne semblait avoir de blessures externes. Qu’est-ce qui leur avait fait ça ?

« Il ne semble pas que ce soit du gaz toxique. Oh mon Dieu… »

Son sourd

Il donna un coup de pied à la tête d’un soldat. Celui-ci ne réagit pas. Cependant, il remarqua un faible mouvement, presque imperceptible, de la poitrine du soldat qui se soulevait et s’abaissait. Il pouvait aussi à peine entendre le soldat respirer.

« Ils sont donc vivants… Ce qui veut dire qu’ils dorment… ou plutôt qu’ils ont été assommés ? Mais c’est tout de même étrange. D’autant plus que l’alarme fait une telle clameur, et qu’ils ne montrent aucun signe de réveil. »

Quelque chose ne tournait pas rond. En fait, c’était plus que cela : c’était inquiétant.

Il connaissait les pouvoirs astraux capables d’hypnotiser, mais les forces impériales étaient les personnes les plus susceptibles de se consacrer à la recherche de contre-mesures à de telles attaques.

Pourtant, ce sont ces mêmes personnes qui ont été vaincues ?

Et personne n’avait été blessé. Tous dormaient profondément. Cela semblait incroyablement irréaliste. Il n’avait jamais vu une méthode aussi tranquille pour vaincre des soldats.

« C’est vraiment étrange. Quelqu’un a traité avec les forces impériales avant nous ? Mais il semble qu’ils n’aient jamais combattu, ce qui signifie… »

Il ne pouvait imaginer aucun scénario qui aurait pu aboutir à un tel résultat. Même en tant que chef par procuration des Zoa, l’une des familles royales, le Seigneur Masqué ne pouvait imaginer la moindre méthode permettant de neutraliser les forces impériales de cette manière.

Et cela l’irritait.

« Viens, Kissing. Il semblerait que nous puissions nous approcher de cette zone, mais tu dois veiller à ne pas les toucher accidentellement. »

« Oui, mon cher oncle. »

La jeune fille se dirigea gracieusement vers lui, mais elle s’arrêta juste avant d’entrer dans la zone.

« … »

« Qu’est-ce qu’il y a, Kissing ? »

« … Non. »

« Hmm ? »

« Noooon ! Ahhh ! »

Son cri ne pouvait plus former de mots intelligibles. Devant le Seigneur Masqué et ses subordonnés, la jeune fille se mit soudain à avoir des spasmes, à se tenir la tête et à hurler. Le bandeau qu’elle portait s’abaissa pour révéler ses yeux, qui brillaient d’une lueur violette.

Kissing Zoa Nebulis IX était un énorme don.

Sa crête astrale apparut dans ses yeux. Tous les mages astraux avaient un symbole qui apparaissait sur leur corps. Cependant, jamais dans l’histoire personne n’avait eu de crête dans les yeux, à l’exception de Kissing. Elle pouvait voir l’énergie astrale.

Kissing visualisait l’énergie astrale avec une précision des dizaines de milliers — voire des millions — de fois supérieure à celle de n’importe quel capteur impérial de pointe.

Pour cette raison, Kissing était une arme secrète. Elle était l’arme de la famille Zoa pour leur plan de lutte contre les mages astraux.

« Non… ! Ne… ne vous approchez pas de moi ! »

Et maintenant, cette même fille criait.

Elle avait vu quelque chose. À ce moment précis, dans cet espace, elle voyait s’approcher un monstre comme elle n’en avait jamais vu auparavant.

« Kissing ? Calme-toi. Qu’est-ce que tu vois — ? »

« Oh, j’ai cru vous reconnaître. »

Une voix flirteuse résonna autour d’eux.

Juste devant le Seigneur Masqué et les autres, un flux noir commença à se déverser d’une fissure dans la route pavée — un vortex noir.

C’est tout ce que l’on pouvait dire. Le flux noir s’éleva en spirale dans les airs et se condensa en une silhouette humanoïde. Il se transforma en un monstre noir sans yeux ni bouche.

Bong…

C’était comme si leurs cœurs étaient comprimés. Des sueurs froides commencèrent à couler sur le front du Seigneur Masqué.

« Quoi ? »

Immédiatement, il saisit Kissing et la poussa derrière lui. D’un seul coup d’œil, il comprit que les forces impériales avaient été anéanties par ce monstre — et c’est aussi ce que Kissing avait vu.

« – »

Le monstre le regarda fixement, mais se détourna soudainement pour faire face aux soldats tombés au combat.

« Es-tu inquiet à leur sujet, Seigneur Masqué ? Ils ont été si grossiers. Ils m’ont traitée de monstre et ont commencé à m’attaquer. J’ai donc décidé de les punir un peu. »

« Quoi — !? » Il fut tellement surpris que sa voix se brisa. Comment ce monstre connaissait-il son nom ?

« Qu’avons-nous là… ? » Il cacha Kissing, qui continuait à trembler, derrière lui et fit un pas en avant. Il était devant ses subordonnés, après tout. Si lui, leur chef, flanchait, cela affecterait le moral de ses troupes. « Pourquoi un être aussi grotesque connaît-il mon nom ? »

« C’est déplacé », la créature déclara ça avec un ton dramatique la chose en plaçant une main sur sa joue et en feignant d’être blessée. « As-tu oublié qui je suis, Seigneur Masqué ? Mais nous avons eu une expérience si exaltante dans la flèche lunaire. »

« Quoi ? »

« Oh, je plaisante. » La voix du monstre reprit son ton habituel sans perdre une miette. Elle riait comme un diable. « Ma voix résonne tellement sous cette forme qu’il semblerait que les humains aient du mal à m’entendre. Mais quelle déception de voir que même toi ne peux pas me reconnaître. »

Elle passa le bout d’un doigt sur sa grosse poitrine. Si le monstre avait été humain, ses courbes auraient certainement été qualifiées de captivantes. Et sa voix avait pris un ton envoûtant.

« … » Une seule personne lui vint à l’esprit. « Elletear… est-ce vous ? »

« C’est un honneur que tu l’aies réalisé. »

Ses subordonnés commencèrent à murmurer. Bien sûr, ils ne pourraient pas retenir leur choc. La plus grande beauté du palais — non, la plus grande beauté de la Souveraineté — et ce monstre de brume noire n’avaient rien à voir. C’était comme si elle était l’ombre d’elle-même.

« Alors, avez-vous fait cela aux forces impériales ? »

« C’était une entreprise tellement agréable. » Le monstre qui prétendait être Elletear ouvrit grand les bras. « J’ai montré un peu d’amour à ce qui est censé être la plus grande force militaire du monde, et ils se sont effondrés, impuissants. Ils sont vraiment, vraiment adorables. »

« Oh… ? » L’impression du Seigneur Masqué sur la situation changea avec cette réponse. Apprendre comment la première princesse de la famille des Lou avait fini ainsi, quel pouvoir elle avait utilisé sur les forces impériales — c’était des choses à découvrir plus tard. Comprendre ce qui s’était passé prendrait du temps. L’action la plus appropriée maintenant serait de déterminer comment il pourrait l’utiliser, elle et son pouvoir, pour neutraliser les forces impériales. Avec la Fondatrice et Elletear, ils pourraient s’emparer de la capitale impériale en une seule nuit.

***

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