Il ne voulait pas être le Centre de l’Attention – Tome 1

Table des matières

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Prologue 1 : Le Cinquième Oublié

Tout le monde, au moins une fois dans sa vie, a rêvé de devenir un héros et de vaincre le Seigneur des Démons.

Mais, en réalité, c’est aussi difficile que de gagner à la loterie.

Je voulais l’affronter avant tout le monde et revenir sain et sauf. Il se trouvait dans un endroit dangereux, mais même le fait de mourir sur le chemin du retour pourrait faire de moi un héros.

Par exemple, quand un héros revenait après avoir réalisé un exploit similaire, cela va sans dire qu’il avait été plus fort que ce qui avait été vaincu. Par conséquent, il était tout à fait normal que les monstres aient trop peur de l’attaquer.

Mais même le fait d’être reconnu comme quelqu’un de ce calibre était très frustrant en soit.

Malgré toute la gloire et la renommée que cela apportait, vous finissiez par perdre votre liberté.

Dans ce cas, que faire ? Avant la fin de cette aventure, j’étais devenu inquiet à propos de ça.

Je pourrais être un lâche, mais j’avais rejoint la campagne afin d’éliminer le Seigneur des Démons et j’avais décidé de faire un grand retour en grâce.

Mais je n’avais pas besoin de gloire. Je ne me souciais pas d’être le centre de l’attention. Je voulais juste mettre la main sur ce que je voulais.

Je voulais ne pas me faire mal.

C’est la raison pour laquelle j’avais choisi de soutenir depuis l’arrière. Ce que je voulais dire, c’était que j’aurais préféré travailler en tant qu’aide pour les autres, leur tuteur.

Je voulais à tout prix éviter d’être l’un des héros. Les soutenir et les observer de loin était largement suffisant pour moi. J’avais continué à croire en ça que jusqu’à ce que nous ayons réussi notre exploit.

***

Voici le résumé d’une longue histoire. Afin de vaincre le Seigneur des Démons, des aventuriers de Rang-SSS étaient nécessaires.

Dans le monde de Grangalm, où prospère le Royaume d’Albein, la guilde mesurait avec précision la force de ses membres. Force physique, Pouvoir Magique, techniques connues et connexions personnelles. Si la « puissance de l’aventurier » dépassait les 100 000 points, il était considéré comme un aventurier de Rang-SSS.

Depuis la fondation du règne, seuls quelques aventuriers avaient réussi à obtenir ce rang.

Mais notre génération était une exception. Une demande intitulée « S’il vous plaît ! Arrêtez le Seigneur des Démons ! » avait été envoyés aux enfants d’environ dix ans. Ils avaient été appelés les « Enfants du Miracle ».

Dieu leur avait accordé d’énormes capacités. Après les avoir aiguisés, elles apportèrent à ces enfants un score supérieur à 100 000 points.

Un surnom fut attribué pour chacun de ses cinq enfants.

« Cody – L’Épée Sacrée de la Lumière. »

« Mylarka – La Douce Catastrophe. »

« Yuma – Le Requiem sans Voix. »

« Aileen – La Charmante Déesse de la Colère. »

Et finalement, moi... Bien que mon score dépassait également les 100 000 points, j’étais pratiquement invisible, et donc, on me nomma « Guy – L’Oublié. »

Je pensais qu’ils auraient pu chercher un peu plus pour mon premier surnom, puisqu’ils voulurent finalement m’en accorder un autre. Je m’appelle également la Queue d’Argent.

Ils étaient tous des novices avec des scores remarquables, mais leur point faible était évident.

Leur naïveté. Tout le monde comptait trop sur leurs capacités, ils n’avaient donc pas besoin de penser à des stratégies ou même au moindre plan.

Cody était un garçon honnête et incapable de se battre sans se présenter. Les trois autres étaient des filles qui possédaient assez de force pour briser la colonne vertébrale d’un homme normal, mais leurs personnalités vraiment terribles étaient un obstacle dans le groupe.

Pourtant, après m’être joint à eux, j’avais réussi à les unifier.

J’avais parfaitement compris leurs pouvoirs et j’en avais fait bon usage. Je n’étais pas assez capable pour être le combattant à l’avant-garde... il va sans dire. Je n’étais pas bon comme Cody et Aileen en combat rapproché, et il était inutile de me comparer aux assauts magiques d’Yuma et Mylarka. Pour cette raison, ce rôle était parfait pour moi. Mes capacités étaient les plus équilibrées parmi les Enfants du Miracle.

Sous ma direction, nous nous étions facilement rendus jusqu’au repaire du Seigneur des Démons.

Mylarka avait assailli sans relâche le Seigneur des Démons avec sa Magie d’Annihilation. Yuma avait appelé les âmes et les avait envoyées dans les Cieux. Aileen se jeta sur lui telle une lance et satura l’ennemi à l’aide de ses attaques, et Cody donna l’attaque finale avec son épée de lumière.

Je leur avais suggéré cette tactique et j’avais utilisé de temps en temps ma magie défensive, mais à part ça je n’étais qu’un spectateur. Je ne pouvais rien faire afin d’aider ces personnes dans la bataille. Donc je les avais soutenus du mieux que je le pouvais. Yuma, même si elle était une Haute Prêtresse, n’avait jamais appris la magie de guérison ou défensive. Le Seigneur des Démons était si puissant que perdre un membre d’un seul coup ne serait pas étrange. Pour cette raison, peut-être, que grâce à ma magie, quelqu’un avait pu éviter de mourir. Ou plutôt, devrais-je dire que je l’espérais.

J’étais resté tout ce temps un support, essayant de rester inaperçu jusqu’à la fin. J’aurais pu ainsi gagner un peu de mérites même si j’étais le plus inutile du groupe. Mais je ne voulais pas que les personnes sachent que j’avais aidé.

« J’étais juste un soutien, » voilà ce que j’aurai dit, et c’était vrai que cela aurait été le cas. Il n’y aurait pas eu beaucoup de personnes qui penseraient à moi avec une haute opinion.

À la fin, nous avions réussi à vaincre le Seigneur des Démons, une magnifique elfe noire.

« Il semble que j’ai perdu. Humains, je reconnais votre force, » déclara le Seigneur des Démons.

« Vraiment ? Alors si tu promets que tu seras une gentille fille, nous nous arrêterons pour l’instant. Arrête d’intimider les habitants et ne quitte plus jamais tes terres. Sinon, tu ne t’en tireras pas impunément, » déclara Cody.

« Voulez-vous quitter ce territoire en me laissant indemne... ? Comme c’est naïf, humain. Pensez-vous qu’il n’est pas nécessaire de détruire la terre des démons ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Tout le monde a besoin d’un endroit pour vivre. Voilà comment je vois la situation, » déclara Cody.

Après cette bataille, Cody était couvert de sang, mais il avait déclaré cela avec vigueur. Je pensais que quelqu’un devrait faire quelque chose à propos de ses blessures, mais j’étais le seul qui pouvait le faire. J’avais espéré qu’un guérisseur nous rejoigne le long du chemin... mais cela ne s’était pas produit. Alors tout cela était maintenant tombé sur moi. J’avais alors préparé la Lumière de Guérison et l’avais jetée nonchalamment sur lui.

« Umpf... Humains, pour l’instant, j’abandonne, » déclara-t-elle. « Mais rappelez-vous que chaque fois que la lumière brille, les ombres se développent également. Les démons reviendront et plongeront votre monde dans les ténèbres... »

« On s’en fout. Nous devons récupérer une preuve de notre succès, ou nous pouvons dire adieu à notre récompense, » déclara Mylarka.

« Iiihhh ! »

La Douce Catastrophe était un titre approprié pour elle. Mylarka était mignonne même lorsqu’elle intimidait le Seigneur des Démons. Elle avait les cheveux droits et blonds et le regard ferme. Elle avait onze ans, donc deux ans de moins que moi, mais elle ne s’en souciait nullement... elle avait montré de la confiance dans son attitude et dans ses capacités. Notre différence d’âge n’avait donc pas d’importance pour elle.

Elle avait l’air stricte et tout aussi féroce. Elle s’approcha de la magnifique femme à la peau sombre, qui laissa échapper un petit cri quand Mylarka commença à déchirer ses vêtements à la recherche d’une preuve de notre victoire.

« Je me demandais à quoi ressemblait ton âme, mais quand je l’ai vue de l’autre côté... c’était vraiment décevant, » déclara Yuma.

« Hé... Ne sois pas méchante. Une prêtresse ne devrait pas parler comme ça, » dis-je.

« Hein !? Pourquoi !? Je veux consoler chaque âme dans ce monde. Queue, toi aussi..., » déclara Yuma.

Yuma ressemblait à une prêtresse folle et psychopathe, mais elle était juste une fétichiste des âmes. Ce petit prodige n’avait que neuf ans, ce qui faisait d’elle la plus jeune de notre groupe, mais je m’inquiétais toujours de la façon dont son état mental pourrait s’aggraver à l’avenir. « Les prêtres sont comme ça », elle avait toujours dit ça, mais j’en avais dès le départ douté.

« Alors, que devrions-nous faire ? Nous avons besoin de preuves, donc... et le pendentif qu’elle porte autour de son cou devrait être largement suffisant, n’est-ce pas ? » demanda Aileen.

Aileen était un petit maître des arts martiaux aux cheveux roux. Elle était une Demie, née de l’union d’un humain et d’un esprit. En dépit de n’avoir que douze ans, son corps qui avait grandi plus vite que celui d’un humain était bien développé. Sa poitrine, surnommée « Boing Boing », était à peu près aussi grande que celle du Seigneur des Démons. Sa silhouette était exceptionnelle pour quelqu’un de cet âge-là, et je fantasmais souvent sur elle... mais arrêtons de divaguer.

Cody avait regardé le cou de notre ennemi et avait vu le pendentif. Après cela, il rougit et son comportement changea étrangement :

« Queue... peux-tu aller le ramasser ? » demanda-t-il.

« Pourquoi me demandes-tu de le faire... ? Hmm ? » demandai-je.

Les vêtements en loques du Seigneur des Démons dissimulaient très peu la zone proche de son torse. Notre trésor était caché au milieu de sa généreuse poitrine.

Cody ne pouvait pas faire grand-chose face à ça... Eh bien ! Même si c’était normal pour un garçon de treize ans, dans ce cas, cela avait l’air un peu trop exagéré. Et ainsi, possédant des sentiments brûlants dans mon cœur, j’avais pris le pendentif qui se trouvait sur sa poitrine.

« Nh... ! Veux-tu vraiment prendre mon talisman... ? Tu ferais mieux de ne pas le faire, » déclara-t-elle. « Je perdrais ma résistance, ainsi que ma régénération... mais si n’importe quel humain le porte, il serait maudit et son énergie vitale sera drainée... ! »

« Hum... pas mal..., » dis-je.

Après qu’elle eut fini son explication, j’avais commencé à lentement tirer dessus... et la cordelette cassa. Ceci ressemblait à un simple objet magique, mais le pouvoir étonnant qui en émanait ne l’était sûrement pas.

« Regarder le Seigneur des Démons avec ce visage si lubrique est vraiment dégoûtant... pervers. Tu es un pervers, Queue, » déclara Mylarka.

« Hahaha ! Mylarka est tout simplement envieuse ! Ne t’inquiète pas, les tiens grossiront à mesure que tu grandiras ♪, » déclara Aileen.

« Je-je ne pensais pas à ça..., » répondit Mylarka.

Mylarka me regarda un moment avant de détourner les yeux. Même quand elle était silencieuse et mignonne, elle avait une personnalité forte et résolue... mais j’étais déjà habitué.

Le talisman était plus important. La chaleur de cette poitrine si tentante alors que j’avais pris l’objet... Je voulais dire qu’il était encore chaud, mais j’avais ignoré ce détail.

« Ceci va venir avec nous. Même si je le portais, je ne pourrais pas être maudit, » déclarai-je.

« Tch... B-Bien. Si je me comporte bien, allez-vous me le rendre ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Je ne peux pas te le promettre, mais voyons... viens le reprendre dans cinq ans. Si tu fais cela, il sera à nouveau à toi, » déclarai-je.

« ... Je déteste à mort les enfants, mais vous n’avez pas peur. Jeune héros, quel est ton nom ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Tu ne l’as pas entendu avant aujourd’hui ? Je suis Queue. Queue d’Argent. N’hésite pas à l’oublier. Même si j’aimerais que tu t’en souviennes. Sinon, oublie aussi le talisman, » dis-je.

J’avais pris le trésor... même si cela pouvait maudire une personne normale, avec ma véritable puissance, je pouvais la neutraliser. Je me demandais si le fait de le porter m’aurait transformé en Seigneur des Démons, mais ce n’était pas mon but.

... Bon, j’oubliais quelque chose.

« ... Et en tout cas, je ne suis pas un héros. Cody l’est. Moi je n’ai fait que les suivre, » dis-je.

« P-Pourquoi... es-tu si modeste ? C’est évident que sans toi, ils n’auraient jamais pu... » déclara l’Elfe Noire.

Sans la laisser finir sa phrase, j’avais quitté le château. Les démons qui avaient survécu à notre attaque n’avaient pas osé nous attaquer alors qu’ils nous voyaient partir.

***

Prologue 2 : Leurs Récompenses Respectives

Après que nous avions vaincu le Seigneur des Démons et avions pris avec nous le talisman, le Roi nous avait récompensés.

Cody avait demandé le titre de général en chef de l’armée d’Albein.

Mylarka voulait l’un des rares Oiseaux Fantômes vivant dans le monde.

Yuma avait demandé à être à la tête de l’orphelinat qui s’occupait de l’adoption des enfants sans parents.

Aileen, à la place, voulait une boisson alcoolisée extrêmement rare appelée la Divine Liqueur...

Certaines des personnes présentes se demandaient si leurs choix étaient vraiment corrects, mais les héros semblaient satisfaits.

Si un humain portait le talisman du Seigneur des Démons, alors la malédiction se déclencherait et elle lui drainerait la vie. Par conséquent, la nécessité de quelqu’un qui pourrait prendre soin du talisman était apparue...

Je m’étais nonchalamment porté volontaire pour cette tâche.

Dans le cas contraire, ils l’auraient juste jeté dans le trésor royal et j’aurais dû devenir un voleur pour le rendre à sa légitime propriétaire.

S’il avait le pouvoir d’entraver ses ennemis, alors cela pourrait être très utile... mais j’avais décidé de le garder pour moi. Je voulais avoir plus d’un tour dans mon sac. Cela m’avait fait me sentir plus en sécurité, même si je ne savais pas vraiment comment les utiliser.

Il s’agissait de ma récompense en tant que membre de l’expédition.

« Queue d’Argent. Il ne fait aucun doute que vous avez atteint le Seigneur des Démons et avez combattu aux côtés des héros, et cela même si tout le monde reconnaît que vous n’avez pas contribué autant qu’eux. Je ne peux pas vous accorder une grande récompense, mais je vous permets de faire un vœu. »

« Mais... Votre Majesté, je voudrais exprimer mon opinion. Queue était... » Cody m’avait défendu. Il avait les cheveux et les yeux bruns, des traits doux et enfantins et il affichait toujours un sourire lumineux et doux... mais maintenant son visage était rempli de désespoir.

Était-ce parce qu’il voulait prouver ma valeur ?

« Cody, merci pour ta préoccupation. Mais je n’ai pas fait grand-chose, » dis-je.

Je secouai la tête, bien que ce qu’il essayait de dire était admirable. Je ne pouvais pas me permettre de laisser le roi ou ses plus proches collaborateurs reconnaître mes véritables capacités.

« Je comprends, mais... Il est injuste de considérer une telle chose comme la récompense, » déclara Cody.

« Eh bien... je n’ai fait que vous suivre. Et rien de plus, » dis-je. « Même cela prend une certaine capacité... je voulais seulement atteindre de toutes mes forces le repaire du Seigneur des Démons. Et en ce qui concerne le talisman, y a-t-il quelqu’un d’autre qui pourrait le supporter ? »

Je n’étais pas préoccupé par ce discours poli, mais plutôt par mon prochain mouvement.

Le roi était généreux, même si j’avais ruiné mon image par moi-même.

« Pourtant, cela ne change pas que vous ayez pris part à l’expédition. Jeune homme, ne soyez pas modeste, » déclara le Roi.

« Tu es un menteur, Queue, » murmura une Mylarka déçue. Yuma n’avait pas brisé son sourire habituel alors qu’elle restait silencieuse. Aileen regardait autour d’elle nerveusement, probablement impatiente de goûter sa récompense.

Finalement, j’étais jeune tout comme les autres.

À partir de maintenant, chacun d’entre nous commencera à marcher sur la voie que nous aurons personnellement choisie.

J’en étais triste, parce qu’il était temps de se dire au revoir, mais après tout, notre groupe s’était juste rassemblé afin d’arrêter le Seigneur des Démons.

« Même si vous n’avez pas croisé l’épée avec le Seigneur des Démons, au cours du voyage, vous avez aidé vos camarades, » déclara le Roi. « Je vous le demande donc une fois de plus. Qu’est-ce que vous souhaitez ? »

« Je vous remercie pour votre indulgence. Alors..., » dis-je.

J’y avais déjà réfléchi.

Je devais encore décider quoi faire.

La meilleure façon d’éviter d’être le centre de l’attention et d’avoir un mode de vie dépourvu d’obstacles économiques était...

« Votre Majesté, je souhaite créer une nouvelle guilde dans la capitale royale, » dis-je.

Si j’étais un Maître de Guilde, je n’aurais pas à travailler et je pourrais laisser tout le crédit aux aventuriers.

Afin d’échapper à l’attention du public, je devrais recruter et former des membres de la guilde, des aventuriers, et rien de plus.

Il était courant qu’un aventurier de Rang-SSS retraité devienne maître de guilde... bien sûr, j’aurais besoin d’argent et de relations, mais je pourrais en parler avec le Roi.

L’important étaient de ne pas rejoindre les guildes les plus fortes, car cela aurait l’effet inverse.

La perspective vis-à-vis des requêtes et de la gestion des aventuriers était passionnante.

Afin de réaliser quelque chose comme ça, je devais garder un profil bas et ne jamais viser trop haut...

Je devrais m’assurer d’être connu du reste du monde à cause de requêtes bizarres.

Ça prendrait du temps, mais c’était certainement possible.

« Maître de Guilde ? Queue, penses-tu à une telle chose ? » demanda Mylarka.

« Une guilde est là où les âmes des aventuriers sont rassemblées... non, je dois me calmer ! » dis-je.

« Ho ! C’est une bonne idée. Pourrions-nous laisser faire ça ? » demanda Aileen.

Les filles avaient l’air ravies, mais je les laissais faire. Tant qu’ils venaient de temps en temps, mon image de Maître de Guilde fantôme resterait indemne. Mais vu leur renommée, il vaudrait mieux qu’ils se déguisent...

« Créer une nouvelle guilde ? Dans cette nation, il y a déjà douze guildes d’aventuriers, mais la douzième n’est plus vraiment dans de bonnes conditions après que le vieux maître de guilde ait pris sa retraite le mois dernier, » déclara le Roi. « Queue d’Argent, vous pourriez prendre sa place et commencer votre activité dès maintenant ? Ou peut-être préfériez-vous commencer à partir de zéro ? »

« Est-il situé dans un endroit connu ? » demandai-je.

« Non. Le fait que ce soit sur la douzième rue impériale, une zone remplie de crimes, n’a pas vraiment aidé à sa croissance, » déclara le Roi. « C’est l’un des principaux problèmes... Et donc, voulez-vous en commencer une nouvelle ? »

Il voulait être sûr.

Même si je n’avais participé qu’à l’expédition, le fait de penser que je pourrais accepter en tant que récompense une si terrible guilde de seconde main, en plus du fait qu’elle était située dans un endroit aussi horrible, était vraiment allée trop loin.

Mais aussi horrible que c’était, j’avais eu un score de 100 035.

Et donc, la criminalité ne me dérangeait pas personnellement.

Les visites occasionnelles de certaines personnes devaient rester secrètes... Pourtant, accepter dans les coulisses des demandes absurdes permettrait de réaliser ma guilde idéale.

Mais même si la guilde était terrible, ça devrait aller. En fin de compte, personne ne pouvait s’attendre à ce que le prochain Maître de Guilde soit une personne digne de son titre.

« Ce serait un honneur d’être mis à la tête d’une telle guilde. S’il vous plaît, laissez-moi essayer, » dis-je.

« Euh... je suis un peu perplexe. Mais si c’est ce que vous voulez, alors qu’il en soit ainsi, » déclara le Roi. « Je crois que votre humilité est exagérée, mais je suppose que les jeunes et les adultes souhaitent des choses différentes. »

Il avait l’air de dire ça sincèrement. Il avait l’air plus détendu après avoir su que personne ne demanderait la main de sa fille. Peut-être était-ce pour cette raison que la princesse avait pris part à la réunion et qu’elle n’avait fait que nous regarder... Cody et moi devrons donc demander pardon pour ce genre de fin.

***

Après la fin de la réunion, un défilé afin de célébrer l’exploit des héros avait été organisé. Mais à part Cody, personne ne voulait y participer.

« Les personnes comme vous sont... non, je le savais depuis le début de notre épopée, » déclara Cody.

Après être sorti du château, il avait décidé de nous suivre jusqu’à ce que le défilé ait commencé. Nous avions donc discuté sur le pont de pierre se trouvant à proximité de la porte. Chacun de nous avait pris une pose différente.

Mylarka croisa les bras et s’appuya contre le parapet, sur lequel était assise Aileen. Yuma s’agenouilla avant de s’asseoir sur ses pieds.

Quant à moi, je m’étais simplement assis sur le sol.

« J’ai participé à ce voyage parce que je voulais l’Oiseau Fantôme. Maintenant qu’il est à moi, je n’ai plus besoin d’épater la galerie, » déclara Mylarka.

« C’est si mignon ♪, » déclara Aileen.

« Oui, mais je vais te pincer les joues si tu dis que tu veux voir son âme, » menaça Yuma.

« Yuma, tu es encore jeune, mais tu es vraiment la fille d’un archevêque, » déclara Mylarka. « Décider de s’occuper d’un orphelinat est vraiment admirable. »

« J’ai vu beaucoup d’enfants affamés au cours de notre voyage, » répondit Yuma. « Je leur ai promis que si nous parvenions à vaincre le Seigneur des Démons, je viendrais à nouveau leur rendre visite. »

Je voulais lui demander si elle avait vraiment neuf ans. Mais comme j’étais aussi assez singulier malgré cinq ans de plus qu’elle, je m’étais arrêté.

« Attends une seconde ! Yuma est-elle vraiment la fille d’un archevêque ? Je ne savais pas ça, » dis-je.

« Parce que personne ne te l’a dit. Tout comme je ne t’ai rien dit de moi et Aileen non plus, » répondit Mylarka.

Notre expédition avait duré trois mois, mais nous ne savions toujours rien l’un de l’autre... Eh bien ! Ne rien savoir sur les autres était vraiment utile.

« Écoute, Queue. Quand tu auras grandi, que dirais-tu de boire ensemble cette Liqueur Divine ? » demanda Aileen. « Au début, ils pensaient que je pouvais boire, mais dès qu’ils ont lu l’âge sur ma carte de guilde, on m’a dit d’attendre d’avoir seize ans... »

« Bien sûr que c’est d’accord... mais je serai franc, quand tu me rendras visite, assure-toi d’avoir l’air méconnaissable, » déclarai-je. « Tu es trop célèbre. »

« J’espérais une telle inquiétude, mais ce n’est pas sympa, » répliqua Aileen. « Je fais ce que je veux. Ne me dis pas quoi faire. »

« D-D’accord..., » répondis-je.

Même Mylarka semblait vouloir me rendre visite, mais elle ne savait pas que c’était écrit sur son visage.

Pendant notre voyage, elle était une fille toujours hostile envers moi et m’avait traité comme pour dire « qu’est-ce que tu veux de moi ? »

« Au moins, ils nous ont sortis par la porte arrière. Tout le monde dans la capitale connaît la Douce Catastrophe, » dis-je.

« Écoute... je t’ai dit d’arrêter de m’appeler comme ça, » répondit Mylarka. « C’est ennuyeux quand des personnes ignorantes qui ne comprennent en rien la beauté de la Magie d’Annihilation me parlent en utilisant ce surnom. »

« Mylarka, veux-tu aller à l’Académie de Magie... ce que je voulais dire, iras-tu étudier avec ton père ? » demanda Yuma.

« O-Oui. J’y ai déjà pensé, » répondit Mylarka.

Mylarka avait compris les origines d’Yuma et elle-même était la fille d’un professeur à l’Académie de Magie.

Les deux parents de Cody étaient des aventuriers et il espérait marcher dans leurs pas.

Mais comme il était un prodige, il les avait déjà surpassés à l’âge de quatre ans. Mais il avait toujours beaucoup de respect pour eux.

« Eh bien ! Cody, laisse-moi te dire ça. Tu es vraiment très fort, mais ne meurs pas “pour ta terre”, » déclarai-je.

« Je ne peux pas être comme toi, mais... tu détesteras entendre ça. Mais je crois que sans tes conseils, je ne serais pas maintenant encore en vie, » répondit Cody.

« E-Eh bien... non, c’est embarrassant. S’il te plaît, ne réponds pas avec autant de sérieux, » dis-je.

« Hahaha, désolé, » répondit Cody. « Je ne mourrai pas pour ma terre, mais je pourrais mourir pour mes idéaux. Je crois que les chevaliers devraient être ainsi. »

Je me demandais si dire de telles choses en cherchant à être pris au sérieux était une capacité requise pour être un héros.

« Il est... l’heure de partir pour moi. Les amis, j’espère vous revoir après ça, » déclara Cody.

« Moi de même. Profite bien pour nous du défilé, » répondis-je.

« Cody, fais de ton mieux, » rajouta Mylarka.

Il était alors retourné au château. Quant à nous, nous étions restés là un peu plus longtemps.

« H-Hé, Queue... où es-tu né ? » demanda Aileen.

« Mon père est un fermier, » répondis-je. « Je ne vais pas te dire où est mon village parce que je veux garder cela secret. »

« Je-je vois... alors, la prochaine fois que tu reviendras là-bas... » dit Aileen.

« Je ne pense pas que je ferai ça, car j’ai beaucoup de frères plus âgés, » répondis-je. « Je me suis enfui de chez moi, alors je resterai dans la capitale. »

Je l’avais interrompu avec douceur, mais un silence embarrassant tomba l’instant d’après. Je n’avais jamais été doué pour lire l’ambiance... même si je devais apprendre à le faire.

« Queue, puis-je aussi passer ? Nous séparer comme ça me ferait me sentir seule, » déclara Yuma.

« Je ne veux pas non plus retourner tout de suite à la maison, j’ai aussi pensé à venir avec toi, » déclara Aileen.

« M-Moi aussi... Après tout, ma maison est proche. Et en plus, tu n’arrêtes pas de regarder Aileen avec des yeux lubriques. Je dois garder un œil sur vous deux, » déclara Mylarka.

« Hahaha ! Les gars sont comme ça. Ils sont particulièrement heureux quand Boing Boing est impliqué, » rajouta Aileen.

Heureux mon cul !, je voulais dire, mais ce développement inattendu m’avait fait me sentir bien mieux.

J’étais désolé pour Cody. Se séparer ainsi serait difficile même pour quelqu’un qui avait passé outre la solitude telle que moi. C’était pourquoi j’étais inquiet jusqu’à maintenant.

« Alors, allons dans mon nouveau refuge. Mais déguisez-vous correctement. Cependant, moi, je n’ai pas besoin de le faire, » déclarai-je.

« Tu es vraiment obsédé par ça. Tu ne m’as pas adoptée, alors ne sois pas ennuyeux avec ça, » déclara Yuma.

« Je suis d’accord avec elle. Mylarka, tu aurais fait ce qu’il dit jusqu’à la fin, n’est-ce pas ? » demanda Aileen.

« Ce n’est pas vrai ! Je suis juste assez généreuse pour écouter les demandes des enfants égoïstes, » répliqua Mylarka.

« Hahaha ! Je suis contente ♪. Nous serons toujours ensemble à partir de maintenant ♪, » déclara Aileen.

La prêtresse silencieuse avait le charme d’une petite sœur.

J’étais en train de me retenir de la mettre sur mon épaule et de continuer à agir de manière cool.

En dépit de ne plus être un groupe, notre relation n’avait pour autant pas pris fin. Et aussi le fait de penser à la chance de leur demander de l’aide de temps en temps m’avait rempli de joie.

Voilà comment j’étais devenu le Maître de Guilde de ce trou à rats se trouvant sur la 12e rue.

J’avais utilisé l’argent que j’avais reçu comme fonds pour la guilde.

Arriverais-je à faire de ce lieu une place pour les aventuriers qui pourront se rassembler ici tout en faisant de mon mieux pour rester inconnu ?

Cinq années s’étaient écoulées depuis le jour où j’avais pris les rênes de ce lieu.

***

Chapitre 1 : La Magnifique Fille et l’Ivrogne

Le Royaume d’Albein était situé dans la partie nord du continent d’Exrea et il possède deux mille ans d’histoire.

Cinquante mille habitants sur dix millions étaient citoyens d’Alvinas, la capitale du Royaume.

Les nobles, qui vivent sous le Roi, comptaient plusieurs centaines d’individus, d’autant plus si l’on comptait également leurs familles.

L’autorité de Cody, qui devint le général de l’armée, valait autant que celle d’un prince.

Le garçon qui était un aventurier avant ça n’avait pas baissé la tête face à la noblesse et dès le départ, cela avait causé des problèmes. Même si cela n’était pas dû à son statut de héros.

Les nobles ne savaient pas qu’un seul aventurier de Rang-SSS pouvait entièrement anéantir une nation... Je pense que Cody se retenait admirablement et sans relâche face à ceux qui le tourmentaient.

Au moment où il avait eu seize ans, l’âge où il pouvait commencer légalement à boire, il avait commencé à me rendre visite. C’était arrivé au point ou il n’était plus nécessaire de poser des questions sur sa commande.

« J’ai des problèmes à négocier avec les nobles, » disait-il fréquemment.

Chaque fois, j’avais toujours répondu que les plus hauts dirigeants devaient supporter ce genre de fardeau.

« Être un Maître de Guilde est un travail fantastique, » disait-il souvent.

« Je passe juste mes journées à boire, » répondis-je.

Mais je pouvais me le permettre parce que j’avais créé un système sans faille.

Il y avait onze autres guildes dans la capitale à part la mienne, la « Verseau d’Argent », mais nous étions affiliés à la septième, la meilleure guilde le « Mouton Blanc ».

Le système d’affiliation était basé sur l’aide mutuelle entre nos membres.

En fait, je n’en faisais pas partie.

Quelqu’un d’autre s’était occupé d’eux, mais j’avais aidé à préserver ce secret.

Je devais m’organiser à l’avance pour pouvoir réaliser ça. Donc, avant tout, je m’étais assuré que certaines guildes quittent la vieille alliance qui les unissait toutes. Cela avait permis à ma guilde de ne pas s’être démarquée comme étant la seule qui soit autosuffisante.

Après avoir accordé plus de secrets à ma guilde, j’avais répandu la rumeur qu’une « guilde sur la 12e rue acceptait des demandes que tout le monde refusait. ».

Bien sûr, ce n’était pas comme si tout le monde s’était précipité après avoir entendu une telle rumeur. En fait, si quelqu’un souhaitait se joindre ou s’il voulait soumettre une demande, il devait connaître le « mot de passe ».

Laissez-moi vous donner un exemple.

***

Cette histoire date de quelques jours après avoir eu dix-huit ans.

Comme toujours, peu après midi, j’étais au comptoir du bar, buvant de l’alcool pour mouiller ma gorge asséchée.

« Maître, et à propos de celui-là ? C’est un vin fruité de première classe produit à Borgognia avec le meilleur cépage blanc de la saison, » déclara l’elfe.

Derrière le comptoir se trouvait une elfe habillée en femme de chambre... Qu’il y ait ou non des clients, elle m’appelait toujours comme ça quand personne ne pouvait l’entendre.

Je lui avais toujours dit d’arrêter ça, mais elle ne m’écoutait jamais et c’était peine perdue de la corriger à chaque fois.

Après qu’elle avait effectué l’ouverture à dix heures du matin, les voisins étaient venus acheter de la nourriture, mais même si nous étions restés ouverts, personne n’était venu à cette heure si matinale. Ainsi, nous étions uniquement tous les deux. Toutefois, une guilde s’attendait toujours à avoir des clients ou de nouveaux membres. Tôt ou tard, quelqu’un devrait venir, alors j’avais passé mon temps à boire jusqu’à ce que cela se produise.

Bien que je devais rester en permanence en alerte vis-à-vis de cette elfe.

« Appelle-moi “monsieur”, et non pas “maître”. Je ne te répondrai pas autrement, » dis-je.

« M-Mais... Dans cas, quand tu seras ivre, puis-je t’appeler l’“homme sublime avec des yeux magnétiques” ? » déclara-t-elle

« Combien de fois dois-tu me féliciter avant de te sentir satisfaite... ? » demandai-je. « Et qu’est-ce qu’il y a avec ces yeux magnétiques ? Eh bien ! La prochaine fois que tu m’appelleras ainsi, tu verras bien. »

« Gh ! O-Oui ! S-S’il te plaît ! Montre-le d’une manière appropriée à cette sale chienne que je suis... ! » déclara-t-elle.

J’avais observé son corps bien développé se courber comme une branche pleine de fruits.

Le port de jupes très courtes était une hérésie dans la capitale, mais elle ne s’habillait ainsi que pour attirer mon attention.

Son corps n’avait nullement changé depuis la dernière fois que je l’avais vue, et cela même après que la couleur de sa peau soit devenue identique à celle d’une elfe normale.

Si une elfe noire devait entrer dans la capitale, le chaos s’étendrait partout. Alors elle avait décidé de respecter mon ordre à sa manière. Avant de me rencontrer à nouveau, elle s’était déjà « transformée » en une elfe commune.

« Je voudrais te rappeler que plus tu poursuis les hommes, plus vite ils courent, » dis-je. « Si tu ne peux pas pousser, alors pourquoi ne pas essayer de tirer, non ? »

« Pouah..., » répondit-elle.

Elle avait l’air découragée. Cracher un « pouah » à son propre maître était assez grossier.

Pourtant, c’était compréhensible.

Elle ressemblait à une femme de ménage, mais elle n’en était pas vraiment une.

Elle prit une profonde inspiration, comme chaque fois qu’elle allait changer de ton.

« Même si tu me dis ça, j’ai attendu cinq ans ! » s’exclama-t-elle. « Tu m’as dit de venir ici pour le talisman ! Et me voici, t’appelant Maître et te respectant, alors de quoi es-tu insatisfait ? »

Son ton était tout sauf celui d’une servante.

Oui, elle était réellement le Seigneur des Démons ayant pris l’apparence d’une femme de chambre.

Elle était venue vivre dans ma guilde le mois dernier. Je me demandais comment elle m’avait trouvé et où elle avait eu cette robe. Mais dans tous les cas, elle avait commencé à travailler au bar. Elle avait rapidement appris comment faire les différents mélanges pour les boissons et comment préparer les collations associées, au point qu’elle était déjà une experte.

Le Seigneur des Démons à la peau sombre et aux cheveux violets, avait maintenant la peau claire et les cheveux argentés comme les graines de lin. Elle les avait modifiés avec de la magie.

« Si tu t’inquiètes pour mes terres, je les ai confiées à mon petit frère, » dit-elle. « C’est un bon garçon et il m’écoute toujours. »

« S’il te plaît. Même s’il était gouverné par un horrible démon, notre royaume est doux comme un agneau..., » dis-je.

« Il y a encore un groupe qui continue d’attaquer les habitants, » dit-elle. « Nous ne pouvons rien faire contre les extrémistes, mais ils ne sont pas aussi agressifs que par le passé... Je veux dire, les installations de chasse, d’agriculture et d’instructions ont été beaucoup améliorées depuis ta visite. Ne devrais-tu pas me féliciter un peu pour ça ? »

« Eh bien non. Qui t’a demandé de faire cela ? Cependant, c’est pas mal, » dis-je.

« Quel genre de réponse est-ce ? » demanda-t-elle. « J’ai eu beaucoup de problèmes pour faire ça ! Un véritable héros ne devrait-il pas me féliciter pour cela ? Tu pourrais au moins apprécier mes efforts ! »

Je n’étais pas cynique. C’était juste que je me sentais terriblement mal à l’aise quand je lui disais quelque chose de gentil. Alors j’essayais honnêtement de ne pas aller dans le sens de, « Wôw ! Comment as-tu pu persuader les démons d’arrêter d’attaquer les humains ? C’est vraiment fantastique ! »

« Je ne suis pas un héros, » répliquai-je. « Je jure que si tu m’appelles encore ici, je demanderai à Aileen de te pourchasser. »

« Pourquoi demanderais-tu ça à cette diablesse !? » demanda-t-elle. « Après cinq ans, tu bois toujours avec tes copains et je la vois toujours faire des vas et viens. Merde ! Profitez de mon Maître ivre pour le faire, c’est... scandaleux. »

« Ça n’a pas vraiment d’importance, n’est-ce pas ? Quoi qu’il en soit, surveille ton langage, un client pourrait venir à tout moment, » dis-je.

Après avoir fait un bruit agacé et s’être éclairci la gorge, elle obéit à mon ordre et retourna en mode femme de ménage.

En parlant d’Aileen, après qu’elle soit restée ici quelques jours après notre voyage, elle était allée à la rencontre de ses parents. Elle avait apporté les nouvelles de notre succès à son père, le chef du village situé sur une zone montagneuse à l’ouest du Royaume d’Albein.

Elle n’avait partagé que la moitié de sa Liqueur Divine avec ses parents et avait gardé le reste pour elle-même.

Dès lors, Aileen avait commencé à travailler. Ainsi, au fil du temps, elle avait pu se permettre d’avoir une maison dans la ville et elle était passée acheter de la nourriture plus ou moins tous les jours. Dans son village, on pouvait légalement boire à l’âge de dix ans, mais pour une raison inconnue, elle avait décidé d’attendre son seizième anniversaire, conformément à la loi de notre royaume.

Maintenant, nous avions tous deux développé une certaine résistance à l’alcool, mais la première fois que nous avions bu ensemble, nous nous étions évidemment saoulés et avions même fini par parler de choses obscènes... eh bien ! Dès lors, rien d’autre ne s’était produit entre nous. Notre relation avait atteint le point où il était difficile de se voir comme un membre du sexe opposé...

Alors que je pensais à cette situation désespérée, un client s’était approché de la porte d’entrée. Le Seigneur des Démons et moi-même avions échangé un regard attentif et nous étions redevenus à notre attitude normale pour ainsi être un client et la barmaid.

*Dling Dlong~*

Après que la sonnette de la porte eut sonné, un humanoïde entra avec un long pardessus gris cendré et une capuche dissimulant son visage.

À en juger par le bruit de ses pas sur le plancher, il s’agissait d’une femme.

Elle s’était alors assise sur un tabouret, à quatre places de moi.

J’avais apporté le verre de vin blanc à mes lèvres et je l’ai apprécié avec délice. C’était tout ce que je devais faire pour l’instant.

J’avais tout de suite su qu’elle n’était pas une habituée.

Mais je devais suivre la procédure, sinon je ne pourrais pas entendre sa demande.

Le client avait commencé à parler à la barmaid alors que j’avais feint l’ignorance.

« ... Puis-je avoir du lait ? Autrement, s’il en a déjà plus, je voudrais ce que je peux boire uniquement ici, » déclara la femme.

« Certainement, » déclara la barmaid. « Le mélange spécial de la maison est-il correct pour vous ? »

« Oui, merci beaucoup. S’il vous plaît, faites le juste pour moi, » répondit la cliente.

Elle avait dit tous les mots-clés. À ce stade, j’avais pu confirmer qu’elle était ici pour une demande.

Elle portait la bonne couleur pour la journée. Maintenant, elle n’avait plus qu’à dire une dernière chose. Quelque chose du genre « J’ai une demande que personne n’accepterait, la feriez-vous ? » ou « Je suis un intermédiaire pour quelqu’un que je connais. »

De cette façon, ses intentions auraient été claires.

Pourtant, même si j’avais compris qu’elle voulait quelque chose, j’étais resté spectateur. J’avais prétendu être un client ordinaire qui avait été témoin de leur conversation.

Après avoir fini mon vin, j’avais continué à regarder le verre vide se trouvant devant moi sans lui faire face. Je faisais ça afin qu’elle ne devienne pas méfiante.

« ... Pouvons-nous parler ? » demanda la cliente.

« Bien sûr. J’ai déjà compris que vous êtes un client important pour nous, » répondit la barmaid.

La fille laissa échapper un soupir.

« Je me demande si vous pouvez répondre à ma demande. J’ai peur que personne d’autre ne puisse la faire, » alors qu’elle disait ça, elle enleva son capuchon, libérant ses cheveux bruns.

Elle était mignonne... non, comparée aux filles de la ville, sa beauté était presque inégalée. Elle devait avoir mon âge, ou peut-être un peu plus jeune.

Elle avait l’air sérieuse et son comportement me rappelait quelqu’un.

J’avais l’impression de l’avoir déjà vue quelque part... Est-ce juste un déjà vu... ?

« Je serai franche, » commença-t-elle. « Je voudrais que vous rompiez les fiançailles entre le Prince de Vinceburg et notre Princesse Manarina. »

« Briser leurs fiançailles... ? Puis-je vous demander quand à la raison ? » demanda la barmaid.

Cette année, la Manarina mentionnée ci-dessus allait avoir seize ans. Selon les lois du Royaume, cela signifiait qu’elle atteindrait l’âge adulte. Et donc. Son père choisirait son mari.

Il s’agissait d’une vieille coutume de la famille royale qui visait à créer des liens avec des aristocrates influents afin d’augmenter leur propre pouvoir politique.

Vinceburg avait eu un sénat formé par les aristocrates qui avaient beaucoup aidé la monarchie.

Être engagé avec la princesse signifiait qu’il devait avoir une haute fonction politique... mais celui qui l’avait eu avait la cinquantaine. C’était un assez grand écart d’âge.

« Je-je suis... euh... L-la dame d’honneur de la princesse. Son Altesse ne veut pas se marier avec lui. Il s’agit d’un choix fait par Sa Majesté, mais si cela se met réellement en place, la Princesse a prévu de s’ôter la vie, » déclara la jeune femme.

« Quoi... ? » s’exclama la barmaid.

Une princesse naissait en étant obligée d’épouser les puissants qui aidaient et soutenait le royaume... mais le Seigneur des Démons ne répondit pas comme tout le monde l’aurait fait.

« Si elle est contre, elle devrait s’opposer de toutes ses forces à la décision du roi. Je crois que l’acceptation de votre demande est la bonne chose à faire, » déclara le Seigneur des Démons.

La fille avait retenu son souffle.

« V-Vraiment !? » s’exclama-t-elle. « Pouvez-vous faire quelque chose pour mon... euh, pour éviter le mariage de Son Altesse avec cet homme dégoûtant !? »

La dame d’honneur autoproclamée s’était rapprochée du Seigneur des Démons.

L’heure des jeux était déjà finie...

Je pouvais dire que le fait de savoir que mon réseau avait déjà atteint la famille royale m’avait laissé totalement abasourdi.

Je voulais rester à distance de la noblesse et de l’aristocratie, mais puisque le fait de connaître les secrets des gens puissants rendait ma vie dans ce royaume plus facile, je continuais toujours à rassembler des informations.

Jean Vinceburg était l’exemple parfait d’un magnifique homme d’âge moyen (50 ans).

Il était marié jusqu’à cette année. Mais couraient après une douzaine d’autres femmes entre les épouses et les filles d’autres aristocrates. Il était en effet un play-boy dégoûtant.

Pourtant, il était charismatique comme tout bon aristocrate et avait montré sa loyauté envers le Roi.

Si on y réfléchissait bien, c’était assez évident de voir pourquoi il avait préféré changer de femme. Épouser la Princesse l’aurait ainsi rendu plus influent.

C’était compréhensible, mais ce n’était clairement pas bien pour elle.

J’avais alors fait ma commande habituelle au Seigneur des Démons et elle m’avait apporté une chope de bière froide.

« ... Quel est son problème ? Nous parlons d’affaires sérieuses et il continue à boire, » déclara la cliente.

« Madame, ne faites pas attention à moi. Je suis juste un ivrogne, » dis-je.

« Boire à cette heure est... méprisable. Si vous ne surveillez pas votre santé, les personnes autour de vous seront inquiètes, » déclara-t-elle.

« Gh...! Qui serait ainsi ? Je n’ai pas de personne comme ça dans ma vie. Être célibataire et boire sont mes seules libertés, » dis-je.

Entendre son doux commentaire m’avait fait cracher ces mots. C’était le genre de gentillesse dont je rêvais... Je pensais qu’elle était vraiment adorable.

D’un autre côté, le Seigneur des Démons n’était pas très sympathique.

« Mmm... bien. C’est ton corps, donc c’est juste à toi de faire ce que tu veux avec ton corps, » déclara le Seigneur des Démons. « Pour en revenir à notre précédente conversation, tu m’aideras, n’est-ce pas ? »

« Oui. Il n’y a aucune chance que nous échouions. Mais comme à chaque fois que nous acceptons une demande, nous devons avoir d’autres clarifications, » dis-je.

« Demande-moi ce que vous voulez ! Tant que cela vous fait l’accepter, je répondrai à toutes vos questions ! » déclara la jeune femme.

Le visage de dame d’honneur autoproclamée s’illumina immédiatement.

Parce qu’elle ne savait pas si sa demande serait acceptée, au début, elle était plutôt nerveuse, mais ce nouveau regard lui convenait bien mieux.

***

Chapitre 2 : Le Lait Froid et le Koumis mélangés avec du Jus de Pêche Millénaire

Je jetai un coup d’œil sur les manches du pardessus de la jeune fille. Il s’agissait d’un vêtement que seule une personne de grande classe pouvait se permettre... Voyant cela, il devint clair vis-à-vis de quel genre de sang coulait dans ses veines..

Elle n’avait probablement jamais porté de vêtements bon marché. Elle devait avoir provoqué toute une agitation juste pour venir ici.

J’avais alors donné au Seigneur des Démons mon bon de commande. Sur celui-ci, j’avais écrit quelques questions pour la soi-disant Dame d’Honneur. Après l’avoir lu sans montrer la moindre émotion, elle m’avait fait une collation et avait commencé à l’interroger.

« D’abord ! Pourquoi la Princesse Manarina veut-elle rompre son engagement ? » demanda la barmaid.

« ... Même si Sa Majesté a décidé de son futur mari, elle ne veut pas l’épouser, et cela malgré le fait qu’il s’agit de son devoir de princesse, » répondit la jeune fille.

« Je la comprends parfaitement... car je suis dans une situation similaire, mais j’essaie de parvenir à une compréhension mutuelle en parlant avec cette personne, » déclara la barmaid.

De quoi parles-tu ? Je voulais crier ça, mais je me mordis la langue et ignorai le clin d’œil en provenance de l’elfe.

« ... Eh bien, peut-être que vous devriez juste lui en parler ? Le Prince de Vinceburg accorde seulement de l’importance à l’apparence physique. Et aussi, il ne se soucie pas de Son Altesse, mais seulement de l’autorité du Roi et c’est dégoûtant qu’il ait même répudié la femme qu’il avait avant ça, car il la considérait comme n’ayant aucune valeur pour lui. Comment quelqu’un peut-il faire confiance à une personne telle que lui ? » déclara la jeune fille.

La Princesse devait probablement ressembler à une égoïste aux yeux de la famille royale et des aristocraties.

Les personnes influentes se concentraient principalement sur le Roi, c’est pourquoi sa fille n’était pas vraiment considérée comme un individu... et comme elle souffrait à cause de cela, maintenant elle essayait de se rebeller contre son père.

Quand j’étais en présence de Sa Majesté, j’avais pu constater sa gentillesse.

Mais même s’il était un homme bien, il aurait dû s’assurer de certaines choses, comme ma loyauté.

Pourtant, le fait de vouloir créer un lien fort avec Vinceburg était tout à fait naturel, car cela renforcerait le Royaume d’Albein.

J’avais l’impression que le chaos se répandrait si nous devions achever la demande de la Princesse, mais étant donné les fantastiques aventures du Prince avec les femmes, j’avais considéré qu’il était correct d’annuler son mariage tout de suite, au lieu de la laisser souffrir pour le restant de sa vie.

En tant que guilde, nous ne pouvions pas nous plaindre face à une telle requête.

« Je comprends parfaitement ce que ressent la Princesse. Maintenant, sans exclure aucune possibilité, y a-t-il un moyen d’annuler ce mariage ? » demanda la barmaid.

« ... Oui, » elle avait répondu en murmurant.

J’avais déjà deviné que ce n’était pas une méthode facile.

« Les nobles peuvent eux aussi refuser toute demande de tierces parties en remportant un duel. Donc, si le Prince de Vinceburg devait perdre face à la Princesse... le mariage serait déclaré nul, » expliqua la jeune fille.

Il s’agissait d’une ancienne coutume du Royaume d’Albein, mais tout le monde avait le droit de refuser une demande de duel.

Le fait de refuser de respecter les enjeux était considéré comme un sacrilège, car c’était comme insulter en personne le Dieu de la Gloire et la Bataille d’Albein. La famille royale ne pourrait en aucun cas laisser un tel affront impuni, puisque cette doctrine était vénérée par la moitié de la population du Royaume.

Même un prince ne pouvait effectuer d’objections face à ce résultat.

Aussi égoïste que soit cette solution, il était possible de contrôler les autorités, il fallait donc la prendre sérieusement en considération.

Pourtant, sur le visage de la demoiselle, il était écrit qu’il ne serait pas facile de remporter en temps normal un tel duel.

« J’ai entendu dire que le Prince de Vinceburg est vraiment fort. Il possède un score de mille deux cents points, avec huit cents points en escrime et quatre cents en magie... mais Son Altesse... » déclara la Dame d’Honneur.

« La Princesse n’a que sept cents points en escrime..., » compléta le Seigneur des Démons.

Il n’y avait pas de nécessité à s’entraîner en étant un noble. Donc c’était juste pour avoir une idée de ses compétences. Ainsi, voici la raison derrière le fait que beaucoup d’entre eux avaient demandé aux guildes de mesurer leur force.

Le Prince avait même répété son test il y a deux semaines, et le résultat fut un score de mille deux cent trente et un points.

Cependant, si vous considériez également son statut de prince, il aurait atteint un total de six mille sept cent soixante-quatre points.

Les scores des nobles étaient généralement plus élevés comparés aux aventuriers normaux, et cela même par rapport à un aventurier de rang A. C’était parce que les aventuriers étaient principalement spécialisés dans le combat, puisque les requêtes étaient généralement effectuées de cette façon.

Mais en prenant en compte son influence politique qui pourrait être utilisée pour achever les requêtes, le score du Prince de Vinceburg aurait sûrement atteint au moins les six mille points. Le fait que son score était plus bas que son score actuel était dû à la haine qu’il avait gagnée à la suite de ses aventures de coucherie avec de nombreuses femmes. Mais comme c’était un sujet douloureux, nous n’allions pas aller dans les détails. Dans tous les cas, j’avais compris que ce n’était pas une demande difficile pour moi.

En revenant sur le sujet des scores, puisqu’une différence de cent points était énorme, il était extrêmement difficile pour le plus faible de sortir victorieux d’un tel duel. Quand la différence était de cinq cents points, une intervention divine était presque obligatoire.

La Princesse Manarina était très friande de l’épée et elle avait clairement montré qu’elle avait du talent. Mais avec seulement sept cents points en escrime, même si elle était meilleure qu’une novice, gagner un duel avec le Prince était presque impossible.

Pour cette raison, elle devrait accepter de l’aide.

J’avais donc tranquillement commencé les préparatifs.

J’avais déjà compris ce que je devais faire afin de résoudre sa situation.

Mais j’avais fait en sorte que la soi-disant dame d’honneur ne remarque rien.

« Barmaid, s’il te plaît, du lait, » demandai-je.

« Compris. S’il te plaît, veux-tu bien patienter un peu ? » répondit la barmaid.

« ... du lait ? Avez-vous réfléchi à ce que je vous ai dit juste avant ? Commencez-vous à vous inquiéter pour votre santé... ? » demanda la jeune fille.

La jeune fille avait l’air surprise. J’avais pris le verre des mains du Seigneur des Démons et je l’avais tenu pendant un petit moment...

Après ça, je l’avais fait glisser sur la table sans en renverser une goutte, et il s’était déplacé jusqu’à ce qu’il atteigne la dame de compagnie.

« Mademoiselle, c’est pour vous. Buvez-le ! C’est moi qui régale, » déclarai-je.

« L-Le Lait est... un mot-clé... Je l’ai commandé seulement pour ça..., » répondit-elle.

« Eh bien ! Vous n’avez pas l’air assez vieille pour être autorisée à boire. Allez, ne soyez pas timide, » dis-je.

« Q-Quoi... !? Comment osez-vous me traiter comme une enfant !? » répondit la jeune fille.

Elle était clairement irritée.

C’était à prévoir, mais j’avais mes raisons et le lait était la meilleure boisson que je puisse lui offrir. Elle devait en prendre au moins une gorgée.

« Mademoiselle, j’ai d’autres questions concernant votre requête. Je m’excuse pour mon impolitesse. Je m’excuse également si l’offre de ce gentil client vous a blessé. Mais, j’ai oublié de vous apporter ce que vous m’aviez demandé... Alors cela m’aiderait vraiment à soulager ma culpabilité si vous l’acceptiez, » déclara le Seigneur des Démons, avec calme. La jeune fille se mit à rougir tout en déplaçant son regard vers ses pieds.

Elle avait alors pris le verre après m’avoir regardé tout en étant embarrassée.

« ... Il fait froid, mais ma gorge est sèche. Désolée, j’ai réagi de manière excessive. Mais revenons à ma requête, » déclara la jeune fille.

Elle s’était replacée sur son tabouret, puis elle avait ensuite amené le verre jusqu’à ses lèvres.

On aurait dit qu’elle avait vraiment soif, mais que peut-être pour être polie, elle n’avait pas pris plus de deux gorgées.

Cependant, cela n’avait pas d’importance.

Tout était à peu près bon... et si ma supposition était correcte et elle était la Princesse Manarina.

« Je vous remercie. Je comprends maintenant l’actuelle situation. La Princesse doit donc défier le Prince de Vinceburg au cours d’un duel avec ses fiançailles en jeu, ai-je raison ? » demanda la barmaid.

« O-Oui... C’est exactement ça, mais... je... la princesse ne pourra jamais..., » répondit la Dame d’Honneur.

« Nous avons déjà tout ce qu’il faut pour la faire gagner. Dites-lui qu’il n’y a rien à craindre à ce propos et qu’elle doit juste suivre notre plan, » déclara la barmaid.

« ... Sérieusement, c’est impossible... Peut-être, voulez-vous empoisonner le Prince ? » demanda la Dame d’Honneur.

« Notre guilde, la Choppe Argent, ne laisse jamais de traces quant à nos succès, » déclara la barmaid. « Nous sommes extrêmement prudents. Nous ne divulguons jamais ce genre d’informations et nous accordons une grande importance à la confidentialité de nos clients. Rien ne fera obstacle aux grands efforts de notre Princesse, alors, s’il vous plaît, rassurez-la. »

Le Seigneur des Démons était mon acolyte depuis environ un mois maintenant, mais son explication reflétait parfaitement les points clés que je lui avais dits à propos de tout ça. Il y avait aussi une autre réceptionniste, mais grâce à ma formation, elle était devenue une grande aventurière, alors elle était partie afin de réaliser des requêtes et faire des emplettes.

« ... D’accord. Je veux vous faire confiance à vous et à votre guilde. Ici..., » déclara la jeune fille.

J’avais déjà averti le Seigneur des Démons que notre client avait du sang royal dans ses veines et que je pensais à annuler son mariage... elle m’avait fait penser au visage fatigué de Cody.

Les nobles avaient abusé de leur autorité puisqu’ils avaient décidé d’utiliser des chevaliers pour chaque tâche... C’était pourquoi Cody ne se débrouillait pas très bien dans cette situation.

Pourquoi avaient-ils dû faire une telle chose ?

Parce que les guildes facturaient de l’argent pour les requêtes.

Les nobles auraient pu s’occuper de leurs territoires par eux-mêmes, mais à la place, ils avaient emprunté gratuitement des chevaliers afin de le faire.

Cody avait également été obligé de chasser ces demi-portions avec son Épée Sacrée. L’absence de requêtes en provenance de la noblesse n’était pas une bonne chose pour les guildes, mais cette situation pourrait être une grande chance de changer les choses.

« Nous voulons demander à Sa Majesté de ne plus exploiter ainsi les chevaliers. Les nobles les utilisent comme s’ils étaient des aventuriers et c’est la raison pour laquelle les vrais aventuriers font face à une forte diminution des requêtes. En outre, les chevaliers sont au bord de l’épuisement, » déclara la barmaid.

« Les chevaliers... ? En effet, les nobles demandent leur aide pour de nombreuses demandes personnelles. Son Altesse l’a également remarqué, alors je vais aussi le signaler en son nom. Je sais que ce n’est pas suffisant, mais je voudrais vous donner ceci comme paiement anticipé. Acceptez-le comme un gage de ma gratitude, » en disant cela, la Princesse Manarina avait placé sur le comptoir un pendentif en or... gravé du Sceau Royal.

Cela ressemblait au véritable objet, mais je ne pouvais pas vraiment le croire.

Cette requête ne m’avait pas seulement donné l’occasion favorable d’étendre mon réseau jusqu’à la famille royale, mais avait même permis de recevoir un objet de niveau trésor national ! Et ce n’était même pas notre récompense !

Dans le Royaume d’Albein, il y avait cinq ruines des temps anciens, et le Sceau Royal était nécessaire pour y entrer.

Chaque chasseur de trésors baverait juste en y pensant, étant donné la rareté d’un tel objet.

Il n’y en avait que trois dans le Royaume et j’avais toujours pensé que si j’avais l’occasion de m’en procurer un, cela aurait été dans un avenir lointain.

Ces ruines étaient hors de portée de tous, et cela même pour les aventuriers les plus talentueux, car elles étaient remplies de monstres vicieux et d’innombrables pièges à tel point que le Royaume avait cessé de les observer.

Même si je décidais de les étudiés avec soins avec ma guilde et que quelqu’un la découvrait entièrement, personne ne voudrait vraiment en savoir plus sur la raison qui avait permis ça.

« Êtes-vous sûr ? Pour nous faire confiance en nous donnant quelque chose comme ça..., » demanda la barmaid.

« Je suis plus que certaine. Je ferai en sorte de changer ma vie grâce à vos paroles. Je dois donc vous donner quelque chose qui a la même valeur. Sinon nous ne serions même pas à égalité, » déclara la jeune fille.

Je voulais le prendre de ses mains... mais...

J’avais attendu.

Je voulais parler un peu plus avec elle avant de le faire.

Cela ne me dérangeait pas si elle allait me voir comme un horrible ivrogne... alors je lui avais offert un verre.

J’avais décidé de commander quelque chose qui conviendrait à une jeune fille.

Pour la bataille qui allait changer sa vie, j’avais décidé d’agir.

« ... Jeune demoiselle, allez-vous vraiment l’accepter ? » demandai-je.

« Oui pourquoi pas. Désolée si j’ai semblé être enfantin en commandant du lait, » déclara la jeune fille.

« N-Ne vous inquiétez pas. Il n’y a rien d’enfantin dans tout cela, » déclarai-je.

La fille avait accepté la boisson que j’avais commandée pour elle comme un signe d’excuse et le Seigneur des Démons était entré dans la cuisine afin de le préparer.

Au moment où elle revint, elle plaça le verre devant la Princesse.

« Qu’est-ce que c’est... ? » demanda-t-elle.

« Il s’agit d’une boisson avec un faible pourcentage d’alcool que même les jeunes peuvent boire. S’il vous plaît, prenez-en une gorgée, » répondis-je.

Un liquide blanc et un liquide rosé se fondaient dans le verre et un pétale rouge flottait sur le dessus, représentant la victoire et la passion.

Une dame d’honneur n’aurait pas compris la signification, mais une princesse aurait certainement compris.

« Il s’agit de la liqueur spéciale qui ne peut être bue qu’ici. Il s’agit d’un Koumis à faible teneur en alcool mélangé avec le jus d’un fruit appelé pêche millénaire, sur lequel flotte un pétale de notre fleur nationale, » déclara la barmaid.

« ... C’est magnifique... est-ce que je peux vraiment boire ça... ? » demanda la jeune fille.

Le Seigneur des Démons hocha la tête et la Princesse Manarina porta le verre à ses lèvres, puis le regarda avec respect.

« Délicieux... Je ne savais pas que l’alcool pouvait avoir un goût si délicat. Je pensais que l’ivrogne n’avait que des goûts terribles, mais cela... » dit la Dame d’Honneur.

Sans répondre, je continuais à boire ma « terrible » bière.

Elle ne savait pas que je l’avais déjà aidée avec sa requête, alors elle ne pouvait pas être reconnaissante.

Mais elle avait été beaucoup plus impressionnée par la boisson que je ne l’avais imaginée.

La fille se leva, s’approcha de moi avec son verre à la main et l’inclina vers moi.

Maintenant, il était impossible de continuer à prétendre que je l’ignorais...

J’avais levé ma chope en souriant, avant de porter un toast.

« Le lait que j’ai bu auparavant était délicieux, mais cette liqueur m’a impressionné au moment où j’ai posé mes yeux dessus, » déclara la jeune fille.

« Nh... je-je suis désolé, Mademoiselle. Je ne faisais pas un mouvement pour vous. Je voulais juste vous offrir quelque chose en tant que buveur passionné..., » dis-je.

« Je sais. Je voulais juste vous dire ce que je pensais... Monsieur l’Ivrogne, » déclara-t-elle.

Je n’avais pas pu voir son visage correctement jusque-là, mais au moment où je la vis de face, j’en fus totalement stupéfait.

Le fait de décrire la splendeur de son magnifique sourire avec seulement des mots était impossible.

***

Chapitre 3 : La Première Princesse et la Douce Catastrophe

J’avais dit au Seigneur des Démons de rendre à la Princesse le Symbole Royal avant qu’elle ne parte, afin que cela devienne notre récompense si notre plan réussissait.

En échange, la princesse avait dû nous payer la somme insignifiante de dix pièces d’or.

Je pourrais payer trois mois de maintenance pour ma guilde avec, mais c’était correct ainsi.

L’argent faisait tourner le monde.

Trois jours s’étaient alors écoulés.

Manarina avait défié le prince de Vinceburg lors d’un duel et j’avais déjà reçu des rapports annonçant sa victoire.

Comment avait-elle gagné ?

Bien sûr, c’était grâce à mon aide, mais ce n’était pas comme si elle ne le savait pas.

Je ne voulais pas révéler mon secret même quand elle reviendrait afin de nous donner la récompense.

La vérité était que j’avais une confiance absolue dans cette méthode, parce que je l’avais utilisé d’innombrables fois avant de vaincre le Seigneur des Démons.

La Magie de Soutien.

Je pouvais infuser de la nourriture avec elle, de sorte que personne ne remarquerait rien, et juste en la mangeant, ses capacités augmenteraient de manière exponentielle.

Le score de la princesse avait augmenté de mille points juste après avoir bu le lait enchanté.

Les koumis avaient été enchantés afin d’améliorer ses capacités physiques et la pêche millénaire lui avait accordé de la résistance magique. L’écart entre son score et celui du Prince de Vinceburg était maintenant inversé et Manarina l’avait facilement vaincu avec une seule attaque.

Je m’étais assuré que certains membres de ma guilde soient témoins du duel. Manarina avait les cheveux bruns attachés et elle portait une armure légère de couleur neige. Elle avait affiché une expression indiquant sa grande résolution.

Alors que le Prince de Vinceburg se vantait devant l’assemblée, elle l’avait désarmé avec une unique attaque. Cette scène avait laissé le roi et les aristocrates éberlués.

Tout avait donc parfaitement fonctionné comme mon plan le prévoyait, mais faire les choses de cette façon était risqué.

Si la Princesse surestimait sa propre puissance, les choses pourraient devenir problématiques.

Mais je devinais qu’elle n’avait que très peu de chance de devoir se battre contre quelqu’un d’autre. Et de toute façon, même si elle devait le faire, elle aurait peut-être gagné à l’aide d’une formation suffisante. Si nous réussissions à gagner sa confiance, elle pourrait revenir ici si elle avait besoin d’aide pour un autre duel.

Disons les choses clairement, c’était juste une amélioration, je ne dopais personne.

Les aventuriers faibles qui cherchent un coup de pouce supplémentaire même quand ils s’entraînaient n’étaient en rien quelque chose de nouveau, et beaucoup d’entre eux étaient déjà venus frapper à ma porte pour avoir cette boisson miraculeuse.

La dame d’honneur autoproclamée ne s’était toujours pas montrée, mais se faufiler hors du château royal sans que personne ne s’en aperçoive ne devrait pas être une tâche aisée.

Peut-être que je pourrais la revoir d’ici à quelques jours.

« Queue, pourquoi ne lui as-tu pas dit que tu avais compris qui elle était ? » déclara Aileen. Elle venait juste de rentrer d’un travail difficile, mais très rentable que nous lui avions confié.

Elle ne voulait pas rejoindre ma guilde. Et elle ne voulait pas être connue comme étant « le maître des arts martiaux qui avait participé à l’expédition contre le Seigneur des Démons ».

Elle voulait être un esprit libre.

Parfois, je lui demandais si elle souhaitait accepter un emploi, puisque le paiement était plutôt correct et que c’était à la guilde de payer les taxes.

Quand elle avait eu dix-sept ans, son surnom est passé de « Boing boing » à « Boom boom », et même si son comportement sans cervelle était toujours le même, découvrir qu’elle pouvait faire ses propres boissons et qu’elle était plutôt douée pour la cuisine était une expérience assez agréable.

C’est pourquoi elle m’avait parfois aidé en cuisine. Mais chaque fois qu’elle sortait de la guilde, c’était toujours par la porte de derrière. Elle n’avait jamais aimé se démarquer, exactement comme une certaine personne.

Bien que j’étais un homme à tout faire, ma cuisine était assez bonne. Ainsi, quand le cuisinier de la guilde n’était pas là, nous étions la nuit les seuls dans la cuisine.

Vous savez, ce n’est pas comme si je buvais toute la journée au cours de l’année.

« Parce que ses efforts pour me le dissimuler auraient été gaspillés, » dis-je.

« Ha ! Je comprends, » répondit-elle. « En tout cas, on dit que le Comte de Vinceburg était tellement choqué qu’il ne s’est pas levé le lendemain. Que va-t-il lui arriver ? »

« Il est prince, et non pas comte, » répondis-je. « Il voulait se marier le plus tôt possible, alors il semblerait que ses maîtresses soient parties loin de lui. Parmi elles se trouvaient d’autres filles d’aristocrates, donc cela a causé quelques problèmes dans les hauts offices. C’est assez dur, mais il le mérite pleinement. »

Le Seigneur des Démons était en pause depuis la fermeture de la guilde, mais elle m’avait aidé de son plein gré. Elle était particulièrement bonne quand il s’agissait de procédé à épluchage des légumes racines.

Aileen l’avait mise au défi de voir qui était la meilleure, alors je m’étais moi-même affecté aux quelques autres tâches qui restaient à faire.

Cody était encore dans une situation difficile, étant donné les relations entre les nobles et les chevaliers, mais Manarina avait parlé à son père, et elle avait réussi à imposer notre condition. Les demandes effectuées par les nobles envers les chevaliers avaient fortement diminué et les guildes commençaient à recevoir plus de requêtes de leur part.

C’était une vraie bénédiction pour moi.

La prochaine fois que Cody viendra boire ici, je voulais entendre ses pensées concernant ça.

Je le ferais boire même après qu’il soit déjà ivre. Car pour une fois, je voulais le voir se sentir bien.

« De toute façon, les rumeurs disent que Manarina est une véritable beauté, » déclara Aileen. « Mais maintenant qu’elle a atteint l’âge adulte, ne recevrait-elle pas plus de propositions de mariage ? »

« Elle ne les accepterait jamais. Elle a été frappée par le charme de mon Maître, » déclara le Seigneur des Démons.

« Qu’est-ce que tu dis... ? J’ai juste continué à boire tout en restant en arrière-plan, » répondis-je. « Elle doit déjà tout avoir oublié de moi. En outre, elle s’est toujours présentée comme une dame d’honneur quand elle était venue ici. »

Alors que je disais ça, le moment où elle avait enlevé sa capuche m’était revenu à l’esprit.

Je n’oublierais jamais son merveilleux visage.

Mais j’avais déjà ressenti quelque chose comme ça il y a cinq ans.

C’était quand j’avais rencontré Mylarka.

Jusqu’à ce qu’elle me dise. « Tu nous accompagnes seulement. Tu n’es rien de spécial. » Mais à cette époque, j’étais intrigué par mes coéquipiers et j’étais vraiment heureux que nous allions avoir une aventure ensemble.

Elle ne s’intéressait qu’à la Magie d’Annihilation et aux mignons petits animaux, et elle n’avait jamais montré ce côté-là aux hommes. Elle était belle, et juste après le début de notre voyage, elle avait reçu d’innombrables demandes de recrutement.

Mais personne ne pourrait briser son armure.

« Vous ne m’intéresseriez même pas dans un million d’années, » elle avait toujours répondu ça, et elle avait rompu les liens tout de suite après.

Elle était probablement encore seule aujourd’hui.

Parfois, Mylarka passait pour se plaindre de quelque chose, mais un an avant le duel de Manarina, elle avait mal compris ma relation avec Aileen et avait cessé ses visites. Si elle m’avait simplement insulté, cela aurait été bien mieux. La mélancolie avait dès lors resserré mon cœur.

« Au fait, la princesse n’a-t-elle pas fréquenté la même école que... ? » demanda Aileen.

« Mon Dieu !? Qu’est-ce que c’était, Aileen ? » demandai-je.

« Hahaha ! Rien rien, c’était rien du tout, » répondit-elle. « Peut-être que je me trompe, mais tu pourrais le savoir bien assez tôt. »

« Qu’est-ce que tu racontes ? » demandai-je. « Allez, je suis curieux. Sinon, je ne pourrais pas me concentrer sur autre chose. »

« Grrr. Je savais que ce démon était doué pour jouer avec le cœur de mon Maître... Je devrais apprendre plus d’elle..., » répliqua le Seigneur des Démons.

Les paroles d’Aileen avaient capté mon intérêt, mais même si je ne cessais de lui demander de quoi il s’agissait, elle ne m’avait jamais donné une réponse appropriée.

Puis, alors que nous étions toujours en train de cuisiner, la sonnette avait retenti.

« Un client ? À cette heure ? » s’exclama le Seigneur des Démons.

« Je ne peux pas y aller. Seigneur des Démons, vas-y, s’il te plaît, » dis-je.

Elle avait commencé à marcher vers l’entrée. Aileen et moi-même avions cessé de faire le moindre mouvement, veillant à ne pas faire de bruit.

Deux filles étaient alors entrées dans la boutique en portant un long manteau. L’une d’elles était la Princesse Manarina, tandis que l’autre était...

« Nous ne sommes pas encore ouverts, mais comment puis-je vous aider ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Je veux parler avec ton maître de guilde... Queue d’Argent, montre-toi ! Rester caché est inutile ! » cria une voix féminine que je connaissais bien.

Après un an, elle était toujours la même.

Elle n’était pas gentille avec moi, mais sa voix résonnait dans mes oreilles comme le doux son des cloches dans la brise d’été.

Elle avait enlevé son capuchon, libérant ses longs cheveux blonds.

Même sans devoir la scruter en détail, en voyant les boucles d’oreilles qui limitaient ses pouvoirs, je savais qui elle était.

Mylarka Iris.

La belle jeune fille qui possédait une forte volonté et qui avait également une incroyable intelligence. Elle était devenue une enseignante à l’académie de magie à l’âge de quatorze ans. Elle était également connue sous l’alias « Douce Catastrophe » en raison de quelques expériences effrayantes concernant la Magie d’Annihilation.

Non, elle ne ressemblait plus à une petite fille... elle était une belle femme.

Selon les rumeurs, tous les garçons de l’école étaient tombés éperdument amoureux d’elle, mais depuis, elle les avait déjà tous impitoyablement rejetés. Même si elle agissait de manière cool avec ses bras croisés et son aura intimidante, le fait d’être ici signifiait qu’elle avait surmonté un certain complexe.

Mais pourquoi venait-elle me voir avec la princesse ?

J’avais essayé de fantasmer sur la réponse, mais le feu qui brûlait dans ses yeux avait l’air plutôt hostile à mon égard.

***

Chapitre 4 : Les Révélations et la Vérité sur la Princesse

« Mylarka, pourquoi es-tu si agitée ? » demanda la Princesse.

La princesse avait affiché une expression perplexe et elle avait enlevé son capuchon.

Face à la question, Mylarka avait profondément soupiré avant de répondre. « J’ai vu ta bataille avec ce prince. Normalement, cela aurait été très dur que tu puisses gagner ce duel... ou plutôt, cela aurait été impossible en raison de l’écart entre vos deux scores. Pourtant, en très peu de temps, ta force a augmenté d’une manière spectaculaire, et tu as facilement réussi à le vaincre. Le seul capable d’augmenter la force de quelqu’un comme ça... c’est Queue ! Alors, montre-toi ! »

Comme prévu d’une ancienne membre de mon groupe.

Elle avait compris la vérité même si nous n’avions laissé aucune trace derrière nous. Je sentais que mon estomac s’était contracté. Mais finalement, j’étais sorti de là ou je me dissimulais. La princesse fut surprise de me voir. Elle avait fait un sourire éclatant en me voyant. Son impression me concernant aurait dû être complètement différente.

Mylarka me lança un regard noir avec ses bras toujours croisés.

Sa généreuse poitrine était comme un aimant pour mes yeux, mais j’avais combattu la tentation et j’avais donc regardé son visage.

Elle était en colère et son regard était effrayant, mais je ne pouvais pas m’enfuir.

« Mylarka, comment connais-tu assez la princesse pour parler ainsi avec elle ? » demandai-je.

« Je suis sa professeure. Elle assiste à l’Académie de Magie et est l’une de mes étudiantes, » répondit Mylarka. « Bien que je doive en ce moment lui apprendre les bases, car elle ne sait pas comment utiliser la magie. »

Le talent était essentiel pour apprendre à utiliser la magie. Quelqu’un pouvait la maîtriser en un an alors que quelqu’un d’autre le maîtriserait en un jour. La Princesse Manarina n’avait presque aucun Pouvoir Magique, c’était pourquoi elle était mieux adaptée à l’escrime.

« Je vous demande pardon de vous avoir menti... Mon vrai nom est Manarina Lia Albein, » déclara la princesse. « En vous regardant comme vous êtes maintenant, j’aurais dû deviner qui vous étiez vraiment, Sire Queue. »

« H-He bien... c’est correct, » dis-je. « Mais peut-être que je ne suis pas votre homme. C’est simplement Mylarka qui croit avec force en ce qu’elle dit en ce moment. »

« Menteur. Tu as toujours été ainsi, et ça m’énerve toujours autant, » répondit Mylarka.

Elle m’avait poignardé avec de dures paroles... si je n’avais pas pris cette remarque comme une sorte de compliments en provenance d’une fille magnifique comme elle, j’aurais probablement commencé à pleurer.

« Je suis vraiment reconnaissante à Mylarka de m’avoir encadrée à l’académie. En fait, c’est moi qui lui ai posé des questions sur cette guilde..., » déclara Manarina.

« Si j’avais su que les choses se seraient déroulées ainsi, je ne t’aurais rien dit. Queue, je pensais que tu avais du bon sens en toi, mais tu es bien pire qu’une bête, » déclara Mylarka.

« U-Une bête... ? Qu’est-ce que j’ai encore fait ? » demandai-je.

Voyant à quel point j’étais choqué, elle m’avait regardé comme si j’étais stupide. Cela m’avait donné envie de me suicider, alors j’espérais qu’elle serait compréhensive et qu’elle m’expliquerait.

« Queue, est-ce que tu réalises que ta méthode était défectueuse ? » demanda Mylarka. « Manarina était devenue bien trop forte vis-à-vis du Prince de Vinceburg. Pourtant, si tu ne l’avais pas aidée, elle ne serait jamais revenue ici, n’est-ce pas ? Tu es un ver malicieux. Attirer mon innocente Manarina dans ton repaire et lui montrer la beauté d’être forte... tu n’es qu’un pervers. Queue, tu n’es qu’un porc. »

Maintenant que mon plan était ouvertement brisé par Mylarka, la princesse devait être au courant de mes intentions.

« Tu as creusé ton trou comme un fourmilion, et tu t’es couché là à attendre ta proie..., » continua-t-elle. « Puis, dès qu’elle sera arrivée jusqu’à toi, tu avais décidé de l’attraper et de la pénétrer de ton aiguillon ! »

« Non, arrête-toi maintenant. C’est des bêtises ce que tu dis. Je lui ai juste offert un verre, et j’étais content qu’elle l’ait aimé ! » dis-je.

« ... et a-t-elle aimé ça ? » demanda Mylarka.

Mylarka ne faisait confiance à aucune de mes paroles. Mais même si cela pouvait être compréhensible, utiliser une expression comme « la pénétrer de son aiguillon » ne pourrait que causer qu’un méchant malentendu.

Pourquoi était-elle si obstinée et hostile envers moi ?

Après y avoir réfléchi un moment, la réponse m’avait traversé l’esprit.

Un an auparavant, alors que je prenais soin d’Aileen qui était en état d’ivresse après que nous ayons bu ensemble pour la première fois, Mylarka avait mal compris la situation et elle avait pensé que nous étions en couple.

Voilà pourquoi elle devait trouver impardonnable que j’essaye également de me rapprocher de la princesse.

Si je lui disais « Occupe-toi de tes affaires... », probablement... non, justement parce que nous étions adultes, rien ne serait résolu.

J’avais seulement vu Mylarka pleurer trois fois.

Quand nous avions vaincu le Seigneur des Démons, quand pour la première fois elle avait quitté ma guilde pour revenir à la maison, et quand cette nuit-là elle nous avait vu Aileen et moi.

Même si elle me regardait fixement, ses yeux étaient déjà larmoyants.

Chaque fois que cela s’était produit, j’avais senti que mes sentiments étaient comme déchirés.

Cela aurait été une semaine fructueuse, donc je ne voulais pas que ça se termine comme ça.

Pendant que je réfléchissais à une façon de résoudre cette situation, Aileen, qui dissimulait habilement sa présence, fit le tour de Mylarka.

Alors que je me demandais ce qu’elle faisait, elle avait commencé à tâtonner la poitrine de son ancienne camarade depuis derrière.

« Waaah! » cria Mylarka.

« Mylarka, ont-ils grandi pour être plus gros que les miens ? » demanda Aileen. « Si tu les laisses ainsi visibles, Queue ne pourra pas penser à autre chose. »

« A-Arrête Aileen ! Ne touche pas ça... » déclara Mylarka.

S’échappant des griffes d’Aileen, elle ajusta ses vêtements et me regarda avec des joues rougies... Comment étais-je supposé réagir ?

Même si elles étaient en effet plus grandes, seule une fille penserait d’une manière si simple vis-à-vis des hommes. Et moi, je ne pensais pas que j’étais quelqu’un comme ça. Le Seigneur des Démons était imperturbable, tandis que la Princesse Manarina était rouge comme une betterave.

« Comme s’il s’intéresserait à moi ! À ce moment-là, vous étiez..., » déclara Mylarka.

Elle avait coupé court quant à sa réflexion.

Alors que je pensais à la façon de clarifier ce malentendu, le temps avait continué à s’écouler...

Tout ce que j’aurais dit aurait ressemblé à une excuse.

D’autre part, Aileen avait ri innocemment.

« Qu’est-ce que tu racontes ? » demanda Aileen. « C’était la première fois que je buvais et j’avais exagéré. Je lui ai juste demandé s’il pouvait me taper dans le dos, et heureusement je me sentais mieux après ça. N’est-ce pas Queue ? »

« T-Tout à fait... J’étais juste inquiet, mais tu m’as pris au dépourvu lorsque tu as commencé à enlever tes vêtements parce que tu ne te sentais pas si bien que ça..., » répondis-je.

« Hahaha. Ai-je vraiment fait quelque chose comme ça ? » demanda Aileen. « J’étais tellement ivre que je ne me souviens pas de grande chose qui s’est déroulée au cours de cette nuit-là. Ça a dû être dur pour toi. »

Cela semblait un peu étrange, mais c’était la vérité.

Eh oui ! J’avoue que voir Aileen pratiquement nue avait été vraiment dur.

Cependant, mieux valait ne pas le mentionner.

Mylarka n’avait même pas essayé de cacher son expression d’agacement.

Peut-être qu’elle pensait que tout cela n’était que des mensonges.

Celle qui avait été témoin de cette scène tout en restant silencieuse jusqu’à maintenant... La princesse Manarina nous avait alors sauvés de cette impasse.

« Je ne pense pas qu’ils mentent. Mylarka, pourquoi n’essayerais-tu pas de les croire ? » demanda Manarina.

« Même... même si c’est vrai, je leur souhaite le bonheur. S’ils étaient dans une telle relation, il n’y aurait rien d’étrange. Ils s’entendent très bien, » déclara Mylarka.

Elle avait toujours agi comme ça. Bien que ses mots aient été tout le temps dur, elle nous voyait comme ses camarades même après la fin de notre périple.

Mais il était nécessaire de lui faire comprendre que c’était un malentendu, sinon la réputation d’Aileen aurait été ternie.

« Aileen a le privilège de pouvoir choisir son partenaire. Pourquoi gaspillait-elle ce choix en jetant son dévolu sur quelqu’un d’aussi insignifiant que moi... ? » dis-je.

Au moment où je déclarai ça, quelque chose avait changé dans l’atmosphère. Le regard de toutes les personnes présentes s’était focalisé sur moi.

« Wôw. Je savais que tu étais comme ça. Mais tu sais, ça ne te ferait pas de mal d’avoir un peu plus confiance en toi, » déclara Aileen.

« Tu es toujours passif dans de telles situations, mais je suis contente que tu ne sois pas devenu un porc à part entière, » déclara Mylarka.

« D-De quoi s’agit-il ? Je pensais que nous avions enfin clarifié les choses..., » déclarai-je.

« Maître, bien sûr que tu les as clarifiées. Regarde, même la princesse Manarina est étonnée, » déclara le Seigneur des Démons.

« N-Noo... C’est que... il était déjà aussi modeste il y a cinq ans..., » bégaya-t-elle en affichant l’expression rougeoyante d’une vierge amoureuse, tout en ayant son visage rouge jusqu’à ses oreilles.

Bien que je m’étais rendu compte qu’il était trop tard, je ne m’attendrais pas à entendre quelque chose comme ça.

« Il y a cinq ans... ? De quoi parlez-vous, Princesse ? » demandai-je.

« V-Vous n’êtes pas obligé d’être si poli avec moi. Veuillez arrêter avec les formalités, Sire Queue, » déclara la Princesse. « Je me souviens encore de “Queue — L’Oublié” lors de la réunion que les héros ont eu il y a cinq ans avec mon père. »

Je me demandais si le roi n’avait pas convoqué sa fille afin de pouvoir lui permettre de nous observer en silence et de nous juger en cas ou Cody ou moi avions demandé d’être le fiancé de la Princesse.

Elle était la première Princesse Manarina, la même fille qui me regardait avec douceur.

Un développement si bien ne pouvait pas être réel.

Cela aurait été comme gagner le gros lot à la loterie.

« N-Non... Je n’ai rien fait de remarquable, et demander à devenir un simple Maître de Guilde est déplorable... n’est-ce pas ? N’avez-vous pas toutes pensé cela ? » demandai-je.

« Eh bien ! C’était modeste, mais vous faisiez quand même partie de l’expédition afin d’aller affronter le Seigneur des Démons, » déclara Manarina.

« Et même si vous n’aviez jamais vraiment contribué comme vous le dites, bien que cette guilde se soit effondrée, le titre de Maître de Guilde ne pouvait être acquis par personne. Je pense que c’est une réalisation remarquable que vous avez faite, » continua-t-elle.

Oui, mais... seulement une demi-année après que je fus devenu maître de guilde, presque tous les aides du roi avaient disparu. J’étais sûr concernant ce fait, car certains de mes membres de guilde me l’avaient signalé.

Pourtant, après tout ce temps, la princesse ne m’avait jamais oublié, même si de mon côté, je l’avais fait. Si l’on se souvenait de « Queue — L’Oublié », alors il deviendrait juste « Queue ».

« Monsieur Queue... indépendamment de votre humilité, vous devriez reconnaître vos mérites, » déclara Manarina. « Pour moi, il a toujours été clair que vous étiez essentiel quant à la mission de vaincre le Seigneur des Démons. »

Le Seigneur des Démons hocha la tête en entendant ces paroles. Je voulais qu’elle arrête, sinon elle aurait été repérée si j’avais fait ça. Je me sentais tellement gêné que si j’avais vu un trou, je me serais jeté dedans avant de m’enterrer vivant dedans.

« Quand je vous ai retrouvé ici... vous avez prétendu être un pitoyable ivrogne, mais vous pensiez vraiment à m’aider, » déclara Manarina. « J’ai perdu mon sang-froid quand vous m’avez offert un verre de lait, parce que j’avais l’impression que vous me regardiez avec dédain, mais... cette boisson était si délicieuse, que je me demandais comment je pourrais vous rembourser... »

Son beau sourire apparut à nouveau dans mon esprit... Il n’était pas destiné à un étranger, mais à la personne qu’elle rêvait de revoir depuis cinq ans.

Le simple fait de penser à ce sujet avait complètement changé le sens de son geste.

La Princesse Manarina tendit la main vers le Symbole Royal qui se cachait dans sa manche et se rapprocha de moi.

Elle l’avait ensuite fait glisser dans mes mains et les avait tenues pour que je l’accepte.

« Ceci est votre récompense, » déclara-t-elle. « Je ne pense pas que ce soit assez pour ce que vous avez fait pour moi, mais... à partir de maintenant, j’aimerais discuter avec vous sur la manière dont je pourrais vous rembourser votre faveur ? »

« ... Si tel est votre volonté, Princesse... non, vous m’avez dit d’abandonner avec les formalités, » dis-je. « Manarina, si c’est ce que vous voulez, alors je vais l’accepter. Et si j’ai besoin de l’aide de la famille royale, je vous contacterai. »

« Je vous remercie. Je ferais n’importe quoi pour vous, Queue..., » déclara-t-elle.

Pour commencer le Seigneur des Démons, et maintenant Manarina... toutes les deux avaient un statut social très élevé, et toutes les deux voulaient me servir bien trop loyalement.

« He Mylarka, es-tu toujours en colère contre Queue ? Finalement, il est toujours ainsi, » déclara Aileen.

« ... Je suis désolée d’avoir tiré des conclusions hâtives, mais il reste toujours un coureur de jupons. Peut-être que de temps en temps, je devrais revenir afin de le surveiller, » déclara Mylarka.

Cela ressemblait comme si Aileen et Mylarka maquillaient la réalité...

Comme d’habitude, après cela, nous avions commencé à boire afin de célébrer nos accomplissements. Et depuis cette nuit, je n’avais pas accepté de réponses négatives, car tout était offert par la maison.

***

Chapitre 5 : Le Héros à l’Épée Sacrée et une Nouvelle Demande

La nuit, le bar du Verseau d’Argent était toujours rempli de monde. Ou plutôt devrais-je le dire différemment ? Comme il n’y avait pas beaucoup de places disponibles, lorsque la capacité était dépassée, nous avions caché le panneau à la porte d’entrée afin que personne ne souhaite y entrer. Une file d’attente devant la porte attirerait bien trop l’attention. Après tout, notre guilde servait de lieu de rassemblement pour les guildes alliées et nous devions nous occuper des demandes.

Nous ne pouvions pas nous permettre de penser au profit lié à la vente de nourriture et de boisson.

Mylarka, la Princesse et Aileen voulaient continuer à se parler même après avoir commencé le quart de nuit, alors je les avais amenées à une table sur le côté puis je m’étais arrangé pour leur fournir l’équivalent d’une salle privée pour elles. Il était impossible de les voir depuis l’extérieur quand le rideau était en place, mais comme elles étaient près du comptoir, j’entendais parfois des fragments de leur conversation.

« Mylarka, comment ça se passe à l’académie ? J’ai entendu dire que tu avais fait un tas d’autre de tes expériences absurdes, » demanda Aileen.

« Je détruis des bâtiments faits de divers matériaux avec de la magie pour voir quelle est la meilleure façon de les briser pendant un siège, mais puisque je suis la seule à pouvoir mettre ces expériences en pratique... Je pensais à rendre ces sorts à la portée de tout le monde, » déclara Mylarka.

« Depuis que le Seigneur des Démons a été vaincu, certains des monstres restants, les “Égarés”, ont commencé à construire des forteresses. Mylarka veut les attaquer quand ils commencent à causer des problèmes aux citoyens..., » déclara la Princesse.

« Les orcs, les ogres et les trolls ont des aptitudes de reproductions vraiment incroyables. Les laisser seuls peut devenir un véritable problème. En fait, nous devrions demander à une guilde de prendre soin d’eux, mais les frais sont trop élevés, » déclara Mylarka.

Le fait d’entendre que Mylarka voulait protéger les habitants et agir comme un héros était réconfortant.

Bien que je n’avais pas besoin d’entendre parler de ses expériences.

« Même si les monstres de mon royaume ne sont plus hostiles, ceux qui sont à l’extérieur finiront par attaquer, Hmm... ? » me murmura le Seigneur des Démons.

Leur conversation se poursuivit de leur côté. « Eh bien ! Au moins maintenant, nous avons beaucoup moins de monstres pour lesquels il faut s’inquiéter. Nous devons juste vaincre ceux qui envahissent des royaumes voisins et traiter correctement les monstres volants, » déclara Mylarka.

« Je vois. En parlant de cela, il est dit qu’un dragon de feu a embrasé la forêt à proximité de la Capitale Impériale. Puisque c’est la saison des amours, il est probablement passé dans cette région afin de rechercher de la nourriture, » déclara Aileen.

J’avais aussi entendu parler de quelques dragons qui avaient attaqué les personnes qui travaillaient dans la forêt. Si quelqu’un m’avait envoyé une demande, j’aurais pris soin d’eux moi-même, mais j’attendais encore.

De plus, il y avait aussi des aventuriers de Rang S dans le Bélier Blanc, donc si quelqu’un envoyait une demande pour s’occuper de ces bêtes, ils auraient probablement pu s’en charger.

« Maître, n’es-tu pas intéressé par le fait de vaincre ce dragon ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Compte tenu des ressources qu’ils laissent tomber... oui, je le suis, » répondis-je. « Mais si je le faisais, j’attirerais trop l’attention. Je dois prendre les mesures appropriées pour ce genre de travail. »

« Je vois... Un dragon de feu pourrait attaquer les habitants, non ? » demanda le Seigneur des Démons.

« Verlaine, voici un autre ordre. Ne paressez pas et ne bavardez pas trop avec ce monsieur. Faites votre travail correctement, d’accord ~ ? » déclarai-je, parlant de moi-même à la troisième personne.

Comme il s’agissait du quart de nuit, l’une de nos serveuses à temps partiel aidait au bar. Elle était une pickpocket des bidonvilles. Voilà pourquoi elle avait été enregistrée en tant que voleur dans notre guilde.

« J’arrive. À plus tard, Monsieur, » déclara Verlaine, jouant le jeu.

« Bien sûr. Tu me trouveras ici en train de boire, » dis-je.

Verlaine Elsain était le vrai nom du Seigneur des Démons. Toutes les personnes la connaissaient toutes comme étant le « Seigneur des Démons », il était donc presque impossible que quelqu’un reconnaisse son véritable nom, mais je n’aimais pas que ce risque puisse exister.

« Elsain » était le nom du Royaume du Seigneur des Démons, et « Verlaine » était le douzième Seigneur des Démons. L’histoire de ce royaume était bien plus ancienne que celle d’Albein, qui comptait cinquante-deux générations. C’était parce que nous devions prendre en compte la durée de vie moyenne entre les races et la fréquence des rébellions. Dans le passé, les guerres pour le trône avaient éclaté dans le Royaume d’Albein, mais maintenant la situation était beaucoup plus calme.

« Écoute, Aileen. Ça fait un certain temps que cette fille elfe a commencé à travailler ici, mais n’a-t-elle pas l’air de quelqu’un que nous connaissons ? » demanda Mylarka.

Je savais qu’elle allait remarquer cela... même si le Seigneur des Démons se déguisait, son visage était le même, et Mylarka était trop forte.

« En ayant parlé avec elle, je peux te dire que Verlaine est une bonne personne. Elle aide quand elle le peut, et c’est elle qui s’occupe tout le temps de ce bar. Même Queue a l’air content de l’avoir avec lui, tu ne le penses pas ? » demanda Aileen.

« ... Mmmh. N’est-elle pas le genre de femme qui le tromperait ? » demanda Mylarka.

« Tu n’as pas à te soucier de ça. Elle fait de son mieux pour être reconnue par lui, » déclara Aileen.

« Être reconnue... ? J-Je suis désolée. Peut-être ressent-elle quelque chose envers Sire Queue ? » déclara la Princesse.

Je me demandais si c’était bien de laisser la Princesse rester ici, mais je devinais qu’elle avait déjà demandé à Mylarka de dire à sa famille qu’elle allait dormir chez elle afin d’étudier.

Après tout, leur séjour ici n’allait pas faire beaucoup de différence, et il n’y aurait pas de problèmes tant qu’elles n’étaient pas découvertes.

« Ah, qui sait. Je pense qu’elle veut juste reprendre ce qu’elle a, » déclara Aileen.

« Je me demande si Queue a remarqué que travailler ici n’est qu’une excuse pour elle... Nous devrions le lui dire quand elle ne sera pas là, » déclara Mylarka.

« Mylarka, chaque métier a ses propres libertés. N’est-ce pas bien ? Pour ma part, cela ne me dérangerait pas de passer plus de temps avec lui, alors, » déclara la Princesse.

« Je le savais... tu ne peux pas le sortir de ta tête, n’est-ce pas ? » déclara Mylarka.

« Je-je suis désolée. Mais je suis vraiment contente qu’il m’ait aidée..., » déclara la Princesse.

Dieu merci, je n’étais pas assis avec elles, sinon je ne serais pas parti de là très facilement.

Dling Dlong~

La cloche de la porte sonna alors que je noyais mes soucis dans l’alcool.

Un type à capuchon, vêtu d’un long pardessus brun foncé, s’était approché du comptoir, se dirigeant droit vers moi.

« Puis-je m’asseoir ici ? » demanda-t-il.

« Bien sûr, le siège n’est pas pris, » répondis-je.

C’était Cody — la Sainte Épée de Lumière.

Je lui avais dit d’éviter d’attirer l’attention quand il venait ici, et je savais qu’il allait bientôt venir ici, mais c’était arrivé plus tôt que prévu.

Il avait alors enlevé son capuchon et m’avait montré son léger sourire habituel.

Il avait l’air mieux que la dernière fois qu’il était venu ici.

« Monsieur, que voudriez-vous commander ? » demanda Verlaine.

« Une bière froide, s’il vous plaît, » déclara Cody.

« D’accord, » répondit-elle.

La bière, par opposition aux boissons mélangées, était servie tout de suite parce qu’il suffisait de les verser dans un verre. De plus, même s’il y avait énormément de bars dans la ville, le mien était le seul à avoir un entrepôt frigorifique où nous gardions des boissons.

Verlaine savait que j’allais demander une nouvelle bière, alors elle en apporta deux.

Après un toast, Cody en avait bu la moitié.

« Mmm... génial. Les bières d’ici ont toujours un goût si incroyable, » déclara Cody.

« Eh bien, nous n’avons pas le même fournisseur que les autres bars. Chaque bière a un goût différent selon sa recette, » déclarai-je.

« Tu es toujours si méticuleux quand il s’agit de ce genre de chose, n’est-ce pas, Queue ? » demanda Cody. « Je pense que ta précision sur le moindre détail serait évidente dans n’importe quel magasin que tu ouvrirais. »

« Je veux juste avoir de bonnes boissons. Plus tu essayes d’attirer les personnes dans un bar, moins il fonctionne comme un véritable bar, » dis-je.

Je n’essayais pas vraiment de cacher notre discussion. Le bar était juste une tentative de dissimuler notre supériorité en tant que guilde... mais bien sûr cela n’était pas quelque chose que je pouvais dire ouvertement.

Cody avait bu le reste de sa bière puis il avait commencé à manger des collations. À en juger par la façon dont il buvait, il ressemblait à un jeune soldat qui buvait avec un ami, bien plus que le général en chef de l’armée.

Je ne pouvais pas nier notre amitié. Et Cody n’avait jamais d’arrières pensés.

Il était vraiment un bon gars, et même s’il avait maintenant beaucoup de responsabilités et de contraintes, il n’avait pas changé à cet égard.

« Écoute... es-tu derrière la bataille faite par la Princesse ? » demanda Cody.

« Mylarka a aussi dit ça, et je pensais que toi aussi tu le remarquerais... Je pense que c’est évident pour quelqu’un qui connaît ma magie, » répondis-je.

« Non, je n’ai ressenti aucune trace de magie, mais voir ce genre d’amélioration magique m’a rendu nostalgique, » dit-il. « C’était juste une supposition de mon côté. »

« Oh, es-tu là pour ça ? Tu es vraiment honnête, » dis-je.

« Hahaha... Je pense que Mylarka va bientôt venir ici, » dit-il. « Il est impossible qu’elle ne vienne pas après avoir été témoin de ce combat. Tu peux vraiment influencer la capitale, bien que seulement quelques-uns se souviennent de “Guy — l’Oublié”. »

Si Cody déclarait une telle chose, alors c’était que mon plan se déroulait parfaitement.

Connaissant la quantité d’informations auxquelles il pouvait accéder, si mon nom n’apparaissait nulle part, c’était que je me cachais bien.

« Mh~ ! Ces collations sont également géniales ! Est-ce des noix frites ? » demanda Cody.

« Ce sont des noix grillées. Elles sont bonnes simplement au naturel, mais quand vous les faites griller, elles ont une saveur encore plus forte, » déclarai-je.

« Ouais... et elles sont addictives..., » déclara Cody.

« Nous sommes le seul bar qui fournit cette collation. Prends-en autant que tu veux, » dis-je.

« Tu es toujours si généreux. Quoi qu’il en soit, ce sentiment... est-ce ma résistance au feu qui augmente ? » demanda-t-il.

« Oui, c’est bien ça. Nous devrions aussi accorder les boissons ainsi. Car je me prépare à combattre un monstre cracheur de feu, » dis-je.

J’avais fourré des noix dans ma bouche, me délectant de leur saveur.

Elles avaient vraiment bon goût. Le casse-croûte parfait pour la bière.

Cody regarda le bol contenant les collations.

Il affichait le genre d’expression qui annonçait le début d’une affaire sérieuse.

Bien sûr, ce moment n’était pas une exception.

« Queue, j’ai une faveur à te demander. Je ne veux pas le faire, mais je ne peux demander à personne d’autre, » déclara Cody.

« J’aimerais refuser, mais... ça dépend de la demande, » répondis-je. « Rien n’est impossible pour ma guilde, mais nous n’acceptons pas toutes les demandes. »

J’avais souhaité que les filles n’écoutent pas, mais comme elles discutaient encore entre elles, elles ne semblaient pas avoir remarqué la présence de Cody.

« De quoi s’agit-il ? Si tu as besoin de chercher un chat, tu peux demander à quelqu’un d’autre, mais je considérerai ta proposition avant de la décliner, » déclarai-je.

« Je pourrais le faire moi-même... même si cela me demandait des jours de recherches inutiles, » dit-il.

Cody avait maintenant un gentil sourire sur son visage. Il ne savait pas jusqu’à quelle profondeur pouvait aller mon réseau d’information, mais j’avais estimé que c’était sans pareil dans la capitale.

Cependant, cela n’était pas nécessairement vrai.

Cody reprit son expression sérieuse et baissa la voix pour que je puisse être le seul à l’entendre.

« Timis, l’une de mes subordonnées et commandantes d’une centaine de soldats, s’est portée volontaire pour vaincre le dragon qui a mis le feu à la forêt à l’est de la capitale, » déclara-t-il.

« Une centaine de soldats, hein ? À combien est son score ? » demandai-je.

« Elle est une aventurière de rang C avec mille huit cent quarante points, » répondit Cody.

Pour diriger un millier de soldats, il fallait avoir au moins un score correspondant à un aventurier de rang B.

Même six aventuriers de rang A pourraient échouer quand il s’agit d’une bataille face à un dragon.

En clair, si Timis allait combattre cette bête, elle serait morte ainsi que son peloton.

« La laisser y aller est une idiotie, » dis-je.

« Sa Majesté lui-même m’a ordonné de le faire, et il m’a lui-même demandé de lui accorder cette chance. Et aussi, elle fait vraiment de son mieux pour obtenir une promotion... Peux-tu l’aider ? » demanda Cody.

« Je ne veux pas vraiment le demander, mais... quelle est sa relation avec le roi ? » demandai-je.

« Elle est la fille de sa concubine. Elle est qualifiée dans les arts martiaux et elle est une grande lanceuse même parmi ses collègues généraux, mais elle est trop désireuse de gravir les échelons, » dit-il.

Un dragon apparaissant si proche était une occasion en or pour elle.

« Sa fille illégitime... ? » dis-je. « Si Manarina n’était pas là, Timis aurait été l’héritière légitime du trône. Je suppose que c’est la raison qui fait qu’elle veut montrer ses compétences en tant que soldat. Je ne pense pas que ce soit faux, mais si tu la laissais mourir à cause de l’ordre de son père, les choses pourraient devenir ennuyeuses. »

« C’est vrai..., » déclara Cody.

Cody avait d’énormes responsabilités sur ses épaules, et son vice-général était complètement dépendant de lui. S’il disparaissait, ses subalternes auraient été mobilisés pour le retrouver... Si le roi découvrait qu’il s’était installé dans la capitale, il aurait deviné facilement la raison derrière cela.

Personne ne pourrait blâmer Cody s’il pensait que Timis était vouée à l’échec.

Ce n’était pas une situation facile, mais il était toujours loyal envers le roi.

Le roi avait même permis aux parents de Cody de se retirer et de vivre loin du danger.

Avec son pouvoir, Cody aurait pu faire prospérer le royaume, mais il avait dit qu’il n’avait pas de telles ambitions. Il n’avait jamais été arrogant. Et la paix du royaume était sans aucun doute là grâce à sa présence en tant que général de l’armée.

« Si je dis au groupe de Timis qu’ils vont trouver la réponse qu’ils cherchent ici, pourrais-tu l’aider à réussir cette mission ? » demanda-t-il.

La demande de la Princesse n’était pas difficile à gérer. Car l’écart entre le score des deux adversaires n’était pas très important, et parce que son opposant était humaine... mais cette fois nous parlions d’un dragon cracheur de feu. Même le plus faible d’entre eux aurait quand même un score minimum de douze mille points. Un chevalier avec un mauvais score tel que Timis aurait pu supporter seulement deux coups.

La première attaque aurait enlevé son armure, la seconde, sa vie.

Et aussi, quand un dragon devait affronter plusieurs ennemis en même temps, il envoyait son souffle de feu pour en neutraliser plusieurs à la fois. Le régiment aurait subi de massives pertes.

Mais... il y avait un truc afin de vaincre un dragon de feu. S’ils l’utilisaient, ils pourraient réussir, indépendamment de l’écart entre leurs capacités.

Ce n’était pas la première fois qu’un dragon attaquait la forêt de Belfon.

Deux ans auparavant, je m’étais moi-même occupé de lui.

Bien sûr, je venais de dire aux membres de ma guilde ce qu’il fallait faire.

La requête de Cody était de conduire une jeune femme-chevalier qui aspirait à tuer un dragon sans aucun sort.

Si vous vous demandiez si c’était possible, laissez-moi vous dire ceci.

Avec des préparations adéquates, rien n’est impossible.

***

Chapitre 6 : La dernière commande et le joyeux anniversaire

« Je peux faire réussir la mission de Timis, alors laisse-moi entrer en contact avec elle. Si tes subordonnés ne veulent pas mourir, dis-leur que la guilde de la 12e Rue leur prêtera son pouvoir. Le reste, cela sera à elle de le faire, » dis-je.

« Je te remercie. N’importe qui aurait refusé ma demande, mais toi..., » déclara Cody.

« Je l’aurais aussi refusée si c’était impossible. Je n’ai pas une guilde uniquement pour accepter des requêtes gênantes, » dis-je.

« Pourtant, je te suis reconnaissant. Le Roi a dit qu’il voulait juste que sa fille obtienne une promotion, mais je ne peux pas lui accorder le souhait de la garder tout le temps en sécurité. Mais, même si je l’avais laissée faire le coup final au dragon, il serait toujours dangereux de l’approcher alors qu’il est en pleine frénésie, » déclara Cody.

C’était une bonne chose que Cody puisse analyser calmement la situation.

Il avait entièrement raison.

Un dragon coincé aurait certainement craché son feu afin de survivre.

« Je vais lui demander une récompense, » déclarai-je.

« Je pense qu’elle pourrait... Non, nous ne pouvons pas le savoir avant de lui demander, » déclara Cody.

« Qu’essayais-tu de dire... ? Peu importe. Cody, laisse-moi me charger de tout ça, » dis-je. « Après notre petite discussion, je m’assurerai qu’elle ne mourra pas, et cela quoiqu’il arrive. »

« ... Merci beaucoup. Même si j’ai essayé de la convaincre qu’il n’est pas nécessaire de s’impliquer dans une mission aussi dangereuse pour obtenir une promotion..., » commença Cody.

« Même si tu n’aimes pas ça, faire la leçon à tes subordonnés est toujours ton travail. Faire en sorte que les soldats te respectent est une autre partie de ton travail, n’est-ce pas ? » demandai-je. « De toute façon, c’est une tâche assez sérieuse pour ce soir. Puisque tu es venu ici, buvons encore un peu plus. »

J’avais mis fin rapidement à notre conversation parce que Mylarka et les deux autres filles sortaient de leur pièce privée. En voyant Cody, elles le saluèrent et se placèrent au comptoir.

Moi, Cody, Aileen, Mylarka et Manarina.

« Hé Cody ! Maintenant, tu as l’air mieux que la dernière fois. N’étais-tu plus inquiet à propos de certaines choses ? » demanda Aileen.

« Non, il est toujours mêlé à des problèmes, mais grâce à Manarina, il a l’air beaucoup plus détendu, » déclara Mylarka.

« La princesse a parlé avec le roi à propos d’une affaire délicate, et elle a fait une suggestion vis-à-vis de la relation entre les nobles et les chevaliers. C’était un geste audacieux, » déclara Cody.

« Ne parlez pas trop de ce genre de choses, sinon Queue deviendra paranoïaque, » déclara Mylarka.

« Paranoïaque ? S’il vous plaît... Mais si c’est possible, j’aimerais que vous évitiez de parler de questions liées à la royauté, » demandai-je.

« Hahaha ! C’est assez nostalgique, n’est-ce pas ? Ça fait longtemps depuis que nous étions tous les cinq ensemble, » déclara Aileen.

Le dernier Enfant du Miracle était Yuma, mais nous pouvions dire qu’elle était la plus occupée de nous tous.

Même si elle n’avait que quatorze ans, elle était la directrice d’un orphelinat, et comme elle étudiait aussi en tant qu’héritière d’un archevêque, elle n’avait presque pas de temps libre.

Mylarka et Aileen lui rendaient parfois visite.

Elles m’avaient dit qu’elle aimerait aussi me voir, mais après avoir entendu ça, j’étais devenu un peu timide.

Le cœur des hommes est complexe.

« Chers clients, il est temps pour la dernière commande. Puis-je vous apporter quelque chose ? » demandai-je.

« Heu... Sire Queue, puis-je vous demander une faveur ? Pourriez-vous me faire une autre de vos “boissons spéciales”... ? » demanda Manarina.

« Bien sûr... Ceci ne me dérange pas. Je reviens dans une minute, » dis-je.

Je m’étais alors faufilé dans la cuisine afin de préparer des boissons pour les autres.

Je voulais voir Mylarka plus détendue, alors j’avais mélangé dans la boisson que j’allai faire pour elle de la primevère du soir avec du jus de papaye royale.

Aileen aimait les liqueurs fortes, alors j’avais dilué de la boisson alcoolisée des nains avec du gel perpétuel cristallisé.

Pour Manarina, j’avais ajouté du sirop à l’un des plus fins et des plus traditionnels alcools d’Albein, un alcool à la cerise et à la crème.

Cody était un amateur de bière, alors j’avais préparé une nouvelle chope de bière pour lui. Eh bien, j’étais aussi dans la bonne humeur pour un peu de bière... mais je ne pouvais pas me saouler avec un seul type d’alcool, alors je devais en boire d’autres.

Verlaine avait apporté aux autres leurs boissons afin de m’aider. Trouver un artisan qui pouvait produire des verres façonnés si différents était difficile... mais je ne pouvais pas présenter une boisson mélangée dans une tasse comme s’il s’agissait de la bière.

Depuis que j’avais commencé à boire, je sentais que chaque boisson devrait avoir sa propre aura.

« ... Queue, où as-tu appris cette recette ? » demanda Mylarka.

« C’est le résultat de nombreuses expériences. J’ai beaucoup de temps libre, tu sais... oh, attends. Mylarka, je veux m’en assurer, mais es-tu assez vieille pour boire ? » demandai-je.

« O-Oui... je suis..., » l’expression de Mylarka tressaillit comme si elle avait remarqué quelque chose. Elle aurait dû avoir maintenant seize ans... et si je m’en souvenais bien, son anniversaire était proche d’aujourd’hui.

« ... Ah ! Mylarka, n’est-ce pas ton anniversaire aujourd’hui ? L’année dernière, tu avais dit que tu ne pouvais toujours pas boire, et que tu devrais attendre une autre année ! » déclara Aileen.

« ... O-Oui. J’ai bien dit ça, » répondit Mylarka.

« Ho, mon Dieu ! Même si c’est une coïncidence. Maintenant, nous pouvons célébrer cela tous ensemble ! Ah... Queue, peut-être savais-tu quelque chose à propos de son anniversaire ? » demanda Cody.

Bien sûr que non. Mais Mylarka m’avait regardé avec un regard surpris.

Alors qu’elle pensait que j’avais mis tout en cela place pour elle, elle avait eu ses impressions me concernant qui étaient montées en flèche.

Dans ce cas, je me demandais si j’allais pouvoir voir son côté tendre.

Cela aurait grandement aidé ma santé mentale, mais à la place, elle...

« ... Hé, Mylarka, que se passe-t-il ? » demandai-je.

« Sniff... R-rien, vraiment rien. J’ai juste quelque chose dans l’œil..., » répondit Mylarka.

Pendant qu’Aileen s’inquiétait, Mylarka prit le mouchoir qu’on lui apporta, mais le flot de larmes ne s’arrêta pas, alors elle baissa la tête.

Tout le monde, sauf Mylarka, m’avait alors regardé.

Cody était faible quand il s’agissait de filles. Quand ce genre de choses se produisait, il s’était toujours contenté de regarder quelqu’un avec un « faire quelque chose d’autre » écrit sur son visage. Aileen avait la même expression.

« ... E-Ehm... Eh bien... Tu sais, si c’est ton anniversaire, nous devrions célébrer, » déclara Cody.

« Wôw, c’était faible. Cela m’a donné envie de me cacher de honte, » déclara Aileen.

« Félicitations, Mylarka. Qu’en est-il du fait de porter un toast avec tout le monde... ? » demandai-je.

Mylarka avait compris qu’elle ne pouvait pas nous cacher ses larmes, alors elle m’avait regardé avec des yeux rouges. Elle avait un « quoi, est-ce un problème ? » qui écrit sur tout son visage, alors je n’avais pas d’autre choix que de lui sourire amèrement.

« ... Chers clients, pourrais-je rejoindre votre toast ? » demanda Verlaine.

« Non, attends, tu ne devrais pas boire au travail, » dis-je.

« En tant que barmaids de ce bar, ne serait-il pas élégant de lui souhaiter mes meilleurs vœux ? » demanda Verlaine.

Comme pour montrer ses privilèges, Verlaine avait versé de l’alcool fort dans un verre.

Il s’agissait d’une boisson mystérieuse fabriquée par les elfes qui brillait magnifiquement comme s’il s’agissait d’une sorte de verre.

Elle aimait les boissons produites avec des ingrédients nutritifs, et la première fois qu’elle était venue ici, elle avait goûté à son favori. C’était un alcool qui avait des propriétés analeptiques.

Chaque fois qu’elle en buvait, elle disait que ça pourrait être une nouvelle entrée pour le menu.

« Je ne sais pas de quoi il s’agit, mais ça va. Hmm... Joyeux anniversaire et félicitations à notre requête terminée ! À votre santé ! » déclara Cody.

« Avez-vous vraiment omis nos noms pour ne pas attirer l’attention... ? » demanda Mylarka.

« À votre santé ! Yay, je vais aussi boire aujourd’hui ! » déclarai-je.

« Attends, tu vas boire même maintenant ? Qu’est-il arrivé à cette bouteille de liqueur forte que tu avais ouverte l’autre jour... ? » demanda Verlaine.

« Aileen ne peut pas se saouler sur quelque chose comme ça, » déclarai-je. « Ceci ne serait guère plus que de l’eau pour elle, contrairement à moi. »

Avant de devenir une vraie buveuse, j’avais vu à quel point elle était séduisante en état d’ébriété... mais si cette situation dégénérait, notre relation aurait probablement été détruite, alors c’était mieux ainsi.

« Uuh~ j’ai l’impression d’être en feu ! L’alcool des Nains fait brûler votre corps comme de la lave ! » déclara Aileen.

« Cette boisson est si forte que je me demande si ce n’est vraiment pas un feu buvable..., » déclarai-je.

« D’accord, célébrons tout ça avec le souffle enflammé d’Aileen. Laissez-moi vérifier s’il reste des silex, » déclara Cody.

« Si la plus forte artiste martiale de la race des esprits devait cracher du feu, cela ferait partie de sa légende. Je ne peux pas louper ça, » déclara Mylarka.

Le fait de discuter ainsi m’avait fait me remémorer du temps de notre voyage.

Les jours où j’avais sans arrêt corrigé les actions de certaines personnes si inouïes...

Même si c’était vraiment nostalgique, je ne ferai plus jamais quelque chose comme ça.

La Princesse Manarina riait en nous voyant parler ainsi.

« Vous êtes vraiment en bons termes. Si des personnes aussi fortes que vous s’entendent aussi bien, il n’est pas étrange de penser que vous avez réussi à vaincre le Seigneur des Démons, » déclara-t-elle.

« Oui, mais vous savez... Je-je veux dire, cela ne me dérange pas, Mademoiselle, » Le Seigneur des Démons avait commencé à confirmer ça sans réfléchir, mais elle avait arrêté à mi-phrase.

Manarina ne connaissait pas le visage du Seigneur des Démons, alors elle ne pouvait même pas imaginer qu’elle se tenait juste devant elle.

Après cela, Manarina et Mylarka avaient goûté aux boissons que j’avais préparées pour elles.

Pour autant que je sache, la saveur aurait dû être assez bonne pour leurs préférences gustatives...

Malgré ça, j’étais anxieux.

« ... Je pensais que l’alcool avait une saveur amère... mais je suppose qu’il y a aussi des boissons comme ça, n’est-ce pas ? » déclara Mylarka.

« Mh~ C’est tellement bon. Sa saveur est si délicate que je ne peux pas croire qu’il s’agisse d’une boisson alcoolisée, » déclara Manarina.

« Eh bien, vous devriez quand même être capable de supporter des boissons plus fortes, » dis-je.

« Qu’est ce que c’est censé vouloir dire ? Tu n’as que deux ans de plus que moi, » déclara Mylarka. « Il pourrait ressembler à un adulte, mais il n’a pas encore vingt ans. Manarina, ne te laisse pas berner par son apparence. »

« J’avais poser la question à propos de l’âge de Sire Queue quand vous avez eu cette réunion avec mon Père... mais quand même, quand nous nous sommes revus par la suite, j’ai été surprise de le voir si mature, » déclara Manarina.

Même quand je me saoulais, je devais prendre soin de mon apparence, puisque je ne pouvais pas laisser les invités voir un ivrogne dégoûtant assis au comptoir. C’est pourquoi je m’étais assuré de toujours être bien habillé. J’avais également accepté les suggestions d’Aileen et de Verlaine concernant le choix des vêtements.

Peu importe que je grandisse ou non, mon image reflétée dans le miroir était quelque peu décevante, alors même que cinq ans s’étaient écoulés.

L’alcool n’avait pas du tout ruiné mon corps, puisque je pouvais utiliser la magie de guérison pour neutraliser son poison afin que le lendemain, j’évite ses effets secondaires. C’était devenu populaire parmi les membres de la guilde, puisque les personnes pouvaient boire autant qu’elles le voulaient sans interférer avec les tâches du jour suivant.

C’est pourquoi je pensais que Mylarka et Manarina allaient bien, mais...

Mylarka prit ses premières gorgées calmement, et cela jusqu’à ce que le verre soit à moitié vide, puis elle but le reste d’un coup. Manarina continua à boire avec de petites gorgées tout en regardant la boisson, mais quand l’effet de l’alcool commença à se faire sentir, elle acheva sa boisson en quelques secondes...

« M-Mylarka, Manarina, même si vos boissons sont douces et faciles à boire, l’alcool reste encore de l’alcool. Vous devriez boire plus lentement, » dis-je.

« Ne puis-je pas faire ce que je veux ? » demanda Mylarka. « Tu sais, c’est mon anniversaire. Maintenant, apporte en moi un autre, s’il te plaît. »

« Je-je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Tu vas finir ivre morte, » déclarai-je.

J’avais déjà une certaine expérience avec l’alcool, alors j’avais gentiment essayé de les avertir... mais Mylarka s’était levée, avait mis une main sur mon épaule et l’avait serrée avec force.

« N-Nous sommes si proches... Je ne peux pas être ivre si je n’ai bu en ce lieu que du jus ! » déclara-t-elle.

« ... Vas-tu me laisser partir si je te donne la recette de ta boisson ? » demandai-je.

« Sire Queue, j’aimerais également avoir une nouvelle tournée..., pourriez-vous prétendre que cela soit celle-là notre toute dernière commande pour aujourd’hui... ? » demanda Manarina.

Le duo de beauté aux cheveux bruns et aux cheveux blonds me demandait toutes deux un autre verre.

Je ne voulais pas, et il aurait mieux valu que je les dilue davantage, mais il était trop tard pour le regretter maintenant.

« Eh bien... si elles attendent la fermeture du bar, on les laissera boire un autre verre plus tard ? » suggéra Verlaine.

« Aaah... C’est une bonne idée. Je récolte ce que je sème. Que voulez-vous boire ? » demandai-je.

« J’aimerais boire quelque chose de délicieux. Si c’est Sire Queue qui le fait lui-même, alors tout ira bien..., » déclara Manarina.

« Je veux... comme avant. C’était si bon que j’en boirais des milliers de fois plus..., » annonça Mylarka.

« Hé, es-tu sérieuse ? » demandai-je. « Je ne te laisserai pas dépenser autant d’argent pour boire. Ce sera le dernier. »

« Queue, puis-je aussi avoir une autre bière ? Je vais retourner à la base des chevaliers après celle-là, » déclara Cody.

Si quelqu’un remarquait qu’il sentait l’alcool, l’image de Cody serait ternie, mais cela irait toujours bien, même s’il était ivre mort.

Il aurait été impoli d’enlever avec ma magie l’engourdissement si agréable que l’on ressentait lorsqu’on était ivre.

***

Chapitre 7 : La Jeune Chevalière et ses Gardes

Après la dernière tournée de boissons, j’avais fait dire aux clients par les serveuses que nous fermions pour aujourd’hui. Verlaine était revenue dans la cuisine et m’avait donné la chope de Cody... mais derrière elle, les trois filles étaient toujours au comptoir avec leurs verres.

« Hé Queue ! N’es-tu pas intéressé par les filles ~ ? Me vois-tu seulement comme une amie ~ ? » demanda Aileen.

« Je pense sérieusement à faire le prochain pas... Hic. Désolé, qu’est-ce que c’est... *hoquet*... Hic, » déclara Mylarka.

« Mylarka, je veux vraiment savoir ce que tu ressens à propos de Sire Queue, » déclara Manarina.

« Je... Je l’ai ai.Hic.me depuis toujours... Hic. Après tout, il est tellement gentil..., » répondit Mylarka.

« Oui, je suis d’accord avec toi. Il s’inquiète tout le temps pour nous, » déclara Cody.

L’embarras de Mylarka avait été quelque peu tempéré par la déclaration de Cody.

Je ne savais pas si j’aurais dû être content de ses sentiments, mais si elle me voyait vraiment comme ça, ça aurait été un bon changement par rapport aux abus verbaux habituels.

« Aileen, ce jour-là, Queue a-t-il été gentil avec toi ? » demanda Cody.

« Qu... N-Non ? Tu as tort, nous n’avons toujours pas fait ça..., » répondit Aileen.

« Quand je rêve de Sire Queue, il est si romantique... Ah, je ne devrais pas faire ça, mais, même si nous nous connaissons à peine..., » déclara Manarina, tout enjouée.

Alors que Manarina se tenait la tête en parlant, Cody décida qu’il était temps de partir et se leva.

Il avait ensuite payé Verlaine et avait marché vers la porte arrière.

« À bientôt les gars, à la prochaine fois. Queue, désolé de te demander une telle chose, » déclara Cody.

« S’il te plaît, ne mentionne pas ça, » dis-je.

« Demande... ? As-tu fait une demande à Queue ? » demanda Aileen.

« Eh bien, plus ou moins. Mais je dois garder cela secret pour le moment, » répondis-je.

« Nnn...? Ce soir, je me sentais comme si je voulais t’aider si c’était nécessaire... Mais cela semble inutile. Je te rembourserai un jour, » déclara Mylarka.

Je me demandais si Mylarka faisait référence à cette dernière boisson.

Elle était si heureuse de sa fête d’anniversaire... mais d’une certaine manière, elle n’avait pas l’air fragile comme elle l’était quelques instants auparavant.

« Zzz... Zzz... »

« Outch, la Princesse vient de s’endormir. Mylarka, peux-tu la porter jusqu’à chez elle ? » demandai-je.

« Je pourrais peut-être, mais... Queue, pouvons-nous utiliser une pièce pour la nuit ? » demanda Mylarka.

Je savais que ça allait finir comme ça...

Elles étaient sans force après avoir tant bu, et maintenant je n’avais plus le choix.

« Maître... il semblerait que vous aurez une nuit très agitée, » déclara Verlaine.

« Épargne-moi tes bêtises... Bref, pourquoi ne rentres-tu pas chez toi ? Aileen vit également à proximité, alors aidez-vous les uns les autres et allez dormir là-bas, » dis-je.

« Hein !? Je suis trop fatiguée, je ne veux donc pas. Laisse-nous dormir ensemble, entre filles~, » déclara Aileen.

Aileen avait pris en douceur le corps de la Princesse et elle avait commencé à aller au deuxième étage... de ma maison. Juste après ça, Mylarka se leva aussi brusquement et tenta de la suivre, titubante.

Avant qu’elle ne touche le sol, j’avais réduit la distance entre nous et avais attrapé son corps.

« Hé, fais attention. Même la Douce Catastrophe perd-elle face à l’alcool ? » demandai-je.

« ... M-Merci beaucoup... Ne t’inquiète pas, je suis juste un peu étourdie, » répondit Mylarka.

Mylarka s’éloigna immédiatement de moi et essaya à nouveau de monter les escaliers menant au deuxième étage, mais ses jambes cédèrent et elle tomba sur ses fesses.

« ... Qu’as-tu mis dans ma boisson pour rendre mes jambes si instables ? » demanda-t-elle.

« Rien de spécial, » dis-je. « C’est juste que tu as trop bu. Veux-tu que je te guérisse de ça ? Cependant, pour faire ça, je dois te toucher au niveau du foie. »

« C-C’est correct... Le foie, hehe. Donc tu veux toucher mon ventre. Est-ce que tu penses à cela tout le temps ? » demanda-t-elle.

« B-Bien sûr que non, » répondis-je. « Je m’inquiète pour toi, alors je voulais juste que tu saches que je peux t’aider si c’est nécessaire... C’est tout. Je vais t’aider à monter ces escaliers. Cela ne me dérange pas si je dois te prêter mon épaule ou simplement te porter. »

« N-Ne me laisse pas le choix ! Ils sont presque les mêmes..., » déclara-t-elle.

« Alors, je vais vous porter. Vous n’avez pas à vous inquiéter, nos précédents combats appartiennent désormais au passé. Maintenant, je ne fais office que de serveuse, » déclara Verlaine.

« Ah... je-je n’ai pas dit que je ne voulais pas être porté par..., » déclara Mylarka.

Verlaine prit Mylarka dans ses bras et elle l’apporta jusqu’au deuxième étage. Qui sait ce qui lui était arrivé... Sa force était admirable. Tout comme Aileen, elle pouvait porter quelqu’un sans même transpirer.

Mylarka me regarda amèrement. Mais comme je ne pouvais pas la porter et ainsi sentir dans mon dos combien elle avait grandi, j’étais aussi déçu qu’elle.

J’avais décidé de respecter notre relation, mais même si l’on disait que l’amitié ne pouvait pas exister entre les hommes et les femmes, cette scène m’avait affecté.

La Verseau d’Argent avait fini ses affaires pour la journée.

J’avais alors éteint les lanternes éclairées par la magie. J’avais également vérifié si quelqu’un avait oublié quelque chose dans le bar, puis j’étais allé laver les assiettes et les verres usagés avec le Seigneur-Démon, et finalement, j’avais arrangé le nécessaire pour le lendemain.

***

Deux jours plus tard, en début d’après-midi, j’avais fini les préparatifs pour la demande de Timis et je l’avais attendue au bar.

Le dragon de feu n’avait toujours pas détruit beaucoup de choses, et nous pourrions dire que les citoyens vivant près de la forêt avaient presque l’interdiction de faire quoi que ce soit vis-à-vis de lui. Il aurait été bon que la menace ne s’aggrave pas, mais le dragon pourrait attaquer les humains s’ils le mettaient en colère, donc l’accès à la forêt était restreint.

Si la saison de reproduction des dragons de feu prenait maintenant fin, ils seraient simplement retournés dans sa région volcanique.

Mais si leur territoire manquait de nourriture, ils s’envolaient vers les hameaux voisins et commençaient à attaquer le bétail. Avant que cela n’arrive, il fallait s’occuper d’eux.

Alors que je pensais à la situation, la clochette avait retenti.

Elle annonça l’arrivée d’un « demandeur ». Dans notre cas, il s’agissait d’une chevalière portant un manteau brun foncé. Le brun était la couleur de mardi. Elle était entrée avec une femme-tigresse, et un homme qui ressemblait à un archer, et qui affichait une expression sérieuse.

En voyant la chevalière portant une armure sous son manteau tout en portant une lance sur son dos, j’avais senti... que quelque chose la concernant ressemblait à Manarina.

Je pouvais sentir sa fierté de la façon dont elle marchait avec sa poitrine gonflée.

Et je ne pouvais pas ne pas admirer la femme-tigresse se tenant près d’elle.

Elle était forte... Sa longue épée avait été faite par une technique de forgeage spéciale venant d’un endroit lointain à l’Est. Le tranchant de cette arme était vraiment au plus haut niveau.

Cela prouvait qu’elle était une « maître-épéiste ».

Ils m’avaient regardé, puis ils s’étaient assis au comptoir, mais ils pensaient que j’étais juste un habitué. La chevalière avait alors fait face à Verlaine.

« Est-ce bien le Verseau d’Argent ? Je suis de la chevalerie du Royaume d’Albein..., » commença-t-elle.

« Mademoiselle. Vous n’avez nullement besoin de vous présenter. Ici, c’est juste un endroit où les gens aiment boire, » répondit Verlaine.

En opposition à Manarina, Timis était trop sérieuse.

Elle avait même essayé de se présenter avant de déclarer les mots-clés. Ce n’était pas comme si c’était un problème, puisque j’avais déjà scellé la porte avec de la magie pour que personne ne puisse entrer.

« Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez commander ? » demanda Verlaine.

« Je voudrais un peu de lait. Sinon, s’il n’y en a pas, je voudrais ce que je peux boire uniquement ici, » demanda Timis.

« Très bien. Le mélange spécial de la maison est-il correct pour vous ? » demanda Verlaine.

« Tout à fait. Mais faites le juste pour moi, s’il vous plaît, » répondit Timis.

Après cela, la chevalière regarda calmement Verlaine.

Quand la barmaid lui fit un sourire, Timis laissa échapper un soupir de soulagement.

« Merci mon dieu ! Après tout, nous sommes au bon endroit, » déclara Timis.

« ... Mademoiselle Timis, nous n’avons pas vraiment besoin de l’aide d’une guilde de banlieue comme celle-ci. Je vais tuer le dragon avec une seule frappe, » déclara la femme-tigresse.

« Je suis d’accord avec toi, Lia. Ce monstre ne serait pas le poids face à nous, » déclara Timis.

Après avoir entendu les commentaires des deux filles, j’avais pensé... que Cody avait vraiment des ennuis.

Timis était une aventurière de Rang-C qui n’était pas assez forte pour tuer un dragon, mais elle était convaincue du contraire.

D’une certaine manière, elle semblait aussi faire confiance à la femme-tigresse.

Elle était en effet une aventurière de Rang-A... mais cela signifiait simplement que son score était d’environ six mille.

Une équipe de six aventuriers de Rang-A pourrait atteindre un score de douze mille s’ils étaient très bien coordonnés. Dans ce cas, tuer un dragon deviendrait faisable.

Mais elle seule n’était nullement assez. Je devinais que l’homme qui n’avait pas encore parlé était un Rang-B.

Tout en les regardant, j’avais pensé à quel point l’ignorance et l’inexpérience étaient des choses effrayantes.

Timis elle-même débordait de confiance en soi, et ils avaient tous l’ambition de réaliser un tel exploit avec leur propre force.

« Mademoiselle Timis, quel genre de relation Mademoiselle Lia et cet homme pourraient-ils avoir avec vous ? » demanda Verlaine.

« Lia et McKinley sont mes gardes. Donc je les ai amenés avec moi aujourd’hui. Y a-t-il un problème avec ça ? » répondit Timis.

« Non, pas du tout. Afin de pouvoir accepter votre demande, nous devons vous demander des informations sur votre groupe. Rien de plus, » répondit Verlaine.

Je n’aimais pas qu’elle amène quelqu’un avec elle, mais j’avais deviné que c’était inévitable en tant que fille de la concubine du Roi. Comme elle était la chef d’une centaine de personnes, elle avait d’autres subordonnés, mais elle ne les apportait pas... Est-ce parce qu’elle ne voulait sacrifier personne ?

Pourtant, je devais admettre que Lia était remarquable. Elle n’était pas simplement à moitié une humaine et un tigre, mais une race complètement différente. Elle avait des oreilles de tigre couvertes de fourrure, mais elle ressemblait à un simple humain dans tout autre aspect. Elle avait environ la vingtaine, elle avait les cheveux courts et dans ses yeux calmes brillait une vive lumière.

Les femmes-tigresses avaient la même force et le corps solide des prédateurs. Son armure de cuir était composée uniquement d’un plastron, d’une pièce qui lui couvrait les hanches et des guêtres. Il s’agissait d’une armure légère pour une avant-garde, mais je devinais que c’était pour ne pas la ralentir.

Elle s’était probablement concentrée sur son agilité et avait favorisé une tactique d’attaque éclair. Infliger le plus de dégâts possible avant de se retirer. Elle avait un cache-œil probablement à cause de son travail de mercenaire avant de devenir la garde du corps de Timis.

Elle avait l’air si talentueuse que je la voulais dans ma guilde.

McKinley avait autour de mon âge, ou peut-être un peu plus vieux.

Bien qu’il n’ait pas enlevé son capuchon, il y avait une sorte d’ombre dans ses yeux.

Il avait une carrure moyenne et de bons muscles, et portait une lourde arbalète sur son dos... c’était donc un arbalétrier. Ses carreaux étaient plus grands que les arbalètes normales et l’arbalète pouvait être utilisée même contre les dragons.

Timis faisait confiance en leurs compétences, mais elle exagérait.

J’avais deviné qu’il s’agissait de la raison pour laquelle elle s’était portée volontaire pour la tâche... Faire confiance à ses compagnons était une bonne chose, mais si elle participait à un groupe comme celui-là, elle ne ferait que les retenir.

« Un collègue de confiance m’a dit que je pouvais trouver des informations ici, c’est pourquoi je suis venue, » déclara Timis. « Je n’ai pas besoin de main-d’œuvre, mais cela ne me gênerais pas de glaner quelques conseils au sujet de comment vaincre un dragon, tant qu’ils sont utiles. »

Ce collègue digne de confiance devait avoir été l’un des subordonnés de confiance de Cody.

Cette jeune chevalière n’avait toujours pas compris que le général de l’armée avait agi pour elle.

« Mademoiselle, vous n’avez pas à vous inquiéter, » répondit Verlaine. « Toutes informations que vous trouverez ici vous seront utiles. Si vous voulez vraiment tuer le dragon, vous devez nous promettre que vous suivrez en détail nos recommandations. »

Verlaine était debout devant elle. Le regard de Lia devint plus tranchant, mais elle garda le silence.

Timis y pensait, mais elle n’était pas assez imprudente pour retourner chez elle les mains vides.

« ... Je dois le tuer par tous les moyens pour répondre aux attentes de ma mère et de mon père, » déclara Timis.

« Ma Dame..., » Lia s’inquiétait sérieusement pour elle.

Normalement, elle aurait dit à Timis que c’était impossible, mais satisfaire le désir de sa Dame était probablement important pour elle.

« Si vous faites ce que nous disons, vous reviendrez vivante et votre victoire sera garantie, » déclara Verlaine. « Vous pouvez accepter après que l’on vous aura expliqué la moitié du plan, mais... »

« Non, si vous parlez sincèrement, je vais accepter tout de suite, » répondit Timis. « J’ai seulement besoin d’écouter... mais l’information a un prix, donc je ne peux pas m’en aller ainsi après ça. Je m’excuse d’avoir été grossière. »

« Il n’est pas nécessaire de le mentionner, » déclara Verlaine. « Mais je suis contente que vous disiez cela. S’il vous plaît, asseyez-vous. Je vais vous apporter des boissons. »

Timis était trop confiante, mais elle était aussi assez posée pour écouter les conseils qui auraient augmenté ses chances de gagner. Si elle suivait le plan, elle allait à coup sûr remporter la victoire.

L’une des attaques de Lia allait frapper le point faible du dragon, et l’arbalète de McKinley aurait rendu tout cela encore plus facile.

Ces deux-là étaient une erreur de calcul fort agréable.

Tout serait réglé en fonction des négociations qui allaient commencer.

J’avais amené le verre à mes lèvres pendant que j’écoutais leur conversation.

***

Chapitre 8 : L’écologie du dragon de feu et le plan pour le subjuguer

La relation entre Timis, Lia et McKinley n’avait rien de spécial.

Trois ans auparavant, Lia avait été engagée comme garde du corps pour Timis, et McKinley avait été choisi pour cette expédition par l’ancienne guilde mercenaire de Lia.

Une guilde de mercenaires était différente d’une guilde d’aventuriers, à partir du rôle qu’ils prennent dans le cas où une guerre éclaterait. Bien que le pays ait rarement demandé la coopération des aventuriers, des mercenaires seraient envoyés sur n’importe quel champ de bataille si c’était rentable.

Une guilde de mercenaires accepterait n’importe quelle demande aussi longtemps qu’une somme d’argent suffisante était payée.

C’était l’une des raisons pour lesquelles ils ne pouvaient pas envoyer de requêtes aux guildes d’aventuriers.

Puisque ces deux types de guildes étaient clairement différentes, leur demander de travailler sur une seule requête était inconcevable.

Après que Timis avait fini de donner des informations sur son équipe, Verlaine avait commencé à expliquer le plan.

« Tout d’abord, je veux confirmer à quel point vous êtes au courant de l’écologie des dragons de feu, » déclara Verlaine.

« N’est-il pas évident que nous ne savons rien de tout cela ? Ce sont des monstres qui vivent dans la région volcanique, donc même les observer serait dangereux, » Répondit Timis, et exactement comme elle l’avait dit, ils étaient complètement désemparés.

Ils auraient pu tout simplement recruter une équipe d’aventuriers de rang A, ou même mieux, et tenter de tuer le dragon par la force brute.

Mais même dans ce cas, ils auraient été brûlés à mort par les flammes du dragon.

Nous devions prouver à Timis et à ses gardes qu’un plan était nécessaire.

Verlaine sortit un livre de sous le comptoir et laissa Timis lire sa couverture.

« ... “Comment tuer les Dragons pour les nuls”... ? » murmura Timis.

« Gh... Vous moquez-vous de Dame Timis ? Ce stupide livre ne nous aidera pas ! » rugit Lia.

Lia avait sauté sur ses pieds et elle avait immédiatement réduit la distance pour arrivé proche du visage de Verlaine.

Son tempérament était pire que prévu, mais le Seigneur-Démon avait enduré son regard ardent sans sourciller.

« L’auteur de ce livre... le Duke Solver est la personne la mieux informée sur les dragons de feu dans tout le royaume, » répondit Verlaine. « En suivant ce guide, même quelques aventuriers de rang B pourront tuer un monstre si puissant. »

« Le Duke Solver... ? Je n’en ai jamais entendu parler, » déclara Timis.

« Si vous dites la vérité, alors l’auteur..., ce Duke Solver serait très largement connu. En outre, ce livre serait vendu partout, » Lia s’était opposée à Verlaine.

Pourtant, même s’ils cherchaient ce livre ou son auteur en dehors de la guilde, ils ne trouveraient pas le moindre indice.

J’aurais dû être plus original et écrire avec un alias différent.

Le fait de garder mon sang-froid devenait une tâche difficile. Chaque fois que j’entendais ce nom, ma boisson risquait de tomber dans le mauvais sens.

« Ce type a-t-il lui-même le pouvoir de tuer un dragon ? » McKinley avait ouvert la bouche pour la première fois. Comme il était si taciturne, je pensais que son modèle de discours serait plutôt sévère, mais à la place, il parlait comme un jeune homme normal.

Vous ne pouviez pas juger un livre par sa couverture.

« Si c’est le cas, j’aimerais l’engager... mais je suppose que ça ne servirait à rien si Mamzelle veut gagner des mérites, » déclara McKinley.

« McKinley. C’est Dame Timis. Combien de fois dois-je te le dire avant que tu le comprennes, » répondit Lia.

« Oh, c’est vrai. Dame Timis. Je suis désolé pour mes mauvaises manières, » déclara-t-il.

Lia était trop sérieuse, et McKinley était un gars trop détendu.

Il avait finalement enlevé sa capuche. Ses cheveux étaient gris et noirs, et il ressemblait à un homme à part entière.

Timis sortit de sa poche un ruban et le tint avec ses lèvres alors qu’elle rassemblait ses cheveux dans un chignon. Elle avait ensuite pris le livre et l’avait ouvert.

Compte tenu de son expression solennelle, je devinais qu’attacher ses cheveux comme ça était son charme avant de prendre au sérieux quelque chose.

Ses mains tremblaient alors qu’elle continuait à feuilleter les pages.

« Comment... Comment a-t-il pu recueillir autant d’informations...? » murmura Timis.

Timis laissa Lia, qui était maintenant de retour à sa place, regarder les pages en feuilletant le livre. Elles étaient toutes les deux choquées.

« ... Un dragon de feu boit trois fois par jour et ne boit que de l’eau souterraine avec beaucoup de minéraux dissous dedans. Puisque les écailles d’un dragon sont comme sa peau, il faut les remplacer fréquemment, donc on peut deviner que les minéraux sont essentiels pour la croissance des écailles..., » Lia était tellement impressionnée qu’elle ne pouvait s’empêcher de lire à haute voix. McKinley était également ainsi après les avoir rejoints.

« Ce Duke Solver est incroyable... qui est-il vraiment ? » demanda Timis. « Il a tout observé sur les dragons de feu, analysant même ce qui n’est pas nécessaire pour qu’une équipe d’aventuriers en tue un, et a également donné des indices à ce sujet. Est-ce que ce type inouï a écrit ce livre pour votre guilde... ? »

Leur opinion sur Duke Solver était en plein essor. Cela aurait été une douleur s’ils considéraient le livre comme un tas de déchets, mais les choses semblaient aller bien jusqu’à présent.

« Comprenez-vous maintenant ? » demanda Verlaine. « Connaître les habitudes de votre ennemi vous fait choisir l’endroit idéal pour commencer votre combat. Savoir sa position exacte à l’heure à laquelle vous voulez frapper vous permet de faire plus attention à l’environnement. Le fait de connaître tout sur ses attaques est essentiel pour la bataille... Ne pas être au courant de ces choses réduit drastiquement vos chances de gagner. »

« ... Honnêtement, je n’aurais jamais pensé à ça. Est-ce que cette guilde est spécialisée dans la destruction de dragons ? » demanda Lia. « Ou êtes-vous simplement intéressé par les gros monstres... ? »

« Non, nous ne le sommes pas. Nous voulons simplement répondre aux demandes de nos clients. Disons que nous avons ce livre par pure chance, » déclara Verlaine.

La vérité était que si nous n’avions pas tué le dragon qui avait attaqué la forêt deux ans auparavant, je n’aurais jamais écrit ce livre.

À cette époque, ma guilde n’avait que quatre aventuriers de rang B, et même si ma méthode était un peu imprudente, ils avaient réussi à gagner.

J’avais déjà vérifié que nous pourrions réutiliser la même stratégie.

Le moment où ce dragon buvait était différent, et la topographie de la forêt avait quelque peu changé, mais tout avait été pris en considération, ce qui en faisait le guide parfait pour cette occasion.

Pourtant, le retour de Timis indemne n’était pas certain. Elle devait augmenter son mauvais score... et devenir une aventurière de Rang-B.

« Barmaid, apportez à la Dame du meilleur lait. Oh, et je veux aussi une autre choppe, » déclarai-je avec force.

« Cela vient tout de suite, » répondit Verlaine.

Le meilleur lait était un cran au-dessus de ce que Manarina avait bu.

C’était du lait de Béhémoth. Grâce à la formidable vitalité du Béhémoth, ma magie de soutien avait atteint son apogée lorsqu’elle était infusée dans son lait. Si je n’avais pas utilisé ça, elle ne serait jamais devenue assez forte.

« ... Du lait ? Je préfère boire quelque chose..., » déclara Timis.

« Ma Dame, ce serait mieux si vous ne pensez pas à boire. Pour le moment, concentrons-nous sur la demande, » répondit Lia.

« Et à vous, je vous offre aussi quelque chose. Je ne veux pas vous laisser en dehors de ça, » déclarai-je.

J’avais aussi commandé du rhum mélangé avec du sirop de grenade secret pour McKinley et du kotsuzake [1] de salamandre pour Lia.

Quand les verres furent placés devant eux, McKinley laissa échapper un murmure d’admiration, tandis que Lia était totalement déconcertée. Timis, contrairement à sa sœur, m’avait regardé et avait commencé à rire.

« Sérieusement, est-ce que je parais si jeune selon vous ? » demanda Timis. « De plus, l’âge ne compte pas pour les chevaliers. »

« Madame, vous êtes encore trop jeune pour l’alcool, mais vous êtes libre de manger des biscuits avec le lait, » dis-je.

« Si vulgaire. Bien que ce soit un bar, pensez-vous que vous pouvez négliger nos rangs ? » rugit Lia.

« Franchement, où est le problème ? » demandai-je. « Cet endroit est digne de confiance, et ce n’est pas comme s’il vous servait des boissons empoisonnées. Mais ce n’est pas comme si j’avais l’envie de les goûter pour m’en assurer. »

« ... C’est correct, merci. Je suppose que cet endroit fonctionne comme ça, donc je dois juste supporter vos manières grossières, » déclara Timis, puis elle commença à boire un peu de son verre.

Cet endroit ne fonctionnait pas vraiment comme ça, mais la première étape était de la faire boire... parce qu’elle était maintenant presque deux fois plus forte qu’avant, même si j’étais le seul à le savoir. Être le bouclier de l’avant-garde est un fardeau énorme en soi, et Timis était également la plus faible de son groupe.

Les cookies furent servis dans ce but.

J’avais fait des biscuits d’érable en utilisant les noix grillées dans la pâte.

Le goût était considérablement meilleur si on le comparait aux simples noix rôties.

« Les cookies... Ça fait longtemps que j’en ai eu. Excusez-moi, mais j’en prends un... Mmh ~, » déclara Timis.

En la regardant, je pensais qu’elle pourrait être encore plus docile que prévu, ou peut-être qu’elle était tout simplement trop jeune et les informations du livre avaient fait qu’elle avait complètement confiance dans la guilde. Le fait de faire confiance à un étranger qu’elle n’avait jamais vu auparavant était différent.

« Délicieux. Sont-ils des biscuits à la noix ? » demanda Timis. « Je n’ai jamais ressenti ce goût avant. Ils ont une saveur si forte... »

« Mademoiselle, je suis contente qu’ils correspondent à votre goût, » Verlaine sourit tendrement tout en disant ça.

En voyant que Timis avait pris l’initiative de consommer à la fois la nourriture et le lait, ses gardes avaient commencé à l’imiter. McKinley semblait légèrement plus heureux, et l’expression sévère de Lia s’adoucit au moment où elle porta le verre à ses lèvres.

« Gh... La douceur de cette boisson réchauffe mes entrailles... Ce n’est pas mal, » déclara Lia.

« C’est sec, mais ça a bon goût, » déclara McKinley.

Les hommes-bêtes vivaient généralement dans des montagnes où la température était plutôt basse, alors ils demandaient aux nains de boire leurs boissons fortes et pouvaient aussi préparer eux-mêmes des boissons fortes. Peut-être qu’elle n’avait eu aucun problème à boire le kotsuzake de salamandre grâce à ça. C’était si fort que si j’en avais goûté, ça aurait fait brûler l’intérieur de ma gorge. Elle avait ensuite bu le reste d’un coup.

« Lia ! Je te dis toujours que si tu bois comme ça... tu vas gâcher ton corps, » déclara Timis.

« Je vous demande pardon, Ma Dame. Mais cette boisson était meilleure que prévu, » répondit Lia.

Les personnes qui aiment l’alcool devraient être les bienvenus dans les bars.

Tant qu’elles n’exagéraient pas, ça ne me dérangerait pas de les laisser boire autant qu’elles le voulaient.

L’alcool était bon dans les endroits où les demandes pouvaient être acceptées parce que cela pouvait aider les personnes à être plus détendues et à aplanir les négociations.

En fait, le visage de Lia était maintenant légèrement rouge, et son humeur s’était adoucie. Je savais que sa boisson était assez forte, et évidemment elle avait démarré assez vite sa consommation.

« De toute façon, nous ne sommes pas là pour boire. Devrions-nous lire ce livre pour tuer le dragon ? » demanda Timis.

« Oui, grosso modo. Mais laissez-moi vous avertir de quelque chose, » déclara Verlaine. « La méthode expliquée ici ne peut être utilisée que cette fois-ci, car l’environnement forestier change chaque fois qu’une telle rencontre a lieu. »

« Je vois. Un essai est tout ce dont nous avons besoin, » répondit Timis.

Et donc, les négociations étaient terminées... alors, oublions ça. Mais je ne pouvais pas les laisser partir de cette façon.

Je voulais les matériaux du dragon, donc je ne voulais pas qu’ils le massacrent.

« Nous avons une autre condition. Nous ne voulons pas que vous tuiez le dragon, mais nous voulons que vous essayiez de le capturer. La preuve du succès de Mademoiselle Timis sera l’une de ses écailles. Après la capture, vous laissez tout le reste à notre guilde, » rajouta Verlaine.

S’ils pouvaient le faire, Timis gagnerait encore plus de mérites. De plus, les chevaliers ne se souciaient pas vraiment des matériaux des monstres... donc ils accepteraient probablement la condition.

Comme prévu, Timis acquiesça et Verlaine lui montra le contrat.

« Je pensais combattre un dragon de feu sans rien savoir... Je vous suis reconnaissante de m’avoir fait prendre conscience de mon ignorance, » déclara Timis. « Lia est forte, mais j’ai encore un long chemin à parcourir... Je suis sans égal parmi les chevaliers de la même année, mais mon arrogance allait me tuer... »

« ... J’aimerais rencontrer ce Duke Solver. Seul un guerrier pourrait écrire quelque chose de si détaillé, » déclara Lia. « Je suis sûr qu’il est un maître des arts martiaux. »

« Le monde est vaste. Est-ce que Duke Solver passe de temps en temps ici ? » demanda Timis.

Verlaine se figea un bref instant... et sans regarder dans ma direction, elle plissa les yeux, encadrée par ses longs cils, et répondit avec un élégant sourire. « Oui, il vient souvent ici. Il aime les boissons alcoolisées, mais ne boit que des boissons bon marché. »

Cela dit, leur opinion sur Duke Solver était encore meilleure après ça.

Il semblerait que ce type était glorifié par eux, car il était si fort et humble.

Mais permettez-moi de le dire clairement : ce guide ne contenait que les connaissances de base et les grandes lignes de la procédure pour la tâche, de sorte que seul ça ne suffisait pas.

Ils devaient aussi connaître la Forêt de Belfon.

Le « plan de subjugation du dragon de feu » mis en place par « Duke Solver » devait être exécuté exactement comme il était décrit là.

Note

  • 1 Il est généralement fabriqué en rôtissant légèrement les arêtes de poisson pour faire ressortir les huiles et les saveurs, puis en les plongeant dans le saké chaud. On se demande comment Queue pourrait rôtir des os de salamandre...

***

Chapitre 9 : La Rune et le début de l’opération

Trois jours s’étaient écoulés depuis que nous avions accepté la demande de Timis.

Verlaine avait expliqué le plan en détail et avait apporté une carte et quelques pièces d’échecs sur la table afin de pouvoir le simuler.

« Cela ressemble à... un jeu de plateau, » déclara Timis.

« C’est plus comme une reproduction de la bataille, » déclara McKinley. « J’ai déjà gravé dans mon esprit comment le dragon de feu bougera, mais je ne sais pas si nous serons capables de... »

McKinley avait une énorme responsabilité sur ses épaules. La précision d’un aventurier de rang B n’était pas parfaite, mais elle était assez au point pour être classé comme tireur d’élite. Tout ce qu’il avait à faire était de tirer sur la bête après que Timis avait déclenché la bonne série d’actions.

« Si les choses ne se passent pas comme prévu, la protection de Madame deviendra ma priorité absolue. Cependant, je ne veux pas penser que tout cela sera fait pour rien..., » déclara Lia.

« Non, ne me traite pas comme ça, » déclara Timis. « Je suis déjà un obstacle... Je l’ai réalisée après la discussion sur la force du dragon de feu. Jusqu’à présent, j’ai vaincu des orcs et des monstres de bas rang, mais c’est totalement différent maintenant. Toujours, en le comparant à vaincre dix mille orcs... »

Tuer autant d’orcs serait possible avec une armée de mille hommes, mais cela pourrait être insuffisant pour vaincre un dragon. Un seigneur-orc apparaîtrait après un millier d’orcs, et même si Timis était une aventurière de rang B, cela pourrait être une bataille difficile.

Bien que si Lia était avec elle, ce serait facile.

« Madame Timis, pourrais-je vous poser une autre question ? Pourquoi êtes-vous si obsédée par le dragon ? » demanda Verlaine.

« ... Parce que le fait d’en vaincre un est une nécessité pour moi, » répondit Timis. « Sinon, je ne peux pas devenir la vice-générale de l’armée. Puisque le général actuel a promis de rester pour toujours, le plus haut rang que nous pouvons viser est de devenir son bras droit. »

« Rang... c’est ça ? Pourquoi voudriez-vous obtenir ce titre ? » demanda Verlaine.

« Je veux... voir quelqu’un. C’est une personne que je respecte profondément et que je ne peux pas affronter avec courage, » répondit Timis.

Ce doit être une histoire d’amour... Étant donné son âge délicat, c’était probablement l’impulsion illogique de la puberté.

« Je suis responsable de la protection de l’héritière du trône et je brandis mon arme pour elle, elle qui s’est battue pour refuser son mariage et a magnifiquement gagné, » continua Timis. « Je veux voir ma sœur Manarina à la cérémonie... »

Je pensais qu’elle parlait d’un homme, mais il semblait que j’avais tort. J’avais deviné que ça aurait pu être Cody, mais bizarrement, il n’avait rien à voir avec les filles.

La mère de Timis et Manarina était différente, alors j’avais pensé que Timis aurait des sentiments complexes concernant sa sœur. Au lieu de cela, elle avait un profond respect pour la princesse.

« Je ne peux pas cacher que moi et la princesse Manarina ne sommes pas vraiment sœurs, » répondit Timis. « Ma mère est une roturière qui a accepté la protection de Sa Majesté et qui est enviée des concubines des autres nobles pour cela. Mais je crois que les choses peuvent changer si j’obtiens suffisamment de mérites. »

Ses yeux brillaient de détermination.

Si elle voulait voir sa sœur, je devais lui accorder son vœu. Pourtant, la situation entourant la mère de Timis était difficile à changer du jour au lendemain... mais pas impossible.

« Madame Timis, je comprends que vous avez plus que suffisamment de résolution, » répondit Verlaine. « Demain, nous allons exécuter notre plan. Reposez-vous aujourd’hui et préparez-vous pour votre combat. Je prierai pour votre succès. »

« Oui, Professeur ! Je voulais dire, Barmaid ! » répondit Timis.

« M-Madame... vous avez agi jusqu’à présent en tant que chevalière, et maintenant..., » déclara Lia.

« Hahaha, quel est le problème avec ça ? Ceci fait un moment que quelqu’un m’ait expliqué quelque chose, » commenta McKinley à la fin.

Quand j’avais demandé à propos de l’âge de Timis, j’avais constaté qu’elle n’avait que quatorze ans... elle était terriblement jeune. Être la tête d’une centaine de personnes à cet âge était impressionnant, et si elle réussissait, elle pourrait devenir une grande chevalière.

Après la fin des discussions, j’aurais aimé essayer de recruter à la fois Lia et McKinley... mais la fille-bête semblait très proche de Timis, alors je devais réfléchir à un moyen de l’amener à mes côtés.

À ce moment-là, je me rendis compte que j’avais presque oublié quelque chose.

J’avais tapoté sur la table deux fois avec mon doigt, et Verlaine m’avait approché en remarquant le signal.

Je lui avais remis un ticket pour une nouvelle commande et je lui avais insufflé cette magie.

Ses joues avaient rougi après avoir touché ma main, mais elle avait fait semblant d’agir normalement et était retournée auprès des autres après m’avoir apporté plus de collations et d’alcool.

« Madame Timis, avant votre départ, nous aimerions que vous fassiez autre chose, » déclara Verlaine. « Puis-je tracer une rune sur votre corps ? »

« Une rune... ? » demanda Timis. « Sera-t-elle utile de tuer le dragon ? »

« Oui. Mais elle doit être faite près de votre poitrine, » répondit Verlaine. « Nous avons une salle privée prête pour cela, alors pourriez-vous y entrer ? »

« ... Est-ce vraiment nécessaire ? » demanda Lia. « Si c’est quelque chose d’étrange... »

« Ne t’inquiète pas, Lia, » répondit Timis. « Nous sommes toutes les deux des filles, il n’y a rien à avoir honte. »

Le fait d’utiliser une brosse aurait pu la chatouiller, mais dès que Verlaine eut fini d’expliquer la situation, elle escorta Timis jusqu’à la pièce.

« Moi et Lia n’en avons pas besoin ? » demanda McKinley.

« Q-Que dites-vous ? » s’exclama Lia. « McKinley, si tu oses fantasmer sur la silhouette de Madame alors que quelqu’un lui fait ça, je vais te couper en deux ! »

« E-Excuse moi ? » s’écria McKinley. « J’étais seulement curieux. Ne me regarde pas comme ça, s’il te plaît. »

Je savais ce que McKinley ressentait. Imaginer une elfe voluptueuse chargée de sex-appeal souiller la peau intacte d’un jeune chevalier était... étrangement une scène de charme.

La rune devait être tracée avec des outils spéciaux et elle aurait disparu dans quelques jours. J’aurais été inquiet si elle devait le faire elle-même, étant donné que son seul usage était de respecter ma parole envers Cody.

Je lui avais promis que j’aurais tout fait pour assurer la survie de Timis.

Il n’y avait pas besoin de l’utiliser s’ils exécutaient parfaitement le plan, mais les humains peuvent commettre des erreurs.

Même quand nous, les Enfants Miracles, avions combattu le Seigneur-Démon, nous avions presque été anéantis à cause d’une seule erreur... raison pour laquelle je n’avais jamais fait complètement confiance à quelqu’un.

Ce n’était pas une question de défiance, c’était simplement que je ferais n’importe quoi pour remporter la victoire.

« Au fait, Lia... qui est ce type qui nous a offert des boissons ? » demanda McKinley.

« ... Je pensais qu’il pourrait être lui-même Duke Solver... mais je suppose qu’il est juste quelqu’un de curieux, » répondit Lia.

« Duke...? Désolé, Mamzelle, mais je n’ai jamais entendu parler de lui, » m’exclamai-je. « Vous semblez avoir beaucoup de choses dans votre assiette, donc plus tard, je vais vous offrir quelque chose. »

« Oh vraiment ? Alors, je ne vais pas le gaspiller, » déclara McKinley.

« ... Je le savais, il ne peut pas être Duke. Il est juste un ivrogne, » répondit Lia. « Je m’inquiète pour Madame... parfois, cette elfe ne sourit pas sincèrement... J’espère qu’elle n’a pas de passe-temps bizarre... »

Lia avait commencé à bouger ses jambes... On aurait dit que les effets de l’alcool disparaissaient à cause de son inquiétude. La raison qui faisait qu’elle pensait tellement à Timis était un mystère, mais j’avais deviné que c’était parce qu’elle lui avait donné un chez-soi.

On m’avait directement demandé mon identité qui lui semblait bizarre, mais grâce à la Déesse, j’avais échappé au pire des cas... C’était bien que je sois un ivrogne, comme l’avait dit Lia.

Je me demandais comment les choses se déroulaient à l’infirmerie, alors j’avais attentivement écouté leurs paroles.

« Gh... »

« Vous ne devrez pas bouger, » déclara Verlaine. « Une fois que cette peinture touche la peau, elle ne disparaît qu’après un certain temps... Oui, restez immobile comme ça... Parfait... »

« ... C’est embarrassant, Mademoiselle la Barmaid... J’ai des muscles, contrairement à vous..., » déclara Timis.

« Un chevalier doit être fort, » déclara Verlaine. « C’est difficile d’avoir de tels muscles pour les filles, et vous êtes encore jeune... vous avez dû beaucoup vous entraîner. On dit que l’exercice va faire baisser le volume de la poitrine, mais le vôtre a bien grandi. »

« Ça me gêne quand je frappe avec mon épée, alors j’espère que ça ne va plus grandir... Est-ce que cette guilde accepte même ce genre de demandes ? » demanda Timis.

« Mon Maître sait comment les agrandir, mais je ne pense pas qu’il le fasse pour les réduire, » répondit Verlaine.

« Je-je vois... Comment peut-il les faire faire grandir ? » demanda Timis.

« Il utilise une technique appelée “la main droite de Dieu, la main gauche du Seigneur-Démon”. Puisque la croissance de la poitrine fait tomber une fille en transe, mon maître a acquis le surnom de “Le Cinquième Faiseur de Transes...”. »

« C-C’est impressionnant... Cette guilde est vraiment impressionnante d’avoir quelqu’un comme lui... et Duke vient aussi souvent ici..., » répondit Timis.

Sans moi, le Seigneur-Démon ne cessait de cracher des inepties. Je devais lui faire avouer franchement comment cette idée stupide avait traversé son esprit, mais c’était une autre histoire...

***

Le lendemain, j’étais assis au comptoir pendant que Timis et son groupe allaient commencer leur chasse.

Il était 6 h 30, donc il restait encore du temps avant d’ouvrir le bar. Pendant que Verlaine préparait tout, elle avait mis devant moi un verre de bière noire. Elle était plus précieuse que la bière noire habituelle, il était donc difficile de la trouver sur le marché. Je n’en buvais que quand j’en avais en stock.

Je portai la tasse à mes lèvres et sentis le liquide glacé couler dans ma gorge.

« Aaaah... »

« Maître, cette fois-ci, vous étiez encore plus scrupuleux que d’habitude..., » déclara Verlaine.

J’avais renforcé le corps de Timis avec ma Magie de Support quand elle avait bu le lait de Behemoth.

C’était vraiment précieux, alors je n’en avais pas donné aux deux autres... mais accepter la demande nous aurait rapporté beaucoup d’argent. Il était normal qu’un pro gagne suffisamment pour couvrir les dépenses.

« La stratégie est importante, tout comme les effets de ce qu’ils ont consommé, » dis-je. « Maintenant, tout dépend de leurs capacités. »

« Maître... la nuit dernière, j’ai senti que votre Pouvoir Magique diminuait. Devrais-je penser que mes sens m’ont trompé ? » demanda Verlaine.

J’avais souri et n’avais pas répondu. Verlaine était le Seigneur-Démon, elle remarquerait un changement dans le Pouvoir Magique de quelqu’un en un instant.

« Ça fait cinq ans depuis notre bataille... les Enfants Miracle sont vraiment effrayants, » déclara-t-elle. « Même avec votre puissance diminuée, je... »

« ... Verlaine, écoute-moi, » dis-je. « Je veux juste boire comme d’habitude. Alors, parle-moi à nouveau dans une heure. »

L’elfe blonde avait réfléchi à mes paroles puis elle avait lentement compris ce que je voulais dire... puis avait souri.

« Ne vous inquiétez pas, Maître, » répondit-elle. « Même si votre cœur n’est pas là, je ne volerais pas le talisman. »

« ... Merci. Je compte sur toi..., » dis-je.

« C’est peut-être une mauvaise blague, mais... nous sommes seuls jusqu’à l’ouverture du bar, » déclara Verlaine.

« Plus ou moins... alors tant que je n’encaisse pas de choc..., » dis-je.

Après avoir fini de boire, ma conscience s’était dissipée en un instant. Il n’eut aucun autre effet visible.

Et bien sûr, ce n’était qu’une coïncidence que Timis et son équipe aient commencé leur opération à ce moment précis.

***

Le groupe pour tuer le dragon s’était levé et s’était préparé très tôt.

Ses membres étaient entrés dans la forêt de Belfon et avaient observé l’environnement exactement comme ils étaient censés le faire, puis avaient renforcé leur détermination et s’étaient dirigés vers leur destination réelle.

J’ai mémorisé le contenu du livre et chaque mouvement du jeu de plateau. Je vais réussir à coup sûr, Timis se répétait ça dans son esprit alors qu’elle continuait à marcher dans la forêt.

Lia et McKinley étaient également silencieux depuis un certain temps maintenant. Le fait de marcher sur le territoire d’un dragon de feu les rendait même nerveux.

Alors qu’ils se déplaçaient, ils se répétaient les paroles de Duke Solver.

Pendant la saison de la reproduction, le dragon mâle quittait la forêt et retournait à son nid dans la région volcanique. C’était le bon moment pour frapper, puisque la femelle restait seule.

Elle faisait le nid dans une grotte forestière et y pondait son œuf. Dès qu’il était posé, il éclorait. Les dragons laissaient grandir en eux leurs œufs et les déposaient donc juste avant leur éclosion.

Le dragon femelle avait tout de suite besoin de nourrir son bébé, alors elle allait à la chasse. Dans son troisième mois, le nouveau-né allait déployer ses ailes et apprenait à voler sur de courtes distances, jusqu’à ce qu’il atteigne le dos de ses parents. Ensuite, la pénurie de nourriture de la région volcanique devrait être terminée, et ils y retourneraient.

Même si les humains n’avaient pas étendu leur territoire, un conflit avec ces envahisseurs était inévitable. Les dragons de feu agissaient par pur instinct et étaient des créatures assez dangereuses, ils devaient donc être chassés.

Combattre le dragon était déjà assez difficile... mais il fallait en plus le capturer...!

6 h 34.

Le dragon était sorti de sa caverne et avait commencé à chercher de la nourriture et de l’eau.

6 h 36.

Au moment où le dragon avait atteint l’eau, Timis et ses compagnons avaient été cachés derrière des buissons, couverts par un manteau et prêts à agir à tout moment.

C’était alors que Timis sentit quelque chose proche de sa poitrine... et une petite lumière jaillit de son armure.

« Quoi ?! Q-Qu’est-ce que c’est... ? » s’exclama-t-elle.

« ... Un insecte lumineux ? » demanda Lia. « Ils vivent dans cette forêt, donc je suppose que c’est entré dans votre armure. »

« Et il est allé se loger dans son plastron, chanceux b... je veux dire... Rien, » déclara McKinley.

Alors qu’il essayait d’exprimer sa pensée, Lia lui lança un regard noir. Timis regarda brièvement la chose brillante qui flottait simplement dans les airs, puis l’ignora.

Le dragon déploya ses ailes et les étira, exactement comme le livre le décrivait.

Le sol avait tremblé chaque fois qu’ils les avaient battues, et la bête, cinq fois plus grosse qu’un humain, avait tendu son cou vers l’eau qui s’échappait d’un rocher voisin et avait commencé à boire.

« C’est... vraiment énorme. Et nous sommes censés le faire tout seuls... ? » demanda McKinley.

« McKinley, ne parle pas trop ou il nous remarquera, » déclara Lia.

« D’abord, je vais attirer son attention, alors procédons comme prévu, » déclara Timis. « McKinley, je compte sur vous. »

« Bien sûr, » répondit McKinley. « Nous portons le fardeau le plus lourd, mais Madame devrait aussi faire attention. »

Ils avaient tous hoché la tête. Après que Timis eut demandé à Lia de l’eau pour qu’elle puisse mouiller sa gorge sèche, elle avait suivi le plan et s’était précipitée hors du buisson.

Le dragon de feu l’avait remarqué et s’était ainsi retourné. En la voyant tenir une lance, il ouvrit sa large bouche pour faire retentir son rugissement dans la forêt.

« Maintenant, McKinley ! » cria Timis.

Il avait stabilisé son arbalète et aiguisé son regard. Il visait la bouche de la bête... avant de tirer sur la gâchette.

Alors que le carreau volait vers sa cible, le chevalier avait sauté hors de sa trajectoire.

Dans le mille.

« Guoooh... Gah, goh! »

McKinley avait tiré un Carreau Silencieux, une des munitions que lui avait confiées le Verseau d’Argent, et avait scellé la voix du dragon.

Ce fut au tour de Lia, qui avait jailli des buissons tout en dégainant son épée.

Elle se précipita vers le dragon comme un tigre qui sautait sur sa proie.

« Aaaah! » cria-t-elle.

La couche épaisse d’écailles sur les ailes du dragon aurait pu ébrécher la lame, mais elle avait visé sa jambe... et avait frappé.

« Goooh... ! »

Une attaque puissante trancha dans sa chair, faisant presque perdre l’équilibre au dragon. Comprenant qu’il était en danger, il battit puissamment des ailes, et une pression du vent effrayante arrêta l’assaut de Lia, la forçant à faire quelques pas en arrière.

Mais ce n’était que le début.

Mais ces trois-là croyaient en leur victoire.

Le dragon s’était lentement élevé dans le ciel, essayant de s’échapper.

Timis le regarda tourner dans le sens des aiguilles d’une montre avant de se diriger vers sa destination.

Normalement, cela aurait signifié la fin de la bataille, car les dragons étaient trop rapides pour être rattrapé à pied, mais cela ne s’appliquait pas si le chasseur savait où il allait.

« Madame, il tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, alors il doit aller à..., » commença Lia.

« Oui, exactement où le livre le dit... Allons-y ! On se dépêche ! » cria Timis.

Ils hochaient la tête avant de commencer leur poursuite alors que la petite lumière qui avait jailli de l’armure de Timis commençait à les suivre.

***

Chapitre 10 : La furie du dragon et l’insecte lumineux

Le premier livre de Duke Solver, « Tuer un dragon pour les nuls ».

Le plan pour l’assaut était expliqué en détail dans le deuxième chapitre.

Tout d’abord, le dragon ne fera pas attention à son environnement quand il boit.

Les dragons de feu ont une vue aiguisée, mais leur champ de vision n’est pas large, ils ne peuvent donc pas voir les ennemis approcher sur leur côté ou dans leur dos.

Ils ne vous remarqueront pas tant qu’ils ne regarderont pas dans votre direction.

Ils sont spécialisés dans les attaques frontales, et leurs pattes antérieures sont assez développées.

Ils essaieront de vous frapper avec leurs griffes, mais s’ils pensent qu’ils vont être attaqués par-derrière, ils balanceront leur queue pour vous écraser, et cela même sans regarder.

Leur queue présente des écailles saillantes comme des épines, mais c’est l’ingrédient parfait pour une soupe vraiment étonnante... Maintenant, revenons à l’assaut.

Une fois que le dragon vous remarque, il rugira pour appeler son compagnon, et cela, peu importe si l’autre dragon de feu n’est pas proche.

Sceller sa voix avec une Flèche Silencieuse la mettra dans la confusion pendant plus ou moins dix secondes, et c’est le moment où vous devriez frapper. Un aventurier puissant peut mettre fin à la bataille dans ce laps de temps, mais de toute façon il est recommandé de faire autant de dégâts que possible.

Les écailles sont relativement fines à la base de sa queue, sur ses côtés, sur ses pattes et sur son cou.

Une fois qu’il a subi trop de dégâts, il peut se déchaîner et augmenter la température dans son environnement. Lorsque cela se produit, l’herbe, les arbres, les buissons et tout ce qui peut brûler à proximité peuvent s’enflammer, il serait donc préférable de le finir avant cette phase.

Il est recommandé de viser ses jambes avec une arme tranchante, et si vous parvenez à couper à travers sa chair, le dragon essaiera de s’échapper en vol.

S’il tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, sa destination est la colline dans la partie nord-est de la forêt.

S’il tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, il se dirigera vers la rivière dans le sud-est et il écrasera tout avec son lourd corps.

Après l’atterrissage, il va sûrement inspecter son corps pour confirmer son état.

À ce moment-là, sa tête serait une cible facile, donc charger de front et la frapper avec une arme contondante ou un bouclier l’étourdirait probablement pendant quelques secondes.

C’est là que vous devriez frapper à nouveau.

Si vous ne terminez pas la bataille à ce moment-là et que le dragon a assez de temps pour récupérer, vous devez être prudent et le terminer dès que vous le pouvez. Compte tenu de la structure de ses jambes, il est difficile pour lui de donner un coup de pied latéralement, donc il le ferait seulement en volant. L’attaquer sur les côtés va certainement grandement le blesser et vous garder plus en sécurité.

Il vaudrait mieux recouvrir vos armes avec du poison paralysant ou somnifère.

Ses coups deviendront plus féroces dans son assaut final, donc si vous ne gênez pas ses mouvements, des incidents inattendus pourraient survenir.

Le porteur de bouclier doit agir comme un leurre, et si l’archer ou l’avant-garde reçoit trop de dégâts et qu’ils sont dans une situation difficile, la personne en soutien doit penser à faire attention au prochain mouvement.

Les attaques du dragon sont extrêmement puissantes, mais il y a une grande chance de parer le premier. Pourtant, étant donné l’énorme force de ces coups, bloquer même l’un d’entre eux pourrait mettre votre vie en danger.

À ce stade, la difficulté de la bataille monte en flèche, alors vous devriez terminer la bataille avant cette étape. Seule une équipe d’aventuriers au-dessus du Rang S peut faire face à l’assaut d’un dragon de feu.

Tout était affreusement précis. C’était comme si l’auteur avait lu les pensées du dragon.

Se répétant tout le processus dans leur tête, Timis et son équipe avaient fait le chemin dans la forêt et s’étaient cachés, en attendant que le dragon arrive à destination.

Dès qu’il avait atterri, Timis avait chargé et avait frappé sa tête avec son bouclier.

« Eeei! »

« Grrrhhh... ! »

Le choc produisit un important son, et le dragon recula. Lia dégaina son épée et commença à effectuer un nouvel assaut, tandis que Timis réalisa le succès de son attaque.

« C’est la fin ! Aaah! » Avec suffisamment de confiance, la femme-bête avait frappé de toutes ses forces le corps sans défense du dragon de feu, percutant son armure d’écailles. Voyant que ses attaques étaient efficaces, elle avait poussé ses compétences à la limite et avait frappé avec son épée à plusieurs reprises comme si elle dansait.

« Je vais aussi aider ! Yaaah! » Timis visait le côté du dragon et le poignarda... mais elle ne pouvait pas percer ses écailles.

Faisant confiance aux paroles du livre, elle essaya alors de frapper de toutes ses forces la partie inférieure du corps de la bête.

« Ghaaawr ! »

Mais cette fois, c’était efficace et le dragon recula, donnant à McKinley une chance de lui tirer dessus à plusieurs reprises. Son travail était de continuer à tirer des flèches empoisonnées pour émousser les actions du dragon. Au début, elles avaient rebondi sur ses écailles, alors il avait visé les entailles que Lia ouvrait dans la chair du dragon.

« On peut gagner... si on continue comme ça... ! » Mais pendant que McKinley rechargeait, quelque chose d’inattendu était arrivé.

« Grraaaaaaa ! » Même s’il aurait dû être assommé, il avait essayé d’arrêter l’assaut des filles en battant des ailes, et cette fois-ci, c’était encore plus violemment qu’avant.

« Aaah! »

« Mademoiselle ! »

La pression du vent avait pris Timis au dépourvu, et maintenant que sa défense était grande ouverte, le dragon s’était retourné et avait balayé avec sa queue tout ce qui était à porter.

« GH ! » La réaction de Lia fut instantanée.

Elle avait frappé le sol avec ses pieds, réduisant d'un coup la distance entre elle et Timis, puis elle avait repoussé la chevalière... et avait encaissé l’attaque du dragon. Son flanc avait été labouré par les écailles, et l’instant suivant, la douleur s’était répandue dans tout son corps alors qu’elle était emportée au loin.

« Merde ! Comment cela a-t-il pu arriver ? » Perdant son calme, McKinley avait perdu son objectif de vue et avait raté sa cible.

Le dragon avait récupéré tous ses sens. Les flammes de la colère faisaient rage dans ses yeux, et ses écailles étaient devenues rouges. L’air autour de lui avait commencé à se déformer et scintiller à cause de l’extrême chaleur.

Les coups de bêtes étaient vraiment dévastateurs.

La douleur insupportable qui courait dans le corps de Lia en était la preuve.

En plantant son épée dans le sol, l’amazone avant réussit à se relever et à appuyer sur sa blessure, bien consciente qu’elle ne serait pas capable d’arrêter la prochaine attaque avec une seule main.

« Mademoiselle, courez... Laissez-moi ici... ! » cria Lia.

« Impossible ! Je peux parer l’un de ses coups ! Lia, tu dois courir ! » Cria Timis.

« GH... Vous ne pouvez pas ! Le dragon est maintenant dans une frénésie... son prochain coup sera beaucoup plus fort que ça... ! » déclara Lia.

« S’il vous plaît, pardonnez mon égoïsme, Lia. Mais je ne vous laisserai pas mourir ! » cria Timis.

À cause de la blessure, Lia ne pouvait pas arrêter Timis comme elle aurait voulu le faire.

Tout en brandissant son bouclier, Timis chargea la bête enragée.

Ils auraient pu gagner si les choses ne s’étaient pas passées comme ça.

Mais comme l’aurait fait une bête, le dragon se battait maintenant avec sa vie et celle de sa progéniture en jeu.

Mère... père... Pardonnez-moi, mais j’ai échoué...

« Ne vous rendez pas ainsi ! Avez-vous oublié ce qu’il y avait dans le livre ? »

« Nh ?! »

Une voix masculine résonna dans la tête de Timis. C’était une voix familière, mais elle ne savait pas à qui elle appartenait.

Dans son cœur qui avait déjà accepté la défaite, son esprit combatif réapparut.

Elle avait jeté sa lance et brandi son bouclier à deux mains, quand...

« Grraaaaaaa ! » Le rugissement féroce du dragon secoua la forêt. Tout le corps et l’âme de Timis furent secoués, mais elle avait continué à charger, tenant fermement son bouclier avec foi.

***

Ils pouvaient entendre le doux bruit de l’eau qui coulait.

Une lumière chaude les caressait, et la position du soleil dans le ciel suggérait qu’il était midi.

Cela ne fait pas longtemps depuis le début de l’opération.

Au début, tout s’était bien déroulé.

Le dragon avait fui, ils l’avaient pourchassé, l’avaient combattu..., puis, ils avaient été poussés dans un coin.

« GH... Lia ! McKinley ! » Timis avait appelé le nom de ses camarades après qu’elle eut sauté sur ses pieds, puis elle regarda autour d’elle.

Sur le sol se trouvaient sa lance et son bouclier... près d’eux, Lia, et pas loin, cachée dans un fourré, se trouvait McKinley, face cachée.

« Lia... Je suis tellement contente... Tellement heureuse que tu sois en vie..., » s’exclama Timis.

« Ma... demoiselle..., » murmura Lia.

Elle avait dû perdre une quantité considérable de sang, mais ses blessures étaient maintenant fermées.

Une capacité de régénération des femmes bêtes était remarquable, et toutes les blessures normales se refermaient relativement rapidement. Timis était tellement soulagée de voir que Lia était en sécurité, que des larmes de soulagement coulèrent sur ses joues.

« Les chevaliers ne devraient pas... pleurer devant tout le monde... Les militaires ne doivent pas... laisser transparaître leurs émotions..., » balbutia Lia.

« Oui... je sais, Lia... désolé... » La femme-bête avait faiblement souri face à ce que Timis venait de lui dire.

À l’instant d’après, le sang de Timis se figea dans ses veines.

Où était le dragon ? Elle avait lentement tourné la tête.

Son cœur avait presque cessé de battre à ce moment-là. Même si elle comprenait la situation, un mélange de soulagement et un sentiment inconnu enveloppaient sa poitrine.

Si le dragon se dirige vers le bord de la rivière et que vous lui infligez assez de dégâts, vous pouvez l’attraper dans un piège. C’est ce que le plan de Duke Solver avait dit.

Proche de la rivière se trouvait la « forêt des chasseurs ». Et là-dedans, vous trouviez de nombreux pièges qui avaient été laissés là.

Le dragon affaibli avait marché sur un piège de type « Fixation » et avait été pris dedans.

S’ils devaient le tuer, c’était maintenant la chance parfaite.

À la place, s’ils devaient le capturer, ils auraient dû lui renvoyer leurs flèches empoisonnées restantes. Quand le poison pénétrait dans la circulation sanguine, le dragon devrait ainsi tomber dans un profond sommeil pour se remettre de son effet.

Alors, a-t-il activé le piège... et McKinley a-t-il tiré... ? Non, c’est faux... C’est impossible...

En face d’elle se trouvait le dragon, endormi et lié par la magie.

Le bouclier de Timis ne présentait pas de fissures ou d’égratignures. Il était encore intact.

En outre, elle se sentait parfaitement bien, comme si elle n’avait reçu aucun coup.

Si McKinley avait terminé cela tout seul, pourquoi se coucherait-il face cachée dans un fourré ?

Peut-être que quelqu’un d’autre était autour d’eux ? Non, c’était impossible.

Mais elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que quelqu’un les avait aidés.

Elle avait regardé autour d’elle à la recherche d’une réponse, et...

« Un insecte lumineux... ? »

Il était sorti de son armure quand leur premier assaut était sur le point de commencer, et Lia l’avait rassurée en disant qu’ils vivaient dans la forêt.

« ... Ne me dis pas... »

Elle avait mis une main sur sa poitrine. La rune était-elle toujours là ?

Elle voulait le découvrir tout de suite, mais elle ne pouvait pas simplement enlever ses vêtements dans un tel endroit, alors elle avait pour l’instant abandonné l’idée.

Cette rune avait été dessinée sur sa poitrine pour les aider dans leur mission.

Et si cela s’activait au moment où ils allaient être vaincus ?

La forêt des chasseurs. Les flèches empoisonnées de McKinley ne se trouvaient nulle part.

La dernière charge de Timis..., Lia et elle-même étaient sauve.

Tout était étrange.

« Duke Solver... est vous... ? » Au moment où elle avait parlé à l’insecte lumineux, il avait disparu comme s’il n’avait été qu’une illusion.

Et ensuite, les sons de la forêt et de l’eau qui coulait l’avaient sorti de ses pensées.

Tout en étant encore confuse, Timis ramassa l’écaille du dragon qui s’était détachée lors de l’assaut de Lia et la plaça près de sa poitrine, pensant à quel point ce cadeau était précieux.

Et enfin, elle se souvint de ce qui était écrit dans la dernière partie du livre.

Pour que ce plan soit couronné de succès, le groupe ne devrait pas avoir plus de quatre membres. Essayer de combattre un dragon avec plus de quatre personnes le ferait cracher son souffle enflammé afin de réduire le nombre de ses ennemis, donc c’est plus sûr de le faire avec quatre personnes ou moins.

Mais je vous suggère fortement de faire appel à un quatrième membre si vous songez à combattre le dragon avec trois personnes.

Bien sûr, ce n’est qu’une opinion, alors n’hésitez pas à l’ignorer.

« ... Monsieur Queue... »

Peut-être que cela n’était pas lui, mais elle ne pouvait penser à personne d’autre.

Un sentiment semblable à l’admiration qu’elle éprouvait pour sa sœur aînée, mais un peu différente, avait fleuri dans le cœur immature de cette jeune chevalière inexpérimentée.

***

Chapitre 11 : Les genoux du Seigneur-Démon et les sœurs royales

Ma tête reposait sur quelque chose de doux.

Quelqu’un me caressait comme si cette personne me peignait les cheveux en produisant un doux contact.

C’était tellement agréable que je voulais me rendormir, mais je devais y résister.

« ... Je savais que tu allais poser la main sur moi pendant que je serais inconscient, ancien Seigneur-Démon, » dis-je.

Quand mes paupières purent enfin se soulever, j’avais vu les cheveux couleur de lin de l’elfe et son expression malicieuse.

J’avais deviné qu’elle avait pris le siège à côté du mien et qu’elle avait déplacé mon corps pour faire reposer ma tête sur ses genoux. On dirait que la douce sensation présente sous ma tête était les cuisses de Verlaine.

Elle souriait avec tendresse, mais un voile d’inquiétude assombrissait son visage alors qu’elle ouvrait la bouche. « Quelle honte... j’espérais que l’expédition durerait encore un peu plus longtemps. »

« ... Je devais m’en occuper, mais je suppose que tu le sais déjà. Combien de temps ai-je dormi ? Une heure ? » demandai-je.

« Non, pas tant que ça, » répondit Verlaine. « Tu étais en dehors de ton corps pendant un maximum d’une demi-heure. »

« Je vois. Dans ce cas, nous avons encore du temps avant d’ouvrir le bar, » dis-je.

J’avais essayé de me lever, mais le Seigneur-Démon avait attrapé mon épaule et m’avait ramené sur ses genoux.

« ... Puis-je me lever, s’il te plaît ? » demandai-je.

« Pourquoi ne pas nous reposer un peu plus ? » demanda Verlaine. « Je suis fatiguée à cause de notre emploi du temps quotidien. Si je ne me repose jamais, j’ai l’impression de vieillir plus vite. »

« Me fais-tu reposer sur tes genoux afin de ralentir ton vieillissement ? » demandai-je. « Tes jambes ne seront-elles pas engourdies ? »

« Penses-tu que je ne peux pas supporter ça ? » demanda Verlaine. « Ne suis-je pas l’ancien Seigneur-Démon ? »

En effet, elle l’était. Mais si la situation continuait, même un génie comme moi aurait réagi comme un homme.

« Comment était-ce ? » demanda Verlaine.

« De quoi est-ce que tu parles ? ... Je suppose qu’il est inutile de jouer à l’idiot avec toi, hein, » dis-je.

« Je suis celle qui a lancé la magie, alors je sais que quelque chose est arrivé, » répondit Verlaine. « Ne t’inquiète pas, je ne dirai rien à Timis ou à son groupe. S’ils remarquent quelque chose, ce serait à cause d’une erreur que tu auras faite. »

« Tout ira bien. Ils m’ont appelé “insecte lumineux.”, » dis-je. « Eh bien, c’était en fait mon apparence à ce moment-là. »

Les lèvres de Verlaine se plissèrent en un sourire.

« C’était sûrement ton avatar... mais je crois qu’ils n’imagineront jamais qu’il avait la force d’un aventurier de Rang SS là-dedans, » déclara Verlaine.

La rune que j’avais fait inscrire sur Timis par Verlaine avait servi à activer le sort d’invocation appelé « Petit Esprit ».

Il avait divisé ma puissance afin de créer un corps inférieur, que je l’avais formé pour prendre l’apparence d’un petit orbe de lumière.

Il serait quasi impossible de discerner la différence entre ça et un véritable insecte lumineux.

J’avais déplacé ma conscience vers le petit esprit, qui avait un score de cinq mille points et qui pouvait s’élever à vingt-cinq mille grâce à la magie curative et la magie de soutien. Avec lui, j’avais surveillé la progression de Timis et de son groupe.

Verlaine avait à nouveau commencé à parler. « On dirait que tout s’est bien déroulé. Allons-nous voir maintenant comment le dragon se porte ? »

« Non, laissons ça aux membres de notre guilde. J’ai déjà tout arrangé, » dis-je.

« Je vois... Tu as même pensé à les faire sauver Timis par nos membres si les choses allaient mal, n’est-ce pas ? » demanda Verlaine.

« Non, cela aurait été une mauvaise chose si c’était arrivé. Dans ce cas, tout aurait été fait pour rien, » dis-je.

Après avoir dit ça, j’avais essayé de me relever, et cette fois Verlaine ne m’avait pas arrêté.

Elle n’avait pas l’air satisfaite, mais nous ne pouvions pas rester comme ça pour toujours.

« ... Eh bien ! J’aurais dû endurer tout cela un peu plus longtemps. Seulement un peu plus, » dis-je.

« Je le savais... tu les protégeais, n’est-ce pas ? » déclara Verlaine. « Mais pourquoi as-tu l’air si déprimé ? Tout s’est passé comme prévu, non ? »

« Non, je n’aurais pas dû moi-même en finir avec le dragon, » répondis-je. « On m’a demandé de leur faire acquérir de l’expérience, alors ils auraient dû le faire par eux-mêmes. Au lieu de cela, j’ai fini la bataille pour eux, et ils vont uniquement prendre des mérites pour tout cela. »

Ils avaient encore une chance de victoire, et cela même si Timis devait être touchée par le dragon de feu, mais je ne pouvais pas supporter cette situation plus longtemps et j’étais intervenu juste avant que cela n’arrive. J’aurais dû attendre et endurer cette vision comme un véritable professionnel.

« Je vois... De toute façon, si tu n’avais pas amélioré leur résistance au feu, les filles auraient été brûlées à mort simplement en se tenant près du dragon de feu, et si la présence de McKinley n’était pas obscurcie par le sirop de grenade, le dragon l’aurait visé avant même le premier tir, » répondit Verlaine. « Le plan n’a-t-il pas bien fonctionné jusqu’à la fin ? »

L’air entourant le corps d’un dragon de feu était toujours brûlant, et pas seulement quand il devenait fou... Les filles pouvaient l’approcher seulement grâce aux noix grillées et au kotsuzake de salamandre qu’elles avaient consommée ici.

« De plus, si tu n’étais pas intervenu, ils seraient morts, non ? » demanda Verlaine. « Si l’on y réfléchit bien, ton intervention était essentielle. Maître, tu es une personne froide et un observateur pointu, mais il est naturel que certaines choses t’amènent à agir. »

« ... Quoi qu’il en soit, je veux trouver un moyen d’annuler les mouvements aléatoires d’un dragon de feu, » déclarai-je.

« Plus de recherches... ? » demanda Verlaine. « Le livre est-il encore incomplet même s’il contient autant d’informations ? C’est presque parfait, n’est-ce pas suffisant ? »

Si c’était parfait, je n’aurais pas eu à agir.

Pour satisfaire toute demande, je devais tout préparer.

Heureusement, j’avais prévu de garder en observation le dragon à partir de maintenant.

La clochette de l’entrée retentit.

Nous n’étions pas encore ouverts, mais un client était entré... et avait pris le siège à côté de moi.

Il portait un pardessus vert.

« Merci pour votre parrainage continu. Je viens de la compagnie Veltem. Je suis ici afin de livrer ce que vous avez demandé, » annonça la personne.

Verlaine avait apposé sa signature sur les reçus que l’homme avait mis sur la table. Son nom était Joyce Veltem, et il était mon fournisseur de boissons et de nourriture... ou plutôt, il s’agissait de son travail principal. Derrière cette façade, il était un marchand de biens rares qui n’étaient généralement pas vendus dans la capitale.

Joyce avait commandé du rhum et avait parlé avant d’en boire. Les gens ne buvaient généralement pas le matin, mais cela n’avait pas d’importance pour lui. « Monsieur, il y a quelque chose dont je voudrais vous parler. J’ai embauché un gestionnaire et ai commencé à préparer l’environnement. »

« Merci. Certains gars de confiance vont déplacer le dragon de feu et sa progéniture, » répondis-je. « Y a-t-il assez de nourriture pour eux ? »

« Oui. Je suis allé voir l’endroit et c’est vraiment très bien installé, » répondit-il. « Si joli que je commence à comprendre pourquoi ils ont choisi une forêt où les hommes vivent. »

« Je pense que les gens ont plus de raisons d’y aller comparer à un dragon de feu, » répondis-je. « Cette forêt ne devrait pas avoir quelque chose de si spécial que ça. »

« Je ne suis pas certain, » répondit-il. « De toute façon, vous avez vraiment bien pensé à tout. Un dragon de feu en pâturage dans une forêt protégée par les humains... c’est tout à fait un paysage improbable. »

En entendant cela, Verlaine avait écarquillé ses yeux pendant un moment. Elle avait compris de quoi nous parlions, mais elle avait continué la procédure pour acheter des marchandises sans émettre le moindre son.

« Les matériaux des dragons sont toujours demandés, mais ils sont trop chers. Une seule écaille vaut cinquante pièces d’or, et cela même s’il est facile de les ramasser quand elles sont remplacées par de nouvelles écailles, » déclara Joyce.

« Il n’y a pas de différence entre la valeur des anciennes et celle des nouvelles. Ou plutôt devrai-je dire que les anciennes sont encore meilleures, compte tenu de leur robustesse, » répondis-je.

Joyce avait bu du rhum avant de laisser échapper un soupir.

Il était le même genre de buveur que j’étais. Il avait un remarquable sens des affaires qui l’avait fait interagir en toute honnêteté avec ses clients. Voilà pourquoi il avait commenté avec moi le sujet de pâturage.

« En y pensant, une fois que les bébés dragons grandiront et entreront dans la saison de reproduction, les forêts comme la nôtre ne seront-elles pas bondées par eux ? » demanda-t-il.

« Ben ouais. Mais si vous apprivoisez un bébé dragon, celui-ci grandira et vous écoutera même après avoir atteint l’âge adulte, contrairement à un adulte déjà à la fleur de l’âge, » répondis-je.

« Oh, j’ai aussi entendu parler de ça, » répondit-il. « Les gens qui les élèvent s’appellent les maîtres des dragons. Avez-vous peut-être vous-même ce genre d’expérience ? »

« Je ne suis que le fils d’un fermier, mais je connais un maître des dragons, » répondis-je.

« Gh... Êtes-vous sérieux... ? Quelle est la profondeur de vos connexions...? » demanda-t-il.

« Après que le dragon aura été déplacé, j’irai moi aussi le voir, » répondis-je. « Il y a quelqu’un qui veut voir un bébé dragon. »

J’avais coupé court à la conversation. Joyce avala le rhum restant et haussa les épaules. Il laissa l’argent sur la table, prit l’un des reçus et marcha vers la porte. Avant de partir, il nous avait fait face et avait fait un important salut. C’était sa façon de faire.

***

Timis, suivi de Lia et McKinley, était entrée dans le bar quand le quart de nuit avait déjà commencé. Elle s’assura que personne ne la surveillait et montra à Verlaine l’écaille pendant que je buvais ma bière habituelle.

« Vous avez dit que vous prendrez soin du dragon... mais où l’amèneriez-vous ? » demanda Timis.

« Je ne peux pas vous donner les détails, mais nous ne le tuerons pas, » répondit Verlaine. « Nous allons le relocaliser et confirmer que l’expédition a été un succès. »

« B-Bien. Je suis sûre que les habitants qui vivent à proximité de la forêt pousseront maintenant un soupir de soulagement..., » déclara Timis.

Le comportement de Timis, Lia et McKinley était différent. Ils étaient un peu plus humbles, et même le visage du tireur d’élite était plus sérieux.

« En ce qui concerne le paiement, j’espère que cela ne sera pas trop élevé... mais peu importe le prix, je vous paierai d’une façon ou d’une autre, » déclara Timis. « Vous avez toute ma gratitude. Le fait de demander à cette guilde était le bon choix à faire. »

« Nous avons combattu le dragon, mais nous n’avons pas pu résister à sa fureur... Pourtant, il a été pris dans un piège qui avait été posé dans la forêt des chasseurs. Je ne sais pas comment c’est arrivé... mais..., » déclara Lia.

Du chagrin était évident dans les paroles de Lia, alors McKinley se rajouta dans la conversation. « Cette mission était hors de notre portée, mais vous nous avez aidés à la réaliser. Nous pensons que Duke Solver lui-même nous a protégés. »

Ils avaient bien dû penser que je n’étais qu’un insecte lumineux. Je ne m’attendais pas à être idolâtré comme ça.

Techniquement, je ne faisais que les surveiller... Je veux dire par là que j’avais aveuglé le dragon quand il avait attaqué, puis je l’avais frappé avec des balles magiques pour l’enfoncer dans le piège, et j’avais utilisé les flèches empoisonnées de McKinley afin de l’endormir.

Il était impossible pour eux de le découvrir. J’avais même pensé à effacer leur mémoire, mais cela aurait été excessif et inhumain même pour moi.

Ce qui m’avait sauvé, c’est que Queue était un nom fictif.

Ils ne pouvaient probablement pas suivre mes traces...

« J’ai une demande... Si vous me laissez voir Sire Duke Solver, je vous paierai avec tout ce que j’ai. Je veux le remercier personnellement pour tout ce qu’il a fait... ! »

... Ou alors c’était ce que je pensais.

Timis avait plaidé avec des yeux larmoyants, mais Verlaine n’avait pas tourné son regard dans ma direction. Je parie que c’était une démonstration de sa gentillesse.

« J’ai compris que j’avais encore un long chemin à parcourir, mais si je pouvais m’entraîner sous les ordres de Duke Solver... je pourrais devenir assez forte pour protéger Mademoiselle ! Je suis préparée à faire n’importe quoi tant que je peux le rencontrer ! » déclara Lia.

« S’il vous plaît, laissez-moi rejoindre votre guilde ! » demanda McKinley. « Même le simple fait de travailler ici serait bien ! »

Lia et McKinley... Je ne m’y attendais pas... Je ne pensais pas qu’ils aient reconnu les capacités de Duke Solver seulement à cause du livre qu’il avait écrit.

Ils avaient en eux un profond respect pour lui, qui avait accompli le même exploit avant eux.

Mais Duke Solver n’était nul autre moi.

Timis ressemblait à une jeune fille amoureuse dont l’admiration pour son amant allait devenir encore plus forte. Même un gars comme moi pouvait comprendre comment elle se sentirait si elle ne pouvait jamais le rencontrer.

« Je ne suis vivante que grâce à Sire Duke Solver, » déclara Timis. « Je devrais lui offrir personnellement la preuve de notre victoire... Il a conduit avec douceur une personne faible comme moi sur le chemin de la victoire... Donc, si possible, j’adorerais le rencontrer et... »

Verlaine avait souri avec douceur face à la demande de la chevalière.

« Madame Timis, si vous continuez à vous améliorer, le fait de devenir la vice-générale de l’armée ne sera plus qu’une question de temps. Je vais lui demander à apparaître devant vous quand cela arrivera, » déclara Verlaine.

« V-Vraiment... ? » demanda Timis.

« Oui, mais vous n’avez pas le droit de vous surmener pour cela, » répondit Verlaine. « Vous êtes encore jeune, et donc, il n’est pas nécessaire d’être si impatiente. Je suis sûre que même lui s’attend à vous voir plus mature et attendra patiemment ce moment pour venir vous voir. »

« Aaah... Sire Duke Solver... S’il m’attend... je deviendrai plus forte ! » Timis avait promis ça avec des yeux larmoyants.

Je devrais remercier Verlaine pour ça, mais je devais encore franchir une étape avant.

Ding dong~

La sonnette avait à nouveau retenti et deux personnages étaient entrés dans le bar. Il s’agissait de Mylarka et de Manarina.

Timis se tourna vers elles et remarqua tout de suite que sa sœur bien-aimée se tenait là.

« ... Pourquoi êtes-vous là, princesse Manarina...? » demanda Timis.

« Timis, ça fait longtemps. Sire Queue m’a dit que je pourrais vous rencontrer si je venais ici, » déclara Manarina.

« Queue... ? Qui est-ce ? » demanda Timis.

Pour que les sœurs se rencontrent, j’avais dit à Mylarka et à Manarina de venir... mais à cause de ça, j’étais sur le point de me faire découvrir.

« C’est cette personne. Il est mon bienfaiteur..., » déclara Manarina.

« Je vois... son nom est Queue. Je pensais qu’il était Duke Solver, mais je suppose que j’avais tort, » déclara Timis.

« Je-je vois... Alors c’est tout. Il est généreux, mais il n’est rien de plus qu’un ivrogne, » déclara Lia.

Je ne pouvais pas comprendre si Lia était vraiment forte ou très dense, mais grâce à elle j’avais été sauvé.

Alors qu’elle essayait de comprendre la situation, Mylarka regarda dans ma direction avec un regard soupçonneux.

« Gentil monsieur, nous offrira-t-on quelque chose à boire ? J’accepterais des suggestions, si vous en avez, » déclara Mylarka.

« Kh... B-Bien sûr. Je vais bien m’occuper de vous. Alors, pourquoi ne pas vous asseoir à cette table ? » demandai-je.

« Sire Queue... non, je comprends. Aujourd’hui, je vais profiter du temps avec ma sœur, » déclara Manarina.

Devinant mon humeur, Manarina avait amené sa sœur dans l’une des chambres qui possédait un rideau. Lia et McKinley s’étaient également assis à des tables différentes et avaient commencé à boire quelque chose pour se fondre avec les autres clients.

La femme-bête était heureuse que Timis puisse rencontrer sa sœur, et McKinley, même s’il buvait seul, affichait une expression de satisfaction. Il semblait sérieux au sujet de la proposition qu’il avait faite auparavant.

Verlaine me regarda pendant un moment alors qu’elle arrangeait les choses, et elle parla dès qu’elle eut un moment de repos. « Monsieur, vous devriez prendre certaines responsabilités pour que Timis montre son vrai moi. » Verlaine me parlait comme ça seulement dans ce genre de situation.

Je laissai tomber mon corps sur le comptoir, et la tasse encore remplie de bière trembla légèrement.

Je m’étais rendu face à mon destin.

« Adoré par les sœurs royales... Il ne faudra pas longtemps avant que vous ne contrôliez la capitale depuis l’ombre, Monsieur le Cinquième fantôme, » déclara Verlaine.

« Ce n’était pas mon intention... Je ne comprends pas comment les femmes pensent, » répondis-je.

« Dois-je vous apprendre à ce sujet ? » demanda Verlaine. « Peut-être que je vais écrire un livre intitulé “Comment comprendre les femmes”. »

« ... Quand j’aurais un peu de temps, j’aimerais lire ça, » dis-je.

Tandis que Verlaine riait avec joie de mes paroles, j’entendais les voix joyeuses de Timis et Manarina venir de leur pièce.

La vérité est que j’avais fait venir Mylarka pour une autre raison. Après avoir bu, elle aurait été de bonne humeur, donc je pourrais commencer à négocier pour une certaine chose... après tout, je lui avais demandé de venir avec moi alors que cela sera son jour de congé.

***

Le lendemain, j’avais amené Mylarka là où le dragon vivait.

Le gars que Joyce avait embauché était un vieil homme avec de l’expérience en tant que Maître des Dragons.

Le marchand ne le savait pas et l’avait recruté uniquement en raison de ses connaissances sur le sujet. Le vieil homme nous avait chaleureusement accueillis et nous avait guidés vers le nid du dragon.

Le dragon qui avait combattu Timis et son équipe n’était pas vigilant quant à ce qui se trouvait autour de lui, et il semblait très docile quand nous nous étions rapprochés de ses bébés.

« Les dragons de feu sont super adorables quand ils sont jeunes, alors je voulais que vous en voyiez un, » dis-je.

« Mmmh... Je vois. Je ne peux pas les considérer comme adorables, cependant..., » répondit Mylarka.

Au milieu de la grotte se trouvait un nid fait avec des branches d’arbres, et trois petits dragons, aussi grands qu’un bébé humain, criaient des « Piii » aigus.

L’un d’eux s’approcha en chancelant du bord avec son corps rond et maladroit, tombant devant les pieds de Mylarka avec un son sourd.

Une fois qu’il s’était remis sur ses pattes, il avait continué à pleurer et s’était accroché à la fille. On aurait dit que le bébé dragon voulait être choyé par elle.

« Oh, il vous apprécie beaucoup, jeune demoiselle. C’est même le plus prudent parmi les trois bébés, » déclara le vieil homme.

« Mais..., » répondit Mylarka.

« Tu l’as entendu, Mylarka... ? Mylarka ? » demandai-je.

Sans dire un mot, elle enlaça le bébé dragon et commença à le caresser.

« ... Super adorable... Je veux l’élever... Je ne peux pas croire que quelque chose de si mignon existe réellement... Oui, oui, qui est un gentil garçon ! » murmura Mylarka.

Les cris du dragon semblaient joyeux tandis que Mylarka se pâmait devant lui.

Elle aimait les animaux mignons, alors j’avais pensé à la laisser voir un bébé dragon, mais elle appréciait l’expérience bien plus que prévu.

« Hé... Je crois que tu m’imagines caressant pour notre enfant, Queue. Si tu le fais, je vais te tuer, » rugit Mylarka.

« Désolé, je me soucie de ma vie... attends ! Pourquoi es-tu si agressive maintenant ? » demandai-je.

« Tais-toi ! Oh non ! Mon chou, je suis désolée ! » déclara Mylarka. « Est-ce que je t’ai fait peur ? Tout est de la faute de ce méchant-là ! Viens, nous allons jouer ensemble ! »

Mylarka avait commencé à marcher vers l’autre côté de la grotte tout en parlant doucement au dragon. Les deux autres jeunes la suivirent aussi, pleurant de leurs voix aiguës.

Même si elle était en colère contre moi, elle n’agissait pas différemment d’une mère qui jouait joyeusement avec ses enfants.

La Mère-Dragon veillait sur ses bébés espiègles à une certaine distance, laissant échapper de temps à autre un doux grondement.

***

Chapitre 12 : Les nouvelles et la jeune prêtresse

Les membres du Verseau d’Argent étaient spécialisés dans la collecte d’informations.

Ils écoutaient attentivement toutes les rumeurs dans la ville et me les rapportaient tous.

Chacune des douze guildes d’aventuriers avait une sorte de département spécialisé sur le renseignement, à l’exception de la meilleure guilde, le Bélier Blanc. Ils n’avaient jamais accordé beaucoup d’importance à la collecte d’informations. Car après tout, quand on y pense, une guilde pourrait être gérable même en acceptant simplement les demandes.

Pourtant, pour obtenir les emplois les plus rentables, vous deviez les rechercher.

Aider les agriculteurs avec leurs champs quand ils en avaient besoin, collecter des matériaux spécifiques, protéger les marchands, vaincre les monstres qui n’étaient pas particulièrement forts, chercher des animaux perdus comme des chats ou des chiens, ou pour ceux qui fuyaient la maison... Rester en contact avec les autres guildes pour contrôler le flux des requêtes était tout simplement une perte d’énergie.

Il aurait été préférable de rechercher ce qui n’avait jamais été demandé à une guilde.

Voilà pourquoi les membres de mon service de renseignement avaient recueilli jour et nuit des informations.

L’un d’entre eux m’avait rapporté ce qu’il avait entendu pendant que je buvais pendant le quart de nuit. « Ver, apporte-moi une bière froide, s’il te plaît ! Aujourd’hui, je ne me suis pas arrêté une seconde ! Je suis trempée de sueur ! »

« Bon travail, Leeza ! » répondit la barmaid.

Leeza, la fille assise à deux sièges de moi, buvait joyeusement sa bière. Elle avait d’abord travaillé comme femme de chambre dans un magasin vendant des informations de la Douzième Rue, mais je l’avais embauchée dès que j’avais remarqué son potentiel. Quand nous nous étions rencontrés, elle avait onze ans, et maintenant seize. Sa coiffure courte laissait apparaître son merveilleux sourire et sa personnalité enjouée.

La boucle d’oreille à son oreille droite était un objet magique qui améliorait sa capacité auditive.

Chaque rassembleur d’informations dans ma guilde avait l’un de ces accessoires, que j’avais personnellement conçu.

Ils portaient également des pardessus sur leur armure de cuir pour éviter de se faire remarquer dans le bar. Après tout, tous les clients les portaient.

« Ah, puis-je m’asseoir à côté de vous ? » demanda-t-elle.

« Bien sûr, le siège n’est pas pris, » répondis-je.

« Hehehe, merci. Vous ne changez jamais, Maître... Je veux dire, monsieur, » déclara Leeza.

Le « Maître » était intentionnel, n’est-ce pas ? Alors que je pensais à ça, je buvais ma bière avec un sourire ironique.

Lorsque Verlaine avait apporté les collations, et du fromage frais que nous venions de recevoir, j’avais décidé de manger.

Leeza m’avait imité joyeusement après que je l’eus encouragée à le faire. Elle aimait les produits laitiers, et ce fromage de mouton-nuage était délicieux. Ce n’était pas dur comme les moutons communs et il avait également une saveur délicate.

« Ver, écoute-moi ! Aujourd’hui..., » elle semblait faire du commérage, mais elle utilisait en fait un code secret pour me dire ce qu’elle avait découvert.

Le Prince de Vinceburg, après que Manarina ait rompu leurs fiançailles, n’avait pas reculé et avait continué à proposer aux autres princesses, mais il avait été rejeté par la troisième princesse en raison de son jeune âge.

Un noble qui utilisait des chevaliers pour ses demandes personnelles avait perdu son droit de le faire et avait demandé de l’aide aux guildes.

La demande consistait à la purification du manoir qu’il avait acheté à un faible prix en raison des fantômes qui le hantaient. Puisque tout le monde avait rejeté sa demande, le noble avait quitté sa nouvelle résidence sans y penser.

Je ne m’intéressais pas vraiment à ces choses, mais si Manarina et Timis avaient une autre sœur, je voulais la protéger des mains diaboliques du Prince de Vinceburg. Je suppose qu’il voulait tellement rejoindre la famille royale qu’il avait même essayé de courtiser si l’autre était une si jeune fille.

« Oh, et la princesse Manarina a eu une autre proposition du roi, mais elle l’a clairement rejetée. On dirait qu’elle a été influencée par une certaine personne. »

« Vraiment ? Comme c’est intéressant. Peut-être que le monsieur là-bas a quelque chose à voir avec ça, » Commenta Verlaine, gloussant.

Puisqu’une princesse pouvait être intronisée, elle n’était pas obligée d’épouser quelqu’un. Mais si elle choisissait de faire vœu de chasteté pour moi... Je veux dire par là que cela ne serait-il pas nécessaire de m’interroger quand à tout ça ?

J’étais sûr que si j’osais exprimer mes pensées, Mylarka m’aurait regardé avec dégoût la prochaine fois que nous nous reverrons.

« Oh, c’est vrai ! As-tu entendu, charmante épouse ? » déclara Leeza.

« Épouse... ? Est-ce que tu parles de moi ? Je veux épouser quelqu’un que j’aime, mais es-tu en train d’essayer de me remonter le moral ? Comme c’est gentil de ta part, Leeza, » répondit Verlaine.

« Je suis juste portée par l’ambiance, mais je suis contente que tu l’aies appréciée ! » répondit Leeza.

J’étais sur le point de dire « Ne l’appelle pas une épouse », mais j’avais avalé à la place un peu de bière.

« Oh, sais-tu à propos de l’orphelinat de la banlieue du District de l’Église dans la Capitale Royale, non ? » demanda Leeza. « On dit que son directeur a arrêté de travailler depuis un moment et que les enfants s’inquiètent de plus en plus. L’aîné agit maintenant comme relais, mais il semblerait qu’il y a pas mal de problèmes. »

« C’est très malheureux... Est-ce que le directeur a contracté une sorte de maladie ? » demanda Verlaine.

« Oui, mais on ne sait rien à propos de cette maladie. Son nom est Yuphila Manafroze, et son état ne cesse de s’aggraver jour après jour, » répondit Leeza.

Yuphila Manafroze. Cela faisait longtemps que je n’avais pas entendu ce nom.

Dans mon esprit flottait l’image d’une prêtresse avec des vêtements trop grands pour elle et un doux, et gentil sourire.

« Puisque mon nom est assez long, je vous prie de m’appeler avec une abréviation », avait-elle demandé avant notre expédition. C’est pourquoi Aileen avait créé son nom favori en ne prenant que les premières syllabes de son nom complet : « Yuma ».

Exactement. Elle était le Requiem sans Voix, l’une de mes anciennes camarades de l’expédition pour vaincre le Seigneur-Démon.

Mylarka ne savait pas qu’elle était tombée malade, alors son état actuel devait être quelque chose qui avait commencé récemment.

« Son père est l’archevêque de l’église ! On dirait qu’il ne peut pas demander publiquement l’aide d’une guilde, mais il ferait n’importe quoi pour guérir l’état de sa fille. Actuellement, sa mère s’occupe d’elle jour et nuit. » Puisque Leeza était au courant pour moi et Yuma, elle avait fourni des détails sur le sujet. « C’est tout pour aujourd’hui. Je suis super fatiguée, donc je veux prendre un long sommeil quand je serais rentrée à la maison. »

« Je te remercie pour ton travail acharné. J’espère te revoir bientôt. Passe une excellente nuit, » déclarai-je.

La jeune fille agita nonchalamment sa main vers moi et Verlaine, puis quitta le bar avec des jambes un peu instables et se dirigea vers le dortoir de la guilde, qui était un immeuble d’appartements proche que j’avais acheté.

De mon côté, je vivais au deuxième étage du bar, avec l’ancienne Seigneur-Démon.

« Avez-vous entendu, monsieur ? Leeza m’a appelé comme étant une épouse. Peut-être que travailler comme barmaid me fait ressembler à une jeune... qu’est-ce que vous en pensez ? » demanda Verlaine.

Je ne savais pas comment être barmaid et ressembler à une jeune épouse pouvait être apparenté, mais elle avait l’air heureuse à propos de ça. Je me demandais si son objectif avait changé, étant donné que dernièrement elle n’avait pas insisté sur ce genre de chose. Mais tant qu’elle ne m’avait pas agressée, tout allait bien.

Je ne savais pas précisément ce qui allait bien entre les deux rôles, mais je me l’étais dit pour moi-même.

***

Le lendemain, j’étais sorti par la porte arrière pendant la pause de l’après-midi et je m’étais dirigé vers sa place.

Chacune des douze rues de la capitale s’étendait du nord au sud avec leurs caractéristiques particulières et était numérotée à partir de l’ouest.

La Première Rue jouxtait le Quartier des Églises. Comme il aurait fallu du temps pour y arriver à pied, j’avais fait faire un tour dans l’une des calèches taxis. Les sièges des plus récents étaient extrêmement bons, donc rester assis dessus pendant un certain temps ne m’avait même pas fait mal au dos.

Au bout d’une heure, lorsque ma destination était proche, j’avais placé un pardessus sur moi et j’étais descendu de là. Grâce à la subvention du pays pour les calèches qui acceptaient des passagers, j’avais payé la faible somme de cinq pièces d’argent pour le trajet.

Exactement comme son nom l’indiquait, le District des Églises d’Albein était rempli d’institutions religieuses. Les gens allaient visiter les temples tandis que les prêtres et les moines pratiquaient leurs arts de manière ascétique.

Jetant un coup d’œil sur les bâtiments environnants, j’avais finalement atteint l’orphelinat qu’Yuma avait géré jusqu’à maintenant en tant que directrice.

Près de lui se trouvait le temple où elle menait ses devoirs de prêtresse et étudiait pour devenir archevêque. Elle était tellement occupée qu’il n’aurait pas été étrange pour une personne normale de s’évanouir à cause de la fatigue.

Quand j’avais approché des lieux, j’avais vu des enfants jouer dans la cour de l’orphelinat, puis une jeune prêtresse qui les surveillait m’avait appelée. « Bonjour Monsieur. Y a-t-il quelque chose que je peux faire pour vous aider ? »

« J’aimerais parler avec votre directrice. Est-il possible de la rencontrer ? » demandai-je.

« La directrice est au temple, mais ces derniers temps elle ne se sent pas bien, alors une rencontre est sûrement impossible..., » répondit-elle.

Yuma n’était pas assez âgée pour boire, et c’était également interdit aux prêtres, alors elle ne pouvait pas venir dans ma guilde.

C’était pourquoi la seule façon de la voir était de lui rendre visite, mais aller si loin pour venir me voir alors qu’elle était ainsi lui était impossible, et pour moi, c’était vraiment une gêne. Mais aujourd’hui était une exception.

Je venais après tout d’accepter une demande que je pouvais faire. Tout en ayant pensé à une excuse, je m’étais préparé pour le pire.

« Yuma... je suis un vieil ami de Yuphila. Mylarka Iris et moi nous nous connaissons, » dis-je.

« Mylarka Iris... ? Êtes-vous un ami de la Douce Catastrophe... ? » demanda la prêtresse.

La prêtresse était surprise d’entendre cela. Je me demandais si elle m’aurait laissée faire ça, étant donné l’autorité que portait le nom de Mylarka. Il semblerait que la fille en face de moi, qui avait l’air plus âgée qu’Yuma, la connaissait aussi.

« A-Alors je vais demander à Mademoiselle Yuphila. Veuillez attendre ici, » déclara la prêtresse et elle se dirigea vers le temple à un rythme rapide.

Après un petit moment, elle était revenue et m’avait guidée pour rencontrer la directrice comme demandé.

***

En entrant dans le bâtiment, j’avais posé les yeux sur le dos d’une prêtresse qui priait devant l’icône qu’elle adorait.

Alors que la lumière qui descendait de la lucarne l’éclairait doucement, elle continua à invoquer silencieusement la grâce de sa divinité.

Je me demandais si je pouvais me rapprocher, et alors que je rassemblais mon courage pour marcher vers elle, elle se tourna vers moi.

Elle portait le même sourire dont je me souvenais, et leva l’une de ses mains pour me saluer.

« Ça fait longtemps, Queue. Je savais que tu allais venir me voir. Je l’ai vu dans une vision récente, » déclara Yuma.

« Incroyable... Quel genre de vision était-ce ? » demandai-je.

« Je ne peux pas révéler les voies de Dieu si facilement. Cela doit rester un secret, » répondit-elle.

Elle avait mis son index devant sa bouche. Ses vêtements blancs avaient montré ses courbes délicates. Malgré sa petite taille, elle avait grandi et elle était maintenant assez grande pour ne plus être appelée une enfant.

« As-tu perdu du poids ? Je ne t’ai pas vue depuis un moment, mais je vois ça, » déclarai-je.

« Tu as entendu que j’étais malade et tu es donc venu me voir, n’est-ce pas ? » demanda Yuma.

« Bien, je suppose que oui... eh bien, je ne savais pas si un messager pouvait convenir pour ça, » déclarai-je.

« Merci beaucoup, Queue. Tu as toujours été plein de bonté, même si tu prétends être indifférent vis-à-vis des autres, » déclara Yuma.

« Si je n’étais pas intéressé par les autres, je n’aurais pas créé de guilde. Je ne veux pas être le centre de l’attention, c’est tout, » répondis-je.

Elle m’avait regardé en s’amusant ce que j’avais dit. Elle avait entendu ces mots plusieurs fois auparavant.

Pourtant, même si elle avait l’air bien au premier coup d’œil, il était évident qu’elle était malade.

Comment pourrais-je l’expliquer... Elle était trop pure maintenant. La Yuma que je connaissais n’était pas comme ça.

« L’orphelinat va-t-il bien ? » demandai-je.

« Oui. Nous ne pouvons pas nous permettre de prendre plus de monde, mais j’ai parlé avec mon père et j’ai proposé d’en construire un autre, » répondit Yuma.

« ... As-tu le temps pour ça ? Si tu continues à te négliger ainsi, ton état s’aggravera, » déclarai-je.

Si je devais la décrire, elle était comme un requiem. Mais de toute façon, je ne pouvais pas sentir la sérénité dans ses mots.

Après tout le temps où nous ne nous étions pas vus, la première chose qu’elle m’aurait dite aurait été de réconforter mon âme ou quelque chose, étant donné mon âme fétiche.

C’était étrange.

Ou plutôt, c’était normal pour une personne normale, mais pas pour Yuma.

« Travailler et étudier sont vraiment importants, mais tu devrais prendre le temps de te reposer de temps en temps, » dis-je.

« Tu as raison... mais la capitale est en paix maintenant. Les événements qui secouent mon âme arrivent à peine, » répondit-elle avec une voix découragée.

Je le savais... La raison pour laquelle elle se sentait si mal était qu’elle ne pouvait pas apporter la paix à l’âme de quelqu’un.

« Pourrais-tu... avoir apporté la paix à toute âme depuis ton retour dans la capitale ? » demandai-je.

« Q-Qu’est-ce que cela a à voir avec tout ça... ? » demanda Yuma.

« Regarde-toi ! » dis-je. « Tu as toujours dit que tu voulais faire cela, mais tu ne l’as pas mentionné une seule fois depuis que nous avons commencé à parler. Tu n’as dit que des choses normales jusqu’ici, et ce n’est pas ainsi que tu es normalement. »

« La capitale est en paix maintenant, et personne ne m’a demandé de prendre soin des âmes des défunts, alors contrairement au temps où nous voyagions ensemble... Je n’avais aucune chance de... d’a-apporter... beaucoup de paix à..., » comme elle prononçait ces derniers mots avec hésitation, incapables de continuer à les dire, la lumière avait disparu de ses yeux. « Mais... Aah... Maintenant, je me souviens... Je voulais consoler ton âme... même pour un peu... »

« A-Attends, je ne suis pas encore mort. Comment peux-tu apporter la paix à mon âme pendant que je suis vivant ? » demandai-je.

« Je peux forcer son chemin vers le Royaume de Dieu... Ascension... Un sort de magie sacrée..., » déclara-t-elle.

« Oh, mon Dieu... Y-Yuma, calme-toi, » dis-je. « Je vais te laisser consoler mon âme autant que tu voudras une fois que je sois mort. Disons que c’est un peu difficile pour moi maintenant... »

J’avais laissé échapper un soupir de soulagement quand la lumière avait commencé à refluer dans ses yeux stagnants.

Après l’avoir attentivement regardée, je vis qu’elle avait vraiment perdu beaucoup de poids. Je m’étais assis sur l’un des sacs de cuir éparpillés autour, qui était utilisé comme sièges pour le temple, et j’avais montré à Yuma une bouteille et un verre que j’avais apporté ici.

« Est-ce que manger ou boire dans le temple est interdit ? Devrions-nous aller ailleurs ? » demandai-je.

« Non, cela ne l’est pas... Mais pourquoi fais-tu tout ça pour moi...? » demanda-t-elle.

« Eh bien, buvons pour commencer ça. Ne t’inquiète pas, il n’y a pas d’alcool dedans, » dis-je.

J’avais débouché la bouteille et avais versé une partie du liquide dans le verre.

La « Goutte de la Sérénité » était un médicament elfique fabriqué en mélangeant l’essence d’herbes médicinales très rares.

Yuma s’était assise à côté de moi et avait pris le verre, puis elle commença à siroter le médicament.

« Mmh... ça a l’air dense et amer, mais c’est vraiment doux, » déclara-t-elle.

« La saveur est importante même pour les médicaments. Penses-y comme une potion de haut niveau, » dis-je.

« Je vois... Je sens que mon corps se réchauffe et que mes sentiments se calment en moi..., » déclara-t-elle.

Elle était si fatiguée que les effets de la médecine avaient tout de suite commencé à agir.

Cela avait également stimulé l’appétit, alors je lui avais donné du jus de fruits et un sandwich que même un prêtre ou un moine, qui ne pouvait pas manger de viande, pouvait consommer.

« Si tu as faim, prends ces choses-là. Mon bar est très populaire pour ses repas légers, » dis-je.

« ... Aussi honteux que ce soit, j’ai maintenant vraiment très faim. Merci beaucoup, » dit-elle.

Elle prit le sandwich, le déballa de son papier et mordit dedans. Regarder une fille qui mangeait peut-être dérangeant pour elle, alors j’avais déplacé mon regard vers l’icône religieuse du temple.

« C’est nostalgique... n’est-ce pas, Queue ? » demanda-t-elle. « Je me souviens que tu préparais quelque chose comme ça pendant notre expédition, même si ça a meilleur goût maintenant. »

« Je suis content de l’entendre. Tu devrais manger correctement, car là, tu es trop mince, » dis-je.

« Tu as raison. Pourtant, c’est une honte que nous ne mangeons pas ensemble, » déclara-t-elle.

Je ne pouvais pas ignorer son invitation. J’avais sorti le sandwich que je pensais manger plus tard et j’avais mordu devant son regard amusé.

***

La situation n’était pas bonne. Elle était encore faible en raison du manque de nourriture.

Si je ne pouvais pas lui faire évacuer son stress, le problème n’allait pas être résolu.

Mais que faire ?

J’aurais dû lui faire satisfaire le désir qu’elle avait accumulé.

Cette Yuma douce et gracieuse n’était pas mal du tout, mais je voulais qu’elle retourne à son état habituel.

Quand j’avais finalement trouvé la réponse, j’avais commencé à planifier le prochain mouvement.

***

Chapitre 13 : La maison hantée et le couple marié

Après avoir quitté le temple, je m’étais dirigé vers le nord.

Ma destination était une zone en haut d’une colline où plusieurs manoirs appartenant à des nobles avaient été construits au fil des années. Cet endroit offrait une belle vue sur la capitale qui s’étendait plus bas.

Selon les paroles de Leeza, l’un de ses manoirs était hanté. Il était entouré de hauts murs, mais à part sa vieillesse, il n’était pas délabré et n’était pas différent des autres bâtisses environnantes, du moins, depuis l’extérieur.

Le premier étage avait huit chambres, une cuisine et une salle de bain, tandis que le second avait douze autres chambres. La maison d’un noble abritait habituellement de dix à vingt personnes, mais ce manoir était exceptionnel même par rapport aux manoirs classiques.

Son propriétaire précédent l’avait acheté pour un prix vraiment bon marché, pour seulement un millier de pièces d’or, puis il avait fui dès la première semaine. Ce n’était pas la première fois que cela arrivait.

L’agent immobilier avait perçu à la fois un pourcentage et le paiement pour le manoir, s’assurant ainsi de profiter de la situation. La « mauvaise » partie de cette affaire était que le bâtiment était vendu au vingtième de son prix réel, afin d’attirer l’attention des acheteurs potentiels et de pouvoir gagner encore plus d’argent.

Mais même si les propriétaires pouvaient simplement le démolir et en construire un nouveau à partir de rien, pourquoi l’avaient-ils simplement rendu et n’avaient-ils jamais approché de nouveau de la bâtisse ? Cela pouvait-il être en raison d’une sensation étrange qu’ils avaient eue une fois dans le bâtiment ?

« Je ne peux pas sentir la moindre présence..., » j’avais murmuré cela sans penser à quoi que ce soit.

Les fantômes ne dérangeaient normalement pas les résidents d’une maison en pleine journée, il y avait même des chances d’apparaître à midi, mais je ne pouvais pas sentir le moindre mal présent dans le manoir.

Les personnes normales ne connaissaient pas la différence entre les spectres et les esprits, donc même quand elles étaient face avec un esprit non agressif, elles choisiraient probablement de s’enfuir.

Peut-être que des problèmes avaient commencé à apparaître seulement la nuit quand les apparitions des fantômes étaient plus fréquentes et quand d’autres créatures pouvaient apparaître ?

Dans ce cas, j’aurais dû appeler celui qui était chargé de collecter des informations dans ce domaine et demander s’il en avait entendu parler. Je n’aurais pas pensé à devoir enquêter par moi-même, mais je devais réfléchir à la façon de convaincre le père d’Yuma, l’archevêque, de venir jusqu’à notre guilde afin de faire une demande officielle.

***

Deux jours plus tard...

J’avais ordonné à mes membres de guilde de faire savoir aux gens proches de l’archevêque la fiabilité de ma guilde, le Verseau d’Argent, le tout pour que le père d’Yuma vienne le vérifier par lui-même. Les choses avaient alors vite bougé.

Peu après l’ouverture de l’équipe de nuit, un homme et une femme étaient entrés dans le bar et s’étaient approchés du comptoir. Leurs pardessus correspondaient à la bonne couleur pour la journée : l’ocre.

Je n’avais choisi que des couleurs unies, car elles n’attiraient pas beaucoup d’attention.

L’homme portait une capuche, mais en regardant son visage, il devait avoir la cinquantaine. Il avait une barbe blanche, une peau sombre et des yeux perçants. Comparée à sa carrure massive, la femme à côté de lui ressemblait plus à une enfant. Elle semblait être dans la vingtaine et elle affichait une aura de douceur et de délicatesse.

Ce qui était émis d’elle était la même aura qu’Yuma... Si elles étaient liées par le sang, alors peut-être qu’elle était...

« ... Je voudrais avoir du lait ? Mais je voudrais que cela soit quelque chose que je peux boire uniquement ici, » déclara-t-il.

« Certainement, » déclara la barmaid. « Le mélange spécial de la maison est-il correct pour vous ? »

« J’ai demandé à boire, mais en vérité, je ne peux pas boire de boissons alcoolisées. Si possible, je voudrais quelque chose sans alcool, mais que cela soit juste pour moi, » déclara-t-il.

« Très bien. Je vous l’amène tout de suite, » déclara Verlaine.

« Mademoiselle, mon mari et moi ne pouvons pas boire d’alcool en raison de la nature de notre métier... Nous nous excusons pour la gêne occasionnée, » déclara la femme.

Ils étaient mariés et elle ressemblait à Yuma, alors...

« Je m’appelle Grenadine Manafroze. Je suis venu ici pour discuter de certaines circonstances concernant ma fille, » commença l’homme.

« Je m’appelle Fenna, et je suis la femme de Grenadine. Nous avons entendu dire que nous pourrions trouver dans cet endroit la solution au problème de notre fille, » déclara la femme.

Je ne m’attendais pas à ce que les deux parents d’Yuma viennent jusqu’ici. Ils devaient être très inquiets quant à son état.

Pourtant, le corps musclé de son père ressemblait plus à celui d’un combattant qu’à celui d’un moine. Dieu merci, Yuma avait pris plus de choses du côté de sa mère.

« Vous connaissiez tous les mots-clés, nous pouvons donc maintenant parler de votre requête, » déclara la barmaid. « Votre fille est Mademoiselle Yuphila, l’un des héros qui a participé à l’expédition pour vaincre le Seigneur-Démon, ai-je raison ? »

« Tout à fait. Elle est née avec le pouvoir inné de guider les âmes perdues. Ses compétences en purification sont sans égal dans ce pays... non, dans le monde, » déclara son père.

« Elle a toujours été une enfant qui ne nous a jamais dérangés, » continua sa mère. « Elle a même grandement amélioré ses capacités de gestion depuis qu’elle est devenue directrice de l’orphelinat... mais dernièrement, elle n’a plus d’appétit et soupire fréquemment. Quand j’ai commencé à m’inquiéter pour elle, elle s’est tout à coup évanouie... Le médecin ne comprend pas l’origine de son malaise, et a suggéré de commencer une sorte de traitement médical... »

Fenna avait déplacé un mouchoir jusqu’à ses yeux larmoyants. Grenadine était évidemment aussi inquiet que sa femme et avala un peu du « jus de poire sacré mélangé à de l’eau de source » que Verlaine lui avait rapidement apportée.

Comme son nom l’indiquait, il avait été fabriqué avec des poires récoltées dans une montagne sacrée, où l’eau de source avait également été recueillie, et le tout se trouvait dans les terres sacrées d’Albein. Il s’agissait de la boisson parfaite pour les personnes religieuses.

« Elle a dit qu’elle est satisfaite de son travail, et ses efforts pour me succéder sont admirables, » déclara Grenadine. « La seule cause possible pour son malaise doit être une maladie que les médecins ne peuvent déceler... »

« Je vous en supplie... S’il vous plaît... Faites quelque chose pour Yuphila... Sauvez notre enfant..., » Fenna avait essayé de contrôler ses sanglots tout en suppliant Verlaine.

Afin de chercher un remède pour leur fille, s’accrochant au dernier fil d’espoir, ils avaient essayé de demander de l’aide à une guilde minable comme la mienne. Nous ne pouvions pas les décevoir.

Je voulais qu’Yuma se sente mieux sans lui laisser savoir que j’étais impliquée.

Une partie de mon objectif était la même que celle de ses parents.

« Soyez rassuré. Nous comprendrons ce qui arrive à votre fille et nous trouverons un remède, » déclara Verlaine.

« ... Merci beaucoup. De penser que la bénédiction de notre Dieu, qui nous a accordé la magie de guérison, n’a pas pu aider notre propre enfant est... très vexant. Nous ne voulons pas la perdre..., » sanglota Fenna.

Ne vous inquiétez pas, madame, ce n’est pas si grave. Votre fille reviendra bientôt en pleine forme.

Je devais juste l’amener jusqu’à ce manoir hanté.

Pour être franc, je l’avais déjà acheté pour mille pièces d’or. Personne ne s’était plaint de ça, et une fois qu’il aura été purifié, il deviendra une autre de mes nombreuses propriétés.

Je devais seulement obliger ses parents à la forcer à prendre un peu de repos. À mon avis, ce n’était pas une mauvaise affaire.

« Nous comprenons votre inquiétude quant à votre fille, mais vous n’avez pas à vous inquiéter maintenant. Pourriez-vous lui demander de prendre quelques jours de vacances ? » demanda Verlaine.

« Arg... Elle est vraiment diligente quand à son travail, donc je ne sais pas si nous pouvons la convaincre de rester longtemps loin des enfants..., » répondit Grenadine.

« Je vais moi-même lui dire, mon chéri. Mais où voulez-vous l’amener...? » demanda Fenna.

« C’est quelque part dans la capitale, et ce n’est pas loin d’ici. Si cela peut vous aider à vous sentir mieux, nous pouvons organiser un moyen de rester en contact avec elle, » déclara Verlaine.

Tout était vrai, mais si nous avions précisé qu’elle devrait séjourner dans un manoir hanté, cela ne serait pas un détail rassurant pour eux. Si nous trouvions des fantômes, j’étais sûr qu’elle serait immédiatement revenue à son état habituel.

Une attitude plus adaptée au Requiem sans Voix que je connaissais serait ainsi de retour.

Elle pourrait ainsi laisser ses capacités de purification tant réfrénée exploser sans retenue.

En tant que paiement anticipé, ils avaient seulement dû payer les frais de logement d’Yuma dans mon manoir.

Je n’étais pas sûr du type de récompense que nous pourrions demander, alors nous avions décidé de reporter le choix et d’y réfléchir plus attentivement à un autre moment.

Après leur départ, j’avais fait venir Aileen et Mylarka afin qu’elles prennent place au comptoir.

Je leur avais demandé de boire toute seule avant ça afin que Verlaine puisse parler avec le couple sans être dérangé.

« Je vois... la condition mentale et physique d’Yuma est aussi mauvaise que ça, hein. Elle allait bien la dernière fois que je l’ai vue, même si son visage avait l’air un peu plus aminci, » déclara Mylarka.

« Alors... vas-tu demander notre aide ? » demanda Aileen.

« Tout à fait, » dis-je. « Notre demande est de passer quelques jours avec elle à un certain endroit. »

« Passer quelques jours ensemble... ? Yuma, Aileen et moi ? » demanda Mylarka.

« Oh, je vois ! Par exemple, quand je suis fatiguée après avoir trop travaillé et que j’ai besoin de me reposer, je vais dans une source d’eau chaude, » déclara Aileen. « Maintenant qu’elle est fatiguée, nous devrions faire de même et essayer de la faire se détendre, n’est-ce pas ? Super, je suis d’accord de le faire ! Plus d’alcool, s’il te plaît ! »

Aileen était de bonne humeur et avait demandé un nouveau verre. Pendant ce temps, je buvais de la bière et grignotais des « haricots de sagesse rôtis ». Je voulais laisser les filles faire le reste, mais...

Mylarka se leva et plaça sa main sur mon épaule avant de demander. « Monsieur le Soûlard, qu’est-ce que c’est que ce visage qui indique “ce ne sont pas mes affaires” ? »

« Je-Je suis suis pas... Mamzelle, ce que je veux plutôt dire, c’est que faire la fête avec vos amies semble plutôt amusant. Alors, ne faites pas attention à moi et profitez de vos vacances entre filles... »

« Hein... ? Oh, tu fais donc semblant maintenant d’être un client. Dans ce cas, Monsieur, je voudrais que tu te souviennes que tu peux boire seul quand tu le veux, mais parfois, cela ne te ferait pas de mal un petit changement de rythme, » répliqua Mylarka.

« R-Rien me fait me sentir plus à l’aise qu’en étant à cet endroit, » répondis-je.

« Wôw, ai-je touché un point sensible ? Ne sois pas comme ça. Nous te souhaitons la bienvenue dans notre groupe avec les bras grands ouverts, mais je suppose que ce n’est pas comme si tu t’en souciais. Hahaha ☆, » déclara Mylarka.

C’était plus ou moins une invitation normale, mais je devais garder mon apparence calme même avec la main de Mylarka sur mon épaule.

« Je pense que tu devrais nous en dire plus sur ces vacances quand le bar se fermera... tu ne crois pas, Monsieur le Soûlard ? » demanda Mylarka.

« Je vais expliquer les détails plus tard. Bien sûr, mon Maître sera présent, donc vous n’avez pas à vous inquiéter. Profitez de vos boissons, » déclara Verlaine alors qu’elle plaçait un verre rempli devant Mylarka.

Il semblait que mes boissons mélangées étaient ses préférées, même si elle ne l’avait jamais dit ouvertement.

« Hmm... qu’est-ce que c’est bon !! » murmura-t-elle.

« Mylarka, ce sera la première fois que nous serons en vacances ensemble ! Je suis super excitée ! » s’exclama Aileen.

« ... Tu as raison, » répondit Mylarka. « Il aurait mieux valu en faire une juste après notre expédition, mais ce n’est pas un mauvais moment de le faire maintenant... »

La destination de leurs vacances dont elles parlaient était un manoir hanté, mais elles n’avaient rien à craindre.

Ou plutôt, j’aurais dû être inquiet si aucun fantôme ne devait apparaître en ces lieux. Le fait d’envoyé Yuma seule était probablement un mauvais choix, alors j’avais demandé à ses amies les plus puissantes de la suivre, mais comment cela se passera-t-il ?

Cela aurait été un problème si elles détruisaient le manoir, alors je devrais les surveiller depuis l’ombre.

Un insecte de lumière se cacherait bien dans ce genre de bâtiment, et je voulais croire qu’elles n’écraseraient pas une créature aussi inoffensive. Pourtant, si elles découvraient qu’il y avait un intrus dans leurs vacances ne comprenant que des filles... elles pourraient très certainement décider de me tuer. Si elles n’avaient pas encore appris à contrôler leur immense pouvoir, j’étais le seul à pouvoir les gérer correctement sans qu’une catastrophe frappe la capitale.

« Attendez, nous n’irons donc pas aux sources d’eau chaude, mais dans un manoir sur la colline au nord-est d’ici... ? Oh... Est-ce qu’il y a au moins une grande salle de bain ? » demanda Aileen. « Combien d’alcool y aura-t-il à disposition là-bas ? »

« ... Il y a quelque chose de louche dans tout ça, mais passons. Nous avons la responsabilité d’aider une amie dans le besoin, » déclara Mylarka en me regardant avec un regard soupçonneux.

Au lieu de leur répondre, j’avais tranquillement avalé ma bière froide.

***

Chapitre 14 : Les vacances des trois héros et le majordome masqué

Après avoir fermé le bar, j’avais expliqué le plan à Mylarka et Aileen.

Ou plutôt, je leur avais demandé de trouver un moyen de faire se détendre Yuma dans mon nouveau manoir.

« Y a-t-il quelque chose d’étrange dans cet endroit ? Amener Yuma là-bas est..., » déclara Aileen.

« J’ai compris. Il y a un fantôme ou un autre truc dans le genre, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Belle supposition, les filles. Le Maître n’a même pas mentionné ce fait, » Verlaine avait utilisé son ton de Seigneur-Démon, mais les autres y étaient déjà habituées.

Elles savaient que sa véritable nature ne convenait pas vraiment à être une servante.

« Je comprends le plan, mais... pourquoi n’y es-tu pas allé une nuit avant nous avec elle ? » demanda Mylarka.

« Parce que ce serait sans signification. Nous devons lui faire faire tout le scénario, » déclarai-je.

« Attends un peu. Pourquoi cela la ferait-il se sentir mieux ? » demanda Aileen.

« Eh bien, Yuma dit toujours qu’elle veut réconforter les âmes, tu t’en souviens ? » déclara Mylarka. « Je suis sûre que c’est parce qu’il y a quelque chose qu’elle peut exorciser dans ce manoir. »

Mylarka, la professeur de génie, avait facilement vu à travers mon plan sans faille.

Si nous devions rester seuls là-bas, cela aurait pu sembler suspect, et faire face à ses parents serait également devenu gênant.

« Oh, alors elle va utiliser ses pouvoirs ? Dans ce cas, cela veut dire qu’une âme errante réside vraiment là-dedans !? Woah, c’est super excitant ! » déclara Aileen.

« Aileen, tu es forte, mais tu ne peux pas affronter ce genre de choses, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Et toi, Mylarka ? » demanda Aileen. « Ne vas-tu pas paniquer et détruire le manoir ? »

« Je ne peux pas faire face à des événements surprenants, alors n’essayez pas de me faire peur, s’il vous plaît, » répondit Mylarka. « Pourtant, si quelque chose comme ça arrivait, j’essayerais de m’arrêter avant d’endommager quelque chose... à propos de quoi ris-tu, Queue ? »

« Rien ! Je me rappelais juste cette fois où nous avons traversé une caverne remplie de morts-vivants, » répondis-je. « Quand ce spectre est sorti du sol... »

« N-Non... arrête-toi tout de suite, » déclara Mylarka. « Son contact était froid et dégoûtant, et il volait mon énergie vitale, n’est-ce pas ? »

Les spectres étaient des monstres de rang intermédiaire, même parmi les morts-vivants, mais grâce à leur corps spirituel, ils pouvaient traverser le sol et les murs.

Quand il était apparu sous les pieds de Mylarka, elle avait commencé à crier et m’avait étreint avec force. Aileen n’avait pas eu peur et avait même dit que c’était cool et agréable à toucher, mais la Douce Catastrophe avait été assez effrayée.

Ainsi, le fait de lui demander de passer du temps dans une maison hantée m’avait fait me sentir coupable.

« Mon Maître ne semble pas approuver sa propre présence lors de vacances réservées aux filles, » déclara Verlaine.

« Je... ne peux pas croire ce mec, » répondit Mylarka. « Ne te lave pas les mains de ce problème. Ton refus ne fait qu’aggraver mon conflit intérieur... »

« Et aussi, si nous n’avons pas Queue avec nous, pouvoir manger quelque chose de comestible sera également assez difficile, » rajouta Aileen.

« Je ne suis pas votre cuisinier... D’accord, laissez-moi être plus clair, » déclarai-je. « Je veux aider Yuma à évacuer son stress, mais je ne veux pas qu’elle me découvre. »

« Tu n’as pas besoin de faire ça. Viens tout simplement avec nous, » Mylarka s’était opposée à mes dires sans ménagement.

Comment le sujet avait-il changé pour en arriver au fait que je devais être avec elles... ?

« Que dirais-tu d’utiliser un déguisement ? » demanda Verlaine. « Je suis sûr que le Maître peut changer au moins sa voix. »

« Oh, peut-il faire ça ? Bon, mais n’essayes pas de tromper Yuma, » insista la fille blonde.

Si j’avais essayé d’utiliser un insecte lumineux, elles auraient pu tout découvrir, et même savoir où je me trouvais. Cela ne pourrait-il pas rester un secret entre nous ?

« Mylarka, sais-tu pourquoi il est si déterminé à ne pas être découvert ? » demanda Aileen.

« Parce qu’il ne peut pas gérer les louanges, » répondit Mylarka. « Ce n’est pas comme si Il ne voulait pas être le Centre de l’Attention, c’est juste qu’il est affecté par le syndrome de ne pas vouloir qu’on le félicite. »

« Je pensais à une manière appropriée d’exprimer la personnalité du Maître, mais c’est plutôt correct, » déclara Verlaine.

« La chose amusante est qu’il est heureux quand les gens le félicitent, » déclara Mylarka. « N’est-il pas adorable ? »

« Tellement adorable qu’on ne peut s’empêcher de l’aimer. Bien qu’il ne veut pas me laisser faire la moindre chose, » déclara Verlaine.

« Euhh... Q-Qu’est-ce que tu veux dire par là, Verlaine ? » demanda Mylarka. « Comment la plupart des adultes se font-ils plaisir les uns avec les autres ? »

Je voulais leur demander de partir tout de suite puisque le bar était fermé, mais j’avais noyé ma frustration dans l’alcool et j’avais écouté cette torture dans mon coin. Je n’avais pas l’intention d’exagérer, mais si j’avais cessé de boire pendant une seconde, je me serais senti encore plus mal.

◆◇◆

Quelques jours plus tard, Yuma avait accepté de prendre des vacances et j’avais demandé à Mylarka et Aileen d’aller la chercher.

Moi et quelques membres de la guilde étions allés au manoir le matin afin de préparer un bon accueil pour nos invités, mais dès que nous étions entrés, nous avions tous remarqué que quelque chose ne tournait pas rond.

« Maître, personne n’a mis les pieds dans cette maison pendant des semaines, non ? Est-ce que l’agent immobilier a envoyé quelqu’un pour nettoyer le manoir ? » demanda un jeune homme qui avait remarqué la grande propreté du manoir. D’autre part, deux filles étaient venues avec nous.

« Je n’ai jamais entendu parler d’un homme de ménage ou de quelqu’un qui est venu ici récemment, » répondis-je.

« Il semble que cet endroit ait une histoire intéressante, et j’ai deviné que les agents immobiliers ont triché avec beaucoup de personnes... voulez-vous enquêter sur ça... ? » demanda l’une des filles.

« Ne sautez pas aux conclusions. Même si cela devrait être une maison hantée, je ne peux ressentir aucune autre présence autre que nous, » répondis-je.

J’étais allé vérifier la salle à manger et la cuisine, mais rien ne semblait suspect dans ces deux pièces.

La cave froide avait des ingrédients encore utilisables... J’avais essayé de mieux les examiner, mais ils étaient parfaitement normaux et bien conservés. Pourtant, si cela avait été des choses laissées par le propriétaire précédent, je n’avais pas vraiment envie de les manger.

« Les fantômes peuvent apparaître à tout moment, mais il est plus probable de les voir la nuit, » déclara le jeune homme. « Oh, Maître, j’ai fini de vérifier les chambres ! »

« Super, bien joué, » répondis-je. « Je ne savais pas qu’il y avait si peu à faire, alors désolé de vous avoir demandé de venir. Vous pouvez retourner à votre travail. »

« Il n’y a pas de quoi ! Ça faisait longtemps que nous n’avons pas pu parler comme ça, alors je suis content de pouvoir venir ! Merci beaucoup ! » déclara-t-il.

« Merci beaucoup ! » déclarèrent mes assistantes à l’unisson.

Même si nous avions à peu près le même âge, ils étaient tous des membres que j’avais recrutés et entraînés, donc chaque fois que nous nous revoyions, nous nous traitions toujours comme au bon vieux temps.

Il s’agissait des aventuriers de Rang B que j’avais entraînés pour l’expédition après que le dragon avait attaqué la forêt de Belfon il y a quelques années. Ils étaient maintenant des aventuriers de Rang A et formaient un groupe indépendant qui effectuait mes demandes quand c’était nécessaire.

Juste en les effectuant, les membres de ma guilde pouvaient gagner beaucoup d’argent.

Les affaires étaient variables, donc ils avaient souvent échangé leurs récompenses avec des pierres précieuses afin de les stocker dans une banque. Comme leur valeur ne pouvait pas baisser facilement, quand il y avait peu de demandes et que les prix augmentaient, il était possible de les utiliser comme substitut.

J’avais déjà estimé que l’économie du pays devrait rester stable pendant encore dix ans, donc tout allait bien tant qu’une guerre n’éclatait pas.

◆◇◆

Mylarka, Aileen et Yuma étaient arrivées au manoir dans la soirée.

Je portais un costume de majordome et les attendais toutes les trois devant le manoir, et quand nous étions face à face...

« Qu’est-ce qu’il y a avec ce masque ? Êtes-vous sérieux ? » demanda Mylarka.

« Mademoiselle Mylarka, je ne suis pas autorisé à vous montrer mon véritable visage, mais s’il vous plaît, n’y pensez pas trop, » avais-je déclaré.

Afin de me déguiser, j’avais choisi de cacher mon visage, de m’habiller correctement et de changer ma voix. Étant donné que ce manoir avait l’air assez luxueux, il n’aurait pas été étrange pour un majordome d’être présent ici.

« Wôw, c’est cool ! Qu... Je veux dire, Monsieur le Majordome, prenez bien soin de nous, » déclara Aileen. « Avez-vous préparé assez de l’alcool délicieux pour nous ? »

« Absolument. J’ai également préparé d’autres boissons pour ceux qui ne pourraient pas apprécier l’alcool comme vous, Mademoiselle, » répondis-je.

« C’est un soulagement d’entendre cela, » répondit Yuma. « Je ne peux pas boire de boissons alcoolisées en raison de ma doctrine. Je ne peux en consommer que lorsqu’elle est utilisée pour assaisonner les aliments. »

Les trois filles portaient des vêtements décontractés.

Yuma portait normalement tout le temps sa tenue de prêtresse, alors la voir comme ça était rafraîchissant.

J’avais essayé de changer grandement ma voix ainsi que mon discours pour être plus celui d’un majordome expérimenté, mais je me demandais si elle m’aurait reconnu...

« Êtes-vous responsable de la gestion de ce manoir ? C’est un plaisir d’être à vos soins, » déclara Yuma.

« Le plaisir est pour moi, Mademoiselle. Mon nom est Sebas Dian, » déclarai-je.

« Sebas Dian ? Je m’appelle Yuphila Manafroze. »

Aileen semblait vouloir dire quelque chose, mais j’avais fait semblant de ne pas la voir.

Pendant ce temps, Mylarka me foudroyait du regard, mais maintenant que nous nous étions présentés, je devais garder ma façade de majordome.

« Merci d’avoir choisi de prendre vos vacances avec Mademoiselle Mylarka, » déclarai-je.

« Eh bien, traitez-nous bien. Yuphila, cet homme sait vraiment comment être hospitalier, donc si tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas à le lui demander, » déclara Mylarka.

« Wôw, vraiment !? » s’exclama Aileen. « À ce propos, j’aimerais bien avoir plus tard un massage sur mes épaules et mes jambes. Le fait de le demander à un étranger est embarrassant, mais je suppose qu’il n’y a pas besoin de se retenir dans un tel cas ! Je veux me sentir totalement ressuscité ~. »

Aileen n’avait pas dit cela avec un double sens, mais même si je me déguisais en majordome, j’étais quand même un homme. Pourrais-je vraiment accepter le bonheur de masser une fille ?

« ... Si Aileen en veut vraiment un, je suppose que je devrais moi aussi essayer. Je suis sûre que notre majordome n’essayera pas de toucher un endroit étrange, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Je n’oserais jamais vous faire la moindre chose désobligeante. Je le jure sur le Dieu d’Albein, » déclarai-je.

« Je connais quelqu’un de très proche de notre Dieu. Il veille toujours sur nous avec une douceur infinie, » déclara Yuma.

Yuma rassembla ses mains et les porta à sa poitrine, exactement comme quand elle priait, et avec ce simple geste, je sentis l’air autour de nous s’éclaircir au fur et à mesure que la malveillance diminuait. J’avais ainsi pu confirmer que cet endroit était vraiment hanté.

« Je sens une âme qui étouffe... des restes d’une volonté malveillante... C’est faible, mais... non..., » murmura Yuma.

« Yuma, ça va ? Dis-moi s’il y a quelque chose d’étrange, » déclara Mylarka ce qui fit qu’Yuma se mit à sourire avec tendresse.

« Ce n’est pas inquiétant, mais je sens un esprit inoffensif flâner ici. Il devrait être réprimé et guidé vers les cieux, » répondit Yuma.

... Comme attendu de sa part. Je ne pouvais sentir aucune trace de fantômes ici, mais elle avait immédiatement confirmé qu’il y avait quelque chose dans le manoir. Il y a quelques instants, elle avait même dit qu’il avait des « restes d’une volonté malveillante », donc il n’y avait pas seulement un esprit inoffensif présent en ces lieux.

« Pourrais-je en premier vous montrer le manoir ? » demandai-je. « Vous pourrez ensuite vous détendre et vous reposer jusqu’à l’heure du souper. »

Je m’étais incliné respectueusement, puis j’avais ouvert la porte. Quand elles avaient franchi la grande entrée, elles avaient fait entendre leurs voix.

« Wôw, c’est énorme ! Si ma famille voyait cela, ils l’auraient comparé aux Anciennes Grottes ! » Aileen semblait ravie du spectacle.

« J’ai entendu dire que la tribu des esprits utilise cette forme de discours. Je pense que c’est encore plus grand que ça..., » déclara Mylarka.

« J’adore les greniers. Pourrais-je rester là-bas ? » demanda Yuma, qui aimait les greniers et les caves parce que les esprits avaient tendance à apparaître dans ce genre de lieux. J’avais déjà essayé de les vérifier avant, mais je n’avais rien trouvé de suspect.

Pourtant, si c’était elle, elle pourrait probablement trouver quelque chose.

« Ce manoir a aussi un grenier, mais je suggère fortement que vous partagiez la même chambre pour ce soir, » déclarai-je.

« Je vois... Mais puis-je regarder dans n’importe quel endroit du manoir plus tard ? » demanda Yuma.

« Très certainement, n’hésitez pas à explorer autant que vous voulez, » répondis-je. « Il y a aussi une salle remplie de diverses œuvres d’art. »

Il s’agissait de la deuxième pièce au deuxième étage. Les œuvres d’art avaient probablement été laissées par les précédents propriétaires, et maintenant je pouvais comprendre pourquoi ils avaient rapidement fui.

« Yuma, tu as l’air un peu mieux maintenant, mais ne te surmène pas, d’accord ? » déclara Mylarka.

« Oui. Mais ne t’en fais pas, Mylarka, » répondit Yuma.

« Visitons le manoir avec Sebas. Puis, prenons-nous un bain ensemble plus tard ? » demanda Mylarka. « Nous sommes après tout en vacances. »

« Gh... Euh... je-je suis toujours... en quelque sorte... sous..., » déclara Yuma.

« Ne t’inquiète pas, tu as encore quatorze ans, Yuma. À l’époque, j’étais aussi..., » déclara Mylarka.

Deux ans auparavant, Mylarka n’était pas pire que l’actuelle Yuma.

Pourtant, tout le monde avait sa propre période de croissance. Je pensais que ce n’était pas quelque chose à propos de quoi les personnes devraient trop s’inquiéter.

« ... J’ai oublié que vous étiez ici. Sebas, oubliez ce que vous venez d’entendre, » déclara Mylarka.

« Tout de suite, Mademoiselle Mylarka, » répondis-je.

« Yuma, ne t’inquiète pas pour ça et allons-y ensemble ! » déclara Aileen. « Cela fait longtemps, alors pourquoi ne pas profiter de ces moments ? »

« Je-je suppose... que tu as raison, » répondit Yuma. « Merci pour l’invitation. »

Les trois filles dans la même salle de bain, hein ? Compte tenu de sa taille, cela ne serait pas un problème. En outre, j’étais un majordome. Rester sous le même toit que trois filles qui se baignaient n’était pas quelque chose qui aurait pu m’influencer vers le côté obscur.

Ce que je désirais était d’effectuer le service d’hébergement ultime.

◆◇◆

Après avoir fini de les faire visiter les lieux, j’avais essayé d’aller préparer le souper, mais...

« Sebas, où allez-vous ? Avez-vous oublié la demande d’Aileen ? » demanda Mylarka.

« Euh... Je-Je ne l’ai pas oublier. Pardonnez-moi pour ma grossièreté, Mademoiselle, » dis-je.

La chambre d’amis était divisée en une chambre à coucher et un salon. Dans ce dernier se trouvaient une grande table et des chaises. J’avais apporté à Aileen et à Mylarka de délicieux amuse-gueules ainsi que du thé aux feuilles ondulées, et pour Yuma, j’avais apporté du jus de poire sacré mélangé à de l’eau de source que j’avais également donné à ses parents.

« D’accord... Je serai entre vos mains, Sebas, » Aileen avait détendu son corps après m’avoir dit cela.

Il était temps de commencer.

En y réfléchissant, je leur avais déjà fait des massages même au cours de notre expédition, comme quand nous avions passé la nuit dans une auberge et qu’elles étaient mortes de fatigue. Pendant que je me demandais si elles s’en souvenaient encore, j’avais placé mes mains sur ses épaules et j’avais commencé à faire une pression.

« Nnnh~ » Aileen se mit à gémir sous l’effet du massage.

« ... Aileen, tu gémis, » murmurai-je.

« Oh, ai-je fait ça ? Désolée, je veux dire... Q-Queu... Sebas... Non..., » déclara Aileen.

Quand j’avais entendu le début de mon prénom, le sang s’était glacé dans mes veines. C’était trop risqué d’arrêter maintenant, alors j’avais dédié mon âme et mon corps à cette prestation. Je devais la faire se détendre jusqu’à l’heure du repas.

« J’ai honte de vous demander ça, mais effectuer ce massage serait beaucoup plus facile si vous vous couchez sur le ventre, Mademoiselle, » dis-je.

« J-Je vois... dans ce cas, je vais laisser ici ma boisson, » déclara Aileen.

« E-Eh bien... Sebas est un vrai majordome, alors il ne fera rien de bizarre..., » déclara Mylarka.

« Je ne ferais jamais quelque chose comme ça. Je le jure sur le Dieu d’Albein, » déclarai-je.

Mylarka avait dit « il ne fera rien de bizarre » avec un accent particulier.

J’avais deviné qu’il s’agissait d’une menace.

Après avoir répondu que rien n’arriverait, j’avais invité la plus forte artiste martiale de la capitale à aller dans la chambre à coucher. C’était vrai qu’un homme masqué était suspect, mais en prenant cela à part, je n’étais pas vraiment louche.

« Je-Je... suis une prêtresse, je ne peux pas laisser un homme me toucher... M-Mon cœur n’est toujours pas..., » déclara Yuma.

« Yuma, ne t’inquiète pas pour ça ! Sebas est..., » commença Aileen.

« S’il te plaît, Aileen, vas-y maintenant. Sebas doit également préparer notre dîner après ça, » déclara Mylarka.

Je m’étais retenu de dire. « Alors, laissez-moi partir maintenant ! » et j’étais rentré dans la chambre à coucher.

J’avais renouvelé ma résolution devant la fille allongée sur le ventre.

Si des fantômes apparaissaient la nuit, ce n’était pas mauvais de les faire se détendre maintenant. Afin de les endormir, je devais me transformer en un innocent expert en massage.

***

Chapitre 15 : Les massages et la fille du grenier

J’étais le cinquième membre présent dans l’expédition afin d’exterminer le Seigneur-Démon.

En surveillant mes camarades, j’avais dû faire face à de nombreux problèmes.

L’un d’entre eux était que même si j’accompagnais probablement les personnes les plus puissantes du monde, leurs jeunes corps ne pouvaient pas supporter le dur voyage, et donc, nous avions dû prendre quelques pauses pour les laisser se reposer.

À l’époque, Yuma avait neuf ans, et Mylarka avait onze ans. Aucune d’elles n’était habituée à marcher longtemps, donc je devais souvent les porter sur mes épaules.

Si leurs jambes étaient si douloureuses qu’elles ne pouvaient plus bouger le lendemain, le groupe aurait été considérablement affaibli, alors, comme je doutais de mon score d’aventurier, j’avais fini par m’occuper des conditions de chacun d’eux.

Cody était beaucoup plus robuste que les deux autres, au point que nous avions commencé à plaisanter à ce sujet.

« Cody le répulsif du froid », c’était ainsi que nous l’avions surnommé.

Le corps d’Aileen était si fort qu’elle n’aurait pas perdu même face à une armée d’hommes. Elle m’avait donné le privilège de l’appeler la « fille d’acier », même si je n’avais jamais vraiment commencé à utiliser cet alias.

En tout cas, afin de garder mes camarades dans leurs meilleures conditions physiques et mentales, j’avais dû polir beaucoup de compétences.

Le résultat était un mélange de Magie Curative, de Magie de Soutiens et d’autres techniques tels que le massage et l’acuponcture.

« Aaah... Nnnh... Queue, tu es si compétent... Ça fait un moment depuis que tu n’es pas allé si profondément..., » murmura Aileen.

« On dirait que les effets de ma magie ont atteint ton noyau... mais s’il te plaît, évite de faire des commentaires. De plus, je m’appelle Sebas, » déclarai-je.

« M-Mais... le fait de prononcer ton véritable nom me fait me sentir plus à l’aise, » répondit-elle.

« Oh ! Eh bien, ce n’est pas un problème tant que les autres ne l’ont pas entendu. Je vais essayer de te faire plaisir, puisque tu acceptes toujours les demandes difficiles. Veux-tu être massée quelque part en particulier ? » demandai-je.

« ... Non, je ne sais pas vraiment... peut-être mes bras ? » demanda Aileen.

« Ça aurait été plus facile si tu avais une requête particulière, » déclarai-je.

« J-J’ai essayé de dire la première chose qui m’a traversé l’esprit ! » répondit-elle. « Je sais que tu n’essaieras pas de faire quelque chose d’étrange ! »

Elle venait de dire qu’elle me faisait confiance, tout comme l’avait dit Mylarka avant ça.

Au début, les muscles de son dos jusqu’à ses hanches étaient raides, mais elle se détendit lentement, et était maintenant sans défense.

J’avais allumé de l’encens afin d’amplifier l’effet relaxant, pensant qu’il aurait mieux valu la laisser dormir. J’avais dû utiliser un outil, car je ne connaissais aucune technique pour reproduire le même effet.

« ... Euh... Queue, ce n’est pas comme si je ne te voyais pas comme un homme..., » déclara Aileen.

« Merci de vous inquiéter de ça, Mademoiselle. Je vais passer après ça à vos bras, » dis-je sur un ton formel.

« Cela sonne de façon inattendue comme venant d’un majordome. Cette façon de parler te convient, » dit-elle.

« D’où vient cette “façon inattendue”... ? Bien que je suppose que ce n’est pas le bon moment pour se plaindre, » dis-je.

Aileen portait une simple robe une pièce, et non pas ses vêtements habituels d’artiste martiale. Ses manches étaient courtes, donc elles ne dérangeaient pas mon massage. J’avais placé mes mains sur ses épaules, puis j’avais ajusté son débit sanguin, et lentement j’avais fait se détendre ses bras.

« Nhah... D-Désolée, je ne voulais pas me plaindre... Je suppose que je suis plus raide que prévu..., » dit-elle.

« Vous avez fait de votre mieux jusqu’ici, mais vous avez accumulé beaucoup de stress sans vous en apercevoir, » dis-je. « Vous devriez vous reposer comme ça de temps en temps. »

« M-Merci... Hmmm... mais si tu faittttt... Çaaaaa...! Ah, ici ! Aaaahh...! » s’exclama-t-elle.

« Je ne fais que des choses tout à fait normales. S’il vous plaît, essayez de garder le contrôle de vos réactions, » dis-je.

« M-Mais, tu es si... si bon... Qu-Q-uand tu me masses les bras, je me sens si biennnn... ! » répondit-elle.

« J’effectue un traitement médical, c’est pourquoi ça fait tant de bien, » dis-je. « Ça ferait mal si je n’utilisais pas la magie, mais je n’ai pas besoin d’utiliser beaucoup de force avec cette méthode. »

« Je-je vois... Ça fait du bien à cause de la magie... Tu es trop sérieux pour quelque chose comme ça... » dit-elle.

J’avais gardé le « je suis toujours sérieux » pour moi-même, et j’avais fini le massage sur ses bras. Ensuite, j’avais tendu les mains vers les muscles raides de son dos.

En baissant les yeux, j’avais regardé les fesses d’Aileen. On disait que les grandes hanches étaient idéales pour un accouchement en toute sécurité, et les siennes étaient exactement comme ça.

Bien que soudainement, le visage de ses parents avait surgi dans ma tête.

« Aaah~ ! J’ai l’impression de fondre encore ~ ! Ceci est un sentiment addictif ~ ! » s’exclama-t-elle.

« Il est préférable de laisser circuler la magie dans le corps en massant les hanches, » dis-je.

« Je-je ne sais pas ce que c’est, mais j’ai envie... un tourbillon chaud entre ma taille et mes hanches..., » murmura-t-elle.

« Je ne vais plus en verser en vous, mais je voulais que vous l’essayiez. De toute façon, vous avez de très belles jambes... Comment avez-vous pu acquérir vos muscles de façon si parfaite ? » demandai-je, jouant mon rôle de majordome.

« O-Oh ! Mon Dieu ! Il me fait des compliments... Je-je... ne peux plus résister... Hnnn... ! » dit-elle.

Je ne pouvais pas comprendre si c’était une bonne ou une mauvaise chose. Je pourrais m’arrêter là si elle le voulait, et puisqu’elle était maintenant trop détendue, elle ne pouvait plus gémir et chaque fois que j’utilisais de la magie, son corps se contractait. Ce n’était pas volontaire.

Lorsque les muscles recevaient directement de la magie curative, ils se contractaient avant la guérison.

J’étais ensuite descendu de ses cuisses à ses mollets, et elle avait perdu connaissance pendant que je massais ses pieds. La courbure que représentait la partie inférieure de la silhouette de son corps correspondait parfaitement à celle d’une artiste martiale, et on disait que c’était quelque chose de très agréable de contempler de telles jambes, mais j’avais rejeté toutes ses pensées, je m’étais essuyé le front et je m’étais ressaisi.

Après avoir fini, j’avais dit à Mylarka d’entrer.

« ... Comment Aileen, qui n’était pas particulièrement fatiguée, pourrait-elle s’endormir lors d’un massage ? » demanda Mylarka.

« Je l’ai aidée à se détendre autant que possible. S’il vous plaît, couchez-vous sur ce lit, Mademoiselle, » dis-je.

« N-Ne dis pas lit. C’est lubrique quand tu le dis, » déclara Mylarka.

Il y avait beaucoup de questions que je voulais poser en tant que majordome, comme « Que pourriez-vous imaginer qui pourrait se produire sur ce lit ? », mais je m’étais souvenu qu’Yuma était l’invitée spéciale, donc je devais mettre fin rapidement au massage de Mylarka.

« ... Je me souviens que tu n’as massé que mes jambes la dernière fois... mais as-tu massé tout le corps d’Aileen ? » demanda-t-elle.

« Tout à fait, » répondis-je. « Je l’ai détendue et j’ai fait disparaître la fatigue de ses muscles en utilisant la Magie Curative. »

« J-Je vois..., » dit-elle. « Je suppose qu’elle t’a autorisé à masser l’arrière de son corps, non ? Cependant, je ne comprends pas pourquoi elle est maintenant de face. »

« Exactement, » dis-je. « Pourtant, si vous avez une demande pour ce massage, je vais l’accomplir au mieux de mes capacités. »

« ... Traite-moi comme Aileen, s’il te plaît. Mais commence par mes pieds. Cela va m’aider à me relaxer, » dit-elle.

Elle s’était assise sur le lit et remonta sa jupe en faisant attention de ne pas me laisser voir ce qu’il y avait en dessous. J’avais ensuite enlevé ses bottes, comme je l’avais déjà fait dans le passé.

De retour dans notre voyage, elle ne portait rien sous ses bottes, mais maintenant, elle portait des collants noirs. C’était seulement une autre confirmation de combien elle avait grandi au cours de ces cinq années. Il s’agissait seulement d’une petite partie de la noblesse qui les portait, mais en tant que professeur de l’académie de magie, elle pouvait engager une couturière personnelle. Les collants blancs faits de chanvre étaient courants, alors que ceux qu’elle portait étaient faits de soies noires provenant de vers à soie. Même si je pouvais comprendre leur matière à partir d’une simple touche, je n’avais jamais vu de collants comme ceux-là.

« ... Q-Quoi, devrais-je aussi enlever mes collants ? » demanda-t-elle. « Être pieds nus est embarrassant... »

« Non, ils ne sont pas un problème, » dis-je. « Commençons le massage. Avec toute cette marche, je suis sûre que maintenant, vous devez être fatiguée. »

« Une distance comme ça n’est pas..., » commença-t-elle.

« Ces bottes sont un nouvel achat, n’est-ce pas ? » demandai-je. « Êtes-vous déjà habituée à elles ? »

« E-Eh bien, c’est..., » commença-t-elle.

Alors que je tenais son pied, j’avais appuyé mes doigts sur la plante de ses pieds. J’avais ainsi pu confirmer que les escarres de ses chaussures pourraient bientôt apparaître, alors j’avais commencé à utiliser la magie curative.

« ... Tu es assez bon. Tu ressembles plus à un médecin qu’à un maître de guilde, n’est-ce pas... non... ! Nh... C-Ce sentiment chaud... Utilises-tu de la magie ? » demanda-t-elle.

« Tout à fait, » dis-je. « J’ai tendance à l’utiliser pour les massages. Jusqu’à ce que Mademoiselle s’habitue à ses nouvelles bottes, je devrais vous aider comme je le peux. Lumière de guérison... Régénération. »

Mylarka n’avait offert aucune résistance. Il semblait que les endroits où la fatigue s’accumulait le plus étaient ses yeux, ses épaules et sa taille. Cela était probablement lié à son travail en tant qu’enseignante, puisqu’elle devait s’asseoir pendant de longues heures et s’occuper de la paperasse.

« Mademoiselle, si vous pouviez m’accorder un peu plus de votre temps, je vous suggère fortement de me laisser traiter tout votre corps, » dis-je.

« ... D’accord. Je ne vais pas m’endormir comme Aileen. Je suis venue ici pour une raison importante, alors je dois être vigilante, » déclara-t-elle.

« Ce n’est pas nécessaire. Vous devriez passer le temps jusqu’au dîner comme vous le souhaitez, » dis-je. « Vous pourriez être fatiguée à cause de votre travail, alors peut-être que prendre un bon repos vous sera bénéfique. »

Quand j’avais fini avec ses pieds, elle s’était couchée sur le lit.

Je me demandais comment allait Aileen, qui dormait encore tout près de nous, mais je n’avais pas fait part de mes doutes et j’avais continué mes devoirs.

« Je t’ai dit d’être hospitalier, mais... même si ta façon de parler comme un majordome semble forcée, elle n’est pas aussi mauvaise que je l’imaginais, » déclara-t-elle.

Elle agissait d’une manière plus mature que d’habitude... Je me demandais si j’aurais dû agir d’une manière plus gentleman quand je voulais qu’elle m’écoute.

Alors que je reconnaissais l’existence d’une Mylarka sans défense, qui était maintenant allongée sur sa face avant, je pressai mes doigts sur son dos, et elle laissa échapper une douce voix. Je faisais semblant de ne pas l’entendre et continuais mon massage professionnel avec indifférence.

***

À la fin, Mylarka s’était endormie et j’avais invité Yuma dans la pièce, mais comme elle trouvait troublant d’être touchée par un homme, j’effectuai un « massage sans contact ».

Je n’avais fait qu’utiliser de la magie sans la toucher directement.

Elle s’était assise sur le lit et j’avais commencé à verser de la magie en elle en tenant mes mains en l’air. Comme prévu, étant donné l’énorme travail qu’elle devait faire, elle avait accumulé beaucoup de stress. L’accumuler ainsi dans son petit corps semblait un exploit incroyable, mais elle avait besoin de se détendre.

« C’est vraiment agréable, Monsieur Sebas. Vous pouvez utiliser Magie Curative, n’est-ce pas ? » demanda Yuma.

« Je me dois de maîtriser toute capacité qui pourrait plaire à mes invités, » dis-je.

Si je lui disais que je pourrais utiliser à la fois la magie curative et de soutien, elle aurait compris mon identité.

Pourtant, il n’aurait pas été étrange si elle, qui avait déjà reçu mes massages dans le passé, reliait les points. Heureusement, il semblait qu’elle ne remarquait rien.

« J’ai un important camarade... peut-être, l’appeler un ami serait plus approprié... qui peut aussi utiliser la magie curative, » dit Yuma.

« ... Oh, connaissez-vous quelqu’un comme ça ? » demandai-je.

« Oui, » répondit-elle. « Il semble de prime abord une personne froide, mais il pense tout le temps aux personnes qui l’entourent. Même si je suis une prêtresse, je ne peux pas utiliser la magie de guérison. Pourtant, il ne s’est jamais fâché et il a continué patiemment à nous guérir. Chaque fois que je le regardais faire ces traitements, je pensais que je voulais aussi pouvoir faire ça... »

Il était probable qu’elle faisait référence à Queue d’Argent... Moi.

Je ne savais pas qu’elle pensait beaucoup à moi, et je me demandais si le fait que j’entendais cela alors que j’étais déguisé était correct.

La seule chose que je pouvais faire à ce moment-là était de lui répondre comme l’aurait fait un majordome.

« Je suis sûr qu’il a un profond respect pour vous, Mademoiselle Yuma, » dis-je. « Votre métier est merveilleux, il apaise le cœur des gens. »

« V-Vraiment... ? J’ai encore un long chemin à parcourir et je n’ai pu aider personne jusqu’à présent..., » répondit-elle.

« Aussi simple que je puisse l’être, je veux toujours soutenir votre travail acharné, » dis-je. « Je me demande si ma volonté est partagée par tous les autres... De toute façon, le massage est fini. »

« Ah... J-Je vois. Mon corps se sent incroyablement plus léger. Merci beaucoup, » dit-elle.

Elle se leva et inclina la tête avec gratitude.

Ses cheveux, qui atteignaient presque ses épaules, se balançaient doucement, et elle commença à les brosser timidement des deux mains. Ce geste innocent m’avait fait penser qu’elle n’avait pas beaucoup changé vis-à-vis de l’Yuma dont je me souvenais.

« ... Eh bien, il est temps pour moi de préparer le dîner, » dis-je.

« D-D’accord. Encore merci. Je me reposerai jusqu’à ce que les deux autres se réveillent, » dit-elle.

« Faites comme chez vous. Si vous voulez bien m’excuser, » dis-je.

Je les avais laissées dans la pièce. J’avais déjà tout ce dont j’avais besoin pour préparer le dîner, donc je n’aurais pas eu de problèmes à le faire moi-même...

Mais en pensant à cela, j’avais entendu les pas de quelqu’un faire écho dans le couloir.

À part Mylarka, Aileen, Yuma et moi, il ne devrait pas y avoir quelqu’un d’autre dans ce manoir. Pourtant, je pouvais les entendre clairement.

J’avais donc décidé de les suivre.

Le deuxième étage comptait douze pièces, et celle des filles était du côté est.

Personne ne devrait utiliser celles du côté ouest. J’avais ouvert les chambres et vérifié si quelqu’un était là, mais je n’avais vu personne. La salle d’art était aussi vide.

Alors que je pensais à ça, peut-être... le grenier.

Les escaliers qui y menaient étaient du côté ouest du deuxième étage.

J’avais déjà vérifié à la fois ici et la cave, mais je devinais que quelque chose aurait pu changer à la tombée de la nuit.

C’était censé être une maison hantée. Face à cette réalité, alors qu’un peu de tension avait commencé à s’accumuler en moi, je m’étais dirigé vers le grenier.

Quand j’ouvris la porte et entrai... les couleurs chaudes et sombres du crépuscule qui passait à travers la fenêtre peignirent la pièce.

Debout devant moi se trouvait une petite fille. À en juger par sa robe noire et la coiffe placée sur ses longs cheveux argentés, je devinais qu’elle aurait pu être d’une lignée de noble.

« ... Qui pouvez-vous être ? Comment êtes-vous entrée dans ce manoir ? » demandai-je.

Elle avait soulevé l’ourlet de sa jupe avant de répondre. « ... Il s’agit de la première fois que nous nous rencontrons. Je suis l’ancienne propriétaire de ce manoir. »

Il semblait que ma conjecture soit correcte.

L’ancienne propriétaire... Pourquoi était-elle dans le grenier ? Et où était-elle quand j’avais enquêté sur le bâtiment avec les membres de ma guilde ?

Il y avait beaucoup de choses que je voulais lui demander, mais quelque chose de bien plus important que toute autre chose avait attiré mon attention.

Sa beauté à couper le souffle, qui me rappelait celle d’une belle peinture, m’avait fait oublier tout le reste pendant quelques secondes.

***

Chapitre 16 : L’ancienne propriétaire et le renouveau d’une Sainte

La fille aux cheveux soyeux et à la coiffure à tresses m’avait regardé avec ses yeux hétérochromatiques. Je pouvais clairement les voir même à la lumière du crépuscule : l’un était doré, l’autre était bleu.

Seuls les esprits étaient censés avoir les yeux dorés.

« Cette maison, était-elle autrefois la vôtre... ? » demandai-je. « De combien d’années parlons-nous ? »

« Il y a encore dix ans. Avez-vous déjà entendu parler de la famille Stollen ? » demanda-t-elle.

Les trois grandes familles nobles du Royaume d’Albein étaient les Vinceburg, les Orlanz et les Stollen. Alors bien sûr que je les connaissais.

Quand j’avais acheté ce manoir, seuls les deux derniers propriétaires avaient été inclus dans les dossiers. Il était normal que le Royaume ne garde pas de traces de tous les acheteurs passés. Pourtant, si c’était autrefois la propriété d’une famille noble, pourquoi n’avais-je pas été averti ? Il était même possible que même l’agent immobilier ne le sût pas.

« J’ai récemment acheté ce manoir. Mon nom est Dick Silver... mais mes invitées m’appellent Sebas, » dis-je.

« Je le sais déjà. Je sais tout ce qui se passe au sein de ses murs. Je m’excuse, mais l’un des anciens propriétaires m’a accordé ce pouvoir. Je n’ai nullement l’intention d’en abuser, » déclara-t-elle.

Eh bien ! Puisque les sorts spécialisés dans la collecte d’informations existaient, ce qu’elle disait était tout à fait possible.

Je m’étais mise à penser à quelques façons permettant de créer un effet comme ça. L’un était d’inscrire des runes dans le bâtiment, tandis que l’autre était de créer un immense champ magique tout autour de la bâtisse. Je n’avais rien remarqué de la sorte quand j’avais étudié la structure, alors j’avais deviné que ce qui avait été utilisé avait été caché par une technique de dissimulation de rang supérieur.

« Pourquoi les Stollen ont-ils quitté ce manoir ? Qui êtes-vous ? » demandai-je.

« Je suis Béatrice Stollen, une membre de cette noble famille. Désolée, mais je ne peux pas en dire plus, » répondit Béatrice.

« ... Vous semblez savoir de quoi vous parlez. Pourtant, vous n’avez pas répondu à ma question. La famille Stollen peut-elle entrer à tout moment dans ce manoir ? » demandai-je.

« Non... Je ne suis jamais entrée dans ce manoir après coup, » répondit-elle.

« C’est impossible. J’ai examiné tous les coins et recoins de ce bâtiment ce matin. Peut-être que vous voulez dire que votre cachette est ailleurs ? » demandai-je.

« J’étais là dès le tout début, » répondit-elle. « Je n’étais pas précisément ici, mais j’étais partout dans ce manoir. »

Un frisson avait parcouru le long de ma colonne vertébrale. Elle n’était jamais entrée dans le bâtiment, mais était partout et savait tout ce qui s’y passait, n’est-ce pas ce qu’elle venait de dire ?

Si ce n’était pas une absurdité, alors elle aurait été...

« Je dois surveiller ce manoir... Même si ma famille l’a quitté, je ne peux pas négliger mes devoirs..., » déclara-t-elle.

« Vos devoirs... ? » demandai-je.

Avant de me demander de quoi il s’agissait, j’avais finalement remarqué quelque chose...

Sa silhouette était légèrement transparente. Elle n’était pas une humaine normale.

« Êtes-vous... le fantôme qui a été vu dans cette maison ? » demandai-je.

« ... Oui. N’avez-vous pas aussi amené une prêtresse pour m’exorciser ? Mais je ne peux pas partir de cet endroit, » déclara Béatrice.

« Elle a dit qu’il y avait une âme inoffensive qui ne peut pas trouver le repos. Béatrice... si elle vous trouve, elle vous forcera à aller au paradis, » déclarai-je.

« ... Le pouvoir qui est présent en elle est en effet étonnant, » annonça-t-elle. « Je suis sûre que si elle devait m’exorciser, la route du ciel se présentera devant mes yeux. Mais malgré cela, je ne peux toujours pas y aller. »

« Pourriez-vous... pourquoi ne pouvez-vous pas ? Est-il vrai que des fantômes apparaissent ici ? » demandai-je.

Sa silhouette s’estompait. Il semblerait qu’elle ne pouvait pas maintenir son corps seulement en utilisant sa volonté.

« Je veux que cet endroit soit comme il est, pour que ma famille puisse revenir ici à tout moment, » déclara-t-elle. Et après avoir déclaré ces mots, Béatrice avait disparu.

Grâce à cette rencontre, j’avais pu savoir la raison derrière le fait que le manoir était parfaitement entretenu. Elle gardait la maison propre pour le retour de sa famille.

Elle m’avait aussi fait savoir que chaque propriétaire de ce manoir après elle, moi inclus, avait essayé de la faire partir sans succès. Mais les Stollen, qui ont quitté cet endroit, reviendraient-ils ?

Je devais revoir Béatrice pour en savoir plus, mais pour commencer, j’avais besoin de tout expliquer à Mylarka et Aileen, pour qu’ainsi elles puissent voir ça avec Yuma.

***

Le dîner était prêt, alors j’avais réveillé les filles et je les avais conduites à la salle à manger.

Le soleil avait sombré sous l’horizon et la pièce était illuminée à l’aide de la magie. Mylarka et Yuma étaient assises sur un côté de la longue table qui pouvait accueillir dix personnes, et Aileen avait pris place de l’autre côté.

Il ne semblait pas que Béatrice essayait déjà de nous chasser du manoir, étant donné que je n’avais eu aucun problème à préparer le dîner.

« Yuma, as-tu dit qu’il y a un esprit inoffensif ici ? Peux-tu sentir sa présence même maintenant ? » demanda Mylarka.

« Tout à fait. Il nous regarde en ce moment même, » répondit Yuma.

« Ce n’est vraiment pas une bonne sensation... Pouvons-nous faire quelque chose face à ça ? » demanda Mylarka.

J’avais déjà parlé de Béatrice à Mylarka, mais même si elle comprenait la situation, elle ne pouvait pas se détendre.

Aileen ne se souciait pas de sa présence et déplaçait dans la joie le morceau d’agneau rôti avec de la sauce dans sa bouche.

« Yum... Mmh~ ! C’est délicieux ! Tout d’abord, un massage relaxant, et maintenant de la bonne nourriture et des boissons. Maintenant, j’ai juste besoin de prendre un bain et tout sera parfait ~ ! » déclara Aileen.

« ... Es-tu sûre de vouloir ça ? Quand tu feras ça, tu seras vraiment sans défense... Si nous sommes soudainement attaquées dans une telle situation, je pourrais utiliser un peu trop de Pouvoir Magique, » déclara Mylarka.

« Tout ira bien si nous y allons ensemble, » répondit Aileen. « Je veillerai sur toi. N’as-tu jamais l’impression que quelqu’un te regarde dans le dos quand tu te laves les cheveux ? »

« B-Bien sûr que non, il n’y a personne derrière moi... A-Arrête de dire de telles choses..., » cria Mylarka.

Même si Mylarka n’avait aucune raison de s’inquiéter, elle regarda derrière elle. Après avoir confirmé que rien n’était présent, elle avait apporté de la soupe de légumes dans sa bouche. Elle ne mangeait pas beaucoup de viande ou de pain, mais buvait plutôt une bonne quantité de vin, tout comme Aileen.

« Mesdames, compte tenu du nombre de rumeurs entourant cette maison, je vous suggère fortement d’être prudente la nuit lorsque vous quittez votre chambre, » déclarai-je.

« Ghaa... Si-Si c’était délibéré, je reconnais votre bravoure. Mais devez-vous nous le dire maintenant ? » demanda Mylarka.

« Mylarka, ta main tremble... Es-tu effrayée ? » demanda Aileen.

« Q-Qu’est-ce qui t’a fait sauter à cette conclusion ? En outre, peu importe ce qui pourrait arriver, tant qu’Yuma est avec nous, nous n’aurons aucun problème ! » déclara Mylarka.

Elle avait placé l’affaire sur Yuma qui de son côté n’avait pas répondu. Les lèvres de la prêtresse tremblaient alors qu’elle tenait un verre d’eau à deux mains.

« Devrait le faire... même s’il est inoffensif... Cela ne nous dérangera pas, mais... J’ai besoin de... je veux... le guider vers le paradis... ! » murmura Yuma.

« Euh... Yuma, y a-t-il quelque chose que tu veux faire ? As-tu besoin de quelque chose comme l’aide de Queue ? » demanda Mylarka.

« ... Quoi !? Ai-je dit quelque chose ? » s’exclama Yuma.

Son regard devenait dangereux, mais elle n’en était pas consciente.

« Ce n’est vraiment pas bien... Si nous ne faisons pas quelque chose, ton cœur se cassera, » déclara Mylarka.

« Hein !? M-Mon cœur ? Que veux-tu dire par là ? » demanda Yuma.

« Hmm... eh bien, tu es en train d’être embrouillé dans tout ça. Habituellement, tu serais nerveuse, mais là, tu es vraiment introvertie... Pour mieux aller, tu dois absolument exprimer tes sentiments, » déclara Mylarka.

« J-Je vois... Je suppose que je garde tout pour moi. Que dois-je faire pour évacuer tout ça ? » demanda Yuma.

« Mais c’est évident ! Attrape l’âme de Sebas et envoie-la au paradis, » déclara Mylarka.

« M-Madame... Est-ce que je me suis si mal comporté pour que vous ayez fini par souhaiter mon ascension précoce au Royaume de Dieu... ? » demandai-je.

« N-Non, le seul que je veux guider vers les cieux est... non, ce n’est rien... ne faites pas attention à moi..., » déclara Yuma.

Donc, elle voulait vraiment envoyer l'âme de ... je veux dire, celle de Queue, et non pas celle de Sebas..., elle veut donc l'envoyer au paradis...

C’était quand même quelque chose de scandaleux de l’entendre directement d’une prêtresse. Je me demandais si de l’imaginer en train de le faire aurait fait de moi une personne sans valeur.

« Yuma, le fait de sauver les âmes ne semble-t-il pas assez agréable ? J’ai souvent ressenti ce sentiment quand tu as exorcisé des morts-vivants avant ça, » déclara Aileen.

« Ghu... ! *Toux* *Toux* *Toux* qu’est-ce que c’était, Aileen !? Veux-tu dire que tu comprends ce qu’ils ressentaient ? » demanda Mylarka.

« Hahaha, non, pas du tout. Pourtant, j’ai toujours pensé qu’ils étaient heureux quand je les ai vus partir. Quoi qu’il en soit, pourquoi sembles-tu étouffé, Mylarka ? » demanda Aileen.

« C-C’est parce que tu as dit quelque chose qui était vraiment étrange, » répondit Mylarka.

« Ce n’était pas étrange. C’est exactement comme elle l’a dit, » déclara Yuma.

« ... Yuma ? » demanda Mylarka.

Ses yeux étaient revenus hagards... comme quand elle avait essayé de forcer mon âme au paradis dans la chapelle. Ce sujet semblait pour elle trop dur en ce moment.

« Le fait de sauver des âmes signifie qu’ils sont détachés et libérés de ce monde éphémère, » expliqua Yuma. « Ma doctrine appelle cet événement l’“extase”, et le prêtre ressent une partie de la sensation quand l’acte est en cours. Pourtant, le sommet d’un tel acte est atteint lorsque les deux âmes partent ensemble pour leur voyage. Je n’ai ressenti qu’une fois une telle attraction vis-à-vis d’une âme... »

« Y-Yuma, calme-toi. Je comprends parfaitement, mais maintenant, prends de profondes respirations, » déclara Mylarka.

« Aahh.. Q-Quoi !? Mylarka, est-ce que j’ai fait quelque chose d’étrange... ? » demanda Yuma.

« Eh bien, même moi j’ai pu le remarquer ! Yuma, tu es vraiment à bout en ce moment ! » répondit Mylarka.

« A-Aileen... ? Est-ce vrai ? Sebas, ai-je l’air d’être à ma limite ? » demanda Yuma.

« Nullement ! Je vous remercie chaleureusement pour l’explication difficile, » déclarai-je.

Je me demande comment on se sent au cours d’une telle extase, pensai-je.

Mais en regardant l’excitation excessive d’Yuma, j’avais pensé qu’il valait mieux ne pas le savoir.

***

Après la fin du dîner quelque peu orageux et la fin du nettoyage de la cuisine et de la salle à manger, j’avais jeté un coup d’œil dans la cour depuis le couloir du premier étage. Même s’il faisait déjà nuit, les piliers magiques avaient fait leur office, m’accordant ainsi une vision claire.

Pourtant, je ne pouvais voir aucun esprit dans les lieux.

Je me demandais si Béatrice serait réapparue si on l’avait laissée seule, mais cela ne semblait pas être le cas.

Les filles prenaient actuellement un bain du côté est du premier étage, alors que j’étais debout non loin de là, pour que je puisse les soutenir si quelque chose devait arriver.

Pourquoi a-t-elle dû faire partir tous les anciens propriétaires en peu de temps ?

Si je pouvais entendre la raison de Béatrice..., cela serait une bonne chose.

Alors que j’étais perdu dans mes pensées, quelque chose s’était produit devant mes yeux.

« Ils arrivent... ! »

Je ne pouvais toujours pas les sentir clairement, mais j’avais vu beaucoup de silhouettes humaines dans le jardin... il s’agissait des esprits dont j’attendais la venue.

Certains étaient en forme humaine et transparente, des fantômes, tandis que d’autres étaient simplement une masse de brume sombre, des spectres. Il y avait aussi des âmes en peine que Mylarka ne pouvait pas supporter... et leur nombre grandissait.

« Kyaaah! »

« !? »

Un cri perçant se fit entendre en provenance de la salle de bain. Comme il s’agissait d’une urgence, je n’avais pas d’autre choix que d’entrer.

« Mesdames, êtes-vous... en danger... ? » demandai-je.

« P-Pourquoi doivent-ils apparaître maintenanttttt... ? » cria Mylarka.

Mylarka s’enfuyait vers moi en étant totalement nue. Ou plutôt, elle avait de la mousse produite par le savon qui couvrait une partie de son corps, de sorte que les parties importantes étaient en quelque sorte non visibles.

« TTTTTTellement froiiiiiddd ! Tu ne partiras sûrement pas, car je n’arrive même pas à te toucher ! » cria Aileen.

Aileen, cachée par la vapeur, donnait des coups de pied aux fantômes qui apparaissaient dans la pièce. Pourtant, comme elle n’avait pas ses armes magiques avec elle, elle ne pouvait infliger aucun dommage, et ses coups coupaient dans les airs sans occasionner le moindre dégât. Elle n’avait pas reçu le surnom de Déesse de la Colère pour rien.

Puis j’avais vu Yuma dans la pièce, qui n’avait qu’une serviette autour de la taille pour la couvrir. Elle était distraitement assise sur le sol, alors même que c’était vraiment le moment où elle devrait agir.

Alors que j’étais témoin de ce spectacle, mon cœur n’avait nullement faibli comme aurait réagi un professionnel.

« Mesdames, c’est dangereux ! Vous devriez vous fuir d’ici et vous préparez pour..., » commençai-je.

« Nhh... Sebas, attendez ! Yuma va se charger de tout ça ! » déclara Aileen.

« Tout à fait... Yuma, utilise dès maintenant ton pouvoir ! Tu nous as toujours sauvés dans ce genre de situation, n’est-ce pas ? Allez, lève-toi ! » déclara Mylarka.

Les filles avaient crié pendant que les fantômes se rapprochaient de la prêtresse.

Si quelque chose tente de la toucher, je la ferai disparaître...

Il s’agissait de ma décision, et alors qu’un fantôme était sur le point de mettre la main sur elle, je l’avais purifié et je l’avais fait disparaître sans un bruit.

« Il y a... tant d’âmes perdues qui se rassemblent ici... elles ont toutes besoin d’être réprimées, mais... pourquoi l’ai-je remarqué seulement maintenant... ? » murmura Yuma.

Que ce soit une âme en peine ou un spectre, ça n’avait pas vraiment d’importance.

Son corps était recouvert d’une lumière de purification. Pour un prêtre normal, quel que soit son niveau de compétence, il devrait chanter un mantra afin de purifier les morts-vivants... mais cela ne s’appliquait pas à Yuma.

Elle avait quant même été appelée le « Requiem Sans Voix » justement parce qu’elle n’avait pas besoin de le faire.

Et pourtant, son pouvoir était aberrant. Même quand nous avions été encerclés dans une caverne remplie de morts-vivants, elle avait fini par purifier toute la zone. Voilà la raison qui faisait qu’elle avait obtenu un score d’aventurier de 101 180 points. Elle avait atteint le rang SSS grâce à sa capacité à exorciser les morts-vivants.

« Je vais maintenant vous accorder la paix... Peu importe vos regrets, ou vos angoisses, j’écouterai votre chagrin. Permettez-moi de vous ramener à votre état d’origine, comme des nouveau-nés ! Permettez-moi de vous amener à la terre promise par notre Dieu..., » elle avait seulement joint ses mains et avait prié, et son pouvoir illimité s’était propagé en traversant n’importe quel obstacle.

« La Purification sans Limites... !? M-Mademoiselle Yuphila, si elle touche nos corps... ! » déclarai-je.

Elle m’avait souri et m’avait répondu. « Comme l’a dit Aileen, le fait de guider des âmes au paradis est vraiment agréable. J’avais oublié ça... Pourquoi ai-je retenu ce pouvoir ? J’ai besoin de ça pour vivre... Ahh... Mais ce que je voudrais vraiment réprimer, c’est... »

À ce moment, son pouvoir m’avait touché. Peut-être que j’avais ressenti la même chose que les deux autres filles. Son pouvoir n’était pas seulement d’exorciser les morts-vivants et de les envoyer au Ciel, il affectait aussi les choses vivantes. C’était comme si elle caressait mon âme avec ses mains.

Ce n’était pas vraiment effrayant, mais plutôt très agréable. Comme elle l’avait dit, les âmes qui partaient et celles qui restaient partageaient le même sentiment.

Avant que je ne le remarque, les fantômes avaient cessé de venir, et les autres avaient disparu en s’enfonçant dans le sol. Le silence était tombé dans la pièce. Sur les joues rouges de la prêtresse, il y avait des gouttes de sueur, mais elle avait l’air énergique plutôt qu’épuisée.

« À présent... Je dois parler avec Béatrice et réprimer son âme. Sebas, allons au grenier, car elle nous attend là, » déclara Yuma, alors que de mon côté, j’avais détourné mes yeux d’elle.

Peut-être était-il inélégant de lui dire à quoi elle ressemblait maintenant, alors je m’étais promis de ne pas regarder dans sa direction pendant un moment. Elle va sûrement s’en rendre compte dans peu de temps...

***

Chapitre 17 : Le conflit du majordome et le contrat d’invocation

Après qu’Yuma ait purifié les fantômes, j’avais décidé de retourner dans le couloir devenu silencieux.

J’avais regardé par la fenêtre et j’avais confirmé qu’il n’y avait pas de traces d’esprits dans le jardin.

Elle pouvait choisir les cibles qui allaient être affectées par son pouvoir, alors elle avait décidé de tout purifier sauf Béatrice.

Pendant que je regardais à travers la vitre, je n’avais pas pu m’empêcher de me rappeler ce qui était arrivé aux filles quelques instants auparavant.

J’étais presque sûr que je n’imaginais pas que j’avais vu les sommets de couleur cerise pâle des montagnes de Mylarka sans mousse.

En outre, la partie supérieure nue d’Aileen, même si elle était assez mince, avait été soigneusement forgée par la pratique des arts martiaux malgré le fait qu’elle soit vraiment une grosse buveuse. Même si je n’étais pas ce genre de personne, je n’avais pas pu m’empêcher d’être étonné par les résultats.

Après avoir comparé ces deux beautés, j’étais sûr que celles d’Aileen étaient plus grandes, mais la douceur visqueuse que je voyais quand elles se couvraient de leurs bras m’avait fait deviner que celles de Mylarka étaient plus douces. J’aurais dû rassembler plus d’informations sur le sujet en leur faisant accepter une investigation approfondie de leurs formes avec ma Magie Seita.

C’était seulement pour le bien de la connaissance et je ne serais pas allé plus loin.

Et aussi, moi — le majordome masqué appelé Sebas, qui avait accidentellement vu le corps pur et nu d’Yuma — je voulais que les choses continuent comme si rien ne s’était produit pour éviter des dommages émotionnels à son cœur qui s’était finalement rétabli. Peut-être que l’utilisation de son pouvoir après un long moment l’avait rendue tellement concentrée qu’elle n’était pas consciente de ce qui s’était produit. Quel miracle venant de Dieu !

« D-Désolée de vous avoir fait attendre, Sebas, » déclara Yuma.

« C-C’est bon, Mademoiselle Yuma. Cependant, je devrais résoudre ce problème par moi-même..., » répondis-je.

« Vous n’avez pas à vous inquiéter, nous voulons aussi voir cette fille fantôme, » déclara Mylarka.

« Si rien d’inattendu ne se reproduit, je ne serai pas surprise par un simple fantôme. Allez, on y va, » déclara Aileen.

Aileen faisait semblant d’être calme, mais son visage rougissait. Son embarras était compréhensible, mais c’était un peu trop évident pour moi.

Mylarka semblait calme maintenant, mais elle cachait sa poitrine avec ses bras. Si elle ne l’avait pas fait, j’aurais vu sa forme très clairement, puisqu’elle portait un déshabillé fin qui la rendait encore plus séduisante que les autres filles.

« Mylarka, as-tu juste amené ce déshabillé pour ce soir ? » demanda Yuma.

« D-D’habitude Yuma, je dors habillée comme ça. Aurais-je dû en acheter un nouveau pour quelques soirées pyjama sporadiques ? » demanda Mylarka.

« Ça te donne l’air d’une adulte, ça te va si bien... Regarde-moi à la place, j’ai cet habit pour enfant..., » déclara Yuma.

Le pyjama d’Yuma était une chemise à manches courtes faite d’un tissu doux et d’un short. C’était tellement enfantin que je pouvais comprendre son embarras.

« Yuma, tu grandis encore. Tu es plus grande que la dernière fois qu’on s’est vus, » répondit Aileen.

« J-Je ne crois pas que j’ai beaucoup grandi, Aileen... Même si je mange régulièrement, je suis toujours la même..., » déclara Yuma.

« On parle de tout ton corps, pas seulement de ta taille. Les gens regardent tout, à l’exception d’une certaine personne qui ne prête attention qu’à certaines parties, » déclara Mylarka.

Est-ce que cela m’était adressé ? Je n’avais jamais montré mon intérêt pour les seins ! Je veux dire par là que j’ai quand même des nerfs d’acier ! Je me demandais si Mylarka sentait que je détournais le regard de son visage, mais... après tout, les filles avaient une intuition aiguisée... Plutôt que de vivre dans la honte, j’aurais préféré vivre le reste de ma vie avec un masque cachant mes yeux.

« I-Il semblerait que quelqu’un ait détourné son regard loin de moi ! Mais quoi qu’il en soit, on doit aller au grenier, » déclara Yuma.

« Mesdemoiselles, on y va ensemble ? » demandai-je.

« Oui. Désolée d’avoir parlé de sujets sans rapport, » déclara Yuma.

Yuma et Aileen s’étaient dirigées vers les escaliers, nous laissant Mylarka et moi derrière.

« Elle se concentrait sur la purification de ces fantômes, mais cela ne change pas le fait que tu l’as vue nue, » déclara Mylarka.

« Pff... Plutôt que moi, ce serait mieux si elle pensait que Sebas est le coupable... mais de toute façon, je suppose qu’elle serait choquée, » répondis-je.

Alors que je répondais sérieusement, elle avait poussé un profond soupir dégoûté, puis m’avait frappé l’épaule.

« Je ne dirai rien, sinon cela deviendrait un problème, mais j’espère que tu réfléchiras en profondeur à ce que tu as fait, » déclara Mylarka.

« Q-Qu’est-ce que tu veux dire... ? Me laisses-tu partir ? Même si je t’ai également vue ? » demandai-je.

« J’adorerais dire que je vais détruire ta mémoire, mais... Je serai magnanime cette fois-ci parce que l’état d’Yuma s’améliore grâce à toi, » répondit Mylarka.

Après avoir dit ça, elle commença à marcher devant moi. C’était un événement imprévu, mais comme Yuma allait mieux maintenant, je me considérais comme chanceux.

Aileen serait probablement embarrassée si nous parlions à nouveau de ce qui s’était passé dans le bain.

Pour préserver notre relation actuelle, j’allais agir comme si rien ne s’était passé.

Néanmoins, je savais qu’un tel moment allait tôt ou tard venir.

 

***

 

J’avais ouvert la porte du grenier avec le passe-partout, et comme Yuma l’avait dit, Béatrice se tenait là, nous attendant.

« Dame Béatrice, ces dames sont Aileen, Mylarka et Yuma, » annonçai-je.

« Merci de les avoir présentées, Sebas. Pardonnez-moi d’avoir tout à l’heure interrompu notre conversation, » déclara Béatrice.

Sans cligner des yeux, elle avait répondu formellement à mon ton de majordome. Elle n’avait pas l’air sur ses gardes vis-à-vis de nous.

« Wooow~ ! Tu es si belle ! C’est une “beauté d’un autre monde” ! » déclara Aileen.

« Votre œil... ça devrait être la couleur de l’esprit. Êtes-vous un fantôme ? » demanda Mylarka.

C’est ce que je pensais également, mais la fille géniale l’avait directement demandé avec franchise.

« Sebas vous a parlé de moi, n’est-ce pas ? Je m’appelle Béatrice Stollen. »

« Stollen... la noble famille ? Alors, pourquoi avez-vous cet œil ? Un esprit est-il l’un de vos ancêtres ? » demanda Mylarka.

« Ce n’est pas le cas. Dame Stollen est le résultat d’un sort jeté dans ce manoir, » dis-je.

« Un sort... ? Se pourrait-il que cela soit une Invocation Magique ? » demanda Mylarka.

La perplexité de Mylarka était compréhensible, alors je l’avais immédiatement éclaircie pour elle.

La magie destinée à invoquer les esprits existait, mais elle faisait encore l’objet de recherches. Son taux de réussite était faible, mais il y avait eu des cas où un esprit de rang A avait été invoqué avec succès.

« Oui. J’ai été invoquée par le Seigneur Stollen. Je suis une reine des Spectres, » annonça Béatrice.

« Vous êtes... un spectre ? Un de ces monstres qui sortent du sol... ? » demanda Mylarka.

« Attendez un moment. Pourquoi l’attaque d’Yuma ne vous a-t-elle pas purifiée... ? » demanda Aileen.

« Parce que mon contrat avec la famille Stollen m’interdit de faire du mal aux humains. Son pouvoir a bien atteint mon âme, mais je pense qu’elle a décidé de me laisser intact, » répondit Béatrice.

Béatrice était à un niveau totalement différent des Spectres de bas rang.

J’admirais du fond de mon cœur cet étrange mort-vivant qui restait sain d’esprit.

Son existence même signifiait qu’il y avait encore des races de monstres inconnus dans ce monde.

« Maintenant, je comprends pourquoi les fantômes se rassemblent dans ce manoir. Comme le nom de votre race le suggère, vous êtes comme une reine, donc les morts-vivants sont attirés vers vous, » déclara Mylarka.

« C’est la raison pour laquelle votre famille a quitté ce manoir. Plutôt audacieux, vu que c’est eux qui ont passé un contrat avec vous, » déclarai-je.

« Je dois quand même respecter ce contrat. On m’a dit de protéger ce manoir... alors je ne peux pas disparaître. Si vous voulez me forcer à partir, une bataille sera inévitable..., » annonça Béatrice.

Son corps était enveloppé d’une aura blanche et bleutée. Il semblait qu’elle était prête à jeter des sorts, mais... son corps disparaissait peu à peu et elle semblait tout le temps être sur le point de disparaître dans la nuit.

« Les morts-vivants sont principalement composés de pouvoirs magiques... si vous utilisez la magie, vous disparaîtrez, » dis-je.

« Je dois encore protéger ce manoir à tout prix, et si la disparition est le seul moyen de tenir ma parole, alors..., » répondit Béatrice.

Si les choses s’étaient passées comme ça, elle aurait été purifiée.

Dans ce cas, les fantômes ne se seraient plus rassemblés ici, mais était-ce pour le mieux ?

N’y avait-il pas un moyen de la garder en vie sans se battre ?

Puis, une idée m’était venue à l’esprit.

« Dame Béatrice, si je peux avancer une proposition... Êtes-vous un monstre ? » demandai-je.

« Oui, ma race est assez rare. Pourquoi ? » demanda-t-elle.

« Les monstres sont généralement gouvernés par le Seigneur-Démon. Son pouvoir ne devrait-il pas l’emporter sur un simple contrat conclu avec des humains ? » demandai-je.

« Je pense que la seule façon de l’écraser serait que le Seigneur-Démon lui-même vienne ici. Pourtant, il a été obligé de ne jamais quitter son pays par l’expédition qui l’a vaincu... donc, il n’y a aucune chance pour moi d’échapper à mon serment, » répondit Béatrice.

C’est ça, c’est ça.

Si le Seigneur-Démon venait ici, le contrat de Béatrice pourrait être annulé, et elle pourrait revenir sous le contrôle du Seigneur-Démon.

***

Chapitre 18 : La reine des spectres mise à nue et la nuit sans fin

« ... Permettez-moi de nous présenter à nouveau. Nous sommes tous les trois membres du groupe qui avons vaincu le Seigneur-Démon. Si vous voulez, nous pouvons l’amener ici en secret et vous libérer de votre serment, » déclara Mylarka.

« Je vois... Vous êtes la Douce Catastrophe, le Requiem sans Voix et la Charmante Déesse de la Colère, hein ? » demanda Béatrice.

« Hahahaha~ ! Nous sommes bien connues ! » s’exclama Aileen.

En entendant son titre, Aileen avait rougi. En effet, elle était charmante même dans sa tenue de combat, mais il semblerait qu’elle ne pensait pas la même chose de son côté.

Mylarka n’avait pas mentionné mon nom pour préserver ma fausse identité. Béatrice avait peut-être vu que j’avais visité ce manoir en tant que Queue d’Argent pour préparer le logement... mais comme les morts-vivants étaient plus faibles pendant la journée, ce n’était peut-être pas le cas.

« Si vous laissez Yuma créer l’une de ses barrières, elle peut sceller votre pouvoir pour que vous n’attiriez pas de fantômes. De cette façon, même si les Stollen ne vivent plus ici, vous pouvez vivre avec quelqu’un... Sebas veut également cela, » déclara Mylarka.

« C’est exactement comme le dit Mademoiselle Mylarka. Si vous nous le permettez, nous aimerions utiliser ce manoir comme logement pour des clients, » répondis-je.

Béatrice avait l’air surprise et n’avait pas répondu pendant un certain temps.

Des larmes avaient coulé dans ses yeux et elles tombèrent en silence. Malgré sa nature incorporelle, elles étaient réelles. Elle avait dû s’imaginer qu’elle allait continuer à attendre ceux qui l’avaient abandonnée pour toujours.

Je ne pouvais même pas imaginer comment elle se sentait ou à quel point elle se sentait seule.

« Voulez-vous vraiment faire ça pour quelqu’un qui n’a fait que causer des ennuis aux autres ? » demanda Béatrice.

Yuma s’avança et se tint devant elle. Une aura purifiante enveloppait son corps à tout moment, mais la Reine des Spectres n’allait pas être en danger. « J’ai bien compris combien vous aviez envie de revoir votre maître. Il n’est pas encore temps que votre âme soit appelée au Ciel. »

« Ah... Aaah... ! » Béatrice était alors tombée à genoux, les mains cachant son visage, alors que les sentiments incommensurables qu’elle avait réprimés pendant si longtemps l’assaillaient. L’autre fille s’était agenouillée et l’avait enlacée.

Une prêtresse réconfortait une Reine des Spectres... Voir une scène aussi rare m’avait fait croire que la venue d’Yuma avait été la bonne chose à faire.

Comment aurais-je pu savoir qu’à l’intérieur de ces murs se cachait un tel secret ?

Même la raison de la présence de fantômes dépassait mes attentes.

Béatrice avait pleuré un moment, et après avoir réussi à se calmer, elle s’était redressée.

« Pardonnez-moi de vous montrer une apparence aussi honteuse. Je n’avais pas l’intention de pleurer devant vous…, » déclara Béatrice.

« Pleurer consomme votre pouvoir magique, n’est-ce pas ? Est-ce que ça va ? Vous avez l’air plus pâle, » demanda Yuma.

« Je sais que je ne suis pas en position de vous le demander, mais pourriez-vous me donner de l’énergie ? J’ai peur que la prochaine aube soit ma dernière, » déclara Béatrice.

Mylarka détestait ce sentiment, Aileen avait dit qu’il faisait froid, et le fait de drainer directement le pouvoir sacré d’Yuma aurait pu être fatal pour Béatrice.

J’étais le seul choix... ou plutôt, Aileen pouvait aussi le faire, mais elle me regardait déjà avec le pouce levé.

« Sebas peut même utiliser la magie de guérison, il a beaucoup d’énergie. Je suppose que ça ne lui ferait pas de mal de vous en prêter, » déclara Aileen.

« En tant que camarade, j’adorerais vous donner de la mienne, mais... désolée, je déteste ce sentiment de froid, » déclara Mylarka.

« J’apprécie l’idée. Puis-je avoir un peu de l’énergie de Monsieur Sebas, s’il est d’accord ? » demanda Béatrice.

Ça veut dire qu’elle allait juste me toucher, n’est-ce pas ?

Ce n’était pas un problème en soi vu que je pouvais récupérer cette petite quantité en une seule journée.

« D’accord. N’hésitez pas à venir vous-même vous servir, » dis-je.

« ... Dans ce cas, je viendrais vous voir plus tard. Avant ça, je dois aller me préparer, » sa silhouette avait commencé à s’estomper alors que je me demandais ce qu’elle voulait dire par là.

« Super ! Affaire classée. Je vais me coucher, » déclara Aileen.

« Eh, les filles, voulez-vous discuter dans notre chambre ? Maintenant qu’Yuma va mieux et tout…, » demanda Mylarka.

« Oui, j’adorerais. Sebas, prenez bien soin de Béatrice, » déclara Yuma.

Elles avaient quitté le grenier et étaient retournées dans la chambre où elles logeaient toutes.

J’avais regardé autour de moi et je n’avais vu qu’un bureau, des étagères et une lanterne.

J’avais bien deviné que les morts-vivants n’avaient pas besoin de dormir. J’avais ensuite fermé la porte et j’avais commencé à suivre les filles.

 

☆☆☆

 

Après avoir enlevé mon masque et pris un bain, je m’étais détendu dans ma chambre.

Cette longue journée était enfin terminée. Il ne me restait plus qu’à laisser Béatrice prendre une partie de mon énergie magique.

Elle se serait montrée une fois préparée, mais qu’est-ce qu’elle voulait dire par là ? J’avais bu du vin en y pensant, puis je m’étais jeté sur le lit.

Je ne pouvais sentir personne d’autre à proximité.

Comme la porte était fermée, je me demandais si Béatrice allait entrer par un mur, alors j’avais levé le haut de mon corps.

Puis, mon esprit s’était vidé.

Éclairée par la faible lumière de la lanterne, Béatrice se tenait devant moi tout en serrant son corps avec ses bras. Elle ne portait plus sa robe noire. Même si sa coiffure était la même, le négligé qu’elle portait était encore plus mince que celui de Mylarka.

« M-Madame Béatrice, qu’est ce que c’est que ces vêtements ? Si vous ne portez pas quelque chose par-dessus... ! » commençais-je en la regardant.

Elle avait souri et avait cligné un œil. Même si elle pouvait probablement flotter, elle s’était rapprochée en marchant, et au moment où elle avait éloigné ses bras de sa poitrine, j’avais réussi à voir son corps sous le tissu mince. Il avait la même couleur que celle d’un humain.

« C’est la première fois que je fais ça avec un homme, donc... puisque vous êtes un gentleman, Sebas... Non, Maître de guilde, j’ai pensé qu’en tant que Reine des Spectres, je devais être préparée correctement, » déclara Béatrice.

Elle connaissait ma véritable identité... Je pouvais arrêter de faire semblant d’être un majordome, alors je m’étais préparé au pire et j’étais retourné à mon état normal.

« Donc, tu m’as regardé depuis le début... et tu as joué avec ça ? » demandai-je.

Elle avait souri de nouveau et avait rougi face à mon changement de ton. Il s’agissait d’une morte vivante, mais en voyant ses gestes chaleureux, j’avais pensé qu’il y avait encore beaucoup de choses que nous ne savions pas sur eux.

« Je sais que tu ne voulais pas que les filles... ou plutôt, qu’Yuma soit au courant de ta véritable identité. Les deux autres savent déjà qui tu es, » déclara Béatrice.

« ... Je suis le Maître de la Guilde du Verseau d’Argent. Yuma ne se sentait pas bien, alors je voulais l’aider à sortir du marasme, » expliquai-je.

« Je pense qu’elle finira par le découvrir. Ne penses-tu pas qu’elle serait heureuse de le savoir ? » demanda Béatrice.

« Je ne veux pas... mais tu as sûrement raison. Je veux que cet endroit serve d’installation de loisirs pour ma guilde, et je veux également inviter Yuma à nouveau à l’avenir... Ce serait bizarre d’agir comme majordome quand elle est là, donc je devrai lui dire la vérité tôt ou tard, » avouai-je.

« Ce serait un gâchis de ne plus jamais te voir comme un majordome masqué. Je trouve que cela te va très bien. » Tout en disant cela, elle avait pris le masque que j’avais mis sur la table de chevet et avait essayé de le porter...

C’était comme si elle jouait avec moi.

Après l’avoir remis à sa place, elle s’était dirigée vers moi, puis elle m’avait tendu la main.

« Toujours... Je ne me lasserai pas de te voir sans lui, » déclara-t-elle.

« Je ne pense pas que ce soit le cas. Mes camarades sont bien plus belles que moi, » répondis-je.

« Tout le monde s’intéresse à quelqu’un. Par exemple, j’aime ton visage, Queue, » murmura-t-elle en me regardant.

« Je pensais à la façon dont tu allais drainer mon énergie... Tu n’agiras pas comme un succube, n’est-ce pas ? » demandai-je.

Elle n’avait pas répondu alors qu’elle s’était approchée, puis ses mains s’étaient posées sur mes vêtements de nuit et avaient commencé à détacher les boutons.

« ... Ça te dérangerait-il de répondre à ma question ? » demandai-je.

« Je ne te toucherai qu’aujourd’hui. Tu ne ressentiras aucune douleur, mais... si je n’utilise que mes paumes, cela prendra beaucoup trop de temps..., » murmura-t-elle.

« Il y a beaucoup de choses que tu peux toucher, mais... es-tu sûre de vouloir le faire ? Nous venons juste de nous rencontrer, » demandai-je.

Je commençais clairement à imaginer ce qu’elle allait faire.

Elle était déjà à mon troisième bouton quand elle avait touché le ruban présent sur sa poitrine.

Si elle l’avait tirée jusqu’au bout, je l’aurais probablement vue toute nue.

« Même si je suis une Reine des Spectres, passer chaque nuit des dix dernières années seule dans un manoir où les fantômes se rassemblent m’a fait me sentir tellement seule..., » déclara Béatrice.

« ... je vois. Alors, je n’ai pas d’autre choix, » répondis-je.

À ce moment-là, j’avais compris mon erreur stupide réalisée bien avant ça.

Je pensais que puisqu’elle n’avait pas de corps tangible, elle n’aurait pas voulu coucher avec moi, mais j’avais vite constaté que j’avais tort.

Mais maintenant, il était trop tard.

Je lui avais déjà donné la permission de le faire par elle-même, et je ne pouvais pas revenir en arrière. Je n’allais certainement pas revenir sur ma promesse. J’étais quand même une personne qui respecte ça.

Elle avait détaché le ruban avec un mouvement doux. Son déshabillé s’ouvrit et révéla son corps blanc, presque transparent, qui était maintenant presque complètement nu.

« J’aimerais que tu partages ton énergie avec moi pendant toute la nuit. Puisque nous n’avons pas d’arrières pensés, les autres n’y verront pas d’inconvénient, » elle avait déclaré ça nonchalamment et avait ensuite levé les mains pour défaire sa coiffure.

« Tu n’as pas besoin de l’enlever maintenant. Faisons ça plus tard, au cas où..., » dis-je.

« ... D’accord. Si c’est ce que tu veux, Maître Queue..., » me répondit-elle.

Comment pouvait-elle m’appeler avec un tel respect alors que je venais de lui dire cela sur un ton aussi suppliant ?

Quand un homme avait l’impression que l’autre partie écoutera tout ce qu’il dirait, il n’y avait aucune chance de l’arrêter. Je ne faisais pas exception, mais en pensant aux trois filles qui dormaient sous ce même toit, j’avais pu à peine garder mon sens du devoir.

« On va juste dormir ensemble, d’accord ? Et tu prendras mon énergie, n’est-ce pas ? » demandai-je.

« Oui. Je n’ai besoin que de te toucher, mais un autre pas pourrait être nécessaire..., » répondit Béatrice.

« On va vraiment le faire ? Je plaisante, c’est tout. Ce n’est pas comme si je ne pouvais pas... ! » commençai-je.

Au moment où j’avais essayé de plaisanter pour retrouver un peu de sang-froid, elle avait glissé ses doigts derrière mon cou.

« Viens-tu de le faire ? » demandai-je.

Elle avait hoché la tête et avait porté ses doigts à sa bouche. « Mhhhh... C’est si doux. Mais cela ne suffira pas à soutenir mon corps… »

« Je vois... on ne peut pas faire autrement. Prends donc tout ce dont tu as besoin, » déclarai-je.

« Ne t’inquiète pas de ça, nous avons encore beaucoup de temps avant l’aube, » me répondit Béatrice.

« Avant l’aube... ? N’est-ce pas un peu trop ? » demandai-je.

Elle n’avait pas répondu, même s’il s’agissait d’une question importante.

Cette fois, ses mains étaient passées de mon cou à ma clavicule et avaient commencé à détacher d’autres boutons.

« Je le savais depuis le début, même si tu l’as caché sous tes vêtements... Tu as le corps le plus travaillé parmi tes camarades…, » murmura-t-elle.

« Je ne suis qu’un ivrogne, je néglige ma santé et j’ai même arrêté de m’entraîner, » répondis-je.

Même si j’aimais la sensation agréable d’être pompette, j’éliminais toujours les toxines de l’alcool, donc je n’avais pas de ventre de bière, mais mon travail quotidien n’était pas suffisant pour forger mon corps comme ça.

Habituellement, je lance la magie de soutien sur moi-même pour que mes muscles soient toujours dans de bonnes conditions, et cela même lorsque j’étais assis sans rien faire au comptoir. Pour quelqu’un comme moi qui avait tendance à tout trouver gênant, prendre la chance d’apprendre la magie de soutien quand j’étais encore enfant était un don du ciel.

« ... Dois-je totalement me déshabiller ? » demandai-je.

« Plus nos corps se touchent, mieux cela sera…, » répondis-elle.

Vu ce que j’avais déclaré avant, j’avais décidé de ne plus rien dire.

Elle s’était penchée et s’était pressée contre moi.

Même si elle pouvait passer à travers des objets, je pouvais clairement sentir son contact... et c’était chaud. Peut-être qu’il faisait froid seulement quand les morts vivants drainaient l’énergie par la force.

Je pouvais presque sentir ses battements de cœur. Quelque deux choses de doux à peu près de la taille d’une main étaient pressées contre ma poitrine. Elle avait presque l’air humaine.

« Donc, les Reines des Spectres ont des corps tangibles... il y a beaucoup à savoir sur ta race, » déclarai-je.

« Quand je recharge mon pouvoir magique, je peux garder cette forme. Je suis sûre que tu penses que les morts-vivants n’ont pas de corps chauds, mais il est possible de régler notre température selon nos désirs... Maître Queue, tu es si chaleureux..., » murmura-t-elle à mon oreille.

« Ne pouvais-tu pas dire ça à Mylarka ? Elle déteste ce sentiment de froid, » demandai-je.

« Quelle est ta relation avec elle ? Tu devrais avoir approfondi tes liens avec elle en tant que membres du groupe, mais... tu n’avais pas l’air si proche que ça, » déclara Béatrice.

« Je me fâcherai si tu mets ton nez là où il n’a rien à faire. Et bien, nous sommes juste amis... Pourquoi as-tu l’air si heureuse d’un coup ? » demandai-je en la voyant afficher d’un coup un large sourire coquin.

« Hehe... c’est une affaire personnelle, donc je vais garder ça secret, » me répondit-elle d’une manière coquette.

Je voulais vraiment aider la jeune femme qui ne voulait pas être convoquée, celle qui était liée à ce manoir et qui était maintenant couchée sur mon corps, mais je me demandais comment les événements avaient pu me conduire jusque là.

Pendant que je fouillais mon esprit à la recherche d’une réponse, je priais pour que l’aube lointaine brise bientôt cette nuit sans fin.

***

Chapitre 19 : La visite du Seigneur-Démon et le nouveau contrat

Avant que je remarque ça, la lumière de l’aube avait franchi la fenêtre. Je m’étais retrouvé à me réveiller tôt.

J’avais posé mon regard sur Béatrice, qui dormait à côté de moi, et j’avais vu ses cils trembler. Elle m’avait probablement senti bouger.

« Mhhh…, » murmura-t-elle.

Elle avait légèrement bougé la tête. Son corps, qui avait suffisamment aspiré de mon énergie, n’était plus transparent, mais ressemblait exactement à celui d’un humain.

Je m’étais faufilé hors du lit et j’allais là laisser se reposer un peu plus longtemps.

Cela avait été assez difficile de s’endormir cette nuit-là, mais comme elle ne m’avait pas trop taquiné, il ne s’était rien passé de trop étrange.

Je me demandais ce que les autres auraient pensé s’ils nous voyaient maintenant. Le fait de voir l’état sans défense de Béatrice pourrait créer un gros malentendu. Peut-être que les reines des fantômes n’avaient pas besoin d’être vigilantes avec les hommes...

« Maître... y vas-tu déjà ? » demanda Béatrice.

« O-Oh, tu es réveillé ? Je vais amener le Seigneur-Démon ici, alors attends-moi, » répondis-je.

J’avais replacé la cravate sur ma chemise, puis j’avais mis ma veste. Je devais avoir l’air d’un noble, alors j’avais demandé à un célèbre couturier de me concevoir tout ça. Ils n’étaient pas seulement beaux, mais aussi confortables. Ils m’avaient coûté un total de quinze pièces d’or. C’était peut-être un peu trop, mais étant donné la personne qui les avait fabriqués et le tissu dont ils étaient faits, je dirais que c’était un prix convenable.

Béatrice avait tiré les draps pour couvrir la partie supérieure de son corps, et j’avais regardé ses cheveux ébouriffés... J’avais pu deviner qu’ils avaient aussi gagné en substance.

« Cela m’est presque sorti de l’esprit, mais combien de mois cela prendra-t-il ? » demanda Béatrice.

J’y ai réfléchi brièvement. Comme je ne savais pas si la famille Stollen pouvait obtenir des informations grâce au contrat de Béatrice, j’avais décidé de garder secret le fait que l’ancien Seigneur-Démon vivait en fait dans ma guilde et travaillait comme barman, du moins jusqu’à ce que Verlaine ait écrasé le contrat.

« Ne t’inquiète pas, ça ne prendra pas longtemps. Nous étions après tout membres de l’expédition qui l’a vaincu. Nous lui avons dit de ne jamais quitter son territoire, mais nous pouvons lui demander de venir ici une fois, » répondis-je.

« Est-ce vraiment possible... ? Était-ce spécifié dans un contrat ? » demanda Béatrice.

« Eh bien, ce n’était pas sur papier, mais Verlaine a tenu parole jusqu’à présent. Et aussi, si nous devions raser toute sa région jusqu’au sol, les seigneurs qui gouvernent les autres régions démoniaques ne l’ignoreraient pas. Nous voulions un armistice éternel, » répondis-je.

Nous étions tous d’accord sur ce point, et Cody avait décidé à l’avance de faire capituler l’elfe noir.

Avant que les monstres n’apprennent à ne pas agresser les humains, les incidents étaient fréquents. Les demi-humains faisaient des raids quotidiens dans les villes humaines, et même le village dans lequel j’avais grandi avait été victime de ces démons. À cause de ce qui s’était passé, j’avais commencé à étudier l’art de la guerre... mais c’était une autre histoire, alors ne faisons pas de digression.

Tout le monde comprenait combien il était inutile d’aller à l’encontre de ceux qui avaient vaincu Verlaine.

Après que chaque territoire d’Elsain, la région démoniaque, se soit rendu, les requêtes demandant de tuer des monstres avaient chuté brusquement et avaient été bientôt remplacées par des demandes de tuer des bêtes dangereuses. Pourtant, la possibilité que des monstres attaquent notre pays n’était pas nulle, alors les aventuriers avaient continué à chercher le pouvoir et étaient restés vigilants.

« Je suis heureuse que tu aies vaincu mon Seigneur. Si tu avais prévu d’exterminer chaque démon ou monstre, même moi, je n’aurais pas eu d’autre choix que de me battre. J’aurais essayé d’apaiser le chagrin de ma race, » répondit Béatrice.

« J’en suis certain. Une reine des fantômes ne se bat pas d’habitude, donc je pense que la tienne aurait été en sécurité, mais je ne parierai pas là-dessus, » répondis-je.

« Une fois mon contrat annulé, me permettant ainsi à nouveau de quitter ce manoir, j’irais rendre visite à mes proches. Ma famille est du Rokuma, donc quand je leur aurai dit que je suis reconnaissante au Maître, ils réfléchiront sûrement à une récompense appropriée…, » déclara Béatrice.

« Non, attends, je n’ai fait qu’aider. Si possible, j’aimerais que tu continues à travailler comme gérante de ce manoir, mais je ne peux pas t’y obliger. N’hésite pas à choisir ce qui est le mieux pour toi à partir de maintenant, » déclarai-je.

Je lui avais dit de penser à elle. Si elle était restée ici, grâce à ses pouvoirs, Yuma aurait pu évacuer de temps en temps son stress.

Cependant, cette jeune fille isolée avait encore une famille qui l’attendait.

« Je comprends. Je penserai à mon propre avenir, » répondit Béatrice.

« Super. Assure-toi de ne pas attraper un rhume... attends, les reines des spectres peuvent-elles tomber malades ? » demandai-je.

« Oui, les morts-vivants peuvent contracter des maladies, mais nous n’avons pas une telle maladie. Merci de t’inquiéter pour moi, » déclara Béatrice.

Son déshabillé, qui était maintenant plié sur la commode près du lit, était fait d’un tissu spécial appelé « tissu éthéré ».

C’était le seul matériau qui pouvait se dématérialiser avec son corps.

Si un mort-vivant se joignait à ma guilde, j’aurais pu accepter plus de demandes. Mais je ne le lui avais pas demandé. Je ne voulais pas limiter la liberté qu’elle allait enfin goûter à nouveau.

 

☆☆☆

 

Yuma avait érigé une barrière et les fantômes avaient cessé de se rassembler dans le manoir. Avant midi, les filles étaient retournées dans leurs maisons respectives, et après avoir vu Yuma au loin, j’étais retournée dans ma guilde.

Verlaine avait accepté de voir Béatrice.

Le soir suivant, alors que nous entrions dans le jardin du manoir, j’avais vu la reine des fantômes, qui se tenait derrière la fenêtre de la salle à manger, et qui s’inclinait énormément devant nous.

« Tu n’as pas à t’incliner, je ne suis plus le Seigneur-Démon. J’ai laissé le royaume entre les mains de mon frère cadet, » déclara Verlaine.

« Seigneur Verlaine, avez-vous abdiquée... ? » demanda Béatrice.

« Oui. Ta famille m’a beaucoup aidé pendant les trente ans où j’ai été reine. Ne t’inquiète pas, ils vont bien, je leur ai ordonné de protéger l’arrière-garde quand j’ai combattu l’expédition, » déclara Verlaine.

« Qu... !? Le Rokuma devrait servir de bouclier au Seigneur-Démon. Pourquoi avez-vous donné un tel ordre... ? » demanda Béatrice.

Verlaine avait annulé la Magie illusoire qui l’avait transformé en elfe à la peau claire. Sa peau sombre et ses cheveux violets lui donnaient l’air d’un succube... Normalement, elle ressemblait à une elfe gracieuse, mais maintenant elle ressemblait à l’incarnation même d’une servante diabolique.

« Parce que nos anciens ennemis ont essayé de ne pas attirer l’attention et se sont déplacés furtivement. Ils ont fait des escarmouches dans des endroits importants et ont disparu par la suite. Puis, quand tes parents étaient absents, ils sont entrés par effraction dans mon château et m’ont vaincue. Franchement, je n’arrivais pas à croire à quel point ils étaient forts, et j’ai trouvé absurde qu’ils ne soient que des enfants, » répondit Verlaine.

« Ce jour date d’il y a cinq ans... Les personnes qui ont acheté ce manoir à l’époque en parlaient, » déclara Béatrice.

« J’avais alors treize ans, et Yuma, la plus jeune d’entre nous, avait neuf ans, » dis-je.

Lorsque Béatrice avait appris que Cody et moi étions les membres les plus âgés, elle s’était tue et Verlaine avait eu l’air émotive.

« Queue... non, il n’y a aucune raison de le cacher maintenant, alors je t’appellerai Maître. Il a pris quelque chose de très important pour moi, alors je lui ai juré fidélité afin de le récupérer, » déclara Verlaine.

« Seigneur Verlaine, est-ce que cela signifie que vous avez promis d’être son serviteur ? » demanda Béatrice.

« ... Pas précisément, mais je ne vais pas être précise concernant ça, » répondit Verlaine.

« Non, attends, tu n’as rien promis, n’est-ce pas ? Ce que je pense, c’est qu’il ne devrait pas y avoir de contrat ou quoi que ce soit du genre, n’est-ce pas ? » demandai-je..

« N-Non, Maître Queue…, » commença Béatrice.

« En parlant de ça, Béatrice, annulons tout de suite ton contrat. Je te ferai revenir sous mon contrôle, mais cela signifie que tu serais aussi sous celui de cet humain. Ça ne te dérange pas ? » demanda Verlaine.

Je n’arrêtais pas de penser à ses paroles. Quand avait-elle fait une telle promesse... ? Avais-je mal interprété ses paroles et créé une chance d’être lié par un serment ?

Quand cela s’était-il produit ? Peut-être que la réponse était...

Son pendentif. C’était la seule chose qui aurait pu nous lier.

« ... Hm ? Non, je n’ai pas l’intention de la mettre sous mon contrôle... Si elle changeait son Maître, ne ressemblerait-elle pas à une servante ? » demandai-je.

« Ne penses-tu pas que ça pourrait lui plaire ? Pourquoi une reine des fantômes devrait-elle te quitter, maintenant qu’elle a goûté ton pouvoir magique ? C’est peut-être moi qui pense ça, mais je trouve que ton énergie est vraiment relaxante, » déclara Verlaine.

« Seigneur Verlaine, je sais que... très bien. Il y a beaucoup de son énergie en moi…, » déclara Béatrice.

On aurait dit qu’elle était d’accord.

Je pensais à inspecter ça une autre fois, mais ce n’est pas préjudiciable pour moi.

« Commençons, alors. Lorsque la réserve d’énergie magique du Maître sera épuisée, tu lui fourniras la tienne, et tu devras répondre à ses ordres quoiqu’il arrive. Est-ce que tu comprends ? » demanda Verlaine.

« S’il est d’accord... J’accepte volontiers ces conditions…, » Béatrice l’avait dit en rougissant.

Je ne pensais pas que Verlaine voulait me lier à d’autres monstres... était-ce parce qu’elle voulait qu’on coexiste ?

« Sur ces mots, moi, Verlaine Elsain, j’emprunte l’ancien pouvoir du Seigneur-Démon pour renouveler ton serment ! » déclara Verlaine.

« Kh... ! »

Verlaine avait touché la gorge de Béatrice, et un symbole blanc bleuté s’était mis à briller sur sa peau pâle. La même chose était apparue sur le dos de ma main, mais je n’avais pas l’impression d’avoir chaud ou froid. C’était le sentiment bizarre que seule la magie de contrat pouvait provoquer.

« Grave ton nouveau nom sur ton âme, Béatrice d’Argent — servante de Queue d’Argent — ainsi, ton ancien lien s’est défait définitivement ! » déclara Verlaine.

« ... J’accepte humblement Béatrice d’Argent comme nouveau nom, » déclara Béatrice.

Alors que le rite avait touché à sa fin, la reine des fantômes me regarda en étant emplie de joie tout en se caressant la nuque.

« Je suis maintenant à toi, Maître, » déclara Béatrice.

« En tant qu’invocateur et invocation, oui. Ce n’est rien qui puisse détruire ma paix de tous les jours, » déclarai-je.

« Qui sait ? Tu lui as épargné la vie, mais elle pourrait prendre la tienne à l’avenir, tout comme moi... En attendant, veillons l’une sur l’autre, car nous aimons notre Maître, » déclara Verlaine.

« Encore une fois, avec ces bêtises... Ne crois pas que je te laisserais si facilement ne pas m’aimer, » déclara Béatrice.

Elles avaient toutes les deux ri à leurs blagues. L’ancienne Seigneur-Démon et son serviteur avaient surmonté le mur social qui les divisait et avaient finalement pu devenir amies.

***

Chapitre 20 : Le talisman et les sauveuses masquées

Deux jours plus tard, les parents de Yuma, portant le manteau habituel, étaient revenus dans mon bar. Mais je ne m’attendais pas à voir leur fille avec eux.

« Merci d’avoir répondu à notre demande, » déclara le père.

« Il n’y a pas de mots pour exprimer à quel point nous vous sommes reconnaissants…, » déclara sa mère.

« Notre Maître de guilde veut vous dire que nous pensons que cette récompense sera largement suffisante, » déclara Verlaine.

Au début, je ne voulais pas leur prendre de l’argent. Grenadine nous avait remis plus de cinq cents pièces d’or, mais j’avais dit à Verlaine de n’en prendre que deux cents. Obtenir ce manoir était plus que suffisant, et même après avoir couvert le coût de notre séjour, nous aurions eu un surplus de près de cent cinquante pièces d’or.

Yuma m’avait approché pendant que ses parents continuaient à parler à la barmaid. Sous son manteau, elle portait une blouse et une jupe, différente des vêtements ordinaires que j’avais vus sur elle il y a quelques jours.

« Ça fait un moment, Queue. Je peux m’asseoir ici ? » demanda Yuma.

« Bien sûr. Tu sembles aller bien mieux qu’avant, » avais-je dit.

« Oui, tout cela est grâce à toi…, » avait-elle déclaré en me fixant du regard.

« Je ne le pense pas... ? Je n’ai rien fait. Nous n’avons fait que nous parler, rien de plus…, » avais-je répondu.

Depuis qu’elle était ici, elle avait peut-être remarqué quelque chose... elle n’allait probablement pas accepter ainsi mon excuse.

« Oh, vraiment ? Alors... ne m’as-tu pas vue nue ? » demanda Yuma.

Ses paroles étaient comme des couteaux tranchants. Si j’avais dit que ce n’était pas moi, même une philanthrope comme Yuma aurait pensé que j’étais un menteur.

« Je suis désolé, tu as gagné. Mais je ne voulais pas que tu le découvres…, » déclarai-je.

« Je ne confondrais jamais ton âme avec celle de quelqu’un d’autre. Au cours de ces cinq années, j’ai pensé à la réconforter tous les jours…, » déclara Yuma.

Était-ce son salut habituel ? Je commençais à me poser des questions. Était-il possible que cette prêtresse psychopathe voulait la même chose que tout le monde ?

Dans tous les cas, mon âme semblait avoir une signification spéciale pour elle. Je pouvais le dire après l’avoir connue pendant si longtemps.

Même si elle ne buvait pas une goutte d’alcool, ses yeux comme enivrer me regardaient d’un air séduisant. Verlaine avait dit que mon pouvoir magique était relaxant... mais mon âme était-elle enivrante pour ceux qui pouvaient la voir ?

« Lady Yuphila est vraiment extraordinaire. Elle n’a pas utilisé son pouvoir pendant longtemps, alors elle a fini par purifier tout le capital en une seule fois…, » déclara Verlaine.

« En effet... pour devenir prêtre à part entière, il faut aussi se charger régulièrement des fantômes, mais c’est devenu impossible pour les autres. Néanmoins, de plus en plus de gens font des dons à l’église, » répondit Grenadine.

« Nous lui avons dit d’éviter d’utiliser ses pouvoirs exactement pour éviter cette situation... mais elle est devenue trop stressée, alors nous allons essayer de trouver une solution pour cela, » déclara sa mère.

C’était compréhensible. Elle était si forte que, si elle utilisait son pouvoir, tous les autres prêtres perdraient leur emploi pendant un certain temps... comme maintenant.

Mais les fantômes naissaient en fonction de la vie qu’ils avaient eue, donc ce n’était qu’une question de temps avant que certains n’apparaissent. Cependant, si Yuma utilisait à nouveau son pouvoir, toute la capitale aurait été à nouveau purifiée.

J’avais déjà pensé à une solution, mais elle aurait dû boire un cocktail spécial avant.

« Yuma, as-tu un plan pour ne pas finir comme ça à nouveau ? » demandai-je.

« Oui, j’y ai déjà pensé, » me répondit-elle.

Elle avait alors sorti un masque de son sac... Je ne l’avais jamais moi-même porté, mais je l’avais déjà vu.

Elle s’était approchée de moi et avait commencé à chuchoter d’une voix si douce qu’elle aurait pu m’endormir. C’était si doux et enivrant que cela m’avait donné envie de me consacrer entièrement à sa religion.

« Si les personnes savent que je suis une prêtresse d’Albein, ils me donneront une récompense pour les fantômes purifiés... mais si je porte ce masque et que je deviens une prêtresse errante, je peux éviter ça, » déclara Yuma.

« ... Es-tu sérieuse ? » demandai-je.

« Oui, je le suis. De cette façon, je peux voyager à l’extérieur de la capitale et aider périodiquement les villages, mais cela signifie aussi que je serai loin de l’orphelinat, donc je devrais me préparer pour ça, » déclara Yuma.

Elle ne voulait pas quitter la chapelle ou l’orphelinat, mais c’était le seul choix qu’elle avait pour évacuer son stress. Si elle était sérieuse, j’allais faire de mon mieux pour l’aider.

Verlaine avait immédiatement compris mes intentions.

« Il existe une solution pour empêcher Lady Yuphila de retomber malade. Qu’elle se déplace périodiquement en dehors de la capitale pour de courts voyages, afin qu’elle puisse utiliser son pouvoir librement, » déclara Verlaine afin que tout le monde soit au courant, alors qu’avant ça, Yuma ne l’avait dit qu’à moi.

« Je vois... mais est-ce que ce sera pour le mieux ? Elle se soucie beaucoup de l’orphelinat…, » déclara son père.

« Nous pouvons vous fournir des personnes compétentes pour s’assurer que les enfants seront en sécurité même en l’absence de Lady Yuphila, » déclara Verlaine.

« Voudriez-vous aller aussi loin pour nous... ? Merci beaucoup, oui, merci beaucoup, » déclara Grenadine.

Les parents de Yuma s’étaient inclinés devant Verlaine, puis Grenadine avait sorti quelque chose de sa poche de poitrine.

« Qu’est-ce... ? » demanda Verlaine.

« C’est le talisman remis aux organisations qui sont profondément liées à la Sainte Église d’Albein. Nous n’en avons jamais donné à une guilde, mais nous voulons que le Verseau d’Argent l’accepte, » déclara-t-il.

Le Talisman de la Sainte Église d’Albein !? Si j’avais ça, l’église aurait été en premier dans ma guilde pour faire leurs demandes !

Jusqu’à présent, le Bélier Blanc était la préférée en raison de sa réputation, mais maintenant nous aurions la priorité sur eux. Bien sûr, nous n’étions pas obligés d’accepter leurs demandes.

Nous ne pourrions accepter que les plus importants, pour ne pas être remarqués.

Il ne fallait pas faire plus que ça. Devais-je vraiment l’accepter ?

« Nous l’acceptons volontiers, » déclara Verlaine.

« Merci. Quoi qu’il en soit, Monsieur Queue d’Argent a vraiment fait du bon travail. Cette guilde ne peut être trouvée qu’en la cherchant précisément, mais elle est étonnante. Est-ce que c’est ce qu’un ancien héros peut faire ? » demanda Grenadine.

« S’il vous plaît, gardez ça secret. Notre succès est un fait acquis, mais ce n’est pas l’attention de tous que cherche notre maître de guilde, » déclara Verlaine.

Grenadine et Fenna ne savaient pas qui j’étais. En les regardant, Yuma avait laissé échapper un léger rire, puis avait affiché une légère expression pleine d’excuses tout en décidant de ne rien leur dire.

« L’humilité est la première vertu de la doctrine d’Albein. Ce serait délicieux si ma fille choisissait un homme comme lui pour partager son avenir, » déclara Grenadine.

« Ghh ! *Toux* ! *Toux* ! »

Alors que l’alcool m’avait malmené ma gorge, Yuma m’avait tapoté le dos, inquiète.

« Mon chéri, Yuphila a encore quatorze ans. C’est encore tôt pour son mariage, » déclara Fenna.

« Euh, c’est vrai. Mais ce ne sera parfait que dans deux ans. Nous nous sommes aussi unis à cet âge, n’est-ce pas ? » demanda Grenadine.

« Mon chéri, s’il te plaît... pas devant d’autres personnes... c’est embarrassant…, » déclara Fenna.

Yuma avait rougi lors de leur charmant échange.

« D-Désolée... mon père est très heureux de ma guérison... C’est peut-être la première fois que je le vois aussi joyeux…, » déclara Yuma.

« J-Je vois…, » répondis-je simplement.

Je voulais lui demander comment elle se serait sentie si elle m’avait épousé, mais elle n’aurait jamais répondu. Yuma avait replacé les cheveux qui étaient devant son visage et avait touché ses oreilles rougies.

Je pouvais dire qu’elle était vraiment troublée.

Puis, l’archevêque avait avalé son verre et s’était levé.

« On devrait maintenant partir. Remerciez Monsieur Queue pour nous, s’il vous plaît, » déclara-t-il.

« Je vais le faire. Soyez prudent sur le chemin du retour, » répondit Verlaine.

« Merci. Nous vous reparlerons si quelque chose se produit à l’avenir, » déclara Grenadine.

Yuma était retournée auprès d’eux, et avant de sortir du bar, elle s’était tournée vers moi et avait légèrement agité la main.

« Félicitations pour avoir obtenu l’autorisation d’épouser Yuma, Monsieur l’ivrogne ! Fêtons ça ! » déclara une voix féminine depuis derrière moi.

« Woah ! Oh... salut, Aileen, » déclarai-je en constatant qui c’était.

Elle m’avait serré les épaules avant de s’asseoir à côté de moi et de verser dans un verre l’alcool de la bouteille qu’elle tenait.

« C’est vrai. J’ai oublié de te demander un truc. Comment as-tu donné de l’énergie à Béatrice ? » demanda Aileen.

« Es-tu vraiment curieuse à propos de ça... ? Nous n’avons partagé que mon lit, et rien de plus, » répondis-je.

« Puisque cette méthode a une faible efficacité, une bonne partie de la surface de vos corps aurait dû se toucher, alors peux-tu donc entrer dans les détails, Monsieur ? Il me serait également utile pour certaines références futures, » déclara Verlaine en essuyant un verre.

À ce moment-là, j’étais devenu leur jouet contre ma volonté, mais si j’avais éludé la question, les choses auraient pu mal tourner.

Je m’étais déjà préparé à ça. Et de toute façon, ce n’était pas comme si j’étais coupable de quoi que ce soit, donc il n’aurait pas dû y avoir de problème.

« ... OK, Verlaine a raison. Nous devions avoir une grosse partie de nos peaux qui se touchaient, donc…, » commençai-je.

Elles avaient l’air vraiment très sérieuses pendant mon explication, même quand j’avais dit qu’on avait dormi ensemble en étant tous les deux nus.

Quand j’étais arrivé sur cette partie de l’histoire, le visage d’Aileen avait rougi, et les yeux de Verlaine avaient commencé à briller.

« ... Maître, vous ne pouvez pas imaginer à quel point je suis envieuse en ce moment, » déclara Verlaine.

« E-Et tu n’as pas eu envie de faire quelque chose d’amusant avec elle ? Et je me demande, n’es-tu pas intéressé par les filles ? » demanda Aileen.

« Je ne faisais que lui donner mon énergie, alors je n’y ai pas trop réfléchi. Si nous faisions la même chose, Aileen, ce ne serait pas plus audacieux que ça, » avais-je dit.

« ... Vraiment ? Je vois... Je suppose que dans ce cas, on va devoir essayer~♪ ! » déclara Aileen.

« Lady Aileen, vous semblez de bonne humeur. Voudriez-vous changer de rôle avec moi et devenir le barman pendant un certain temps ? » demanda Verlaine.

Étant donné le ton acerbe de Verlaine, j’avais compris qu’elle voulait me faire quelque chose après son quart de travail. J’aurais donc à négocier afin d’utiliser ses genoux comme oreiller, mais je devais aussi penser à une solution si les négociations échouaient.

 

☆☆☆

 

Deux semaines avaient passé.

Dans le sud-ouest d’Alvinas — la capitale —, une prêtresse, une mage et une artiste martiale avaient commencé à visiter les villages.

Ces trois filles masquées avaient sauvé les habitants face à des esprits et des monstres, et s’étaient élancées l’instant d’après avant de disparaître sans laisser de traces. Personne ne connaissait leur nom.

Environ un mois plus tard, elles avaient commencé à se manifester même dans les faubourgs de la capitale.

Un quatrième homme masqué, qui connaissait très bien les « sauveuses masquées », comme on les appelait désormais, veillait sur elles depuis l’ombre à chacune de leurs sorties.

***

Chapitre 21 : La morosité du général de l’armée et le plan du noble

Grâce à la promesse que j’avais eue de Béatrice, j’avais pu mettre la main sur l’ancien manoir de la famille Stollen. L’agent immobilier ne s’attendait pas à ce que je reste dedans, alors la seule chose qu’il pouvait dire était : « Je suis vraiment content que vous l’aimiez. »

Plus personne ne s’enfuyait à cause des apparitions des fantômes, ce qui signifiait que l’agent immobilier ne pourrait plus tirer un revenu du manoir, mais d’un autre côté, ils lui avaient probablement fait part de leur colère, de sorte qu’il était soulagé de s’en être débarrassé.

J’avais transformé le manoir en centre de loisirs pour les membres de ma guilde. Bien sûr, je n’y arriverais pas de moi-même, alors j’avais dû embaucher plus de personnel pour ça. Si Béatrice restait tangible, les gens découvriraient qu’elle n’était pas humaine à cause de son iris doré, et je lui avais donc demandé de porter un masque qui ne couvrait que ses yeux.

Les masques étaient devenus très populaires grâce aux membres du personnel du Verseau d’Argent, et ce n’était pas bon pour quelqu’un qui détestait se démarquer comme moi. Même Mylarka avait dit qu’ils étaient parfaits pour rencontrer des amis, et quand Aileen m’avait dit que cette « tendance » s’était encore plus répandue grâce aux sauveuses masquées, j’avais presque craché ma boisson. Inutile de dire que la prochaine fois que Mylarka était passée, elle m’avait rappelé « Queue, tu as commencé ça » pour enfoncer le couteau dans la plaie.

 

☆☆☆

 

Les rumeurs sur les sauveuses masquées ne cessaient de croître. Même si leur apparence était dissimulée, les gens comprenaient qu’ils étaient trois beautés, mais personne n’avait remarqué qu’elles faisaient partie de l’expédition contre le Seigneur-Démon. Quoi qu’il en soit, on disait qu’il s’agissait de filles avec des voix jeunes, dont l’âge était encore un sujet brûlant.

Même les invités de mon bar en parlaient souvent.

« Pourquoi personne ne parle-t-il de moi à la place ? Mon travail consiste à aider et à sauver les gens. Le fait de m’ignorer, c’est méchant, » s’exclama Cody.

Les rumeurs de leurs réalisations avaient même atteint Cody, qui, après avoir entendu parler de la petite prêtresse, de la sorcière blonde et de l’artiste martiale exceptionnelle, avait compris de qui on parlait en quelques instants.

« Nous étions camarades, et je viens ici parce que je pense toujours que nous le sommes, Queue ! Hé, je me plains auprès de toi, tu m’écoutes au moins !? » cria Cody.

« Oui, je le fais... et je ne suis qu’un ivrogne ici, alors ne crie pas mon nom comme ça, s’il te plaît, » répondis-je.

« Pff... tu as raison. Désolé, je me suis emporté. Mais je le pense vraiment, » déclara Cody.

Le général de l’armée n’était pas bon ou mauvais, c’était une personne extrêmement honnête et sérieuse. Cependant, la première chose qu’il me montrait chaque fois qu’il passait, c’était son côté grincheux.

J’avais compris ce qu’il voulait dire... Il avait toujours été comme une ombre qui suivait nos actions, même pendant notre expédition.

De mon côté, j’étais comme un parent qui veillait sur ses enfants. Mylarka n’avait ainsi pas détruit l’environnement avec sa Magie d’Annihilation, Aileen avait contrôlé son côté féroce pour ne pas effrayer les personnes, et Yuma s’était préparé pour purifier seulement les monstres spectraux les plus dangereux, pour ne pas ainsi priver les prêtres des villages de leur travail. Nous étions le groupe idéal des héros.

Les filles se comportaient si parfaitement que je n’avais rien à faire, mais je pouvais voir qu’elles s’amusaient beaucoup. Peu importe la faiblesse de leur adversaire, elles n’avaient pas hésité. Elles brillaient comme de précieuses pierres précieuses... Même si on ne peut pas en dire autant de leur personnalité.

« Cody, tu serais découvert tout de suite si tu utilisais ton épée. Tu es le seul à te battre comme ça, » déclarai-je.

« Je ne peux pas utiliser une épée normale et venir avec toi ? Je suis peut-être occupé, mais je peux trouver du temps, » répondit Cody.

« Bien sûr, je te contacterai si nécessaire, alors tu devrais arrêter de boire des boissons ainsi, » répondis-je.

« Si tu le dis, je serai toujours prêt. Je suis sûr que tu le penses vraiment, alors je te fais confiance, Qu... non, Monsieur l’ivrogne, » déclara Cody.

« Nous n’aurions besoin de toi que si la nation est en danger, » annonçai-je.

« Hahahaha... Je ne devrais pas souhaiter que cela arrive, étant donné ma position, n’est-ce pas ? » demanda Cody.

Ce jour-là, il avait demandé de l’alcool fort au lieu d’une bière. C’était du rhum vieilli dix ans, dilué avec de l’eau pour affaiblir son goût fort. L’eau avait été puisée dans les Grottes de l’Eau, un endroit au nord de la capitale, en coupant de la glace pure, qui était de l’eau souterraine gelée au fil du temps. Le fait de boire lui avait ainsi donné une résistance à la glace.

« Monsieur, puis-je vous poser une question grossière ? Vous êtes le plus beau client ici, et vous devriez être très populaire auprès des filles. Quand les nobles vous invitent à leurs fêtes, je suis sûre qu’ils attendent impatiemment de vous voir, alors pourquoi venez-vous ici si souvent ? » Verlaine était vraiment curieuse à ce sujet et ne pouvait pas retenir sa curiosité.

La glace qui se reflétait sur les yeux bruns de Cody clignait, et il détournait son regard de son verre en répondant avec un sourire. « Je n’ai pas beaucoup d’amis, alors venir ici est la seule façon de me détendre. »

« Y a-t-il quelqu’un à qui vous pensez beaucoup dans l’armée ou parmi vos subordonnés ? Par exemple, une collègue sur votre lieu de travail, » demanda Verlaine.

« Personne n’essaie d’être général, puisque je suis devenu général sans avoir gravi les échelons. Ils ne me voient pas comme leur égal. Mes subordonnés ont commencé à dire que je suis une sorte de Dieu, mais bien que ce soit une blague, je ne peux pas vraiment montrer mon côté humain, » répondit Cody.

« Tu traverses une période difficile. Bois autant que tu le veux, j’enlèverai les toxines de l’alcool de ton corps avant que tu ne rentres chez toi, » déclarai-je.

« Non, j’ai besoin d’être au moins pompette, sinon je ne dormirais pas ce soir. Et il faudrait que tu me touches pour ça, n’est-ce pas ? » demanda Cody.

Un mâle touchant un autre mâle près du foie pour le guérir, quel était le problème ? En y pensant, je ne l’avais jamais touché et il n’avait jamais été si blessé que j’ai dû lui enlever ses vêtements.

Il y avait des personnes qui n’aimaient pas exposer leur corps aux autres, alors j’avais deviné que Cody était l’un d’entre eux. Je ne pensais pas qu’il était méchant même s’il ne voulait pas prendre un bain avec moi.

« Mais pourquoi ? Si vous voulez éviter la gueule de bois, n’est-ce pas la magie idéale que possède Monsieur... ? » demanda Verlaine.

« Parce que je ne veux pas penser à quoi que ce soit avant demain. Une dernière tournée, » déclara Cody.

Avec un sourire éclatant, il avait avalé son verre et en avait demandé un autre. Il savait très bien quand s’arrêter, c’était pour ça que je ne l’avais jamais vu ivre.

C’était presque l’heure de la fermeture, et alors que j’étais sur le point de demander la dernière commande, la sonnette avait retenti et une fille portant un manteau indigo, selon la couleur de mercredi, était entrée dans le bar.

Même avec le bruit des clients restants, l’interrupteur présent chez Verlaine et moi avait basculé en voyant ça.

La jeune fille avait l’air forte et volontaire alors qu’elle marchait vers le comptoir, et une fois devant le comptoir, elle avait regardé Verlaine.

« ... Donnez-moi du lait. Mais cela devrait être ce que je ne peux boire qu’ici, » déclara-t-elle.

« Je vous demande pardon d’en parler, mais c’est un lieu de rassemblement pour messieurs et mesdames, » répondit Verlaine.

« Et alors ? J’ai commandé du lait. Dans tous les cas, je veux ce que je ne peux boire qu’ici, » insista la femme.

Elle m’énervait. Qu’est-ce qu’elle avait ? Elle était d’une grande beauté, mais avec ce comportement agressif, elle avait laissé une première impression terrible. Quel gâchis complet... mais j’avais autre chose à penser.

Elle n’allait probablement pas demander quelque chose de facile.

Mon sixième sens s’était mis à crier. Elle allait nous donner une tâche impossible.

« ... Certainement. Est-ce que le mélange spécial de la maison vous convient ? » demanda Verlaine.

« C’est très bien. Faites-le juste pour moi... est-ce bon ? » demanda la femme.

« Oui. Nous avons maintenant confirmé que vous, mademoiselle, êtes une cliente importante, » répondit Verlaine.

Elle avait enlevé son capuchon et s’était assise à deux sièges de Cody, qui faisait un visage étrange.

Il avait enlevé furtivement le dessous de son verre et il avait utilisé son doigt mince pour écrire sur le papier « serviteur d’un noble ».

« J’ai entendu dire que vous acceptez n’importe quel type de travail. Je pense que c’est impossible, mais peut-être que ça vaut le coup d’essayer... puisque je suis moi-même impuissante. Je ne devrais pas être ici, mais…, » commença la femme.

« Être si contrariée ne vous aidera pas, jeune fille. Du calme, » lui avais-je dit, et j’avais établi un contact visuel avec Verlaine pour commander un verre.

Cody avait lu l’humeur et s’était légèrement éloigné du comptoir.

J’avais ensuite fait glisser le verre sur le comptoir, qui s’était arrêté juste devant elle.

« Qu’est-ce que ça veut dire ? » demanda-t-elle.

« Est-ce la première fois que vous venez ici ? Permettez-moi de vous accueillir en tant qu’habitué, » déclarai-je.

« Berk, dégoûtant ivrogne. Voir quelqu’un qui boit si jeune jusqu’à cette heure tardive est vraiment déplorable, » cracha la femme.

« Mademoiselle, nous sommes terriblement désolées, mais c’est la dernière commande. Si vous voulez, on peut continuer à parler après la fermeture du bar. J’espère que vous apprécierez votre boisson en attendant, » déclara Verlaine.

Elle avait l’air de quelqu’un qui n’acceptait rien des étrangers, mais après m’avoir regardé avec son regard aiguisé, elle haussa les épaules et abandonna.

C’était quoi son comportement théâtral ?

La manipuler n’aurait pas été si difficile pour moi... Je n’avais qu’à écouter et à garder mon sang-froid.

« C’est quoi ce truc jaune, un abricot ? Qui aurait imaginé qu’un bar dans la banlieue servirait des fruits frais ? » demanda-t-elle.

Sa boisson servait à calmer son esprit et à détendre son corps.

Il avait été dit une fois qu’un « Abricot de Paix » avait calmé une femme furieuse d’une petite tribu dans la zone humide orientale d’Albein pendant trois jours d’affilié, la faisant ressembler à une mère affectueuse. C’était une ressource précieuse qui n’aurait dû être utilisée que pour des cas similaires.

De plus, l’ajouter à une boisson alcoolisée amplifiait encore plus son effet.

Je me demandais ce qui se serait passé si j’y avais mélangé du pur jus de noix de coco vierge... et après avoir regardé la réaction de la fille, j’avais eu ma réponse.

« Hmm... ce n’est pas aussi aigre que je m’y attendais. Je me sens si chaude…, » murmura la femme.

« L’aimez-vous bien ? » avais-je demandé.

La jeune fille ne répondit pas et fixa le verre pendant un certain temps, puis elle jeta tout son embarras aux poubelles et elle avala d’un coup son verre.

L’instant d’après, son expression raide et lugubre s’était détendue et son visage s’était éclairci. Les effets étaient apparus tout de suite.

« S’il vous plaît, laissez-moi reprendre tout ce que j’ai dit plus tôt... peut-être que ma demande ne sera pas un problème pour une grande guilde, alors je vous prie de m’écouter. Si personne ne fait quoi que ce soit ou si quelqu’un le fait d’une mauvaise manière, le pays tout entier sera en danger, » déclara la jeune femme.

Cody, l’entendant parler poliment, avait ouvert les yeux et m’avait regardé, tandis que je faisais semblant de ne pas être intéressé et de simplement siroter ma bière.

« Est-il possible pour vous de détruire les plans d’une certaine personne ? Je veux vous demander votre aide pour sauver ce pays, » demanda-t-elle.

« ... Qui pourrait être cette personne ? S’il vaut mieux ne pas dire ce nom à haute voix…, » déclara Verlaine.

Verlaine lui avait donné la feuille de commande et une plume d’oiseau, et avait attendu que la jeune fille écrive. Puis, elle avait à peine bougé la bouche, s’assurant que personne ne s’en apercevrait, pour me laisser lire sur ses lèvres.

« Zevias Vinceburg ». Le père de Jean Vinceburg, l’homme qui aurait dû épouser la princesse Manarina...

Je ne m’attendais pas à m’impliquer à nouveau avec cette famille.

***

Chapitre 22 : Le chagrin du serviteur et la guilde inébranlable

Alors que le bar avait fermé, la jeune fille avait déjà fini son abricot mélangé avec de l’alcool et du jus de noix de coco vierge. Une fois qu’elle s’était calmée, l’humeur s’était radicalement adoucie.

« C’est un peu tard pour les présentations, mais je m’appelle Kirsch Auguste. Je suis vraiment désolée pour mon impolitesse, » déclara-t-elle.

Elle avait un fleuret attaché à la taille, alors j’avais deviné qu’elle était quelque peu douée pour les arts martiaux. Son score aurait pu être d’environ trois mille d’après mon estimation, donc elle était probablement l’égale d’un aventurier de Rang B.

Je disais par là qu’elle était au-dessus de la moyenne des serviteurs d’une famille noble.

Les gens comme elle préféraient généralement vivre librement, sans être liés à quelqu’un.

« Désolée d’arriver à l’heure de fermeture, » déclara-t-elle.

« Ne vous inquiétez pas, je suis sûre que vous avez dû travailler pendant la journée, et vous êtes venue ici à cette heure pour ne pas attirer l’attention, » déclara Verlaine.

« ... Exactement. Je suis l’assistante de la noble famille Vinceburg... Nous pouvons maintenant dire que je suis une traîtresse, mais... cette fois-ci…, » déclara Kirsch.

Le bar était fermé, et Cody et moi écoutions depuis la cuisine.

« Es-tu sûr de vouloir t’en mêler ? Tu dois travailler demain, et c’est un problème pour ma guilde. Pourquoi es-tu si inquiet par ça ? » demandai-je à Cody.

« Qu’est-ce que tu racontes  ? Si le duc prépare quelque chose, il y a peut-être quelque chose que je peux faire ! Ne t’inquiète pas, je respecterai tes choix, alors n’hésite pas à m’utiliser comme tu le souhaites ! » déclara Cody.

« Habituellement, le plus fort ne bouge pas avant la fin, » murmurai-je.

Je m’étais plaint, mais il avait simplement souri à ma remarque cynique, alors je n’avais rien dit d’autre. Cody avait apporté son verre, qui n’était pas encore vide, à ses lèvres tout en écoutant les filles parler au comptoir.

« Alors... qu’est-ce que Zevias Vinceburg planifie ? » demanda Verlaine.

« Maître Zevias a laissé son fils, le Seigneur Jean, devenir chef de famille. Pourtant, j’ai découvert qu’il se déplace dans l’ombre dans un certain but tout en gardant le contrôle sur le pouvoir de sa famille, » répondit Kirsch.

Je pouvais imaginer l’expression de Kirsch simplement en entendant à quel point elle était agitée.

Je voulais complimenter Cody pour avoir gardé son sang-froid, mais étant donné sa puissance, c’était évident que presque rien ne pouvait le troubler.

« Ils essaient d’avoir une alliance avec la République de Velvechia pour attaquer les frontières nationales, » expliqua Kirsch.

« ... Ils veulent provoquer une révolte ? » demanda Verlaine.

« Oui... Je sais que cela peut sembler absurde, mais j’ai la preuve qui le confirme. Le duc et Velvechia ont continué à échanger des lettres au sujet de leurs plans en utilisant un messager secret qui a été agressé et volé lors d’un trajet par des voleurs, » répondit Kirsch.

Honnêtement, je ne pouvais pas dire si c’était bon ou mauvais, mais si je voulais maintenir la paix d’Albein, j’avais deviné que c’était ce dernier qui importait.

J’avais rejoint l’équipe de l’expédition contre le Seigneur Démon exactement parce que je ne voulais pas vivre dans une époque chaotique. Peut-être que j’aurais pu de toute façon vivre en faisant ce que je voulais, mais je voulais que les gens ne vivent pas dans la peur d’être attaqués quotidiennement par des monstres. Je voulais aussi une vie meilleure pour eux.

« Ont-ils menacé la famille de votre maître ? » demanda Verlaine.

« Oui. Cependant, la lettre a été écrite avec un code crypté, de sorte que les voleurs ont dû torturer le messager, et c’est ainsi qu’ils connaissaient le lien entre Vinceburg et Velvechia. On m’a ordonné d’être le chef d’un groupe pour la récupérer, et…, » répondit Kirsch,

J’avais compris que les ordres étaient de ne pas laisser échapper les voleurs. Je n’étais pas du genre à tirer des conclusions hâtives, mais ce développement était tout à fait naturel.

« ... Pour tous les tuer, n’est-ce pas ? » demanda Verlaine.

« ... Nous avions deux ordres. Le premier était de récupérer la lettre, et le second... était de les massacrer juste avant le début des négociations, » répondit Kirsch.

« L’avez-vous fait ? » demanda Verlaine.

Kirsch hésita avant de parler d’une voix tremblante. « ... Je ne pouvais pas leur pardonner d’avoir menacé mon Maître. On s’est battus, mais on ne les a pas tous tués. Puis, j’ai eu un mauvais pressentiment, alors j’ai utilisé la capacité de voir à travers tout pour lire la lettre sans endommager le sceau, même si c’était un acte impardonnable... »

N’importe quelle guilde de voleurs enseignait le pouvoir de transparence, ce qui permettait à l’utilisateur de voir à travers des matériaux minces comme le papier. Je pouvais utiliser une autre méthode, qui avait presque le même effet, donc je n’en avais pas besoin.

Une guilde de voleurs était différente de celle des aventuriers. L’apprentissage des compétences qu’ils enseignaient était illégal, puisqu’il y avait toujours beaucoup de criminels parmi leurs membres. Les instructeurs n’étaient pas des exceptions, en fait, il n’était pas rare qu’ils commettent des vols ou d’autres crimes.

Mais Kirsch avait servi Vinceburg, alors elle avait accepté le sale boulot et avait effacé la menace.

Les voleurs devaient être punis, mais elle ne pouvait pas détourner les yeux de la situation.

Elle était venue nous voir parce qu’elle n’arrivait pas à se débarrasser du sentiment que quelque chose de dangereux allait se produire.

« La République de Velvechia essaie-t-elle de faire équipe avec Vinceburg pour prendre le contrôle de ce pays ? » demanda Verlaine.

« ... Oui. Lord Jean voulait épouser rapidement la princesse Manarina pour gagner de l’influence dans la famille royale et ensuite faire des demandes en utilisant son statut nouvellement acquis…, » répondit Kirsch.

S’il avait utilisé le pouvoir de Velvechia, il aurait pu obtenir le trône. Il n’aurait plus besoin de la main de Manarina.

Si nous ne l’avions pas arrêté, Velvechia nous aurait peut-être déjà attaqués... le fait de penser ça était très troublant. Les humains seront toujours plus effrayants que les monstres.

« ... Queue, ça fait longtemps que tu n’as pas fait une telle tête, » déclara Cody.

« Qu’est-ce que tu racontes ? Je suppose que je ne peux pas dire que c’est la faute de mon verre, hein, » répondis-je.

« Combien de temps s’est écoulé depuis que j’ai senti mon sang bouillir comme ça ? J’imagine que je continue à venir ici pour ne pas oublier ce que ça fait d’être un héros, » déclara Cody.

« N’as-tu pas dit qu’étant donné ta position, tu ne devrais pas être heureux si le pays était en danger ? » demandai-je.

« Oui, je l’ai fait. Mais si je peux l’empêcher avant qu’on s’en aperçoive, tout ira bien. Tu aimes quand les choses sont faites comme ça, n’est-ce pas ? » demanda Cody.

Ne pas attirer l’attention est ce qu’il y a de mieux. Rien n’est un problème s’il est résolu avant qu’il ne le devienne.

Dans ce cas, les citoyens ne sauront pas qu’une guerre avait menacé le pays.

Si nous pouvions réussir, ils auraient vu la famille Vinceburg être privée de leur rang et de leur honneur pour une raison inconnue, ce qui signifiait qu’une des trois grandes familles nobles aurait été remplacée... si le Roi le voulait ainsi.

« J’aimerais apprendre à faire les choses de cette façon... mais mon épée est beaucoup trop visible, » déclara Cody.

« Oui, mais tu es la bonne personne au bon endroit. Il est très probable que je te demanderai ton aide cette fois, » déclarai-je.

« Ce n’est pas sûr, hein... ? Eh bien, j’ai hâte d’y être, » répondit Cody.

« Désolé, mais tu es toujours le plus fort. Je ne te ferai pas bouger si facilement, » annonçai-je.

Le verre de Cody était maintenant vide, ainsi que sa volonté de boire, mais comme je ne pouvais pas le guérir par la magie, j’avais remis un abricot dans un nouveau verre pour le faire dormir profondément pour la nuit.

« ... Est-ce le même que tu as servi à cette fille ? » demanda Cody.

« C’est assez efficace sur les filles, mais ça marche même sur les hommes. J’ai moi-même essayé, » répondis-je.

« Joli. Si tu fais boire ça à Mylarka et aux filles... non, je suppose que cela ne serait pas bon de trop les calmer…, » répondit Cody.

Je l’avais mélangé avec de l’eau gazeuse et je l’avais donné à Cody. C’est à ce moment-là que l’histoire de notre client avait atteint son apogée.

« Lady Kirsch, vous avez donc lu la lettre et confirmé qu’elle aurait dû être livrée à Velvechia et qu’il s’agissait des conséquences du flop du mariage, n’est-ce pas ? » demanda Verlaine.

« Oui. Velvechia s’était déjà préparée à attaquer ce pays en secret avec Maître Zevias. Ils ont érigé une forteresse et des murs défensifs, maintenant entièrement approvisionnés pour l’invasion, dans les plaines qui nous longent au sud, mais ce n’est qu’un appât. Ils ont l’intention d’attaquer depuis les montagnes inaccessibles du nord, parce que même si c’est une barrière naturelle, les gardes de ce côté-là ne sont pas très vigilants, » répondit Kirsch.

« ... Si Velvechia connaît un passage secret pour passer de là, ils conduiront sûrement une armée vers la capitale. Si la faction d’Albein remarque l’attaque, la capitale ne sera pas le seul champ de bataille…, » déclara Verlaine.

Verlaine avait beaucoup d’expérience de la guerre, alors elle avait rapidement compris le déroulement de la situation.

« Vinceburg est chargé de cette ligne de défense... mais s’ils aident l’ennemi à envahir…, » déclara Kirsch.

« Vous avez fait du bon travail en venant ici, Lady Kirsch. Si vos maîtres découvraient que vous en avez discuté avec une guilde, vous pourriez être arrêté, » déclara Verlaine.

« ... En effet. Mes subordonnés ont gardé le silence sur ma trahison, mais je me demande combien de temps cela va durer... Maître Zevias devient vraiment sauvage quand il s’agit d’échecs. Je pourrais même être expulsé pour ça…, » répondit Kirsch.

Ses paroles s’étaient arrêtées. Je pouvais parfaitement sentir sa situation, car sa vie était tellement en danger qu’elle était venue nous demander de l’aide.

« Je comprends que je ne devrais pas me sentir comme ça et je n’aurais pas dû trahir mon seigneur en premier lieu, mais…, » déclara Kirsch.

« Si le plan du Seigneur Zevias réussit, les citoyens en souffriront, donc votre détermination est importante. La Verseau d’Argent ne permettra, ni ne pardonnera quiconque vous toucherait, » déclara Verlaine.

Qui sait ce que Kirsch aurait pensé si elle avait su que Verlaine, qui venait de dire ces paroles vertueuses, était l’ancien Seigneur Démon... Se souvenait-elle de l’indignation d’un vassal trahissant son maître ?

Certaines parties de mon corps avaient commencé à me démanger quand je l’avais entendue dire que notre guilde était une guilde vertueuse, et Cody avait commencé à doucement rire en me regardant.

Puis, Verlaine avait laissé notre client attendre et était entré dans la cuisine pendant un bref instant.

Je lui avais fait un signe de tête et elle avait souri avant de retourner au bar.

Je ne pouvais pas hésiter devant ce choix.

Si c’était une question de commerce, il n’y aurait pas eu beaucoup de problèmes, mais une invasion visant la capitale était une autre affaire.

Je voulais juste vivre en paix. Boire tous les jours, travailler et rire tout en parlant de bêtises avec des amis. Rien de plus.

Qu’est-ce que je devrais faire pour que les choses restent ainsi ?

Bien sûr, exactement ce que j’avais fait jusqu’à présent.

Cody avait raison. Je devrais empêcher toute catastrophe... et je devrais secrètement me déplacer pour laisser quelqu’un d’autre, qui pourrait se le permettre, être le centre de l’attention.

« ... As-tu pris ta décision, Queue ? » demanda Cody.

« Je ne peux pas encore te laisser rejoindre les sauveuses masquées, mais je trouverai une solution. Reviens ici demain, » déclarai-je.

« C’est une promesse. Je vais tout te laisser, car je ne suis pas doué pour les choses compliquées, » répondit Cody.

Il avait aussi ce côté-là... il était vraiment enthousiaste pour vaincre les méchants, mais il n’était pas bon pour analyser les situations. Il aimait les choses simples et claires.

Après l’avoir accompagné jusqu’à la porte de derrière et l’avoir vu partir, j’avais écouté le reste de la discussion de la fille. Elles étaient à la partie où Verlaine avait montré le contrat et avait discuté de notre récompense.

« Étant donné votre demande, il sera difficile pour vous seule de nous offrir une récompense appropriée... mais parlons-en après avoir accompli cette tâche et calculons une rémunération appropriée. Cette guilde existe parce qu’Albein l’a enregistrée en tant que telle, donc, si nous voulons conserver notre licence, la récompense aura probablement des implications, » annonça Verlaine.

« Mais... est-ce que c’est quelque chose dont votre guilde devrait s’inquiéter seule... ? Et non pas tout le pays... ? » demanda Kirsch.

« Le taux de réussite de notre guilde, à l’exception des cas spéciaux qui vont à l’encontre des sentiments de nos clients, est de cent pour cent, quelle que soit la difficulté des demandes. C’est dommage que nous ne puissions pas le montrer pour vous donner de la confiance, mais nous allons plus loin que n’importe qui d’autre et disons que nous sommes les seuls à pouvoir le faire. Ce sont nos conditions, si vous voulez nous soumettre officiellement votre demande, » déclara Verlaine.

Kirsch continuait d’écouter Verlaine.

Notre guilde pouvait-elle l’atteindre... ou plutôt, y avait-il une guilde qui le pouvait ? En y pensant, même si elle était venue de si loin, il était seulement évident qu’elle n’avait pas beaucoup de foi en notre succès, étant donné la situation délicate.

Mais il suffisait de lui montrer le résultat qu’elle voulait.

J’allais devoir le résoudre de l’ombre avant que quelqu’un ne remarque qu’il se passait quelque chose, exactement comme je l’avais déjà fait plusieurs fois auparavant.

En entendant nos conditions, Kirsch avait l’air assez tendue, mais quand elle avait ouvert la bouche...

« ... Je ferai tout ce que je peux dans la mesure de mes possibilités, bien que je comprenne que ce ne sera pas suffisant. Je vous offre même ma vie et toutes mes futures réincarnations, » déclara Kirsch.

« La vie n’a pas une faible valeur, même si je ne dirais pas qu’elle a la valeur maximale possible. Cependant, si vous, Lady Kirsch, avez la fierté de faire un tel choix, nous accepterons votre vie comme récompense, » répondit Verlaine.

« K-Kh... Ghhhh... ! »

Qu’est-ce que c’était que ces mots mignons ? Mais j’avais laissé faire Verlaine.

Je ne pouvais pas la définir comme « grande », alors je l’avais laissée être le barman, mais... quand elle avait montré ce côté de sa personnalité, je m’étais demandé qui était le vrai Maître de la Guilde.

Kirsch s’était mise à pleurer. Elle avait ensuite essuyé ses larmes avec le mouchoir que Verlaine lui offrit et leva la tête.

Son visage était maintenant plus détendu. Elle ne semblait toujours pas sûre d’accepter nos conditions, mais malgré cela, elle se sentait mieux grâce à cette libération.

« S’il vous plaît... Arrêtez la famille Vinceburg et sauvez ce pays, » déclara Kirsch.

« Ce sera fait, Lady Kirsch, » répondit Verlaine.

Elle avait signé le contrat, et le lendemain nous aurions commencé cette nouvelle mission.

Il y avait beaucoup de problèmes à régler.

Vinceburg savait comment traverser la frontière du pays, alors j’avais dû penser à une solution... puis, j’avais dû me préparer à une invasion potentielle de Velvechia et une façon de ralentir leur assaut.

Entre-temps, je devrais bien confirmer si les informations de Kirsch concernant Zevias et Jean étaient exactes.

De plus, les membres de ma guilde avaient déjà beaucoup de travail, donc je ne pouvais demander de l’aide qu’aux filles.

Enfin, même si je ne voulais pas quitter le bar, il y avait la possibilité que je doive aussi me déplacer... Pendant que je pensais à tout cela, j’avais fait disparaître ma présence et j’avais vu Kirsch sortir par la porte arrière.

***

Chapitre 23 : L’académie de magie et la jeune enseignante

Je voulais que Kirsch reste en sécurité, alors j’avais dépêché des membres de ma guilde spécialisés dans ce type de travail. Le responsable de la collecte d’informations était Leeza.

Verlaine était entrée dans le bureau au deuxième étage et avait placé le contrat dans la trésorerie, puis elle avait commencé à enlever son tablier. C’était également sa chambre, donc ce n’était pas une action étrange ou audacieuse... si je n’avais pas été présent en ce moment.

« Quoi ? J’enlève seulement mon tablier. Ne me dis pas que tu vas m’ordonner de me déshabiller totalement. Mais c’est une bonne idée, » déclara Verlaine.

« Il y a beaucoup de choses que j’aimerais que tu fasses, mais pour l’instant, parlons du travail, » déclarai-je

« Tu es toujours si calme... C’est vrai que je suis une elfe noire, mais ne ressens-tu aucun intérêt pour moi en tant que femme ? » demanda Verlaine. « Les humains préfèrent les elfes normaux, mais nous descendons de la même race. Adorer le Dieu des ténèbres ou le Dieu de la lumière est ce qui a déterminé la couleur de notre peau, et rien de plus. »

« Je savais que c’était quelque chose comme ça, mais l’entendre d’une elfe noire est tout à fait incroyable, » déclarai-je.

« Hehehe... Eh bien, nous parlons de mythes, » répondit Verlaine. « Pour le dire franchement, la couleur de notre peau est la seule différence entre nous. »

Elle l’avait dit alors qu’elle plaçait le tablier plié sur le bureau. Puis, elle avait commencé à détacher sa coiffure.

« ... Dois-je considérer ton regard comme une démonstration d’amour ? Il semble que tu ne t’es pas encore guéri par toi-même, alors tu devrais être de bonne humeur, » demanda Verlaine.

« Ce n’est pas comme si je retirais chaque fois l’alcool présent dans mon corps, » répondis-je.

Sous son tablier blanc, elle ne portait qu’une robe noire qui était très plaisante sur elle. Cela lui allait très bien avec sa peau blanche, mais j’étais sûr qu’elle aurait été belle même avec la véritable couleur de sa peau.

« Quoi qu’il en soit, c’est quand même une demande absurde. Le destin de tout le pays est en jeu... mais c’est approprié pour quelqu’un comme toi, Maître, » déclara Verlaine.

« Beaucoup de gens sauront que nous ne sommes pas une guilde normale, donc nous attirerons beaucoup trop d’attention... après avoir fini ce travail, nous attendrons que les choses se tassent avant de faire la moindre chose, » déclarai-je.

« Je suppose que Velvechia est en train de mobiliser leurs soldats en ce moment même, » déclara Verlaine. « Que vas-tu faire pour y remédier ? S’ils déplacent toute leur armée, nous devrons peut-être prendre des mesures spectaculaires. Je suis d’accord pour moi-même y aller, mais tu as probablement une meilleure idée. »

« Ça fait longtemps que tu ne t’es pas battue, alors je ne peux pas te laisser agir, » répondis-je. « Eh bien, quelqu’un devra faire quelque chose de tape-à-l’œil, mais la demande est assez difficile en soi... »

Verlaine affichait en ce moment un sourire ironique alors qu’elle devinait à qui je faisais référence.

« Cette fille, hein... Elle a fait beaucoup de dégâts dans mon pays, » déclara Verlaine. « Nous avons un nouveau lac, et il est même devenu une attraction touristique célèbre. Il y a beaucoup de choses qu’elle a laissées derrière elle. Pourquoi ne pas changer son surnom en “Cataclysme Ambulant” ? »

« Elle ne sait pas comment s’y prendre en douceur... on peut dire la même chose pour son apparence, » répondis-je.

« Son apparence, hein... Je n’aime pas les gens qui prennent soin d’eux-mêmes. Je suivrais mon propre chemin. N’est-ce pas la meilleure façon de vivre ? » demanda Verlaine.

Un ancien esprit dirigeant comme toi ne devrait-il pas plutôt parler de retraite spirituelle ? J’avais gardé cette blague absurde pour moi, mais dans mon cœur, j’étais d’accord.

« Si tu veux lui demander quelque chose, attends qu’elle passe au bar. Je vais aussi t’aider, » déclara Verlaine.

« D’accord, merci. Mais nous devons commencer bientôt, alors il vaut mieux aller lui demander sincèrement, » répondis-je.

Alors que je me demandais si la Douce Catastrophe éternuait à ce moment-là, je m’étais déplacé à l’arrière du bureau.

« Maître, n’as-tu pas promis à Cody de ne pas te marier avant lui ? » demanda Verlaine.

« Je ne pense pas ? D’ailleurs, si on enlève le tablier d’une robe avec tablier, cela reste fascinant. Pourquoi est-ce que c’est ainsi ? » demandai-je.

« Kh... Si tu penses ça, alors pourquoi ne réagis-tu pas ? Les individus sont vraiment mauvais, mais toi, tu es un monstre, » répliqua Verlaine.

« Les individus sont tentés trop facilement. Si je devais me soûler, je ne sais pas ce que je pourrais te faire, » déclarai-je.

« Maître, tu es vraiment quelque chose. Ne devrais-tu pas te détendre un peu plus... ? Mais ce serait mieux si tu ne fais rien pour faire que je te méprise. Après tout, je suis toujours l’ancienne Seigneur-Démon, » déclara Verlaine.

Son ton suggérait tout sauf le mépris et la haine, mais je devais quand même penser à lui rendre un jour son talisman.

Pourtant, en m’habituant à avoir une barmaid compétente comme elle, j’avais pensé à quel point il aurait été triste qu’elle retourne dans son pays natal.

☆☆☆

Le lendemain matin, j’avais laissé Verlaine s’occuper du bar pendant que j’allais à l’académie de magie.

J’avais pris une diligence qui m’avait amené vers le nord-est et j’étais descendu exactement devant l’académie. Le site était assez énorme, et depuis le jardin, je n’avais dû marcher que cinq minutes pour atteindre le bâtiment affecté aux laboratoires.

Le campus était rempli de jeunes, dont certains mangeaient leur repas, tandis que d’autres pratiquaient la magie.

Un bureau d’accueil pour coordonner les réunions et pour obtenir des informations avait été placé à l’entrée du bâtiment des laboratoires. Je parie qu’ils ne me laisseraient pas entrer facilement si j’avais le visage couvert, alors je l’avais approché avec mon apparence réelle. Même si je m’étais présenté comme Queue d’Argent, personne ne se serait souvenu que j’avais été l’un des membres de l’expédition contre le Seigneur-Démon, puisque durant ces cinq années, j’avais gommé toute trace de moi-même. Mais étant donné ma nature, j’avais préféré utiliser un faux nom.

« Bonjour Monsieur. Avez-vous un rendez-vous ? » demanda la réceptionniste.

La réceptionniste portait un chapeau et son uniforme soulignait tellement la forme de sa poitrine que j’avais une lutte interne pour éviter de fixer cette énorme bénédiction divine.

Son apparence et son sourire éclatant donnaient vraiment un sentiment de jeunesse, mais si elle travaillait ici, elle aurait dû être plus âgée que moi.

Eh bien ! Franchement, est-ce que Mylarka et les gens liés à cet endroit ont agrandi leurs seins ou bien est-ce la zone qui cause ça ? pensai-je.

« Je m’appelle Queue Solver. Je cherche le laboratoire de Mylarka, qui enseigne la magie offensive à la première classe, » déclarai-je.

« La professeur Mylarka s’est dirigée vers la bibliothèque. Voulez-vous l’attendre ici, Monsieur Queue ? » demanda-t-elle.

« Non, je préfère y aller moi-même. Merci pour l’information, » déclarai-je.

« Beaucoup d’hommes veulent rencontrer Madame Mylarka, mais elle les rejette généralement avant même de connaître leur nom, » répondit-elle.

« Je vois... attendez ! Dans ce cas, pourquoi me l’avez-vous dit ? » demandai-je.

« Elle m’a dit que je pouvais faire savoir à un jeune homme aux cheveux noirs dont le nom commençait par “Q” où elle se trouve, » déclara la réceptionniste.

Bien sûr, « faites-lui savoir où je suis », pas « dites-lui où je suis ». Cela ressemblait exactement à quelque chose que Mylarka dirait... mais que se passerait-il si quelqu’un d’autre avec ces caractéristiques se montrait ?

« Elle a également dit que la voix de cet homme serait plus grave que prévu, alors je suppose qu’elle parlait de vous, n’est-ce pas ? » continua la femme.

« Eh bien, probablement oui. Pouvez-vous lui dire de ne pas divulguer des informations personnelles, s’il vous plaît ? Et cela même quand il s’agit de plaisanter, » demandai-je.

« Oui. Je garderai ça secret entre nous, » déclara-t-elle.

Elle hocha la tête avec un sourire joyeux, et mon regard était descendu sur ses gros seins, qui suivaient avec douceur ses mouvements. Sur son badge était inscrit son nom : « Pollon Marcot ».

« Désolé si ce n’est pas lié, mais parlez-vous avec des étudiants de sexe masculin sans raison réelle ? » demandai-je.

« Mon travail est de fournir des informations à ceux qui viennent ici, donc, sans raison réelle, j’évite de parler beaucoup avec eux, » répondit-elle.

Je vois. Donc, comme je ne suis pas un étudiant, elle m’aurait reparlé si je reviens... attends, il faut que je reste calme. Si Mylarka était au courant que je le faisais, elle voudrait certainement me tuer, alors il vaut mieux garder mes lèvres scellées.

☆☆☆

J’étais entré dans la bibliothèque et j’avais demandé au bibliothécaire où trouver Mylarka. Comme elle faisait des recherches sur la magie offensive, elle aurait dû être à l’est du deuxième étage.

Ce genre de magie pourrait fonctionner de plusieurs façons, y compris en empruntant du pouvoir aux esprits ou aux dieux, ou en utilisant son pouvoir magique pour se mêler des lois du monde. Dans mon cas, j’avais étudié et amélioré ce que j’avais appris d’autres personnes, mais je faisais partie de ce dernier groupe.

Une fois au deuxième étage, je l’avais parcouru en admirant le grand nombre de livres stockés sur les étagères, jusqu’à ce que je la voie enfin.

Elle essayait d’atteindre un livre. Elle avait tout son corps étiré, mais le bout de ses doigts ne pouvait que l’effleurer.

« Quel est l’intérêt de placer les livres à cette hauteur ? Ils devraient être à la portée de tous... ! » déclara-t-elle.

Elle se plaignait de frustrations en murmurant, et c’était quelque chose qu’elle n’aurait jamais laissé voir aux autres.

Je m’étais alors approché furtivement d’elle, j’avais pris le livre sur l’étagère et je le lui avais remis.

« En as-tu besoin ? » demandai-je.

« Kh... Depuis combien de temps es-tu ici, Queue ? » demanda-t-elle.

« Juste à temps pour prendre ça pour toi. Est-ce le bon ? » demandai-je.

« Je ne dirai pas que ce n’est pas le cas, » répondit-elle.

Elle l’avait pris et avait parcouru les pages en les feuilletant.

« Ne crois pas que mon opinion te concernant s’est améliorée seulement parce que tu es plus grand que moi et parce que tu as essayé d’agir d’une manière cool, » répliqua Mylarka.

« La prochaine fois que je passerai, je t’apporterai un tabouret. Ou bien préférais-tu que je te porte sur mes épaules ? » demandai-je.

« Ne sois pas arrogant ! Mets-toi à quatre pattes et sois plutôt mon tabouret ! Et comme je suis gentille, j’enlèverai même mes chaussures avant de te marcher dessus ! » Mylarka m’avait crié dessus, et même si j’étais habitué à ses abus verbaux, c’était un peu trop même pour moi.

Bien qu’elle était une jeune enseignante de l’académie de magie, elle avait tout juste seize ans et ne semblait pas différente d’une élève. C’était la même chose pour la réceptionniste à qui j’avais parlé tout à l’heure. Je pensais aussi que le chapeau lui allait très bien.

« J’avais l’impression que tu viendrais bientôt. Veux-tu quelque chose de ma part ? » demanda-t-elle.

« Oui. Je veux demander quelque chose à la sauveuse masquée…, » déclarai-je.

« Non, on oublie ça, » répliqua-t-elle directement.

« … Peux-tu au moins écouter avant de refuser, s’il te plaît ? » demandai-je.

Elle m’avait interrompu avant de plier les bras, le livre encore dans sa main, puis elle m’avait regardé en se brossant ses cheveux blonds.

« C’est quelque chose que je ne fais que pour Yuma. Peux-tu arrêter de penser que je porterais un masque de moi-même ? » demanda-t-elle.

« Je sais que tu tiens vraiment à tes amis, » répondis-je.

« Me flatter ne t’aidera pas. J’ai seulement pensé que ce serait dangereux pour Yuma si Aileen était sa seule aide et rien de plus, » répliqua-t-elle.

Tu es la plus dangereuse, mais j’avais décidé de garder le silence.

Si elle avait accepté de me prêter sa force, j’aurais résolu le premier problème... de manière épique.

« J’essaierai d’y réfléchir quand tu m’auras aidé. Tu devrais être capable de transporter cinquante livres si tu utilises ta Magie de Soutien, n’est-ce pas ? » demanda-t-elle.

« Les maintenir en équilibre semble impossible, mais il n’y a pas de problème. Alors, tu agis comme un professeur normal, hein ? » demandai-je.

« Je ne trouverai pas de références pour ma magie dans ces livres, mais si je n’enseigne pas la théorie à mes étudiants, ils n’apprendront pas du tout comment utiliser la magie... Ah, prends le livre bleu sur cette étagère. Maintenant, le deuxième à partir de sa gauche, » déclara-t-elle en me pointant du doigt les différents livres qu’elle voulait.

Elle n’arrêtait pas de me donner des ordres, et les livres s’empilaient dans mes bras, mais ce n’était pas une chose si absurde que je devais faire pour pouvoir lui faire écouter ma demande.

La montagne avait grandi presque jusqu’au vingtième livre quand elle se tut un instant.

Je l’avais regardée et elle avait fait un beau sourire.

« Je suis content que tu sois venu aujourd’hui. Il aurait été difficile de porter tout cela toute seule. Merci, Queue, » déclara-t-elle.

« Kh... C’est bon à entendre. Je suis content d’avoir pu t’aider, » répondis-je.

« ... Mh ? C’est quoi ce regard bizarre ? Il y a quelque chose de coincé sur mon visage ? » demanda-t-elle.

« Oui, les yeux, le nez et la bouche les plus typiques du monde, » répliquai-je.

« Oh, est-ce qu’on joue avec l’évidence ? Tu as également les yeux, le nez et la bouche les plus simples du monde, » répliqua-t-elle à son tour.

J’avais été surpris de recevoir un remerciement venant d’elle... Était-elle un peu heureuse en collectionnant les livres ou était-ce juste mon imagination ?

« Oh, au fait, Queue. Je parie que tu as regardé l’énorme poitrine de Pollon, la réceptionniste. C’est grossier et dégoûtant. Attention, la prochaine fois, j’appellerai les gardes, » annonça-t-elle.

Au moment où j’avais voulu me venger d’elle, j’avais pensé à ce qui aurait pu se passer dans ce scénario. Le nom de Queue Solver se répandrait dans tout le pays pour avoir été arrêté dans cette académie, et il n’y avait rien qu’il aurait pu faire pour échapper à son destin. Une fois que Timis en aurait entendu parler, elle aurait été très déçue...

Quand le tas de livres était devenu deux fois plus grand que moi, je l’avais apporté à la bibliothécaire, qui l’avait regardé d’un air choqué. Après avoir obtenu la permission de les prendre, j’avais marché vers le laboratoire de Mylarka. J’avais l’impression de me démarquer sans raison réelle, mais je m’étais convaincu que c’était pour le bien de tous.

***

Chapitre 24 : Le laboratoire et les masques s’envolant dans le ciel

Une fois dans le laboratoire de Mylarka, nous avions commencé à ranger les livres sur les étagères. Après avoir travaillé pendant un certain temps, elle m’avait remis un carnet de notes.

« Manarina a écrit les détails de ses recherches ici. Elle a dit qu’elle avait peut-être découvert quelque chose et qu’elle voulait que tu y jettes un coup d’œil, » déclara Mylarka.

« Oh, elle fait des recherches sur la magie offensive ? » demandai-je. « Je n’ai jamais utilisé la magie spirituelle, mais n’est-ce pas facile à apprendre ? »

« Eh bien, les étudiants peuvent l’apprendre dans les livres, donc beaucoup d’entre eux se spécialisent dans ce domaine, » répondit-elle. « Ici, la magie divine ne peut être étudiée que par ceux qui suivent la doctrine d’Albein, donc seuls les prêtres peuvent l’utiliser, et les gens ne peuvent pas vraiment emprunter le pouvoir aux autres divinités de cette ville. »

Était-ce une conférence ou une explication ?

N’importe qui pouvait s’inscrire à l’académie de magie, quel que soit son âge, donc j’aurais pu essayer de m’inscrire aussi... en pensant à la vie d’un étudiant, j’avais senti un certain intérêt monter en moi.

Mais je n’avais pas besoin d’étudier pour l’instant, alors j’avais gardé mon intérêt à distance. Après tout, le ton de Mylarka m’avait fait me rappeler qu’elle était enseignante.

« Combien d’étudiants as-tu à ton séminaire ? » demandai-je.

« Manarina et plusieurs autres, » répondit-elle.

« Woah... Je pensais que tu ne pouvais enseigner qu’à une dizaine de personnes. Je suppose que je me suis trompé, » déclarai-je.

« Je passe la majorité de mon temps à faire des recherches, mais beaucoup d’entre elles sont trop avancées pour les membres de cette académie, » répliqua Mylarka.

Mylarka était une hérétique parmi ceux qui lui enseignaient la même matière.

Sa « magie de l’expansion de l’espace » n’était pas quelque chose qui pouvait être reproduit par d’autres. Normalement, les personnes chantaient le sort, et les dieux ou les esprits leur accordaient le pouvoir, mais elle n’avait pas besoin de le faire.

En combinant des motifs magiques, elle pourrait interférer avec les lois du monde en élargissant l’espace. Mylarka pouvait décider de la portée de ses attaques, ce qui signifiait qu’elle était théoriquement capable d’attaquer toute la capitale.

De plus, ses motifs magiques en expansion avaient des combinaisons infinies, qui produisaient de nombreux effets différents, et tous étaient incroyablement dangereux. C’est pourquoi Mylarka était inepte avec toute sorte de magie non offensive.

Quand elle avait postulé pour l’expédition contre le Seigneur Démon, son score personnel était de 102 952, et presque tout était dû à sa capacité de magie offensive.

Pour démontrer ses compétences, elle avait été amenée dans des plaines loin de la capitale, où elle avait utilisé son motif magique « Anéantissement de grandes zones numéro 152 - Champ d’attraction de la Terre » pour annihiler la tanière d’une bête dangereuse.

Les aventuriers de rang SSS étaient plus que de simples humains.

Je m’étais promis de ne jamais mettre Mylarka en colère, mais Dieu merci, elle était aussi rationnelle que puissante. Elle pouvait contrôler la portée de ses motifs magiques avec élégance, à tel point qu’elle pouvait frapper une seule cible avec précision... mais c’était la seule partie élégante du processus, étant donné que sa magie était la puissance et la plus dévastatrice que je connaissais.

« Alors, de quoi as-tu besoin ? » demanda-t-elle.

« Oh, c’est vrai. J’aimerais aussi te poser des questions sur l’académie, mais d’abord..., » déclarai-je.

J’avais commencé à lui expliquer la situation de Kirsch, car je voulais que cette servante se sorte des ennuis le plus vite possible.

Pendant ce temps, j’avais préparé du jus de « raisin mystérieux » provenant des boisés du sud du pays et des biscuits à l’érable faits avec de la poudre de haricot de sagesse. La première allait améliorer la concentration et la seconde allait renforcer la mémoire. Mylarka était déjà impeccable dans ces deux domaines, donc elle n’en avait pas vraiment besoin, mais c’était quand même une bonne collation.

« Ne me dis pas que le Seigneur Démon les a fait cuire. Mais ça ne me dérangerait pas, » déclara-t-elle.

« Haha... Je l’ai fait, même si je ne suis pas doué avec les sucreries, » répondis-je.

« Je pense que ces biscuits sont meilleurs que la moyenne des biscuits, » déclara la jeune femme. « Pourquoi ne cultives-tu pas un peu d’estime en toi ? Être trop humble te rendra insolent. »

« Je m’en souviendrai. Je ne me valorise pas beaucoup, » déclarai-je.

« C’est bien... ou plutôt, c’est curieux. Manarina est aussi comme ça, après ça tu as essayé d’être si beau devant Cody, » déclara-t-elle.

Elle avait commenté tout en croquant d’autres biscuits. Peut-être que c’était à cause des miettes près de ses lèvres, ou parce qu’elle avait mangé avec une main devant sa bouche, mais elle était vraiment mignonne.

« Quoi qu’il en soit, c’est bien mieux que les cookies du magasin de l’école, » déclara Mylarka. « Ils n’ont aucun goût comparé aux tiens. Pourquoi me les donnes-tu ? »

« Sans réelle raison. Mais je t’en donnerai plus, si tu veux. Il s’agira de cinq pièces d’argent chacune, » répondis-je.

« ... Assez cher, mais c’est approprié étant donné les ingrédients et le goût, » répondit-elle. « Pourquoi n’ouvres-tu pas une boutique de confiserie ? Je peux t’aider avec de l’argent, si tu en as besoin. »

« Non, merci, merci. Même s’il s’agit d’un produit de mon bar, je ne pense pas que ce soit la spécialité d’une confiserie, » répondis-je.

« Je ne suis pas d’accord. Même ce jus de raisin est si bon qu’il m’irrite, » annonça-t-elle.

Je ne connaissais personne qui pouvait se sentir irrité alors qu’il était de si bonne humeur... mais passons à autre chose.

« Bref, en ce qui concerne ce que tu m’as demandé. Veux-tu juste que je bloque la route que Velvechia utilisera pour atteindre Vinceburg ? » demanda-t-elle.

« Je suis content que tu comprennes ça vite. Je ne voulais pas vraiment te demander, mais... tu es la seule à pouvoir le faire, » déclarai-je.

« Soyons clairs, je ne veux pas causer un massacre, » déclara Mylarka. « Ce n’est pas comme si j’aimais détruire des choses au hasard ou tuer des individus. »

« Bien sûr, bien sûr que je le sais, » déclarai-je. « C’est exactement pour cela que j’ai une stratégie prête... puis-je compter sur toi ? »

Nous devions d’abord aller vers l’ouest... mais il n’était pas certain qu’elle aurait accepté de me suivre tout de suite.

Elle m’avait regardé en silence en consommant les restes de sa nourriture, puis elle avait posé le verre vide sur la table.

« Je t’aiderai à une condition, » annonça-t-elle.

« Demande n’importe quoi. Je ferai de mon mieux aussi longtemps que je le pourrai, » lui répondis-je.

« Comme je dois payer pour tout ce que je détruis avec mon propre argent, parfois je veux que tu m’apportes de la nourriture ici, » demanda la jeune mage. « Tout ce qui est sur ton menu est bon, car il ne devrait y avoir rien que je n’ai pas encore goûté. »

« Je ne veux pas qu’on se souvienne de mon visage ici... Oh, attends, c’est vrai. À quelle fréquence devrais-je venir ? » demandai-je.

« J’aimerais dire “dès que je le veux”... mais n’hésite pas à venir quand tu en as envie. Maintenant, allons-y, » répondit-elle.

C’est ainsi qu’elle avait commencé à se préparer au départ.

Franchement, je ne m’attendais pas à ça.

« ... Quoi, n’es-tu pas prêt ? » demanda-t-elle.

« Non, je te remercie d’avoir accepté si vite, » déclarai-je.

« Je n’aime pas massacrer les gens sans discernement, » déclara Mylarka. « Nous devons bloquer la route avant qu’ils ne la traversent. Il y a des villageois dans le coin ? J’ai entendu dire que certaines familles vivaient dans la partie ouest de la chaîne de montagnes. »

« Je pense que Vinceburg va faire passer Velvechia par un autre chemin pour éviter toute entrave... mais on peut encore vérifier par le haut, » annonçai-je.

« D’en haut... ? Y a-t-il un endroit comme ça sur la montagne ? Ou bien connais-tu des sorts qui feront l’affaire ? » demanda-t-elle.

La magie de soutien pouvait améliorer la vue, et je pouvais explorer la zone avec un Petit Esprit, mais je n’avais pas l’intention d’en utiliser.

Il y avait un autre moyen qui n’incluait pas la marche... voler.

 

☆☆☆

 

Dans l’ouest de la capitale se trouvait un domaine pour les dragons de feu, et Shura, un vieux maître dragon, s’occupait d’eux.

L’atteindre à cheval nous avait pris environ deux heures.

« Bonjour, Monsieur Queue. Voulez-vous voir comment vont les dragons ? Ou bien y a-t-il une autre raison pour votre visite ? » demanda Shura.

Il y avait encore du temps avant la fin de la saison de reproduction, alors toute la famille du dragon était réunie.

Les petits dragons, qui n’étaient plus si petits, s’approchaient de nous en vacillant d’excitation, et malgré leur taille qui nous empêchait de les étreindre complètement, leurs sons étaient encore aigus et adorables. Mylarka les avait tapotés sur leur tête et les avait nourris.

« Là-bas, qui sont les bons garçons ? Tu commences à ressembler beaucoup à maman et papa, » déclara Mylarka.

« Ils écoutent attentivement ce que je dis, jeune fille. J’ai été séparé de mes fils et petits-enfants il y a longtemps, alors je ne peux m’empêcher de m’occuper d’eux, » répondit Shura.

« C’est important d’aimer son travail. Maintenant, en ce qui concerne le fait de monter..., » demandai-je.

« J’ai déjà utilisé la flûte de dragon sur le père, et tout est prêt. Ce ne sera pas difficile pour vous de le monter avec une selle. Monsieur Queue... Est-ce que la dame là-bas vient avec vous ? » demanda Shura.

« Attends, quoi !? Queue, voulais-tu que je vienne avec toi ? L’as-tu déjà fait avant ? » demanda Mylarka, surprise.

« Oui. Tu te souviens que je vivais dans une région rurale ? J’ai aidé une wyverne blessée une fois, et elle m’a laissé la monter, » répondis-je.

« Alors, il ne vous sera pas difficile de monter d’autres types de dragons. Les wyvernes n’ont pas les pattes avant, donc elles sont assez instables, » déclara Shura. « Il s’agit de l’une des espèces les plus difficiles à monter. »

Après l’avoir guéri, elle est retournée à son troupeau... J’espère qu’elle est encore en bonne santé.

Je n’y avais pas pensé quand j’avais fondé ce lieu, mais après avoir engagé un maître-dragon et être devenu son manager, j’aurais pu chevaucher les dragons de feu en temps de crise.

Le vieil homme m’avait donné sa selle personnelle, et après l’avoir ajustée sur la protubérance des épaules du père dragon, j’étais monté dessus.

Après que Shura ait fixé les courroies de selle sur le ventre du dragon, j’avais dit à Mylarka, qui nous observait avec les petits dragons, de se lever. Comme elle ne l’avait jamais fait auparavant, elle était maladroite et ne pouvait pas le faire correctement, alors j’avais dû l’aider.

« Donne-moi tes mains, je t’aiderai, » déclarai-je.

« D’accord... Wah ! » cria Mylarka.

J’avais augmenté la force de mes bras avec de la magie, je l’avais soulevée et je l’avais placée devant moi.

Pour Mylarka, c’était comme si elle dansait dans les airs.

« ... Nous sommes plus ou moins trois fois plus élevés qu’un cheval... serons-nous bien... ? » demanda-t-elle.

« As-tu le vertige ? Tu devrais alors fermer les yeux, » répondis-je.

« N-Non, je veux dire... C’est la première fois que je monte un dragon, donc je me sens si mal à l’aise... Apprends-moi comment faire ça, » me demanda-t-elle.

« Ne t’inquiète pas, je te soutiendrai par-derrière, tu ne tomberas pas. Il y a aussi les rênes pour empêcher cela, » lui expliquai-je.

Elle avait poussé un cri pendant que j’ajustais sa position par-derrière, puis j’avais passé mes mains autour d’elle pour l’empêcher de tomber. Comme ça, elle ne paniquait pas quand nous aurons commencé à voler.

« ... Les tiendras-tu ? On dirait que tu ne veux que saisir cette chance…, » murmura Mylarka.

« Monsieur Queue, le dragon de feu se déplacera en fonction du pouvoir magique du flûtiste... mais étant donné vos compétences, je doute qu’il y ait des complications, » déclara Shura.

Shura avait fabriqué la flûte tout seul, comme un vrai maître dragon devrait le faire. J’étais très intéressé par le genre de vie qu’il avait, alors peut-être que je devrais lui apporter à boire après que nous aurons fini ce travail.

« Bon Mylarka, les rênes sont à toi. Je vais jouer de la flûte, » déclarai-je.

« D’accord... mais peux-tu m’aider à comprendre ce que je dois faire ? » me demanda-t-elle.

« T’aider... ? » demandai-je à mon tour.

Elle m’avait tiré les mains, m’avait fait saisir les rênes, puis avait posé ses mains sur les miennes.

« Fais-le comme ça. Montrons à l’armée de Velvechia de quoi sont faits les sauveurs masqués, » déclara-t-elle.

Ainsi, deux mystérieuses silhouettes partaient en mission sur le dos d’un dragon.

C’est alors que nous avions porté nos masques, et Mylarka avait l’air ravie de ce fait.

« Être jeune est un si grand moment... ils peuvent faire ressentir de l’excitation même un homme décrépit comme moi..., » déclara Shura.

Shura s’inclina profondément au moment de notre départ et nous souhaitait le meilleur en tant qu’aîné dans la vie.

***

Chapitre 25 : Rencontre avec l’ennemi et la phrase d’accroche

Un trou dans le plafond du ranch était utilisé par les dragons de feu pour entrer et sortir de leur nid. J’avais entendu dire qu’ils n’aimaient pas avoir l’entrée sur le sol parce que les dragons de terre, leurs ennemis naturels, auraient pu se faufiler pendant leur absence. C’était donc probablement quelque chose qui était dicté par leur instinct.

Dès que nous avions commencé à voler et que nous étions sortis du ranch, j’avais remarqué que notre boussole ne fonctionnait probablement pas à cause des minéraux magnétiques contenus dans la peau du dragon ? Mais il suffisait d’aller vers l’est à partir de la capitale.

Monter un dragon était exactement comme le disait Shura : beaucoup plus stable que de monter une wyverne, et dans l’ensemble très confortable.

La flûte de dragon que je portais autour de mon cou avait commencé à jouer chaque fois que j’y avais versé de la magie, et notre monture avait obéi à tous mes ordres.

« ... Tu utilises une sorte de magie, non ? Maintenant, je n’ai presque plus peur, » déclara Mylarka.

« Eh bien, n’importe qui aurait peur de ressentir cette hauteur pour la première fois, mais c’est risqué d’avoir peur, alors j’ai utilisé un Esprit Protecteur, » répondis-je.

« N’aimes-tu pas me voir avoir peur, hein ? Et moi qui pensais que tu te moquerais de moi…, » déclara-t-elle.

« En toute franchise, je préfère profiter de la vue d’ici. Ne penses-tu pas qu’avoir un peu peur vaut la peine d’être témoin d’un paysage aussi étonnant ? » demandai-je.

Au début, elle était rigide à cause de la tension, mais avec le temps, elle avait finalement commencé à se calmer et elle s’était appuyée sur moi. La paperasse avait dû l’épuiser.

« Je ne devrais pas être lourde, mais dis-moi si je le suis, » demanda-t-elle.

« Non, je suis surpris que tu sois aussi légère. Encore plus que quand je t’ai soulevé auparavant, » répondis-je.

« B-Bon... Je suppose que c’est bon, alors. Tu es un dur à cuire, c’est probablement pour ça que tu ne me trouves pas lourde, » répondit Mylarka.

« Mais tu n’es pas aussi grande qu’un bâton deku. Je peux prendre des livres que tu ne peux pas atteindre, » déclarai-je.

« Si je portais des chaussures hautes, je les aurais également atteintes, mais elles me font mal aux pieds, donc je ne les aime pas beaucoup, » expliqua-t-elle.

Nous avions continué à bavarder paisiblement sur notre trajet. Peu importe la taille et l’élite de l’armée de Velvechia, elle n’était pas de taille contre nous.

La République de Velvechia était située à côté du pays d’un autre Seigneur Démon, qui, selon Verlaine, n’était que de Rang S, mais comme personne ne pouvait le vaincre, chaque année les villes lui envoyaient beaucoup d’hommages pour éviter toute invasion. Les guerriers les plus forts de Velvechia étaient de Rang AA, avec des scores d’environ vingt mille. Cela signifiait que le soldat moyen était de rang C ou inférieur. C’était à peu près au même niveau qu’Albein.

Pourtant, Velvechia ne savait rien de notre expédition et de notre victoire contre Verlaine, un Seigneur Démon de Rang SSS.

Le duc de Vinceburg songeait à nous écraser avec le nombre, mais c’était une erreur de calcul de sa part.

« Je parie que tu penses qu’on est les adultes qui vont arrêter un combat d’enfants... Je ressens la même chose, tu sais ? » déclara Mylarka.

« Eh bien, si nous n’avions pas participé à l’expédition contre Verlaine, nous n’aurions pas connu notre vrai pouvoir. Pourtant, nous ne savons pas comment gérer les disputes entre humains, » lui répondis-je.

« Si nous devions nous battre contre une horde de monstres, je pourrais les faire exploser..., » déclara-t-elle.

Quand nous avions voyagé ensemble, c’est exactement ce qu’elle avait fait sur beaucoup de tanières de monstres, et si une race demi-humaine les utilisait pour une raison quelconque, les habitations avoisinantes auraient aussi été gravement endommagées. Oh, et ne parlons pas de ce qu’il était advenu des monstres...

C’est ainsi qu’elle avait gagné son titre de calamité... le Doux Désastre.

« Queue, est-ce ça ? Ma vue est meilleure que la tienne, n’est-ce pas ? » demanda-t-elle.

« La zone est un peu plus dégagée, et il y a des statues de pierre placées à distance régulière... Ce doit être le chemin que Vinceburg a organisé pour Velvechia, » répondis-je.

« Je n’arrive pas à croire que ceux qui devraient nous protéger ont construit ça. Ne penses-tu pas qu’ils méritent une punition ? » me demanda-t-elle.

« En toute honnêteté, oui. Si j’avais anticipé cela au moment des fiançailles de Manarina, j’aurais pu tout régler sans attirer l’attention..., » déclarai-je.

« Si c’était le cas, tu serais devenu le roi de ce pays... Cependant, si quelqu’un l’avait demandé quand nous en avions l’occasion, peut-être que le roi lui-même l’aurait permis, » déclara-t-elle.

Je voulais lui rappeler que chacun d’entre nous était indifférent au prestige.

Surtout Aileen, qui pourrait être appelée « Maître Guerrier » par n’importe quel combattant ou professeur d’art martial si seulement elle le voulait.

« Je vais peut-être essayer de faire d’Aileen notre chef... Est-ce que ça la rendrait plus responsable ? » demandai-je.

« Bonne idée, mais elle a des cornes. Comment est-elle censée porter une couronne ? » répliqua-t-elle.

J’avais ri de sa blague, qu’elle lâchait très rarement. Si je n’étais pas tendu, ça aurait été réconfortant.

Une route serpentait à travers la montagne, et en la suivant de mon regard, je pouvais voir un village au loin.

« C’est le seul village par ici, d’accord... ? L’ennemi passera sûrement à côté, » déclarai-je.

« Oui... si elle n’était pas là... Attends, qu’est-ce que c’est ? Les éclaireurs de Velvechia ? » demanda Mylarka.

« C’est ce qu’on dirait. Notre pays n’utilise pas d’armures noires…, » déclarai-je.

Nous les voyions bien. Cinq chevaliers vêtus d’armures noires, des manteaux roux flottant derrière eux, galopaient sur la route.

Ils criaient frénétiquement, arcs à la main comme des chasseurs pourchassant leur proie.

À ce moment-là, j’en étais sûr.

Quand ils avaient mis en place leurs flèches, j’avais fermement étreint Mylarka.

« Wah ! Qu’est-ce que tu fais !? On n’est pas là pour... ! Waaaah ! » cria Mylarka.

« Ils poursuivent quelqu’un. On va les arrêter avant qu’il ne soit trop tard, » déclarai-je.

« O-Oh... Je vois, d’accord. Je m’accrocherai bien, » répondit-elle.

Elle avait abaissé son corps quand j’avais envoyé ma volonté dans la flûte du dragon, et notre monture avait ajusté ses ailes pour qu’elle glisse dans le ciel.

« Arg... ! Attends, ne nous remarqueront-ils pas comme ça... ? » demanda-t-elle.

« Ne t’inquiète pas, j’ai fait avaler au dragon de feu des grenades. Personne ne nous remarquera avant que nous nous approchions, et leurs camarades, s’il y en a, ne nous verront pas de loin, » répondis-je.

« Oh, tu as déjà tout prévu... ? D’accord, on va se faufiler et conclure rapidement, » déclara-t-elle.

Alors que nous les approchions, les chevaliers n’avaient rien remarqué, mais le simple sentiment d’être ciblés avait éveillé leur sixième sens.

« Quelque chose vient vers nous... »

« Un... d-dragon ! Capitaine, un dragon est... ! »

« D’où est-ce que ça vient ? Merde, tirez ! »

Nous avions foncé sur eux en traçant un arc de cercle dans l’air, et au fur et à mesure que nous nous rapprochions, je pouvais voir le corps de Doux Désastre rétrécir dans mes bras avant de les regarder avec férocité.

« “Anéantissement de zone restreinte n° 66 — Champ de désintégration !”, » déclara-t-elle.

Elle avait commencé à tisser son symbole magique à une vitesse incroyable, qui enveloppait la cible en un instant et l’activait d’un claquement de doigts.

« Qu’est-ce qui se passe... !!? »

« Mon arc et mon armure... Waaaah ! »

Ils se sentaient complètement perdus.

Après qu’un dragon de feu avait frôlé leurs têtes, une rafale avait fait s’arrêter leurs chevaux, et tout leur équipement s’était transformé en sable fin qui était tombé sur le sol et s’était dispersé.

Après que nous ayons repris de l’altitude, j’avais ordonné au dragon d’y rester.

Leur capitaine, qui était plus jeune que prévu et maintenant presque complètement nu, avait tourné son cheval confus et nous avait regardés.

« Qui êtes-vous, les maîtres dragons d’Albein ? Enlevez vos masques stupides et montrez votre visage ! » cria le capitaine.

Il semble qu’il avait encore la force de nous faire des griefs, mais monter à cheval en sous-vêtements rendait sa tentative de coercition d’autant plus ridicule.

Mylarka avait étendu son champ magique avec tant de précision que leurs sous-vêtements étaient la seule chose qui restait pour les couvrir. C’était à la fois une douce préoccupation et une action aberrante.

Pour autant que je sache, seuls nous deux savions comment désassembler du matériel en poussière comme ça... et je croyais qu’il était hautement improbable de trouver quelqu’un avec les mêmes capacités.

Après s’être éclairci la gorge, Mylarka avait commencé à parler fermement. « Vous êtes de Velvechia, n’est-ce pas ? Nous avons nos raisons de vous empêcher de retourner dans votre armée principale. Rendez-vous maintenant, et aucun sang ne teindra la terre. »

« Je le savais, vous êtes d’Albein... Maudit soit cet idiot inutile…, » cria le capitaine.

J’avais deviné qu’il maudissait Vinceburg. Il devait tout garder secret, alors il pensait probablement qu’il y avait un espion parmi eux.

« Capitaine, on devrait essayer de s’enfuir ! Ce sera suffisant si un seul d’entre nous rentre chez nous... ! » suggéra un jeune homme avec une voix tremblante, et personne n’avait répondu pendant qu’ils se déplaçaient pour s’échapper.

« Mylarka, bouche tes oreilles, » dis-je à Mylarka.

« Hm ? Pourquoi ? » me demanda-t-elle.

J’avais mis mes mains à ses oreilles et j’avais jeté un sort de protection sur nous deux. J’avais pris un moment pour réfléchir avant de donner un nouvel ordre au dragon.

Il y a longtemps que je n’avais pas pu être dans un tel combat, mais grâce à Shura, qui m’avait appris le charme des flûtes de dragon, j’avais eu beaucoup de plaisir à me battre du ciel avec Mylarka. Si je devais le dire comme lui, c’était vraiment excitant.

« Groooarh ! »

Le grondement tonitruant de notre monture secouait à la fois l’air et la terre : il s’agissait de la puissance d’intimidation de son cri.

Les chevaux furent pris de terreur et s’arrêtèrent de bouger, tandis que les têtes des chevaliers pendaient la tête comme s’ils étaient en transe.

Après cela, nous avions atterri avec un grand bruit, et Mylarka avait haussé sa voix. « Les cieux pourraient vous pardonner, mais les yeux brillants derrière nos masques ne doivent pas négliger la méchanceté ! »

Je ne savais pas comment réagir à cette déclaration... Nos cibles étaient en transe et ils ne l’avaient probablement pas entendue, mais la voir s’amuser tout en gonflant fièrement sa poitrine m’avait donné envie de m’asseoir et de voir ce qui allait se passer ensuite.

« ... C’est de toi-même ou c’est le slogan des sauveurs masqués ? » lui demandai-je.

« Premier cas. Peut-être devrais-je ajouter aussi une partie qui mentionne la terre…, » me répondit-elle.

« Tu as toute une vie pour y penser. Au fait, où est allé celui qu’ils poursuivaient ? » demandai-je.

Alors que j’observais mon environnement, les applaudissements de mains de quelqu’un atteignirent nos oreilles, et lorsque nous nous étions tournés vers sa source, une dame demi-humaine, un peu plus jeune que nous, se cachait à l’ombre d’un arbre.

« Mylarka, elle nous aime bien. N’est-ce pas génial ? » déclarai-je.

« C’est naturel quand quelqu’un te sauve... mais maintenant j’ai vraiment besoin de compléter la phrase d’accroche. Je savais que c’était une bonne idée, » répondit-elle.

Elle était si heureuse que mon cynisme ne l’avait pas atteint, et même si elle aurait dû agir avec plus de maturité, elle était vraiment excitée d’être une guerrière de la justice, et cela m’avait fait confirmer à nouveau l’écart d’âge entre nous. Je n’aurais jamais dit qu’elle était enfantine. Et je n’avais pas vraiment détesté tout ça.

Si Aileen était là, elle aurait pu se moquer de Mylarka sans craindre les conséquences, alors il valait mieux qu’elle ne soit pas avec nous. L’enseignante géniale s’était assurée de l’impuissance de nos cibles tout en réfléchissant à sa phrase d’accroche.

Pendant ce temps, la jeune fille, qui, avec ses oreilles et sa queue, faisait partie de la race des tigres, n’arrêtait pas de frapper dans ses mains avec des yeux pétillants.

***

Chapitre 26 : Les prisonniers et les masques sous le clair de lune

Mylarka s’approcha de la fille, dont les yeux brillaient tels des joyaux.

Les demi-humains avaient leur propre langue, mais je pouvais un peu la comprendre, et le professeur de génie pouvait la parler couramment.

« La race des tigres devrait parler la nouvelle langue des hommes-bêtes, donc... Me comprenez-vous ? » demanda Mylarka.

« Oui, c’est vrai ! Mais mademoiselle, n’êtes-vous pas humaine ? Pourquoi connaissez-vous notre langue ? » demanda la jeune fille.

La fille était enthousiaste. En raison de la grammaire différente et difficile de l’ancienne, leur nouvelle langue s’était développée au cours des années en se détachant largement de l’ancienne, encore parlée par quelques rares personnes vivant dans des zones isolées. Elle était devenue une nouvelle langue qui était désormais parlée par la majorité des membres de leurs races.

« Nous sommes du Royaume d’Albein. Ces types faisaient partie de l’armée de Velvechia, mais... pourquoi vous pourchassaient-ils ? » demanda Mylarka.

« Arg... Albein a détruit nos montagnes. Tout le monde vous déteste, » répondit la jeune femme.

Lorsque Vinceburg avait construit la route pour traverser cette montagne, il avait dû faire un raid sur le territoire de la race des hommes-tigres, de sorte qu’il était naturel que les victimes nous voient — nous tous — comme des ennemis.

Pendant que je réfléchissais à un moyen de résoudre ce problème, la jeune fille avait reparlé.

« Mais Monsieur et Mademoiselle sont différents. Vous m’avez défendu de Velvechia, et vous êtes même ami avec un dragon. La race du tigre et des dragons sont aussi des amis. Les dragons sont les dieux gardiens des draconiens. »

Il semblait que sa race n’avait pas de bonnes relations avec d’autres que les draconiens. De plus, il était assez rare de rencontrer une personne amicale de la race des hommes-tigres, donc c’était une chance en or de mieux les connaître.

Les draconiens adoraient les dragons du feu, donc si j’étais accompagné d’un dragon du feu, j’aurais pu établir une bonne relation avec eux... mais je voulais d’abord en parler avec Shura.

« L’Ancien a dit que les soldats de Velvechia ont un camp non loin d’ici. Ils nous ont dit de partager nos rations et de leur apporter beaucoup d’hommes et de femmes, sinon ils brûleraient la montagne... ! » déclara la jeune femme.

« ... Queue, on va raser le campement de Velvechia, » déclara Mylarka.

« Je veux faire la même chose, mais nous avons besoin de plus d’informations. Qu’est-il arrivé à ceux qui leur apportaient de la nourriture ? » demandai-je.

En entendant ma question, l’expression de la jeune fille s’était obscurcie, et j’avais deviné que quelque chose de mal s’était passé.

« Velvechia a dit qu’ils étaient forts et ils ont même saisi les femmes qui étaient affectées à la cuisine. Ils sont prisonniers pour éviter notre rébellion, » répondit-elle.

« Je vois... ça doit être dur pour vous. Mais rassurez-vous, nous sommes ici. Vous n’avez plus besoin de vous inquiéter, » déclara Mylarka.

Mylarka réconforta la jeune fille et la tint fermement dans les bras, mais lorsque le regard ferme de la femme bête commença à s’estomper, pas une larme ne descendit de ses yeux.

« Les autres sont plus blessés que moi. Ils m’ont dit que je devais m’échapper, mais je ne pouvais même pas le faire, » expliqua la jeune femme.

« Vous en avez fait plus qu’assez. Vous pouvez retourner dans votre village sans vous inquiéter du reste, » déclara Mylarka.

« Plus tard, on devrait aller avec elle. Nous devons demander pardon à l’Ancien pour certaines choses, comme le fait que nous ayons bloqué le chemin de la montagne, » déclarai-je.

« L’Ancien veut la route comme avant. Même si cela prend du temps, tout redeviendra comme par le passé, » déclara Mylarka.

Mylarka avait bloqué la route avec sa magie pour empêcher quiconque de la traverser, mais nous devions la rendre aussi naturelle que possible après ça. J’avais l’intention d’emprunter le pouvoir de la terre et de l’esprit des arbres pour faire les réparations.

« Super, alors partons. Nous allons d’abord au campement de Velvechia, car nous devons sauver les prisonniers le plus vite possible. Quel est votre nom ? » demandai-je.

« Je suis Riko de la tribu des tigres. Et vous êtes ? » demanda Riko.

« Nous sommes... les sauveurs masqués. Désolé, mais nous ne pouvons pas révéler nos vrais noms, » répondit Mylarka.

« C’est très bien. Je parlerai de vous à l’ancien sur le fait que vous m’avez sauvée, » déclara Riko.

Elle ne pouvait pas imaginer que nous avions l’intention de redonner à la montagne sa gloire d’antan, étant donné le peu de choses qu’elle voyait sur notre pouvoir.

« Vous devez cacher votre odeur si vous venez dans notre village. La tribu des tigres n’aime pas l’odeur des humains, » déclara Riko.

« Je peux l’imaginer... Alors, qu’est-ce qu’on devrait sentir ? » demandai-je.

« La queue de Riko. Je vais la frotter sur vous. Il y a un grand arbre à l’extérieur du village. Je vous attendrai là-bas, » déclara Riko.

Je me demandais si elle avait deviné nos intentions quand elle nous avait vus... mais je n’étais pas vraiment sûr qu’elle ait un œil aussi vif.

Nous devions neutraliser les forces de Velvechia, sauver les prisonniers de guerre, débloquer la route, puis tout rapporter à l’Ancien.

« Riko... faites venir ici des adultes et emmenez ces individus chez vous, » déclarai-je.

« D’accord. Nous les garderons prisonniers jusqu’à ce que Velvechia promette d’arrêter, » déclara Riko.

Elle avait ouvert sa bouche de colère tout en montrant ses canines. Cela allait sans dire, puisqu’elle avait été poursuivie et ciblée par des flèches.

Si nous pouvions réussir à sauver ses camarades, les soldats pourraient peut-être rentrer chez eux en toute sécurité. Pour atteindre ce résultat, j’avais placé ma confiance dans la nature quelque peu douce de Mylarka.

 

☆☆☆

 

Notre première destination était à vingt minutes à cheval du village de la race des hommes-tigres, et à seulement cinq minutes si nous utilisions un dragon du feu.

Le soir, nous étions prêts à y aller. Il était temps d’agir.

« D’abord, nous libérerons les prisonniers, Mylarka. Je suis sûr que tu peux détruire les bâtiments petit à petit et désarmer les soldats, » déclarai-je.

« Analyser et désintégrer autant d’objets me prendra du temps. Les types de la formation précédente avaient leur équipement presque entièrement fait d’acier noir, donc il était facile à désintégrer, » répondit Mylarka.

« Combien de temps te faudra-t-il pour détruire l’équipement et les tentes dans ce camp ? » demandai-je.

« Je dirais un quart d’heure. Cela devrait suffire pour que mon champ magique soit étendu, puis que j’analyse et désintègre leur équipement, leurs tentes et tout le reste, » répondit-elle.

« Super. Pendant que j’infiltre leur base, tu commences les préparatifs pour raser l’endroit. Quand j’aurai fini de sauver les prisonniers, je te ferai signe d’aller de l’avant, » déclarai-je.

« D’accord, » répondit-elle.

Une fois que nous nous étions séparés, j’avais fait disparaître ma présence avec ma magie de dissimulation et j’étais entré en territoire ennemi.

Le camp n’était bien éclairé que du côté qui faisait face à la route, de sorte que je pouvais entrer sans problème par l’autre. Qui traverserait une forêt entière pour entrer dans une base ennemie ? Sans parler du fait qu’il était situé à la frontière du royaume, de sorte qu’ils ne s’attendaient pas à ce que quelqu’un de ce côté-là les attaque.

À l’arrière du camp se trouvaient des clôtures et des tours de guet remplies de soldats négligents. J’avais fixé un grappin à l’une des tours, j’avais grimpé par-dessus la clôture et j’avais sauté derrière un soldat.

« Pourquoi ce grappin est-il ici... ? », demanda-t-il.

J’avais étouffé mon atterrissage et mes pas avec ma magie en m’approchant de lui. Aileen pouvait se déplacer sans cela grâce à ses capacités en arts martiaux, mais moi, je devais toujours compter sur la magie... Je ne m’entraînais pas assez et j’étais trop autocratique pour atteindre le même résultat sans aide.

« Ne bouge pas. Dis-moi où sont les prisonniers, » ordonnai-je.

« Qui est là... ? L’un d’entre eux... ? Ou quelqu’un d’Albein... ? » demanda le garde.

« Tu n’as pas besoin de le savoir. Maintenant, réponds, ou sinon..., » déclarai-je.

« Les hommes-bêtes sont... dans cette tente..., » déclara-t-il en désignant une tente.

« Bien. Pour ton information, ce soir, nous raserons cette base jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien, » déclarai-je.

« Qu..., » le garde recommença à parler.

Je lui avais jeté une magie de sommeil, car l’obliger à dormir avec violence aurait été trop dur pour lui. Si Mylarka activait son champ magique, la tour de guet tout entière disparaîtrait, alors je l’avais immédiatement descendu et je m’étais approché de ma nouvelle destination.

Un soldat ivre se déplaçait dans ma direction, mais il ne m’avait pas remarqué.

Le soldat moyen n’avait aucune chance de pouvoir me repérer.

J’avais contourné la tente et j’avais ouvert un judas à l’aide d’un couteau.

Des femmes et des enfants de l’âge de Riko étaient là-dedans, et plusieurs hommes présentaient des blessures par coups sur leur corps. Des chaînes attachées à des poteaux solides liaient leurs jambes, et bien qu’ils pouvaient se libérer par la force, ils ne pouvaient pas riposter avec insouciance, probablement pour le bien de leurs enfants.

Un soldat les regardait avec un sourire sur le visage, et l’un des hommes-bêtes leva la tête pour le fusiller du regard.

« Comment oses-tu me regarder ? N’as-tu pas encore compris ta situation !? Vous tous, vous allez être des esclaves ! Les hommes travailleront à mort dans les mines, et les femmes deviendront des jouets pour de riches nobles ! » déclara le garde.

« ... !! »

Le jeune homme-bête, incapable de garder son sang-froid, se leva à l’instant d’après. Son amoureuse ou sa femme avait probablement été prise avec lui.

Il avait dit quelque chose, mais le soldat ne comprenait pas ses mots.

« Tant mieux pour toi. Si je pouvais comprendre ce que tu venais de dire, je te ferais fouetter, » déclara le soldat.

« ... »

« Pourtant, je suis sûr que c’était quelque chose de mauvais, alors devine ce qui va lui arriver... à elle, » déclara le garde.

« ... !! »

Le soldat, tenant un fouet barbelé, s’approcha d’une fille proche de lui.

« Vous, les monstres, vous avez une vitesse et une régénération folles, n’est-ce pas ? La fouetter une ou deux fois ne changera pas grand-chose ? Regarde son joli visage avant que je..., » commença le garde.

« C’est suffisant, » dis-je.

« Woah ! Que-que-que... ! » s’exclama le garde.

Pendant qu’il parlait, j’avais ouvert une brèche dans la tente et je m’étais faufilé jusqu’à être dans son dos.

Il n’avait pas eu le temps de se retourner et de me faire face : Je l’avais frappé à l’arrière du cou et il s’était effondré au sol. La magie du sommeil était quelque peu agréable, mais ma main avait bougé d’elle-même. Je n’avais pas besoin de me retenir face à une telle personne.

Les personnes présentes m’avaient regardé sans comprendre ce qui venait de se passer, puis je m’étais souvenu du masque présent sur mon visage.

« C’est vrai... Je porte un masque, mais je ne suis pas l’un des méchants. Pouvez-vous vous enfuir d’ici quand j’aurais brisé vos chaînes ? » demandai-je.

J’avais pressé ma mémoire pour formuler cette phrase dans leur langue, et il semblait qu’ils me comprenaient. Puis, un homme parmi eux m’avait regardé différemment.

« ... Vous ressemblez à un humain. Pourquoi nous aidez-vous ? » demanda-t-il.

« Parce que nous n’aimons pas tous vous persécuter. Je viens d’Albein, mais je ne suis pas comme ceux qui ont attaqué votre montagne sacrée. Peut-être que vous ne me croirez pas, mais pouvez-vous accepter que je veuille en ce moment vous sauver ? » demandai-je.

« Mhm... »

« ... Homme masqué, je vous suis reconnaissant d’avoir sauvé ma femme. Je crois en vous, » déclara le premier homme-bête.

« Ludo... Tu as raison. Pardonnez-moi. Comment pouvons-nous nous échapper de cet endroit, Homme Masqué ? » demanda le deuxième homme-bête.

Il était évident qu’ils s’adressaient à moi comme ça, mais je me demandais s’il était vraiment nécessaire de me cacher d’eux... Eh bien, ce n’était pas le moment pour de telles pensées.

« Je vais vous guider. D’abord, je brise les chaînes, puis sortons d’ici et cachons-nous dans la forêt, » déclarai-je.

Les hommes-bêtes avaient suivi toutes mes instructions comme si j’étais leur chevalier en armure brillante, même si je n’avais pas utilisé d’épée depuis si longtemps, alors j’étais tout à fait rouillé.

Créer un chemin par la force aurait pu être le moyen le plus rapide de sortir d’ici.

Une fois que nous avions fini de tout préparer pour notre évasion, nous avons traversé la « porte de derrière » que j’avais faite dans la tente et nous étions allés vers le mur de bois en ligne droite.

Les bûches attachées ensemble pour former la clôture étaient presque deux fois plus hautes que moi, et il aurait été facile de sauter par-dessus s’il n’y avait pas leurs extrémités pointues. Je devais m’assurer que les enfants ne se blesseraient pas.

J’avais dégainé mon épée et j’avais jeté un sort dessus. Cela ne pouvait même pas être comparé à l’épée de lumière de Cody, mais je pouvais au moins la rendre assez solide pour couper le fer... quand même, cela faisait si longtemps depuis la dernière fois que j’en avais tenue une que je devenais nerveux, mais j’aimais cette pression.

« ... Hm ! »

J’avais appliqué mon pouvoir de Lame Spirituel sur mon épée, ce qui avait triplé la portée de ses attaques, puis je l’avais balancé plusieurs fois sur les rondins pour les couper en bûches qui étaient tombées sur le sol à l’instant suivant, nous ouvrant ainsi une voie de sortie.

« Courez ! Je vous rejoindrai plus tard ! » déclarai-je.

« Incroyable... Qui êtes-vous, Homme Masqué ? » demanda l’un d’eux.

« Je n’arrive pas à croire que nous sommes tous en sécurité... Merci beaucoup... ! »

« Merci, Homme Masqué ! »

« Notre sauveur ! »

Les hommes-bêtes n’avaient pas perdu de temps et s’étaient enfuis dans la forêt à une vitesse étonnante, ce qui était caractéristique de leur race.

Pendant ce temps, les soldats avaient remarqué que quelque chose s’était passé et qu’ils venaient ici, mais il était trop tard pour qu’ils puissent faire quoi que ce soit.

« Armée de Velvechia ! Si vous ne voulez pas mourir ici, lâchez vos armes et ne bougez plus ! Vous avez tous une maison, alors vous devriez y retourner ! » criai-je.

J’avais levé la main au-dessus de ma tête et invoqué le sort de Lumière, qui ressemblait maintenant à une sphère lumineuse qui s’élevait dans le ciel avant d’exploser. C’était mon signal pour Mylarka.

Le camp tout entier devenait plus agité à mesure que les soldats comprenaient qu’il se passait quelque chose, et malgré la fatigue qui les affligeait, ils se rendaient compte de ce qui venait de se passer.

Mais ils n’avaient pas eu le temps d’organiser une contre-attaque, puisque quinze minutes s’étaient déjà écoulées.

« Anéantissement de zone restreinte n° 66 — Champ de désintégration ! »

Et exactement comme ceux qui poursuivaient Riko, l’équipement des soldats s’était transformé en sable.

Avant que le campement ne devienne un enfer de cris agonisants, j’avais essayé de leur montrer ma sympathie avec des mots, mais Mylarka n’était pas de ce genre.

Un doux désastre avait commencé à descendre du ciel en chevauchant le dragon de feu, qui se tenait dans le ciel avec la lune derrière lui, et une fois qu’elle était au-dessus des soldats impuissants, elle avait commencé à parler en les regardant d’un regard glacial.

« Non seulement vous avez essayé d’envahir Albein, mais vous avez aussi tourmenté la race des hommes-tigres ! Vos péchés ne peuvent être pardonnés ! Je vous condamnerais à mort au nom des dieux de cette montagne, mais comme je ne veux pas salir cette terre sainte avec votre vil sang, je fermerai les yeux pour cette fois seulement ! N’osez plus jamais entrer dans cette montagne si vous ne voulez pas attirer la colère des sauveurs masqués ! »

Le clair de lune brillait sur elle, alors que sa poitrine était gonflée de confiance en soi. Sa voix ferme résonna dans les environs... L’amener ici était la meilleure idée que je pouvais avoir eue.

Le tumulte des soldats horrifiés qui s’étaient mis à courir n’était pour moi qu’un bruit lointain.

Alors que Mylarka et sa monture regardaient notre ennemi, elle avait déclaré sa phrase d’accroche, puis nous avions effacé de ce monde ce qui restait de la base ennemie, laissant sous le ciel sans fin un morceau de terre en friche.

Après cela, Mylarka s’était occupée de la route avec sa magie et nous avions été rejoindre les anciens prisonniers. Quand ils avaient vu la fille des miracles, au lieu de la voir comme une calamité ambulante, ils s’étaient prosternés à ses pieds et avaient commencé à la vénérer.

Incapable de supporter un tel traitement, le visage de l’enseignante de génie était devenu rouge telle une betterave.

***

Chapitre 27 : La gratitude de la race des tigres et l’esprit de la mission de la fille

La brise nocturne était en ce moment en train de disperser les cendres de ce qui avait été autrefois la base ennemie.

En route vers le village d’hommes-tigres, j’avais détecté les deux derniers soldats restés dans la région. L’un d’eux dormait à cause de la magie et l’autre s’était évanoui. Alors que je pensais qu’il valait mieux les faire partir de là le plus rapidement possible, j’avais secoué celui qui dormait.

« ... Hmm ? Est-ce qu’il fait encore nuit... ? » demanda le soldat.

« Ouais, et tous tes camarades se sont enfuis sans toi, » répliquai-je.

« ... Eh... ? Attendez ! Quoi... !? » s’exclama le soldat.

Il ne comprenait pas ce qui se passait, et c’était pénible d’expliquer les choses en profondeur, alors...

« Ne t’inquiète pas, même ton capitaine s’est enfui, donc tu ne seras pas puni si tu fuis aussi. Oh ! Et emmène ce type avec toi jusqu’à ce qu’il puisse se réveiller, » déclarai-je.

« D’accord... Wouah ! C’est quoi ce masque ? » me demanda-t-il.

« Tu n’as pas besoin de savoir. Maintenant, pars avant que la race des hommes-tigres ne t’attrape, » déclarai-je.

« W-Waaaah ! Aidez-moi ! »

Il avait poussé un cri mémorable avant de se précipiter au loin, amenant avec lui le gars inconscient. Pendant qu’il s’enfuyait, j’avais jeté une magie curative sur eux deux, et j’espérais qu’ils ne tomberaient pas et ne se blesseraient pas trop gravement.

Cinq prisonniers étaient plus que suffisants. Un peu plus que ça serait un fardeau pour le village des hommes-tigres.

Ces soldats ne pouvaient pas revenir sans équipement adéquat.

Mylarka avait bloqué leur route de ravitaillement et l’établissement d’une nouvelle route aurait pris beaucoup de temps. Ils devaient maintenant également trouver un moyen de sortir d’ici par leur propre moyen, car la montagne n’était pas un endroit sûr la nuit, compte tenu des monstres et des bêtes errantes, mais c’était leur problème et non pas le nôtre. S’ils n’avaient pas l’impression que leur vie était en jeu, ils auraient pu essayer d’attaquer à nouveau dans un avenir proche.

Si nous n’avions pas agi tout de suite après avoir eu vent de ce qui tramait ici, ils auraient probablement utilisé cette montagne comme base pour profiter de la brèche dans la défense du royaume.

J’avais déjà demandé à Aileen d’espionner Velvechia pour savoir exactement ce qu’ils planifiaient, et Kirsch aidait également à cette tâche. Se faufiler dans le manoir de Vinceburg était dans l’ensemble simple... mais pour être en sécurité, j’avais « collé mes yeux » sur Aileen.

Mais j’avais dû gérer autre chose à ce moment-là.

« Allons au village... Vous autres, êtes-vous toujours là ? » demandai-je.

Les membres de la race des hommes-tigres, qui étaient en adoration devant Mylarka après avoir été témoins de la destruction écrasante de la base de l’ennemi, étaient encore prostrés à ses pieds... ou plutôt, à ceux du dragon, puisqu’elle le montait encore.

« Peux-tu aussi leur dire de lever la tête ? Je n’aime pas la façon dont ils tremblent, » déclara Mylarka.

« Quand nous sommes tombés dans un piège, un ange monté sur un dragon est descendu du ciel et a rasé la base ennemie en un clin d’œil... Moi, Jedah, je raconterai cette histoire aussi longtemps que je vivrai et je la rapporterai à notre chef, » déclara l’un des hommes-bêtes.

Jedah, un mâle de race des hommes-tigres qui semblait habituellement intrépide et intimidant, nous regardait avec une expression enfantine. Il fantasmait probablement sur nous.

« Ah... Magicienne masquée, vous êtes si belle... »

« Épéiste masqué, même vos capacités sont incroyables, et votre magie l’était aussi... Comment pourrions-nous vous appeler ? »

Ludo et sa femme avaient aussi l’air quelque peu enthousiastes. Le fait de recevoir des éloges était troublant, mais cette fois je n’avais pas d’autre choix que de les accepter sans rien dire.

« Nous avons seulement vu Riko de la tribu des hommes-tigres poursuivie par des soldats de Velvechia, et nous avons entendu parler de votre situation par elle. Devant de tels comportements, nous, les sauveurs masqués, voulions vous aider. Ce n’est rien de plus, » déclarai-je.

« Les sauveurs masqués... Je n’aurais jamais imaginé qu’il y avait des humains si désireux d’aider une race qu’ils continuaient d’exploiter. Nous devrions nous débarrasser de nos préjugés. »

Malheureusement, dans le royaume, c’était normal de penser que les hommes-bêtes étaient des « êtres inférieurs », mais ce n’était pas notre cas.

Mais je ne pouvais pas penser à eux de cette manière, compte tenu de la sagesse de leurs aînés et de leur capacité à saisir les mouvements de base du combat. Certains d’eux étaient même de merveilleux mercenaires.

Alors, comment ont-ils pu être capturés comme ça... ? Velvechia avait dû profiter de leur pyrophobie et exploiter ces créatures innocentes. Après que tout sera fini, je voulais leur faire payer pour leurs péchés... J’avais besoin de réfléchir à ce qu’il fallait faire.

« Ne vous sentez pas obligé envers nous. Maintenant que vous êtes en sécurité, retournez dans votre village et vivez en paix. Nous essaierons de ne plus jamais vous faire ennuyer par Albein, » déclara Mylarka.

Les paroles de Mylarka étaient si intrinsèques à son sens de la justice que je n’avais rien à ajouter. Elle n’avait pas rejoint l’expédition contre le Seigneur Démon pour rien.

Jedah, qui était encore prostré, leva la tête.

« La race des hommes-tigres rembourse toujours ses dettes. Nous ne pouvons pas vous aider si vous devez partir quelque part rapidement, mais comme il est déjà si tard, nous aimerions au moins vous offrir un endroit ou vous reposer, » déclara Jedah.

Il avait alors tenu une pose suppliante, et ses camarades l’avaient copié. C’était super efficace.

De plus, nous n’avions pas vraiment besoin de retourner à la capitale tout de suite...

J’avais déjà écrit la rune pour ma Magie Spirituelle sur Aileen, pour pouvoir l’aider au combat et savoir comment les choses se passent en temps réel.

Elle avait prévu de prendre d’assaut le manoir de Vinceburg, mais le plan avait changé lorsqu’elle avait pris contact avec Kirsch, qui essayait de faire rentrer en rébellion ses ex-camarades.

Les serviteurs de Vinceburg tenaient en ce moment une réunion à l’extérieur du manoir, et actuellement Aileen écoutait leur conversation depuis la véranda de la chambre de leur auberge. Elle demandait parfois si elle pouvait entrer par effraction, et je devais toujours lui dire d’attendre un peu plus.

Si Velvechia ne pouvait pas attaquer notre royaume à partir des montagnes, ils allaient probablement forcer leur chemin à travers les plaines du sud.

C’était le champ de bataille parfait pour la cavalerie sombre, leur principale force composée de cavaliers à grande mobilité...

« Eh bien, mis à part votre offre, nous avons fait une promesse avec Riko, alors nous allons accepter, » déclarai-je.

« Tout à fait, mais vous n’aimez pas l’odeur des humains, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Oui, mais les bienfaiteurs sont une exception. Les aînés seront toutefois surpris, alors il vaudrait mieux que vous puissiez sentir comme nous... Que diriez-vous de... ? » demanda Jedah.

« Ah, ne vous inquiétez pas. Riko nous a dit qu’elle y réfléchissait déjà. Je suis sûr que ça vous dérangerait si on demandait la queue de la femme de Ludo, » déclarai-je.

« N-Non, ce ne serait pas... Ma femme et moi serions fiers d’aider nos sauveurs, » déclara Ludo.

Ses joues étaient rouges alors qu’il nous regardait, mais il n’avait pas l’air d’être contre.

Leurs réactions correspondaient à celles d’un humain, et la seule vraie différence entre nous était leurs traits de bêtes. Leurs vêtements étaient faits de tissu ou de cuir et semblaient assez minables de prime abord. Ils révélaient également une plus grande superficie de peau que nos vêtements, mais c’était le mieux que la race des tigres pouvait produire pour l’instant. Les humains auraient trop honte de s’habiller comme ça, mais j’avais deviné qu’il y avait aussi des différences culturelles qui avaient influencé leur choix de tenue.

Mon esprit avait dérivé vers la proposition de la race des hommes-tigres, et Mylarka s’était tournée vers moi.

« ... Veux-tu peut-être frotter la queue de quelqu’un d’autre que sa femme ? Ou bien veux-tu ressentir la douceur de l’un d’eux ? Surtout le bout, il a l’air très doux, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Oui, c’est bien le cas. Mais je n’y pensais pas tant que ça... mais à ce propos, je me demandais si c’était bien de le faire avec Riko, » déclarai-je.

« Je pensais que la queue d’un adulte et celle d’un enfant étaient différentes, mais... pardon, quel âge a Riko ? » demanda Mylarka.

« Elle a treize ans. Elle est donc une adulte à part entière, étant donné que nous atteignons l’âge adulte à douze ans, » répondit Ludo.

« Lady Riko est l’arrière-arrière-petit-enfant du chef, et tous les membres de sa génération aspirent à l’être, » répondit sa femme.

Elle était quoi ? Ça veut dire qu’elle faisait partie de la lignée du chef, n’est-ce pas ?

Sa famille représentait le noyau de leur tribu, et étant donné la relation de Riko avec le chef, il ne pouvait pas être exclu que beaucoup de leurs compagnons de tribu partageaient le même sang.

« ... Attendez un peu. Est-ce que cela a une signification spéciale si une femme adulte de votre famille laisse un homme humain sentir comme elle ? » lui demandai-je.

« Eh bien, je suis sûre que cela signifie qu’il y a un intérêt de son côté, mais ne craignez rien, cela ne signifie pas nécessairement qu’elle veut pouvoir agrandir sa famille avec vous. Il n’y a pas de loi comme ça non plus. Je doute que Lady Riko vous ait aussi demandé de toucher sa queue, étant donné qu’elle est déjà assez vieille pour discerner certaines choses. »

Les quatre femmes à proximité de Jedah, qui venaient de fournir une explication raisonnable, affichaient un sourire ironique.

J’avais tourné la tête, incapable de saisir le sens de leurs paroles, et j’avais senti l’éclat perçant de Mylarka, qui l’avait probablement compris.

◆◇◆

Nous avions trouvé l’arbre rayé à l’extérieur du village exactement comme Riko l’avait dit.

Un sanglier sauvage ou une énorme bête avait dû rentrer en collision avec l’arbre, laissant une cicatrice.

Compte tenu de la taille de l’arbre et de la cicatrice, ce premier aurait dû avoir plusieurs siècles.

Jedah et les autres étaient retournés au village en premier et avaient envoyé Riko ici. Elle avait changé ses vêtements et s’était débarrassée des chaînes qui lui liaient les poignets et les chevilles. Ses beaux cheveux étaient disposés différemment, et ses couleurs mélangeaient l’ambre et le noir... Même ses lèvres étaient différentes, maintenant peintes d’une belle couleur pourpre.

Mylarka s’était giflé le front et avait regardé le ciel.

Si elle était une adulte à part entière, y avait-il un sens derrière son habillement ?

« S-Seigneur Sauveur... avant de commencer, puis-je demander quelque chose ? » demanda Riko.

« Mhmh !? » murmurai-je.

Mylarka me fixait avec un regard noir. J’avais entendu sa voix intérieure couiner : « Qu’est-ce que c’est que ça ? », et même moi, j’étais conscient que ma voix sonnait misérablement trop fort... mais c’était seulement parce que je me demandais ce qu’elle allait demander.

« ... Je veux que vous touchiez ma queue. Je pense que c’est duveteux et agréable au toucher... Cela ira si c’est seulement un petit peu, » déclara Riko.

« J’apprécie vraiment cette offre, mais comment puis-je le dire ? » répondis-je.

« Riko, est-ce que laisser quelqu’un toucher votre queue signifie quelque chose pour vous ? » lui demanda Mylarka.

Riko appuya ses mains sur ses joues rouges et fit quelques pas avant de s’accroupir.

« ... Seules les personnes spéciales peuvent la toucher. Mais une ou deux fois, ça ira ! » déclara Riko.

« Une ou deux fois... ? Attendez un peu. Je n’essaie pas de devenir polygame ou quelque chose comme ça. Et puis, on vient de se rencontrer, donc on ne se connaît pas. Ne pensez-vous pas que nous devrions passer plus de temps ensemble et en discuter avant de franchir cette étape ? » lui demandai-je.

« Pourquoi diable parles-tu comme si tu allais l’épouser, espèce d’ivrogne !? » s’écria Mylarka.

« Je suis peut-être un ivrogne, mais je ne vais jamais trop loin. Je peux toucher la queue de Riko, mais cela n’aura pas de signification particulière pour moi. Est-ce que ce serait vraiment bien ainsi ? » lui demandai-je.

Je ne voulais pas blesser le cœur pur d’une jeune fille qui me regardait si innocemment, et c’était exactement pour cela que je voulais être clair avec elle. Dire que je n’y aurais jamais touché aurait été pire, mais peut-être que j’étais trop gêné.

Lorsque Riko s’était calmée, elle s’était levée et s’était de nouveau approchée de moi avec un sourire agréable.

« Vous avez tenu une fois votre promesse, alors la prochaine fois qu’on verra, je vous laisserai la toucher, » déclara Riko.

« Super. Je vais m’y préparer, mais je ne peux pas vous promettre d’être votre futur mari, » déclarai-je.

« ... Tu es si rafraîchissant et dégoûtant en même temps en ce moment, mais tu as fait le bon choix. C’est mieux si elle n’attend rien de toi, » déclara Mylarka.

Je n’avais prêté que peu d’attention à la remarque désagréable de Mylarka et j’avais ainsi confirmé que toucher la queue d’une femme était vraiment une demande en mariage, à en juger par le visage de Riko qui devenait rouge.

Elle avait ensuite légèrement déplacé sa queue sur moi pour cacher mon odeur humaine, et j’avais vu après ça le même traitement pour Mylarka.

« Levez les bras. Je dois passer par là aussi. Ne vous inquiète pas, vous sentirez comme moi, » déclara Riko.

« Je suis désolée... Je suis chatouilleuse..., » répondit Mylarka.

Mylarka enleva son manteau et leva les bras, et Riko passa sa queue duveteuse sur les points faibles de la fille masquée pendant que je les regardais sans le moindre soupçon de malice. Ce que je voulais dire par là, c’était que c’était simplement une interaction entre femmes... quand même, Mylarka me regardait comme si j’étais un ver sale, et je ne pouvais pas m’empêcher de détourner mon regard.

Aileen en avait eu assez d’attendre et m’avait parlé.

« Franchementtttttt, puis-je entrer par effraction ? Allez, laisse-moi ! Queue, laisse-moi faire ! » déclara Aileen.

« Attends, je vais y déplacer la moitié de ma conscience. Les choses sont calmes ici, » répondis-je.

« Super. Je peux le dire d’après le ton de votre voix. Je parie que Mylarka a fait du bon travail, mais je n’échouerai pas ! » répliqua Aileen.

« Les filles, ne vous inquiétez pas si j’ai l’air de ne pas être là un moment. S’il vous plaît, frappez-moi sur la tête et dites-moi ce qui s’est passé s’il se produit quelque chose, » déclarai-je.

« O-Oh, tu vas là-bas ? Ne t’inquiète pas, je vais m’occuper de tout ici, » déclara Mylarka.

« Hein ? Où va-t-il à cette heure ? » demanda Riko.

« Nulle part. Il va aller s’occuper de quelque chose et sera moins réactif pendant un certain temps, rien de plus, » déclara Mylarka.

Après m’être assuré qu’elles comprenaient, j’avais déplacé ma conscience dans le petit esprit.

◆◇◆

Mon minuscule corps s’était formé à partir de la rune présente sur la poitrine d’Aileen, et j’avais volé hors de sa robe.

« Woah ! C-C’est inattendu... Tu apparais juste comme ça ? » demanda Aileen.

« Ouais, désolé de t’avoir fait attendre. Les autres sont-ils toujours là-dedans ? » lui demandai-je.

Elle hocha la tête et s’arrêta de respirer pour écouter les voix à l’intérieur de la pièce. Quatre hommes parlaient sur un ton ferme.

« L’armée de Velvechia est en train de traverser la frontière dans les plaines de l’ouest, et s’ils réussissent, nous devons enlever les princesses. Je choisirais Manarina, la première princesse afin d’hériter du prestige d’un seigneur, même le troisième serait très bien aussi. »

« Sire Lang, je trouve un peu risqué de mettre la main sur la princesse Manarina au nom du Seigneur Zevias... »

« Personne ne m’en a informé. Le Seigneur Jean est un imbécile, mais ses sous-fifres sont tout à fait remarquables. Surtout Kirsch, dont la beauté et la fidélité sont aujourd’hui des traits rares. »

« Arrêtez, votre habitude se voit de nouveau. Sire Lang aime beaucoup les femmes, et bien que je puisse voir pourquoi cette fille pourrait être séduisante... elle est toujours notre camarade, vous savez ? »

C’était en effet un discours vulgaire et dégoûtant.

Ceux qui répandent des rumeurs concernant les filles mignonnes devraient tout simplement se rendre compte que ce n’est pas cool.

Les hommes dans la salle ne pensaient qu’à eux-mêmes et considéraient les femmes comme de simples outils.

Je me demandais à quoi pensait Aileen, mais c’était écrit sur son visage couvert. Le masque bleu qu’elle portait maintenant avait une couleur différente du nôtre.

« Je vais essayer d’y aller doucement avec eux, mais pardonne-moi si ma main glisse ~ ♪, » elle avait dit ça d’un ton enjoué tout en portant ses gants sans doigts.

Aileen était sur le point de démontrer comment elle avait obtenu son titre. Quand je l’avais réalisé, j’avais senti mon sang couler à flots dans mes veines, et mon minuscule corps avait commencé à trembler d’excitation.

***

Chapitre 28 : La danseuse combattante et le chemin vers la paix

Aileen avait pris une certaine distance par rapport au mur et s’était préparée à fracasser la fenêtre avec un coup de poing.

« Attends, tu n’as pas besoin de la détruire ! Tout ira bien même sans tout détruire ! » déclarai-je.

« Mais pourquoi ? Cette version est plus cool ! » demanda Aileen.

« Si tu brises la fenêtre et qu’il reste un petit fragment sur le sol, cela causera des désagréments aux prochains clients qui vont réserver cette chambre, ne le penses-tu pas ? » demandai-je.

« Oh, c’est vrai. Le personnel de l’auberge n’a rien fait de mal, donc ce serait problématique pour eux, » déclara-t-elle.

Elle s’était frappé le poing sur la paume de sa main après avoir été d’accord avec moi.

« Mais je pourrais casser des trucs quand on se battra. Je veux les châtier, » déclara-t-elle.

« Eh bien, je suppose qu’on ne peut pas faire autrement... Essaie juste de ne pas en faire trop, » déclarai-je.

« Bien sûr ~ ♪, commençons ! » déclara Aileen.

Aileen était honnête, mais naïve. Elle n’avait probablement même pas pensé que les employés de l’auberge pourraient répandre de mauvaises rumeurs au sujet des sauveurs masqués si nous cassions quelque chose... ou peut-être que c’était juste moi qui exagérais quand il s’agissait de ces choses.

« Eh bien, la porte n’est pas fermée, alors je vais entrer. Excusez-moi ~ ! » déclara Aileen.

La fenêtre s’était ouverte en produisant un cliquetis, et elle grimpa sur le rebord de la fenêtre pendant que les individus dans la pièce la fixaient d’un air sidéré pendant quelques instants.

Après qu’elle eut sauté dans la pièce et atterri sans bruit, l’un des hommes bougea ses mains avec colère.

« Qu-Qui diable es-tu !? Un sous-fifre de l’empire !? Ou un ennemi !? » demanda-t-il.

« Sire Lag, nous avons été découverts ! »

« Qu’est-ce que vous attendez !? Appelez les gardes avant le... »

« Avant quoi ? »

Elle se rapprocha de l’homme qui essayait de quitter la pièce en un clin d’œil et saisit son épaule.

Elle portait un manteau d’allure lourde, mais ses mouvements étaient silencieux et rapides.

Même les membres de la race des hommes-tigres, réputés pour leur vitesse, n’auraient eu aucune chance contre elle.

« Je n’ai encore rien fait... même si ça a l’air ennuyeux, je ne peux pas énormément vous blesser... Le truc, c’est que j’ai entendu pas mal de vilaines choses de votre part, alors vous récoltez ce que vous semez. Au moins, vos gardes semblent savoir se battre, » déclara Aileen.

« F-Fuyez... ! »

« C’est vrai. Je ne veux pas qu’on me voie me battre, mais Qu... Finalement, cela ne me dérange pas, » déclara Aileen.

Elle était rapide comme l’éclair. Avant que les deux gardes à l’extérieur de la porte ne puissent entrer, j’avais vu sa silhouette se diviser en quatre, se déplacer dans la pièce et faire s’évanouir les quatre hommes avec un coup. Cela ressemblait à une sorte de magie, mais en fait, ce n’étaient que des images résiduelles.

C’est à ce point qu’elle était douée en arts martiaux.

Les hommes s’évanouirent en silence, mais je vis qu’elle y allait doucement avec celui qui s’appelait Lag. Elle voulait probablement obtenir des informations de lui plus tard.

En ce moment, j’avais l’air d’un petit insecte de lumière ou d’un globe de lumière, mais mon score était d’environ cinquante mille. Même si nos ennemis étaient sur un pied d’égalité avec les aventuriers classés SS, la vitesse inhumaine d’Aileen était à peine perceptible, et son score dépassait les cent mille points simplement avec ses capacités au combat rapproché.

« C’était une technique supérieure au corps à corps appelée “Poing fantôme du carnage”. Désolée d’avoir utilisé quelque chose d’aussi rudimentaire, » déclara Aileen.

Peu importe qui le regardait, ce n’était pas évident. De plus, elle n’avait même pas transpiré... ça avait l’air d’un jeu d’enfant pour elle.

« Après ça, je passe aux gardes... mais je parie qu’ils cachent quelque chose dans leurs vêtements, » déclara Aileen.

« Aileen, attention ! Il va te jeter quelque chose ! » déclarai-je.

Lorsque les deux gardes étaient entrés dans la pièce, l’un d’eux lui avait jeté quelques couteaux qu’il avait récupérés sous son manteau.

Aileen avait souri et elle dévia leurs trajectoires avec ses poings, ce qui les amena à se planter dans le mur.

« Jolis mouvements ! Mais viser le visage d’une fille, c’est méchant, » déclara Aileen.

« Argh... ! »

L’homme ne s’attendait pas à ce qu’elle détourne les couteaux et il s’était préparé à une autre attaque.

« Laisse-moi m’en occuper ! Aaah ! » cria le deuxième garde.

L’autre avait dégainé son épée et avait chargé Aileen, essayant de la frapper à plusieurs reprises, mais elle avait continué à éviter ses attaques avec un sourire sur le visage.

« Penses-tu avoir plus de chance de gagner en utilisant une épée contre moi ? » demanda Aileen.

« La ferme ! La ferme ! » cria l’homme à l’épée.

L’homme à l’épée avait été provoqué avec succès par ses paroles et avait continué d’attaquer avec insouciance.

« Ya-ah ! » elle avait crié sur l’impulsion du moment, et simulant une parade, elle avait évité sa frappe et l’avait frappé à la tête, le faisant voler. Le combattant moyen ne pourrait jamais éviter un tel coup.

Son manteau flottait, montrant ses longues jambes minces sous la fente de sa jupe.

« Prends ça ! » cria Aileen.

« Wah... ! »

Alors qu’elle enlevait son manteau, l’autre homme avait jeté un autre couteau qui l’avait transpercé ce qui avait laissé un trou.

Avait-il prévu son action... ? Non, c’était probablement une coïncidence.

« Putain ! Qu... Mon Dieu, il me l’a donné en cadeau, et c’est aussi l’un de mes préférés ! Maintenant, tu l’as vraiment fait, alors tu vas payer ! » cria Aileen.

Je me demandais de quoi elle parlait. Au moins, elle n’avait elle-même pas été poignardée.

« Ne pense surtout pas que je serais si facile à vaincre ! » cria le garde.

L’homme qui avait été envoyé par Aileen s’était déplacé pour se placer proche d’elle et avait commencé un autre assaut. Il était probablement un épéiste de Rang A, étant donné la précision de ses frappes, mais ce n’était pas suffisant pour surpasser le plus fort artiste martial dans le royaume.

« Ahh ! »

Elle avait poussé un cri et s’était placée dans une position d’attente appelée « Éclair en train de s’abattre », qui avait été utilisée pour concentrer toute la puissance pour ainsi tuer la cible en un seul coup.

L’homme avait encore essayé d’attaquer Aileen, mais elle avait tout simplement réagi en esquivant. Puis, profitant de sa position basse pour contre-attaquer avec la base de sa paume, elle avait visé le point faible de l’épée, qui s’était brisée en produisant un son aigu, puis elle s’était avancée et avait frappé avec force l’homme derrière elle.

Il s’agissait d’une technique supérieure au corps à corps secret : le Collisionneur d’étoile rakshasa. Elle avait étiré ses merveilleuses jambes et elles s’écrasèrent sur lui, émettant un son horrible avant qu’il aille s’écraser contre le mur. Quelques secondes plus tard, la gravité l’avait ramené au sol.

L’autre homme n’avait pas fait de déplacement et il avait essayé de profiter de la situation pour lui lancer un autre couteau dans le dos.

Un aventurier de Rang A n’aurait pu éviter cela... mais la différence entre ce niveau et celui d’un rang SSS était tout simplement abyssale.

« Ahh ! »

Elle s’était tordue sur elle-même et avait tracé un arc de cercle avec sa jambe blanche. Après que la frappe eut arrêté le couteau en plein vol, elle l’avait directement frappé et l’avait renvoyé vers celui qui l’avait envoyé, perçant l’épaule de l’homme et la porte, scellant ses mouvements.

Je n’en croyais pas mes yeux... Était-ce vraiment possible ?

En la regardant avec admiration, j’espérais voir plus de ses techniques.

« Argh... M-Monstre... ! » cria le garde.

Elle s’approcha alors rapidement de lui.

« Je paierai pour la porte plus tard. Mon patron se soucie de ce genre de choses, » déclara Aileen.

« ... Hein ? »

Elle avait pris à nouveau la pose de l’« Éclair en train de s’abattre » et elle s’apprêta à lui faire part de sa frustration. À ce moment-là, même le sol semblait trembler.

« Atatatatatatata! »

Aileen avait massacré le pauvre homme à une vitesse inhumaine. Ses coups étaient si forts qu’ils avaient laissé d’innombrables bosses sur la porte derrière lui.

« Guah... »

Il s’était évanoui alors que ses yeux se révulsaient. Ses vêtements avaient été déchirés.

Elle était vraiment en colère pour ce qui était arrivé à son pardessus, et je ne pouvais pas vraiment savoir si j’étais plus mal à l’aise à ce sujet ou si j’étais désolé pour le pauvre gars qui l’avait mise en colère.

Maintenant que les hommes avaient été assommés, elle avait inspiré et avait donné quelques coups de pied dans l’air avant de se tenir debout dans une pose de la victoire.

« Nous n’oublierons pas la méchanceté qui grouille dans le monde alors que nous aidons les individus dans le besoin ! Les imbattables sauveurs masqués sont là ! » déclara Aileen.

Pourquoi l’a-t-elle déclaré maintenant vu que personne ne pouvait l’entendre ? Mais franchement, même Mylarka avait fait la même chose après avoir vaincu ces gars, mais... était-ce nécessaire de vous présenter ? Pourtant, même si je ne voulais pas me démarquer, je savais que ça devait être agréable de le faire.

« Ton slogan est différent de celui de Mylarka, » déclarai-je.

« Hein ? Qu’est-ce qu’elle dit ? On devrait en parler avec Yuma la prochaine fois, mais le mien est plus cool, non ? » déclara Aileen.

« Légèrement... Mais je ne suis pas intervenu pour t’aider, » déclarai-je.

« Si j’avais fait le maximum, ils n’auraient pas survécu. Je parie que tu es bien plus fort qu’eux ! Veux-tu essayer de te battre ? » demanda-t-elle.

« Non, merci. Quoi qu’il en soit, ce que Lag a dit est un problème. Aileen, désolé de te déranger à nouveau, mais peux-tu être la garde du corps de Manarina et de ses sœurs pour un moment ? » demandai-je.

« Ouais, pas de problème. Qu’est-ce que tu veux faire de ces types ? Dois-je demander à la guilde de les capturer ? » demanda-t-elle.

À part Lag, qui était attaché pendant que nous parlions, les trois autres hommes et les deux gardes ne se réveilleraient pas de sitôt, et Vinceburg aurait certainement remarqué que quelqu’un essayait de saboter ses plans.

« Demandons d’abord quelques petites choses à Lag. Quand Velvechia nous attaquera-t-il ? » demandai-je.

« Le premier contact... sera demain... Le Seigneur Jean profitera... de l’ouverture..., » commença Lag.

Je l’avais imaginé. Jean, qui ne pouvait même pas vaincre la princesse, était considéré comme inutile par ses alliés, alors il organisa les préparatifs pour cette invasion, mais ils l’ignorèrent.

« Vouliez-vous vivre la vie des riches après avoir vendu le royaume ? » demandai-je.

« ... Quand Velvechia atteindra la forteresse de la frontière... nous avions prévu de nous rendre ! » déclara Lag.

Aileen l’avait frappé à la tête. Sa force quand elle se mettait en colère était terrifiante...

La race des Esprits était remplie de gens inflexibles, et leur puissance n’était pas une plaisanterie.

« C’est stupide ! Si nous perdons notre royaume, qu’est-ce qui se passera !? Je dois punir ces idiots qui vous écoutent. Queue, puis-je ? » demanda-t-elle.

« Je connais ce sentiment, mais attends un peu. Nous avons juste besoin de leur montrer ce dont nous sommes faits. Peux-tu tout dire à Cody avant de rencontrer Manarina ? » demandai-je.

« Oui. Je suis sûre qu’il sera ravi d’aider s-son ami, » déclara-t-elle.

« Qu’est-ce que c’était... ? Quoi qu’il en soit, nous devons compter sur le héros brandissant l’épée de lumière, » déclarai-je.

Le Royaume d’Albein avait dans ses rangs le groupe de l’expédition, une équipe imbattable qui devint les sauveurs masqués.

Cody — L’Épée Sacrée de la lumière était le meilleur moyen de montrer à Velvechia la futilité de leur geste.

« ... Au fait, j’ai effectué un coup de pied circulaire. As-tu vu quelque chose ? » demanda Aileen.

« ... Veux-tu vraiment le savoir ? » lui demandai-je.

« Waaaah ! M-Ma culotte est jolie aujourd’hui, mais je ne voulais absolument pas que tu la voie ! Oublie ça ! Maintenant ! » déclara-t-elle.

« J’ai peut-être entrevu quelque chose de blanc, mais je suppose que ce n’était que mon imagination, » déclarai-je.

« N-Non, arrête ! Le rouge, c’est bien, mais pas le blanc ! »

Aileen — La charmante déesse de la colère. Je devais encore voir la forme ultime de son titre, mais en voyant son style de combat dansant, j’avais pu confirmer à quel point la partie « charmante » était vibrante.

***

Chapitre 29 : Le mensonge du héros et les réjouissances de la race des tigres

J’avais identifié les deux gardes du corps à partir des cartes de guilde qu’ils avaient sur eux.

Ils faisaient partie du « Scorpion pourpre », une guilde située sur la 5e rue qui était célèbre pour le nombre élevé d’assassins et de gardes du corps parmi ses membres. Il y avait beaucoup de types dangereux là-dedans.

Lang et les autres étaient les subordonnés de Vinceburg, et leur histoire personnelle n’était pas exactement « propre ». Beaucoup de nobles étaient affiliés à la partie obscure de la capitale, à cela, à un niveau vraiment inquiétant.

« Même s’ils sont d’une guilde, ne devrait-on pas punir tout le monde ? » demanda Aileen.

« Eh bien, c’est sûr. Lang et les autres gars ont demandé de l’aide, mais accepter une demande n’est pas obligatoire, » répondis-je.

« Tu écoutes toujours attentivement les détails des demandes et tu évalues d’abord leur valeur, n’est-ce pas... ? On finit souvent par les accepter, » déclara-t-elle.

Ma guilde ne pouvait pas répondre à tous les types de requêtes, alors je m’étais toujours assuré de faire les bons choix. Après tout, un échec pourrait s’avérer fatal.

Cependant, comme je mettais un point d’honneur sur la collecte d’informations, cela m’avait permis de bien me préparer pour toute éventualité. Grâce à cela, nous n’avions guère eu de problèmes avec les emplois sales et gênants.

 

☆☆☆

 

Après ça, j’avais contacté ma guilde et je leur avais demandé d’envoyer ici suffisamment de personnes pour « escorter » Lang et les autres jusqu’à notre base la plus proche. Pendant ce temps, Aileen était allée payer le propriétaire de l’auberge pour les frais pour réparer les dégâts dans la chambre.

Elle m’avait aussi aidé à déplacer les individus évanouis, bien que son aide n’avait pas vraiment été nécessaire.

Je ne pouvais pas dire que la récompense de nos actions était la paix du pays, mais nous essayions en ce moment d’empêcher une guerre civile, alors j’étais sûr que nous pourrions profiter de la situation.

« OK, je vais chez Cody. Queue, repars-tu après ça ? » me demanda Aileen.

Sa question m’avait fait réfléchir. Mon corps était dans un endroit sûr, mais Mylarka et Riko en avaient probablement assez d’attendre.

Mylarka et moi avions été invités chez l’aîné, où la race des tigres avait organisé un banquet. Ils avaient tous commencé à boire, et à mesure que l’ambiance s’animait, ils nous avaient divertis avec des performances artistiques, mais Mylarka s’était vite lassée de ça et elle avait essayé de me parler, car nos hôtes étaient occupés à faire la fête.

À ce moment-là, mon corps versait de l’eau dans son verre, mais comme je continuais à donner des réponses monosyllabiques, elle m’avait déclaré ouvertement que ce n’était pas drôle de parler avec moi.

Oui, c’était probablement mieux d’y retourner, même si les runes de l’Esprit de Lumière étaient encore actives sur la poitrine d’Aileen...

« Queue, as-tu entendu ? » demanda Aileen.

« O-Oui, bien sûr. Je vais y retourner, » déclarai-je.

« Chouette. Prends soin de Mylarka. Au fait, reviendrez-vous demain... ? Peut-être demain matin après avoir passé une nuit blanche ? » demanda Aileen.

« Tu crois vraiment qu’elle me laisserait faire ? Je ne suis pas une bête, tu sais, » lui demandai-je.

« Comme c’est adorable, tu n’as même pas essayé de le nier ~ ! Si mignon, je commence à être tout excitée ! » s’exclama Aileen.

« N-Nié quoi, exactement ? Je..., » commençai-je.

« Ouais, ouais, c’est bon. Rentre maintenant. Je suis sûre que tu manques à Mylarka en ce moment, » déclara Aileen.

Elle avait probablement raison, mais je ne pouvais pas imaginer que je manquerais à Mylarka. Elle était probablement de mauvaise humeur en ce moment, donc...

« Merci, Aileen. Tu m’es d’une grande aide, » déclarai-je.

« Euh... E-Eh bien. Tu n’as pas besoin de me remercier comme ça. Je suis indépendante, mais aussi membre de ta guilde, » déclara Aileen.

Elle avait dit ça tout en se touchant les cheveux délavés, qui, comme son sang était un mélange de sang humain et de sang d’Esprit, avaient une couleur rouge pâle. Cela ressemblant presque à celle d’une pêche.

« Je m’en vais. Et si on buvait tous ensemble après la fin de ce boulot ? Invitons Yuma, sinon elle se sentira seule, » déclara Aileen.

« Oui, bonne idée. Parfois, il est bon de s’asseoir et de se détendre, » déclarai-je.

Elle avait souri puis elle avait replacé sa cagoule sur la tête, avant de sortir par la fenêtre.

Elle était montée sur le toit et avait sauté d’un immeuble à un autre. Ma philosophie était de ne jamais me démarquer, et elle avait toujours fait de son mieux pour respecter cela. On n’entendait aucun de ses pas de chat dans la nuit.

 

☆☆☆

 

Cody vivait dans la partie de la capitale où résidaient les familles des chevaliers les plus importants, au nord-est de la capitale.

Aileen était plus rapide et pouvait se déplacer plus facilement qu’un chariot tiré par des chevaux, et après un certain temps, elle était finalement arrivée chez Cody.

« C’est sa chambre, d’accord... ? Hop ! » s’exclama-t-elle.

Elle avait sauté sur l’arbre du jardin, et de là, sur la véranda de la chambre de Cody.

« Uff... Cody, es-tu là ? » demanda Aileen.

Elle avait ouvert légèrement la fenêtre et Cody s’approcha d’elle.

« Bonsoir, Aileen. Je te répète sans cesse que la porte arrière est ouverte, mais tu ne changeras jamais..., » déclara Cody.

« Hahahaha, désolée ! Le truc, c’est que je suis pressée et je veux te demander quelque chose, » déclara Aileen.

« J’avais l’impression que Queue allait bientôt m’appeler, » déclara Cody.

Il l’avait laissée entrer. Ses vêtements, son armure et son épée étaient placés sur le lit, et il n’y avait pas un seul grain de poussière dans toute la pièce.

Lorsque le roi lui avait accordé son titre, il avait reçu une armure d’argent et l’ancienne épée longue portant le symbole de la famille royale gravée sur elle. Il n’avait jamais utilisé l’épée au combat, mais portait toujours l’armure.

« Te laves-tu avant d’aller te coucher ? Tes cheveux sont mouillés, » demanda Aileen.

« Oui. Ou plutôt, aujourd’hui a été le premier jour d’entraînement de ce mois-ci, alors j’ai un peu transpiré, » déclara Cody.

Il portait un pantalon court et des bandages enveloppaient la partie supérieure de son corps. Ce n’était pas une apparence propice à un chevalier.

Après avoir terminé l’entretien de son équipement, il avait pris un bain. Il s’agissait de son habitude, à la fois en tant qu’aventurier de Rang SSS et en tant qu’ancien membre du groupe de l’expédition.

Pourtant, quelque chose en lui avait changé par rapport à l’époque.

« Cody, tu portes ce truc chaque fois que tu sors des toilettes, même à la maison ? Tu devrais y aller doucement de temps en temps. Ce que je veux dire par là, c’est que tout le monde grandit tôt ou tard, » déclara Aileen.

« Ce n’est pas grand-chose, même si dernièrement, cela devient difficile de le faire tout seul... mais je te suis toujours reconnaissant de m’avoir appris comment mettre ça, » déclara Cody.

« Tu m’as vraiment prise par surprise à l’époque ~ ! Mais d’une façon ou d’une autre, je savais pour toi. Appelons ça le sixième sens de la femme, » déclara Aileen.

« Hahahaha ! Je ne pense pas que ça te convienne vraiment, Aileen. Mais ce n’est pas à moi de dire ça, » déclara Cody.

« Oh, franchement ! Tu sais, tu ne peux pas revenir en arrière. Quoi qu’il en soit, je sais que tu as beaucoup de choses en tête afin de garder ce secret depuis que tu as rejoint l’expédition, mais... Je pense que tu devrais le dire à Queue. Au moins, en tant qu’ami, » dit Aileen en montrant du doigt les bandages qui enveloppent le corps de Cody, qui avait été endurci par un entraînement épuisant.

« Franchement, il faut juste que tu t’y habitues. De toute façon, tu es censé envelopper ta poitrine lorsque tu utilises un arc, » déclara Cody.

« La corde de l’arc l’aurait touché, hein... ? De toute façon, tu n’as pas l’air heureuse, » déclara Aileen.

« Il n’y a pas de quoi s’inquiéter. J’ai décidé de le faire. Et aussi, c’est gênant si je ne les serre pas avant l’entraînement, » déclara Cody.

Cody s’essuya les cheveux avec un chiffon, exposant sa nuque blanche, alors qu’Aileen poussa un soupir.

« Pourquoi Queue n’a-t-il toujours pas remarqué pour toi ? Mylarka et moi ne l’avons pas fait au début, mais c’est devenu évident avec le temps, » déclara Aileen.

« Parce qu’il me fait confiance, » déclara Cody.

Après avoir invité son amie à s’asseoir, il avait mis le maillot de corps qu’il portait lorsqu’il revêtait l’armure qu’il laissait sur la table. Il était ainsi devenu impossible pour quiconque de discerner quelque chose d’étrange dans son corps.

« ... Désolée, Cody. J’ai peut-être dit quelque chose que je n’aurais pas dû dire à Queue... Je sais que tu tiens beaucoup à lui..., » déclara Aileen.

« Quel est le problème avec ça, Aileen ? Je le pense vraiment, et je ressens la même chose pour toi, Sa Majesté et les citoyens d’Albein, » déclara Cody.

« Tu as toujours l’air si honorable... Franchement, on peut voir que tu aimes Queue, alors comment se sentirait-il s’il l’apprenait ? » demanda Aileen.

Il n’avait pas répondu au début, mais peu à peu, sa bouche s’était courbée avant de s’estomper.

« Même là, il ne s’en apercevra jamais. Il ne l’a pas fait dans le passé, et il ne le fait pas plus maintenant, » déclara Cody.

« C’est vrai... Cody, veux-tu vraiment le lui cacher pour toujours ? » demanda Aileen.

« Au début, je pensais que j’avais besoin de lui mentir. Je devrais être cohérent avec ça, » déclara Cody.

« Mais tu sais qu’il n’y a aucune raison de continuer cette mascarade ! N’as-tu pas dit que tu lui faisais confiance !? » s’exclama Aileen.

« ... Oui, je l’ai fait. C’est exactement pourquoi je ne trahirai jamais sa confiance, » déclara Cody.

Aileen avait eu du mal à trouver les mots justes, mais elle avait vite abandonné et avait enlevé son manteau, le laissant sur le dos de la chaise. Puis, elle avait pris la cruche d’eau sur la table et avait rempli deux verres, en buvant tout de suite le sien.

Cody accepta l’autre et en avala la moitié, exactement comme il le faisait avec la bière du Verseau d’Argent.

« Cody, pourquoi as-tu fait ça ? J’ai toujours voulu entendre ta raison, mais ça fait déjà cinq ans... S’il te plaît, dis-le-moi, » demanda Aileen.

« ... C’est quelque chose que j’ai décidé quand j’étais très jeune. Ça ne veut rien dire de particulier, » déclara Cody.

« Non, je ne te crois pas. Tu as toujours été une personne sérieuse, alors tu es arrivé à cette conclusion après y avoir longuement réfléchi. Qu’est-ce que c’était ? » demanda Aileen.

Il avait englouti le reste de son eau et rencontra le regard d’Aileen.

« ... J’ai un frère. Il s’appelle Léon, et c’est un aventurier de rang SS assez célèbre dans ma ville, » déclara Cody.

« Léon... ? Oui, ça me dit quelque chose. Après tout, il n’y a pas plus de vingt aventuriers de rang SS dans le pays, » déclara Aileen.

« Il fait partie d’une branche de le Bélier Blanc, de sorte que les rumeurs à son sujet pourraient atteindre même la capitale... étant donné sa mauvaise réputation et sa conduite infâme, » déclara Cody.

L’expression de Cody s’était assombrie en un instant, et lentement, mais de façon perceptible, la prise sur le verre vide dans sa main commença à se resserrer.

« Il s’agit du genre de personne qui joue avec le cœur des femmes. Il s’en est servi. Que cela soit des membres de son équipe ou nobles, leur statut était insignifiant. Il l’a peut-être fait pour le profit de notre famille, mais c’était facile pour lui, grâce à sa beauté, » déclara Cody.

« Eh bien... si ton frère est comme ça, j’ai l’impression de pouvoir te comprendre, » déclara Aileen.

« Puis... il a posé les mains même sur une fille qui s’est occupée de moi depuis que je suis enfant... Bien sûr, il ne voulait pas l’épouser, alors quand ils se sont séparés, j’ai été puni en son nom et j’ai été forcé de déménager dans une autre ville, » déclara Cody.

Aileen avait perdu ses mots alors qu’elle regardait le visage de son amie, qui lui faisait un faible sourire.

« C’est une histoire du passé, mais ce que j’ai appris en le regardant... Si je devenais un jour un aventurier, je voulais que les membres de mon groupe soient tous du même sexe, ou du moins qu’ils soient équilibrés entre garçons et filles. S’il n’y avait eu qu’un garçon ou qu’une fille, j’étais sûr que cela aurait causé beaucoup de problèmes. Je savais que c’était stupide, mais j’étais tout simplement trop obstiné, et je ne pouvais même pas imaginer qu’il y avait des hommes dans le monde qui n’agissaient pas comme lui, » déclara Cody.

« ... Puis tu t’es joint à l’expédition... n’est-ce pas ? » demanda Aileen.

« J’ai encore honte de moi, mais je ne pouvais pas faire confiance à Queue au début, probablement parce que j’étais bien conscient de sa force, » déclara Cody.

Elle avait levé une main sur sa poitrine et avait senti son cœur battre à toute allure alors qu’elle fouillait dans ses souvenirs.

« J’étais avec quatre personnes qui étaient presque aussi fortes que moi... mais je ne comprenais pas pourquoi Queue était le plus fort parmi vous, et ce qui le rendait si fort, » déclara Cody.

« Oui, c’est un mystère toujours non résolu... Il n’est pas aussi fort physiquement que moi, mais quoi qu’il arrive, il trouvera un moyen de gagner, » déclara Aileen.

Cody avait souri à son commentaire et avait rempli à nouveau leurs verres d’eau.

« Quand nous nous sommes battus ensemble, j’ai eu honte d’avoir douté de lui... mais j’en étais aussi heureux. Si je n’avais jamais menti, on ne serait peut-être pas amis en ce moment, » déclara Cody.

« ... Et avec ce mensonge, tu es même devenu le général de l’armée d’Albein. Donc, il n’y a plus de retour en arrière maintenant, hein ? » demanda Aileen.

« Tu frappes là où ça fait mal... Mon seul désir était de protéger le peuple de ce pays, et pour cela, je devais devenir ce que je suis maintenant, » déclara Cody.

« J’admire la diligence avec laquelle tu fonctionnes. Même Mylarka et Yuma pensent la même chose, mais on s’inquiète aussi pour toi, » déclara Aileen.

« ... Merci, mais je vais bien. Ce n’est pas dur pour moi, et j’ai failli oublier mon mensonge, » déclara Cody.

Ce n’est qu’un autre mensonge, chuchota Aileen, mais Cody ne l’entendit pas, ou fit probablement semblant de ne pas l’entendre, car elle avait saisi son épée et elle l’avait serrée contre elle comme la première fois qu’ils s’étaient rencontrés.

« Je veux être son épée, et je couperai tout ce qu’il voudra, » déclara Cody.

« ... Tu l’aimes vraiment. Mais Queue se demande pourquoi tu ne le laisses jamais toucher ton ventre, » déclara Aileen.

« ... S’il l’apprenait, j’essaierais d’effacer sa mémoire... Il ne doit jamais savoir que je suis..., » déclara Cody.

À ce moment, sa voix devint un murmure lointain, puis disparut avec la pièce.

« ... ck. J’en ai assez... Tu ne peux pas juste revenir ici !? » s’écria une voix.

J’entendais quelqu’un m’appeler. Ma conscience dérivait de nouveau vers mon corps quand ma connexion magique avait été coupée.

 

☆☆☆

 

« ... Nhhhh... Doux..., » murmurai-je.

« Excuse-moi !? Tu es tombé sur mes jambes dès que tu t’es levé ! Tu es lourd, alors déplace-toi ! » s’écria Mylarka.

« Oh... Mylarka, je suis désolé... ! » m’exclamai-je.

Les membres de la race des tigres faisaient encore la fête, et il y en avait plus d’une centaine dans la tente.

Ceux qui étaient assis sur la place d’honneur étaient Mylarka et moi, dont j’utilisais les genoux comme coussin. C’était un digne adversaire de Verlaine, et sa douceur unique m’avait bercé la tête si légèrement.

Mais malgré ce bon sentiment, je ne pouvais pas rester comme ça pour toujours, alors j’avais dû me lever.

Comme j’avais toujours les runes de l’Esprit de Lumière sur Aileen, j’avais pu entendre sa conversation avec Cody. La dernière fois, j’avais eu besoin de l’aide de Verlaine pour forcer ma conscience à revenir à mon corps avant la fin du temps imparti.

Pourtant, même si je savais que je finirais par les espionner, j’avais entendu parler du frère de Cody, et aussi de choses que je n’aurais jamais dû savoir.

Léon, son frère, était un coureur de jupons, ce qui avait amené Cody à ne pas me faire confiance au début.

C’était pour ça qu’il m’avait menti. Mais... était-ce nécessaire ?

De plus, voir les bandages qui enveloppaient son corps et la façon dont il séchait ses cheveux m’avait fait sombrer dans un profond sentiment de culpabilité.

Cody est un homme avec de beaux cheveux, une peau lisse et cela ne peut pas être une illusion.

J’avais pris le verre que j’avais versé pour Mylarka et je l’avais bu.

Oui, je dois être ivre, pensai-je.

« ... Tu n’as pas l’air bien. Riko, pouvez-vous apporter d’autres boissons ? » demanda Mylarka.

« Pas de problème. C’est de la bière de feu, une boisson de nains. Faites attention quand vous le buvez, car vous aurez l’impression que votre corps brûle, » déclara Riko.

« Merci... Argh, ce n’est pas bon... il y a quelque chose qui ne va pas dans la recette, mais si vous attendez trois jours, je vous apporte la bonne version, » déclarai-je.

« Ah, homme masqué, savez-vous comment faire de bonnes boissons !? Incroyable ! Je vais le dire à l’Ancien ! » s’exclama Riko.

Elle s’était mise à courir en étant excitée.

Merde, j’aurais dû me taire...

Mylarka me regarda avec une expression étrange.

« Il y a quelque chose qui ne va pas chez toi. On en reparlera plus tard. Maintenant, il est trop tard pour rentrer à la maison, alors j’ai demandé si on pouvait passer la nuit ici, » déclara Mylarka.

« Ouais, c’est bon... merci, Mylarka, » répondis-je.

J’y avais réfléchi. Ils ne fourniraient probablement qu’une seule tente pour nous deux.

Alors que je cherchais en vain un moyen de signaler ce problème, Mylarka avait commencé à boire un verre de quelque chose mélangé à du jus de fruits, et tandis que mon esprit s’égarait, je m’étais laissé enchanter par les danses des femmes de la race des tigres qui se produisaient devant moi.

***

Chapitre 30 : L’Épée Sainte de Lumière et le Nom Secret

Après que Cody Blancheneige eut fini de parler avec Aileen, elle était partie en secret vers la frontière sud-ouest.

La Verseau d’Argent avait de nombreuses bases éparpillées dans le Royaume d’Albein et sa capitale Alvinas, et toutes étaient reliées par des cercles de Transfert Magique, qui ne pouvaient être installés qu’en infusant un type spécifique de magie dans des cristaux magiques. Ils avaient été trouvés dans d’anciennes ruines, et bien qu’ils puissent être utilisés sans avoir besoin de procédures complexes, les principes qui sous-tendaient leurs fonctions n’étaient pas clairs.

C’est pourquoi les cristaux étaient si précieux qu’on ne pouvait pas les acheter avec de l’argent. La Verseau d’Argent avait exploré activement de nombreuses ruines et d’anciens donjons, et avait réussi à en obtenir huit, dont l’un avait été installé dans une auberge près de la frontière sud-ouest.

Il s’agissait de la destination de Cody.

Seul le vice-général et chevalier Marlo savait qu’elle quittait la capitale, et Cody s’était assurée que sa servante enverrait une lettre aux responsables des chevaliers pour les avertir de son absence en raison de mauvaises conditions de santé, mais personne ne savait où elle allait ni la raison de son départ. Elle avait peur que les gens se méfient, alors elle avait agi aussi vite que possible à cause des paroles de Lag : « le premier contact — c’est-à-dire le raid de Velvechia — sera effectué demain ».

Cody avait atteint la base principale du Verseau d’Argent et avait suivi Verlaine jusqu’à la cave à vin. Elle avait retiré une bouteille d’une étagère et activé le mécanisme caché derrière elle.

À l’instant d’après, le tableau encadré sur le mur d’une jeune fille buvant de l’alcool avait glissé, révélant un passage secret.

« Je vois... C’est comme une porte secrète, » déclara Cody.

« Quand mon Maître est dans le bar, il agit comme une sorte de gardien, bien que nous n’ayons pas de raison de nous inquiéter. Pourtant, je doute que ce genre de tour ait eu un quelconque effet sur moi, à l’époque où j’étais encore un Seigneur-Démon, » déclara Verlaine.

« Ta Magie Noire a été difficile à gérer, même pour moi. Tu m’as fait saigner pour la première fois de ma vie, » déclara Cody.

« Et bien que couvert de sang, tu n’as jamais essayé de me tuer, même si tu aurais pu me couper en petits morceaux si seulement tu avais libéré tout ton potentiel, » déclara Verlaine.

C’était la première fois qu’elles parlaient de leur bataille passée. En tant que barman et invitée, elles ne pouvaient pas converser comme ça en temps normal.

« Queue avait déjà pensé à ce qu’il allait faire après l’expédition. Il a compris que si nous t’avions tuée, tes serviteurs auraient fait des ravages sur Albein, poussés par la haine et la vengeance, » déclara Cody.

« ... Vous êtes restés dans mon royaume pendant trois mois. Je pensais que vous alliez désorganiser les quelques forces qui me restaient, mais le Maître surveillait l’état de mes citoyens, hein... ? Il a saisi leurs conditions et le fil de leurs pensées, » déclara Verlaine.

« Au premier abord, il se préparait à attaquer le château, mais quand nous avons remarqué qu’il n’était pas vraiment sérieux à propos de ça, alors parfois nous avons même fini par nous battre. Pourtant, il n’arrêtait pas d’expliquer qu’il nous fallait du temps pour obtenir le meilleur résultat possible, » déclara Cody.

Verlaine pensait qu’il était impossible pour un garçon de treize ans de penser et d’agir ainsi. Les elfes noirs vivaient longtemps, mais elle avait quand même réussi à prendre la place du précédent Seigneur-Démon dans la vingtaine. Pourtant, son maître n’était-il pas encore plus incroyable qu’elle ?

« Ce résultat était tout à fait naturel pour mon maître. Quoi qu’il en soit, il a toujours été capable de réaliser ce qu’il s’était fixé comme objectif. C’est exactement pourquoi j’ai ce doute... pourquoi n’a-t-il pas encore remarqué ce que tu es vraiment ? » demanda Verlaine.

« Tu as dit que les filles nobles avaient hâte d’être avec moi... alors tu n’as pas le droit d’en parler ainsi, » déclara Cody.

« Ce n’est pas le sexe qui attire les autres. On dit que les braves femmes sont aussi désirées par les filles nobles, et les voir vivre dans la débauche est assez commun. Même parmi mes subordonnés, il y avait des individus attirés uniquement par ceux qui partageaient le même sexe, » déclara Verlaine.

« Je suis sûre qu’il l’a déjà pensé. Peut-être que cela aurait été mieux si nous ne nous étions jamais rencontrés dans le passé, » déclara Cody.

« Les membres de cette guilde aiment beaucoup le Maître, mais il peut difficilement parler de façon décontractée avec qui que ce soit. Tu jouis de ce privilège, et je te serais reconnaissante si cela devait rester ainsi à l’avenir. Ton visage atteint presque les traits dignes d’un jeune adulte... Maintenant, terminons notre conversation ici, » déclara Verlaine.

Verlaine était entrée par la porte cachée et avait invité Cody à entrer.

Un cristal de la taille d’un poing flottait au milieu de la pièce, et sur le sol en dessous, un cercle magique complexe était tracé.

« C’est donc le cercle magique de téléportation... Tout le monde peut-il l’utiliser ? » demanda Cody.

« Pas exactement. Seules les personnes ayant un score magique supérieur à vingt mille peuvent le faire fonctionner, » expliqua Verlaine.

« Il a même fait des recherches à ce sujet... ? » demanda Cody.

« Mon Maître peut tracer des cercles magiques qui ne peuvent être activés que par des personnes ayant un certain pouvoir magique, car elles doivent surmonter le limiteur qu’il a créé en inversant la Magie de Soutien installé, qui comprime pour ainsi dire le pouvoir de la personne activant le cercle. Tu réponds à ces exigences, » déclara Verlaine.

« Non, je laisse toujours la magie aux autres. Je ne peux utiliser qu’une seule sorte de magie, et je ne me donne pas la peine de me souvenir d’une autre sorte. Si possible, j’aimerais que tu l’actives pour moi, » déclara Cody.

Verlaine avait compris qu’elle n’était pas modeste, mais qu’elle disait la vérité. Un seul type d’esprit pouvait être perçu en elle, et elle n’utilisait jamais la magie pour invoquer les éléments.

Cody avait juré fidélité à un seul esprit : celui qui avait mis Verlaine à genoux.

« Tu seras téléporté près des murailles de la frontière. Mais je trouve improbable que l’armée de Velvechia passe à travers elles, » déclara Verlaine.

« Cette bataille prendra fin avant que cela n’arrive, car c’est mon domaine d’expertise. Je n’ai besoin que de les voir clairement... et seul un Seigneur Démon comme toi attendrait le combat au corps à corps, » déclara Cody.

« Puis-je dire que c’est plus glorieux... ? Dois-je me réjouir d’avoir vécu un combat serré contre toi ? Non, je devrais probablement avoir honte d’avoir eu votre pitié, » déclara Verlaine.

« Je ne pense pas que ce soit le cas. Nous avons à nous cinq réussi à te vaincre, » déclara Cody.

Cody avait montré un sourire limpide lorsqu’elle avait tendu la main, et Verlaine, en retirant son gant, l’avait secouée.

« Je prierai pour ta victoire. Quand le Maître reviendra, dis-lui ce qui s’est passé, s’il te plaît, » déclara Verlaine.

Puis, l’ancien Seigneur Démon avait activé le cercle magique, et une lumière éblouissante avait rempli la vision du héros en blanc.

Lorsqu’elle s’était dissipée, elle s’était retrouvée devant un homme habillé en mage, et elle avait deviné qu’il était membre du Verseau d’Argent.

« Nous avons reçu des directives de notre maître de guilde. Pouvez-vous nous donner un coup de main, Sire Général ? » demanda l’homme.

« Oui, mais j’ai une faveur à vous demander. Pouvez-vous m’appeler... “Sauveur masqué” ? » demanda Cody.

« Pardonnez mon impolitesse... Je n’arrive pas à croire qu’il y ait réfléchi jusqu’à ce point..., » déclara l’homme.

Cody portait un manteau rouge pour cacher son armure argentée et un masque jaune pour cacher son visage et camoufler sa voix. L’homme devant lui observait le beau chevalier avec les yeux sculptés de rides et un sourire sur le visage.

 

☆☆☆

 

Quelques heures plus tard, une silhouette masquée et voyante était apparue sur la place forte de la frontière. Elle n’avait pas répondu aux questions des gardes, car elle avait sauté avec une dextérité surnaturelle sur le bord des murs pour atteindre le sommet de la tour de guet.

« Qui diable es-tu !? Descends de là ! »

« Ce n’est pas un endroit pour tout le monde... Wouah ! N-Nous sommes attaqués ! »

« Une énorme armée arrive de l’ouest... C-C’est Velvechia... ! »

Alors que les soldats commençaient à paniquer, Cody confirma l’avance de l’armée ennemie sur les plaines éclairées par le crépuscule.

Il y avait environ cinquante mille unités, entre la chevalerie, l’infanterie et les armes de siège. Même en refusant l’aide de Vinceburg, leur nombre était toujours digne de mention.

Dans la partie nord d’Exrea, Albein possédait de nombreux greniers et mines de minerais précieux ou utiles, mais Velvechia savait qu’il y avait une parcelle de terre qui était traversée du nord au sud par une grande rivière, ce qui rendait toute la zone riche en eau même dans son sous-sol.

C’est ce qu’ils visaient, car l’eau était si précieuse pour eux qu’ils avaient commencé à se la voler l’un à l’autre.

Jusqu’à présent, la République de Velvechia comptait neuf groupes ethniques, et Garaba, celui qui les avait unifiés grâce à sa puissante chevalerie, avait imposé une dictature militaire.

Pourtant, ils avaient été exploités à maintes reprises par le pays occidental voisin, gouverné par un Seigneur Démon de Rang S, qui les avait une fois attaqués et avait incendié l’un de leurs villages.

Ce jour-là, les citoyens de Velvechia comprirent que leur pays était voué à la chute.

Mais le Seigneur Démon avait immédiatement cessé les hostilités et avait demandé des tribus, car il n’avait pas attaqué pour détruire, mais pour piller.

Puis, tout en asséchant leurs propres ressources, Velvechia avait finalement assemblé la chevalerie en armure noire, et au lieu d’attaquer la région démoniaque qui les opprimait, et les aurait probablement annihilés en retour, ils avaient commencé le plan pour conquérir des régions humaines.

Les généraux et les soldats pensaient que c’était le bon choix, alors ils pensaient que la conquête d’Albein n’était pas impossible.

Mais ils ne savaient pas.

Ils ne savaient pas qu’Albein avait gagné la paix après avoir vaincu le Seigneur Démon de Rang SSS qui planait sur eux.

Vinceburg avait gardé le secret et leur avait dit à quel point l’attaque aurait été commode pour eux. Pourtant, Velvechia ne faisait pas confiance aux autres pays.

Alors, comment pourraient-ils penser à avoir une chance de victoire ? Cette question n’avait pas enflammé la colère de Cody, mais la pitié.

En même temps, les envahisseurs ne voulaient pas gâcher leur vie en vain.

« Gardes d’Albein ! Ne bougez pas d’ici ! » La voix de Cody se faisait entendre par dessus les autres, et résonnait dans la forteresse avec une puissance écrasante.

« Excusez-moi !? Je ne me battrai pas contre une armée aussi grande ! » cria un garde.

« P-Partons d’ici ! Tout ira bien si on s’enfuit ! » cria un autre garde.

Certains soldats avaient commencé à fuir la forteresse, mais Cody avait demandé aux membres du Verseau d’Argent qui l’y avaient amené de saisir tous ceux qui tentaient de s’échapper.

Il ne devait pas y avoir de désertion parmi les chevaliers d’Albein. Le général de l’armée était désolé d’entendre de telles choses de la part de ses subordonnés, mais elle aurait à régler leur comportement plus tard.

« Velvechia... Reculez maintenant. Même vous trouverez la force de sauver votre peuple un jour, » déclara Cody.

Queue ne laissera jamais un pays voisin dans cet état à son propre destin.

Il gagnera la guerre et sauvera tout le monde, sans même sortir de son bar.

Cody croyait fermement en lui et en sa force, ce qui l’avait conduit devant Velvechia à ce moment précis. Alors que l’aube se levait sur la nuit, une seule goutte tomba sur la joue blanche de la guerrière masquée.

Pourquoi est-ce ainsi ?

« Suis-je enfin l’un de tes pions, Queue... ? » murmura Cody.

Ces mots n’avaient atteint personne.

Maintenant que son dos était éclairé par la lumière du soleil, elle tendit les mains en chantant doucement.

Si elle n’avait pas menti, comment cela serait-il maintenant ?

Si j’avais été honnête dès le début... m’aurais-tu vue comme une étrange femme ?

Peut-être qu’elle aurait été détestée si elle avait été plus méchante que Mylarka et avait montré ouvertement sa méfiance envers les hommes.

Ou bien Queue se serait-il ouvert à elle quoiqu’il arrive ?

Maintenant que j’y pense, c’est stupide... Les individus comme toi sont vraiment...

Sans se soucier des larmes qui coulaient sur son visage, elle profita de ces longs instants de considération, et décida de prononcer le nom que ses parents lui avaient donné.

« Je t’en supplie, ô Laguna, lame fantôme ! Accorde-moi, à Cordelia Blancheneige, ta Lame de Lumière ! » déclara-t-elle.

Cordelia avait utilisé Cody comme un faux nom depuis qu’elle avait obtenu son statut d’aventurière de Rang SSS.

Elle avait toujours invoqué son épée en silence pendant l’expédition, et n’avait jamais dit son vrai nom une seule fois. Tout ça en raison du maintien de son mensonge.

Les lames fantômes étaient des esprits spéciaux qui étaient uniques au monde, par opposition à d’autres.

La première fois que Cody... non, que Cordelia ait signé un contrat, elle avait choisi la lame fantôme.

Son seul pouvoir était d’invoquer la Lame de Lumière, l’épée possédant l’attribut de Lumière qui ressemblait exactement à la lumière elle-même, qu’elle avait utilisée pour combattre Verlaine.

Une épée normale apportait tout son potentiel, quelle que soit sa forme, lorsqu’elle était utilisée en combat rapproché, mais une épée purement faite de lumière pourrait même...

– Lame de Lumière – Projectile Horizontal –

La forme de l’épée s’était transformée en deux projectiles de lumière puis elle avait disparu.

Presque au même moment, le drapeau de Velvechia avait été percé et presque entièrement détruit par l’un des projectiles, et l’autre s’était glissé juste devant le casque du commandant suprême de l’armée.

Grâce à l’aide de la lame fantôme, Cordelia pouvait viser et tirer à n’importe quelle distance que la lumière pouvait atteindre et qu’elle pouvait voir. Cela signifiait que sa portée était théoriquement infinie. De plus, la lumière de la lame fantôme ne serait pas réfractée comme la lumière normale.

« Regardez ! L’armée de Velvechia panique !? » s’écria un garde.

L’armée qui marchait vers eux avait commencé à ralentir. Une minute de plus et ils auraient atteint les murs. Mais maintenant, ils étaient devenus comme des pierres.

« Ils... se sont arrêtés !? Est-ce que ce type masqué a fait quelque chose... !? » s’écria un garde.

« Impossible ! Qu’est-ce qu’il peut bien faire à cette distance !? » demanda un autre.

« M-Mais, j’ai vu quelque chose... Argh ! Le soleil est trop lumineux ! Je ne vois rien de précis ! » déclara un troisième.

S’ils avaient reconnu la lame de lumière, ils auraient deviné la véritable identité de l’homme masqué. Comme Cordelia était de plus en plus nerveuse en écoutant les commentaires des soldats d’Albein, elle pensait que l’armée devant elle n’allait pas perdre leur esprit combatif si facilement,

– Mais elle ne s’attendait pas à ce qu’ils soient si horrifiés.

« Ils... battent en retraite..., » déclara un garde.

« C-Comment est-ce... possible... ? » demanda un autre.

Ils avaient tout misé sur cette attaque alors, partiraient-ils ainsi ? C’était inconcevable pour elle.

Elle ne s’attendait pas à ce que son pouvoir soit si terrifiant.

Lorsqu’elle avait fait son vœu avec la lame fantôme et qu’elle gagna son pouvoir, même son frère la regarda avec de la peur dans ses yeux. Un aventurier de rang SS était effrayé par une fillette de cinq ans.

Elle avait ensuite retenu son souffle en pensant à ce que Queue aurait dit dans ce cas, et elle avait fait entendre sa voix vers les soldats confus.

« J’ai tiré sur le casque de leur commandant suprême et je l’ai éraflé, et ils se sont retirés ! Mais écoutez, soldats ! Les Sauveteurs Masqués ne viendront pas vous aider à tout moment ! Développez des nerfs d’acier, préparez-vous à être attaqués à nouveau, et continuez à vous entraîner tous les jours ! » déclara Cody.

Comme elle s’inquiétait d’avoir révélé son ton habituel de général, elle sauta sur la tour de guet et descendit sur les murs.

« Les Sauveurs Masqués... ? I-Insensé... Qui diable sont-ils... !? » demanda un premier garde.

« Comment pourrait-il viser le casque du commandant suprême de là... ! ? Regardez, leur drapeau est déchiré ! » déclara un deuxième garde.

« C’est ce qu’il a fait... ? C’est inhumain... ! » déclara un troisième.

Le drapeau de Velvechia n’était plus qu’un morceau de tissu en lambeaux. Cordelia pensait qu’ils auraient essayé d’utiliser des renforts pour reprendre leur marche, mais son plan avait quand même fonctionné.

« Plus tard, je vous dirai quoi faire. Peu importe le temps qu’il faudra à un ennemi pour venir, le laxisme n’est pas bon. Préparez-vous à un entraînement strict, » murmura-t-elle.

Elle était seule en quittant la forteresse, et un sourire éclatant était présent sur son visage.

Après avoir marché un moment, elle avait rencontré les membres du Verseau d’Argent. L’homme qui l’avait accueillie après qu’elle eut été téléportée lui avait montré les soldats en fuite qui avaient été soudoyés par Lag.

« Merveilleux travail. Malheureusement, aucun d’entre nous n’a vu ce qui s’est passé d’ici, mais nous avons entendu dire que l’armée ennemie s’était retirée, » déclara l’homme.

« Oui, je vous remercie. La guilde de Queue est vraiment remplie d’individus compétents... Sont-ils tous des traîtres ? » demanda Cody.

« Il y a peut-être un déserteur qui s’est enfui à l’avance, mais nous les retrouverons probablement bientôt, » déclara l’homme.

« Non, plus tard, je veux que les hommes de ce bastion suivent un entraînement drastique. Alors, ils ne trahiront probablement plus jamais le royaume. Mes subordonnés directs et moi-même avons l’habitude de préparer des séances d’entraînement difficiles pour nos soldats, » déclara Cody.

En entendant les paroles de Cordelia, les personnes présentes se représentèrent l’une de ces séances dans leur esprit, mais ils n’éprouvaient aucune sympathie pour les soldats. Son esprit flamboyant, même si tout le monde pensait qu’elle était un homme en ce moment, pouvait éradiquer même une légion d’aventuriers de Rang B et plus encore en ce qui concerne leur volonté de se battre.

Alors qu’elle réfléchissait à la manière d’amener les soldats arrêtés à la capitale, elle utilisa à nouveau le cercle magique et les précéda, puis revint chez elle.

Quelques heures seulement s’étaient écoulées depuis que le soleil avait commencé à illuminer le ciel.

***

Chapitre 31 : Les sources chaudes de la race des hommes-tigres et la lutte du duc

Après la fin du banquet, je m’étais retrouvé dans la même tente que Riko et Mylarka, mais comme il y avait beaucoup de place, j’avais utilisé un rideau pour diviser l’espace afin de pouvoir dormir en paix.

« Eh bien... Je dois dormir. Par contre, quelle quantité d’alcool Mylarka m’a-t-elle fait boire... ? » me demandai-je à voix haute.

Nous devions nous lever tôt le lendemain matin et quitter ce village avant l’aube.

Si tout se déroulait selon mes prédictions, Cody repousserait l’attaque de Velvechia au cours de la nuit, mais je me demandais ce qui arriverait si la capitale en entendait parler... Vinceburg aurait dû réfléchir à diverses méthodes pour éviter d’être pris pour cible.

La première solution serait de s’échapper avant qu’une rébellion ne se déchaîne dans la ville.

Une autre manière serait de faire profil bas et d’avoir caché toute trace de leur implication avec Velvechia, mais comme Lag et ses camarades avaient été arrêtés, il était déjà trop tard pour cette solution.

Sinon, ils pourraient essayer d’utiliser d’autres nobles comme boucs émissaires... Rien que d’y penser, je me sentais mal à l’aise, mais comme ils voulaient usurper le trône, ce n’était pas impensable qu’il commette ça.

Comme je devenais étourdi par l’alcool en moi, j’avais commencé à éliminer les toxines de mon corps.

Les boissons de la race des hommes-tigres étaient plutôt bonnes, mais elles avaient été ratées lors de l’exécution des recettes, donc il était très facile de se soûler à mort avec elles. Cependant, la saveur sauvage de leur alcool non raffiné était étonnante.

Je voulais vraiment en avoir dans mon bar pour apporter un peu de choix.

« ... Hmm ? »

Puis, j’avais remarqué que je ne pouvais pas sentir les présences de Riko et Mylarka dans la tente, bien qu’elles auraient dû être derrière le rideau.

J’étais inquiet de laisser la Douce Catastrophe se promener si tard dans la nuit... mais peut-être qu’elle avait seulement demandé à Riko de l’amener quelque part.

Pourtant, j’étais quand même sorti de la tente et j’avais cherché une trace laissée par Mylarka.

Comme sa magie était si unique, il m’était facile de détecter où elle était passée.

Au bout d’un certain temps, j’avais atteint la lisière de la forêt.

« Qu’est-ce que... ? » murmurai-je.

J’étais entré dans les bois et j’avais remarqué qu’il y avait du brouillard assez dense se trouvant autour de moi. L’endroit semblait chaud et humide, et il y avait une odeur étrange qui flottait dans l’air.

Plus je marchais vers l’avant, plus le brouillard s’épaississait, et alors que je passais à travers ce mur pâle, la faible lumière du ciel nocturne s’affaiblissait. Ainsi, le simple fait de voir ce qui était devant moi devenait très difficile. Le simple fait de suivre les traces magiques était à peine faisable, mais je ne pouvais pas simplement retourner à la tente.

Puis, j’avais vu une grande clôture faite de morceaux de bambou attachés ensemble, d’où jaillissait le brouillard blanc.

« ... Peut-être qu’elle est derrière tout ça ? Heeey, Mylarka... »

Pendant que je parlais, j’avais jeté un coup d’œil à travers une fissure de la clôture, et le bruit de quelque chose entrant dans l’eau avait atteint mes oreilles. Je commençais à comprendre ce qui se passait.

« Ahhh... Je ne peux vraiment pas me détendre sans prendre un bain. Merci de m’avoir amené ici, Riko, » déclara Mylarka.

« Je voulais aussi prendre un bain, alors je suis contente que tu sois venue ! Je t’aime, fille sauveuse masquée ~ ! ♪, » déclara Riko.

« Toi... ne voulais-tu pas que l’autre personne vienne aussi ? » demanda Mylarka.

« Vous m’avez sauvée tous les deux, donc vous êtes aussi super importants. Maintenant, tout le monde déteste moins les humains, » déclara Riko.

« Tu ne devrais pas faire confiance aux étrangers, bien que nous soyons une exception, » déclara Mylarka.

Pourquoi... pourquoi portait-elle un masque dans le bain ?

J’avais commencé à regarder autour de moi. Elles étaient dans un bain en plein air fait de pierre, et Mylarka était en train de laver le dos de Riko.

La vapeur cachait presque tout, et comme j’avais l’impression de voir quelque chose que je n’aurais pas dû voir, le sang s’était précipité vers ma tête.

En y repensant, il y a eu ce moment où nous nous sommes tous baignés ensemble dans l’eau froide pendant l’expédition... Je ne mate pas, j’ai juste remarqué trop tard ce qu’est cet endroit !

Pourtant, même si Riko aurait dû avoir une bonne ouïe, elle n’avait pas l’air de m’avoir remarqué... J’ai été béni par les Cieux ! Mon Dieu, quelle chance j’ai eue !

« Riko... veux-tu vraiment l’épouser ? » demanda Mylarka.

« Nh... T-Tout à fait. Un sauveur masqué est un bon choix. Il est très fort et gentil, » déclara Riko.

Il est temps d’entendre Mylarka dénigrer son opinion...

Mais je ne m’attendais pas à ce que j’avais ensuite entendu.

« Hehehe... Il ne veut pas être le centre de l’attention, » répondit Mylarka. « Il est intelligent, attentionné et a un joli visage, et on trouve rarement des types comme lui. Je ne peux pas dire que je ne comprends pas tes sentiments. »

Mon cœur battait très fort.

C’était trop vil de ma part d’entendre une telle chose de cette façon.

Je devrais vraiment faire comme si je n’étais jamais sorti ma tente cette nuit-là.

« Je veux en savoir plus. Reviendrez-vous au moins une fois ? » demanda Riko.

« Bien sûr, appelez-nous quand tu veux. Peut-on amener d’autres amis ? » demanda Mylarka.

« Si ce sont tes amis, nous les accueillerons ! J’ai hâte d’y être ~ ! ♪ » déclara Riko.

« Je suis contente qu’on ait pu passer un jour de repos ici. Il y a beaucoup de choses rares... et ta queue est..., » déclara Mylarka.

« Eheheheh, ça chatouille ! Maintenant que tu l’as touché, nous sommes officiellement amies ! » déclara Riko.

« Oh, c’est vrai ? C’est un plaisir d’être amie avec toi, » déclara Mylarka.

Mylarka avait peloté le bout de la queue de la fille, et Riko avait commencé à laver soigneusement le corps de sa nouvelle amie.

Je m’étais éloigné de ma cachette et j’avais commencé à y retourner.

Il n’y avait pas de quoi avoir peur, mais si elles savaient ce que j’avais fait, j’aurais sûrement affronté ma fin.

« ... Le garçon masqué est venu ici. Est-ce qu’il m’a vu... ? » demanda Riko.

« Eh !? P-Pourquoi tu ne me l’as pas dit !? Crois-tu qu’il nous a entendus ? Dans ce cas, je devrais effacer —, » commença Mylarka.

« N-Non, je ne crois pas. Les humains ne peuvent pas entendre de cette distance, » répondit Riko.

« J-Je vois... alors, pas de problème. S’il m’avait vue, j’aurais réfléchi à ce que je devrais lui faire..., » déclara Mylarka.

« Pourquoi ne pas l’épouser ensemble ? Tu es la première, je suis la deuxième ! ♪, » déclara Riko.

« ... Tu es vraiment honnête avec toi-même. En te voyant ainsi, j’ai presque envie d’oublier ma colère, » déclara Mylarka.

Mylarka était devenue très gentille. C’était presque inimaginable, vue comment elle était dans le passé.

Même elle, qui n’avait jamais voulu que les autres se rapprochent d’elle, avait envisagé d’épouser quelqu’un, et dans cette atmosphère chaleureuse, elle était presque tentée de l’envisager sérieusement.

Néanmoins, étant donné notre expédition passée, j’aurais dû être conscient des relations entre nous.

Mais il était vrai que la surveiller trop longtemps m’aurait forcé à utiliser la Lumière Curatif sur moi-même.

 

◆◇◆

 

Nous avions nourri le dragon de feu avec de la grenadine concentrée, puis nous étions montés dessus avant l’aube et étions partis vers le nord-ouest : la capitale.

Mylarka avait déjà l’habitude de m’utiliser comme dossier et appréciait la vue.

« ... Hm ? Quelque chose vient par ici... Est-ce que c’est ton... ? » demandai-je.

« C’est mon oiseau féerique. Je lui ai demandé de venir me prévenir s’il se passait quelque chose. Que s’est-il passé, Charlotte ? » demanda Mylarka.

J’avais pris le temps de l’admirer alors qu’il atterrissait sur son épaule. Son joli nom correspondait parfaitement à son allure adorable : un dégradé bleu colorait ses plumes de saphir jusqu’à leurs pointes.

Il avait aussi la capacité de faire disparaître sa présence et de se fondre dans l’environnement.

Mylarka était très fière, donc elle n’avait pas été utilisée en tant qu’éclaireuse comme les autres membres de ma guilde.

Charlotte gazouilla à l’oreille de son maître, et le professeur de génie qui enseigna la magie offensive à la première classe l’avait compris grâce aux efforts qu’elle consacrait à la recherche sur les langues des animaux. En fait, ceci était l’une de ses recherches les plus célèbres.

« Queue, Zevias... blâme Kirsch et ses camarades. Ils pourraient même être exécutés, » déclara Mylarka.

Je ne sentais rien en moi et il n’y avait même pas de colère.

Ces mots avaient beau être entrés dans mes oreilles, mais mes sentiments étaient totalement calmes. C’était juste une autre possibilité à laquelle j’avais déjà pensé depuis longtemps, et j’aurais pu faire en sorte que les membres de ma guilde agissent en conséquence si seulement je n’étais pas au milieu du ciel.

« ... Qu’est-ce que Jean fait ? » demandai-je.

« Il a fui loin de la capitale. Il s’est séparé de son père... Je vais aller l’arrêter. Plus tard, je demanderai aux membres de ta guilde de m’aider, et si nous le saisissons, nous l’amènerons aux autorités, » déclara Mylarka.

Elle ne portait pas son masque jusqu’à ce moment-là, car il lui était impossible d’être vue en volant à cette altitude, mais elle avait décidé de le porter au moment suivant. Dans son regard ardent, on pouvait voir sa volonté de fer.

Lui laisser cette tâche était une bonne idée. Les membres de ma guilde l’aideraient, mais... et moi ?

Zevias Vinceburg était un homme qui a renoncé à son statut uniquement pour voler le trône.

Je devais donc le faire échouer. Sinon, la paix qui régnait actuellement dans la capitale serait détruite.

« ... Le cinquième oublié... Zevias regrettera de ne rien savoir de ton existence ! » déclara Mylarka.

« Je suis d’accord pour qu’on m’oublie totalement. Ce n’est pas comme si j’avais beaucoup à faire maintenant, » déclarai-je.

Je portais aussi mon masque. Le fait d’agir comme maître de guilde allait à l’encontre de mes principes... mais en tant que membre des sauveurs masqués, je ne pouvais m’empêcher de penser à notre expédition contre l’ancien Seigneur Démon.

C’était juste une autre histoire, mais c’était avec les mêmes camarades que j’avais à l’époque.

Je n’avais jamais été sous les feux de la rampe en regardant les victoires qui s’étaient accumulées sur leur route.

Cody, Mylarka, Aileen, Yuma : J’admirais leurs combats surprenants, et j’étais fier et heureux d’être leur camarade.

« Que nous donnerez-vous une fois que ça sera fini, Monsieur le majordome masqué ? » demanda Mylarka.

« Vous verrez, Milady. Attendez-vous à au moins un dîner complet à le Verseau d’Argent ! » répondis-je.

Nous étions descendus en piqué et nous nous étions arrêtés à une certaine distance du manoir de Vinceburg qui se trouvait devant nous.

***

Chapitre 32 : Une fois de plus, le cinquième, l’Oublié

Une fois que nous avions atterri avec l’assistance de l’oiseau féerique, nous étions encore un peu loin de notre destination, alors nous avions décidé de nous séparer. Mylarka était allée empêcher Jean Vinceburg de s’échapper, et j’étais allé à son château.

Au milieu de la large cour devant le manoir se déroulait une scène triste.

Kirsch et plusieurs autres serviteurs étaient assis par terre, les mains liées dans le dos, et deux hommes tenant des épées de bourreau se tenaient derrière eux.

Devant eux, un vieil homme chauve vêtu de vêtements luxueux regardait les camarades de la jeune fille avec un regard plus froid que la glace et un sourire tordu sur son visage.

« Exactement comme l’armée de Velvechia, vous avez trahi la famille de Vinceburg. C’est de votre faute si ça s’est terminé comme ça. Kirsch, je pensais que tu étais un fidèle serviteur de Jean, mais tu es en fait une sale traîtresse. »

« Grrr... ! »

« Oh, ne t’avise pas de bouger, sinon ta tête va rouler sur le sol. Laisse-moi te donner une dernière chance. Mon stupide fils est déjà parti, alors pourrais-tu envisager de devenir mon serviteur ? Si tu me jures fidélité, j’assurerai ta survie. »

« S-S’il vous plaît, attendez, Seigneur Zevias ! Est-ce que ça veut dire que nous — ahh ! »

L’un des autres serviteurs essaya de parler, mais l’un des bourreaux le frappa avec force, le poussant ainsi sur le sol, haletant.

« Qui a dit que tu pouvais parler ? Je ne tends la main qu’à ceux qui le méritent. Les gens comme toi sont remplaçables. »

« Quoi... !? Si je ne vous avais pas dit que la capitaine Kirsch n’avait pas suivi vos ordres, vous... »

« Tu ne l’as pas arrêtée, alors où veux-tu en venir ? Penses-tu que les traîtres devraient être traités avec bonté ? Comme c’est honteux de ta part ! »

« Argh... Merddde... ! »

Kirsch allait défendre son camarade. Je savais ce qui allait se passer dans cette affaire, alors j’avais commencé à réfléchir.

Comment pourrais-je la sauver ?

Les bourreaux de Zevias étaient des aventuriers de Rang A, et l’un d’entre eux était sûrement doué avec son épée, donc s’il la rabattait sur Kirsch, elle allait certainement mourir... mais les battre ne représentait pas une tâche ardue.

Ils n’avaient pas pu s’échapper... Je devais les faire se concentrer sur moi.

Quoi qu’il arrive, j’espère juste que ce bonhomme mourra de peur, pensai-je.

J’avais utilisé de la magie de soutien sur les domestiques pour protéger leur corps, juste au cas où.

Au départ, les Buffs n’étaient pas quelque chose que l’on pouvait gagner en mangeant, c’était une convenance à laquelle j’avais pensé. La magie de support normale avait été utilisée sur les champs de bataille afin d’aider ses camarades.

J’avais caché mon pouvoir magique et j’avais jeté un sort de renforcement sur Kirsch, mais ça seul ne pouvait pas faire le travail. L’ennemi devait être affaibli... alors j’avais commencé à me préparer pour le prochain coup.

Je m’étais beaucoup entraîné afin de bien l’utiliser, et bien qu’il soit moins efficace que les sorts de Mylarka, les résultats étaient garantis.

Kirsch leva la tête et regarda Zevias en face. Elle s’était probablement opposée en résistant avant d’être saisie. Du sang coulait de ses lèvres comme si elle avait été frappée, et ses cheveux étaient ébouriffés.

« Je n’ai rien fait de mal, Zevias Vinceburg ! Même si je meurs maintenant, quelqu’un saura sûrement ce que tu as fait ! » Elle ne lui avait pas épargné un mot.

Ce n’était pas nécessaire.

Verlaine avait dit que si Kirsch avait confiance en son choix, nous l’aurions acceptée comme récompense.

Nous avions un accord, donc nous devions répondre à sa demande.

Zevias était silencieux, mais la fureur s’empara de lui. Avec ses prochaines paroles, il pourrait ordonner au bourreau de mettre fin à sa vie. Son visage ridé frémissait tristement, reflétant un instant le même sentiment que Lang pour cette belle femme.

« ... Aussi triste que cela soit, tu es accusée de trahison. Par conséquent, je te condamne à mort. Je sais que tu comprends mon choix, » déclara Zevias.

« Khhh... ! »

Alors que les larmes coulaient le long de ses joues, la lumière dans ses yeux ne vacilla jamais, et pas un instant elle baissa la tête.

La lame brillante qui se reflétait dans ses yeux s’éleva lentement dans le ciel, et alors qu’elle était sur le point de se balancer vers elle, je jetai deux sorts simultanément.

Esprit, Monté ! Esprit, Réduction !

« Argh... !? »

Le bourreau s’arrêta de bouger et, incapable de tenir l’épée dans ses mains, il perdit l’équilibre et tomba au sol.

« L’épée est... lourde... ! »

« Qu’est-ce que tu fais !? Je t’ai dit de la tuer ! Si tu refuses de le faire, Glance, fais-le ! »

« Seuls les scélérats condamneraient quelqu’un à mort, tu ne crois pas ? » demandai-je.

C’était le meilleur moment pour agir. Avant d’approcher les serviteurs attachés, j’avais dégainé mon épée.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas croisé mon fer avec quelqu’un, mais cela ne pouvait même pas être considéré comme un combat pour moi.

« Pour qui te prends-tu avec ce masque, un héros... ? C’est des conneries ! »

« Je travaille comme toi, Glance Bardot du Scorpion Pourpre, » répondis-je.

« Oh, c’est vrai ? Alors, meurs ! » cria Glance.

C’était un aventurier de Rang A avec un score de dix mille points, et j’étais sûr qu’il gagnait beaucoup d’argent grâce à ses bras solides et ses techniques d’épée.

Pourtant, quiconque se servait d’une épée commune contre moi — entraîné et maniant une lame d’esprit — demandait simplement à mourir.

Clang, nos épées s’étaient heurtées, et la sienne avait été magnifiquement coupée en deux.

« Impossible... ! Une épée d’acier ne peut pas couper à travers le kurogane... ! » cria Glance.

« Oh, tu utilisais l’une des armes de Velvechia ? Je suppose qu’elle était défectueuse..., » déclarai-je.

« Grrr... ! »

Ayant perdu son arme, je lui avais donné un coup de pied pour mettre fin rapidement à notre bataille.

Frappe, activation !

Normalement, il n’y avait pas besoin d’utiliser la magie de soutien, mais je n’étais pas non plus obligé d’y aller doucement avec lui, alors je m’étais un peu emporté.

Soudain, Glance s’écrasa sur un grand arbre et des fissures se formèrent sur son tronc lors de l’impact.

« Qui est le suivant ? Personne d’autre ? Bon sang, ton visage devient violet, » demandai-je.

« Entouré d’un tas de gens inutiles... ! Si je pouvais m’en sortir... Si seulement je pouvais m’enfuir... ! »

L’homme qui manipulait ses sous-fifres de l’ombre n’avait aucun signe d’intelligence sur son visage.

Même son fils l’avait abandonné, et avec ce développement, ses espoirs s’étaient effondrés... mais en s’agrippant à tout, il avait saisi son épée et l’avait pointée vers moi.

Son visage était déformé d’orgueil et de haine.

« WAAAH ! »

Perdant la tête, il avait crié comme une bête et avait agité son épée. Bien que j’avais presque pitié de lui, considérant qu’il était encore plus faible qu’un aventurier de rang C, je n’avais pas baissé la garde.

Parmi les innombrables façons d’aborder un problème, j’avais toujours choisi la « non traditionnelle ». Je m’étais toujours battu comme ça.

J’avais donc dissimulé mon symbole magique en forme de carré.

Chaque fois que je voyais Mylarka lancer de la magie, je me demandais toujours si elle pouvait le faire.

Il n’y avait personne d’autre qu’elle pour utiliser la magie de l’expansion de l’espace, mais je n’avais cessé de l’analyser depuis toujours, et c’est pourquoi nul autre qu’un homme à tout faire comme moi n’aurait pu la reproduire.

Anéantissement en zone restreinte n° 66 — Champ de désintégration.

Son épée m’avait apparemment poignardé.

« T-Tu vois !? Ce n’est pas la fin pour moi ! Je vais... »

« Non, c’est fini. Et tu n’auras plus jamais d’autre chance, » répondis-je.

« Whaaaah !? Qu-Qu’est-ce que... ! »

L’épée commença à devenir noire comme un morceau de charbon de bois, puis s’émietta en morceaux. Il était tombé sur ses fesses et m’avait regardé comme si j’étais un monstre.

« M-Mon épée... ! T-Tu es un esprit ! Est-ce que des esprits dégoûtants vont envahir notre capitale !? »

« Ne les méprise pas, Zevias, » répliquai-je. « Je connais des esprits bien plus fiers que toi. Ce n’est pas comme si ce mot s’applique à quelqu’un qui a essayé de vendre son propre pays... Ce serait du gâchis ! »

« Guhhhh... Gh... ! »

Lorsqu’il avait accepté la défaite, il s’était mis à écumer, l’empêchant d’articuler correctement les mots, et à la fin, il s’était évanoui.

Aucun de ses sous-fifres ne voulait plus se battre. L’esprit avait tellement affaibli les cibles que s’ils n’avaient pas une certaine force, ils ne pourraient même pas tenir une épée.

« Je suppose que l’emmener avec vous serait trop demander, alors saisissez-le. »

Personne n’avait rien dit, mais je sentais que personne n’était contre ma proposition.

J’avais libéré Kirsch et ses camarades et après avoir vu que la corde avait creusé dans ses bras et qu’elle saignait, j’avais jeté un sort de soin sur les personnes présentes.

« Cette lumière... vous pouvez même utiliser la magie de guérison... ? » demanda Kirsch.

« Je n’ai rien fait de mal ! Le capitaine Kirsch l’a fait — . »

J’avais frappé le camarade de la fille et l’avais fait s’évanouir.

« Quelqu’un d’autre t’a-t-il trahie ? » lui demandai-je.

« ... Non, bien que certains le voulaient. Mais c’est ma faute, je ne suis pas digne de respect..., » répondit-elle.

« Je ne pense pas qu’ils —, » déclarai-je.

« Pardonnez-moi, capitaine Kirsch, d’avoir douté de vous à un moment donné... »

Trois de ses subordonnés avaient commencé à s’excuser, mais elle leur avait souri.

« Tout le monde aurait douté de moi là-bas. Et puis, cela vous a peut-être sauvé... mais je préfère mourir que d’être son serviteur, » déclara Kirsch.

« Capitaine... ! »

Elle pensait sûrement beaucoup à eux. Ils se faisaient confiance, mais cette confiance était lentement souillée par le sale boulot que Jean et Zevias leur avaient ordonné de faire.

Charlotte avait traversé le ciel suivi par le dragon de feu, alors j’avais deviné que Mylarka avait terminé sa mission.

« D-Désolée, homme masqué... Pourquoi nous avoir sauvés ? » demanda Kirsch.

Mon apparence et ma voix étaient camouflées, alors Kirsch ne m’avait pas reconnu. Ainsi elle attendait une réponse... mais j’étais trop concentré sur sa peau, exposée par sa veste déchirée.

« Ah, pardonnez-moi... Je ne m’attendais pas à ce que quelqu’un nous aide..., » déclara-t-elle.

« Non, ne t’inquiète pas. C’était le moins que je puisse faire, » répondis-je.

J’avais tourné le dos et j’avais commencé à m’éloigner. Ma prochaine étape était de contacter les membres de ma guilde et de s’occuper de Kirsch et ses camarades, car ils avaient probablement des informations précieuses... et dans le pire des cas, je devais demander de l’aide à Cody.

« S’il vous plaît, dites-moi au moins votre nom ! » demanda Kirsch.

« Mon nom ? Tu m’oublieras de toute façon, donc c’est bien si tu ne le sais jamais, » répondis-je.

Ce n’était pas totalement un mensonge. Je ne voulais pas dire mon nom devant les autres et je ne l’avais fait qu’à des occasions très spéciales.

Aurais-je dû lui répondre seul à seul ? Ou était-ce mieux pour elle de demander aux membres de ma guilde ? Dans les deux cas, connaître mon nom était inutile, puisqu’il n’était pas nécessaire de se présenter à un ivrogne comme moi.

C’est exactement pour cette raison que je portais un masque.

« Je suis le cinquième sauveur masqué. N’hésitez pas à vous en souvenir, » répondis-je.

« Oui ! Bien sûr que je le ferai ! Merci beaucoup, Héros Oublié ! » déclara Kirsch.

« Gh... !? »

« Héros... ? Cet homme ? »

« Il nous a sauvés, alors ne devrais-je pas l’appeler un héros ? » demanda Kirsch.

Ils étaient tous d’accord, mais ça m’avait choqué.

Le savait-elle ? Non, elle avait probablement cherché le nom du maître de la guilde du Verseau d’Argent, qui avait été officiellement enregistré... tout le monde pouvait relié les points.

La Verseau d’Argent, ou plutôt, moi, j’avais accepté sa demande, et un sauveur masqué était venu l’aider... eh bien, faire des histoires pour une chose aussi insignifiante était tout simplement idiot.

Elle gardera ce secret. Et si ce n’est pas le cas, je demanderai à Verlaine d’ajouter cela comme autre partie de notre récompense, pensai-je.

Les sauveurs masqués étaient le fruit d’une collaboration entre les individus, et non entre les guildes, et servaient à protéger le pays.

S’ils sauvaient quelqu’un, ce n’était pas le mérite d’une guilde ou d’une compagnie... Je voulais vraiment que ce soit clair.

***

Chapitre 33 : La restauration de la paix et l’invitation du majordome

Kirsch Auguste avait informé la capitale royale des plans de Vinceburg, qui consistait à utiliser deux autres familles nobles comme bouc émissaire afin de se protéger. Le premier à l’entendre avait été le Premier ministre, qui avait tenté de demander une audience avec la famille royale avant que le pays ne puisse être secoué par une telle crise.

Malgré son prestige important, la maison de Vinceburg avait commencé à pourrir depuis la génération de Zevias, et cela était devenu évident même pour d’autres familles. Peu importe leur noble titre, Orlanz — la première famille ducale — et Stollen jugeaient scandaleuse leur tentative de forcer un mariage avec une princesse, et aucun d’eux ne pouvait garder le silence devant la débauche de Jean.

Stollen savait que leur ancien manoir appartenait maintenant à ma guilde et m’avait déjà envoyé une lettre amicale qui affirmait leur confiance réciproque avec Orlanz, qui avait à cœur le cas de Kirsch et voulait l’employer.

Je croyais qu’elle pouvait accepter leur demande.

Même Yuma avait dit qu’elle voulait l’aider indirectement. J’étais sûr qu’elle se serait sentie isolée si elle était la seule dans l’expédition à ne pas avoir aidé dans toute cette affaire.

 

◆◇◆

 

Vinceburg était sur le point d’être dépouillé de son statut, mais les choses s’étaient arrangées avec une rétrogradation généreuse au rang de vicomte. Ce résultat avait été décidé après la confirmation que tous les membres de la famille n’aidaient pas Jean et Zevias, car certains ne savaient même pas ce qu’ils faisaient.

Maintenant qu’il y avait une place vide pour devenir une famille ducale, les marquis avaient décidé qu’il était important d’en choisir une nouvelle. Comme les préparatifs allaient prendre beaucoup de temps avant que l’une d’elles ne soit sélectionnée, les deux autres familles ducales allaient rester au sommet pendant un certain temps.

Heureusement, lorsque Kirsch avait commencé à travailler pour Orlanz, ses capacités et sa loyauté pour son maître et son pays les avaient conquis, elle avait donc été autorisée à garder ses subordonnés restants sous son autorité.

En ce qui concerne la récompense, elle avait décidé d’en parler un autre jour. Nous lui avions dit que nous avions obtenu ce que nous voulions, mais elle ne l’avait pas accepté et avait insisté.

Une semaine s’était donc écoulée.

J’avais invité les autres sauveurs masqués au manoir de Béatrice pour le dîner, et avant de m’asseoir à table, j’avais dit à Yuma qu’elle n’avait rien à faire pour nous cette fois-ci, mais elle était déterminée à contribuer à cette affaire.

« Ma façon d’aider les gens qui se battent entre eux est de conduire au Ciel les âmes des morts qui ont affronté leur mort avec chagrin, » déclara Yuma. « Bien que tel soit l’un de nos devoirs en tant que prêtre, si c’est ce qui te rend heureux, je suis également contente de voir que tu t’inquiètes autant pour moi. »

« Yuma... tu as bien grandi. Tu as toujours dit que tu voulais apaiser toutes les âmes, » déclarai-je.

« Eh bien, c’est ce que je veux vraiment... mais le fait de me contrôler m’a amenée à t’aider, et cela m’a même donné un endroit pour me détendre, » répondit Yuma.

Elle souriait comme seule une sainte jeune fille pouvait le faire, mais j’avais perçu quelque chose d’immoral derrière ses paroles.

« ... Ne t’es-tu pas un peu déchaînée en tant que prêtresse masquée ? » demandai-je.

« O-Oui... Jusqu’à présent, cela a été très satisfaisant, » répondit Yuma. « Malgré tout, ma robe suggérait que je faisais partie de la Sainte Église d’Albein malgré mon masque, donc les offrandes sont en augmentation. Mais je ne peux pas retirer de ma tête ce que j’ai ressenti quand j’ai purifié la ville entière... Ahh... J’ai tellement envie de toucher ton âme comme ça encore une fois... ! »

« J-Je vois... n’hésite pas à le faire quand tu le veux, tant que ça ne fait que toucher mon âme, » répondis-je.

Elle cligna des yeux ronds et mignons à plusieurs reprises, comme si elle pensait que je n’avais pas compris ce qu’elle voulait vraiment dire.

« Non. Je le ferai que dans tes derniers instants, quand ta famille sera à côté de toi. Alors, je t’accompagnerai vers le chemin qui mène au Ciel, » déclara Yuma.

« ... Une famille, hein ? Je devrais choisir une épouse avant ça, » répondis-je.

« E-Eh bien... o-oui. Laisse-moi te dire que mes parents ont de grands espoirs pour toi, alors... Je-Je pourrais..., » commença Yuma.

« Monsieur le majordome, Yuma, nous attendons de prendre place depuis un moment. Avez-vous fini de parler ? » demanda Mylarka.

« Kh ! D-Désolée. Sire Majordome, reprenons notre conversation une autre fois... ! » s’exclama Yuma.

Tout en se précipitant sur son siège, Yuma s’était assise près de Mylarka, qui me regardait en pensant à quelque chose, puis elle avait souri et elle s’était mise à discuter avec son amie.

« Chères invitées, voulez-vous un verre avant le dîner ? » demandai-je.

« Je suis partante pour tout ce que vous suggérez, » déclara Aileen.

« Moi aussi ! Yuma, veux-tu du lait ? Tu ne peux pas briser ton tabou aujourd’hui, n’est-ce pas ? » demanda Mylarka.

« Oui, tout sauf les boissons alcoolisées sera parfait pour moi, » déclara Yuma.

« Bon. Je suppose que je vais... prendre comme d’habitude. »

Le dernier qui avait parlé était Cody, qui portait des vêtements ordinaires et qui s’était assise près d’Aileen.

Il y a longtemps, elle m’avait presque demandé directement comment elle devait s’habiller, puisqu’elle n’était pas le genre de personne qui se souciait des vêtements, alors je lui avais présenté un tailleur que je connaissais.

Je me demandais si de telles journées se reproduiraient à l’avenir.

Devant moi se trouvaient les quelques amies avec qui je pouvais parler sincèrement. Je ne voulais pas les perdre, mais c’était exactement la raison pour laquelle je m’étais demandé : était-ce mieux de continuer à nier ce que je voyais ?

Cody me pardonnerait-elle si je lui disais... si je lui disais ce que je savais ?

Cordelia Blancheneige était un nom qui figurait dans les actes de naissance de sa ville natale.

Grâce à mon réseau d’information, je n’avais même pas eu à me déplacer personnellement pour le chercher. Je n’avais jamais voulu me mêler des affaires de mes amies, et c’était la première fois que j’avais entendu parler de son lieu de naissance.

Bien qu’elle ait gardé ses cheveux bruns courts, j’avais parfois remarqué qu’ils devenaient plus longs, et je me demandais si c’était vraiment une fille, que ce soit pendant notre voyage ou lorsque nous étions assis à proximité pour boire.

Quand c’était arrivé, j’avais toujours nié la vérité : elle ne pouvait pas être une fille, et si je lui avais demandé directement, j’aurais perdu sa confiance.

Et probablement, ce que je voulais faire l’aurait mise en colère et brisé notre relation.

Mais jusque-là, je voulais que son bonheur dure le plus longtemps possible, même si elle devait continuer à mentir sur elle-même. Je voulais qu’elle se détende.

« Laissez-moi vous montrer ma gratitude pour ce que vous avez fait en vous offrant un dîner spécial. Sire Cody, pourriez-vous accepter un verre de ma suggestion ? » demandai-je.

« ... ? Oui, allez-y, n’hésitez pas, » déclara Cody.

J’avais senti mon cœur sauter un battement.

Même si je pouvais continuer à faire semblant d’ignorer tout en m’en débarrassant de ça comme d’une hallucination provoquée en état d’ébriété, notre relation n’aurait pas changé.

Je savais que c’était mal... mais c’était la première fois que j’avais si peur de quelque chose.

J’étais content quand Cody, une habituée, passait à mon bar.

Quel que soit le sexe, mes sentiments auraient été les mêmes.

« Si vous voulez bien m’excuser, je vais vous présenter vos boissons, » déclarai-je.

 

◆◇◆

 

Béatrice entra dans la pièce en poussant un chariot sur lequel quatre verres étaient remplis de liquide coloré, un pour chacune de nos invitées : rouge pour Mylarka, bleu pour Aileen, blanc pour Yuma, et jaune pour Cody.

« C’est ce qu’on appelle les gouttes Arc-en-Ciel, un mélange original du Verseau d’Argent, » déclarai-je.

Ces boissons avaient changé de couleur pour devenir un arc-en-ciel quand j’avais ajouté une goutte d’un liquide spécial. La base d’origine était constituée d’eau-de-vie, de liqueur ou de jus de fruits. C’était déjà très bon, mais après que j’ai ajouté cette goutte, le goût avait été grandement amélioré.

« ... Queue, est-ce que c’est... ? » demanda Cody.

Cody m’avait appelé ainsi malgré mon apparence de majordome, comme si elle s’en fichait.

Sans dire un mot, j’avais fait signe à Béatrice de placer les verres, remplis de liquide transparent et coloré, devant elles.

J’étais sûr que Cody aurait commandé une bière, puisque je lui avais dit que c’était une commande courante pour les invités masculins, et c’était ce qu’elle avait continué à commander.

Elle ne voulait probablement pas avoir l’air efféminée... mais son choix n’était qu’à moitié juste.

Elle jouait ce rôle seulement pour me cacher son vrai sexe.

C’est pourquoi j’avais dû la faire s’arrêter d’une manière que les mots ne pouvaient exprimer.

« ... Je pense que probablement, je l’ai mal formulé. Mais je ne demanderais rien d’autre que du rhum ou de la bière... à quelques exceptions près, » déclara Cody.

« Cela ne fait pas exception à la règle. Je suis sûr que je n’ai pas été piégé par mon imagination, » répondis-je.

Mylarka, Yuma et Aileen avaient le visage crispé. Elles ne pouvaient pas me croire... mais leur réaction était normale.

J’avais fait semblant d’être ignorant pendant cinq longues années jusqu’à ce moment.

Cody avait essayé de dire quelque chose, et un éclair de colère avait éclairé ses yeux, mais...

« ... Je t’interrogerai plus tard. Sache que cela te coûtera cher, » déclara Cody.

« Comme vous le souhaitez. Pourtant, il n’y a pas eu d’erreur dans ma préparation. Si ce n’est pas à votre goût, je vous prie de me punir à votre discrétion, » déclarai-je.

Je m’inclinais profondément tout en me préparant à ce que Cody me saute dessus.

Mais la seule chose qui était sortie de ses lèvres l’instant d’après était un soupir.

« ... Je te demanderai ce que cela signifie plus tard, puisque c’est probablement moi qui dois m’y préparer, » répondit Cody.

Tandis que je levais la tête, le regard des quatre filles me fixait.

Elles ne me regardaient pas avec des yeux qui me blâmaient, mais des yeux compréhensifs et perspicaces.

« Pourquoi as-tu choisi aujourd’hui, et depuis quand le sais-tu... ? J’aimerais te demander beaucoup de choses, mais je vais me contenir par respect pour Cody, » déclara Mylarka.

« Je vous remercie, Lady Mylarka, » répondis-je.

« Hein ? Veux-tu garder cette façade de majordome ? Queue, as-tu honte de parler franchement avec Cody ? » demanda Mylarka.

« ... En vérité, cela ne me dérange nullement, mais tout comme je n’ai jamais eu de problème dans le passé, cela ne sera jamais le cas..., » répondis-je.

En entendant ça, Cody avait rougi jusqu’aux oreilles.

Je l’avais vue rougir comme ça seulement quand je lui avais demandé, pendant notre expédition, de prendre un bain ensemble.

« Le truc, c’est que tu as perdu un ami masculin, Queue, » déclara Mylarka.

« N-Non ? N’hésite pas à me traiter comme un homme, sinon... ce sera un problème..., » déclara Cody.

« J’imagine que vous pensiez à peu près à ça, hein ? Quoi qu’il en soit, ce soir, nous buvonssss ~ ! » s’écria Aileen.

« Excusez mon impolitesse. J’apprécie votre cordialité, Sire Majordome, mais l’alcool est un peu trop pour moi..., » déclara Yuma.

« Lady Yuma, bien que j’aie préparé votre boisson comme les autres, la vôtre est sans alcool, alors ne vous inquiétez pas, » déclarai-je.

« Comme c’est gentil de la part de mon maître... bien qu’il n’y ait pas d’alcool, vous avez inventé une façon de créer une saveur qui émule les boissons alcoolisées. J’aimerais périodiquement en savoir plus sur vos recettes..., » déclara Béatrice.

Béatrice était maintenant la propriétaire de ce manoir, mais si elle le voulait, je pourrais passer de temps en temps.

Pourtant, les quatre personnes assises à table la dévisageaient... son invitation était une façon subtile de demander le pouvoir magique afin de préserver sa forme physique, que je devais lui fournir périodiquement. Mais je ne l’aurais pas fait chaque fois que j’étais ici, et elle non plus n’espérait pas autant.

Je sentais que Yuma et Cody, dont le visage était encore rouge, mais qui conservait son sourire habituel, me regardaient différemment.

« Nous devrions nous occuper des flammes de la jalousie à partir de maintenant, n’est-ce pas ? Ce sera difficile pour tout le monde, » déclara Yuma.

« E-Eh bien, nous ne pouvons rien y faire. Queue n’est pas du tout conscient de lui-même, » déclara Cody.

« C’est sacrément vrai. C’est le genre qu’il faut appâter, sinon on ne peut pas le tirer à nous. Il y a de la pêche à faire avec lui, hein ? » déclara Aileen.

« Gh... Je ne suis qu’un majordome masqué..., » déclarai-je.

« Et je suis qu’une prêtresse masquée. Si je devais l’exprimer en quelques mots, je serais heureuse si vous pouviez vous occuper davantage de moi, » Yuma avait lâché une bombe vers moi... mais cela avait fait sourire tout le monde.

Elle avait toujours été comme ça, comme si elle ne faisait pas partie de ce monde, mais son affirmation avait prouvé le contraire.

« Queue, tu te souviens de notre promesse ? Tu ne t’en sortiras pas facilement si tu ne le fais pas. »

« Ah, donc ce travail a été bien fait ? La prochaine fois, pourquoi ne mangerait-on pas tous chez moi ? N’hésite pas à amener Verlaine Witcha. »

« Bon, puisque tu le reportes toujours... Je veux que tu t’entraînes un peu avec moi. »

Elles avaient toutes dit ce qu’elles voulaient, et même si je ne voulais boire qu’à mon bar, elles ne semblaient pas me laisser faire.

« Quoi qu’il en soit, Queue... ou plutôt, Sire Majordome Masqué, je vous prie de commencer notre toast, » déclara Mylarka.

« Que faites-vous toutes... ? Je veux dire, oui, j’en suis sûr. Mes chères invitées, levez vos verres... Santé ! »

« Santé ! »

Les membres de l’expédition, qui devinrent les sauveurs masqués, élevèrent la voix à l’unisson.

Rien n’avait changé depuis lors.

Je n’avais pas fixé d’heure pour arrêter notre fête, alors les filles avaient le temps de manger jusqu’à ce qu’elles soient rassasiées, de parler et de s’apprécier mutuellement pendant un certain temps.

Le lendemain, j’aurais repris ma vie normale, alors je voulais vraiment profiter de ces moments de paix.

« Sire Majordome, quel est ce verre ? »

« Pourriez-vous nous apprendre à les préparer ? J’ai toujours trouvé injuste que vous sachiez faire tant de choses. »

« Tu sais, il enseigne en faisant observer les autres, alors on ferait mieux d’être attentives. »

« Euh... Je suis intéressée de voir comment préparer ça. Montrez-moi ça, Monsieur le Majordome. »

« Eh bien, si je peux..., » commençai-je.

Béatrice avait pris le shaker et me l’avait passé. C’était un objet particulier que l’on ne trouvait pas dans les bars de la capitale, et aussi ce que j’avais utilisé pour préparer ces boissons. J’étais très intéressé par la façon dont d’autres pays préparaient les boissons, alors j’avais décidé d’en acheter un.

J’y avais mis les ingrédients et j’avais commencé à secouer, puis j’avais versé le mélange dans un verre, profitant des regards curieux de mes amies bien-aimées qui semblaient regarder un trésor inestimable.

***

Chapitre 34 : Invitez à boire un verre avec la tenancière en habits de femme de ménage

Les noms des dieux des étoiles remplissaient le calendrier du royaume d’Albein, et même ma guilde, la « Verseau d’Argent », avait été nommée d’après l’un d’entre eux, le dieu de la cruche à eau.

Le mois actuel de l’année, le cinquième, était appelé le « mois du Dieu Lion », mais il n’était pas clair selon quels critères les dieux des étoiles étaient liés à leurs mois spécifiques.

Le climat avait été doux du troisième au septième mois de l’année, et seul le huitième mois avait été anormalement chaud. C’était dû à l’activité non-stop du Seigneur du Feu, causant la migration des dragons de feu vers le royaume.

À cette époque de l’année, le soleil se lève vers 5 h 30.

C’était exactement le moment où j’avais ouvert les yeux et les rideaux pour être aveuglé par la lumière, alors je les avais tout de suite remises en places. J’avais dû réveiller Verlaine, qui n’était pas la définition d’une personne du matin, puis j’avais préparé le petit-déjeuner pour nous deux, et enfin, je devais préparer les choses pour l’équipe du matin.

Si je voulais boire en paix, un nombre minimum de personnes devait continuer à entrer dans le bar, alors je devais aussi penser à ce que je devais cuisiner pour la journée, et quels ingrédients et plats rares je pouvais utiliser pour piquer l’intérêt des clients. 

L’étape suivante consistait à décider d’un nouveau menu et à lui trouver un nom original. Il en était de même pour les boissons : des boissons de grande qualité étaient stockées dans le sous-sol du magasin, où la température et l’humidité idéales les conservaient parfaitement ainsi que les différents jus de fruits que j’utilisais.

Oh, je devais aussi confirmer la fraîcheur des fruits avant de les presser.

J’avais interagi avec mes partenaires d’affaires par moi-même pour réapprovisionner les ingrédients quotidiens et j’avais même vérifié le marché matinal de la capitale, où j’avais pu juger directement de la qualité des produits. Rendre les gens heureux ne venait pas sans effort, après tout, alors j’avais dû faire plus attention aux ingrédients.

Il en allait de même pour mon look. Quand j’étais dans mon bar en train de boire, je ne pouvais pas avoir l’air d’un mendiant ou d’un riche.

La meilleure option était de n’avoir que deux paires de vêtements et de passer d’un vêtement à l’autre pendant une semaine, puis d’alterner avec des vêtements plus récents lorsqu’ils commençaient à avoir l’air minables. Si des rumeurs à propos d’un client portant toujours les mêmes vêtements se répandaient, une personne normale se serait probablement demandé si l’endroit n’avait pas un problème d’hygiène. 

Pour la même raison, je prenais soin de mes cheveux périodiquement. Quand j’étais enfant, ma sœur aînée les coupait quand elle en avait envie, alors parfois ils devenaient très longs, mais maintenant je passais une fois par mois dans un magasin de confiance pour les laisser s’en occuper.

Ma barbe et ma moustache poussaient à peine, mais dire que j’avais laissé la barbière me raser en raison de l’agréable sensation des seins de la barbière qui me pressait la tête pendant qu’elle le faisait.

Je m’étais habitué à voir de gros seins, mais je n’avais jamais eu la chance de les toucher. Mais aucune malédiction ne m’avait tourmenté. Je me tenais simplement recueilli comme un cheval dont la carotte se trouvait devant ses yeux.

Après m’être lavé le visage, j’avais frappé à la porte de mon bureau pour que Verlaine me pardonne d’être entré même si elle dormait encore.

« Je vais entrer. »

J’avais ouvert la porte.

Nous gardions la paperasse dans le bureau, mais vu la place qu’il restait, Verlaine y avait apporté un lit pour y dormir. Elle réaménagea l’endroit à sa guise et apporta de nouveaux meubles, mais il y avait encore assez d’espace pour se déplacer librement.

Quand j’étais entré, elle avait expiré profondément en se retournant « dans son sommeil ». Si son choix du moment n’avait pas été si parfait, j’aurais pensé qu’elle dormait vraiment.

« Sais-tu combien de fois je t’ai déjà appelée ? Au moins, salue-moi correctement, » déclarai-je.

« ... Uff. Tu es si froid, Maître. N’est-il pas normal de mordre à l’hameçon dans cette situation ? » demanda-t-elle.

Honnêtement, ce n’était pas possible pour une personne de ne pas les regarder. 

Verlaine dormait dans une chemise, qui était déboutonnée jusqu’en dessous de sa poitrine, et elle était couchée sur le dos. C’était un spectacle empoisonné pour un homme.

Une seule erreur et j’aurais dû faire face à beaucoup de problèmes.

« J’avais l’intention de te faire prendre la responsabilité si le dernier bouton explosait..., » déclara Verlaine.

« Je me fiche de te voir t’étirer, mais tu vas attraper froid si tu dors comme ça, » répondis-je.

« Quand j’étais un Seigneur Démon et que je vivais dans le château, je dormais nue. Je t’ai déjà expliqué que je détestais l’impression de porter quelque chose en dormant, » répliqua Verlaine.

« Merci de te soucier de moi, mais porte au moins quelques sous-vêtements, » répliquai-je.

« Je les utilise... Bien que j’en plaisante, je ne suis pas une exhibitionniste, d’accord ? Ce serait mal..., » déclara Verlaine.

Puis, Verlaine s’était enfin levée du lit.

Le jour où elle s’était jointe à ma guilde, elle s’était intéressée aux chemises que j’utilisais comme vêtements de nuit, alors elle en avait parfois pris une dans ma chambre. En plus de cela, elle portait des pantalons courts qui laissaient beaucoup de ses longues et belles jambes bronzées à découvert.

« Porter un pyjama, c’est mieux pour toi... Au fait, pourquoi n’essaies-tu pas de porter un pyjama ou quelque chose comme ça ? » demandai-je.

« Merci, mais je ne veux pas porter de vêtements moulants même en dehors de mes heures de travail. Maintenant, j’ai l’habitude, mais ce n’est pas si simple que ça de porter et d’enlever mon uniforme de femme de chambre. J’ai demandé à des spécialistes de m’enseigner et j’ai fini par doubler leur salaire après avoir compris ce qu’ils devaient faire pendant toute la journée, » répondit Verlaine.

« Tu pourrais porter des vêtements que n’importe quel commerçant porterait. Ça ne me dérangerait pas. Il devrait y en avoir pour tous les goûts..., » répliquai-je.

« Maître, as-tu préparé des vêtements pour le barman... ? C’est curieux, ça. Je suppose que je devrais les essayer au moins une fois. De plus, si je continue à porter la même tenue, les gens s’habitueront à la voir, » déclara Verlaine.

Son attitude et son look avaient attiré beaucoup de clients. Certains clients masculins, en particulier, ne venaient que pour admirer son uniforme de bonne, mais je pouvais... 

Je pourrais probablement augmenter le nombre d’habitués si elle changeait de tenue... non, le flux de clients était déjà trop important, alors je devais faire attention à ce qu’elle faisait.

Elle s’était levée et était allée aux toilettes. Verlaine se lavait deux fois par jour, le soir et le matin, parce qu’elle aime être propre. Il n’y avait probablement pas beaucoup de gens dans la 12e rue qui faisaient quelque chose d’aussi luxueux.

Mais elle était encore un ancien Seigneur Démon, donc se livrer à un peu de luxe n’était pas si étrange pour elle.

◆◇◆

Trente minutes plus tard, quand Verlaine avait été prête, nous avions déjeuné ensemble et étions allés au sous-sol pour préparer les différentes choses pour le bar. Après avoir décidé du menu du jour, il était enfin temps d’ouvrir la boutique.

Le premier client était entré... ou peut-être que je n’aurais pas dû le compter comme tel, puisqu’il était membre de notre guilde. Il s’appelait Rigel, un type soigné avec les cheveux courts et de taille moyenne. Il avait réussi l’examen des aventuriers l’année dernière et avait décidé de rejoindre ma guilde. Un choix singulier, étant donné que normalement personne ne voudrait travailler dans un mauvais quartier tel que la 12e Rue.

Il était un aventurier de grade B ainsi qu’un membre du groupe de Lia et McKinley.

Même si son rang était inférieur au sien, puisqu’elle était A, j’avais décidé qu’elle devait l’écouter.

Ce que j’avais beaucoup apprécié, c’est l’expérience acquise depuis qu’elle s’était jointe à la guilde. Elle n’avait pas l’air très déçue de mon ordre, et s’était vite habituée à aider Rigel avec ses demandes. D’un autre côté, McKinley m’adorait, alors il aurait fait tout ce que je lui demandais, mais j’étais sûr qu’il savait que c’était pour eux, car cela les aidait à progresser et à devenir plus autonomes.

« Monsieur, vous avez l’air prêt à commencer la journée, » déclara Rigel.

« Bonjour. Tu as l’air en pleine forme. Tiens, prends quelque chose à boire, c’est moi qui régale, » répondis-je.

« Je vous remercie ! Franchement, j’avais tellement envie de boire de la bière ! » déclara Rigel.

Rigel avait une personnalité enjouée, mais était en fait assez sérieux et diligent. Sa compétence au sabre était également digne de mention, et j’avais estimé qu’en seulement cinq ans, il aurait pu devenir un aventurier de grade AA.

Atteindre le Rang S n’était pas quelque chose de réalisable avec le temps et l’expérience seulement, étant donné l’énorme quantité de compétences dont on avait besoin. Même un combattant talentueux comme Lia passerait devant cette barrière, et il serait extrêmement difficile de la surmonter.

« Au fait, on m’a demandé de vous donner ceci, mais..., » déclara Rigel.

Il avait posé un morceau de papier sur le comptoir et me l’avait passé.

Les mots « Pour notre bien-aimé Maître, de la part de vos fidèles membres de guilde » y étaient clairement visibles.

« ... Encore ? C’est quoi qui est amusant en buvant avec moi ? » demandai-je.

« Eh bien, tout le monde aimerait vous montrer un peu de gratitude. Mais en toute honnêteté, je ne devrais pas vous le dire en face comme ça, » déclara Rigel.

Ma guilde comptait une centaine de membres. Si je devais estimer combien ils étaient comparés aux autres, je dirais que notre guilde comptait moins de membres que toutes les autres de la capitale. le Bélier Blanc, la guilde la plus nombreuse, comptait un millier de membres, soit plus de trois cents membres au deuxième rang.

Je voulais que mes membres couvrent les frontières de la capitale, et maintenant que nous avions installé le système de Transfert Magique et établi la base principale, il y en avait cinquante personnes dispersées aux endroits que j’avais indiqués. Les cinquante autres se trouvaient dans la capitale et ne se présentaient dans le magasin que pour accepter les demandes de Verlaine ou pour se joindre à un groupe.

Les sièges au bar étaient au nombre de soixante-dix au total : huit au comptoir et soixante-deux aux tables. Ce qui voulait dire que je pourrais convoquer les cinquante membres de la capitale, mais... si je devais le faire, à quoi bon venir ici précisément pour rejoindre les groupes et accepter les demandes ?

« Monsieur, n’est-ce pas bon ? Cela fait un mois que vous ne les avez pas rejoints. Si vous voulez, je peux vous réserver la boutique dans quelques jours, » déclara-t-il. « Je sais que notre boutiquière comprendrait ~ ! Monsieur, comme nous avons de la chance d’avoir une beauté comme elle parmi nous ! »

« Je ne suis qu’un client, et c’est elle la commerçante. Mais oui, c’est une vraie beauté, » déclarai-je.

« Eheh... merci, messieurs. J’apprécie votre flatterie, » déclara Verlaine.

Verlaine, qui ressemblait maintenant à une elfe normale, avait apprécié nos paroles. Son humilité était évidente depuis qu’elle avait commencé à travailler ici, mais les nôtres n’étaient pas des paroles de flatterie, nous disions simplement la vérité.

« D’accord, je m’occupe de tout le monde. Apportes-en autant que tu le veux, » déclarai-je.

« Vraiment !? Ah, désolé d’avoir crié..., » déclara Rigel.

« Au fait, Monsieur Rigel. Pourriez-vous être intéressé par ce que j’ai entendu récemment d’un client ? » demanda Verlaine.

« Ah, bien sûr ! J’adorerais l’entendre ! » déclara Rigel.

Les demandes de Verlaine ressemblaient à des rumeurs. Elle n’était pas très occupée en ce moment, mais la commis de cuisine était déjà au travail et les gens avaient commencé à entrer dans le commerce.

Puisqu’elle ne pouvait pas laisser tout le monde entendre les demandes, elle les faisait apparaître comme une sorte de conversation quotidienne.

« Il s’agit de certains commerçants qui ont eu un accident. J’ai entendu dire que les animaux qu’ils transportaient se sont enfuis et se sont enfermés dans une grotte à proximité..., » déclara Verlaine.

Quelqu’un nous avait apporté cette demande la veille.

Il s’agissait d’un groupe de marchands qui faisaient le commerce d’animaux rares, qui étaient en fait des bêtes incontrôlables qu’il fallait capturer.

Des demandes de ce genre pouvaient faire en sorte qu’un plus grand nombre de guildes se fassent concurrence pour le même travail, mais il y avait un contrat stipulant que seul celui qui le remplissait gagnait la pleine récompense, tandis que les autres ne bénéficieraient que du paiement anticipé.

« Quoi... ? Je n’étais pas au courant. Pouvez-vous me donner plus de détails ? » demanda-t-il.

« Oui. Avez-vous du temps libre ? » déclara Verlaine.

« Oui, et je peux changer mes plans si nécessaire, » répondit l’autre.

Il s’agissait des mots-clés que les membres de ma guilde utilisaient pour accepter les demandes. Maintenant que la documentation de la demande avait été arrangée pour lui, il allait suivre certains de ses camarades et partir.

Il valait mieux que les demandes soient acceptées et complétées rapidement, et comme il avait terminé ma formation, nous avions décidé qu’une journée lui suffisait pour accomplir ce travail. Comprenant cela, il avait fini son verre et s’était levé.

« Merci beaucoup ! Monsieur, ce soir, j’amènerai quelques connaissances ! » déclara-t-il.

« D’accord. Viens quand tu veux, » déclarai-je.

Il voulait dire qu’il aurait amené les membres de la guilde à boire ensemble avant que le bar ne soit réservé.

Eh bien, je m’attendais à ce que le faire pour cinquante personnes prenne un certain temps, mais ce n’était pas un problème. 

Ça ne me dérangeait pas quand mes camarades venaient boire, je voulais juste qu’ils passent un bon moment ici.

« Quels sont vos projets pour ce soir, Maître ? » demanda-t-il.

« Je pense que probablement certains de mes amis viendront aussi, » répondis-je.

« Heheh... Je vois. Récemment, ils se montrent de plus en plus souvent, n’est-ce pas ? » déclara Verlaine.

Elle avait commenté avec un ton de voix suggestif. Bien qu’indépendante, Aileen était comme un membre de ma guilde, et Mylarka, Yuma et Cody avaient commencé à passer de temps en temps.

Yuma, qui ne pouvait rien boire d’alcoolisé, avait été impressionnée par les boissons que je lui avais préparées et avait fini par accepter tout ce que je lui apportais.

Maintenant que j’y pense, je devais aller au laboratoire de Mylarka. La dernière fois que je lui avais apporté quelque chose, c’était il y a quatre jours, mais j’avais finalement réussi à avoir du temps libre.

« ... Désolé, je sortirai à midi, » déclarai-je.

« Comme vous le souhaitez. Je ne bougerai pas d’ici, alors, prenez tout le temps qu’il vous faut, » déclara Verlaine.

« Désolé, c’est toujours comme ça, » déclarai-je.

« Une femme dévouée devrait être parfaitement à l’aise avec ce genre de choses. S’il vous plaît, ne vous en faites pas trop, » déclara Verlaine.

Elle avait fait une déclaration si audacieuse parce qu’il n’y avait pas beaucoup d’invités.

Quand j’avais apporté à ma bouche le troisième verre de bière qu’elle m’avait donné, elle m’avait regardé avec un sourire ensoleillé tout en frottant un autre verre propre.

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Illustrations

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5 commentaires :

  1. J ‘adoooore ce light novel j ‘attend avec impatience la suite, je veux savoir ce qu’il se passe !!!

  2. Grand merci pour se chapitre

  3. ouaip c’est chiant j’ai pas envie de l’aider moi cette timis 🙁

  4. Merci pour la traduction^^

  5. Je l’ai littéralement dévoré 0.0
    Un excellent choix de traduction, merci à l’équipe !

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