Wortenia Senki – Tome 8 – Chapitre 2 – Partie 4

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Chapitre 2 : Un cœur agité

Partie 4

Ce jour-là, Joshua Belares mena un raid sur l’armée d’O’ltormea qui entraîna de grandes pertes pour l’Empire. La vitesse de l’invasion d’O’ltormea s’était donc encore détériorée. Cela avait permis à Ryoma de gagner un temps précieux.

Un certain groupe se dirigeait vers le nord-ouest le long d’une route traversant une zone forestière près de la frontière nord de Xarooda. Ce n’était cependant pas une route commerciale très active. S’il n’y avait pas eu les principaux produits de cette région, aucun marchand n’aurait jamais traversé cette route. Surtout depuis que les mouvements d’Helnesgoula n’étaient plus clairs, les seuls à passer par ici étaient les paysans locaux.

Grâce à cela, ils pouvaient laisser leurs chevaux galoper aussi vite qu’ils le voulaient et ne rencontraient aucun incident. Après tout, le bruit des sabots se propageait loin, et n’importe qui pouvait remarquer l’approche du nuage de poussière afin de se déplacer sur les côtés de la route.

Le groupe était vêtu de vêtements minables et sales. Ils s’étaient probablement éloignés de la route, qui était protégée par une barrière repoussant les monstres, afin de réduire la durée de leur voyage. Les manteaux qu’ils portaient pour se protéger du froid étaient déchirés, comme par les griffes des monstres.

Une odeur nauséabonde se dégageait de leurs corps, preuve qu’ils ne s’étaient pas lavés depuis des jours. Ils avaient probablement dormi dehors au lieu de séjourner dans une auberge. S’ils n’avaient pas été à cheval et armés, ils auraient pu ressembler à des roturiers fuyant la guerre. Les 20 personnes qui composaient ce groupe étaient toutes clairement fatiguées par le voyage.

« Capitaine, c’est en vue ! », cria à pleins poumons un jeune chevalier qui chevauchait en tête après s’être retourné.

C’était une terre occupée par Helnesgoula, un pays qu’ils ne pouvaient pas encore considérer comme étant ami ou ennemi. Ainsi, l’avant-garde de la caravane faisait également office d’éclaireurs. La voix du chevalier était remplie de soulagement d’être enfin libéré de cette tâche.

Aux mots de ce chevalier de la Garde du Monarque, qui était connu pour être particulièrement vigilant, tous les regards s’étaient tournés vers la petite colline devant eux.

« La cité-citadelle du nord, Memphis… »

Orson Greed, qui chevauchait aux côtés de Ryoma, pointa le doigt vers l’avant.

Ryoma regarda dans cette direction. Il vit effectivement un petit point au loin qui s’était progressivement agrandi et précisé au fur et à mesure que son cheval avançait sur la route. Finalement, une ville couverte de plusieurs couches de murs apparut. Au sommet des remparts flottait le drapeau du Royaume d’Helnesgoula.

« Aah, enfin… Cela nous a pris quatre jours, mais nous sommes enfin arrivés… », dit Ryoma tout en fixant les murs tout en gardant l’allure de son cheval.

Les sœurs Malfist, qui chevauchaient parallèlement à Ryoma, l’entendirent murmurer. Ses mots étaient mêlés d’agacement et d’anxiété.

« Je pense que c’est plus rapide que ce qu’il nous faut habituellement… Nous avons dû chevaucher jour et nuit tout en gardant nos chevaux renforcés en utilisant la magie pour le faire. Le fait que nous ayons changé de chevaux dans les villes en cours de route a également accéléré les choses. Nous n’avions pas à perdre de temps à laisser nos chevaux se reposer. », dit Laura.

Sara acquiesça sans mot dire. La magie avait été appliquée aux selles et aux sabots des chevaux, ce qui avait permis au cavalier de partager son prana avec le cheval, lui accordant une vitesse accrue, récupérant peu à peu son endurance. Cela leur permettait de maintenir une vitesse supérieure à celle de la normale pendant une période plus longue.

Ils montaient leurs chevaux aussi vite que possible, et lorsqu’ils atteignaient une ville, Greed utilisait sa position de capitaine de la Garde du Monarque pour faire en sorte que la garnison de la ville échange leurs chevaux. Cela raccourcissait encore plus leur voyage. C’était probablement le moyen de transport le plus rapide dans ce monde.

Ce fut le résultat de leurs meilleurs efforts. Cette méthode nécessitait d’utiliser la magie à cheval et d’être capable d’échanger des chevaux. C’était des conditions très particulières, et à cet égard, ils eurent de la chance que les choses s’alignaient aussi bien.

Mais Ryoma était toujours mécontent.

« Je suppose que c’est comme ça que ça doit être… », murmura Ryoma avec agacement. Il avait gardé son regard fixé vers l’avant.

« Êtes-vous mécontent, Maître Ryoma ? », demanda Sara avec inquiétude.

Ryoma secoua silencieusement la tête et augmenta la vitesse de son cheval.

Eh bien oui, je le suis… Mais le leur dire ne servirait à rien…

Ryoma était habitué aux avions et aux automobiles, et à titre de comparaison monter à cheval manquait de confort et de vitesse. Il ne pouvait s’empêcher d’en être insatisfait, surtout dans des situations comme celle-ci, où chaque minute et chaque seconde comptaient.

Mais Ryoma comprenait que s’attendre à quelque chose qui ressemble à une voiture dans ce monde était demander l’impossible. Il y avait le scénario extrêmement improbable d’un invocateur appelant quelqu’un qui se trouvait dans une voiture et l’amenant avec lui. Mais d’un point de vue pratique, utiliser une voiture ici serait une absurdité totale.

Après tout, il n’y avait pas de mécaniciens pour l’entretenir, et si elle souffrait d’un quelconque dysfonctionnement, en particulier un pneu crevé, il n’y aurait pas de pièces de rechange pour la réparer. Et puis il y avait un problème encore plus fondamental : Ryoma ne se voyait pas obtenir un approvisionnement constant en essence.

L’idée s’était complètement effondrée dès qu’il s’était mis à y réfléchir. C’étaient des problèmes que l’on n’avait pas besoin de considérer quand on vivait dans le monde de Ryoma, mais dans ce monde, tout était différent.

De plus, même si toutes ces conditions étaient remplies, l’état des routes dans ce monde ne permettait pas à un véhicule de rouler correctement. Peut-être que ce serait possible près d’une ville, mais les routes étaient principalement constituées de terre. S’il pleuvait, le sol pouvait devenir boueux, ce qui pouvait bloquer la voiture. Et à moins qu’il ne s’agisse d’une jeep militaire, conduire une automobile dans ce monde serait difficile.

C’était un bon exemple de la façon dont une technologie extrêmement optimisée dans un certain domaine rendait plus difficile l’utilisation efficace d’un outil.

Cela dit, développer les sciences ici serait difficile… Pas impossible, mais il faudrait beaucoup de main-d’œuvre, de temps et d’argent pour y parvenir.

Ryoma avait étudié les sciences pendant les 10 années qu’il avait passées de l’école primaire au lycée. Il connaissait quelques formules chimiques, et il pouvait probablement produire des réactions chimiques en utilisant certains produits chimiques. Mais c’était uniquement dans le cadre de ses études, et il ne pouvait mélanger que des matériaux préparés.

Ce n’était pas différent de la cuisine. En faisant une carbonara, n’importe quel amateur pouvait faire quelque chose de décent avec les matériaux et une recette. Les Japonais étaient particulièrement friands de ce type de pâtes. Mais si l’on pouvait être familier avec les pâtes, peu de gens pouvaient les fabriquer à partir de farine. La plupart des gens auraient du mal à utiliser des ingrédients bruts pour faire quelque chose d’à peu près décent, au pire ils abandonneraient à mi-chemin.

La science était similaire à cela, sauf qu’elle était encore plus compliquée et dangereuse. Si l’on échouait à cuisiner un plat, on fronçait les sourcils et on jetait le résultat. Échouer en science pouvait mettre sa vie en danger.

Dans ce cas, utiliser la magie, qui est beaucoup plus développée dans ce monde, est un choix beaucoup plus réaliste, mais…

La magie était pratique et avait de nombreuses applications, mais elle n’était pas sans défaut. La magie de dotation, en particulier, était plutôt générique et limitée dans ce qu’elle pouvait faire. Pour commencer, il y avait peu de mages capables de marquer des objets avec des sceaux de malédiction. Il était donc logique que les objets enchantés par la magie de dotation se vendent si cher.

De plus, la plupart des rares personnes capables de placer des sceaux de malédiction gagnaient leur vie en créant des équipements d’asservissement destinés à lier les esclaves. Ils n’avaient que peu d’intérêt pour le développement de ce domaine, et de nouvelles façons d’appliquer la magie de dotation n’étaient tout simplement pas découvertes.

Ryoma avait choisi de ne plus y penser à ce moment-là. Les aspects technologiques de ce monde étaient un sujet qui méritait d’être débattu, mais pour l’instant, il devait s’attaquer au problème en cours.

Nous avons fait du mieux que nous pouvions jusqu’à présent… Mais cela suffira-t-il ? Arriverons-nous à temps ?

Y arriveront-ils à temps ou pas ? Tout dépendait de cela. C’était pourquoi Ryoma avait fait tout son possible pour traverser cette terre aussi vite que possible. Peu importe la puissance d’un cheval, il s’agissait toujours d’un être vivant. Il se fatiguait progressivement, et il y avait des limites à la vitesse à laquelle il pouvait aller. C’était pourquoi ils avaient changé de cheval en cours de route.

Pour maximiser leur vitesse, Ryoma et son groupe avaient fait attention aux vêtements qu’ils portaient pendant le voyage, afin de ne pas alourdir davantage leurs destriers. Les chevaliers Xarooda portaient souvent une armure complète, mais cette fois-ci, ils étaient vêtus du genre d’armure en cuir que les mercenaires utilisent généralement. S’il n’y avait pas eu le blason Xarooda, une épée tenue devant un bouclier, tissé dans leurs manteaux, on aurait eu du mal à les reconnaître comme des chevaliers.

Pour ce qui était de l’armement, chacun portait une seule épée, rengainée à la taille. Ils n’avaient pas de lances ou d’armes de rechange. En plus de cela, ils avaient chacun une gourde d’eau et un sac en cuir contenant du bœuf séché comme rations conservées, attachés à leurs selles. Dans ce monde, c’était la manière de voyager le plus légèrement possible. En fait, c’était presque de l’inconscience. Même s’ils se réapprovisionnaient dans les villes le long de la route, on ne pouvait pas savoir ce qui pouvait arriver dans ce monde, contrairement au monde de Ryoma. Il n’aurait jamais voyagé aussi léger dans des conditions ordinaires.

Mais bien que conscients des dangers encourus, ils s’étaient quand même lancés dans ce qui s’apparentait à un pari, car ils savaient que ces moments décisifs étaient leur dernière chance. Maintenant, alors que l’armée d’Helnesgoula commençait à augmenter ses effectifs…

L’armée d’O’ltormea est trop importante. Si nous les affrontons maintenant, les combats ne dureront que quelques jours, et ce même si nous avons l’avantage de la localisation…

Les espions que Joshua avait envoyés dans l’Empire avaient risqué leur vie pour lui transmettre la nouvelle de la prochaine offensive de grande envergure. Ryoma devait réussir dans les négociations à venir, ou leurs efforts n’auront servi à rien.

Avec Lione et Joshua Belares à la tête de la bataille au col de la montagne, nous devrions certainement être en mesure d’écraser la ligne de ravitaillement. Mais…

Ryoma pouvait imaginer le pire scénario, et il fit claquer sa langue malgré lui. Il pouvait imaginer un enfer de sang versé et des flammes brûlantes. Les soldats d’O’ltormea déferlaient sur le champ de bataille comme un raz-de-marée grâce à leur supériorité numérique, submergeant le Royaume de Xarooda et détruisant tout sur leur passage.

En parlant de se battre le dos au mur…

Ryoma était persuadé que son plan était le meilleur, et sûrement la meilleure option pour le Royaume de Xarooda en ce moment. Mais c’était toujours un véritable pari. C’était comme marcher sur une corde raide. Il faudrait donc que tout soit mis parfaitement en place et que toutes ses actions soient concluantes pour former un tout significatif.

Ryoma n’avait pas fait de pari aussi flagrant et imprudent depuis qu’il s’était échappé d’O’ltormea après avoir tué Gaius, sauf quand il avait fait la tête de pont sur la rivière Thèbes. Et même si ses chances semblaient minces à l’époque, elles étaient toujours plus favorables que celles d’aujourd’hui.

Mais il savait qu’il n’avait pas d’autre choix, il devait donc s’engager sur cette voie tout en sachant combien elle était dangereuse.

J’hésite ici… Mais faire ça après que les dés aient été jetés, ça ne me ressemble pas.

Deux visages étaient apparus dans l’esprit de Ryoma. Le premier était celui de sa confidente, Lione. Il avait une parfaite confiance en elle, et c’était pour cela qu’il avait laissé les choses entre ses mains. Il n’avait pas moins confiance en elle qu’en Laura et Sara, qui étaient toujours à ses côtés.

L’autre était quelqu’un qu’il ne connaissait que depuis peu de temps, Joshua. Mais Ryoma avait vu que Joshua avait une odeur similaire à la sienne. Et au vu de ce qu’il avait accompli jusqu’à présent, il ne faisait aucun doute qu’il était un commandant face à qui peu pouvaient rivaliser sur ce continent occidental. C’était pourquoi, bien qu’il lui avait donné l’un de ses atouts, Ryoma avait pu l’envoyer dans ce qui était une mission suicide sans douter de son retour.

Il faut espérer que la reine d’Helnesgoula soit à moitié aussi rusée et compétente que les rumeurs le laissent entendre…

Bien sûr, ils avaient une chance de gagner. Mais ce n’était qu’une possibilité, et non un fait absolu. Ryoma se mordit la lèvre en regardant la bannière d’Helnesgoulia qui flottait devant lui…

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