Wortenia Senki – Tome 8 – Chapitre 1 – Partie 5

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Chapitre 1 : Ceux qui vivent dans l’ombre

Partie 5

« Je suis venu ici par déférence pour Dame Helena, mais je ne peux plus supporter cela. C’est une perte de temps ! Je vais me retirer dans ma chambre. »

« Attends, Grahalt. Nous nous sommes réunis ici en secret, tard dans la nuit, pour cela. Il n’y a pas besoin de tirer des conclusions hâtives. », dit Julianus Ier, en plissant les yeux sur l’homme qui caressait sa barbe blanche.

Ryoma avait demandé que cette réunion soit faite en toute confidentialité, de grands efforts et préparations avaient donc été dépensés pour assurer le secret de cette réunion. Il n’était pas nécessaire de mettre fin aux discussions alors que les choses étaient encore indécises.

« Mais, Votre Majesté… Cet homme dit n’importe quoi. Et d’ailleurs, si nous faisons ce qu’il dit, Xarooda finira par devenir un vassal de Helnesgoula », dit Grahalt.

Mais les prochains mots qui sortirent des lèvres de Julianus Ier dépassèrent l’imagination de Grahalt.

« Et c’est très bien ainsi, Grahalt. »

Un silence pesant s’était installé dans la pièce. Même Helena avait les yeux écarquillés par la surprise.

« V-Votre Majesté ? »

« Pourquoi êtes-vous si surpris ? Si nous restons en retrait et regardons les choses se dérouler, nous deviendrons les vassaux d’O’ltormea ou alors nous sacrifierons notre peuple et mourrons d’une défaite honorable. Dans les deux cas, le résultat sera le même. Dans ce cas, ne vaut-il pas mieux devenir vassaux d’un parti qui nous offrira de meilleures conditions ? »

Se battre jusqu’au bout apporterait le chaos dans les territoires de Xarooda, ravageant les moyens de subsistance de leurs sujets. Mais la même chose serait vraie s’ils devenaient vassaux d’O’ltormea. En fin de compte, la plupart des guerres étaient une forme d’activité économique. Il était impossible de dire combien de temps O’ltormea était prêt à faire durer la guerre avec Xarooda, mais s’ils avaient l’intention d’envahir et de détruire un pays entier, les préparatifs leur coûtaient probablement beaucoup d’argent. Et plus leurs pertes étaient importantes, plus ils extorqueraient de l’argent à Xarooda après la guerre s’ils faisaient une offre de vassalité.

Le tribut qu’ils exigeraient augmenterait chaque année, et les taxes tarifaires deviendraient de plus en plus injustes au fil du temps, rongeant Xarooda jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien à consommer. En fin de compte, choisir de combattre O’ltormea en l’état actuel des choses revenait à choisir entre une mort rapide et une mort lente et agonisante. Quel que soit leur choix, ils mourront sûrement.

Mais ce n’était pas parce qu’O’ltormea était un pays particulièrement cruel ou mauvais. Eux aussi devaient récupérer quelque part les dépenses de guerre qu’ils avaient gaspillées, de peur d’être confrontés à une mort imminente.

« Devenir les vassaux d’Helnesgoula n’est pas quelque chose qui me dérange en soi. Cependant, Mikoshiba, cela n’aura aucun sens si cela revient à nous faire exploiter par O’ltormea. Ai-je tort ? Après tout, au vu des mouvements effectués par Helnesgoula, j’ai du mal à croire qu’ils agiraient comme nous le souhaitons. », dit Julianus I tout en regardant fixement Ryoma.

Ryoma hocha la tête sans mot dire. C’était une question compréhensible à poser.

« C’est pourquoi j’ai réuni ici des représentants de Myest, Rhoadseria et Xarooda. Bien que je doive faire une correction. Mon idée n’était pas la vassalité à Helnesgoula, mais de créer une alliance de quatre pays avec Helnesgoula au sommet… Bien que je suppose que votre choix de considérer cela comme de la vassalité pourrait ne pas être loin de la vérité. »

À l’explication de Ryoma, Grahalt lui coupa une fois de plus la parole. Cet homme n’aimait vraiment pas le plan de Ryoma.

« Et c’est la partie que je trouve la plus détestable ! Pourquoi devons-nous impliquer un autre pays dans nos affaires ? Nous avons envoyé régulièrement des messagers à Helnesgoula depuis la bataille de Notis, mais ils ont tourné autour du pot et n’ont rien fait pendant près d’un an ! Je ne peux pas imaginer qu’ils coopèrent avec votre plan. »

Bien que ses mots provenaient principalement d’une aversion pour l’idée de Ryoma, il n’avait en aucun cas tort. Mais cela ne voulait pas dire qu’il avait entièrement raison.

Mon Dieu, pourquoi ne me laisse-t-il pas finir… ? C’est comme parler à Mikhail. Est-ce qu’être têtu comme une mule fait bien partie de la description du poste d’un chevalier ? Ryoma poussa alors un soupir intérieur.

Les doutes de Grahalt n’étaient pas sans fondement, mais Ryoma avait construit son plan en tenant compte de ce problème. Il n’avait pas l’intention de se vanter, mais il n’y avait absolument aucune chance que lui ou ses camarades ne pensent pas à un défaut que Grahalt pourrait pointer à l’avance. Il serait compréhensible que Grahalt laisse simplement Ryoma finir, mais chaque fois qu’il essayait d’expliquer quoi que ce soit, le chevalier ne cessait de lui couper la parole. Cela mettait Ryoma à bout de nerfs.

Il pouvait comprendre son impatience après que toutes leurs tentatives pour défendre Xarooda se soient avérées vaines, mais la patience de Ryoma atteignait ses limites.

C’est parce que vous êtes si mauvais dans votre travail que j’ai dû être envoyé ici en premier lieu. Vous n’avez perdu à Notis que parce que vous avez été assez stupides pour foncer tête baissée dans le plan de l’ennemi, bande de trous du cul ! Si vous détestez mon plan à ce point, alors essayez de vous faire pousser un cerveau suffisant pour effacer vos propres conneries !

Mais bien sûr, en tant que général de la Rhoadseria, il ne pouvait pas se permettre de faire une sortie aussi puérile. Aussi amer qu’il soit, il devait gérer cela comme un adulte. Et puis, Ryoma avait ses propres raisons de maintenir l’existence de Xarooda, qui étaient distinctes des intérêts de Rhoadseria.

Si l’est devait perdre le bouclier qu’était Xarooda, O’ltormea se précipiterait sur l’est, conquérant ses pays un par un. Myest pourrait probablement tenir le coup pendant un certain temps, car elle avait une économie puissante qui lui permettrait de maintenir une force de chevaliers, mais la puissance nationale de Rhoadseria était encore diminuée par la guerre civile de l’année dernière. Ou plutôt… Vu que les politiques de Lupis ne fonctionnaient pas, elle était peut-être encore plus faible que l’année dernière.

Si O’ltormea devait envoyer une armée d’invasion dans ces conditions, Rhoadseria ne serait pas en mesure de les repousser. Ryoma utilisa toutes ses connaissances pour chercher un moyen d’éviter ce scénario sans espoir. Il avait besoin que Xarooda reste où elle était, au moins jusqu’à ce qu’il soit prêt à se séparer de Rhoadseria.

Et malgré cela, ce crétin continue de se mettre en travers de mon chemin…

Ryoma ne pouvait pas se permettre de crier et de sortir en trombe de la pièce, cela aurait agité Julianus I. Ainsi, malgré le fait qu’il ne pouvait pas le montrer publiquement, le cœur de Ryoma était rempli des flammes sombres de la colère, qui rongeaient son raisonnement, petit à petit…

Peut-être que je devrais juste le liquider et en finir avec ça… Cette pensée lui avait traversé l’esprit.

S’il envoyait les principaux ninjas du clan Igasaki, ils pourraient très bien assassiner un capitaine de chevalerie. Ryoma et Grahalt se regardaient fixement, les yeux rivés dans un regard féroce. Chacun d’entre eux savait qu’en détournant le regard maintenant, il abandonnerait l’initiative à l’autre. Un froid s’installa dans la pièce.

« Ne tirez-vous pas des conclusions hâtives, Seigneur Grahalt ? »

La voix brillante et trop inopportunément joyeuse d’une femme trancha la tension.

« Le seigneur Mikoshiba n’a pas encore terminé son explication. Et comme l’a dit le roi Julianus, nous avons pris la peine d’organiser cette réunion secrète. Nous pourrons décider si ce plan est bon ou non après avoir écouté tout ce qu’il a à dire, d’accord ? »

En entendant ces mots, Ryoma sentit les flammes de la colère s’éteindre.

Merde, mes pensées deviennent trop impulsives… Cette situation me met aussi au pied du mur…

Éliminer les nuisances par la force n’était pas un choix erroné en soi, mais cela ne s’appliquait pas à toutes les situations. S’il avait planifié l’assassinat méticuleusement, cela aurait pu être une idée viable, mais il ne pouvait pas se permettre d’agir de manière imprudente et de se créer de nouveaux ennemis dans le processus.

Et vu la gravité de leur situation, il ne pouvait pas se permettre de perdre des alliés, aussi stupides qu’ils aient pu être. Abattre cet homme ne pouvait être qu’un dernier recours.

« Dame Marinelle… Pensez-vous vraiment qu’il y ait un intérêt à écouter le plan de cet homme ? »

L’expression de Grahalt se contorsionna au son de ces mots surprenants sortant des lèvres de la femme qu’il n’aurait jamais jamais pu les prononcer selon lui.

Si un général d’une expédition envoyée par un pays voisin était prêt à écouter, même Grahalt ne pouvait pas se permettre d’insister. Ecclesia avait quand-même bien plus de réalisations et de mérites à son actif.

« Mais bien sûr. C’est une idée fascinante… », dit Ecclesia tout en tournant son regard vers Ryoma.

« Seigneur Mikoshiba, c’est ça… ? J’ai entendu parler de vous. Vous vous êtes fait un nom lorsque vous avez aidé la reine Lupis à réprimer sa guerre civile. N’est-ce pas, Dame Helena ? »

« Oui, c’est le meilleur tacticien et stratège que je connaisse… »

Helena hocha profondément la tête.

« J’en ai déjà parlé à Grahalt, mais il semble que mes paroles soient tombées dans l’oreille d’un sourd. »

Helena secoua la tête avec regret. Elle réalisait que c’était un moment critique pour eux, et si on lui demandait s’il y avait un autre moyen de sortir de cette situation en dehors de l’idée de Ryoma, sa réponse honnête était qu’elle ne voyait aucune méthode viable.

« M-Mais son idée, elle est tellement absurde que ça ne vaut même pas la peine de… »

« Ça suffit, Grahalt. Tu vas te taire et écouter le seigneur Mikoshiba jusqu’au bout. », lui dit Julianus Ier.

Le doute envahit l’expression de Grahalt. Il avait compris que personne ici n’était de son côté.

« Je m’excuse pour cette interruption. Grahalt comprend maintenant sa position ici. Je vous en prie, continuez. », poursuivit Julianus Ier.

« Bien sûr, Votre Majesté. »

Ryoma hocha profondément la tête et commença à expliquer sa tactique.

Son explication incluait sa prédiction de ce que la reine du royaume d’Helnesgoula, Grindiana Helnecharles, prévoyait.

*****

La réunion terminée, Helena et Ecclesia étaient restées dans la pièce. Les deux s’assirent sur deux canapés opposés placés près de la fenêtre.

« Je m’excuse de vous avoir demandé de rester, Dame Helena », dit Ecclesia en remplissant le verre de vin devant elle.

Il s’agissait d’une bouteille de vin rouge coûteuse, importée du continent central. Un arôme distinct et exotique emplissait l’air, indiquant clairement qu’il était fait à partir des meilleurs raisins du continent central. Même à Myest, qui avait un accès facile aux routes commerciales de la mer, il était difficile de trouver une telle bouteille.

« Oh, ne vous inquiétez pas. Je suis simplement heureuse d’avoir la chance de parler à la célèbre et héroïque Dame Ecclesia. Et j’ai même la chance d’avoir ce merveilleux vin. », dit Helena tout en portant le verre de vin à son nez.

Après avoir pris une longue inspiration pour savourer l’arôme, Helena prit une gorgée.

« On ne l’appelle pas le sang de Shadora pour rien. Une saveur si épaisse… »

Helena hocha la tête de satisfaction, savourant le sublime équilibre d’aigreur et de douceur qui se répandait dans sa bouche.

Mais cela dit, Helena reposa le verre de vin sur la table peu après avoir pris cette gorgée. Cela ne voulait pas dire que le vin n’était pas à son goût, mais simplement qu’elle n’était pas là pour faire la fête. Ecclesia avait bien compris l’intention d’Helena et entrouvrit les lèvres.

« Dame Helena. Celui-là est… très vif. »

« Oui. Pour autant que je sache, c’est aussi un guerrier de premier ordre… »

« Et un maître tacticien. »

Helena acquiesça. Les capacités de Ryoma en tant que guerrier étaient évidentes au vu de son physique, mais sa véritable valeur résidait dans son intellect. Il était capable de stratagèmes vraiment ingénieux, et avait même une façon de lire dans le cœur des autres.

« Mais sa proposition n’était pas… quelque chose que je peux honnêtement qualifier de sage », murmura Ecclesia, sa voix teintée de confusion et de peur.

C’était quelque chose qu’Helena avait ressenti une fois auparavant. Mais depuis qu’Ecclesia était plus proche d’être en opposition avec lui, sa peur était encore plus forte. Helena savait, cependant, que se soumettre à cette peur ne ferait que les laisser sur le chemin de la ruine.

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