Wortenia Senki – Tome 8 – Chapitre 1 – Partie 2

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Chapitre 1 : Ceux qui vivent dans l’ombre

Partie 2

Mais même ainsi, Ryoma avait quelque chose à leur dire maintenant, peu importe comment.

« Oui, la mission est importante… Et je suis heureux de voir que vous êtes prêts à risquer votre vie pour me servir. Mais la seule chose que vous ne devez pas faire, quoiqu’il arrive, c’est mourir. Survivre à tout prix… Comme ça, on pourra à nouveau partager un repas. »

Pour un soldat comme Kevin, cet ordre était une contradiction. Ils ne pouvaient pas espérer réussir une mission qui leur demandait d’être prêts à mourir et recevoir l’ordre de survivre à tout prix en même temps. S’il ne voulait pas qu’ils meurent à ce point, Ryoma ne leur aurait pas ordonné de participer à des missions aussi dangereuses.

Mais la réalité de ce monde ne s’y prêtait pas. Tant que Ryoma poursuivrait ses aspirations, le sang de ses ennemis et de ses alliés souillerait ses mains. Mais malgré cela, Ryoma ne pouvait s’empêcher de dire ces mots à Kevin.

Quoi qu’il arrive, je ne veux pas vous voir mourir…

« Mon Seigneur… »

Les épaules des enfants tremblèrent légèrement.

Ils avaient réalisé qu’il les chérissait. Et pour des enfants comme Kevin, qui avaient été vendus pour réduire le nombre de bouches à nourrir dans leur foyer, c’était le genre d’affection que même leurs parents ne leur accordaient jamais.

« Nous graverons votre ordre dans nos cœurs, mon Seigneur. »

Les cinq s’étaient inclinés en même temps.

Pour cet homme, je ferai n’importe quoi…

Kevin s’était juré de répondre aux attentes de Ryoma.

« Très bien… Mais quand même, vous avez bien travaillé. Je ne peux que vous récompenser comme ça pour l’instant, mais j’espère que vous apprécierez », dit Ryoma en tendant un sac en cuir à Kevin.

Ryoma regarda les cinq accepter le sac et quitter la pièce, après quoi ses pensées vagabondèrent vers Julianus I et son expression.

Choisir le groupe de Kevin pour ce travail était la bonne décision. J’aurais préféré un match nul sans combat, mais… Ils l’ont compris. Et ce vieil homme aussi…

Ils ne pouvaient pas se permettre de perdre cette bataille, mais le fait de gagner ne leur aurait pas non plus donné le meilleur résultat possible. Ils auraient pu gagner si leur objectif était juste d’apporter plus de gloire au nom de Ryoma. Mais le meilleur scénario possible était que le match s’arrête avant d’être décidé, et que la puissance de Ryoma soit montrée aux spectateurs en même temps.

Ryoma voulait trouver le bon moment pour suggérer cela, mais Julianus I avait pris cette décision avant lui. Ce fut une heureuse coïncidence pour lui. Après tout, les chevaliers insistaient sur l’honneur et la réputation plus que tout. Il ne pouvait donc pas se permettre de voir que ses soldats et lui-même soient considérés comme des mauviettes, mais ruiner l’honneur des chevaliers rendrait ses futures relations avec Xarooda incertaines.

À cet égard, le résultat de ce match était parfait. Julianus Ier était connu comme « le roi médiocre », et Ryoma n’attendait donc pas grand-chose de cet homme. Mais son impression du roi avait changé peu à peu en suivant leur audience. Il pouvait dire avec justesse où allaient les vagues de la bataille, et choisissait la méthode qui blessait le moins la dignité de son pays.

« Jusqu’à présent, tout se passe donc comme prévu, non ? » demanda Sara à Ryoma, qui s’était enfoncé dans son siège.

« Oui, d’une manière ou d’une autre… Avec ça, ils ne devraient pas ignorer nos propositions au conseil de guerre demain », dit Ryoma en soupirant et en prenant une gorgée de son verre de vin rouge.

Peu importe la qualité de leur plan, ils devaient avoir le pouvoir nécessaire afin de le faire appliquer. À cet égard, cette Terre était similaire au monde de Ryoma.

« D’un autre côté, le fait que le roi soit plus affûté que nous ne le pensions est un coup de chance », dit Lione.

« J’ai ressenti la même chose. Maître Ryoma, Julianus I à arrêté le combat à ce moment parce que… ? » demanda Laura tout en hochant la tête.

« Il a réalisé que perdre là-bas le mettrait dans une mauvaise posture. Ça se voit qu’il n’a pas ordonné au juge d’arrêter le match, il est allé directement voir Grahalt. Il a probablement pensé que je n’insisterais également pas pour gagner le match. »

Le groupe de Kevin était manifestement en train de gagner. Faire en sorte que le roi utilise son autorité pour arrêter le match à mi-parcours était une décision risquée, même dans ce monde où l’autorité du roi avait autant de poids qu’elle en avait. Si Ryoma n’avait pas accepté le match nul, l’autorité de Julianus Ier en aurait été grandement affectée. Et cela aurait été un coup dur pour le royaume de Xarooda dans son ensemble, surtout avec la guerre en cours avec O’ltormea.

Le fait qu’il ait choisi d’arrêter le match là signifiait qu’il avait vu les véritables intentions de Ryoma.

« Et il en a aussi profité pour enfumer un parasite qui rongeait son pays. Cet homme est plus rusé que je ne le pensais », ajouta Lione, ce qui fit claquer la langue de Ryoma.

« Oui, c’est un vrai renard rusé, celui-là. Il n’a pas seulement vu mes intentions, il les a utilisées en sa faveur. », dit Ryoma en acquiesçant.

Il n’était cependant pas aussi mécontent que ses mots aient pu le laisser entendre. Bien au contraire, Ryoma trouvait que Julianus I était un allié fiable. Après tout, rien n’était plus dangereux qu’un allié incompétent.

Sara versa du vin dans le verre vide de Ryoma.

« Le comte Schwartzheim et le noble qui faisait office de juge… Je crois qu’il s’appelait… »

Ryoma s’était laissé aller.

« Baron Slater », dit Sara.

« Oui, oui, c’était son nom. », dit Ryoma en hochant la tête.

Il n’avait pas prêté beaucoup d’attention au vieux noble, mais quand Julianus I avait arrêté le match, le baron Slater s’était enflammé et avait argumenté contre le roi. Ryoma s’était alors demandé s’il n’avait pas d’arrière-pensées.

« Mon instinct me dit que le comte Schwartzheim a juste été poussé par quelqu’un à faire ça… Mais quoi qu’il en soit, nous devrions examiner les personnes qui les entourent. D’accord, Sakuya ? »

Sakuya acquiesça résolument : « Compris, Seigneur. Je m’acquitterai de mes fonctions assez bien pour faire honneur à mon grand-père. »

Le grand-père de Sakuya, Genou, avait été assigné comme superviseur des défenses de Sirius. En tant que tels, lui et Boltz avaient été laissés derrière pour garder la ville. Les autres membres du Conseil des Anciens étaient tous occupés par leurs propres travaux, c’était donc Sakuya, la chef des jeunes membres du clan Igasaki qui devait rejoindre le Conseil des Anciens dans le futur, qui avait été chargé de l’expédition.

« Tu n’as pas besoin de t’énerver pour ça. Travaille juste comme tu le fais toujours. »

« Merci, Seigneur… »

Sakuya inclina la tête, mais son expression semblait tout aussi nerveuse.

Ryoma échangea un regard avec Lione, et les deux la regardèrent avec un sourire en coin.

Je suppose que lui dire de ne pas être nerveuse était trop lui en demander… Mais bon, ses compétences sont bonnes, elle a juste besoin de confiance…

Genou approuvait les compétences de Sakuya, et tout le monde autour d’elle l’évaluait favorablement. Son seul défaut était son manque d’expérience, et le seul moyen d’en acquérir était de travailler. Et notamment, elle avait besoin d’expérience pour diriger d’autres ninjas en tant que supérieur. Cela faisait partie de la manière dont le clan Igasaki s’assurait de la maturité de la prochaine génération.

Et en effet, malgré la sévérité de Genou à l’égard de Sakuya en tant que ninja, voir sa petite-fille mûrir et s’épanouir en tant que ninja à part entière le rendait nerveux. Le fait qu’il avait sélectionné trente des ninjas les plus doués du clan et qu’il les avait fait se glisser dans l’unité de transport donnait un aperçu du sérieux qu’il accordait à cette affaire. Ils étaient tous capables d’assassiner un général commandant si nécessaire, ou d’être envoyés pour commettre des activités subversives au sein de la base ennemie.

« La bonne nouvelle, c’est que la situation est bien meilleure que ce que nous pensions au départ. Ton plan peut encore porter ses fruits, mon garçon. »

Lione tourna son regard vers Ryoma.

« Oui, je n’étais pas sûr non plus que ce plan aboutisse à quelque chose, mais nous avons eu notre chance. Et le fait que cela n’ait pas été gâché après avoir obtenu la permission de Lupis à l’avance est une bonne chose », dit Ryoma avec un sourire.

« Donc le reste dépend du conseil de guerre de demain… », dit Sara.

Ryoma avait alors simplement pris une autre gorgée de vin en réponse.

Il regarda ensuite dans le verre, le faisant tourner dans sa main tout en appréciant la façon mystifiante dont la lumière de la lampe se reflétait sur la surface rouge du liquide.

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Et alors que Lione et les autres discutaient de leur future politique dans la chambre de Ryoma, un groupe d’hommes était assis devant une table ronde dans un domaine situé ailleurs dans la ville de Peripheria. Leurs expressions étaient toutes perplexes.

« C’est une tournure d’événements assez inattendue… », dit l’un des hommes, ce à quoi tous les autres acquiescent.

« Oui, je pense qu’aucun d’entre nous ne pensait que cela arriverait. »

« On dirait que l’avidité est insouciante. Penser que ses subordonnés perdraient contre de simples enfants… »

Huit hommes étaient assis autour de la table. Leurs vêtements — et en fait, les expressions hautaines et confiantes sur leurs visages — indiquaient clairement qu’ils étaient tous des nobles de haut rang. Ils avaient le visage de ceux qui avaient confiance dans la valeur absolue de leur lignée et dans le fait que les autres n’existaient que pour les servir.

« Que comptez-vous faire, monsieur… ? Nous avons organisé ce match de manière à enfoncer un pieu entre Rhoadseria et Xarooda. Il ne sera pas satisfait de voir tout ceci se terminer d’une manière aussi insatisfaisante. »

« Tout à fait vrai. Avec ça, quel était l’intérêt d’intimider cet imbécile têtu, hein ? »

Les autres hommes gloussèrent à ce commentaire. C’était un rire malicieux, du genre de celui avec lequel on se moquait d’un bouffon pitoyable. Et en effet, pour eux, les actions patriotiques du comte Schwartzheim n’étaient rien de plus qu’une comédie mal jouée.

« Comte Schwartzheim… Ridicule. J’ai dû retenir mon rire quand il fit son numéro dans la salle d’audience. »

« Il est tombé dans notre piège trop facilement. Qui avait vraiment l’intention de combattre ? Il semble que cet homme soit incapable de discerner l’ami de l’ennemi. »

« C’est exact. J’ai entendu dire que le premier chef de la maison Schwartzheim avait accompli de grands exploits militaires lors de la fondation du pays, mais il semblerait que leur chef actuel est un imbécile qui n’a aucun esprit pour la diplomatie ou le jeu. »

« Cet imbécile têtu ne sait pas où est sa place. Quand j’imagine la tête qu’il fera en réalisant que ses actions n’ont fait que nuire à son royaume bien-aimé, je ne peux m’empêcher de rire. »

En repensant à la façon dont le comte Schwartzheim avait admonesté le roi au péril de sa vie et par loyauté envers son pays, les hommes éclatèrent de nouveau de rire. Ils trouvèrent le comte Schwartzheim et son bavardage constant sur la fierté de la noblesse et la loyauté envers Xarooda tout à fait irritant.

Cela dit, toutes les personnes présentes étaient en bonne relation avec le comte Schwartzheim, du moins en apparence. Ou plutôt, elles entretenaient avec lui cette façade de camaraderie en public.

Et, après qu’ils eurent fini de rire, l’homme qui était assis au fond de la salle chuchota.

« Tout le problème réside dans ce chiot. Il est dangereux… Je peux comprendre pourquoi le Seigneur Saitou et la Princesse Shardina se méfient de lui. »

À ces mots, tous les autres échangèrent des regards d’incrédulité.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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