Wortenia Senki – Tome 7 – Chapitre 2 – Partie 1

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Chapitre 2 : Le messager du territoire voisin

Partie 1

Le château qui surplombait la capitale de Pireas était rempli d’un air lourd et anxiogène. Les bureaucrates de haut rang se précipitaient à leur poste, le visage pâle, et les responsables militaires étaient tous réunis de force dans une salle de conférence, qu’ils soient commandants ou non. Même les chevaliers avaient été appelés à la caserne sans se soucier de savoir s’ils étaient en service ou non et avaient reçu l’ordre de s’assurer que leur équipement était révisé et prêt au combat.

Tout le monde se déplaçait dans le palais à la hâte. La plupart d’entre eux faisaient simplement ce qu’on leur disait, et seuls quelques-uns avaient une idée de la situation. Non… Même eux ne comprenaient pas vraiment ce qui se passait. Alors qu’ils passaient tous devant une certaine série de portes du palais, ils s’étaient éloignés rapidement tout en jetant un regard inquiet à l’entrée de cette pièce. Ces portes en fer hermétiquement fermées…

« Oui… Je comprends ce que dit la lettre, mais… Je ne pense pas que nous puissions nous permettre de faire ça… », dit la reine Lupis avec un profond soupir.

L’explication de Meltina n’avait fait qu’assombrir davantage son humeur. Les visages de toutes les personnes présentes dans cette pièce étaient empreints de chagrin et d’inquiétude. C’était le cas de la reine Lupis et de ses aides, Mikhail et Meltina. La représentante et responsable de l’armée était Helena. Le comte Bergstone était à la tête de plusieurs autres nobles influents qui représentaient les fonctionnaires civils.

« Mais Votre Majesté, ignorer cette demande maintenant signifierait… », intervint Meltina.

« Je le sais… Mais notre pays a-t-il actuellement le pouvoir de faire cela ? », demanda Lupis avec une voix chargée de résignation.

La reine Lupis n’avait pas l’intention d’ignorer cette question. Bien au contraire, sa conclusion était que ce n’était pas une situation qu’ils devaient ignorer. Mais si elle avait le défaut de laisser ses émotions prendre le dessus, elle n’était en aucun cas une idiote. En tant que membre de la famille royale, elle avait reçu la meilleure éducation possible dans ce monde. Tant qu’elle gardait son sang-froid, elle était une souveraine capable de voir la réalité des choses. Et elle voyait bien que le problème que détaillait cette lettre entraînait le Royaume de Rhoadseria dans une situation dont il ne pouvait se sortir.

« Non, c’est impossible… Surtout maintenant, alors que nous devons rester prudents et surveiller les mouvements de la faction des nobles… Cependant… », dit Meltina en hésitant.

« Mais nous ne pouvons pas non plus nous permettre d’ignorer cet appel. Si cette lettre était arrivée peu après que nous ayons réprimé le soulèvement, les choses auraient été différentes, mais la guerre civile dure depuis près d’un an. Il faudra encore du temps pour que notre puissance nationale se rétablisse, bien sûr, mais nous ne pouvons plus utiliser cela comme justification… Et d’ailleurs, cette fois-ci… », poursuivit le comte Bergstone

Le regard du comte Bergstone se posa sur deux lettres posées sur la table. Ayant basculé du côté de la faction de la princesse pendant la guerre civile, le comte Salzberg avait été choisi comme l’un des assistants de la reine Lupis pour ses prouesses politiques supérieures. Il était parfaitement conscient de l’équilibre du pouvoir politique dans le royaume, et était assez sage pour surveiller les autres pays voisins.

S’il avait gagné la confiance de la Reine Lupis, il aurait sûrement été nommé Premier Ministre. Et il pouvait dire que le dilemme que les autres royaumes leur imposaient maintenant était une invitation à entrer dans un labyrinthe sans issue.

Il est probable que, peu importe ce que nous choisissons de faire, les perspectives de ce pays soient sombres… pensa-t-il.

Deux lettres étaient posées devant la Reine Lupis. L’une était une lettre qu’ils recevaient assez régulièrement depuis que l’Empire d’O’ltormea avait lancé son invasion du Royaume de Xarooda. C’était une demande de renforts par le Roi Julianus I, souverain de Xarooda.

Le Royaume de Xarooda avait perdu contre O’ltormea lors de la bataille des plaines de Notis, qui avaient repoussé leur ligne défensive à l’intérieur de leurs territoires. Pour sortir de cette impasse, ils avaient naturellement demandé des renforts à leurs compatriotes de l’est, Myest et Rhoadseria.

O’ltormea régnait sur les régions centrales du continent occidental, possédant un vaste territoire et une population importante. Xarooda seul n’était pas capable de retenir sa puissance militaire. Mais les trois pays constituaient la partie orientale du continent occidental : Rhoadseria, Myest et Xarooda. S’ils s’alliaient, ils auraient été capables de s’opposer à O’ltormea.

Et en effet, lors des guerres passées, une alliance entre les trois avait permis de contenir les ambitions d’O’ltormea. Mais cette alliance n’avait pas été formée par camaraderie ou amitié entre les pays. Les trois pays étaient simplement dans un état de dépendance mutuelle.

Sans Xarooda pour servir de brise-lames, les vagues de la guerre s’abattraient sur Rhoadseria. Et si Rhoadseria tombait, les vagues de la guerre s’abattraient ensuite sur Myest… Et donc, au nom de leur propre intérêt et bien-être, les deux pays avaient dû envoyer des renforts à Xarooda.

Mais au cours de l’année passée, la reine Lupis avait refusé les demandes de renforts de Julianus Ier, car elle avait besoin de stabiliser la puissance nationale et le climat politique de Rhoadseria. Et le fait douloureux était que, même sans tenir compte de cela, Rhoadseria manquait tout simplement de troupes à envoyer.

Le général Albrecht avait tenu le commandement de l’armée pendant des années, et le supprimer signifiait que les ordres des chevaliers devaient être réorganisés. La puissance militaire de Rhoadseria avait donc fortement diminué. Avec l’élimination des chevaliers des familles établies, de nombreux soldats qui avaient été écartés et empêchés d’être promus s’étaient battus pour obtenir les postes vacants. De nombreux chevaliers s’étaient même battus en duel pour les obtenir.

Helena avait travaillé dur pour atténuer cette situation, mais les flammes de l’ambition étaient difficiles à éteindre. Et avec des gens qui les attisaient constamment, il était logique qu’elle ait eu du mal à les éteindre.

Avec tout cela à l’esprit, envoyer leurs troupes à l’étranger avec la faction des nobles qui commençait à s’agiter était effectivement un suicide.

Nous aurions vraiment dû rejeter l’offre de fidélité du comte Gelhart… et l’éliminer à l’époque… Avoir son rang à la cour abaissé ne le dérange pas. Après tout, il a accepté ces termes trop facilement.

Même avec son rang abaissé de comte à vicomte, Gelhart avait une grande influence sur la noblesse. Pire encore, depuis que la princesse Radine avait été officiellement reconnue comme un membre de la famille royale, les nobles mécontents de la reine Lupis commençaient à s’unifier sous sa bannière.

Afin de construire une structure de pouvoir dont elle serait le centre, la reine Lupis avait chassé de nombreux nobles du palais après la fin de la guerre civile. Il était donc naturel qu’ils se tournent vers Gelhart et la princesse Radine. Du point de vue de Lupis, il était logique d’éliminer ceux qui avaient soutenu Gelhart dans le passé. Mais ceux qui avaient été chassés n’allaient pas simplement accepter d’être traités de cette façon.

Tuer Gelhart n’aurait pas dissipé le mécontentement des nobles, mais il aurait été beaucoup plus difficile pour eux de s’unir contre la reine Lupis. Gelhart avait du pouvoir, et la princesse Radine pouvait servir de cause juste. Et maintenant, ils se tenaient comme un obstacle à la Reine Lupis.

Nous aurions dû arrêter cette négociation, même si cela signifiait laisser Mikhail Vanash mourir. Bien que dire cela maintenant n’a pas vraiment d’importance, hein… ?

Le regard du comte Bergstone se tourna vers Mikhail, qui se tenait les bras croisés aux côtés de Meltina. Un sentiment amer emplit son cœur. Une victoire parfaite aurait dû être à leur portée lors de la guerre civile. Si seulement ils n’avaient pas accepté l’offre de fidélité de Gelhart…

Nous n’aurions peut-être pas eu le choix, mais le Seigneur Mikoshiba aurait pu trouver un moyen…

Le comte Bergstone avait parfaitement compris la position dans laquelle ils se trouvaient à l’époque. Il faisait partie de cette réunion, et Helena le lui avait également expliqué. Il n’y avait pas grand-chose à faire. Mais quand même, il ne pouvait s’empêcher d’en vouloir à Ryoma d’avoir simplement acquiescé et permis à la Reine Lupis d’accepter la proposition de Gelhart.

Il savait que c’était une rancune mal placée, mais le fait était que s’ils avaient refusé Gelhart et exécuté Radine pour usurpation d’identité, la moitié de leurs problèmes actuels n’auraient pas existé. Toutes les forces subversives du pays seraient encore obligées d’obéir à la reine Lupis, du moins en apparence. Et dans ce cas, peut-être auraient-ils pu envoyer des soldats à Xarooda plus tôt.

Au moins, il connaît sa place maintenant. C’est la seule lueur d’espoir ici…

Dans le passé, Mikhail Vanash se contentait de débiter des absurdités sur la chevalerie et la voie du chevalier et ne servait qu’à semer le désordre dans les réunions. Mais aujourd’hui, il avait gardé sa bouche fermée. Cela avait provoqué un petit soupir de la part du comte Bergstone. L’idée que la croissance de Mikhaïl en tant que personne devait se faire au prix de la situation actuelle de Rhoadseria ressemblait à une triste plaisanterie.

Avec cette pensée en tête, le comte Bergstone ramena la conversation à son sujet principal.

« Notre plus gros problème est les agissements de Myest. Ils ont déjà rassemblé leurs renforts le long de notre frontière orientale, ils pourraient donc être en route dès que nous les autoriserons à passer. Et nous ne pouvons pas refuser leur demande, ou ils pourraient nous déclarer la guerre. Et puis, c’est notre dernière chance de sauver Xarooda. »

Le regard de tous fut posé sur la seconde lettre sur la table.

Myest ne reculera pas, quoi qu’il arrive…

Le Comte Bergstone avait facilement remarqué la colère et la résolution que Myest avait au moment où ils écrivirent cette lettre. Il était clair que laisser Xarooda à son sort signifierait qu’O’ltormea déferlerait sur les régions orientales comme une avalanche, et qu’aucun des trois pays ne pourrait s’y opposer seul. En fait, il était surprenant que Myest ait supporté l’attitude de Rhoadseria jusqu’à présent.

« Cette lettre ne le dit pas directement, mais la demande de Myest est claire… Avez-vous l’intention que nous entrions en guerre avec eux, Votre Majesté ? »

Quoi qu’il advienne, ne pas laisser Myest traverser leur territoire n’était pas une option. La question était de savoir s’ils les laisseraient simplement traverser seuls ou s’ils enverraient leurs propres renforts pour les rejoindre.

Non, on n’a pas non plus trop le choix…

Que se passerait-il s’ils laissaient les militaires de Myest traverser sans aider Xarooda eux-mêmes ? Les hostilités n’éclateraient peut-être pas immédiatement contre O’ltormea, mais cela créerait un fossé entre les trois pays — un fossé profond, irréparable.

Un fossé qui pourrait se manifester par une attaque de la Rhoadseria à la fois par l’est et par l’ouest, menant à sa destruction. Ni Xarooda ni Myest ne toléreraient qu’une nation amie ne leur envoie pas d’aide dans une telle situation d’urgence.

« On n’a pas d’autre choix que d’envoyer nos troupes… ? », dit-elle, la voix emplie d’une amertume totale.

Mais ils n’avaient pas d’autre choix.

Elle comprend donc cela… Mais la question demeure…

Le comte Bergstone tourna son regard vers Meltina.

« Combien pouvons-nous en déployer ? »

« Nos forces sont en grande partie réorganisées, grâce aux efforts de Lady Helena… Mais vu l’état du pays, le plus que nous puissions épargner est un seul ordre de chevaliers. Nous pourrions demander aux nobles de nous prêter leurs forces, bien sûr, mais si nous ne devions compter que sur nos propres forces… »

Une vague de découragement s’était installée dans la pièce.

« L’existence du royaume est en jeu, et nous ne pouvons envoyer que deux mille cinq cents hommes… », murmura Le comte Salzberg, choqué.

Il représentait bien les pensées de toutes les personnes présentes.

Cela ne pourrait même pas être vu comme un renforcement venant d’un autre pays. Il leur faudrait au moins cinq mille hommes, et la situation exigeait effectivement dix mille hommes. Bien sûr, ils ne pouvaient pas envoyer tous leurs chevaliers pour cela, mais ils ne pouvaient pas non plus espérer l’aide des nobles.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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