Une vie en prison est facile pour une Vilaine – Tome 1 – Chapitre 16

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Chapitre 16 : La jeune demoiselle fait du bénévolat

Alors que Sykes se promenait dans le palais, un prêtre arriva avec un groupe de jeunes enfants.

« Bonjour, monsieur ! »

« Salut, petit ! »

« Hé, vieil homme ! »

« Ne m’oblige pas à te tuer, sale gosse. »

Une fois le cortège d’enfants passé, quelque chose vint soudainement à l’esprit de Sykes.

Hein ? Comment se fait-il qu’une bande d’enfants de l’orphelinat puisse se promener dans le palais ?

Il se retourna juste à temps pour voir les enfants disparaître par une porte l’un après l’autre, une porte qui lui était déjà familière, menant au donjon où se trouvait Rachel.

« Hé, il se passe encore quelque chose… », murmura Sykes.

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Quand ils reçurent le rapport de Sykes, le Prince Elliott et les autres s’étaient précipités, descendant les escaliers jusqu’au donjon. Là, ils trouvèrent…

« Il était une fois un petit pays appelé le Royaume des Fleurs. »

Les enfants étaient assis sur le sol à l’extérieur des barreaux, écoutant Rachel qui leur lisait un livre d’images. Oui, à l’intérieur d’une pièce en pierre froide éclairée seulement par la faible lumière du soleil, une fille entourée d’une montagne de boîtes en bois et une peinture murale d’une grande vallée lisait avec enthousiasme des histoires à de petits enfants qui écoutaient attentivement. Entre eux se trouvait un ensemble de barres de fer.

« Quelle est cette scène que je regarde ? ! », s’écria Elliott malgré lui.

Les enfants s’étaient tous retournés pour le regarder, fronçant les sourcils et portant un doigt à leurs lèvres pour lui demander de se taire.

Peu convaincu, Elliott demande à Georges : « Est-ce moi le méchant ici ? »

Mais Georges n’avait pas de réponse à lui donner.

« C’est comme un entrepôt dans un marché d’esclaves », fit remarquer Sykes avec désinvolture.

Cette observation si futile lui valut une grimace d’Elliott.

S’ils devaient suivre ce concept, alors cela ferait d’Elliott le marchand d’esclaves, de Sykes son manager et son garde du corps, et de George le commis principal. Elliott serait le méchant, et Rachel l’héroïne tragique. Il ne pourrait jamais accepter une histoire sans intérêt comme celle-là. Pourtant, sans aucune idée de ce dans quoi ils s’étaient embarqués, ils n’avaient aucun moyen de trouver une réponse par eux-mêmes.

Alors que les enfants les huaient pour avoir interrompu leur plaisir, George demanda à Rachel : « Ma sœur, que se passe-t-il exactement ici ? »

En répondant joyeusement à la question peu enthousiaste de son petit frère idiot, Rachel avait l’air d’une sainte.

« Oh là là, je n’aurais jamais pensé que tu me le demanderais. Tu vois, je me rendais avant ça à l’orphelinat chaque semaine pour faire du bénévolat. Mais avec la situation dans laquelle je me trouve maintenant, je n’ai pas eu d’autre choix que d’arrêter. Je suis si heureuse que les enfants soient venus me rendre visite. »

Sa réponse combinait habilement la question : « As-tu au moins surveillé ta propre sœur ?! », la critique : « C’est de ta faute si j’ai été obligée d’arrêter de faire la charité !! » et la réprimande : « Tu forces ces enfants innocents à être si prévenants ! »

Aucun d’entre eux n’avait pu dire quoi que ce soit en réponse.

Les ignorant, Rachel s’était retournée vers les enfants et, avec le sourire d’une mère affectueuse, reprit sa lecture.

« Le Royaume des Fleurs avait un prince. Toutes les filles l’aimaient pour ses belles boucles d’or, mais malgré son air fringant, le prince était plutôt faible, et aussi un coureur de jupons sans espoir. Peu importe comment ses serviteurs le réprimandaient, il ne voulait ni étudier ni travailler. Et même si les gens se moquaient de lui pour cela, le prince infidèle passait son temps à errer d’une fille à l’autre. Il passait toutes ses journées à courir après les filles et à s’amuser. Le prince ne travaillait jamais. Cela troublait vraiment tous les serviteurs. Ces derniers et le peuple le regardaient froidement, mais ce coureur de jupons ne le remarquait pas. Finalement, les gens en colère saisirent le prince. Ils lui dirent ce qu’ils pensaient, mais ce dernier n’avait pas pu le comprendre. Réalisant que le prince était incapable de voir son erreur, même ses serviteurs l’abandonnèrent. Maintenant, que va-t-il advenir du prince ? »

Les enfants aux yeux brillants qui avaient écouté Rachel répondirent tous : « Qu’on lui coupe la tête ! Qu’on lui coupe la tête ! »

Rachel sourit à leur chant joyeux : « Oui, c’est vrai. Ils ont traîné le prince sur la place, et ensuite on lui a coupé la tête ! Le mauvais prince fut exécuté à la hache ! »

« Yayyyyy ! »

« Attends, quoi ?! », s’exclama Elliott.

Il s’interposa entre les enfants et Rachel, qui lui lança alors un regard noir de l’autre côté des barreaux.

« Quel genre de livre leur lis-tu ?! »

« Y a-t-il quelque chose d’étrange ? », demanda Rachel.

« Qu’est-ce que tu crois qu’il y avait d’étranges dedans ?! C’était bien trop sombre ! Et je suis étonné que tu aies réussi à trouver un livre aussi satirique. »

« Oh, mon dieu. Est-ce que quelque chose dans l’histoire t’a choqué, Votre Altesse ? », dit Rachel avec un sourire sans faille.

« Urgh ! »

Rachel, qui savait exactement ce qu’elle faisait, gardait un sourire plaqué sur son visage, tandis que les enfants, qui ne savaient pas ce qu’elle faisait, regardaient Rachel et Elliott d’un air dubitatif. Elliott ne pouvait pas l’insulter alors que des enfants qui ne comprenaient pas la situation étaient présents. Il pointa un doigt tremblant vers Rachel à travers les barreaux.

« Oublie-moi ! Ce livre a clairement une mauvaise influence sur leur éducation ! N’as-tu rien de mieux ? ! »

« Oh, mais j’étais juste en train de leur lire une histoire banale. »

« Une histoire banale ? ! Avec toutes ces histoires d’adultères et exécutions, le contenu de ce livre n’est pas adapté aux enfants, et tu le sais ! »

Rachel retourna le livre dans ses mains. Il ressemblait effectivement à un livre d’images pour enfants.

« Il me semble parfaitement normal. C’est quand même une œuvre à but moralisateur. Je pense que c’est précisément le genre de matériel qui devrait être lu aux enfants. »

« Il y a de la malice dans ton choix de livre ! Il est évident que le prince était censé être moi ! »

Rachel répondit à la colère d’Elliott par un rire idiot.

« Oh, mon Dieu, Votre Altesse, tu me trompais ? Cela mérite effectivement l’exécution. »

« Pourquoi es-tu si effrontée… Tout ça parce que tu as intimidé Margaret ! Tu devrais avoir honte de toi, au lieu de m’en vouloir indûment pour ça, espèce de sorcière ! »

Le sang était monté à la tête d’Elliott, et il avait fini par crier. Au moment où il réalisait ce qu’il avait fait, il entendit les enfants chuchoter.

« Qui est ce type qui parle fort ? Il est méchant. »

« Il est un peu comme le prince dans le livre, non ? »

« Oh, maintenant que tu le dis. Le prince était aussi blond, non ? »

« Est-ce qu’il trompe tout le temps ? »

« Il a perdu la tête. »

Les enfants ne disaient pas ces choses par ressentiment, et comme Elliott savait qu’ils disaient simplement ce qu’ils pensaient vraiment, leurs commentaires étaient d’autant plus blessants.

« Merde ! Je vous ferai savoir que je travaille, ok ?! Et je ne fais pas l’idiot ! », déclara Elliott.

« Pourquoi cherches-tu des excuses à donner aux enfants ? », demanda Rachel.

« Des excuses ? ! C’est la vérité ! »

« Il a l’air désespéré », dit l’un des enfants.

« Est-ce que tu vas aussi perdre la tête, monsieur ? », dit un autre.

Elliott recula alors, sentant qu’il était totalement désavantagé. De plus, il ne pouvait pas se disputer avec des enfants.

Les enfants, qui avaient apprécié le livre d’images, se rassemblèrent autour de Rachel et crièrent de joie lorsqu’elle leur donna de gros biscuits.

Pourquoi est-ce que c’est le prisonnier qui donne des biscuits ?, se demanda Elliott, hébété.

Peu importe ce que lui ou ses acolytes disaient, ils ne pouvaient pas gagner avec les enfants ici. Elliott et les autres avaient décidé d’en rester là et de revenir plus tard. Ils étaient les plus vertueux ici. Ils ne pouvaient pas chasser une bande d’enfants juste pour pouvoir s’en prendre à Rachel.

Et alors qu’ils étaient sur le point de partir en trombe, Rachel leur offrit le livre.

« Ça vous ferait du bien de lire des livres comme ceux-là, et de vous entraîner à pouvoir les lire aux autres. »

Elliott sentit alors le non-dit « Pourquoi ne fais-tu pas du bénévolat ? » mais, ne voulant pas être humilié davantage devant les enfants, il lui arracha le livre des mains et quitta le donjon.

Il s’était plaint tout le long du chemin jusqu’à son bureau.

« Maudite soit cette Rachel ! Tout ce qu’elle fait est si méchant ! Elle n’avait pas besoin de faire comme si je ne faisais jamais de charité devant les enfants… »

« Oui, c’est difficile pour toi de lui crier dessus avec les enfants présents. Tu essaies toujours de te faire bien voir », ajouta Sykes.

« La ferme ! », hurla Elliott.

Alors qu’Elliott frappa Sykes, George regarda le livre d’images.

« Je n’ai jamais entendu parler d’une histoire comme celle-là. De quel pays vient-elle ? »

En feuilletant rapidement les pages, il regarda le colophon à l’arrière.

L’histoire t’a plu ? Pour le Prince E, avec amour. Histoire/Illustration par R.F.

« Ma sœur a écrit cette chose elle-même… », murmura George.

« Merde ! Une histoire très commune, mon cul ! C’était vraiment une satire de moi ! »

Le hurlement d’un mauvais perdant résonna dans les jardins.

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