Saikyou Mahoushi no Inton Keikaku LN – Tome 3 – Chapitre 14

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Chapitre 14 : Une Arrivée Douloureuse

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Chapitre 14 : Une Arrivée Douloureuse

Partie 1

Les deux poupées qui venaient vers elles avaient des épées courtes.

Tesfia et Alice avaient déjà trouvé la détermination de se battre. Cependant… ou peut-être que malgré cela… serait plus exact…

Beaucoup de poupées n’étaient pas beaucoup plus âgées qu’elles. Ces deux-là étaient encore jeunes. En d’autres termes, leur légère hésitation était due à leur manque d’expérience. Hormis la leçon extrascolaire, elles n’avaient pas eu de véritable expérience sur le champ de bataille.

Alice avait jeté un regard furtif à Mélissa, qui se tenait toujours aux côtés de Godma.

« Alice ! »

« Oui, je vais bien. »

Les filles avaient échangé des regards et avaient positionné leurs AWRs.

Après avoir constaté que son Gèle nécessitait une quantité excessive de mana à cause des murs particuliers, Tesfia avait eu une idée et avait enduit son katana de mana. La formule magique gravée dans la lame avait réagi au mana et elle brilla faiblement. Elle limita son gel à sa lame, alors que le mana se transformait en glace.

Ensuite, elle imagina la forme idéale pour cette situation… forte, dure et tranchante. Elle se servait de l’entraînement pour garder son mana sous contrôle.

Une fine couche de glace recouvrait la lame, prenant habilement forme. C’était un sort d’enchantement connu sous le nom de Lame de Glace. C’était un type de magie largement utilisé dans de nombreux attributs. La version de l’attribut feu, par exemple, était appelée Lame de flammes.

La lame de glace avait bloqué l’épée courte de la poupée, la glace érodant la lame de l’épée courte, la déséquilibrant et émoussant son tranchant.

« — ! » Tesfia ne s’attendait pas à ce genre d’effet, aussi, repoussa-t-elle l’ennemi et s’éloigna-t-elle d’eux. « C-Comment aimez-vous ça ! »

Il n’était pas clair quant à la cible vers qui elle s’en vantait, mais puisque c’était le résultat de l’entraînement d’Alus, peut-être que cela lui était destiné.

Alus se battait tout en les surveillant, il avait donc entendu sa voix, mais l’avait ignorée.

Bien sûr, Alice n’avait pas non plus eu le temps de faire autre chose. Elle était occupée à intercepter la deuxième poupée.

Comparé à la résistance anormale de l’adversaire, leur maniement des armes n’avait rien de spécial. Avec une arme à la main, Alice n’allait pas se laisser distancer par eux avec ses compétences en naginata.

Malgré l’utilisation de son arme à longue portée, il s’agissait toujours d’une lutte pour la suprématie. Elle portait coup sur coup sur le corps de la poupée, mais ne parvenait toujours pas à prendre le dessus.

La raison en était évidente. Ce n’était pas seulement à cause de la solidité de l’adversaire, mais surtout parce qu’Alice hésitait à tuer des gens. Elle ne pouvait pas franchir cette étape finale. Sa peur et sa réticence à faire du mal à une personne l’en empêchaient.

Alice était en train de crier dans sa tête à son adversaire d’arrêter. Cependant, ce n’étaient pas des blessures mineures qui allaient faire flancher quelqu’un qui était incapable de ressentir la douleur, il allait continuer à attaquer jusqu’à son dernier souffle.

Alors qu’un fossé se formait entre Alice et l’ennemi, ce dernier avait déplacé son épée courte vers l’avant et il avait utilisé la magie.

Une boule de lumière était apparue à son extrémité, de la vapeur s’en dégageant. Rien qu’en la regardant, il était clair que l’énergie lumineuse était compressée.

Comme les murs absorbant le mana utilisaient l’attribut de lumière, ils avaient une caractéristique spéciale : les sorts qui n’utilisaient pas de phénomènes physiques comme la combustion ou la congélation — comme les sorts d’attribut lumière — n’étaient pas du tout affectées. Godma, en utilisant ces murs, avait pris en compte cette caractéristique. Cela s’appliquait également à Alice.

Alice fixa l’ennemi qui se préparait à lancer son sort, et prit une profonde inspiration en essayant de mesurer le timing.

L’instant d’après, la boule de lumière quittait la pointe de l’épée courte et volait vers Alice. La poupée s’était élancée à la poursuite de son sort, abandonnant sa défense pour un assaut téméraire.

Alice avait murmuré avec des lèvres tremblantes : « “Réflexion” »

La lame incandescente du naginata avait reçu la boule de lumière, et l’avait renvoyée à une vitesse encore plus grande.

Alice pouvait voir les yeux de la poupée s’ouvrir en grand. Elle serra les dents, car elle pouvait facilement prévoir le résultat macabre. Et c’était elle qui avait fait en sorte que cela arrive.

La boule de lumière s’était écrasée sur la poitrine de la poupée et avait éclaté, envoyant une onde de choc à travers la pièce.

« Eek ! » Après avoir été si proche, Alice avait été happée par l’explosion. Elle s’était rapidement relevée et avait regardé devant elle quand —

« Argh… ack. »

La poupée se tenait debout, immobile, comme si le temps s’était arrêté. Un grand trou avait été fait dans ses vêtements, de la poitrine à l’abdomen, et sa peau blanche était carbonisée et avait pris la couleur noire. La puanteur de la chair brûlée avait atteint le nez d’Alice.

Très vite, un liquide rouge s’était écoulé de leur bouche et il s’était effondré, tombant à plat sur leur visage.

« Pas possible ! » Ce n’était pas son intention, mais les résultats étaient évidents, puisque la poupée avait abandonné sa défense et pris l’attaque de si près. Se rendant compte qu’elle s’était taché les mains, Alice avait regardé fixement la poupée immobile.

« Alice ! »

Reprenant ses esprits grâce à la voix de Tesfia, Alice vit une autre poupée brandir son épée courte. Elle était toujours accroupie, mais elle avait bloqué l’attaque en balançant son AWR sur le côté.

À cause de sa posture, elle ne pouvait pas mettre de force dans son blocage. Elle avait été rapidement déséquilibrée par le choc, et la lame de l’ennemi se dirigeait rapidement vers son visage.

Soudain, c’était devenu beaucoup plus léger, et elle avait pu repousser la lame avec juste un peu de force.

La raison en était que — .

« Haaa… aaa. »Tesfia, respirant lourdement, était juste à côté d’elle. Son katana avait transpercé le cœur de la poupée qui attaquait Alice. Le dos de la poupée était taché de rouge, et la lame qui l’avait transpercée dépassait.

« Fia ! »

« Vas-tu bien, Alice !? »

« Oui… »

Après avoir porté à la poupée un coup sûrement fatal, Tesfia sortit timidement son katana. Son sentiment de dégoût fut rapidement remplacé par le soulagement d’avoir sauvé son amie. Sans même jeter un coup d’œil à son épée tachée de sang, Tesfia avait tendu sa main libre vers Alice.

« Merci, » dit Alice en se levant.

Debout dos à dos, elles avaient fait face à l’ennemi.

 

 

L’instant suivant, Alice avait vu une petite boule de lumière voler vers Tesfia depuis son angle mort. « — ! Fia ! »

C’était la poupée que Tesfia avait poignardée, qui après tout n’était pas morte.

Sa main bougea par réflexe, repoussant Tesfia tandis qu’elle versait désespérément du mana dans son AWR. Elle frappa avec son AWR en diagonale vers le haut, sa formule magique brillait de mille feux.

« “Shiylereis” »

La frappe avait libéré un faisceau de lumière blanche, divisant la boule de lumière sur le point d’éclater et coupant profondément l’ennemi au-delà.

La boule de lumière avait explosé, faisant voler le lanceur du sort qui se trouvait à proximité. Quelques instants plus tard, il s’était écrasé contre le mur.

De grandes quantités de sang s’étaient écoulées de la poitrine ouverte de la poupée tranchée.

Le silence qui s’ensuivit fut la preuve que sa vie était terminée.

« Haah… haah…, » avec son naginata toujours levé, Alice ne pouvait détacher son regard de l’ennemi tombé et trempé de sang.

Avant que son sentiment de culpabilité et ses remords ne puissent s’accumuler — .

« Merci, Alice. »

Ces mots ramenèrent Alice à ses sens, et cette fois, c’était Tesfia — qui était tombée et essayait de se relever — qui tira sur sa main. « Ah ». Elle s’était frotté les fesses en observant la puissance de ce nouveau sort. « J’en veux un aussi, » dit Tesfia, d’une voix apparemment dénuée de tension.

C’était la meilleure façade qu’elle pouvait présenter. Elle parlait de manière frivole dans le but de ne pas trop penser au fait d’avoir pris une vie.

« … Fia. Es-tu blessée quelque part… ? » Alice pouvait sentir sa gorge trembler. Ses vêtements étaient teints en rouge avec du sang, preuve de son péché. Elle avait utilisé la magie et manié une arme mortelle, un outil qui récoltait des vies.

Elle avait été résolue pour ça. Mais elle sentait quand même son cœur se briser. Elle avait peur de son pouvoir. Elle était maintenant consciente qu’un nouveau sort signifiait un nouveau moyen de tuer un ennemi.

« Tu m’as sauvée, Alice. »

« Eh… !? » Alice laissa échapper une voix abasourdie, alors qu’elle était remerciée apparemment de nulle part.

Cependant, Tesfia lui offrait un sourire rafraîchissant. Elle aurait dû avoir peur elle aussi, mais elle se forçait à paraître calme. Alice pouvait voir que les mots frivoles de Tesfia tout à l’heure étaient nés de la considération.

Alice avait vaincu l’ennemi et pris leur vie. Tesfia aurait pu être en danger autrement et subir le même sort. Elle aurait fait la même chose, peu importe le nombre de fois que cela se serait produit. Comparés à l’idée de perdre son amie pour toujours, le regret et le remords qu’elle aurait à porter n’étaient pas si importants.

C’est pourquoi elle avait déjà sa réponse. « Merci, Fia. »

Les filles s’étaient fait un signe de tête. Elles n’étaient pas encore sorties de l’auberge. Elles n’avaient vaincu que deux de ces poupées.

Tenant fermement leurs AWRs en main, Tesfia et Alice avaient jeté un coup d’œil au garçon qui s’était attaqué à la majorité des ennemis tout seul.

Pendant ce temps, ce garçon, Alus, avait observé leur combat du coin de l’œil.

Il n’avait pas d’autre choix que d’admettre qu’il avait fait une heureuse erreur de calcul. Après tout, elles avaient vaincu deux ennemis.

Les filles avaient sans aucun doute grandi. Mais des épreuves les attendaient encore. Elles seront certainement coincées dans les batailles à venir.

À ce moment-là, elles auraient besoin de détermination et de volonté pour sortir du chaos… elles seraient pressées de prendre une décision.

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Partie 2

Tesfia et Alice fixaient Alus, qui repoussait plusieurs ennemis à la fois avec son unique brume nocturne. En voyant ce combat féroce et unilatéral, l’idée d’aller l’aider ne leur était jamais venue à l’esprit.

Mais l’arme qu’il utilisait maintenant était bien trop grande pour être appelée une épée courte. Le mana s’étendait de sa lame, changeant sa forme. Et en utilisant habilement cette arme et la chaîne, Alus avait dévié et bloqué les attaques des ennemis, battant les poupées sans prendre un seul coup. Leurs différences de capacités étaient évidentes.

Loki se tenait derrière Alus. Les couteaux qu’elle lançait transperçaient avec précision les poitrines de ses cibles. Ces couteaux pouvaient percer la peau épaisse des Mamonos, et les poupées n’étaient pas de taille à les affronter. Ainsi, elles étaient tombées une à une.

Alus n’était pas particulièrement heureux que Loki prenne des vies, même si c’était pour le bien d’une mission. Il croyait fermement qu’il était le seul à avoir besoin de se salir les mains.

Cependant, les résultats parlaient d’eux-mêmes et la détermination de Loki était clairement mise en évidence. Il ne pouvait pas non plus nier que son aide était une bonne chose. C’est pourquoi, au moins pour le moment, il devait accepter ses actes. Tesfia et Alice n’avaient pas d’autre choix que de faire ce choix également.

En voyant la détermination des filles, Alus s’était endurci. Bien sûr, pas dans le sens où il avait décidé de ne pas se salir les mains. Il avait commencé à se salir les mains il y a longtemps.

Au lieu de cela, il avait dû avaler la pilule amère de Loki, Alice et Tesfia marchant sur le chemin taché de sang sur lequel il était. Le chemin avait déjà été choisi. Il devra se le reprocher plus tard.

Si elles devaient tuer quelqu’un en dehors de la légitime défense… alors ce serait sans aucun doute sa responsabilité.

Après avoir décidé cela, les mouvements d’Alus étaient devenus plus rationnels. Chaque coup avait tué au moins une poupée. Au moment où Tesfia et Alice, étonnées, l’avaient remarqué, il restait déjà moins de dix poupées.

Il était entouré par des lames mortelles plongeant vers lui de toutes les directions, mais Alus les bloquait toutes. Et puis…

Avant que quiconque ne s’en rende compte, les chaînes traversèrent la pièce, et Alus avait échappé à l’encerclement des poupées. D’un seul pas, il avait disparu.

Pas mêmes Tesfia ou Alice n’avaient pu le voir. Et quand elles l’avaient remarqué à nouveau, les chaînes avaient entouré la bagarre qui se déroulait dans la pièce.

Alus avait saisi avec désinvolture la chaîne qui sortait du fourreau. Lorsqu’il y avait versé du mana, la chaîne avait commencé à se déplacer à une vitesse extrême. L’épée courte au bout de la chaîne s’était transformée en un tueur sans pitié, déchirant les organes vitaux des poupées qui avaient perdu de vue Alus.

Leurs cous, leurs cœurs avaient été déchirés… leurs vies avaient été mises à mort pour qu’elles ne puissent plus jamais se battre.

Il n’y avait aucune droiture ou justice dans ce genre d’attaque. C’est ce que tous les observateurs avaient ressenti.

Du moins, le visage parfaitement posé d’Alus alors qu’il piétinait l’ennemi était inacceptable.

Il tuait et fauchait des vies comme si c’était la chose la plus normale du monde, tout en respirant peu et normalement.

Quand elle avait vu son visage, Tesfia avait serré son katana encore plus fort qu’avant, peut-être sous le coup de la colère. De l’autre main, elle se tenait la poitrine comme pour serrer son cœur. C’était l’autre visage d’Alus qu’elle avait déjà entrevu auparavant.

Ce visage anormal et sans expression se débarrassait de tout comme d’un déchet, surtout de ces poupées qui étaient plus des machines que des humains, les découpant calmement.

Tentant de contrôler son souffle maintenant irrégulier, Tesfia inspira profondément à travers sa gorge tremblante. Malgré cela, elle ne parvenait pas à calmer son cœur qui s’emballait.

Alus, qui avait froidement observé la bataille, se tourna vers sa partenaire. « Loki ! »

Alors qu’il venait d’achever une poupée, Loki avait réagi rapidement à sa voix et lui lança un couteau.

Les poupées attaquaient Alus dans une ouverture après qu’il en ait tué plusieurs. Il avait tailladé l’une d’entre elles avec la brume nocturne. Ensuite, il prit le couteau de Loki entre ses doigts, le déplaçant soigneusement pour ne pas perturber l’enchantement de mana, et l’envoya dans le crâne de la poupée qui l’attaquait de l’autre côté.

Leur brillante combinaison était merveilleuse. Tout ce que Tesfia et Alice pouvaient faire, c’était de les regarder avec étonnement.

Même si elles le faisaient pour se protéger, elles ne seraient pas capables de reproduire ce qu’il avait fait. Elles ne seraient probablement jamais capables d’atteindre le même état d’esprit pour prendre une vie sans aucune hésitation comme il le faisait.

Mais elles se demandaient aussi quelle aide elles pourraient apporter à Alus si elles pouvaient se déplacer comme Loki.

« Loki, tu avais 0,1 seconde de retard. »

« Pardonnez-moi. Je ferai de mon mieux pour m’améliorer. »

Mais même elle avait été critiquée.

« Haha… » Tout ce que Tesfia pouvait faire était de laisser échapper un rire sec. Mais elle parvenait tout juste à garder le moral en gravant les mouvements de Loki dans son esprit et en en faisant son prochain objectif.

Quelques minutes plus tard… une montagne de cadavres se trouvait devant eux. C’était une scène horrible, et il y avait certainement quelque chose qui n’allait pas chez ceux qui n’étaient pas dérangés par cette scène.

Cependant, son responsable, Alus, regardait ça froidement sans y réfléchir. Ce sont les ennemis… c’est la seule chose qu’il avait reconnue.

Lorsqu’il avait vu Tesfia et Alice s’arrêter un instant en voyant son expression, il avait pris conscience qu’il lui manquait quelque chose, ou peut-être qu’il était trop familier avec cela. Cependant, il n’avait pas été rattrapé par des émotions excessives, et la pensée n’était restée dans sa tête que pendant une seconde.

Balayant cela de côté, Alus s’était retourné pour faire face à une certaine personne.

« Pourquoi… ? » le visage de Godma était plein d’étonnement et d’abattements devant le fait que ses calculs avaient mal tourné. Sa blouse était couverte de sang qui l’avait éclaboussé pendant la bataille.

« Je suis juste trop fort. » Les mots durs d’Alus avaient rejeté les recherches de Godma à la racine. Les poupées, ces marionnettes sans émotion, n’atteindraient jamais les sommets auxquels il se trouvait. Alus l’avait prouvé simplement avec son corps.

Sans avoir à regarder autour de lui, Alus savait que les seules personnes restantes étaient Godma lui-même et Mélissa. « J’ai entendu dire par le Seigneur Vizaist qu’il pourrait y avoir une voie de sortie secrète. Au moins, tu ne l’as pas utilisé pour t’enfuir… Je suppose que c’est digne d’éloges. »

Même si une telle route existait, la fuite n’était plus possible. Les poupées qui s’étaient enfuies et qui étaient sorties étaient confrontées à des risques terribles, à 60 contre 500.

Godma s’en était peut-être aussi rendu compte, mais il n’écoutait plus Alus. « Ai-je échoué… ? Non, ce n’est pas possible. Des gens m’ont hautement évalué. Personne n’a pu se plaindre de mes résultats, » murmure-t-il à personne en particulier, dans le centre de recherche désormais silencieux.

« Non… Ça ne compte même pas comme un échec. À partir du moment où tu as touché quelqu’un avec un scalpel, ce que tu faisais ne pouvait plus être appelé de la recherche. »

« La ferme ! »

Godma haussa le ton à la remarque d’Alus, car la situation actuelle en disait long sur la réalité. Submergé par la colère, il avait balayé les matériaux sur un bureau voisin. Parmi les nombreux morceaux de papier qui volaient dans l’air, un vieux livre était tombé sur le sol.

Quand Alus avait vu cette couverture distinctive, ses yeux s’étaient ouverts en grand. L’un des Quatre Livres de Fegel !? Et c’est l’original ? Pourquoi est-ce qu’il a ça ?

Il y avait de nombreux tomes rares dans le monde qui tentaient de percer dans le cœur et les secrets de la magie et des Mamonos, et certains des meilleurs parmi eux étaient les Quatre Livres de Fegel. Des copies de ces livres faisaient partie du matériel qu’Alus avait demandé aux militaires, mais il n’avait pas les originaux. En fait, certaines personnes se demandaient même si les livres originaux existaient.

Alus s’y intéressait aussi, mais il n’avait jamais possédé ni même lu les originaux. Des rumeurs peu fiables prétendaient que les Quatre Livres de Fegel n’avaient pas été fabriqués avec le type de papier couramment utilisé dans le monde, et que c’était la raison pour laquelle ils existaient encore à ce jour sans s’effriter.

Le vieux livre dans le champ de vision d’Alus avait une couverture épaisse faite d’un matériau rouge foncé, avec des craquelures comme des toiles d’araignée répandues à travers elle.

Est-ce vraiment possible ?

On l’appelait une série de livres étranges en raison de leur histoire douteuse et des nombreuses contrefaçons qui existaient. Comme même Alus n’avait pas eu la chance de voir les originaux, une personne normale n’avait aucune chance de pouvoir en évaluer l’authenticité.

Et si Godma le possédait, il ne serait pas étrange qu’un collectionneur fou ait un faux sous la main.

Retenant sa curiosité, Alus avait jeté un coup d’œil à Godma, tout en restant concentré sur la mission.

Les yeux injectés de sang de Godma ne montraient plus la même volonté qu’auparavant. « C’est vrai, c’est comme tu dis… c’est affreux au niveau des résultats. » Il avait baissé la tête, ne résistant plus. Il avait peut-être un esprit brillant, mais il avait perdu toutes ses poupées, et n’étant qu’un simple chercheur sans capacités de magicien, il ne représentait aucune menace pour Alus et son groupe.

Ses épaules s’étaient affaissées, et il avait une aura de chagrin pitoyable comme quelqu’un qui avait été battu.

Cependant, personne ici n’avait encore compris avec précision quel genre de personne il était.

Un feu éternel couvait toujours dans son cœur. Ce n’était pas de la haine. Ni de l’inimitié. Assez étrangement… c’était de la curiosité. C’était ce que possédait un chercheur, la dernière raison significative de ses enquêtes.

« Cependant… Seulement quand on parle de résultats. Il est encore trop tôt pour dire que tout cela est inutile. »En ajustant ses lunettes, une expression fugace était apparue sur le visage de Godma alors qu’il regardait Alus. « Avant, tu as dit que mes recherches étaient incomplètes. Laisse-moi te corriger… ce n’est pas une vérité établie. La perfection est encore en cours d’élaboration. C’est pourquoi j’ai décidé de passer à l’étape suivante. Comme prévu, un humain à la volonté faible ne sera pas capable de surmonter quoi que ce soit. »

Godma avait parlé de sa voix la plus tendue jusqu’à présent. « À ce moment précis, mes recherches vont présenter un nouveau défi. »

Il leva sa main précédemment cachée, et ils avaient vu qu’il tenait quelque chose. Il avait ensuite balancé sa main contre sa poitrine.

« — !! » Loki, Tesfia et Alice avaient réagi.

« Espèce d’idiot… ! » cracha Alus.

Dans la main de Godma se trouvait une seringue en forme de pistolet, maintenant pressée contre sa poitrine. Elle avait un réceptacle à la place du baril, avec un liquide rouge foncé ressemblant à du sang à l’intérieur. Avec une courte explosion, il avait été forcé à l’intérieur de son corps.

« Tout ça, c’est grâce à Mme Alice, là-bas, » dit Godma, qui parvenait à garder un peu de sang-froid, le regard calme.

Alice avait l’impression de l’avoir déjà vu afficher ce regard dans le passé.

« Sire Alus — . »

« Ouais, c’est la pire des résistances inutiles, » déclara Alus, avec une légère dose de pitié, peut-être parce qu’il compatissait avec un collègue chercheur, Godma.

Cependant, peu importe le type de liquide… vu qu’il l’injectait directement dans son cœur, il était en train de mettre sa vie en danger. Alus ne s’opposerait pas à ce que Godma sacrifie sa vie, mais il avait le pressentiment que ce ne serait pas si facile.

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Partie 3

« Agh !! Ahh — Aaaaaaaa… Grrkk, ahh... »

Trébuchant sur ses pieds alors qu’il se débattait, Godma tomba à genoux et se gratta la poitrine. Ses lunettes étaient tombées alors que ses ongles s’enfonçaient dans sa peau. Du sang décoloré avait commencé à suinter de ses blessures. En marchant sur une poupée tombée, une veine épaisse traversait son front. Son teint était devenu plus sombre.

« Hein !? Qu’est-ce qui se passe… ? »

On ne pouvait pas reprocher à Tesfia de ne pas comprendre cette scène absurde. Après tout, un humain se transformait en quelque chose d’autre sous ses yeux.

« … » Alice regardait tranquillement, mais il n’y avait pas de haine dans ses yeux. Au contraire, elle ressentait de la pitié, de la misère… même de la tristesse.

Les épaules de Godma s’étaient contractées. Il s’était arrêté de marcher et s’était accroupi tandis que son corps se gonflait. Sa main droite s’était transformée en quelque chose de complètement inidentifiable, loin de celle d’un humain.

Incapable de résister à la croissance de Godma, ses vêtements se déchirèrent et sa peau se raidissait en s’habituant à son nouveau corps.

Godma avait rapidement relevé la tête et avait regardé Alus et les autres personnes dans la pièce, une lueur dangereuse dans les yeux.

Loki, Tesfia et Alice avaient regardé avec horreur.

Les pupilles de ses yeux désormais dorés étaient de longues fentes, comme celles d’un reptilien.

« Est-ce le résultat dont tu parlais ? » Quel était ce liquide ? Alus ne connaissait pas tous les composants, mais il était sûr qu’il contenait le sang d’Alice… ainsi que du sang d’un mamono.

Godma avait subi une transformation totale, obtenant une nouvelle forme. C’était les ruines de ce qui avait été un chercheur. C’est pourquoi, en tant que collègue chercheur… c’était le combat d’Alus. « Donc, se transformer en Mamono est la fin de ta route de recherche de toute une vie. »

Il n’y avait aucun doute que Godma était un prodige. S’il n’avait pas pris le mauvais chemin dans la vie, il aurait vraiment pu contribuer à l’humanité. Quel gâchis, pensait Alus.

« Est-ce que c’est… un mamono !? » Tesfia s’étonna de l’incroyable transformation de Godma.

Alice se mordit simplement la lèvre, tandis que Loki l’observait prudemment.

Le corps de Godma avait pris une couleur verte profonde, qui ressemblait vraiment au corps d’un mamono. Couplé à sa gigantesque main droite, il n’avait plus aucun vestige de son humanité. Son corps mesurait plus de deux mètres de haut, et ses griffes acérées crissaient sur le sol.

« Gigigigigigigi Gwah !? » La bouche de Godma s’était ouverte comme s’il se moquait d’eux. Un son déstabilisant s’échappa de sa gorge. Son cou épais se transforma progressivement, et quand il eut terminé, il parla d’une voix rauque tout en vérifiant son corps.

« Pardonnez-moi… J’étais juste en train d’essayer ma gorge. Hmm, il semble que mon cerveau, mes cordes vocales et même ma langue aillent bien. C’est donc la forme évoluée de l’humanité… pas mal ! »

« — !! Donc, tu as encore ton esprit, » observa calmement Alus, mais secrètement, il était stupéfait.

Il n’y avait eu aucun exemple antérieur de personnes se transformant en mamono. Et malgré cette transformation sans précédent, Godma avait gardé son intelligence humaine.

Soudain, une pensée avait surgi dans la tête d’Alus. « Je vois. L’attribut de lumière. »

Godma avait ri de manière effrayante. C’était une horrible voix rauque, mais ses mots présentaient une pensée claire derrière eux. « C’est vrai. Tu es très bien informé, Alus Reigin. Si Mélissa a conservé son sens de l’identité, ce n’est pas parce qu’elle avait à l’origine l’attribut de lumière, mais parce qu’elle a reçu le facteur élément d’Alice. Je suis heureux de voir qu’il s’est également adapté à mon propre corps. » De la vapeur s’était échappée de sa bouche en parlant.

« Et quoi encore ! Même si tu es conscient et tu as ton esprit, tu restes un mamono. Au mieux, tu as quelques points communs avec les Mamonos humanoïdes. »

Parmi la variété de Mamonos, les types humanoïdes tendaient à être d’une classification élevés. Il y avait beaucoup de théories sur la raison pour laquelle les Mamonos pouvaient avoir une forme humanoïde, par exemple une forme d’évolution convergente et le mimétisme des humains étaient une de leurs capacités, mais il n’y avait pas encore de preuve pour cela. Ce qui suggérait que Godma, tel qu’il était maintenant, possédait un pouvoir égal à celui d’un mamono de grande classe.

Voyant qu’un combat se préparait, Tesfia et Alice avaient fermement agrippé leurs AWRs, se débarrassant de leur peur. C’était en partie grâce à leur expérience dans la leçon extrascolaire.

Cependant, Alus avait élevé la voix comme pour les réprimander. « Ne vous mêlez pas de ça. »

Face au Godma transformé, toute trace de pitié avait été effacée chez Alus, tout comme dans ses combats dans le Monde extérieur. Il avait décidé qu’il faisait face à ce qui était en fait un Mamono de grande classe.

« Attends, on peut… ! »

Pendant que Tesfia parlait, Alice regardait Mélissa qui se tenait à côté de Godma. À quoi pensait-elle, maintenant que son maître s’était transformé ? Mais Alice ne pouvait pas dire si les yeux vitreux de Mélissa la regardaient. Ses yeux n’étaient pas différents de ceux des autres poupées.

Au milieu du chaos, les pupilles rétrécies de Godma fixaient Alus sans crainte. Il pouvait sentir une grande puissance déborder de son corps. Quelle plus grande joie pourrait-il y avoir dans le monde que d’expérimenter les résultats de ses recherches avec son propre corps ?

« Nous ne savons pas la puissance de Godma en tant que mamono, alors je vais le faire. Loki, toi — !! »

Comme s’il était pris de court, Alus s’était interrompu. Il ne l’avait pas quitté des yeux — mais Godma était parti.

Tesfia, Alice et Loki étaient choquées. Elles regardaient le dos d’Alus, mais un énorme mamono s’était interposé entre Alus et elles en un instant.

Godma était là avant qu’elles ne le réalisent. L’œil humain n’était pas capable de suivre ce genre de vitesse.

« — !! » Quand Alice avait cligné des yeux, le visage disgracieux de Godma était juste en face d’elle. Son visage répugnant la fixait, les yeux dorés en forme de serpent se rapprochant. « Hein ? »

Après avoir reniflé, le Mamono avait expiré une vapeur sombre, en tordant sa grande bouche en un sourire.

Mais l’instant d’après, sa grande carrure avait tremblé alors qu’il sentait une présence, et ses yeux dorés avaient bougé.

L’instant d’après, le visage répugnant du Mamono avait disparu du champ de vision d’Alice. À la place, elle pouvait voir la pointe de la brume nocturne d’Alus se diriger vers le côté du Mamono.

L’épée avait bougé si vite qu’elle semblait vouloir la couper, mais la lame noire s’était arrêtée juste devant son nez.

Et le temps qu’elle s’en rende compte, Godma était revenu dans sa position initiale. Vu les marques de griffes sur le sol, il avait dû utiliser ses bras massifs comme freins.

Le sang d’Alice était mélangé à celui d’un Mamono. Il avait peut-être été attiré par le cœur et le corps d’Alice, la source de ce sang.

En tordant curieusement sa grande bouche, il avait parlé. « Je devrais vraiment te tuer. Je sens une grande haine. » Son ton était rauque.

« Vas-tu bien, Alice ? »

« Ah… oui. » Elle n’avait aucune blessure, mais la main qui tenait son naginata tremblait. Cette énorme créature s’était déplacée aussi vite. Elle n’imaginait pas pouvoir s’opposer à lui.

C’est le pire, gémit Alus pour lui-même.

En raison de la nature des Mamonos, les principes qui sous-tendaient leurs actions étaient généralement extrêmement simples. Ils agissaient par instinct. Mais dans le cas de Godma, sa retenue et son intelligence humaines semblaient être mélangées à l’instinct et à l’intuition d’un Mamono. Bien que ses traits de caractère soient de plus en plus forts, le raisonnement derrière ses actions était inconstant et chaotique, ce qui rendait difficile pour Alus de prédire ce qu’il fera ensuite.

« Kuhyiiii !!! » Ces yeux dorés scrutateurs n’étaient plus sur Alice, mais sur Alus.

« Maintenant, vous avez compris, non ? Vous ne pouvez pas le battre, alors reculez. Cependant, vous allez devoir vous débrouiller toutes seules… il semble qu’il ait trouvé un divertissement très peu drôle pour vous. »

Dans la direction indiquée par Alus se trouvait Godma avec sa griffe massive arrachant la robe de Mélissa, alors qu’il lui ordonnait solennellement de sa voix rauque. « Peu importe, j’ai une assez bonne prise sur ce corps… Mélissa, tu dois tuer Alice. Maintenant que mon expérience est réussie, ton amie n’est malheureusement plus nécessaire. Coupe les attaches qui te restent par toi-même. Compris ? »

« Tuer. Alice… »

Les yeux creux et grands ouverts de Mélissa avaient fixé son regard vers l’avant tandis qu’elle se tordait lentement le cou. Elle avait croisé les bras, dégainant les couteaux AWR qui pendaient à ses hanches, et en avait pointé le bout vers Alice.

« Mélissa… ! »

Le désespoir remplissait les yeux d’Alice, mais l’expression de Mélissa resta inchangée.

« Haha, vous n’avez qu’à vous entretuer toutes les deux. Maintenant, allez-y et amusez-vous ! » Le rire strident de Godma avait rempli la pièce.

Tesfia avait courageusement couru aux côtés d’Alice avec son AWR à portée de main, mais même à deux, elles auraient du mal à faire face à Mélissa.

Alus jeta un regard dans cette direction, tout en surveillant Godma, et interpella l’autre fille présente. « Loki, je m’occupe de lui. »

Assez rapidement, la bataille là-bas avait aussi commencé. Le son métallique du katana de Tesfia avait retenti alors qu’il se heurtait au couteau de Mélissa.

« Plus important encore, je te laisse ce côté. On dirait que ça va être trop difficile à gérer pour elles deux. »

« … ! » En entendant cela, Loki laissa échapper un petit soupir. Ce genre de considération était quelque chose qu’Alus n’avait jamais montré auparavant. En sentant ce petit changement chez lui, la joie commença à monter en elle. C’est pourquoi elle n’allait pas remettre en question le rôle qu’on lui avait confié. Elle était prête à faire tout ce qu’il voulait. « Vous pouvez me laisser faire, mais s’il vous plaît, ne vous forcez pas. »

« Je vais m’en sortir. Comme je l’ai dit, il semble qu’il veuille aussi régler les choses avec moi. C’est la première fois que j’ai affaire à un Mamono qui peut parler, alors je ne peux pas laisser passer cette occasion. Eh bien, nous sommes tous deux des scientifiques, donc je vais au moins l’accompagner dans ses derniers instants. »

Loki avait acquiescé à ses paroles. De toute façon, vu la vitesse à laquelle Godma se déplaçait, elle ne pourrait pas le suivre, ce qui signifiait qu’il y aurait de grandes chances qu’elle se mette en travers du chemin, même s’ils combattaient ensemble.

Même de dos, Loki pouvait voir que l’attention d’Alus était entièrement portée sur Godma. C’était un signe de sa confiance en elle. Confier ses arrières à quelqu’un dans le Monde extérieur, c’était comme mettre sa vie entre ses mains.

Si c’est ce que dit Sire Alus, je ferai tout ce que je peux pour protéger ces deux-là.

En effet, les choses seraient plus simples s’il s’agissait seulement de protéger Alice et Tesfia. Si cela avait été sa priorité, Alus aurait immédiatement éliminé Mélissa. Et comme il ne l’avait pas fait, c’était donc ainsi.

Il avait emmené Tesfia, et lui avait donné suffisamment de temps pour récupérer l’AWR d’Alice sur le terrain d’entraînement. Tout cela semblait illogique si ce n’était que pour protéger Alice, mais tout avait été pris en considération.

Pour cette raison, Loki avait compris son rôle. Elle soutiendrait les deux filles autant que possible, et s’il semblait qu’elles étaient à leur limite, elle prendrait sur elle de se salir les mains.

C’était un rôle épouvantable, mais Loki l’avait accepté avec joie. Comme elle connaissait Alus depuis le monde extérieur, elle avait apprécié ce choix apparemment illogique de sa part.

Et donc — Loki avait tranquillement préparé ses couteaux.

☆☆☆

Partie 4

« GAAAAAAAAH !! »

« … ! »

La bataille avait soudainement redémarré. La bouche grotesque de Godma s’était ouverte en grand. On pouvait voir des dents acérées dans cette bouche inhumaine, et il avait rapidement attaqué.

« Merde ! » En voyant une faible lumière dans les profondeurs de cette bouche, Alus sentit du mana condensé, et plia immédiatement deux doigts vers le haut.

C’était une magie de domination de l’espace. Ce sort affectait l’espace lui-même, et avait été simplifié pour qu’un seul mouvement puisse l’activer. Comme il était fait pour la vitesse, il n’avait pas beaucoup de puissance, mais il pouvait être utilisé en cas d’urgence.

Un mur incolore et transparent fut créé sous la forme d’un rectangle, et se déplaçant en synchronisation avec les doigts d’Alus, il frappa le menton de Godma.

Ayant son cou soudainement tordu, la bouche de Godma s’était levée vers le plafond. L’instant d’après, de grandes quantités de mana condensé avaient jailli de sa bouche sous la forme d’un rayon.

Le rayon avait facilement percé les trois étages souterrains, creusant un grand trou jusqu’à la surface.

« … Loki ! »

« — ! » Loki avait vite compris pourquoi elle avait été appelée. Et l’instant d’après, la licence d’Alus s’envolait dans les airs.

Elle l’avait pris entre ses doigts et avait rapidement ouvert le canal, confirmant qu’il fonctionnait. « Le canal fonctionne maintenant. » Grâce à Godma qui avait ouvert un trou vers la surface, les effets de l’interférence de la pièce s’étaient affaiblis.

« Très bien, alors dis au Seigneur Vizaist qu’il me faudra un peu plus de temps pour accomplir la mission. Quant à la raison, dis-lui qu’une variante de classe A de Mamono est apparue. »

« — ! Je comprends. »

Alus avait hésité un instant à qualifier Godma de Variante, mais il avait décidé de le faire, car il n’était pas un Mamono normal.

Les variantes naissaient généralement lorsqu’un Mamono cannibalise un autre Mamono et assimilait les informations qu’il contenait. Cela n’augmentait pas seulement leurs réserves de mana, mais il y en avait aussi beaucoup qui prenaient un trait unique ou développaient une sorte de pouvoir spécialisé.

Il s’agissait d’une forme d’évolution, ce qui signifiait que les procédures habituelles pour traiter les Mamonos ne suffiraient pas. Il fallait faire preuve de souplesse pour les gérer.

Dans ce sens, une classe Variante était l’ennemi naturel du magicien, les plaçant généralement un rang au-dessus de leurs frères normaux.

Mais c’était une chose de moins à craindre. Si Godma devait essayer de s’échapper, ils pouvaient se préparer au pire.

Cependant, Godma n’allait pas laisser à Alus le temps de respirer. Après avoir perdu l’un de ses atouts, la rage brûlait dans ses yeux et il baissa la tête pour fixer Alus. Ses pupilles étaient rétrécies, comme une bête qui aurait trouvé sa proie.

Reconnaissant une fois de plus combien il était facile d’identifier l’hostilité chez un Mamono, Alus prépara à nouveau la brume nocturne.

Il s’était concentré sur le Mamono en face de lui.

Alus pouvait sentir sa tête se refroidir… un sous-produit de sa réflexion sur la manière la plus efficace de tuer un Mamono.

Après avoir poussé sa robe sur le côté, il s’était rapproché du Mamono en un instant. Ils étaient probablement égaux en termes de vitesse.

La première chose qui laissa une profonde impression à Alus fut la vitesse de Godma par rapport aux Mamonos qu’il avait rencontrés jusqu’à présent. Il ne s’était pas attendu à ce qu’il soit aussi rapide, c’est pourquoi il avait été imprudent auparavant. Mais maintenant qu’il connaissait la vitesse de son adversaire, il n’allait pas se laisser surprendre à nouveau.

Sans même manquer l’ouverture dans la réponse initiale d’Alus, Godma s’était rapproché à une vitesse inimaginable pour sa taille.

Alus avait déplacé la brume nocturne, couverte de mana, ainsi qu’une seconde lame faite de mana.

Godma avait esquivé l’attaque, mais Alus avait continué l’assaut pour empêcher la distance d’augmenter. Tant qu’il pouvait lire ses mouvements, la vitesse à laquelle il se déplaçait n’avait pas d’importance. Son mal de tête dû à l’utilisation du Dévoreur de Gra pour démolir l’armée de poupée s’était déjà dissipé. En retour, Alus pouvait sentir un sentiment froid et sombre monter de sa poitrine.

Essayant de s’éloigner d’Alus, qui le talonnait, Godma s’était soudainement mis à zigzaguer.

Voyant son ennemi s’arrêter un instant, Alus lança la brume nocturne, mais Godma la repoussa avec son bras droit comme s’il l’avait vu venir.

Cela avait un peu surpris Alus. La prévoyance de Godma dépassait les instincts normaux d’un Mamono, et malgré sa classification de Variante, ce n’était pas quelque chose qu’un Mamono ordinaire pouvait faire. « Oh ? Tu mourrais facilement si tu bougeais comme un mamono le devrait. »

Godma s’était remis en mouvement pendant qu’Alus marmonnait. Son gigantesque bras droit était monstrueusement puissant, et pouvait facilement pulvériser une personne d’un seul coup. En revanche, son bras gauche, beaucoup plus petit, était doté de griffes acérées comme des rasoirs.

S’étant une fois de plus rapproché d’Alus, Godma avait balancé son énorme bras droit vers lui.

Le bras se heurta à la brume nocturne, mais le lourd impact résonna dans tout le corps d’Alus, exerçant une pression immense sur ses jambes.

Ayant résisté à la frappe, Alus avait instantanément tiré la brume nocturne pour essayer de couper le bras géant. Mais comme prévu, la peau était aussi résistante qu’elle en avait l’air, et non seulement elle n’avait pas coupé le bras, mais elle n’avait même pas laissé une égratignure.

Godma n’avait pas non plus retiré son bras. Il avait gardé son bras en place, tandis qu’une boule de lumière se formait dans la paume de sa main.

Le sentant, Loki avait jeté un coup d’œil choqué.

Sa cible n’était pas Alus. C’était les deux filles qui se battaient contre Mélissa. C’était un mouvement sournois destiné à créer une ouverture en distrayant Alus.

« Tu es face à moi ! » Alus ouvrit sa main, puis fit un mouvement d’écrasement avec celle-ci comme pour écraser une pomme invisible, la refermant lentement.

Et comme si sa main était liée à celle d’Alus, la main de Godma, qui était sur le point de lancer un sort, s’était fermée de force. Il avait essayé de la garder ouverte, mais quelque chose d’autre contrôlait la main du Mamono.

Alus continua en utilisant la gravitation basée sur la magie de domination spatiale pour augmenter la pression sur la main de Godma. Il donna un coup de pied infusé de mana dans l’abdomen du Mamono, l’envoyant voler. Une fois qu’il était à une certaine distance, Alus avait complètement fermé sa main.

Lorsque Godma avait bondi en arrière, sa main avait été fermée de force avec une pression immense, mais grâce à sa peau épaisse, elle n’avait pas été écrasée.

Mais tout s’était déroulé selon le plan… le sort qui n’avait pas été lancé était maintenant parti dans la main droite fermée de Godma, la soufflant.

L’explosion avait donné à l’énorme corps de Godma encore plus d’élan dans son vol, et il s’était écrasé contre un mur. Du sang vert s’était écoulé de son poignet. La main avait complètement disparu.

« Sire Alus ! »

Loki avait fait demi-tour pour se préparer à toute attaque qui se dirigerait vers eux, et elle éleva la voix. Elle avait vu la blessure qu’Alus avait prise.

Le sang coulait de son épaule. Quand il avait repoussé Godma d’un coup de pied, une de ses griffes avait déchiré son épaule. La griffe qui était entrée par le dos avait été retirée de force, et la blessure était plus profonde que prévu.

Cependant, Alus ne montra aucun signe d’inquiétude à la voix paniquée de Loki. Une fois qu’il était en mode combat, il ne perdait pas sa concentration jusqu’à ce que son ennemi soit complètement éliminé. Ce n’était pas comme s’il ne pouvait pas l’entendre, mais c’était une priorité moindre, alors il la repoussait pour plus tard.

Sans mot dire, il s’était approché de Godma, un pas après l’autre. Une fois qu’il était assez proche, le Mamono avait levé son bras droit blessé et l’avait balancé vers lui.

« Tu peux même faire quelque chose comme ça ? Tu es vraiment un Mamono. »

Les yeux d’Alus s’étaient ouverts en grand — la raison étant que le bras droit écrasé de Godma avait guéri instantanément et que sa main avait repoussé.

Si ce n’était que son bras droit, ce serait une arme contondante puissante, mais cela ne suffirait pas à l’inquiéter. Mais c’était une autre histoire si la main pouvait repousser et se couvrir de vastes quantités de mana.

Le corps d’un Mamono était le parfait conducteur de mana et pouvait parfois même surpasser un AWR en performance. Ainsi, enchanter un poing avec du mana le rendait bien plus puissant qu’une arme ordinaire.

Alus avait instantanément fait un bond en arrière, mais encore plus de mana s’était concentré dans la paume de Godma et s’était transformé en un sort d’attribut de lumière.

L’instant d’après, une onde de choc avait été déclenchée, effaçant complètement l’endroit où se tenait Alus un instant auparavant.

« C’est merveilleux ! C’est donc ça le vrai pouvoir de la magie. S’attendre à ce qu’un corps humain puisse gérer quelque chose comme ça serait cruel. »

« … Bien que tu te sois transformé en un Mamono encore plus grand, tu peux encore parler, hein ? » cracha Alus avec sarcasme.

Contrairement à la magie de tous les jours utilisée par les gens ordinaires, la théorie la plus répandue sur le type de magie utilisée par les magiciens était qu’elle provenait des Mamonos. En fait, l’idée derrière l’AWR était la même que celle du fonctionnement d’un Mamono.

Dans un sens, on pourrait dire que les Mamonos étaient nés avec le système optimal nécessaire pour utiliser la magie. Cela signifiait que la magie n’était pas seulement le seul moyen de s’opposer aux Mamonos, mais aussi que les humains étaient fondamentalement inférieurs à eux dans son utilisation.

☆☆☆

Partie 5

Tandis qu’Alus était enfermé dans un match à mort avec Godma, Alice et Tesfia affrontaient Mélissa.

Contrairement aux autres poupées, bien que ses mouvements soient simples, elle était extrêmement rapide. En termes de capacités physiques, elle rivalisait avec Loki. Ses capacités de combat dépassaient celles d’une poupée moyenne, et elle pouvait même être proche d’un magicien à deux chiffres.

Alors que Mélissa s’approchait rapidement d’elle, le corps d’Alice était figé. Ses mains tenant le naginata semblaient pouvoir le lâcher à tout moment.

Mélissa la fixait avec des yeux froids et sans émotion. Elle n’était plus la Mélissa qu’Alice connaissait.

Alors Alice avait tenu son AWR contre sa poitrine. Malgré le couteau qui se rapprochait d’elle, elle ne montrait aucun signe d’utilisation. Ses yeux vacillants trahissaient ce qu’elle ressentait vraiment. Elle voulait que tout ceci ne soit qu’un mensonge.

« Melissa. » Ce nom, qui s’était échappé de ses lèvres, ne pouvait plus être utilisé pour décrire la fille en face d’elle.

Mélissa signifiait la compassion dans le langage des fleurs. C’était le nom d’une petite fleur blanche et pitoyable. Malgré cela, elle balançait impitoyablement son couteau sur Alice qui ne résistait pas.

Et au moment où tout serait perdu — Alice avait entendu un bruit métallique.

« Alice ! Reste concentré ! »

Devant Alice se trouvait Tesfia, qui avait bloqué le couteau de Mélissa avec le dos de son katana. Alors même que Tesfia se concentrait sur elle, le katana était pressé.

Mais même là, Alice n’avait pas bougé. Elle avait une arme mortelle entre les mains, et l’avait même utilisée pour priver des poupées de leur vie. Mais elle était terrifiée à l’idée de la retourner contre son amie.

Mélissa était forte, et Tesfia ne semblait pas pouvoir tenir plus longtemps, mais Mélissa avait été la première à briser l’impasse.

Le bruit des armes qui s’entrechoquaient s’était arrêté, et alors que Mélissa retirait le couteau, celui qu’elle tenait dans l’autre main s’était abaissé rapidement.

« — !! »

Tesfia avait reculé par instinct, mais elle s’était souvenue d’Alice derrière elle et avait hésité à reculer davantage. L’instant d’après, le couteau avait entaillé l’arrière de l’épaule droite de Tesfia après qu’elle ait bougé le haut de son corps pour esquiver.

« Urk !? Espèce de petit — ! »

C’était une blessure mineure. Elle pouvait s’en occuper. Si elle ne le faisait pas, elle ne pourrait pas protéger Alice. Ayant décidé de cela, Tesfia avait déplacé son katana, même si son visage se déformait de douleur.

Mélissa s’était écartée du chemin de la frappe brutale, avec des pas rythmés.

« Fia !!! » Alice avait instinctivement crié. Elle était rattrapée par un féroce conflit interne. Tesfia et Mélissa étaient toutes deux irremplaçables pour elle. Elle ne voulait pas que l’une d’elles fasse du mal à l’autre. Ses yeux se posèrent sur sa meilleure amie blessée, sa mauvaise conscience la pesant.

« Je vais bien. Je sais ce que tu ressens, Alice… mais tu es la seule à pouvoir la sauver ! »

Préparant à nouveau sa lame, Tesfia fixa Mélissa, maintenant à distance d’elles. Elle était réticente à l’idée de pointer une arme contre quelqu’un qui était comme une famille pour Alice. Mais Alice était sa seule et unique meilleure amie. Elle ne pouvait en aucun cas laisser quelqu’un lui faire du mal. C’est pourquoi elle avait timidement gardé son katana pointé vers Mélissa.

Toute indécision entraînerait la mort d’Alice. Bien qu’elle ne puisse pas se battre sans hésitation, elle sentait qu’elle pouvait comprendre ce qu’Alice disait maintenant. Elle ressentait une douleur sourde, en plus du danger pour sa vie.

Réajustant sa prise sur son katana, Tesfia avait brandi son AWR avec une nouvelle détermination. Rassemblant son esprit de combat, elle donna des ordres à son propre mana.

Très vite, il s’enroula autour de sa lame comme un fidèle serviteur. Un flux glacial prit la forme de son arme, devenant une lame de glace.

En voyant cela, Alice s’était rappelé ce que Tesfia avait dit — qu’elle seule pouvait sauver Mélissa. Alice avait donc positionné son naginata et avait pris une profonde inspiration.

Il devait y avoir un moyen. Mais pour l’instant, elle se battrait aux côtés de son amie… en gardant un faible espoir dans son cœur.

Alice s’était alignée à côté de Tesfia. « Merci, Fia. Allons sauver Mélissa. »

« Oui, ensemble, je suis sûre que nous pouvons le faire. » Son expression était raide, mais Tesfia avait tout de même forcé un sourire pour Alice.

Alice avait étouffé ses larmes en regardant Mélissa, qui avait complètement changé par rapport à ce qu’elle était. À présent, ses bras pendaient mollement et son corps se balançait.

Elle arrive !

Comme les sens aiguisés de Tesfia l’avaient prédit, Mélissa avait fait son mouvement.

Mais elle s’était déplacée encore plus vite qu’avant, et le temps qu’elle le remarque, Mélissa était déjà juste à côté d’elles. Elle avait poussé ses couteaux en avant.

Et en essayant de bloquer l’attaque — les deux filles avaient placé le dos du katana et la poignée du naginata sur le chemin, réussissant tout juste à parer.

Pourtant, Mélissa avait continué à pousser les couteaux en avant. Elle avait une force inhumaine et écrasante.

En une seule poussée, Alice s’était effondrée, et la lame de glace de Tesfia ne gela pas le couteau. Au contraire, sa lame était en train d’être réduite. Le mana avait aussi dû passer à travers les couteaux de Mélissa.

Bientôt, le couteau avait glissé de l’arrière du katana et avait voyagé vers le corps de Tesfia, ayant pris de l’élan.

Tesfia avait été déséquilibrée, mais elle déplaça immédiatement son katana sur le côté en guise de contre-attaque. « — !! »

Cependant, Mélissa s’était accroupie et avait esquivé l’attaque désespérée comme si elle avait vu clair en elle. Elle s’était approchée, fixant Tesfia sans émotion.

Tesfia avait senti de la sueur froide couler dans son dos. Mélissa avait inversé sa prise sur l’un des couteaux et avait laissé l’élan porter son attaque vers le cou de Tesfia.

Le couteau avait voyagé avec un mouvement propre. Tesfia s’était fiée à son intuition pour tordre son cou et l’esquiver. Plusieurs mèches de cheveux cramoisis avaient volé dans l’air.

Mais cela n’avait pas suffi à Mélissa pour relâcher son attaque, elle avait tourné sa hanche pour attaquer avec le couteau dans son autre main.

Malheureusement pour Tesfia, elle n’était pas encore capable de retirer le katana qu’elle venait d’utiliser. Elle ne pouvait pas à cause de la pression qu’elle subissait.

Mélissa avait attaqué en maniant habilement ses couteaux, ne lâchant pas prise pour permettre à Tesfia de reprendre son souffle. Pour chaque attaque que Tesfia pouvait faire avec son katana, Mélissa tailladait deux à trois fois avec ses couteaux.

Tesfia n’avait pas l’air de pouvoir esquiver la prochaine attaque. Parce qu’elle s’était déséquilibrée pour éviter la dernière attaque, sa jambe était soulevée du sol. Avec le couteau qui s’approchait devant ses yeux, elle avait jeté son regard vers le bas et avait invoqué de force une immobilisation.

Elle avait perdu beaucoup de mana à cause des murs absorbants, mais elle avait réussi à l’activer par la force brute et avait gelé le bas du pied de Mélissa pendant un moment. Avec ça, elle avait réussi à empêcher Mélissa de faire un pas de plus vers son attaque mortelle.

Le couteau était passé juste sous le menton de Tesfia. Un instant plus tard, Mélissa avait arraché de force son pied de la glace et lui avait donné un coup de pied dans l’abdomen.

Même dans l’angoisse, Tesfia avait utilisé le coup de pied pour faire un saut arrière, et avait pris ses distances.

Son visage se tordait de douleur tandis qu’elle se laissait tomber à genoux, utilisant son katana pour se soutenir. Elle leva une main pour vérifier son cou, mais elle n’avait qu’une égratignure. Reprenant son souffle, elle se releva précipitamment.

Mélissa en profitait pour vérifier sa jambe qui avait été gelée. Son sang-froid en disait long sur l’écart entre leurs capacités.

Mélissa avait légèrement ajusté sa prise sur l’un de ses couteaux. Sa formule magique brilla alors que le mana la traversait. Elle avait bougé ses lèvres, marmonnant une incantation.

L’instant suivant, une barrière polyédrique était apparue devant elle.

Cela rappelait la Réflexion d’Alice, mais contrairement à la Réflexion qui ne fonctionnait que sur la lame elle-même, celle-ci fonctionnait à une échelle bien plus grande.

Le polyèdre avait la forme d’une gemme taillée, et ressemblait fortement à la Réduction, la version supérieure du sort. Il était principalement utilisé pour contrer les attaques, donc bien sûr il n’y avait aucun intérêt à l’utiliser avant que l’adversaire ne fasse son mouvement… du moins, c’est ce que Tesfia pensait.

« — ! »

Mais Tesfia s’était retrouvée à regarder avec étonnement, réalisant qu’elle avait mal compris. Ce n’était pas quelque chose qu’Alice avait utilisé. En effet, ayant une affinité avec l’élément lumière, Mélissa pouvait aussi l’utiliser.

Tesfia ne savait pas ce qu’elle pensait, mais Mélissa avait balancé son couteau sur le sort et l’avait brisé, envoyant des fragments de celui-ci.

Elle fut étonnée un instant, mais ce n’était pas comme si la construction avait été brisée… elle réalisa instinctivement qu’il s’agissait de la version complète de son sort.

Des fragments flottaient autour de Tesfia. Et ils avaient tiré vers elle comme des chevrotines. Un simple coup d’œil avait suffi pour lui dire qu’elle ne pouvait pas tous les bloquer.

Alors qu’elle utilisait son katana comme support pour se relever, son visage se tordit de douleur et son genou se déforma un peu. Elle avait esquivé un coup fatal, mais elle s’était pris une entaille au mollet sans s’en rendre compte.

Mais Tesfia ne put rester stupéfaite qu’un instant, car peu après, les fragments de lumière fendirent l’air et s’abattirent sur elle. Elle se couvrit rapidement la tête, mais ce n’était pas suffisant pour la protéger.

L’instant d’après, Tesfia avait senti que quelqu’un la couvrait. Cette personne s’était jetée sur elle pour la protéger.

Finalement, la pluie torrentielle de fragments de lumière s’était arrêtée.

Tesfia avait écarté ses bras, ouvrant lentement les yeux. Elle pouvait sentir quelques coupures, mais elle avait évité tout ce qui était mortel.

Quand elle se retourna, elle vit Alice qui souriait de soulagement. Elle essayait toujours de protéger Tesfia, et laissa échapper un soupir, « Dieu merci. »

Mais ayant pris la place de Tesfia, elle avait eu quelques fragments poignardés dans le dos. L’instant d’après, les fragments avaient disparu comme dans une brume, mais ses blessures horribles étaient restées.

« Alice ! »

« Je vais bien, Fia. Ce n’est rien… Loki chérie nous a protégées. »

Loki avait atterri devant elles, un couteau AWR serré entre ses doigts. Ce petit dos semblait si fiable en ce moment. Cependant…

Son bras s’était soudainement affaissé, et le couteau était tombé de sa main. Au même moment, des gouttes de sang avaient coulé de ses doigts.

« Loki ! » « Loki chérie ! »

Elle s’était retournée comme pour répondre à leurs voix. Il y avait du sang sur son visage, et elle portait une expression amère. « Pour être honnête… Je ne sais pas pourquoi j’ai fait quelque chose comme ça. Peut-être que j’ai été influencée par quelqu’un, » avait-elle dit sur un ton d’autodérision, mais il n’y avait aucun regret dans sa voix. Au contraire, elle semblait surprise.

Bien sûr, l’ordre d’Alus d’aider les deux filles était sa motivation, mais quand elle y pense maintenant, elle n’avait aucune attente à l’instant où elle avait bougé son corps. Elle était habituée à la douleur, mais cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas subi une blessure aussi grave.

Alus était une chose, mais pourquoi avait-elle utilisé son corps pour protéger les deux filles — ?

C’est un sentiment si étrange. Loki était sûre qu’Alus ressentait la même chose, mais elle garda sa question pour plus tard, une fois cette mission terminée.

Il y avait tellement d’irrégularités dans cette mission… à commencer par la rousse qui était avec eux.

« J’ai donc perdu l’usage d’un bras. Un sort où la seule option est d’esquiver tout, c’est quand même problématique. »

L’essence de ce sort était la réflexion. Comme il appartient au rang le plus élevé des sorts de lumière, toute magie utilisée pour le combattre se retournerait probablement contre l’utilisateur.

« … C’est probablement le Phasm Clasma, » dit Alice en nommant le sort. Comme il faisait partie de son propre attribut, elle l’avait gardé en mémoire.

« … Je déteste l’élément lumière, » dit Loki en fronçant les sourcils, tenant son bras gauche temporairement inutilisable. « Eh bien, malheureusement, je ne vous serai pas d’une grande utilité au combat, mais allez-vous continuer ? » demanda-t-elle, mais elle était sûre qu’Alice n’abandonnerait pas.

Alors que Loki s’était proclamée comme n’étant pas d’une grande utilité, c’était simplement en termes de combat tout en les protégeant. Si elle se battait sérieusement contre Mélissa, Loki avait de bonnes chances de gagner.

« Oui. Je vais me ressaisir et continuer. J’ai pris ma décision… Alors merci, Loki chérie, Fia. »

Endurant sa douleur, Alice s’était levée. Et avait fait un pas en avant vers Mélissa.

« Tu n’as pas besoin d’être si réservée. Je ne suis peut-être pas d’une grande aide, mais je pense que je peux faire quelque chose. » Tesfia vérifia sa jambe, et s’aligna à côté d’Alice. Au vu de ses blessures, il était douteux qu’elle puisse se battre. Malgré cela, elle voulait soutenir sa meilleure amie jusqu’à la fin.

Loki les observait sans mot dire. Depuis qu’elle s’était consacrée aux cruelles batailles du Monde extérieur, l’atmosphère entre ces deux-là était étrangement éblouissante.

Par-dessus tout, elle avait l’impression de regarder un idéal qui lui avait échappé. Non, Loki n’avait même pas le droit d’avoir un tel idéal, donc ça n’avait pas tout à fait de sens… mais si elle n’avait pas été elle-même, si elle avait mené une autre vie à une autre époque, elle aurait pu être à leur place.

Cependant… tant que quelque chose ne changeait pas fondamentalement, Tesfia et Alice n’avaient aucune chance de gagner. Loki avait décidé de continuer à les surveiller.

Ignorant leur douleur, les deux femmes avaient rapidement recommencé leur affrontement avec Mélissa. Si elles baissaient leur garde un seul instant, elles perdraient leur vie. Cela démontrait clairement la grande différence de capacité entre elles.

☆☆☆

Partie 6

De manière assez inattendue, cependant, l’attaque de Mélissa n’avait pas été fatale pour les deux filles. Elle n’avait même pas fait beaucoup de dégâts.

Il y a quelque chose d’étrange…

Loki regardait fixement la bataille, sentant que quelque chose n’allait pas. Les mouvements de Mélissa devenaient plus lents. Il y avait un retard dans ses mouvements. Et ce retard dans la réaction créait progressivement une grande ouverture.

Mélissa s’était retirée de la portée d’attaque de la lance rapide d’Alice.

L’expression d’Alice n’était pas seulement remplie d’une grimace de douleur. Il y avait eu une période où Mélissa et elle ne se connaissaient pas du tout. Et Alice se donnait littéralement à fond, comme pour montrer ce qu’elle avait appris durant cette période.

Le mana recouvrant son naginata montrait une lumière forte et raffinée. Bien qu’elles utilisaient toutes les deux l’élément lumière, le mana d’Alice avait un éclat plus brillant.

Son attaque suivante visant l’arme de Mélissa n’avait pas réussi à la faire tomber de ses mains, mais combiner à l’élan, Alice avait réussi à envoyer le couteau et le bras de Mélissa en arrière.

Ayant perdu l’équilibre, Mélissa avait immédiatement balancé son couteau contre la fille aux cheveux rouges qui l’approchait par-derrière. Bien sûr, avec son équilibre ruiné, son attaque n’avait pas la même vitesse qu’avant.

Tesfia avait calmement utilisé toute sa force pour frapper le couteau. Ce coup, avec toute sa force, elle avait réussi à faire tomber le couteau de la main de Mélissa.

Mélissa avait été laissée sans défense pendant un moment.

« Alice ! » Ne manquant pas leur ouverture, Tesfia avait donné le signal à Alice.

Alice avait hoché la tête et avait levé son naginata, prêt à le déplacer pour frapper, quand ses yeux avaient rencontré ceux de Mélissa.

Soudain, sa bouche s’était mise à trembler. Tout ce qu’elle avait à faire était de déplacer son naginata vers sa cible, mais elle restait immobile avec la pointe de sa lame en l’air.

« Je ne peux pas le faire… »

La voix qui s’était échappée de ses lèvres était pleine de chagrin. De grosses larmes coulaient sur ses joues.

Loki, qui regardait, avait plissé les yeux. Manquer cette chance était une gaffe majeure, et cela laissait place à une ouverture fatale. C’était maintenant Alice qui était sans défense face à l’ennemi.

Mais quelque chose d’autre avait changé avant que Loki puisse se précipiter pour aider.

Se remettant de sa posture déséquilibrée, Mélissa avait de nouveau brandi ses couteaux… les pointes, cependant, s’étaient arrêtées. Ses yeux étaient aussi vides qu’avant… mais une larme coulait de l’un d’eux. Les mouvements de ses bras semblaient retenus.

« … Mélissa !? »

« A… Alice… »

Mélissa bougea maladroitement sa bouche en réponse à la voix timide d’Alice. Une pointe d’émotion avait commencé à envahir son expression. Au fur et à mesure que les larmes coulaient, le sourire sur son visage commençait à ressembler à celui qu’Alice connaissait.

Mais les mots qu’elle avait prononcés ensuite avaient fait se contracter le cœur d’Alice, qui avait souffert.

« Euh… tue-moi. »

Avec un sourire toujours sur son visage, Mélissa avait dit quelque chose qui avait fait douter Alice. Et les bras de Mélissa tremblaient pendant qu’elle le disait. Une partie d’elle essayait de frapper avec les couteaux, tandis qu’une autre partie d’elle essayait de les arrêter. C’était comme si deux côtés d’elle se disputaient le contrôle de son corps.

Des larmes coulaient sur le visage d’Alice. « Je ne peux pas… Je ne peux pas le faire, Mélissa. »

La lumière dans les yeux de Mélissa avait vacillé, et l’instant d’après elle avait frappé avec son couteau.

Tesfia avait sauté sur Alice, la repoussant juste à temps.

« — !? » Mais Tesfia avait ressenti une sensation de chaleur brûlante dans son dos, comme si elle avait été coupée. De la sueur s’était accumulée sur son front. Et des larmes avaient aussi commencé à couler de ses yeux.

Ces gouttelettes chaudes étaient tombées sur les joues d’Alice. « Je suis désolée, Alice. Je suis vraiment égoïste… »

Tesfia n’avait pas pris la peine d’essuyer ses larmes et s’était levée pour faire face à Mélissa, son AWR dans les mains. « Si tu ne peux pas le faire, je le ferai. Elle était peut-être la seule personne que tu avais dans le passé, mais tu m’as maintenant. Et je m’inquiète pour toi et je te chéris aussi. Si tu ne peux pas te battre, alors je le ferai pour toi. Je suis aussi ton amie, Alice… »

 

 

Le katana dans sa main tremblait légèrement. Elle ne voulait pas non plus tuer quelqu’un. Surtout pas quelqu’un d’aussi précieux pour Alice. Elles avaient été des amies qui avaient partagé joie et douleur ensemble dans le passé. Et c’était sûrement grâce à Mélissa qu’Alice était ce qu’elle était maintenant.

Mais Tesfia avait quand même choisi de le faire. Parce qu’Alice était si précieuse pour elle.

Elle avait beau essayer de s’en convaincre, son cœur qui s’emballait faisait trembler ses mains et sa vision se déformait.

C’était une chose étrange… pour qui pleurait-elle ? Mais non, ce n’était pas ça. Ses larmes étaient celles d’Alice. Et c’était probablement aussi celles de sa vieille amie.

Dans sa main se trouvait un katana, une arme mortelle. Tesfia s’était avancée devant Alice, qui s’était effondrée en larmes… c’était sa tentative pour l’empêcher de voir ce qui allait se passer.

Pendant ce temps, les yeux remplis de larmes d’Alice fixaient sa meilleure amie. Elle n’arrivait pas à exprimer quoi que ce soit à cause de l’hésitation présente de son cœur. Elle ne pouvait pas se résoudre à mettre fin à la vie de Mélissa. Le simple fait de l’imaginer suffisait à faire naître en elle un sentiment écrasant de refus.

Mais Alice n’avait aucune envie de se battre ou de fuir. À ce rythme, elle ne ferait rien pendant que sa meilleure amie se salirait les mains… ou plutôt, elle ferait en sorte que Tesfia se salisse les mains.

« En es-tu sûre ? »

Soudain, Alice avait entendu la voix de Loki dans son oreille. Sa voix était calme, ayant parcouru une certaine distance, et ses mots s’enfonçaient lentement dans le cœur d’Alice. C’était une question simple, qui ne la blâmait ni ne lui en voulait.

Les épaules d’Alice avaient tremblé et elle avait lentement baissé la tête.

Voyant cela, Loki avait utilisé son bras droit pour sortir un couteau. Si Alice confiait ça à Tesfia, elle ferait son mouvement. Cela ne ferait aucune différence de savoir qui était celle qui tuait réellement Mélissa. Et Loki avait déjà utilisé son corps pour répondre à l’ordre d’Alus auparavant.

Loki ne savait pas comment cela fonctionnait, mais elle considérait calmement que le retour à la conscience de Mélissa n’était que temporaire. Si elle manquait l’opportunité, quelqu’un mourrait. Et elle n’était toujours pas convaincue que Tesfia pouvait prendre cette décision, elle non plus. Ce n’était pas quelque chose qui pouvait être fait juste en frappant sans réfléchir.

Sentant ce changement chez Loki, Alice se retourna docilement pour la regarder. Ses longs cils étaient mouillés de larmes.

« Comme l’a dit Sire Alus… si c’est ce que vous avez décidé, alors c’est bien. Mais ne le regretterez-vous pas si vous laissez cette décision à Mme Tesfia ? »

Loki continua calmement. « Sire Alus et moi pensons tous deux au bon choix lorsqu’on nous presse de prendre une décision. Non, je suis sûre que tout le monde le fait. Vivre dans ce monde vous oblige à accumuler les décisions de ce genre. Mais je suis sûre que Sire Alus sait qu’il n’y a pas de bon choix. Alors je suis sûre qu’au final, ce que vous déciderez pour vous-même sera correct. »

« Loki chérie… »

Une certaine émotion amère se mêlait aux yeux doux de Loki. Ce n’était pas dirigé contre l’hésitation d’Alice, mais plutôt contre elle-même.

Elle parlait après avoir connu le regret qui engendre d’autres regrets. La dernière étape pour ceux qui avaient échoué était un état d’esprit rempli d’autosatisfaction égoïste. Comme les ombres suit la lumière, tant qu’une personne est en vie, elle éprouve des regrets. Mais ceux qui n’avaient pas du tout choisi ne verront jamais le meilleur résultat.

Alice s’était retournée pour regarder le dos de Tesfia. Ce dos petit, mais fiable essayait désespérément de la protéger, ces cheveux roux familiers se balançant dans l’air. Ce dos lui rappelait celui de Mélissa quand elles étaient jeunes.

Puis, tout d’un coup, Alice avait compris.

Elle voulait devenir comme une grande sœur, respectée par tout le monde, assez forte pour ne pas seulement être protégée, mais aussi pour protéger. Tout comme elle avait été sauvée une fois, c’était maintenant à son tour de sauver Mélissa. Si elle restait comme ça, elle ne ferait sûrement que la décevoir.

« Merci, ma chère Loki. » Alice avait essuyé ses larmes. Elle avait saisi fermement son naginata et se leva. À pas réguliers, elle s’avança et appela la fille aux cheveux rouges.

« Fia. J’ai pris ma décision, alors laisse-moi faire le reste. »

« Alice… »

Alice semblait avoir retiré un poids sur ses épaules. Elle avait posé sa main sur les mains tremblantes de Tesfia. Prenant une longue inspiration, Tesfia avait lentement abaissé sa lame.

Mélissa avait pu résister à son corps qui bougeait contre sa volonté. Et un sourire soulagé était apparu sur son visage lorsqu’elle avait vu Alice se tenir devant elle.

« Je suis désolée que ce soit tout ce que je puisse faire. » Après avoir versé d’autres larmes, Alice les avait essuyées du revers de la main et avait essayé de sourire du mieux qu’elle pouvait.

« … Alice, s’il te plaît. » Mélissa avait souri à Alice quand elle l’avait vue positionner son naginata.

À cet instant, les dernières forces de la jeune femme semblaient lui échapper, elle perdit le contrôle de sa main et dirigea son couteau vers Alice, le sourire toujours aux lèvres.

Mais comme si elle l’avait vu venir, Alice avait balancé son naginata dans sa trajectoire, coupant le couteau et la main blanche et maladive qui le tenait.

Et avec un jeu de jambes fluide, elle avait levé son naginata. La seule chose qui restait à faire était de l’abaisser.

Mélissa avait laissé toutes ses forces quitter son corps, attendant tranquillement la fin avec les yeux fermés. Elle avait voulu rester aux côtés d’Alice pour la voir grandir… mais même ce désir sombrait maintenant dans un profond sommeil.

Elle voulait qu’Alice regarde l’avenir plutôt que le passé. Qu’elle regarde ceux qui soutiennent l’avenir, et non ceux qui vont mourir.

En jetant un dernier coup d’œil à la fille rousse derrière Alice, Mélissa avait laissé un sourire naturel apparaître sur son visage.

Mais ce qui était arrivé ensuite n’était pas une attaque pour mettre fin à sa vie, mais le doux impact d’une étreinte.

Le naginata qu’elle tenait haut avait glissé de la main d’Alice, et à la place elle avait étreint Mélissa avec tout ce qu’elle avait.

« Quoi — !? »

« — !! »

L’action d’Alice avait surpris Tesfia et Loki, et aucune d’entre elles n’avait été capable de parler. Personne n’avait été capable de réagir à ce geste totalement inattendu.

Sa décision était illogique, et apparemment c’était même un sacrifice, puisqu’elle avait renoncé à la bataille elle-même.

Alors que Tesfia était étonnée, elle avait réalisé que c’était exactement comme était toujours Alice.

Cependant, sa décision était un pari qui ne ferait même pas une bonne histoire. Incapables de s’adapter à l’impact, les deux femmes étaient tombées.

Peu après, au mépris total d’Alice, la main de Mélissa avait bougé mécaniquement et sans son intention, le couteau se rapprochant à nouveau.

Qu’Alice en soit consciente ou non, elle avait parlé. « C’est la seule chose à laquelle j’ai pensé. C’est la seule façon pour moi de ne pas avoir de regrets. Alors je suis désolée, Mélissa. » Alice avait un sourire éclatant sur le visage.

Et en réponse… le coup de couteau venant de derrière s’était soudainement arrêté, et le couteau était tombé de sa main. À sa place, Mélissa avait doucement posé sa main sur le dos d’Alice. « Tu n’as pas changé du tout, Alice. »

« — ! Melissa ! Est-ce que tu vas bien ? Tu es consciente !? »

« Oui. Je suis un peu dans le brouillard, mais… Je vais bien, grâce à toi. »

Mélissa avait regardé Alice d’un air hagard, un de ses yeux étant fermé. Le sentiment qu’elle pouvait disparaître à tout moment était inchangé, mais la lumière dans ses yeux était revenue.

☆☆☆

Partie 7

Voyant que la menace était passée pour l’instant, Loki avait immédiatement haussé la voix. « Sire Alus !! »

Alus était encore au milieu d’une bataille féroce contre Godma, mais il avait rapidement répondu à son appel et avait pointé la paume de sa main vers elles.

L’instant d’après, une barrière magique entourait les quatre filles.

Avec ça, Alus pouvait y aller à fond. Au moins, il n’avait pas à s’inquiéter qu’elles soient prises dans les flammes de la bataille.

Pendant ce temps, à l’intérieur de la barrière, Tesfia s’était effondrée, la force ayant quitté ses jambes.

Alors qu’elle regardait son environnement avec surprise, Loki l’appela fièrement. « C’est la magie de Sire Alus. »

« … Ah bon sang, qu’est-ce que c’est ? S’il pouvait faire quelque chose comme ça, il aurait dû le faire depuis… oh, c’est vrai. » Ayant compris la situation, Tesfia avait regardé Alus avec une expression douce.

Le combat acharné était trop rapide pour qu’elle puisse le voir. Elles avaient atteint la fin avec chacune d’entre elles encore en vie. Levant ses lèvres en un sourire, Tesfia avait décidé de ne rien dire de plus.

 

***

Au milieu de son combat contre Godma, Alus avait jeté un coup d’œil vers Alice et les autres filles à l’intérieur de sa barrière.

Emmener Tesfia était le bon choix.

Maintenant qu’il était un Mamono, la vitesse de réaction et le physique de Godma étaient équivalents à ceux d’Alus. Bien sûr, c’était parce qu’Alus évitait d’utiliser des sorts et de se battre de près.

En fait, il attendait que les filles terminent les choses de leur côté. La barrière qu’il avait jetée autour d’Alice et des autres filles était par égard pour elles, pour qu’elles puissent respirer un peu, et pour empêcher Godma de faire quelque chose d’inutile.

Comme Tesfia l’avait remarqué, il aurait pu le faire à n’importe quel moment, mais en prenant en considération le destin entrelacé d’Alice et de Mélissa ainsi que les sentiments de Tesfia, il s’était retenu de le faire. Mais plus rien ne l’empêchait de le faire.

De plus, alors que leur force physique était équivalente, il y avait une nette différence dans l’endurance. Le corps de Godma, surtout sa carapace extérieure, était assez résistant aux coups. Alus, en revanche, était fait de chair et d’os, et il avait des blessures partout, y compris la grosse sur son épaule.

Parce que le poids des coups de Godma était plus important, Alus serait désavantagé plus le combat se prolongeait.

Esquivant le bras gigantesque de Godma, Alus avait frappé à plusieurs reprises son articulation avec la brume nocturne. Mais comme prévu, chaque coup de couteau ne touchait que superficiellement la peau ressemblant à une carapace. De plus, il était incapable d’esquiver complètement les griffes, et elles avaient coupé dans son épaule et déchiré sa chair.

Alus fit claquer sa langue, et tourna autour de son AWR qui était toujours planté dans l’articulation de Godma. Alors qu’il était à l’envers, au milieu de son mouvement, il donna un coup de pied au cou de Godma. Pourtant, son corps robuste n’avait pas bougé, et son cou n’avait que légèrement basculé.

Ce faisant, il avait sorti la brume nocturne et s’était éloigné du corps de Godma en prenant de la distance.

Godma avait fixé Alus alors que sa tête se remettait lentement en place. Ses pupilles s’étaient encore plus rétrécies. Il avait complètement verrouillé sa cible, mais il avait ensuite déplacé ses yeux pour regarder Mélissa à l’intérieur de la barrière d’Alus. « Comme prévu, je n’aurais pas dû laisser son sens de l’autonomie intact. Ou peut-être que c’est le facteur d’Alice qui l’a ramenée. Hm, hm, hm, dans tous les cas, je suppose que je n’aurais pas pu le prévoir. »

En lâchant un rire bestial, Godma avait regardé Mélissa comme s’il fixait une proie. Il avait ensuite utilisé sa main gauche encore un peu humaine pour couvrir son visage. « J’aurais dû la manipuler un peu plus quand j’en avais l’occasion. C’est malheureux, mais je suppose que je vais la faire servir une dernière fois… »

Avec ces mots, le mana s’était rassemblé au bout des doigts de Godma, dessinant un cercle magique géométrique. Le cercle était aussi rouge que le sang.

Godma avait planté son doigt en son centre. « Le repos embrasse le sacrifice, et invite les ancêtres — “Senas Requiem” »

Un cri était venu d’une direction différente de celle d’Alus, qui se tenait sur ses gardes.

Ça venait de l’intérieur de la barrière en forme de dôme.

Mélissa hurlait, une lumière sinistre s’élevant dans sa poitrine. Elle s’agrippait à elle-même, incapable de supporter cette douleur inimaginable.

« Aaaaa — Aaaaaaah… !! »

« Mélissa ! Mélissa ! »

Alice l’avait prise dans ses bras. Mais Mélissa ne montrait aucun signe de calme, et à cause de sa force, ses ongles s’enfonçaient dans sa poitrine. À ce rythme, elle pourrait même se déchirer.

Sa douleur n’était pas l’effet de l’utilisation par Godma d’un sort tabou, mais plutôt le coût de celui-ci, et cela n’avait pas d’importance qu’elle soit à l’intérieur d’une barrière magique ou non.

Dans le pire des cas, si vous restez dans la barrière, Alice et les autres filles pourraient être prises dans la barrière.

Godma s’en était rendu compte, et ses lèvres s’étaient relevées en un sourire inquiétant. « Dépêche-toi de mourir et de subir ton châtiment, Mélissa. Je ne peux pas m’attendre à quelque chose du niveau de l’attaque de l’Institut, mais en retour, je n’aurai pas besoin de faire des ajustements complexes pour le but… tant que je peux utiliser ce sort tabou, je peux vaincre Alus Reigin et prouver la valeur de mes recherches ! »

« Al... s’il te plaît, sauve Mélissa ! S’il te plaît, je ferai n’importe quoi ! » Alice le suppliait dans une crise de larmes, jetant tout aux pieds d’Alus.

« … »

Cependant, Alus était resté silencieux, ne lui donnant pas de réponse. Il ne pouvait pas.

Mélissa le regardait droit dans les yeux, en secouant faiblement la tête. Elle l’implorait sincèrement de ne pas intervenir. Elle avait tout compris, et elle allait régler ça elle-même. C’est ce que ses yeux lui disaient.

En fait, tout ce qu’Alus pouvait faire était de se fier à une seule méthode maladroite, quelque chose qu’il avait fait d’innombrables fois, le salut par la mort. Contrairement à cette fois avec Loki, il avait expérimenté ce sort deux fois maintenant, et il savait que ce tabou n’avait pas de catalyseur externe.

Le sort tabou connu sous le nom de Senas Requiem utilisait le cœur comme catalyseur.

Son cœur avait été altéré par Godma, de sorte que la simple utilisation de la formule d’activation forçait la construction du sort. Le seul moyen de la sauver était de lui arracher le cœur. Bien sûr, cela mettrait également fin à sa vie.

C’était un tabou à cause de la nature cruelle du sort. Le sacrifié mourrait quoiqu’il arrive.

« Pourquoi, pourquoi… ? »

Alice était soutenue par Tesfia, alors que le désespoir l’envahissait. Son visage était déformé par la colère et les larmes lorsque Mélissa avait soudainement tendu la main pour lui caresser la joue.

« C’est bon, Alice. Il y a des choses que même lui ne peut pas faire. De plus, je dois faire face à ma punition. Alors, s’il te plaît pardonne-moi, Alice. »

Alice tenait avec amour la main blanche qui lui caressait la joue. « Tu n’as pas besoin de dire ça. Tu vas t’en sortir. Nous allons te sauver. »

Le rire de Godma avait résonné dans la pièce en attendant l’activation du sort.

Mélissa avait donné à Alice un sourire fugace. La même forme géométrique que Godma avait créée était déjà gravée dans sa poitrine, alors qu’elle respirait lourdement. Maîtrisant ses respirations rapides et superficielles, elle avait fait appel à sa dernière volonté.

Et dirigea un ricanement plein de pitié vers Godma. « Je ne laisserai pas les choses se passer comme tu le souhaites, Godma ! Je ne me laisserai pas tuer par des gens comme toi… c’est vrai, je ne laisserai personne être responsable de cette fin ! »

Elle retira sa main de la joue d’Alice surprise, et leva le couteau dans sa main gauche… avant de le plonger dans sa poitrine.

Le silence s’était installé dans la pièce.

La formule magique gravée dans le cœur de Mélissa avait cessé de fonctionner, et le sort tabou qui semblait devoir s’activer à tout moment s’était effondré, disparaissant alors même que Godma poussait un cri de colère.

Alus avait tranquillement observé la scène. Il s’y attendait un peu depuis qu’il avait accepté son appel silencieux. Et la raison pour laquelle il n’avait pas pris de mesures pour arrêter le sort tabou de Godma était qu’il n’avait pas à le faire.

Alice avait crié avec un chagrin déchirant. Loki avait baissé les yeux, et Tesfia s’était tenue à côté d’Alice avec une expression de deuil.

« Mélissa, pourquoi… ? Je n’ai jamais voulu que tu partes, plus jamais… ! » Un flot ininterrompu de larmes s’était déversé des yeux d’Alice. Elle avait désespérément pressé ses mains contre la poitrine de Mélissa, essayant d’empêcher le sang de s’écouler du coup de couteau. Mais rien de ce qu’elle pouvait faire ne pouvait changer quoi que ce soit maintenant.

« Merci, Alice. Je suis si heureuse d’avoir pu te voir avant la fin. S’il te plaît, continue à regarder devant toi à partir de maintenant. Ne regarde pas en arrière, et ne t’arrête pas… parce que ton bonheur est mon bonheur. Et je suis heureuse… d’avoir pu te le faire savoir. »

L’épuisement de Mélissa était évident pour tout le monde. Il n’était pas clair si ses yeux pouvaient encore voir Alice.

Soudain, sa main avait dérivé dans l’air. Elle avait faiblement attrapé la main de Tesfia et lui avait parlé. « S’il vous plaît, prenez… soin d’Alice… s’il vous plaît, prenez soin d’elle… »

Sa voix, qui s’affaiblit progressivement, résonna dans le cœur de Tesfia. Tesfia lui avait répondu en hochant la tête à plusieurs reprises. À cause de ses yeux mouillés, des larmes s’étaient répandues sur son visage.

Mélissa avait réalisé qu’elle était en train de mourir, et elle avait appelé Alice, lui demandant de lui raconter une histoire qu’elle pourrait écouter jusqu’à la fin.

Alice étouffa ses larmes et commença à parler. Elle n’avait pas eu assez de temps pour lui raconter tout ce qui s’était passé depuis qu’elles s’étaient séparées, alors son histoire était incohérente et fragmentée.

Mais cela avait quand même semblé satisfaire Mélissa, car un sourire paisible était apparu sur son visage.

Alors que la fin était sur le point d’arriver, Alice s’était souvenue de quelque chose qu’elle devait demander à Mélissa. « Dis-moi, Mélissa. Tu te souviens de ce que tu as dit quand on s’est séparées au centre ? » Elle feignait le calme en parlant. Elle souhaitait pouvoir parler à Mélissa pour toujours afin de ne pas s’endormir, si c’était possible…

Finalement, Mélissa avait ouvert la bouche. « … Je me souviens. À l’époque, j’ai dit : “Retrouvons-nous”. Et ça s’est réalisé. »

Elle n’avait même pas eu la force de changer d’expression, alors qu’elle murmurait ces mots de ses lèvres exsangues à sa petite sœur bien-aimée.

 

 

… Mélissa avait dit un dernier mensonge à la fin. Avec ça, la promesse égoïste qu’elle avait faite ne resterait plus dans le monde.

La vérité, c’est qu’elle avait demandé à Alice de l’appeler à nouveau « sœur » un jour. Elle l’avait implorée par faiblesse. Elle avait peur de se retrouver seule. Elle voulait une famille, et elle avait chéri Alice pour ça. En y repensant maintenant, elle ne pouvait pas se le pardonner.

C’est Mélissa qui avait été sauvée de ces jours d’enfer à l’époque. Alors elle avait prié… pour qu’Alice la considère à nouveau comme une grande sœur si elle avait une autre chance de la protéger.

Mélissa se souvenait de ces jours où elle avait été ensemble avec la jeune Alice. Elle était satisfaite rien qu’en pensant au petit bonheur qu’elles avaient partagé à l’époque. Son monde devenait sombre maintenant, mais elle n’avait pas peur. Au contraire, elle se sentait satisfaite.

Elle ne pouvait même pas bouger un doigt maintenant. Ni ses lèvres, ni ses yeux, ni même ses sourcils. Même cette voix lointaine dans son oreille s’était affaiblie.

« Sœur… Sœur. »

Ah, Alice. Ma chère Alice… merci.

Une seule larme avait coulé de ses yeux fermés, et son heure était venue. Et la main qu’Alice tenait avait perdu toute force, lui faisant savoir qu’elle était morte.

 

***

Ayant assisté à la fin de Mélissa du début à la fin, Godma cracha son dédain. « C’est ce qui arrive quand un animal de compagnie désobéit à son maître. Tu parles d’une marionnette défectueuse. On pourrait appeler ça la plus grande tache sur mon…, »

avant qu’il ne puisse dire un mot, Godma avait senti un froid glacial derrière lui.

En tournant son bras, il avait été arrêté par le bras d’Alus, plus solide qu’un mur épais. Le poing qui était plus gros que la tête d’un homme avait été facilement arrêté par ce qui semblait être un garçon mince.

Sans même avoir le temps d’être surpris, le visage d’Alus était juste devant lui. Derrière cette frange se trouvaient des yeux froids, apparemment remplis de folie, qui fixaient Godma. « Meurs maintenant. »

Godma leva son bras par réflexe, rassemblant du mana pour se défendre contre le prochain coup. Mais avant qu’un quelconque sort ne puisse être activé, sa structure géante fut figée en un instant.

Mistlotein. Alus n’avait même pas dit le nom du sort.

☆☆☆

Partie 8

Au moment où Godma avait reconnu le sort, son corps était déjà une statue de glace.

Bien sûr, cela ne lui ferait rien. L’instant d’après, il avait utilisé son mana pour briser de force la glace. Il ne lui avait fallu qu’une seconde pour le faire.

Une fois libéré de la glace, Godma avait levé les yeux et l’avait vu. Avec un visage rempli d’effroi, il avait crié, « Q-Qui d’entre nous est le monstre… !? »

Avant que le sort en forme d’orbe lumineux ne soit activé, Alus s’était mis à l’abri à une certaine distance, à l’intérieur d’une barrière comme celle qui couvrait Tesfia et les autres filles.

« “Soleil Astral” »

Il était énorme et puissant. Et l’orbe avait encore grandi de deux tailles, et ses flammes étaient devenues encore plus intenses après avoir reçu une quantité apparemment infinie d’informations.

Il s’agissait d’un sort qui ne ressemblait qu’en apparence au sort de débutant Brûler. Celui-ci présentait des températures extrêmes, comme s’il s’agissait d’un soleil rétréci. Et il figurait parmi les meilleurs sorts de l’attribut feu.

« Gaaaaaahh !! »

La zone s’était immédiatement réchauffée. La barrière derrière laquelle Alus se cachait avait commencé à se déformer. Elle ne durerait qu’une douzaine de secondes de plus. Les murs blancs de la barrière avaient commencé à devenir rouges et à fondre, tandis que la composition même de la barrière d’Alus commençait à s’effondrer.

Sentant la température monter rapidement, il avait annulé le sort. S’il faisait une erreur dans une pièce fermée comme celle-ci, tout le monde pourrait mourir brûlé.

Alors qu’Alus annulait le sort, Godma était apparu à travers la fumée noire, à genoux. En raison de la chaleur extrême, certaines parties de son enveloppe extérieure avaient été gravement brûlées, et le sol autour de ses pieds était orange et il était sur le point de se dissoudre.

S’il n’avait subi que ce degré de blessure, c’était probablement parce qu’il avait utilisé à la hâte le mana qu’il avait accumulé et l’avait expulsé pour créer une coquille protectrice autour de lui.

Alus s’était approché de Godma et l’avait regardé sans expression.

Alors…

« — ! Aaaahhh !!! »

Un coup vers le bas, et un bras grotesque avait été coupé à sa base. La punition avait été transmise par la lame noire de la brume nocturne.

Godma avait balancé son autre bras en réponse, mais au moment où il avait bougé, Alus avait appliqué une pression gravitationnelle sur son coude, l’écrasant, le faisant tomber mollement sur le côté.

Ayant neutralisé les dangers provenant du Mamono, Alus avait déplacé sa lame en diagonale vers son torse.

Du sang vert avait giclé. Godma s’était effondré contre un mur.

C’était une conclusion accablante. Cependant, Alus ne l’avait pas achevé.

Voyant cela, Loki avait couru vers lui. « Sire Alus, je vais soigner vos blessures… »

« … ! Ce n’est pas grave. » Ne cachant pas sa surprise, comme s’il venait de s’en rendre compte, Alus regarda vers Loki.

Alice s’était lentement dirigée vers Godma. Tesfia fixait son dos pendant qu’elle allait, jetant un coup d’œil à Mélissa.

L’apparence de Godma n’avait plus rien à voir avec celle qu’il avait lorsqu’il était humain. Des parties de lui se décomposaient et tombaient. Sa carapace grotesque se détachait d’elle-même.

Le sang qui s’écoulait de sa bouche était toujours vert, mais son corps commençait maintenant à redevenir progressivement plus humain. Son bras restant gonflé commençait à avoir l’air plus humain. Mais la couleur dorée de ses yeux n’avait pas du tout changé.

« Ouf… on dirait que ça n’a rien donné, » dit faiblement Godma avec chagrin, son corps toujours appuyé contre le mur. Quoi qu’il en soit, ce n’était qu’une question de temps maintenant.

Alus avait regardé le perdant de haut. Puis — « Elle est là. »

Une femme avait sauté par le trou que Godma avait ouvert auparavant, et avait atterri en silence. Assez rapidement, ses longs cheveux noirs flottants s’étaient remis en place. « Est-ce déjà fini ? »

« Feli, que s’est-il passé là-haut ? »

« Vous n’avez pas à vous inquiéter. L’extermination des poupées qui se sont échappées a déjà commencé, et… il n’en reste que quelques-unes. Voulez-vous voir ? »

Vizaist savait aussi utiliser un sort pour se faire une idée de la situation. Mais le terme « voir » avait suscité un regard perplexe de la part d’Alus.

Felinella lui avait répondu en lui demandant d’attendre un moment. Elle s’était approchée de lui et, alors qu’ils se faisaient face, elle avait pris sa tête en sandwich entre ses mains. Ses joues étaient devenues légèrement rouges et elle avait appuyé son front contre le sien.

« “Vue aérienne, lien” »

Une vision de la zone environnante était apparue dans l’esprit d’Alus, ainsi que des points rouges et bleus dispersés à travers elle. Les points rouges étaient les poupées.

« Quoi !? » s’écria une voix choquée, appartenant sans aucun doute à Loki.

« Penser que tu pourrais faire quelque chose comme ça, c’est incroyable, Feli. »

« Merci ! » Un grand sourire était apparu sur le visage de Felinella.

« Mais… Je n’ai pas vu le commandant faire quelque chose comme ça. » Le sort de Feli était quelque chose que Vizaist aurait dû lui apprendre.

« Eh bien… il faut se toucher le front, donc…, » Felinella avait encore plus rougi.

Alus avait compris ce qu’elle voulait dire. La seule pensée de presser son front contre un vieil homme d’une cinquantaine d’années le déprimait. Et si ses joues devenaient aussi roses que celles de Felinella maintenant, ce serait une expérience traumatisante qu’il n’oublierait jamais. « … Tout sauf ça. »

« D’accord. » Felinella avait également rejeté l’idée qu’Alus et son père se touchent le front.

Dans le silence… Alice regardait un Godma mourant.

Et une voix froide l’appela de derrière. « Je te laisse le reste. Remets-le à l’armée, ou achève-le toi-même, fais ce que tu veux. » Alus s’était déjà désintéressé du sort de cet homme.

Godma avait faiblement levé les yeux vers Alice. « C’était une fin misérable, Alice. Mélissa s’est comportée comme une grande sœur même ici, traitant les poupées comme ses petites sœurs au lieu de toi. Elle n’était pas différente de ce qu’elle était au centre… »

Il se moquait de la mort de Mélissa. Mais Alice avait serré les dents et s’était tue.

« Tue-moi, Alice. Je suis l’homme qui t’a tout volé. Fais-le, et tu pourras te réjouir et te sentir satisfaite, » continua Godma, comme s’il cherchait à la faire enrager.

Alice fixait silencieusement son visage. Franchement, elle le détestait et le méprisait. La raison pour laquelle sa vie et son passé étaient un tel gâchis gisait impuissante juste devant elle. C’était la parfaite occasion de se venger.

Mais alors qu’elle le fixait, elle pouvait sentir sa haine s’estomper. Alice avait compris pourquoi. Si seulement elle avait pu le réaliser dans le passé. « Que vouliez-vous faire… en allant jusqu’à faire du mal aux enfants ? Nous n’étions pas des poupées avec lesquelles vous pouviez jouer », avait marmonné Alice d’un ton déchirant.

Le passé ne peut être changé, et pour une raison inconnue, elle avait ressenti de la pitié. Malgré la montagne de poupées sans âme qui parlaient des cruautés dont Godma était responsable.

« Non, vous êtes des poupées, chacune d’entre vous l’était. Alice, tes parents t’ont même vendu pour de l’argent ! Tout le monde est pareil. Ils acceptent volontiers une excuse commode comme quoi c’est pour le bien de l’humanité alors qu’ils se remplissent les poches d’or. »

Devenant peut-être désespéré, Godma avait commencé à faire pleuvoir des injures sur Alice pour la provoquer. Comme s’il essayait de la blesser, de faire ressortir la haine en elle.

Cependant, le cœur d’Alice n’avait pas changé. « Vous avez tort », dit-elle d’une voix calme, en secouant la tête. Elle tenait sa main au-dessus de sa poitrine. « Parce que ma mère et mon père venaient me rendre visite tous les jours. Ils m’ont chérie jusqu’à la fin… »

Des larmes avaient commencé à couler sur les joues d’Alice alors qu’elle se souvenait. Ces gouttes brillantes ne reflétaient que du bonheur. Elle ne pouvait pas lui pardonner, mais elle l’avait déjà fait.

Et maintenant, elle comprenait enfin la signification de ce que ses parents avaient fait à la fin. « Ils m’avaient acheté un gros animal en peluche. » Alice avait affiché un sourire nostalgique, à travers ses larmes.

Ses parents avaient perdu la vie dans un cambriolage. Même après avoir été poignardés, ils s’étaient accrochés à cette peluche jusqu’à la fin. Ils ne pouvaient pas la laisser se faire voler après l’avoir achetée pour le retour d’Alice, même s’il était impossible que des voleurs ne cherchant qu’à voler de l’argent la prennent.

Elle ne l’avait entendu que de manière indirecte, mais elle pouvait facilement les imaginer se comporter de la sorte. Alors que ses parents étaient décédés, leurs pensées étaient restées sur leur fille bien-aimée.

« Les choses se suivent. Ce que ma mère et mon père ont laissé derrière eux, les sentiments que Mélissa a transmis, et maintenant, alors que je suis sauvée par tant de gens… C’est pourquoi je ne veux pas lâcher le présent… l’avenir qui se poursuit à côté de nos liens. »

Il n’y avait jamais eu aucune raison d’hésiter. Et achever Godma serait sûrement une trahison. Et Mélissa avait pris sa propre vie pour empêcher cela, mettant fin à toute rancune qui pourrait résulter du fait que quelqu’un la tue, de ses propres mains.

Si Alice devait tuer Godma ici, elle ne pourrait pas rester là où elle est maintenant. Le présent qu’elle avait construit et qu’elle chérissait tant était bien trop heureux et précieux pour qu’elle le jette.

Ses retrouvailles avec Mélissa en étaient la preuve ultime. Après tout, il n’y avait aucun moyen de nier son lien avec Mélissa.

En y repensant, la dureté n’était pas la seule chose qu’elle avait ressentie. Peu importe à quel point elle en doutait, ça ne s’était jamais estompé. Que Mélissa se soit vraiment préoccupée d’Alice ou non, et quelles étaient ses véritables motivations n’était pas un problème.

Parce qu’en fin de compte… ce qui comptait vraiment, c’était ce qu’Alice ressentait à ce sujet.

Le lien qu’elle avait formé avec Mélissa était connecté à Tesfia, Alus et Loki, menant à un brillant présent. Et Alice ne pouvait pas souiller ça avec quelque chose d’aussi disgracieux que la vengeance. Si elle le faisait, elle ne pourrait plus jamais prendre leurs mains. Et elle ne pourrait pas affronter ses parents qui l’avaient élevée avec amour. C’est donc la réponse qu’Alice avait choisie.

« Ne sois pas stupide… et alors ? Es-tu sérieusement en train de dire que tu ne me détestes pas pour avoir joué avec toi, Mélissa, et d’innombrables autres expériences ? » Pris de court par la stupéfaction, Godma avait haussé la voix. Son ton semblait vain, et pourtant quelque peu étonné. Il était submergé par ces émotions irrationnelles et absurdes. Il n’y avait pas une seule trace de la haine et de la colère auxquelles il s’attendait dans les yeux d’Alice.

« Oui. Si c’est ce que Mélissa voulait… Je vous pardonnerai, » avait dit Alice d’une voix calme, en essuyant ses larmes du revers de sa main. « C’est pourquoi… Je ne vous laisserai pas souiller mon passé plus longtemps ! »

Après avoir dit ce qu’elle avait à dire, Alice avait pris une profonde inspiration et avait tourné la tête pour révéler l’expression nouvelle sur son visage.

« Es-tu d’accord avec ça ? » demanda Alus.

Alice hocha fermement la tête. « Rien ne serait changé par cela, et je ne le laisserai pas non plus être changé. Cela ne ramènera pas Mélissa, alors je ne veux pas qu’une vengeance inutile gâche le présent qui mène à l’avenir… »

« Eh bien, si tu es d’accord, je n’en dirai pas plus. »

Il n’y avait pas de bonne réponse, mais le choix qu’Alice avait fait toute seule n’était en rien mauvais. Elle avait choisi de ne pas salir la route que Mélissa lui avait montrée. Au final, Alice aurait pu finir par protéger tant de choses précieuses.

Et peut-être que la raison pour laquelle Alus avait emmené Tesfia était que les liens d’Alice avec lui et Loki n’auraient pas été suffisants pour lui faire choisir l’avenir. Tesfia avait sûrement constitué l’un des fils qu’Alice utiliserait pour tisser son avenir.

☆☆☆

Partie 9

Alus avait un vague sentiment qu’il avait pris la bonne décision. C’était une sorte de prémonition qui pouvait être liée à la vérité du monde qui était sûrement quelque chose qui ne reposait pas sur le raisonnement ou la rationalité, mais quelque chose de bien au-delà.

Il était frustré de ne pas pouvoir en voir la logique, mais il s’était senti étrangement heureux en regardant le dos d’Alice.

Alice n’était pas consciente de son regard fixe… mais elle se retourna soudainement pour lui parler. « D’ailleurs…, » elle s’arrêta pour afficher un sourire espiègle. Ses cheveux couleur miel flottaient dans l’air, et elle arborait un sourire radieux. « En plus, tu avais l’air de ne pas vouloir que je le tue. »

« Est-ce que je ressemble à ça ? » Alus lui avait répondu sans ambages, mais avec un élément de surprise dans le ton.

« … C’est vrai, ton visage était tout triste, et tout ça, » Alice avait ri de nouveau, en tenant ses mains derrière son dos et en le regardant avec des yeux tournés vers le haut. En contraste avec sa voix brillante, elle avait délibérément tordu son visage dans une grimace flagrante.

Comprenant qu’elle le taquinait, Alus avait plissé les yeux avant de répondre calmement. « Je vois. »

Et l’instant d’après : « Qui ferait une tête aussi laide que celle-là ? », s’écrie-t-il à voix haute, de façon cabotine.

Si elle continuait comme ça, Alice finirait par s’en remettre complètement un jour. Et cette intuition rendait les pas d’Alus plus légers. Bien sûr, il n’en était pas conscient lui-même.

« Comment ça, moche… ? Tu n’es vraiment pas honnête, » dit Alice avec joie, en arrêtant le regard grimaçant. Elle ajouta ensuite, plus sérieusement. « … C’est vrai. Tu ne te comprends vraiment pas du tout, Al. »

 

* * *

Dans une pièce blanche sans fenêtre.

Godma, qui s’accrochait à peine à la vie, était attaché à un lit et marmonnait tout seul. « … Je… j’ai peut-être perdu contre vous, bande de salauds… mais cela ne mettra pas fin à mes recherches. J’ai tenu ma promesse envers lui après… tout… »

C’est peut-être parce qu’il s’était transformé en Mamono qu’il était encore en vie. En raison de la réflexion de certains hauts responsables, l’ordre d’élimination de Godma avait été temporairement mis en attente.

C’était une installation près de la base de Godma qui avait été construite pour l’encerclement. À proprement parler, il s’agissait d’une des pièces de l’installation médicale temporaire mise en place pour soigner les blessés… mais en raison des circonstances, elle était également devenue une simple salle d’interrogatoire.

C’était un bâtiment abandonné qui avait été rapidement réparé, mais il avait été autrefois un centre de recherche, ce qui était parfaitement ironique.

Loki se tenait à côté d’Alus, couvrant son bras gauche. Tesfia et Alice étaient soignées pour leurs blessures dans la pièce voisine, mais Loki n’avait reçu que le strict minimum de soins.

Elle avait un air anxieux, mais après un rapide coup d’œil à elle, Alus s’était tourné vers Felinella qui se tenait à une certaine distance. La bataille était terminée, mais il restait encore des choses à faire… Alus commençait à avoir envie de son propre laboratoire après tout ce qui s’était passé.

Felinella avait son permis contre son oreille, recevant un rapport de l’extérieur. Peu de temps après, l’appel s’était terminé, et elle avait rapporté calmement, « Il semble que ce soit terminé. Ils les ont finalement tous éliminés. »

Même après la chute de Godma, les quelque 60 poupées qui s’étaient échappées à l’extérieur avaient continué à se déchaîner.

Et Felinella avait ensuite reçu un rapport indiquant que la dernière restante avait finalement cessé de bouger. « Il y en avait une autre… comme prévu. Une poupée avec des yeux de couleur différente. Nous avons capturé celle-là aussi, et elles semblaient avoir des données intégrées dans ses yeux. »

« Impossible !! » En entendant cela, Godma avait crié depuis son lit.

« Je m’y attendais, » dit Alus.

Puisque Godma avait un soutien de quelque part, il avait dû prévoir une assurance que les données de ses recherches atteindraient l’extérieur. Il avait 200 poupées avec lui. C’était suffisant pour appeler ça une armée privée.

Mais Felinella et les autres avaient reçu des informations selon lesquelles le partisan de Godma n’était pas une personne ou une organisation isolée, mais une nation entière.

Balmes, la nation qui comptait le moins de magiciens dans ses rangs, avait également des magiciens de faible qualité et des rumeurs circulaient selon lesquelles elle n’avait pas la capacité de défendre ses frontières, et même que son dirigeant avait été destitué.

Ensuite, il y avait Hydrange, qui avait le magicien classé numéro 5, mais son nombre de magiciens à deux chiffres était une fraction des autres nations.

La recherche de Godma qui créait artificiellement des utilisateurs d’éléments de lumière était quelque chose qui répondrait aux besoins de ces deux nations.

Ils auraient pu obtenir le nom du mécène de Godma par Godma lui-même, mais il semblait qu’il n’était pas au courant de son identité. Il s’était simplement consacré à ses recherches sans se soucier de savoir à qui il avait affaire ni d’où venait l’argent. Malheureusement, Alus pouvait s’imaginer faire la même chose.

Godma était un homme qui s’était lancé dans une recherche par folie, il n’était donc pas difficile de deviner qu’il ne se dérangerait pas lui-même. De plus, le représentant du patron de Godma devait également être assez prudent.

Cela mis à part — « Alors, où a été capturée cette poupée aux yeux étranges ? »

« … À l’Institut. Il semble qu’ils aient utilisé une porte de transport simplifiée. »

« Je vois, donc ils ont laissé une sorte de dispositif derrière eux lors de la dernière attaque pour permettre le transport depuis l’extérieur. Ils ont dû se battre pour faire fonctionner quelque chose comme ça, une version proche d’une porte de transport. »

« Je ne pensais pas que les choses de ce genre étaient encore à un stade pratique, cependant… Quand a-t-il réussi à faire ça ? » demanda Felinella, surprise.

Alus lui avait répondu. « Cela signifie simplement que Godma était plutôt compétent. Comme le seigneur Vizaist s’y attendait, ils avaient un moyen de sortir du centre de recherche, mais penser qu’ils se dirigeaient vers l’Institut… »

« Ce choix était un peu audacieux, » dit Loki d’un ton exaspéré.

« Oui, il faut beaucoup de cran pour essayer de faire ça sous le nez d’un ancien numéro unique. »

Godma avait finalement sous-estimé Cisty. Elle avait surpris l’intrus en détectant un léger changement dans le mana de l’Institut qu’elle contrôlait. L’infiltration de Mélissa lui avait fait prendre conscience qu’il y avait une faille dans la sécurité.

Alus avait jeté un coup d’œil dans la direction de Godma.

« Je vois… donc tout s’est écroulé, » murmura Godma d’un ton rauque. Avec cela, il avait fermé les yeux et avait perdu conscience.

« Mais quand même, quelle situation terrible, » pensa Alus.

Les blessures de Tesfia et d’Alice étaient considérables, et le bras gauche de Loki était lui aussi gravement blessé. Ils n’avaient perdu personne, mais aucun d’entre eux ne s’en était sorti indemne, pas même Alus.

« Je vais aller voir le Seigneur Vizaist et faire un rapport sur cet incident. Feli, peux-tu demander quelques magiciens guérisseurs ? Une fois que c’est fait, Loki, ramène les autres avec toi à l’Institut. »

« Mais tu pars avant que les magiciens guérisseurs n’arrivent, Sire Alus ? Fais-leur au moins arrêter les saignements. »

« Non, c’est toi qui dois d’abord arrêter tes saignements, Loki. »

Loki avait d’abord été surprise, mais elle avait fini par être convaincue par Alus qui avait dit qu’il irait se faire soigner plus tard, et s’était retirée à contrecœur.

Déchirant sa propre robe, Alus avait enveloppé le bras de Loki. Ce n’était qu’une mesure d’urgence, car même les magiciens guérisseurs ne pouvaient pas restaurer le sang perdu.

Pendant ce temps, Loki avait coupé un morceau de la manche de son uniforme afin d’obtenir un tissu qu’elle pourrait utiliser comme bandage pour Alus. Le temps qu’Alus se dise qu’il n’y avait aucune raison d’aller aussi loin, il était déjà trop tard. « Je pourrais simplement utiliser le mien. »

« Tu ne peux pas ! Tu as été en contact direct avec Godma quand il s’est transformé ! Que ferais-tu si une bactérie bizarre infectait la plaie ? La mienne n’est pas sale. »

« … Loki, remplaçons les bouts de tissus bandés autour de ton bras tout de suite. »

Loki s’était immédiatement couvert la bouche, comme si elle en avait trop dit. Elle avait hésité à dire qu’elle se contentait des restes, ce qui avait rendu Alus très perplexe.

Derrière eux, Felinella avait commencé à déchirer sa propre robe. C’était aussi un gâchis, mais il était déjà trop tard.

Alus avait au moins voulu lier ses blessures avec sa propre robe, mais d’après les regards de Loki et de Felinella, ça n’aurait pas marché. S’il y avait eu des réserves de fournitures médicales, rien de tout cela ne serait arrivé, mais il y avait eu plus de blessures que prévu et Tesfia et Alice avaient été prioritaires.

« M. Alus, laisse-moi au moins arrêter l’hémorragie. »

Alus soupira, tandis que Felinella commençait à enrouler le tissu autour de son épaule d’une manière familière.

Felinella avait tout d’abord confirmé auprès de Loki que les bandages de cette dernière étaient bien placés, peut-être par considération, et avait reçu une réponse affirmative de la part de Loki.

Loki fronça les sourcils un instant, mais elle n’eut d’autre choix que de se retirer après qu’on lui ait dit que c’était pour le bien d’Alus. « Je comprends, je vais l’accepter… mais utilise au moins mon tissu, s’il te plaît. Et… »

Son expression était devenue plus sévère. « Presser ces sacs de graisse inutiles contre l’arrière de la tête de Sire Alus fait-il aussi partie du traitement ? Je ne sais pas trop quoi penser de tout ça ! »

« Ah ! »

S’étant tellement investie à envelopper l’épaule d’Alus, Felinella avait inconsciemment pressé sa généreuse poitrine contre lui. Quand elle s’en était rendu compte, elle avait fait un bond en arrière en rougissant.

« Je suis désolé, M. Alus. C’était un accident, je ne voulais rien dire… »

« Oui, ça ne me dérange pas. »

« Moi, oui ! » avait immédiatement rétorqué Loki. L’incident avait semblé particulièrement contrarier Loki, qui s’était lancée dans un flot de plaintes.

Sentant que les choses pourraient continuer ainsi pour toujours, Alus avait décidé d’y mettre un terme. « Laisse ça comme ça. Feli a dit que c’était un accident. Ce n’était pas volontaire. »

« Elle serait juste une salope si c’était le cas, » dit Loki, lançait un regard noir à Felinella qui avait fermement nié ces mots, rougissant toujours furieusement.

Ils avaient un rapport à faire, mais avec le manque de sérieux dans l’air, Alus n’en avait pas l’impression.

☆☆☆

Partie 10

Avec Felinella en tête, Alus s’était dirigé vers la salle de contrôle où se trouvait Vizaist.

Il ne l’avait pas remarqué parce qu’il était sous terre, mais il faisait déjà nuit dehors. Contrairement à l’atmosphère libre du Monde extérieur, il ne ressentait rien pour le faux ciel nocturne.

Sans la mission, cette zone aurait été enveloppée d’un silence sinistre. Mais en ce moment, il y avait des gens partout, et des lumières disséminées ici et là qui repoussaient la lumière de la lune.

Après avoir marché un moment, ils étaient arrivés à leur destination. C’était terriblement simple pour une salle de contrôle, et cela avait le genre d’apparence rustique que seul Vizaist pourrait apprécier. Après tout, ce n’était qu’une grande tente dressée dans une clairière de la forêt. Le centre médical d’avant était mieux que ça.

D’un autre côté, il avait été camouflé par la magie, et il passerait inaperçu à moins que quelqu’un ne soit vigilant.

La magie de Vizaist était adaptée à l’obtention d’informations, mais c’était le type de magie qui nécessitait qu’il soit sur place. Mais comme elle avait une portée de plusieurs kilomètres, il n’y avait personne de mieux placé que lui pour s’occuper d’une mission de grande envergure. Il avait d’innombrables réalisations, et le sang de l’une des familles nobles les plus puissantes coulait dans ses veines.

La première chose qui attira l’attention d’Alus en entrant dans la tente fut les décorations sur la poitrine de Vizaist. Alignées de manière ordonnée sur le côté gauche de sa poitrine, elles étaient des choses qu’Alus ne l’avait jamais vu porter que lors de fonctions officielles. Il était du genre à préférer diriger sur le terrain, donc il n’était pas du genre à aimer afficher des décorations aussi voyantes.

S’il les portait aujourd’hui, c’était probablement parce qu’il dirigeait des forces de sécurité qui n’étaient pas habituées au monde extérieur. En d’autres termes, les médailles servaient à faire en sorte que les gens des autres départements écoutent ce qu’il disait.

Bien à l’intérieur de la tente, Vizaist faisait face à Alus, tandis que Felinella venait se placer aux côtés de son père. « Je l’ai amené, » dit-elle en gardant à l’esprit sa position.

« Ahh, vous êtes là. Ça fait un moment, » dit Vizaist de sa voix grave, assis sur sa chaise.

Bien qu’il se soit fait connaître en tant que commandant, ses muscles bien entraînés avaient révélé sa vraie nature d’artiste martial. Malgré la cinquantaine, son corps était encore très musclé. C’était un homme puissant qui était toujours aussi imposant.

Dans le passé, il s’était vanté de s’être fait un nom en tant que magicien à deux chiffres. Quiconque découvrirait que cet homme robuste, qui avait autrefois couru en liberté dans le Monde extérieur, se spécialisait désormais dans la détection et la collecte d’informations, ne pourrait retenir son rire.

Et en partie à cause de sa personnalité légère et aimable, ceux qui connaissaient son caractère et ses capacités s’assuraient de se référer à lui avec respect. Mais comme il s’était élevé par ses propres pouvoirs, son prénom était plus largement utilisé que son nom de famille.

Et le nom respectueux qu’ils utilisaient était Seigneur Vizaist. Cependant, seuls Alus et le gouverneur général le lui avaient dit en face.

Ses cheveux courts mêlés à des mèches grises étaient les mêmes que lorsqu’Alus l’avait rencontré pour la première fois. C’était quand il avait été affecté à l’unité de Vizaist à l’âge surprenant de dix ans. C’était il y a six ans, mais cela ne faisait pas assez longtemps pour qu’on puisse dire que cela faisait « un moment » depuis leur dernière rencontre.

Bien qu’ils ne se soient pas rencontrés depuis un certain temps, Vizaist était presque toujours chargé de la collecte d’informations sur les missions secrètes auxquelles Alus était affecté, et ils se parlaient donc assez fréquemment.

« Je suis heureux de voir que tu es toujours le même, Seigneur Vizaist, » dit Alus avec respect. Vu la vitesse à laquelle l’encerclement avait été réalisé, ses compétences étaient aussi inchangées que son apparence. Et les pertes parmi les forces utilisées avaient probablement été réduites au minimum.

« Je suis désolé pour ça. Nous ne nous attendions pas à ce que Godma ait une telle force avec lui. C’est notre erreur. »

« Je ne pense pas que cela aurait pu être évité. Je crois que le nombre de poupées qu’il avait préparées, ainsi que le fait qu’il ait utilisé un sort tabou comme leurre, dépassaient de loin l’imagination de quiconque. En fait, il n’y avait aucun moyen de le savoir. »

« Mais nous devons encore préparer des contre-mesures. » Vizaist était le genre d’homme qui ne se laissait pas faire. Même s’il s’agissait d’un sort tabou, il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour trouver une solution. « Mais quand même, ce satané Berwick. Je n’ai jamais entendu dire que tu allais à l’Institut. »

Tout ce qu’Alus avait pu faire en réponse à cela, c’était un sourire sec.

Vizaist était probablement le seul à pouvoir se référer au gouverneur général de manière aussi directe. Les deux hommes étaient de vieilles connaissances, et tandis que Vizaist s’était consacré à des missions dans le monde extérieur, Berwick avait accédé à sa position grâce à des intrigues politiques et à ses réalisations en tant que commandant.

En vieillissant, Vizaist avait passé moins de temps en première ligne, mais il avait obtenu son poste actuel parce qu’il avait insisté pour rester en service actif. Il était déjà doué pour la détection, mais son tempérament ne lui permettait pas de se retirer. C’est pourquoi il était toujours prêt à monter au front et à se battre lui-même si nécessaire.

« Pourtant, tu sembles avoir eu une vie difficile. »

« … On peut dire ça, » il avait déjà dû entendre certains détails de la part de Felinella.

« Si tu avais échoué… oh, je suppose que ça ne serait pas arrivé. »

« Non, j’avais plutôt peur. »

« Ha ha ha… alors je suppose que c’était une bonne expérience pour toi, » dit Vizaist en riant de bon cœur. « Cependant, j’ai failli ne pas te reconnaître. »

« Vraiment ? Je n’ai pas du tout changé. »

La différence n’avait pas été si longue à se manifester. Bien sûr, Alus n’était pas conscient de son propre changement.

« Tu es devenu plus humain. »

« … !! » Alus tâtonna pour trouver une réponse, alors qu’il se demandait si cela était censé être un compliment en quelque sorte.

« Eh bien, je suis heureux que tu t’amuses, » dit Vizaist. « J’ai été choqué quand Berwick m’a dit que tu voulais prendre ta retraite. »

« Je suis désolé de t’avoir inquiété, mais ce n’était pas un mensonge. »

L’expression de Vizaist devient alors sérieuse, comme il sied à un officier militaire. « Je n’étais pas inquiet. Que tu le veuilles ou non, ta place est de ce côté. »

« … »

Alus avait compris ce qu’il voulait dire.

Une atmosphère oppressante avait rempli la pièce. Il n’essayait pas de coincer Alus, mais il faisait pression, comme s’il avait vu clair en lui. Et ses mots semblaient le suggérer aussi.

« Tu avais juste besoin de moi. Si une classe S nous envahit, Alpha subira de sérieux dommages comme cela s’est déjà produit. » Après une courte pause, Alus avait parlé sans détour sur un ton sarcastique, faisant fondre l’atmosphère glaciale. Ce genre de discussion était en fait monnaie courante entre eux.

« Tu as toujours quelque chose à ajouter. »

« C’est valable pour nous deux. »

Vizaist avait souri, montrant ses dents, et il avait dit : « Je vais tout oublier pour cette fois. Tout est bien qui finit bien. Sinon, c’est mon propre cou qui serait en jeu. Je vais le faire savoir à Berwick. »

Il en prendrait toute la responsabilité. Mais étant le bras droit du gouverneur général, il n’aurait probablement pas à le faire. Et ce qu’il avait dit à Alus avait été dit sur le ton de la plaisanterie.

« Merci beaucoup. Mais j’ai de toute façon à faire avec le gouverneur général. »

« Quoi, as-tu encore fait quelque chose ? »

Alus avait ignoré l’accusation injustifiée sous-entendue dans ce « encore ». « C’est une affaire privée. »

En entendant cela, Vizaist avait reposé sa tête dans sa main, comme si cela ne l’amusait pas.

Avec tout ce qui s’était passé, Felinella avait finalement ouvert la bouche pour parler. Elle était exaspérée de voir qu’ils ne passaient pas au point suivant. « Commandant, je pense qu’il est temps de passer au sujet principal… »

Alus était impressionné de voir Felinella se référer à son père de manière si impersonnelle, un signe qu’elle comprenait sa position. Eh bien, même s’ils étaient liés par le sang, ils ne se ressemblaient pas du tout. Même si elle l’avait appelé « Père », cela n’aurait pas été correct, même s’il était au courant de leur relation.

« Bien. Alus, grâce à tes instructions données à Felinella, la bataille à la surface a pu se dérouler à notre avantage. Et Cisty a capturé la poupée qui essayait d’extraire les données et nous l’a remise. Nous avons donc réussi à empêcher la fuite des recherches de Godma… cependant. » Cette pause signifiait qu’ils ne savaient pas comment s’y prendre. « Nos hauts gradés se sont intéressés à ces recherches. L’attaque de l’Institut a rendu l’affaire trop importante. »

« C’est…, » Alus soupçonnait que les hauts gradés n’étaient pas intéressés par le sens littéral du mot, mais plutôt qu’ils pouvaient être directement impliqués. Puisque Vizaist n’avait pas été capable de découvrir qui se cachait derrière Godma, Alus pensait qu’il était possible que les hauts gradés d’Alpha en fassent partie.

Vizaist, cependant, semblait voir clair dans ses doutes. « Non, nous avons enquêté sur eux, et les hauts gradés sont propres. Mais je voulais te demander… que penses-tu de ces recherches ? » La façon dont Vizaist avait présenté les choses montrait clairement qu’on pouvait lui faire confiance sur ce point. Les hauts gradés n’avaient vraiment dû s’intéresser qu’aux recherches.

Comme les poupées étaient égales aux magiciens à trois chiffres en termes de capacités physiques et qu’elles pouvaient utiliser l’élément de lumière, elles étaient parfaites pour les missions dans le monde extérieur.

Mais Alus avait hésité. Il est vrai que ce serait du gaspillage de tout jeter comme si cela n’avait aucune valeur. Les recherches sur l’origine de l’attribut de lumière devraient être mises à profit, mais…

« Je pense qu’il faut s’en débarrasser. C’est trop dangereux et séduisant. »

Il ne pensait pas que le fondement de la nation, l’armée, s’adonnerait à des tabous ou à des expériences inhumaines comme c’est le cas actuellement, mais les recherches de Godma étaient une tentation qui pouvait les égarer.

« Compris. Felinella ! » Vizaist lui avait immédiatement répondu. C’est qu’il respectait les recherches et les opinions d’Alus. Tout autre mot était inutile, et après un élégant salut, Felinella quitta la tente afin de pouvoir se débarrasser soigneusement des matériaux conformément à l’ordre implicite.

Vizaist, Felinella et Alus étaient probablement les seuls à savoir que la poupée aux yeux étranges qu’ils avaient capturée était le moyen pour Godma de transférer ses recherches à son partisan. Cisty n’était pas directement impliquée dans l’armée, et si elle avait lu les intentions de Vizaist, elle n’aurait probablement rien révélé. Bien qu’Alus ait trouvé inattendu que Vizaist fasse faire autant à Felinella.

Bien sûr, puisque la mission qu’il avait reçue de Berwick incluait l’effacement des données de recherche, il ne pensait pas qu’il y aurait des problèmes. Laisser fuir ces recherches pourrait conduire à une situation sans précédent, et de toute façon, c’était trop séduisant et toxique. Il y avait également de fortes chances que Godma lui-même soit éliminé, compte tenu de ce qu’il avait fait.

« J’aimerais faire quelques demandes. »

« Hm ? Il s’agit de ton appel sur place pour accélérer l’exécution de la mission ? Personne ne t’en voudra pour cela. Nous nous apprêtions déjà à faire de même après la deuxième attaque de l’Institut. »

Alus secoua la tête avec une expression sérieuse. « J’aimerais que vous traitiez bien la femme appelée Mélissa. »

« Bien sûr. Nous ne pouvons pas le rendre public, mais j’en prendrai la responsabilité. » Vizaist eut presque l’air déçu en comprenant ce qu’Alus voulait dire, mais il réajusta rapidement sa posture assise et fit sa déclaration.

Mais c’était la première fois qu’Alus faisait une telle demande depuis leur rencontre… Vizaist s’était dit que son impression qu’Alus était devenu plus humain était juste.

« Et aussi… »

« Hé, maintenant, tu fais beaucoup de demandes supplémentaires ici. »

« Non, il s’agit de savoir qui était derrière Godma. »

Vizaist secoua la tête avec une grimace amère rarement vue. « Nous n’avons aucune piste. Nous avons dû travailler dans un délai très court cette fois-ci. »

« Alors même toi, tu ne le sais pas, Seigneur Vizaist. »

« Oui, il y a quelque chose de suspect qui se passe avec tout ça. »

☆☆☆

Partie 11

« À ce propos, connais-tu les Quatre Livres de Fegel ? »

Vizaist avait pris un moment pour rassembler ses pensées, avant de finalement se rappeler quelque chose. En même temps, il fronça les sourcils en réalisant à quel point c’était inquiétant. « Parles-tu de ces écrits prophétiques ? J’ai entendu dire qu’ils constituent un matériel de recherche précieux et qu’il faudra encore du temps pour prouver l’authenticité et la validité de leurs théories… J’ai entendu dire que même une copie écrite de ces écrits est considérée comme top secrète. »

« Oui, mais d’après ce que j’ai vu d’une copie écrite, cela dépasse le domaine de la prophétie. Et Godma avait quelque chose comme ça en sa possession. Au début, je pensais que c’était juste un faux bien fait. »

« … ! »

« Mais c’est la vérité indéniable que Godma a réussie à se transformer en un Mamono, et cela ne fait qu’alimenter davantage mes soupçons. Compte tenu de notre niveau actuel de technologie magique, c’est un trop grand pas en avant. Il y a beaucoup d’expressions obscures dans la copie écrite, ce qui fait que beaucoup de gens la ridiculisent comme une fabrication, mais je suis presque sûr qu’elles ne sont pas sans rapport. »

Ce livre inhabituel, considéré comme absurde, commençait à prendre une tournure plus claire. L’une des raisons de cette évolution était la transformation de Godma. Il était difficile d’imaginer que le fait qu’il possède l’un des quatre livres de Fegel était une simple coïncidence.

« Si c’est vraiment l’original, son origine est un mystère. »

« Les gens se demandent si les originaux existent encore, et toutes les nations les considèrent comme top secret… Je ne veux pas l’imaginer, mais il est possible que quelqu’un d’important soit derrière Godma. Mais peux-tu dire que c’est un original ? »

Alus avait confirmé que personne n’était là pour les entendre, avant de répondre : « On appelle ça un livre, mais ce n’est même pas en papier. Je n’ai pas vu d’original, donc je ne peux cependant pas confirmer que c’est l’un d’entre eux. J’ai aussi l’impression que l’écriture était différente. Mais vu les circonstances, je n’ai pas réussi à mettre la main dessus. »

Si Godma utilisait le livre original pour faire avancer ses recherches, alors il était possible que le contenu soit différent de la version copiée. Alus était d’avis que les copies avaient été intentionnellement modifiées. Bien sûr, dire cela à voix haute n’était pas un nid de frelons qu’il était prêt à titiller.

« Bon, d’accord. Son authenticité mise à part, nous ferons en sorte de le récupérer tout de suite. »

« J’ai utilisé un sort un peu flashy, donc il a pu être détruit pendant ça. »

Avec un léger hochement de tête, comme pour dire que cela lui convenait aussi, Vizaist avait utilisé sa licence pour donner des ordres à ses subordonnés, puis il avait raccroché.

Convaincu qu’il en avait fini pour le moment, Alus avait pris une profonde inspiration pour changer de vitesse.

« Au fait… » dit soudain Vizaist, en jetant un coup d’œil à l’ouverture de la tente par laquelle Felinella était partie, « comment était Felinella ? »

C’était une question soudaine, mais en y réfléchissant, Alus se souvenait que Felinella avait été autorisée à participer à la mission à la condition qu’elle serve de soutien à Alus. C’est donc bien de cela que parlait Vizaist.

« Je pense qu’elle a du talent. Elle est plutôt bien entraînée. L’as-tu aussi envoyée dans le monde extérieur ? »

« Mais bien sûr. Je lui ai inculqué tout ce que je sais. » Le visage fier de Vizaist était celui d’un père plutôt que d’un commandant militaire. Il avait fait en sorte de distinguer la carotte du bâton pour l’élever.

« Je ne l’ai pas vue combattre, mais sa détection est assez pratique comme ça. »

« En effet, elle a le talent pour me surpasser. »

« Oh ? Prends-tu ta retraite ? »

« Ne sois pas stupide, je resterai en service actif jusqu’à ma mort, » déclara Vizaist avec résolution en s’adossant à sa chaise avec un haro. « J’étais bien pire qu’elle à son âge. » Il était fier de sa fille, qui était actuellement au niveau d’un triple chiffre.

Alus avait entendu cela maintes et maintes fois. Vizaist se vantant de sa fille était toujours le même. « Elle semble être une élève très brillante, et elle est très populaire. J’ai hâte de voir comment son avenir se déroulera. »

Vizaist n’avait pas répondu à Alus tout de suite. Il avait froncé les sourcils avec une expression angoissée. « Pourtant, ce n’est pas ce que je voulais dire… Alus, je te la donne. »

« Hein ? »

Tout ce qu’Alus avait pu faire en réponse à ces mots inattendus avait été d’élever la voix par réflexe. Bien qu’il se demandait à quoi pouvait bien penser Vizaist… « Je ne comprends pas vraiment ce que tu veux dire… »

« Il y a beaucoup d’inconvénients à être un noble. Les hommes sont une chose, mais on attend des femmes qu’elles se marient jeunes. Non, je sais que je dois me résoudre à le faire un jour. »

Pas étonnant que Vizaist ait eu une fille si jeune, à son âge. Il s’était marié tard pour un noble, et il avait dû subir des pressions pendant un certain temps.

« Je crois que tu m’as déjà dit que tu n’allais pas t’accrocher au titre de noblesse. »

« Bien sûr, ça ne me dérangerait pas d’y renoncer. Pas moi, en tout cas. Mais ça ne suffira pas si elle s’engage dans l’armée et part dans le monde extérieur. »

Les familles nobles bénéficiaient de toutes sortes d’avantages. Non seulement elles avaient leur mot à dire sur les questions militaires et nationales, quel que soit leur statut, mais elles avaient également le droit de s’installer près de la Tour de Babel, ainsi que d’autres privilèges. Plus un militaire avait une lignée noble, mieux il était traité. Ils étaient également autorisés à employer une force personnelle de magiciens. À l’heure actuelle, il y avait peu de nobles traditionnels à qui l’on accordait des terres comme il y a longtemps.

Vizaist se vantant de ne jamais prendre sa retraite était aussi pour le bien de Felinella. En construisant une base inébranlable au sein de l’armée, il s’était construit un point d’appui pour l’avenir. Pour sa fille, il ne pouvait pas renoncer à son rang de noble.

« Mais je n’ai pas l’intention de confier ma fille à n’importe quel magicien ordinaire. »

Et c’est là qu’Alus était intervenu. Ils se connaissaient bien, et en plus, Alus était le plus grand magicien pour le moment.

« J’aurais hésité à l’époque où tu servais sous mes ordres, mais je le permettrai puisque tu es ainsi maintenant. »

En laissant de côté la raison pour laquelle les choses prenaient cette direction, Alus avait réalisé que Vizaist y pensait depuis qu’Alus avait environ dix ans. Il était stupéfait. Il aurait pu comprendre s’il avait considéré la position de Vizaist en tant que noble… ou bien… il ne l’avait pas fait.

« Seigneur Vizaist, je n’ai pas l’intention de me marier. »

« — !! Tu veux dire que tu n’es pas satisfait de Felinella !! » dit Vizaist en dirigeant un regard et une pression presque menaçants sur Alus. « C’est une beauté sans égale, comme ma femme. Et je dis que je suis prêt à avaler la pilule amère et à la donner. »

En la qualifiant d’incomparable, Vizaist ne faisait pas seulement preuve de favoritisme envers sa fille bien-aimée. Même Alus trouvait qu’elle avait un visage séduisant et d’excellentes proportions. Il n’était pas contre admettre qu’elle était une belle jeune femme.

Ajoutez à cela son comportement gracieux, et il pouvait convenir que son charme avait une emprise sur les étudiants masculins de l’Institut.

Alus ne broncha pas le moins du monde lorsque Vizaist se leva brusquement. Ce n’est pas qu’il était insatisfait, le mariage lui serait simplement préjudiciable maintenant. Il n’était en rien normal, il n’avait pas le rêve ou les pensées pour l’avenir que la personne moyenne avait.

« Ce n’est pas ce que je veux dire. J’ai toutes sortes d’affaires confidentielles en cours… même certaines que tu ignores, Seigneur Vizaist. »

« … !! »

Pour cette raison, il hésitait à se marier. Il ne s’intéressait guère à ce genre de choses tant qu’il ne pourrait pas percer les secrets de ses capacités inhabituelles. Ou plutôt, il n’y serait pas autorisé jusque-là. Le gouverneur général, qui était au courant de ces faits, avait peu de chances d’accorder une permission.

« Berwick, c’est ça ? »

C’était une affaire confidentielle, mais Vizaist ne serait probablement pas convaincu si Alus ne mentionnait pas au moins ses raisons.

Bien que si Alus était intéressé, il ne serait probablement pas rejeté. Tout dépendait donc de lui… c’est pourquoi il ne pouvait pas l’accepter d’emblée.

Il ne voulait pas laisser quelque chose d’inexpliqué en l’état. Après tout, il avait un pouvoir inhabituel dans son mana qui avait sa propre volonté. Et il avait des propriétés qui étaient très similaires à celles des Mamonos.

« De plus, cela te reviendra en pleine figure si tu décides de quelque chose et que tu ignores l’opinion de ta fille. »

« Il n’y aura aucun problème à ce sujet, » dit Vizaist, très sûr de lui, en se caressant le menton.

Alus ne pouvait pas vraiment ignorer ce que cela impliquait, mais Vizaist semblait déjà penser que c’était une affaire réglée, alors il avait mis cela en attente pour le moment. « Gardons cela pour l’instant. Il ne semble pas que ce soit un problème facile à résoudre. »

Car on pourrait dire la même chose d’Alus. Le mariage précoce n’était pas seulement réservé aux nobles, mais ce n’était pas seulement parce que c’était une tendance commune. Ceux qui avaient un rang élevé finissaient par devoir se marier.

Quant à celui qui était classé numéro 1, c’était pratiquement une loi tacite. Beaucoup pensaient que c’était la responsabilité de ceux qui avaient le pouvoir. C’est pourquoi les engagements étaient si courants.

D’un autre côté, la polygamie n’était pas une pratique reconnue. Alors que la population avait considérablement diminué, l’humanité ne voulait pas la voir revenir immédiatement. La nation avait mis en place de nombreuses politiques pour aider à élever les enfants, et pour cette raison, prendre une maîtresse comme seconde épouse était quelque chose que la nation tolérait.

Bien qu’un talent pour la magie ne soit pas quelque chose de facilement transmissible par les gènes, des recherches menées il y a quelques décennies avaient montré que la génétique et le talent n’étaient pas complètement indépendants. C’est pourquoi on attendait beaucoup des magiciens de haut rang. Et en tant que telle, la tendance actuelle était de précipiter les magiciens de haut rang dans le mariage. En bref, pour avoir des enfants. Des regards froids étaient dirigés vers ceux qui déclaraient vouloir passer leur vie en célibataire.

« Peut-être que tu ne peux pas le dire à ton âge, mais ta force est quelque chose qui devrait être laissé à ceux qui viennent après toi. »

Alus avait du mal à approuver ce sentiment. « Ne places-tu pas tes espoirs un peu trop haut ? Même si certaines informations sur le mana sont héritées, ce n’est qu’une faible quantité. Il n’y a aucune garantie que l’enfant devienne un Chiffre Unique. »

« Je le comprends très bien. » Mais Vizaist ne pouvait s’empêcher d’espérer quand même. Il ne pouvait pas résister, sachant que c’était grâce aux réalisations d’Alus qu’Alpha était dans la position où il se trouvait aujourd’hui.

« Ce n’est pas comme si j’avais l’intention de passer ma vie en célibataire, » dit vaguement Alus, avec un sourire en coin.

Il ne pouvait nier à quel point cela sonnait faux. Mais c’était parce qu’il croyait que les connaissances actuelles en matière de magie ne pourraient pas expliquer ses pouvoirs.

« Tu es encore si jeune. C’est peut-être pour ça que Berwick t’a mis à l’Institut. »

Tu vas me dire ça en face ? Alus se l’était dit, mais il ne l’avait pas dit à haute voix.

« Alors que dirais-tu d’un engagement ? »

« Oh non, je pense que je ne ferais que causer des problèmes. »

« Tsk !! Peu importe, tu finiras par changer d’avis. »

Alus ne pouvait que répondre par un autre sourire en coin. Presque personne en Alpha n’oserait refuser des pourparlers de mariage avec la famille Socalent.

☆☆☆

Partie 12

Cela dit, ce serait normalement une offre bienvenue. Bien que cela ne tienne pas compte des sentiments d’Alus, avoir une femme qui montrait de l’affection pour vous était quelque chose qu’un homme appréciait.

Mais Alus n’y voyait qu’une connaissance superficielle. Il était adulte de cette façon, dans le mauvais sens du terme. Comme il n’avait pas eu une enfance normale, ce n’est pas qu’il était obtus, mais plutôt qu’il donnait trop de priorité à la raison. Il se consacrait à l’étude de tout ce qui était magique. Il n’avait aucune idée de ce qu’était l’amour.

« Je suppose que je vais attendre que tu sois séduit par elle. »

« C’est de l’incitation, n’est-ce pas ? Je ne peux pas dire que j’approuve. » Alus pensait que Vizaist serait choqué par cette phrase.

Mais Vizaist avait préféré rire aux éclats. « C’est ainsi que je suis tombé amoureux de sa mère, après tout. Felinella porte le sang de cette femme, alors tu devrais te préparer. »

« Alors je la rencontrerai avec une robuste forteresse. »

« Je ne peux qu’espérer qu’il soit fait de papier. » Se souvenant de quelque chose après avoir dit cela, Vizaist afficha son meilleur sourire paternel. « Si c’est le cas, tu vas avoir beaucoup d’ennuis après ça. »

« Pourquoi ça ? »

« Il est grand temps que cet événement ait lieu. »

Alus balayait ses souvenirs à la recherche d’événements en cours, mais il était plutôt du genre à rester à la maison. « De quoi parles-tu ? »

« Le tournoi amical de magie organisé entre les sept nations. »

« Cela n’a rien à voir avec moi. »

« Je ne dirais pas ça. Berwick est excité à l’idée de te faire participer. »

Ils parlaient d’un tournoi de magie organisé entre les instituts des sept nations une fois par an. Les étudiants s’affrontaient avec la magie qu’ils avaient polie dans leurs instituts, et bien que cela soit appelé amical, c’était aussi une bataille politique où chaque nation se méfiait des autres.

C’était aussi une bonne occasion de montrer la puissance nationale grâce à la qualité de l’entraînement de leurs magiciens.

Bien sûr, Alus ne s’attendait pas à ce qu’il participe à un tournoi entre étudiants. « Qu’est-ce qu’il pense ? »

« Ne sois pas comme ça. Alpha est la nation qui a accompli le plus de choses parmi les sept nations. Donc, bien sûr, tu participeras en tant que personnage clé derrière ces réalisations. »

« Et tu me dis de jouer le jeu de cette farce… tu dois plaisanter. Je vais faire un appel direct au gouverneur général. »

« Il ne serait pas exagéré de dire que la dignité de la nation est en jeu. Je ne pense pas que tu arriveras à quelque chose avec ton appel. »

Alus soupira du fond de son cœur et se frotta les tempes avec son expression la plus exaspérée de l’année.

« Si tu participes, ceux qui cherchent un marié ne resteront pas tranquilles. »

Ceux qui avaient obtenu des résultats fantastiques lors du tournoi avaient vu leurs espoirs de grandeur placés en eux. Cela s’applique aussi bien aux hommes qu’aux femmes. En ce sens, les parents qui étaient venus assister au tournoi étaient tous à la recherche d’un partenaire pour leur fils ou leur fille.

Vizaist arborait un sourire plus crapuleux que d’habitude. « C’est pourquoi, si tu te fiances maintenant, tu pourrais facilement éviter tout autre problème. »

« Je n’ai tout simplement pas à participer. Et je m’occuperai moi-même des problèmes. »

« Hmph, quel sale gosse, » dit Vizaist avec sarcasme, comme s’il s’attendait à cette réponse. Mais il n’y avait aucune mauvaise volonté dans son ton, c’est juste quelque chose qui avait quitté sa bouche par réflexe.

« Tu dis ça, mais ta propre fille va être très demandée, elle aussi. »

« Ne sois pas stupide. Quelque chose comme ça n’est pas suffisant pour que je mesure à qui je laisserais ma fille. »

Tu parles d’un père attentionné. Alus avait l’impression d’être le dindon de la farce dans tout ça, mais c’était ce qui le rendait peu susceptible d’abandonner Alus.

« De plus, c’est la politique d’éducation de la famille Socalent de toujours respecter la volonté de la fille ! » Il semblerait que ce commandant calme, ayant franchi l’âge mûr, avait une ferme conviction.

Felinella était revenue peu après qu’Alus et Vizaist aient fini de parler de la question. Son timing semblait presque planifié, et ses yeux étaient particulièrement doux. « Père… Commandant, de nombreuses tâches ont été accomplies. »

Quelle est la raison de ce lapsus inhabituel ? Alus n’avait pas réfléchi trop profondément, et avait décidé que c’était quelque chose qui arrivait juste de temps en temps.

« Bien fait. J’hésite sur la façon de traiter les autres poupées. »

La majorité des données de recherche avaient été effacées avec succès, mais les presque 100 poupées mortes qui traînaient n’étaient pas si faciles à gérer. Leur existence même témoignait des recherches de Godma. Avec le retour de Felinella, la discussion s’était naturellement tournée vers le nettoyage.

« Je pense que ça devrait aller. Vous ne pourrez probablement faire que des observations superficielles sur les poupées. Pour commencer, c’était une recherche incomplète. Il y a trop d’éléments incertains pour que la nation décide de prendre l’initiative. »

« Eh bien, ce n’est pas comme si s’inquiéter allait servir à quelque chose. Si c’est ce que tu dis, alors tout devrait bien se passer. »

L’armée devrait éviter de s’y intéresser en premier lieu, mais rien ne changerait de dire cela maintenant. Mais tout ce qu’ils avaient à faire était d’empêcher que les données de recherche soient saisies à des fins néfastes. Bien qu’il n’y ait aucune chance que les hauts gradés viennent sur le site lui-même. Tout au plus, ils ne tenaient que les rênes.

« Bien, le reste est notre travail. Tu peux rentrer chez toi, Alus. Felinella, tu n’as plus rien à faire, alors demande-lui de t’accompagner. »

Alus ne savait pas si c’était le plan depuis le début, mais il avait haussé les épaules à la pensée du niveau de soutien de Felinella. S’il devait se faire lire l’avenir en ce moment, il serait sûrement averti de son mauvais sort concernant les femmes.

Tu parles d’un piège bien ficelé… il était impossible qu’Alus refuse d’escorter Felinella. D’ailleurs, le terme « escorter » était trompeur. Ils allaient seulement rentrer ensemble à l’Institut.

« Avec cela, la mission est terminée. Un rapport détaillé sera remis par la suite. »

« Compris, » dit Vizaist, avec la voix vigoureuse d’un soldat.

Alus s’était déjà retourné pour partir quand des mots grossiers lui avaient été lancés.

« Alus, fais attention à ne pas t’approcher d’elle. Hm ? … Je suppose que dans cette situation, tu devrais faire attention quant à ce qu’on te fasse des avances ! »

« … »

« Père ! » Felinella avait rougi et jeta un regard furieux à son mauvais père. Elle tira sur la main d’Alus pour l’emmener précipitamment.

 

+++

Alus avait tranquillement laissé Felinella le guider alors qu’ils se dirigeaient vers l’anneau de transport du quartier de la classe moyenne.

L’obscurité commençait à s’installer correctement maintenant. Il était près de minuit, sur le point de se transformer en un nouveau jour. Les feuilles bleues étaient baignées par la lumière de la lune, reflétant une couleur différente de celle du jour. Bien qu’elle soit fausse, la forêt nocturne était recouverte d’un voile fantastique.

« Je suis désolée. » Le temps que sa tête se refroidisse, les deux individus étaient hors de vue du quartier général des opérations. Se rendant compte qu’ils se tenaient toujours la main, Felinella s’était empressée de le lâcher et de ralentir. « Je suis désolée pour mon père », dit-elle docilement, la tête baissée.

« Tu n’as pas à t’inquiéter. Le seigneur Vizaist prend toujours bien soin de moi, et nous ne sommes pas si éloignés que ça pour que quelque chose comme ça me dérange. Bien que je ne comprenne toujours pas les coutumes de la noblesse. » Alus avait souri et il lui avait fait un clin d’œil.

« Ah, uhm…, » Felinella hésita à parler, et Alus comprit rapidement pourquoi…

« Oh, tu écoutais. »

Felinella avait écouté la discussion d’Alus et de Vizaist à mi-chemin. Bien que ce soit un peu exagéré. Il est plus juste de dire qu’elle était rentrée par hasard alors que les deux hommes discutaient de ce sujet sensible, et elle avait hésité à intervenir.

Et quand ils parlaient d’elle, elle s’efforçait de s’éloigner, même si elle se sentait mal à l’aise.

De plus, le mariage avec Alus avait déjà été discuté entre Felinella et son père.

« Tu le savais !? » Felinella fixa le sol, et son visage devint rouge d’embarras. Son apparence timide semblait encore plus envoûtante sous le clair de lune.

Vizaist avait probablement aussi remarqué qu’elle écoutait de l’extérieur. C’est peut-être pour cela qu’il avait abordé le sujet.

« Eh bien, franchement, oui. »

« Je sais que c’est plutôt soudain. Mais Père insiste sur le fait qu’il est préférable de faire ce genre de choses tôt… »

« Oui, c’est quelque chose que le Seigneur Vizaist dirait. »

« Je suis sûre que ce n’est rien d’autre que des problèmes pour toi… ? » demanda Felinella d’un ton timide et empli de chagrin.

« Non, c’est une chose à laquelle je devrais éventuellement penser, donc c’était une bonne occasion pour cela. »

Une chance comme celle-ci ne se représenterait probablement pas avant un bon moment. Felinella était au moins un peu soulagée d’entendre ça. Mais elle avait aussi décidé d’apporter une correction.

« Euh… ce n’était pas seulement la décision de mon père. »

Alus s’en était douté d’après ce que Vizaist avait dit. Mais il n’avait jamais eu d’expérience de ce genre depuis qu’il avait rejoint l’armée.

Eh bien, tout le monde autour de lui était un adulte alors qu’il était un jeune garçon. S’il avait eu de telles expériences, cela aurait été un problème en soi. C’est pourquoi il ne savait pas quoi dire en regardant le visage rouge de Felinella.

« C’est dégoûtant, n’est-ce pas ? Tomber amoureux après avoir entendu les histoires de mon père et m’avoir rencontré seulement quelques fois… »

« … C’est comme ça que ça se passe normalement, non ? » Alus n’avait aucun moyen de comprendre l’amour. Il ne savait même pas ce qui était normal et ce qui ne l’était pas.

Mais il y a une chose dont il était sûr, c’est que si les étudiants masculins de l’Institut entendaient la confession de Felinella, ils s’évanouiraient sous le choc.

Felinella ne s’attendait probablement pas à entendre quelque chose d’aussi naïf, et après s’être remise de la surprise, un doux sourire était apparu à nouveau sur ses lèvres. « Oh, qui sait à quel point c’est courant. »

 

 

« … »

Elle avait complètement retrouvé son calme et semblait pouvoir se mettre à rire à tout moment.

En la voyant sourire, Alus avait eu l’impression qu’on se moquait de lui, mais vu qu’elle se comportait à nouveau comme d’habitude, ce n’était pas si grave.

« Alors, je devrais peut-être écouter mon père et… essayer de te séduire ? » Bien que la séduction convienne à son apparence, Felinella n’était pas du genre à prendre les devants, et elle était un peu gênée par ses propres paroles.

« Tu peux essayer. »

Bien sûr, Alus était prêt à l’accueillir avec sa forteresse, comme il l’avait dit. Mais il ne l’avait pas rejetée sans réfléchir en disant qu’il ne s’intéressait pas à ce genre de choses tant que les mystères qui l’entouraient n’étaient pas résolus.

Il portait trop de secrets que Felinella ignorait. Et il était certain que sa solide forteresse ne s’effondrerait pas.

Alors qu’ils sortaient du bosquet et s’engageaient sur la route qui reliait les quartiers bourgeois et les quartiers huppés, Felinella bombarda Alus de questions.

Quel était son plat préféré, quels étaient ses hobbies, comment il passait ses week-ends, comment il se détendait et quand, et ainsi de suite… connaissant son long passé de combattant, elle lui avait également demandé quelles étaient les missions pour lesquelles il avait lutté, et ses réalisations.

À mi-chemin, Alus s’était trouvé déconcerté par l’avalanche de questions, mais il avait répondu sincèrement à toutes. En dehors des questions confidentielles, il ne voyait pas la nécessité de cacher quoi que ce soit.

Alors qu’ils approchaient de la porte de transfert — « Quel genre de femme aimes-tu ? » Felinella avait finalement rassemblé assez de courage pour le demander.

Alus était resté silencieux un moment, perdu dans ses pensées.

Ils avaient franchi la porte de transfert, spécifier leur destination, et un cercle magique était apparu à leurs pieds, copiant toutes leurs informations.

Et juste avant leur transfert — « Une femme qui est utile. »

« … !! »

Un certain temps s’était écoulé depuis la question, mais ce n’était pas une réponse mûrement réfléchie. Ce n’était que le résultat de son manque de connaissances.

Alus était tourné vers l’avant, il ne savait donc pas quelle tête Felinella faisait en l’entendant.

Dans la faible lumière, une légère rougeur apparut sur son visage et ses lèvres se retroussèrent, tout en pensant au fait qu’elle ne pourrait jamais atteindre son cœur si elle ne pénétrait pas dans sa forteresse. Si elle ne frappait pas aux portes de temps en temps, son dirigeant resterait fermé à jamais.

Elle ne savait pas quoi faire, mais s’il y avait une chose qu’elle pouvait dire, c’était que rien ne changerait si elle ne faisait pas le premier pas.

Même s’ils s’étaient mariés grâce à l’influence de son père, il n’y avait rien de plus douloureux qu’un mariage sans amour. De plus, il n’y avait rien de plus cruel que d’être forcé à vivre un amour à sens unique, bien que ce soit une histoire commune pour les nobles.

En réalité, Felinella était très populaire, pas seulement chez Alpha, mais dans toute la société noble des sept nations.

Le seul point positif était que son père ne s’en tenait pas à des coutumes aussi strictes. Ce qui signifie que le choix que Felinella devait faire pourrait être étonnamment facile.

Sous le faible clair de lune, elle s’était dit qu’elle devrait transformer l’affection inconstante en amour immuable aussi longtemps que ses sentiments brûlaient.

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