Neechan wa Chuunibyou – Tome 3 – Chapitre 4 – Partie 3

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Chapitre 4 : Bienvenue sur l’île Kurokami remplie de mystère !

Partie 3

Yuichi utilisait une technique connue sous le nom de brasse indienne [1]. Il tenait Natsuki avec son bras droit, mais en tendant toutes les autres parties de son corps à leur limite, il parvenait à faire des progrès.

Il n’y avait pas de temps à perdre. Il devait atteindre l’île pendant que son endurance et la lumière étaient toujours là.

C’était juste après midi quand il avait été jeté du bateau, et c’était l’été, de sorte que le soleil ne se couchait pas avant 19 h environ. Ce qui voulait dire qu’il devait nager 20 kilomètres en 7 heures. Dans des circonstances normales, cela n’aurait peut-être pas été un problème, mais ce serait délicat dans son état actuel.

La lumière du soleil et les vagues irrégulières sapaient lentement son énergie. Les poids et l’eau de mer avaient mis un fardeau sur tout son corps.

Mais Yuichi avait déjà traversé des moments difficiles comme celui-ci. La seule chose différente cette fois, c’était le fardeau qu’il portait sur ses bras et ses jambes.

Silencieusement, Yuichi continua à nager.

« Hé, Sakaki, » déclara Natsuki.

« Qu’est-ce que c’est ? Il y a un problème ? » Mais même s’il y en avait, ils ne pouvaient rien faire avant qu’il n’ait fini de nager jusqu’à l’île.

« Je m’ennuie, » déclara Natsuki.

« Voyons ! C’est tout ce que tu as à dire ? » demanda Yuichi.

« Je souffre de l’indignité de te laisser tâtonner ma poitrine, n’est-ce pas ? Me parler est le moins que tu puisses faire, » déclara Natsuki.

Maintenant qu’elle l’avait dit, faire comme s’il n’avait pas remarqué n’allait pas marcher. Il ne pouvait s’empêcher de penser à la façon dont son bras se tordait et déformait la poitrine molle de Natsuki chaque fois qu’il faisait une brasse.

« Ne le dis pas comme ça ! Mais, désolé… C’est vrai que je n’ai pas été très prévenant, » déclara Yuichi. En effet, nager en silence rendrait n’importe qui fou. « Mais je ne sais pas trop de quoi parler… »

Yuichi ne savait pas grand-chose sur Natsuki. Ils allaient aux réunions du club ensemble, mais ils ne parlaient pas beaucoup. Et même quand elle était passée à l’entraînement de Yuichi, ils ne faisaient que se battre. Tout ce que Yuichi savait de Natsuki, c’est qu’elle était une tueuse en série et qu’elle était très forte.

« He ! Si tu voulais me tuer, ce serait facile maintenant, n’est-ce pas ? » déclara-t-il. C’est la seule chose qui lui était venue à l’esprit. Il y avait probablement un sujet plus normal qu’il aurait pu choisir, mais après tout sa réflexion, c’est ce qu’il avait fini par faire.

« Si je te tuais maintenant, je me noierais, » déclara Natsuki. « Et comme je te l’ai déjà dit, ce n’est pas satisfaisant de tuer quelqu’un qui ne peut résister. »

« À propos de cela…, » déclara-t-il. « C’est quelque chose que je n’ai jamais compris. Pourquoi dois-tu tuer des gens ? »

« J’ai reçu l’ordre de “dévorer cette espèce”, » déclara-t-elle.

« Hé, ça circule beaucoup en ce moment, hein ? Ibaraki a aussi cité Parasyte, » répliqua-t-il.

« … Comme c’est humiliant. Avoir à partager des choses avec lui…, » déclara-t-elle.

« Hé, ne t’énerve pas pour ça…, » répliqua-t-il.

« C’est la vérité, en tout cas, » déclara Natsuki. « J’ai toujours eu quelqu’un à l’intérieur de moi, d’aussi loin que je me souvienne. »

« Tu veux dire… Jack l’Éventreur ? » demanda-t-il.

Jack l’Éventreur. Le terrible tueur en série qui avait terrorisé Londres il y a longtemps. Pendant un certain temps, c’était l’étiquette qui avait suspendu la tête de Natsuki, pour des raisons qu’il ne comprenait pas.

Natsuki utilisait des scalpels chirurgicaux quand elle se battait. C’était l’arme de prédilection de Jack l’Éventreur, il y avait donc clairement un lien.

Ibaraki avait suggéré qu’il y en avait d’autres qui s’appelaient aussi d’après des tueurs en série célèbres. Cela inquiétait Yuichi. Depuis qu’il avait commencé à voir ces mots étranges, il s’était mêlé à beaucoup d’incidents étranges. Il y avait une chance qu’il tombe sur un autre de ces tueurs en série.

« Je ne sais pas, » répondit-elle. « C’est ce qu’il semble penser de lui-même… ce qui ne veut pas dire que je puisse distinguer ses pensées des miennes. Sa faim est la mienne. Cette faim s’exprime par l’envie de tuer… et il semble qu’elle s’adresse à toi, pour l’instant. »

« Tu donnes l’impression que tout cela est si banal…, » répliqua-t-il.

« Je ne le comprends pas vraiment non plus, » répondit Natsuki. « Mais il semble que le tueur en moi ne souhaite pas tuer quelqu’un d’autre que toi en ce moment. Pour que tu puisses dormir tranquille, je ne tuerai personne tant que je ne t’aurai pas tué. »

« C’est quoi ce bordel ? Ça veut dire que je dois rester avec toi pour toujours ? » Yuichi se sentait fatigué. Maintenant qu’il connaissait Natsuki, il ne pouvait pas la laisser tuer quelqu’un d’autre. Ce qui suggérait qu’elle serait complètement dépendante de lui à partir de maintenant. Il ne s’en était pas rendu compte avant, mais il semblait qu’il allait devoir prendre des mesures drastiques à un moment donné.

Natsuki avait gloussé. « Tu es très confiant. C’est comme si tu ne pensais pas qu’il est possible que tu puisses mourir. »

« Après tout ce qui s’est passé, je ne peux pas te laisser me tuer, » répondit Yuichi. « Je resterai avec toi aussi longtemps que possible. »

« Puis-je interpréter cela comme une proposition ? » demanda-t-elle.

« Pourquoi le ferais-tu !? Pourquoi épouserais-je quelqu’un qui essaie de me tuer ? Quel genre de mariage assoiffé de sang serait-ce ? » demanda-t-il.

« Mais c’est jusqu’à ce que la mort nous sépare, n’est-ce pas ? C’est le vœu du mariage. Pour le meilleur ou pour le pire, dans la maladie et la santé, jusqu’à ce que la mort nous sépare, » continua-t-elle.

« Oh… bien, peu importe, » marmonna-t-il. « Quoi qu’il en soit, il doit y avoir un moyen. Il y a beaucoup de choses bizarres, alors il doit y avoir un moyen de faire de toi une personne normale, non ? »

Yuichi voulait vraiment éviter d’avoir à continuer à combattre Natsuki jusqu’à ce qu’il vieillisse et meure.

« Une personne normale… Hmm. S’il y avait un moyen, j’adorerais l’entendre…, » Natsuki avait l’air plutôt triste. « Ce n’est pas comme si je faisais ça parce que j’aime ça. Je veux aussi avoir des amis. Je veux vivre une vie heureuse comme une personne normale, comme tout le monde. »

« Vraiment ? Tu sembles traiter les “personnes normales” comme une classe différente de la tienne. Pourquoi n’essaies-tu pas de te rapprocher d’eux ? Tu construis tous ces murs…, » Yuichi n’avait jamais vu Natsuki faire l’effort de s’entendre avec qui que ce soit.

« À cet égard, tu construis des murs entre toi et moi, n’est-ce pas ? » demanda-t-elle.

« Je mentirais si je disais le contraire, » Yuichi était honnête à cet égard. Il ne pouvait pas oublier ses meurtres.

« Je n’aime pas cette partie non plus, mais je ne m’en fais pas trop, » poursuit-il. « Essayer d’imposer des règles juridiques humaines à des êtres d’un autre monde semble plutôt inutile. Si quelqu’un meurt quelque part dans le monde, ce n’est pas mon problème. Ce n’est pas si différent que d’entendre parler des enfants qui meurent de faim à l’étranger. »

Les mots semblaient sans cœur, mais dans le monde réel, les gens ne pouvaient pas s’inquiéter de chaque petite chose. Vous ne pouviez pas sauver des gens que vous n’aviez jamais vus ou connus.

« De plus, si tu étais humain, ce que tu as pourrait être considéré comme de la schizophrénie, n’est-ce pas ? » demanda-t-il. « Légalement, les crimes commis quand tu n’es pas sain d’esprit ne comptent pas. »

L’article 39 du code légal stipulait que les malades mentaux n’étaient pas considérés comme coupables de leurs crimes. C’était une loi controversée.

« Merci, » déclara Natsuki.

Les mots soudains avaient fait que Yuichi s’était raidi. « Pourquoi me remercier ? »

« J’ai l’impression que tu essaies de me réconforter. Tu veux me protéger. Je t’en suis reconnaissante, » déclara Natsuki.

« Tais-toi. C’est juste que je m’ennuie aussi, » déclara Yuichi.

« Tsundere ? » demanda Natsuki.

« Il n’y a pas de “dere” là-dedans ! » Yuichi avait crié avec une certaine gêne.

Il pouvait dire que ses paroles avaient vraiment rendu Natsuki très heureuse. Après un moment de réflexion, Yuichi s’était de nouveau concentré sur sa natation.

Un petit moment passa en silence avant que Natsuki ne s’adresse de nouveau à lui. « C’est clairement contre nature, n’est-ce pas ? Qu’est-ce que tu crois que c’est ? »

« Qu’est-ce que je pense qu’est-ce que c’est ? » Ils étaient tous les deux tournés dans la même direction, alors il s’était rendu compte de ce qu’elle avait voulu dire.

Il y avait quelque chose dans l’eau, se déplaçant à une telle vitesse qu’elle avait projeté un jet d’eau derrière elle.

Tout comme Yuichi et Natsuki, cela se dirigeait vers l’île de Kurokami.

« Tu ne penses pas que c’est… un requin, n’est-ce pas ? » Yuichi avait grincé des dents. Il savait quelques trucs sur la façon de se battre dans l’eau, mais ses options seraient limitées tant qu’il tiendrait Natsuki. Il faudrait qu’il la laisse partir et qu’il le termine en un seul coup pour qu’ils aient une chance.

Soudain, la chose sembla remarquer Yuichi et Natsuki, et changea de cap pour se diriger vers eux.

« Un chien ? » demanda-t-il. On aurait dit un chien. Un chien à la fourrure noire plaquée sur son corps d’une manière qui lui donnait un aspect légèrement fané.

Une fois qu’il était assez proche, Yuichi pouvait distinguer les mots au-dessus de sa tête.

« Fenrir, » murmura Yuichi.

Il n’avait aucune idée de ce que cela signifiait, mais comme « Nihao la Chine », on aurait dit que c’était une sorte de description.

Pendant une seconde, Yuichi était sûr qu’ils étaient en danger. L’aura qu’il dégageait suggérait un pouvoir extraordinaire.

Pas bon !

Il avait vacillé. Il faudrait qu’il prenne une décision en une fraction de seconde sur la façon d’y faire face.

Cependant, le chien ne semblait pas avoir remarqué l’état de Yuichi. Une fois qu’il s’était approché assez près, il s’était harmonisé en vitesse et avait commencé à nager en parallèle avec lui.

« Hé, » le chien s’était adressé à lui. Il ressemblait à un Anthromorphe, avec un visage canin sur un corps plus ou moins humain. Il était aussi assez grand. « Est-ce l’île de Kurokami ? »

Le chien Anthromorphe nageait d’une patte tandis que l’autre pointait du doigt la masse terrestre qui se trouvait derrière eux. Yuichi n’avait pas réalisé qu’il s’était approché de si près.

« Je pense que oui ? » Yuichi avait répondu honnêtement à la question sans s’en rendre compte.

« Je vois. Merci beaucoup, » après ça, l’Anthromorphe avait repris de la vitesse et se dirigea directement vers l’île.

« Qu’est-ce qui vient de se passer ? » Yuichi murmura une fois que la créature fut hors de vue.

Notes

  • 1 La brasse indienne, ou nage indienne, est une nage se caractérisant par son asymétrie. Elle se pratique allongée sur le côté, en deux temps ; dans un premier temps, un des bras est projeté vers l’avant, pendant que l’autre bras pousse l’eau vers l’arrière dans un mouvement semblable à celui de la nage du crawl, les jambes quant à elles font simultanément un ciseau de brasse ; dans un second temps, les deux mains sont ramenées au niveau du thorax alors que les jambes sont pliées vers l’avant en préparation du mouvement du ciseau. Elle n’est aujourd’hui pas nagée dans les compétitions, mais elle peut être utilisée pour les sauvetages et les longues distances, en raison de son faible coût énergétique.

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