Mushoku Tensei (LN) – Tome 6 – Chapitre 3

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Chapitre 3 : Le royaume de Shirone

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Chapitre 3 : Le royaume de Shirone

Partie 1

Le Royaume Shirone était un petit, mais vieux pays existant depuis deux cents ans. C’était dû au fait que tous les pays humains, à l’exception du royaume d’Asura et du pays saint de Millis, avaient été anéantis par la guerre il y a quatre cents ans.

La partie sud du continent central avait été remplie de conflits jusqu’à ce que le royaume du Roi Dragon prenne le contrôle de toute la région il y a environ trois cents ans. Aujourd’hui encore, les terres situées au nord de cette région étaient une vaste zone de discorde. Le royaume de Shirone était proche de la zone de conflit. Compte tenu de sa situation précaire, comment ce royaume avait-il survécu pendant deux cents ans ? La réponse se trouvait dans l’alliance qu’il avait conclue avec le royaume du Roi Dragon juste après sa fondation, une alliance qui n’en avait que le nom. Tout comme les deux autres pays que nous avions dû traverser pour arriver ici, le royaume de Shirone était en fait un état vassal du royaume du Roi Dragon.

Cela dit, je ne m’intéressais que très peu à la politique nationale. La seule chose qui m’intéressait était le fait que Roxy était dans ce pays. Je me demandais si mon jeune… attendez, non. Elle n’était pas vraiment jeune, pas vraie ? Bref, je me demandais si mon adorable et maladroite maître était encore une magicienne de la cour ici. Elle avait dit que le prince lui causait des ennuis, mais j’étais sûr qu’elle pouvait le supporter.

Cela faisait si longtemps. Je voulais la voir. Je voulais la voir et lui dire que j’allais bien. Je voulais lui raconter comment j’avais visité sa ville natale. Je voulais qu’elle me montre la magie de rang Roi qu’elle avait dit pouvoir utiliser maintenant. Mon cœur battait la chamade alors que nous nous dirigions vers la capitale.

Le long de la route, il y avait des rizières et des pâturages désordonnés. Il y avait aussi des parcelles de terre inactives et des pâturages remplis de plantes qui ressemblaient à du trèfle. Je n’étais pas très au fait des pratiques agricoles, mais les gens de ce monde semblaient réfléchir à la façon dont ils cultivaient leurs récoltes.

Bien qu’il était supposé être un état vassal du Royaume du Roi Dragon, le Royaume Shirone n’avait pas vraiment l’aspect d’une colonie, contrairement aux deux pays que nous avions traversés auparavant. Peut-être était-ce parce qu’il était si éloigné, ou parce qu’il servait de tampon entre la zone de conflit et les autres pays. En tout cas, tel était le paysage qui nous accompagnait lorsque nous étions arrivés à la capitale, Latakia.

Dans ce monde, la plupart des grandes villes étaient entourées de remparts protecteurs, comme Roa et Millishion. Même les grandes villes du royaume de Kikka et du royaume de Sanakia étaient entourées de murs. Il en était de même pour la capitale du royaume de Shirone, dont le périmètre était bordé d’un mur solide et impressionnant.

Rétrospectivement, il en était de même sur le Continent Démon. En fait, comme le continent avait une si forte concentration de monstres puissants, leurs défenses étaient plus complètes. Il n’y avait pas de ville là-bas qui pouvait rivaliser avec les énormes murs naturels qui entouraient la ville de Rikarisu. Chaque ville du continent utilisait les capacités spéciales des tribus vivant à proximité pour ériger de solides murs afin de se protéger. Même les petites colonies procédaient quotidiennement à l’extermination des bêtes à la périphérie du village. En comparaison, les remparts du continent central avaient l’air tellement ridicules.

Nous avions traversé ces murs et nous étions entrés dans la ville, où nous avions garé notre chariot dans une écurie. Il y avait de nombreux donjons dans les environs de la ville, il y avait donc beaucoup d’aventuriers à l’allure durs. Nombreux étaient ceux qui faisaient de la conquête de donjon. C’était la vie de Paul et Ghislaine dans le passé, et même Roxy l’avait fait pendant un certain temps. J’étais presque sûr que c’était Paul qui avait dit que les conquérants de donjon étaient incroyablement doués.

Il y avait de nombreux donjons disséminés dans Shirone, et vous pouviez gagner une somme d’argent incroyable rien qu’en explorant leurs niveaux les plus élevés. Il y avait probablement une poignée d’aventuriers classés S parmi les conquérants de donjon qui visaient le butin le plus lucratif. Nous nous étions ainsi mêlés à cette foule en parcourant la route principale et avions choisi une auberge au hasard pour y séjourner. Comme d’habitude, c’était une auberge adaptée aux aventuriers classés D. Même les auberges les moins bien classées de cette ville étaient un peu chères, peut-être parce qu’il y avait tant d’aventuriers de haut rang dans les environs.

Par rapport aux logements de catégorie D sur le Continent Démon, la qualité des logements sur le Continent Central n’était pas du tout mauvaise. En fait, c’était tellement bien que nous aurions été à l’aise dans des chambres destinées aux aventuriers de rang inférieur, mais nous avions assez d’argent pour ne pas nous en soucier. Bien au contraire. En fait, nous aurions pu nous offrir un logement encore meilleur si nous l’avions voulu.

J’aurais aimé loger dans une meilleure chambre, m’étais-je dit à un moment donné. Mais même si nous avions de l’argent en plus, c’était du gaspillage. Peut-être que j’étais vraiment qu’un avare.

« Très bien ! Maintenant que nous sommes arrivés dans le Royaume de Shirone, nous allons mener notre réunion stratégique », avais-je annoncé aux deux personnes qui se trouvaient devant moi. Leurs applaudissements apathiques me dirent qu’ils s’étaient habitués à ce dispositif.

« Maintenant, par quoi devrions-nous commencer ? »

« Nous allons rencontrer ton professeur, non ? »

La question d’Éris me rappela ce que le Dieu-Homme avait dit.

« Elle s’appelle Aisha Greyrat. Actuellement, elle est détenue dans le Royaume de Shirone. Tu seras là quand les événements de ta vision se produiront, tu la rencontreras et la sauveras. Tu ne devras absolument pas faire connaître ton nom. Appelle-toi le maître du chenil de Dead End et demande-lui des détails sur sa situation. Envoye ensuite une lettre à ta connaissance au Palais Royal de Shirone. Si tu fais cela, Lilia et Aisha seront toutes deux sauvées de ce palais. »

Quelque chose dans ce sens.

Si je me fiais entièrement à ses conseils, il me suffirait de marcher dans la ruelle que j’avais vue dans la vision pour déclencher cet événement. Je m’étais dit que je devrais probablement emmener Éris et Ruijerd. Après tout, l’Homme-Dieu n’avait pas dit que je devais y aller seul cette fois-ci.

J’avais continué à réfléchir. Si je croyais l’Homme-Dieu, alors Lilia et Aisha étaient détenues au palais royal de Shirone. Mais dans ma vision, j’avais rencontré Aisha à l’extérieur. Cela signifiait qu’elle avait réussi à s’échapper du palais. Je m’étais souvenu du regard des deux hommes qui la poursuivaient dans mon rêve. J’avais vu leur tenue à de nombreuses reprises dans la ville, c’était une tenue de soldat ordinaire.

En d’autres termes, Aisha serait poursuivie puis attrapée par les soldats du palais. C’était à ce moment-là que j’entrais en scène. Si j’adoptais l’approche la plus évidente pour la sauver, je risquais de faire du palais un ennemi, ce qui devait être la raison pour laquelle l’Homme-Dieu m’avait dit de ne pas utiliser mon nom. Il serait peut-être préférable que je cache aussi mon visage.

Pendant que les chevaliers étaient occupés à traquer ma fausse identité, je pourrais envoyer une lettre à ma connaissance dans le palais (Roxy) et lui demander de l’aide. Si elle était magicienne de la cour, ses mots devraient avoir un certain pouvoir. Je lui devais déjà beaucoup. Je ne voulais pas me présenter pieds nus et avec des semelles sales sur le pas de sa porte, comme un enfant errant, bien que je lui laverais volontiers les pieds si nos positions étaient inversées.

Mais c’était l’Homme-Dieu dont nous parlions. Il était possible qu’il prépare quelque chose. Si j’en dis trop, ça va gâcher mon plaisir, avait-il dit. En d’autres termes, il espérait que quelque chose d’intéressant allait se produire, et il n’y avait probablement rien que je puisse faire pour l’éviter.

Mais il avait aussi dit : j’espère que tu me feras confiance la prochaine fois. J’espérais que, même si des surprises désagréables m’attendaient, elles n’impliqueraient pas de blessures graves ou la mort d’un de mes proches.

Mais tout cela supposait que je fasse confiance à ce connard. Il pourrait bien essayer de me tromper cette fois-ci, sans se soucier de ce qui se passerait par la suite. Malgré tout, il était inutile d’opposer une résistance qui risquerait d’aggraver la situation de manière catastrophique. Je n’aimais pas le fait de devoir à nouveau rentrer dans son jeu, mais il me semblait que je n’avais pas d’autre choix que de l’écouter.

Mes principaux objectifs étaient maintenant de rechercher Aisha, de masquer mon nom et d’envoyer une lettre à Roxy. Cela dit, comment allais-je convaincre mes compagnons ? La lettre n’était pas un problème, mais il me fallait quand même une bonne raison pour chercher dans les ruelles en utilisant un faux nom. Depuis que nous étions partis de Millishion, ils s’étaient assurés que l’un d’entre eux soit toujours à mes côtés, même pendant nos jours de congé. Apparemment, ils étaient toujours préoccupés par la dépression que j’avais ressentie après ma rencontre avec Paul.

Les avoir inquiétés me mettait mal à l’aise, mais il y avait de fortes chances que nous nous retrouvions face à des soldats dans notre quête pour retrouver Aisha. Ni Éris ni Ruijerd n’étaient bons pour jouer la comédie. Peu importe qui je prenais, il était fort probable qu’ils fassent quelque chose qui nous retombera un jour dessus. Le karma agissait de la même façon.

Alors… que faire ?

« Rudeus, de quoi t’inquiètes-tu ? »

Hm… bien, c’est comme on dit, mieux vaut agir maintenant et s’inquiéter plus tard, m’étais-je dit.

« En fait, j’aimerais que nous cachions nos identités pendant que nous sommes ici. »

« On va encore faire semblant ? Pourquoi ? »

« Hmm… »

Même si je ne devais rien dire au sujet de l’Homme-Dieu, il n’y avait aucune raison que je cache le reste de l’histoire.

« En fait, j’ai entendu dire par une source que des membres de ma famille ont été emmenés en captivité quelque part dans ce pays. »

« Vraiment ? », demanda Éris.

« Oh », grogna Ruijerd.

Ils ne m’avaient pas non plus demandé de qui ou d’où j’avais obtenu cette information, même si l’un ou l’autre d’entre eux avait toujours été avec moi chaque fois que j’avais recueilli des informations. Mais il valait mieux pour moi qu’ils n’insistent pas sur la question.

« Oh, j’ai compris ! Ils seront donc en alerte s’ils entendent le nom de Greyrat ! », s’exclama Éris

« C’est vrai. »

« Alors, quel membre de ta famille ? »

« Lilia et Aisha. Notre ancienne bonne et ma petite sœur. »

En fait, maintenant que j’y pensais, de quelle manière devrais-je appeler Lilia ? Elle n’était pas vraiment ma belle-mère.

« Ta petite sœur ? Tu veux dire celle qui était si imbue d’elle-même, que nous avons rencontrée à Millishion ? »

« J’en ai une autre. »

« Uh-huh… »

Éris avait l’air peu enthousiaste en pinçant ses lèvres.

Donc Norn semblait imbue d’elle-même ? Je ne pensais pas du tout ça, mais Éris avait clairement une impression différente. Je m’étais demandé de quel côté je serais si Éris la frappait…

Éris s’était mise à renifler triomphalement.

« Eh bien, si c’est ce qui se passe, pas de plaintes ici ! Impressionnant, Rudeus. Tu as vraiment bien réfléchi. »

C’est ce qu’elle avait dit, mais tout ceci n’était pourtant qu’un plan conçu par l’Homme Dieu.

« Alors on va cacher nos noms. Devrions-nous en utiliser des faux ? »

« Oui, et ce serait mieux d’utiliser quelque chose de commun », dis-je.

« Pourquoi ? »

« Ils seraient préférables que de faux noms ne seront pas mémorisables. »

« Quels étaient les noms célèbres dans le coin ? », se demandait Éris à voix haute.

« Pendant que nous étions en voyage, j’avais souvent entendu des noms comme Shyna et Reidar », proposais-je.

Shyna, chevalier du Dieu de la mort, était une femme chevalier qui apparaissait fréquemment dans l’Épopée du Dieu du Nord. Elle était l’un des trois chevaliers du dieu du Nord et était l’une des compagnes du Dieu. Quelle que soit la brutalité de la bataille, elle rentrait toujours chez elle, presque comme si elle ne pouvait pas être tuée. L’histoire était probablement fictive, mais il y avait encore beaucoup de gens qui nommaient leur enfant Shyna dans l’espoir que ce nom puisse les empêcher d’être tués dans un accident bizarre.

Reidar était le nom d’un Dieu de l’eau. C’était un génie pour contrer les attaques, il pouvait geler l’océan et marcher dessus, c’était aussi le héros qui avait vaincu le dragon roi des mers. Le nom de cet homme légendaire avait été transmis de génération en génération. Chaque nouveau chef du Style du dieu de l’Eau en héritait : les hommes s’appelaient Reidar tandis que les femmes s’appelaient Reida. C’était un nom assez courant par ici.

Mes deux camarades avaient beaucoup réfléchi aux faux noms qu’ils allaient utiliser. Je leur en étais reconnaissant. Maintenant, je devais aussi réfléchir sérieusement au mien.

« Rudeus, que vas-tu choisir ? »

« Eh bien, voyons voir. Dans ce cas, il vaut mieux qu’ils sachent tout de suite que c’est un faux nom. »

« Pourquoi ? »

« Ils ne connaissent ni nos noms ni nos visages. Ça pourrait les embrouiller si on leur donne un faux nom tape-à-l’œil », avais-je dit, en citant une réplique d’un super vieux dessin animé que j’avais vu il y a longtemps. Pour être tout à fait honnête, cela n’avait pas vraiment d’importance tant que les noms étaient faux.

« Alors on devrait choisir un nom cool. »

Un nom cool, hein ?

« Très bien. Je m’appellerai le Chevalier de la Lune Noire. »

« Chevalier de la Lune Noire !? »

Les joues d’Éris rougirent et ses yeux brillèrent.

C’était un personnage de Kamen Rider qui aimait les haïkus, il portait ce qui semblait être à un uniforme de cantinière de mauvais goût. Si quelqu’un comme ça apparaissait devant Éris, elle le tabasserait probablement.

« Je vais choisir le même nom ! Attends, mais on ne peut pas porter le même, euh… »

L’avait-elle vraiment autant apprécié ? Dans ce cas, autant s’en tenir au thème du chevalier.

***

Partie 2

« Très bien. Éris, tu peux être l’Épée de la Lune Noire et Ruijerd peut être la Lance de la Lune Noire. Nous serons donc tous assortis de cette façon. »

« Très bien, nous sommes assortis ! Utilisons ça ! »

Je pensais que Ruijerd serait gêné par un tel nom, mais cela ne semblait pas être le cas. Paul avait dit que Aqua Heartia était un nom cool. Apparemment, le concept de « geek » n’existait pas dans ce monde.

« Mais tu n’as pas du tout l’air d’un chevalier, Rudeus », murmura Éris, après avoir pensé que nous avions réglé la question.

Pas un chevalier, hein ? Peut-être devrais-je plutôt me faire appeler Méchant Magicien ou Général Omega ? Mais je ne savais pas si je finirais par utiliser ce nom. Si ça ne marchait pas, je pourrais toujours utiliser à la place le Maître du chenil.

« OK. On a décidé de nos faux noms. »

« Que faisons-nous ensuite ? »

« Pour l’instant, je vais envoyer une lettre à Roxy au palais royal. Nous passerons notre temps à rassembler des informations jusqu’à ce que je reçoive une réponse », avais-je déclaré.

♥♥♥

Le lendemain, j’étais allé au marché, j’y achetais du papier à lettres et une enveloppe. J’avais commencé à écrire ma lettre à Roxy. J’avais commencé par lui envoyer des vœux de saison, je m’étais ensuite renseigné sur son bien-être, puis je l’avais informée que, bien que j’ai été téléporté, j’étais en sécurité. Je lui avais dit que j’étais maintenant dans la capitale de Shirone et que je voulais la rencontrer. Espérant éveiller son inquiétude et son anxiété, je lui avais dit en passant que tous les habitants du village de Buena avaient disparu et qu’aucun d’entre eux n’avait été retrouvé malgré les recherches en cours. J’avais ensuite abordé le sujet de notre bonne, Lilia, et j’avais conclu en soulignant une dernière fois (parce que c’était important) à quel point je m’inquiétais pour ma famille. J’avais également structuré la lettre de manière à ce que la première lettre de chaque ligne, si elle était lue verticalement, se lise « AIDEZ-MOI ». Avec tout ce que j’avais inclus dans ma lettre, j’étais sûr que Roxy comprendrait ce que j’insinuais.

Je l’avais scellée avec de la cire dans laquelle j’avais enfoncé une empreinte du pendentif de Roxy. J’avais brièvement envisagé de l’envoyer sous un faux nom, mais je serais dans l’embarras si elle la jetait en pensant : « Mais qui c’est, bon sang ? » Alors je l’avais signé ainsi : votre élève bien-aimé Rudeus Greyrat, qui veut juste veiller sur vous.

Honnêtement, Roxy reconnaîtrait probablement mon écriture même si j’utilisais un faux nom, mais c’était aussi son genre d’être négligente quand il s’agissait de quelque chose d’important. Je ne savais pas si la lettre lui parviendrait jusqu’à ce qu’elle l’ait vraiment entre les mains. Le Roxy de Schrödinger. J’imaginais Roxy assise dans une boîte qui disait « s’il te plaît, viens me chercher ». Aww. Pour l’amour de Dieu (Roxy), tu es censé retourner la boîte et te cacher à l’intérieur.

De toute façon. Cela mis à part, il n’y avait pas de mal à s’assurer qu’elle lirait le contenu en laissant mon vrai nom sur l’enveloppe.

« Très bien, je vais aller envoyer cette lettre. »

« OK. »

« Très bien, fais attention ! »

Ils m’avaient salué tous les deux, Éris avait un sourire radieux sur le visage. Quelle déception ! J’étais si sûr que l’un d’eux voudrait me suivre.

« Hein ? Qu’est-ce que vous allez faire tous les deux ? »

« J’ai l’intention de poser des questions sur ta sœur en ville », dit Éris.

C’est vrai, j’avais dit que nous chercherions des informations. Après tout, l’information c’est le pouvoir, et il n’y avait rien de mal à essayer de rassembler ce qu’on pouvait. En fait, je m’étais senti un peu gêné par mon laxisme, en essayant de passer à l’étape suivante sans le faire avant.

« Très bien. Je m’assurerai aussi de rechercher des informations, une fois que j’aurai fini d’envoyer cette lettre. »

Sur ce, j’avais laissé le duo derrière moi.

J’étais allé à la guilde des aventuriers pour poster la lettre. J’avais l’intention de commencer à chercher des informations par la suite, mais quelques minutes plus tard, je m’étais rendu compte qu’on me suivait. Au début, j’avais cru que c’était Ruijerd qui me surveillait, pensant probablement que je pourrais avoir des ennuis si on me laissait faire. Mais cela n’avait aucun sens après ce qui s’était passé ces derniers mois. Il m’aurait rejoint plutôt que de me suivre en secret. En outre, sa capacité à suivre les gens était sans égale. Si c’était vraiment lui qui me suivait, je n’aurais pas pu le remarquer.

Je m’étais également dit que cela ne devait pas être Éris. Elle était très mauvaise pour filer les gens. Je l’aurais remarquée à la seconde où j’étais sorti de l’auberge, et elle aurait de toute façon préféré rester silencieusement derrière moi plutôt que de se cacher dans l’ombre.

Alors, qui était-ce ? Y avait-il quelqu’un dans ce pays qui m’en voulait… ? Je n’avais pas trouvé âme qui vive. De plus, je venais d’arriver hier. Il était probable que j’allais créer des problèmes à l’avenir, mais je n’avais encore dérangé personne.

Cela avait-il un rapport avec quelque chose que j’avais fait sur le Continent Démon ? Est-ce que quelqu’un me suivrait vraiment jusqu’ici pour se venger ? C’était peu probable. Mais c’était peut-être un survivant du groupe de contrebande de Port Zant qui m’avait repéré par hasard. Peut-être prévoyaient-ils de saisir l’occasion pour m’achever.

Non, l’explication la plus probable était qu’ils n’avaient absolument aucun lien avec moi.

Quand j’avais tourné au coin de la rue, j’avais aperçu une petite silhouette qui se cachait dans l’ombre. C’était un enfant. Peut-être qu’un des enfants du quartier avait décidé de faire semblant que j’étais un méchant afin de me suivre. Ou peut-être que c’était un orphelin qui avait l’intention de me piquer mon portefeuille. Si je me cachais quelque part, il pourrait paniquer et me poursuivre, et je pourrais surgir et leur faire peur.

Non, attendez. Ce monde possédait des races comme les hobbits, qui semblaient tous de petites tailles. Je ne pouvais pas baisser ma garde.

J’avais décidé de le laisser filer. En gardant cela à l’esprit, j’avais pris à droite à deux intersections, puis j’étais entré dans une ruelle un peu étroite.

« Hm… ? »

J’avais eu la sensation bizarre que quelque chose n’allait pas, une sensation comme si quelque chose remontait du fond de ma gorge.

En balayant la zone du regard, j’avais utilisé la magie pour créer un mur de terre. Un mur de trois mètres s’éleva, scellant l’allée derrière moi. J’avais entendu des pas pressés de l’autre côté alors que mon harceleur courait vers le mur, suivis du bruit de quelque chose qui le frappait faiblement.

J’étais allé assez loin dans les ruelles sinueuses pour perdre ce gamin. Maintenant, quel chemin prendre pour retourner à la route principale ? Je me sentais un peu comme un enfant perdu. Contrairement à la disposition en grille de Millishion, même les grandes artères de cette ville n’étaient pas rectilignes. Même quelqu’un ayant un bon sens de l’orientation comme moi commençait à se perdre.

Je supposais que si on en arrivait là, je pourrais toujours utiliser la magie pour me propulser sur un toit. Attendez. Cette ruelle ressemblait à celle de la vision que l’Homme-Dieu m’avait donnée.

« Ah ! »

J’avais réalisé quel était l’étrange sentiment d’il y a un instant. C’était du déjà vu.

En retournant sur mes pas, je courrais dans l’allée sinueuse. J’avais fait demi-tour à un croisement en T, mais j’avais réussi à revenir sur mes pas jusqu’au mur de terre que j’avais créer.

« Non, stop ! » J’avais entendu une fille crier. « Rends-le-moi ! »

J’avais mis ma main contre la structure solide et j’y avais canalisé mon mana. En utilisant la magie de la terre, j’avais affaibli la composition du mur tout en utilisant simultanément la magie du vent pour déclencher une onde de choc. Avec fracas, le mur s’était effondré.

Devant moi se trouvait la vision que l’Homme-Dieu m’avait montrée. Un soldat s’était emparé brutalement de la main d’une fille, tandis qu’un autre lui tendait un papier qu’il lui avait pris, le déchiquetant en morceaux.

« C’est pour mon père ! Ne déchirez pas ça ! », cria la fille.

Au milieu de l’écho de ses protestations, les soldats avaient regardé dans ma direction, dans la confusion.

« Mais qui êtes-vous… ? »

La fille avait un visage qui ressemblait à celui de Lilia, avec les cheveux bruns de Paul ramenés en queue de cheval. Elle portait une tenue de bonne ample. Son visage, qui aurait normalement dû être léger et joyeux, était déformé par les larmes et la morve qui coulait.

 

 

Les soldats l’avaient regardée avec des regards obscènes sur leur visage. Attendez, non. Ce n’était pas correct. Ils avaient l’air d’avoir pitié d’elle. Faisaient-ils cela par devoir, plutôt que parce qu’ils le voulaient ?

« Qui êtes-vous ? Dites votre nom ! »

« Je suis son… » J’avais failli dire « frère », mais je m’étais arrêté. Je n’étais pas censé donner mon vrai nom.

« Euh… Je suis le Chevalier de la Lune Noire ! »

« Quelle partie de toi est chevalier ? On peut bien voir que tu es un magicien. »

« Argh… »

Bon sang ! La prochaine fois, je me nommerai le Magicien des Ténèbres !

« Écoute bien, petit. C’est bien que tu veuilles jouer au héros, mais nous sommes des soldats du palais. Cette petite fille s’est perdue, alors nous sommes venus la ramener chez elle. »

Il me considérait clairement comme un enfant malicieux. J’étais sûr qu’ils mentaient sur leurs intentions, mais il y avait ce regard troublé sur le visage de l’autre soldat qui regardait Aisha, qui pleurait encore. Quoi qu’il se soit passé au palais pour que Lilia et Aïcha soient détenues, cela ne signifiait pas nécessairement que les soldats du palais étaient aussi des méchants. Peut-être que je devrais essayer de leur parler ?

« Mais vous avez déchiré la lettre qu’elle tenait. »

« Ahh… c’est, eh bien, comment l’expliquer ? Les adultes ont leurs raisons. »

Uh-huh. Les adultes avaient beaucoup de raisons.

« Ah ! »

Aisha trouva une ouverture et gifla la main du soldat. Elle se cacha derrière moi et s’accrocha à ma taille, le visage couvert de larmes et de morve.

« S’il vous plaît, aidez-moi ! »

En regardant son expression impuissante et son comportement frénétique, je m’étais soudainement moqué de savoir si je me faisais de ce royaume un ennemi ou non.

« Ces gars ressemblent à des meurtries, et pires encore ! »

Je n’avais absolument aucune idée de ce qu’elle disait en sanglotant, mais je pouvais dire qu’elle était désespérée. D’accord. Mettons un terme à tout ça. J’étais au fond de moi un adulte. Je ne pouvais pas continuer à jouer la comédie d’un enfant qui joue au héros.

Sans prévenir, j’avais levé la main et j’avais envoyé en silence un canon de pierre sur les soldats.

« Mnh ! »

L’homme que j’avais visé avait immédiatement sorti son épée et avait intercepté le canon.

Ouah ! C’était une sacrée vitesse de réaction ! Le style du Dieu de l’eau, hein ? Ça allait rendre les choses difficiles. Mais le Canon de Pierre n’était pas le seul sort que je connaissais. Tant que je maintenais de la distance, ce sera facile.

Même si vous êtes la première personne à éviter mon canon de pierre, avais-je pensé.

« Un magicien qui peut utiliser la magie sans incantations !? »

« Alors, est-ce que ça pourrait être lui !? »

« Appelez des renforts ! »

« Oka-aaaah ! »

J’avais créé une fosse sous les pieds du soldat qui allait essayer de s’enfuir. Whoosh! En même temps, j’avais tiré des canons de pierre en succession rapide pour détourner l’attention de l’autre soldat. En faisant cela, j’avais dit à Aisha : « Nous allons nous enfuir. Tu peux le faire ? »

« Ngh, wah… oui… ! »

Elle hocha la tête, même en sanglotant.

Très bien, très bien. Tout ce que j’avais à faire était de l’assommer, et nous pouvions nous échapper.

Tweeeeee !

À peine avais-je pensé cela qu’un bruit aigu comme le cri d’un oiseau résonna autour de moi. Il provenait du trou que j’avais ouvert. Un sifflement ! L’autre soldat donnait l’alarme !

Quelques instants plus tard, de partout, de près ou de loin, d’autres sifflets s’étaient joints au chœur. Tweee, tweeeet !!

Chacun sonnait légèrement différemment, probablement pour permettre aux gens d’identifier leur emplacement exact. Lorsque mon adversaire avait vu que j’avais cessé de lui lancer des canons à pierre, il cria : « Nous avons créé un blocus autour de cette zone ! D’autres soldats seront là dans un instant. Cessez votre lutte futile et rendez-nous la fille ! Nous ne vous ferons pas de mal ! »

Cette zone était sur le point d’être envahie. Cependant, j’avais encore une carte dans ma manche. « Aisha ! Accroche-toi bien ! »

« Huh!? »

« Ne lâche pas, quoi qu’il arrive ! »

Malgré sa confusion, Aisha enroula ses bras autour de ma taille et serra. J’avais saisi sa chemise de la main gauche et j’avais canalisé le mana dans la droite. Puis, j’avais conjuré une lance de terre avec une pointe aplatie à mes pieds et je l’avais utilisée comme une catapulte pour nous lancer dans le ciel.

« Qu-quoi !? »

« Aaaaaaaah ! »

Ah ha ha ! À plus tard, loosers !

Au fait, je m’étais cassé les deux jambes lors de mon atterrissage. Je n’allais certainement plus jamais faire ça.

***

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