Chapitre 7 : Deux possibilités
Partie 2
« Et… ? » J’avais commencé en secouant légèrement la tête. « Que veux-tu en retour ? »
Même si ce n’était que des cailloux pour lui, il avait pris le temps de les rassembler. Il n’avait aucune raison de les remettre gratuitement. Il était parfaitement évident qu’il voulait une sorte de compensation. Si c’est le cas…
« Hmm, voyons voir…, » dit Kudou, en remettant César dans sa manche. « Senpai, te souviens-tu de la proposition que j’ai faite la dernière fois ? »
C’était exactement ce que je pensais que ce serait. Je l’avais vu venir, mais j’avais quand même froncé les sourcils.
« Donc tu dis que je dois m’allier à toi pour obtenir ton aide ? » avais-je demandé.
Kudou avait fait cette proposition quand nous nous étions séparés au Fort de Tilia. Je vivais en harmonie avec mes monstres, tandis que Kudou maîtrisait les siens. Bien que nos positions soient différentes… ou peut-être parce qu’elles le sont, nos capacités se complétaient parfaitement. Les forces de l’un couvraient les faiblesses de l’autre. Ensemble, nous pourrions peut-être sauver ce monde de la menace rampante des Terres forestières, ou le détruire entièrement. Bien sûr, Kudou ferait une fixation sur moi, étant donné cela.
Dans ce cas, sa proposition n’était pas si scandaleuse. Il me proposait de me prêter sa main en échange de la mienne — un échange vraiment équitable. Je savais parfaitement à quel point la capacité de Kudou était puissante. Si je pouvais emprunter sa force, la probabilité de sauver Lily augmenterait considérablement.
Cependant, s’allier à Kudou signifie se séparer de l’humanité. Je ne peux pas être d’accord.
Avant même que je puisse lui répondre, Kudou avait pris la parole, voyant clair dans mes pensées. « Senpai, je ne pense pas que ce soit une si mauvaise affaire pour toi, » dit-il d’un ton persuasif, tout en restant calme. « Cela fait environ deux mois que tu n’as pas côtoyé la société humaine ici, non ? Tu devrais avoir compris depuis le temps. Je veux dire, avec qui tu dois t’allier. »
Je m’étais tu.
« As-tu vraiment l’intention de te battre jusqu’à la mort pour un monstre !? »
Les mots d’Iino avaient résonné dans mon esprit. De mon point de vue, c’était des mots cruels. Cependant, ce n’était pas le vrai problème derrière sa déclaration. Et Iino n’était pas la seule à penser de cette façon.
Disons que vous aviez deux personnes. L’une est capturée et mourra si elle reste seule. Cependant, si l’autre offre sa vie, le captif sera sauvé. Supposons maintenant qu’un ami du captif apprenne la situation. Il ne dira pas à l’autre personne de renoncer à sa vie pour sauver le captif. Il ne le peut tout simplement pas. Personne ne traitera non plus l’autre personne d’inhumaine pour ne pas avoir sacrifié sa propre vie.
Cependant, disons que la personne n’est pas humaine. Alors quoi ? Si offrir la vie de quelque chose d’inhumain — comme un monstre — permet de sauver le captif, le consensus ne sera-t-il pas alors différent ? Considérons maintenant un monde constamment menacé par des monstres. La plupart des gens pensent que le monstre doit être sacrifié.
En bref, c’était la situation dans laquelle je me trouvais. La grande majorité des gens fronceraient les sourcils devant une personne prête à se battre à mort contre une autre pour lui avoir volé son précieux animal de compagnie. Le trésor d’une personne n’avait pas la même valeur pour tout le monde. Vivre avec des monstres signifiait porter le fardeau de telles déviations cognitives et tous les inconvénients qui en découlaient.
« Tu chéris tes serviteurs, alors ne devrais-tu pas te joindre à moi ? » demanda Kudou.
Il y avait une certaine persuasion dans ses paroles, mais il avait tort.
« Quelle absurdité, » répondit immédiatement Gerbera. Ses mots étaient comme le salut de mon cœur. « Tu marches sur le chemin du carnage sanglant. Tu vas tuer tes ennemis, tes alliés, et même toi-même. » Elle s’était arrêtée et avait regardé Kudou dans les yeux. « Dis-tu à mon seigneur de devenir comme toi ? De nous traiter comme des pions jetables ? »
« Je pense que ce serait beaucoup plus facile pour lui de cette façon, » dit Kudou. L’interruption de Gerbera était inattendue, mais il avait immédiatement repris ses esprits. « En tant que serviteur, ne devriez-vous pas vous sacrifier pour son bonheur ? »
« Quelle plaisanterie ! Même si c’est plus facile comme ça, ce n’est pas le chemin du bonheur, » affirma Gerbera avec détermination. « Tu ferais bien de ne pas te moquer de nous. L’homme dont nous sommes tombées amoureuses n’est pas un lâche au point de tourner le dos au bonheur en prétextant une situation difficile. »
« C’est ce que tu dis, Araignée Blanche, » dit Anton avec un regard de robot alors que Gerbera levait le menton avec fierté. « Même toi, tu trouveras que c’est un trop lourd fardeau de combattre un tricheur avec ton corps dans cet état pitoyable. Tu es toute seule avec un roi qui ne peut rien faire. Comment vas-tu sauver ce slime ? »
« Hmph. Un état pitoyable, dis-tu ? C’est peut-être ce qu’il semble à tes yeux pourris, » dit Gerbera, en jetant un coup d’œil à ses jambes manquantes et en se moquant, « mais c’est un dangereux malentendu. »
Dès qu’elle eut terminé, un torrent tangible et visqueux de soif de sang explosa de son corps svelte. Anton se figea complètement, comme si les fils d’araignée de Gerbera la tenaient tendue, incapable de supporter la moindre pression.
« Je suis forte comme je suis maintenant, » déclara Gerbera avec un beau sourire.
Même si elle avait perdu davantage de ses meilleures armes — ses pattes vicieuses — son état est loin d’être pitoyable.
« Après tout, le désir présent dans mon cœur vient d’être exaucé, » poursuit Gerbera. « Je ne pourrais pas être en meilleure forme. Permets-moi de te dire encore une chose. Je peux puiser dans mes forces précisément parce que mon seigneur est avec moi. Ne va pas prétendre qu’il ne peut rien faire comme si tu savais tout. Sa valeur ne réside pas dans de tels endroits. »
Anton n’avait pas pu dire un mot.
« On dirait que tu n’es bon qu’à débiter des imbécillités » ajouta Gerbera.
Dora, la progéniture mutée d’Anton, avait pris la parole à la place de sa mère. « L’arme de la Grande Araignée Blanche n’est-elle pas ses serres, mais ses lèvres mileuses ? »
Les mains de Dora s’étaient transformées en épées noires de jais. Elle ne possédait pas les capacités d’un doppelgänger, mais pouvait apparemment manipuler son corps dans une certaine mesure.
En voyant la combativité de Dora, Gerbera laissa échapper un soupir d’admiration. « Tu es bien faite pour un être né d’un sous-fifre qui ne peut que trembler devant moi. »
« Comment osez-vous vous moquer de ma mère ! »
« Je voulais en fait te féliciter d’avoir si bien tourné malgré le fait que tu aies été traitée comme une ratée. Dans le monde de notre seigneur, il y a un dicton qui dit qu’une grande personne peut naître de parents parfaitement ordinaires. »
« Espèce d’enfoirée ! »
Des étincelles invisibles volaient entre elles. Gerbera était devenue plutôt belliqueuse après qu’Anton m’ait insulté. À ce rythme, notre conversation n’aboutirait à rien. Finalement, c’était aux deux maîtres de les arrêter.
« Arrête ça, Dora. Qui t’a dit que c’était bien de te battre ? »
« Gerbera, toi aussi. »
Gerbera s’était retournée vers moi et avait haussé les épaules. En revanche, Dora était tombée à genoux, serrant son cou. Kudou avait probablement exercé sa capacité.
« Les choses sont devenues plutôt incontrôlables, n’est-ce pas ? » dit Kudou, baissant son regard vers Dora à genoux avant de me faire face. « Recommençons. »
« Bien, » avais-je répondu d’un signe de tête. « Bien que Gerbera ait déjà dit à peu près tout ce que je voulais dire. »
« Alors tu veux dire…, » murmura Kudou, ses yeux s’élargissant très légèrement.
« Oui. Je partage son opinion, » avais-je déclaré.
Il y avait des parties de la déclaration de Gerbera qui me surestimaient ici et là, mais ce qu’elle avait dit explicitement venait de sa confiance en moi. En tant que tel, je voulais répondre à sa confiance en tant que son maître… Non, pas comme son maître, mais comme l’homme à qui elle avait offert son cœur.
« Je te l’ai déjà dit avant, de toute façon. Je ne suis pas un Roi-Démon. Je suis leur maître. »
Je ne pouvais pas suivre le même chemin que Kudou. J’étais destiné à prendre un chemin différent. Tant que je ne pouvais pas me joindre à lui, il n’y avait aucune chance que j’accepte son offre. En un sens, c’était la seule façon dont ça aurait pu se passer depuis le début. Le vrai problème avait commencé ici avec mon refus.
« Si possible, je préférerais que tu me laisses partir paisiblement, » avais-je dit.
Si je devais sauver Lily, je devrais probablement affronter Takaya. Il serait préférable que je n’aie pas à gaspiller inutilement mon énergie ici. Heureusement, grâce à Gerbera, nous avions réussi à démontrer suffisamment notre potentiel de combat, indépendamment de ses blessures. S’il fallait se battre, Kudou subirait de lourdes pertes. De plus, il n’avait rien à gagner, donc il n’avait aucune raison de se disputer avec nous. En termes de gains et de pertes, il n’avait pas d’autre choix que de reculer. Tout ce qui restait était la question de ses sentiments.
« Je vois. OK, alors vas-y…, » dit Kudou. Mais il avait ajouté : « Pensais-tu vraiment que j’allais reculer comme ça ? »
Berta, qui était restée silencieuse pendant tout ce temps, avait commencé à grogner. La progéniture en forme de Juumonji d’Anton dégaina l’épée à sa taille. Le slime sale César avait suinté de la manche de Kudou. Dora se remit debout en titubant et transforma à nouveau ses bras en épées. En les regardant se préparer au combat, j’avais poussé un soupir.
merci pour le chapitre