Monster no Goshujin-sama (LN) – Tome 4 – Chapitre 13 – Partie 1

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Chapitre 13 : Le mystère restant

Partie 1

J’étais resté là, abasourdi, en écoutant sa vie quitter son corps. Je n’avais toujours pas balancé mon épée. Une lame noire avait volé de nulle part et dépassait maintenant du dos de Juumonji qui était étendu face contre terre. L’épée, qui semblait faite d’une ombre, avait volé la vie de Juumonji. Cet événement inattendu avait stoppé net mes pensées.

« Takahiro ! » Shiran avait crié en se plaçant devant moi.

D’innombrables épées d’ombre nous tombaient dessus depuis devant nous.

« A-Argh… »

Shiran les avait repoussés l’une après l’autre, mais elles étaient trop nombreuses. Même elle serait dépassée si elle continuait à me couvrir. J’avais sauté en arrière par réflexe et elle avait suivi peu après. Des dizaines d’épées sortaient du sol là où nous nous tenions. Cependant, les choses ne s’étaient pas arrêtées là. Des lames encore plus sombres nous avaient poursuivis.

« Maître ! »

« Replie-toi, mon Seigneur ! »

Lily et Gerbera nous avaient rejoints et avaient intercepté l’attaque. Gerbera avait déployé une sorte de filet avec ses deux mains, bloquant les lames qui arrivaient. La lance de Lily avait repoussé celles qui avaient réussi à passer à travers. Notre assaillant avait dû juger que toute autre attaque était inutile, ou peut-être y avait-il une limite au nombre d’épées qu’il pouvait déchaîner. En tout cas, l’assaut s’était arrêté.

« Il y a quelque chose là… »

J’avais réfréné mon cœur battant la chamade et j’avais essayé de confirmer la situation. Les épées étaient toujours en tas sur le sol du couloir. Au-delà d’elles, je pouvais voir une grande ombre à forme humaine qui ne comportait qu’un haut de corps. J’avais déjà vu ce type de monstre auparavant. On l’appelait un doppelgänger. Mais ce spécimen était un peu différent de ceux que je connaissais.

Il était énorme. Bien qu’il ne s’agisse que du haut du corps, il mesurait facilement trois mètres de haut. Ses tripes étaient tellement gonflées qu’on aurait pu croire qu’il avait avalé un humain entier. Il était plusieurs fois plus grand que n’importe quel doppelgänger normal.

« Maître, fais attention. Quelque chose ne va pas ici, » dit Lily, sa lance prête à l’emploi.

Immédiatement après, les épées d’ombre dans le sol avaient commencé à changer de forme.

« Qu’est-ce que… !? »

L’une après l’autre, elles s’étaient effondrées, se mélangeant en plusieurs masses. Les ombres avaient finalement pris la forme de dizaines de doppelgängers. Le couloir s’était rempli de monstres en un instant. Une horde était née d’un seul énorme spécimen. C’était la première fois que je voyais un tel phénomène, mais j’avais déjà entendu parler d’un être capable d’un tel comportement.

« Un monstre qui donne naissance à d’autres… Une reine ? »

Les monstres possèdent du mana. Ceux qui accumulaient du mana au-delà d’une certaine limite pouvaient donner naissance à de nouveaux monstres. On les appelait les reines des monstres. Le grand doppelgänger devant nous était certainement un de ces spécimens.

Tout allait bien jusqu’à ce moment-là. C’était surprenant, mais je savais au moins ce que c’était. Ce qui avait suivi, cependant, était tout à fait en dehors des limites de mon imagination.

« Maître, c’est vraiment une reine-monstre, non ? » dit Lily d’une voix rauque. « Alors pourquoi n’est-elle pas connectée à nous par le cheminement mental ? »

En tant que visiteur d’un autre monde, j’avais la capacité de me connecter au cœur des monstres qui possédaient une grande quantité de mana. Pour simplifier, je pouvais me connecter aux monstres rares et plus. Les reines étaient bien au-delà des monstres rares. Et pourtant, le monstre devant moi, la doppelqueen, par manque de meilleur terme, n’était pas connecté à moi.

Même avec Shiran, qui était un cas assez spécial, j’avais été capable de saisir un mince lien filiforme entre nous. Ici, je ne pouvais rien sentir. En d’autres termes, le monstre devant moi avait défié les règles que je connaissais.

« Qu’est-ce que vous êtes exactement ? » avais-je demandé, mais je ne m’attendais pas à une réponse.

Les monstres ne possédaient pas d’ego tant que le cheminement mental n’était pas connecté. C’est ainsi que ma capacité fonctionnait. En tant que tel, il n’y avait aucun moyen pour ce monstre de répondre. Il n’y avait aucune possibilité normale…

« Je n’aurais jamais pensé que Juumonji Tatsuya serait vaincu dans une collision frontale. »

Une réponse était néanmoins venue. C’était la voix d’un garçon viril. J’avais dégluti en l’entendant. C’était la voix de Juumonji. Ce n’était pas la personne en question, bien sûr. Il était déjà mort. C’était une imitation élaborée de lui. La horde de doppelgängers avait copié sa forme en même temps.

Ils ne pouvaient que reproduire son apparence, mais l’imitation était suffisamment parfaite pour qu’il soit impossible de les distinguer de l’original. Il y avait juste une différence majeure. Il n’y avait rien qui ressemblait à une expression sur leurs visages.

Pour le meilleur ou pour le pire, aucune de ses qualités humaines ne transparaissait — pas la moindre trace de l’égoïsme qui avait déchiré un nombre incalculable de victimes, rien de l’arrogance qui avait ignoré le mal qu’il avait causé, rien de l’attitude froide qui avait scruté tous ceux qui l’entouraient. Ce seul élément manquant banalisait l’existence de Juumonji Tatsuya bien plus cruellement que le simple fait de sculpter son portrait.

Ils s’étaient tous tournés vers moi à l’unisson avec leurs visages sans expression. C’était une scène bizarre qui semblait destinée à déstabiliser mon esprit.

« Disons que vous avez été splendide, deuxième roi. »

Le Juumonji Tatsuya le plus proche de moi avait parlé. Sa voix était coupée et sèche, comme une machine. Il n’y avait aucune émotion.

« J’ai été pleinement témoin de votre pouvoir. Vous avez bien réussi à dompter ce monstre mort-vivant diabolique. »

Un corps différent avait parlé cette fois, suivi d’un autre encore.

« Gerbera, c’est ça ? Cette grande dame araignée est terriblement effrayante. »

« Le mimétisme du slime est également anormal. »

« Il l’appelait Lily, non ? »

« Les autres aussi. »

« Ayame et Asarina. »

« Ils ont dit qu’il y en avait un autre à l’extérieur de la forteresse. »

« Rose, je crois. »

Les orateurs changeaient l’un après l’autre, mais ils étaient tous Juumonji Tatsuya. Ils avaient même évoqué les noms de tous mes serviteurs, y compris celui de Rose, qui n’était pas là avec nous.

« Sa voie est différente de celle de notre roi. »

« Un pouvoir inquiétant. »

« Une menace assez grande comme il est maintenant. »

« J’avais ciblé la vie de cet homme — »

« — Tout ce temps. »

Le dernier spécimen à parler était le seul à conserver sa forme de monstre, la doppelqueen. Elle avait brandi le corps du vrai Juumonji. Je n’avais pas eu le temps de l’arrêter. Elle avait ouvert sa bouche en grand et avait avalé son corps.

L’énorme ombre se tortillait tandis qu’un craquement sec et humide résonnait dans l’air. C’était le son de la mastication. Et avec une grande gorgée, son ventre gonflé avait encore plus grandi. Avec cela, Juumonji Tatsuya avait éternellement disparu de ce monde en servant de nourriture à un monstre.

Je suppose que son apparence est toujours là, cependant… Des douzaines d’entre eux, en fait.

Le Juumonji Tatsuya qui avait offert le vrai cadavre au doppelqueen s’était retourné et avait tapoté son ventre.

« Merci pour le repas. »

« Il parle… ? » murmura finalement Lily, donnant voix à mes propres soupçons. « Un sosie ? Par sa propre volonté ? »

Un doppelgänger peut copier la forme de sa cible. Cependant, même s’il copiait un humain, il ne pouvait pas manipuler les mots. Ils n’avaient pas d’ego, après tout. Pourtant, le spécimen devant nous parlait avec nous. En d’autres termes, peu importe la forme qu’il prenait, cela prouvait qu’il avait une volonté propre.

« Serait-ce le monstre parlant dont Sakagami avait parlé ? » Je gémis doucement.

Sakagami l’avait mentionné après que nous l’ayons coincé. Il pouvait donner des ordres aux autres monstres en passant par un seul spécimen qui avait une volonté. Si c’était ce même monstre, il était logique que ma capacité ne fonctionne pas sur lui.

J’étais un tricheur, mais ce monstre était sous l’effet de la tricherie de quelqu’un d’autre. Ce n’était pas que les règles avaient changé, c’était que les règles étaient différentes. C’est pourquoi mon pouvoir ne fonctionnait pas. D’après ce que je pouvais voir de Lily et des autres filles, elles n’étaient pas non plus sous l’influence de ce pouvoir, donc ma supposition était probablement correcte.

« Ça fait de toi Berta, non ? »

Tous les Juumonji Tatsuyas avaient souri en même temps. Pendant un instant, je n’avais même pas réalisé qu’ils souriaient. Chaque fois que les humains souriaient, même si c’était faux, il y avait une sorte d’émotion derrière. Mais le sourire de Berta n’avait rien de tout cela. C’était comme si des lèvres courbes avaient été collées sur la peau. Je ne pouvais rien ressentir d’autre que du dégoût.

Je ressentais un intense sentiment de malaise face à son comportement inhumain, précisément parce qu’elle ressemblait un peu à un humain. Le simple fait de la regarder me rendait malade. J’avais envie de vomir. C’était comme regarder d’innombrables mille-pattes frétillants. Il n’y avait aucune réalité dans la scène qui se déroulait devant moi. Je commençais à avoir de plus en plus la tête qui tourne.

« Ne te laisse pas entraîner, mon Seigneur. »

Une main gracieuse s’était posée sur mon épaule.

« Ger... bera... ? »

« Quelle ruse impertinente ! Ce charme est d’un vulgaire. »

… charme ? J’avais l’impression que je venais seulement de remarquer le brouillard qui recouvrait ma conscience après qu’elle ait mentionné cela. J’avais entendu pendant les conférences de Kei qu’il y avait en fait des monstres qui pouvaient lancer des charmes.

Les Charmes n’infligeaient pas de dommages directs au corps physique, mais déchiraient l’esprit. On pouvait y résister dans une certaine mesure en utilisant le mana, mais cela signifiait aussi qu’il était exceptionnellement facile d’en être la proie lorsqu’on était pris au dépourvu. Par exemple, dans le cas d’un certain monstre de type végétal, la beauté d’une fleur en pleine floraison ou un parfum riche pouvait voler la conscience de leur proie et les ensorceler. Cependant, je n’avais jamais entendu parler de sosies possédant ce pouvoir. C’était probablement une capacité inhérente à la doppelqueen Berta.

« Ressaisis-toi, mon Seigneur. Si tu te laisses entraîner, il sera d’autant plus facile de t’ensorceler. »

« C’est donc comme ça que ça marche… » avais-je dit avec un gémissement.

Je savais maintenant que c’était un coup calculé de ce monstre. En fait, même Lily et Shiran étaient ensorcelées par la scène bizarre qui se déroulait devant elles. La seule raison pour laquelle Gerbera avait pu garder son calme est qu’elle n’avait pas beaucoup d’expérience avec les humains. Ce spectacle était effroyable pour un humain, mais pour un monstre pur comme elle, c’était juste un peu bizarre. En outre, sa position sur la question avait également joué un rôle.

« N’oublie pas, mon Seigneur. Nous sommes avec toi. Il n’y a rien à craindre. Peu importe ce que c’est, on ne peut le confondre qu’avec un ennemi qui nous veut du mal. Donc, c’est une affaire simple. Tout ce que nous devons faire, c’est l’écraser, non ? »

La logique de Gerbera allait droit au but. C’est pourquoi elle n’avait pas hésité. Mais c’était un énorme obstacle pour le sosie qui essayait de nous ensorceler.

« Il semble que le seul qui soit spécial soit le grand au fond. Les autres ne sont que des terminaux sans âme. Tout sera fini quand on l’aura détruit. »

Les jambes de Gerbera s’agitèrent, faisant tressaillir les Juumonji Tatsuyas.

« Elle est vraiment effrayante. »

« Vous êtes effrayante. »

« Elle est à un niveau totalement différent du mien. »

« Je suis jaloux. »

« Je suis envieux. »

Ils semblaient avoir du ressentiment.

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