Chapitre 6 : Nouvelle famille
Partie 2
Luxon projeta une image améliorée pour que je puisse voir Finn et Brave quitter le port aux côtés du reste de la délégation de l’empire. Je les avais observés en train de nous regarder.
« Ça a l’air vraiment pratique, la façon dont les costumes démoniaques peuvent partager leur vision comme ça », avais-je fait remarquer avec un sourire niais, sachant très bien que Luxon détesterait l’entendre.
« Si c’est tout ce qu’il faut pour t’impressionner, je pourrais accomplir le même exploit avec quelques outils. Pourquoi ne remplacerais-je pas ton œil par un implant adéquat afin de mieux partager les données visuelles ? »
« Devenir cyborg, ça a l’air assez génial, mais je préfère un peu rester un humain à part entière. »
Le fait de faire des bêtises me donnait l’impression que nous étions revenus à notre routine quotidienne normale. Malheureusement, cela n’avait pas duré.
« Je pourrais faire exploser leur vaisseau avec mon canon principal et mettre fin à la menace qu’ils représentent une fois pour toutes », proposa Luxon.
« Si nous prévoyons de nous échapper, à quoi cela nous servira-t-il ? Tu ne feras que donner à l’empire une justification pour nous envahir. »
« Ils se moquent de la justification. Ils envahiront quoi qu’il en soit. »
Nous avions regardé le navire partir, sa coque disparaissant progressivement au loin. Le reste de la foule commença à se disperser.
« Ton grand frère est dans la capitale », déclara soudainement Luxon.
« Vraiment ? »
« Il est en train de visiter le domaine des Roseblade. Voudrais-tu le voir et lui expliquer la situation avant qu’il ne parte ? »
J’avais hoché la tête d’un air pensif. « Oui, je pense que ce serait une bonne idée. Faisons-le. »
Nicks n’avait pas parlé de visite. Une urgence quelconque avait-elle exigé sa présence ?
☆☆☆
Les Roseblade avaient leur propre territoire, mais ils conservaient également une résidence dans la capitale. Les derniers renseignements parvenaient toujours à la capitale avant de se répandre ailleurs, l’emplacement était donc avantageux à cet égard, et il y avait d’autres avantages à posséder un domaine ici. C’est pourquoi les Roseblade avaient pour voisins d’autres familles de l’aristocratie de Hohlfahrt.
Il était un peu plus de midi lorsque j’étais passé à leur manoir. Un serviteur m’avait utilement guidé jusqu’au salon, où j’avais eu la surprise de constater qu’en plus de Nicks, mes sœurs Jenna et Finley étaient également présentes.
Nicks était vêtu d’un costume pimpant, il m’avait accueilli avec bonne humeur. « Je ne m’attendais pas à ce que tu passes tout d’un coup ! Qu’est-ce qui t’amène ici ? »
« Oh, je viens d’apprendre que tu étais dans le quartier. »
« Quoi ? Alors tu es venu juste pour me voir ? » Il arqua un sourcil sceptique — à juste titre, étant donné mes antécédents en matière de problèmes. « Eh bien, tu arrives au bon moment. Il y a quelque chose que je veux te dire. » Nicks se tourna vers la porte. « Dorothea ? Tu peux entrer maintenant. »
Une servante s’approcha de la porte et l’ouvrit pour faire entrer ma belle-sœur, Dorothea Fou Bartfort. Dorothea entra dans la pièce, les mains serrant doucement son ventre gonflé de femme enceinte.
Elle me regarda et sourit. « C’est dommage. Nous avions prévu de garder la surprise pour un peu plus tard. »
Ma mâchoire se décrocha. « Ton estomac », commençai-je, incertain de ce que je voulais dire.
Elle gloussa. « Je suis enceinte, bien sûr. »
Nicks se dirigea vers sa femme souriante et l’entoura doucement de ses bras. « Tu étais le seul à ne pas t’en rendre compte, alors nous avons pensé à te surprendre », expliqua-t-il.
Dorothea était si avancée qu’elle aurait probablement déjà l’accouchement du bébé à la fin des vacances d’été.
Jenna me jeta un regard me jugeant. « Tu es vraiment un imbécile. Honnêtement, je suis à jamais stupéfaite que tu te sois élevé au rang d’archiduc. »
« Oui, » Finley était d’accord. « Je dois dire que tout le monde a compris depuis longtemps. »
Ignorant leur exaspération manifeste, Dorothea me fit signe d’aller vers elle. J’avais hésité avant de m’approcher bêtement.
« Veux-tu le sentir ? » demanda-t-elle en indiquant son ventre.
J’avais tressailli. « Quoi ? Non, je ne peux pas. C’est… Ça me semble inapproprié. »
Je n’avais pas refusé par manque d’intérêt. Mais le consensus général au Japon était qu’il n’était pas acceptable de toucher le ventre d’une femme enceinte si tu n’étais pas son mari.
Dorothea me fit un sourire gêné. « Crois-moi, si quelqu’un le faisait sans permission, je lui enlèverais le membre incriminé. Il s’agit d’une exception spéciale. En tout cas, cela signifie que notre famille s’agrandit. »
Le début de cette réponse avait quelque chose de… menaçant, mais j’étais trop préoccupé par sa dernière remarque pour m’y attarder. « Notre famille s’agrandit. » Ma poitrine se serra.
Avec beaucoup d’appréhension, j’avais tendu la main et l’avais appuyée sur le ventre gonflé de Dorothea. Il y eut une petite ondulation de mouvement sous le bout de mes doigts. « Wôw ! » Je sursautais, les yeux s’ouvrirent en grand.
Nicks et Dorothea avaient ri.
Jenna soupira d’un air rêveur en observant la scène. « J’espère être bientôt enceinte du bébé de Lord Oscar. Cela solidifierait mon avenir en tant que son épouse. »
« C’est une bien mauvaise raison de vouloir un enfant, » déclara Finley d’un ton tranchant. « Fais attention à ce qu’il ne t’abandonne pas avant. »
« Oh, tout ira bien. Lord Oscar est fou de moi ! »
Finley ricana. « Tu es vraiment ennuyeuse. »
J’avais laissé leur odieux badinage entrer par une oreille et sortir par l’autre, ma main toujours fermement plantée sur le ventre de Dorothea. Cette grossesse m’avai fait perdre la tête.
Le bébé ira-t-il bien, comme nous ? Ou bien aura-t-il les mêmes problèmes et symptômes qu’Erica ? Creare avait prévenu que l’état d’Erica deviendrait de plus en plus fréquent. Des tonnes de gènes allaient s’inverser pour s’adapter à ce qui était censé être une atmosphère moins toxique. Je m’étais rappelé que la solution la plus sûre pour le nouveau bébé et ses parents était de se joindre à moi pour fuir la planète.
« Pour te dire la vérité, » dit Nicks, interrompant mes pensées, « les Roseblades nous ont invités ici pour fêter le bébé. Dorothea est si avancée que j’étais inquiet à l’idée de l’emmener sur un dirigeable, mais nous avons pensé qu’elle serait plus à l’aise à la maison. »
Dorothea reposa sa tête sur l’épaule de son mari. « C’est incroyable le nombre de parents qui sont venus me voir. J’aurais peut-être mieux fait de rester chez les Bartfort. »
« Je n’aurais jamais imaginé que mes frères et sœurs débarqueraient comme ça. Je suis désolé. » Nicks lui caressa doucement les cheveux.
« Tout va bien. Tous ces visages familiers sont rassurants. »
« Quoi qu’il en soit, les Roseblades ont des tonnes de parents », ajouta Nicks. « J’ai été choqué. »
« Et ce ne sont que ceux qui s’entendent bien. En y pensant, je m’attends à ce que les amis de mon père passent bientôt avec des cadeaux pour le bébé. Ils m’ont toujours chouchouté quand j’étais plus jeune, alors j’ai hâte de les revoir. »
Le couple heureux discutait avec contentement de leur vie, inconscient de ce qui se passait dans ma tête.
Il n’était pas surprenant que les Roseblade aient de nombreux parents et connaissances. Mais si je suggérais de fuir la planète, combien d’entre eux Dorothea insisterait-elle pour emmener ?
J’avais retiré ma main du ventre de Dorothea, et Jenna n’avait pas perdu de temps pour se moquer de moi. « Je parie que tu le gâteras à mort et que tu seras beaucoup trop protecteur, que ce soit un garçon ou une fille. »
Finley acquiesça. « Oui. Il n’a aucune patience avec ses sœurs, mais je parie qu’il sera doux avec une nièce ou un neveu. Probablement même indulgent. D’une manière agaçante. »
Elles avaient ricané.
D’ordinaire, c’est à ce moment-là que j’aurais pu faire une remarque sarcastique, mais je n’en avais pas l’énergie. Tout ce que j’avais pu faire, c’est leur sourire.
« Qu’est-ce qui ne va pas ? » demanda Nicks avec inquiétude. « Tu n’es pas bien ? »
« Non, ça va. »
« Si tu es sûr de toi. Oh ! Nous aimerions te demander une faveur, en fait. Ça ne te dérange pas ? »
Aveuglé, j’avais secoué la tête d’un air engourdi.
« Il s’agit d’une tradition des Roseblade », expliqua Dorothea. « Emmener un nouveau-né à bord d’un impressionnant dirigeable est censé l’aider à grandir et à être digne de son nom de famille. Nous espérions que tu nous laisserais emprunter l’Einhorn pour l’occasion. »
« Vous voulez utiliser l’Einhorn ? » avais-je répliqué.
Nicks tapa ses mains l’une contre l’autre, puis les tendit vers moi, en suppliant. « S’il te plaît ! Je sais que notre bébé nous rendra fiers s’il peut monter sur un navire aussi célèbre que l’Einhorn ! Et j’aimerais vraiment lui montrer le ciel dégagé. »
Le ciel dégagé, hein ?
Alors que son mari décrivait ses rêves pour leur enfant, Dorothea rayonnait. « Je suppose que tu parles toujours de faire un voyage en famille avec le petit. »
Les joues de Nicks s’étaient colorées et il avait ri maladroitement.
Aucun des deux ne le savait, mais leur bonheur et leurs rêves étaient comme des couteaux dans ma poitrine, coupant de plus en plus profondément.
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merci pour le chapitre