Le Monde dans un Jeu Vidéo Otome est difficile pour la Populace – Tome 11 – Chapitre 7 – Partie 1

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Chapitre 7 : Le coureur de jupons

Partie 1

« Cher et tendre Léon ! »

Un dirigeable de la maison Atlee était arrivé à bon port dans le port de transport public de Frazer. Clarisse Fia Atlee m’avait fait un signe excité depuis le pont. Elle avait été ma camarade de classe à l’académie, mais avait depuis obtenu son diplôme. Ses cheveux orange vif dansaient dans le vent et ses yeux émeraude étaient rivés sur mon visage.

J’avais envoyé une lettre à Miss Clarisse pour qu’elle me tienne au courant de l’évolution de la situation au palais. Je m’attendais à ce qu’elle me réponde simplement, mais vu son apparition soudaine, j’avais plutôt l’impression de l’avoir convoquée par inadvertance.

Je me sentais coupable qu’elle se soit donné du mal pour venir ici, mais le fait de voir la façon dont elle souriait en continuant à me faire des signes me soulagea.

Une fois la passerelle abaissée, Clarisse descendit à ma rencontre.

 

 

« Désolé de t’avoir fait faire tout ce chemin », avais-je dit.

« Oh ? N’es-tu pas content de me voir ? »

« Bien sûr que oui, mais ça n’a pas dû être facile de se rendre dans une région frontalière dans les circonstances actuelles. »

Nous étions sur le point d’entrer en guerre. Le pays tout entier avait été plongé dans le chaos. Commander des dirigeables était devenu beaucoup plus compliqué.

Alors que je m’éloignais du dirigeable de sa famille, Miss Clarisse se plaça à mes côtés d’une démarche aisée. « Frontière ou pas, je suis en sécurité tant que tu es là, n’est-ce pas ? D’ailleurs, j’ai pensé qu’il serait plus pratique de venir te parler directement », dit-elle.

Je penchais la tête. Qu’est-ce qui est pratique dans tout ça ?

Miss Clarisse avait fait volatiliser son expression, le sourire disparaissant de son visage. Elle n’allait pas tourner autour du pot. « Y a-t-il un endroit où nous pouvons aller sans être interrompus ? Ce dont je suis venue te parler n’est pas destiné à être entendu par quelqu’un d’autre. Je préférerais te parler seul à seul. »

Quoi qu’il en soit, cela doit être très important. J’avais jeté un coup d’œil à Luxon. « Qu’en penses-tu ? »

« Si vous menez votre discussion à bord de l’Einhorn, vous pouvez être sûrs que personne n’écoutera aux portes. Bien sûr, j’assisterai également à votre réunion. » Il regarda Miss Clarisse.

« C’est très bien. Cela ne me dérange pas. Après tout, tu es le familier de Léon. »

« Je ne suis rien de tel. Mon existence n’a rien de magique ni de mystique. Je suis l’incarnation de la réussite scientifique. »

Miss Clarisse avait souri alors même qu’il la corrigeait. « Bien sûr, désolée pour ça. »

 

☆☆☆

 

Nous étions montés à bord de l’Einhorn et nous nous étions dirigés vers la salle commune. Miss Clarisse s’était rapidement assise sur le canapé pour transmettre les dernières nouvelles du palais.

« Pour faire court, le gouvernement central a déjà commencé à procéder à un plan d’abandon des seigneurs régionaux et de leurs maisons. »

« Le ministre Bernard soutient-il cette démarche ? » avais-je demandé.

En plus d’être le père de Miss Clarisse, il était l’un des principaux ministres de Hohlfahrt. En tant que noble de la cour, il connaissait bien les rouages de la politique.

« Il s’est opposé à la mesure, mais il semble que Sa Majesté l’ait fait passer malgré tout. » Les sourcils de Miss Clarisse s’étaient froncés dès qu’elle mentionna la reine, apparemment par méfiance. « Mais je dois dire que ce n’est pas si surprenant. Elle est originaire de Lepart, et elle a une véritable dent contre Rachel. »

« De la rancune, tu dis ? »

Elle acquiesça. « Les États qui forment le Royaume-Uni de Lepart ne se sont unis qu’à cause des invasions incessantes de Rachel. Il y a longtemps, ils n’étaient qu’une bande de petits pays entassés sur un continent, constamment en conflit les uns avec les autres. Je crois savoir que Rachel leur a vraiment fait du tort. »

D’après la façon dont elle avait présenté les choses, on dirait que Rachel a l’habitude de se mettre à dos tout le monde dans le voisinage. Les qualifier de mauvais voisins est un euphémisme.

« C’est donc pour cela que Sa Majesté fera tout ce qu’il faut pour les écraser », avais-je dit.

« Oui, parce qu’ainsi, son pays d’origine, Lepart, pourra enfin dormir sur ses deux oreilles. Le royaume sera le plus mal en point, certes, mais la famille royale récoltera tout de même les fruits de ce résultat. »

C’était à mon tour de froncer les sourcils.

« Tu dois savoir que tout le monde n’est pas d’accord avec cette stratégie », ajouta rapidement Miss Clarisse. « En fait, Sa Majesté y était fortement opposée. »

« Roland était contre ? » Ma voix s’était étranglée sous l’effet de la surprise.

« Wôw. Je n’arrive pas à croire que vous vous tutoyez. Mais bon, tu es sans doute la seule personne du royaume à pouvoir s’en tirer comme ça. »

Même Roland n’avait pas pu m’arrêter. Quel roi inutile !

Miss Clarisse quitta son siège actuel pour s’installer à côté de moi. « Alors, qu’est-ce que tu veux faire ? »

« Si possible, j’aimerais conclure les choses avant qu’une véritable guerre n’éclate », avais-je dit.

Miss Clarisse détourna le regard. « Si c’était si facile, nous ne serions pas dans ce pétrin. Ce n’est pas comme si renverser le royaume de Rachel allait résoudre tous nos problèmes. Si tu dépasses les bornes, l’empire interviendra. Cet étudiant transféré — le chevalier impérial — c’est ton ami, non ? Si les choses tournent au vinaigre, tu pourrais te retrouver face à lui sur le champ de bataille. »

Je n’avais aucun moyen de savoir combien d’armures démoniaques l’empire avait en sa possession, mais même si la réponse était zéro, je ne cherchais pas à être ennemi de Finn. Surtout si je n’avais aucune garantie qu’il n’était pas le seul capable de combattre Arroganz à armes égales.

« Tu n’as pas tort », avais-je admis en baissant la tête en signe de déception.

Miss Clariss posa délicatement sa main sur la mienne. « Hé ! Et si nous ralliions la faction qui s’oppose à la reine ? Si nous nous donnons tous la main, Sa Majesté n’aura pas d’autre choix que de changer de cap. Au moins, nous pouvons garantir que la noblesse régionale ne sera pas abandonnée. »

« Pouvons-nous vraiment faire cela ? »

« Bien sûr. Cependant, j’exigerai une compensation en retour… »

J’avais eu du mal à suivre ses paroles. Avant que je m’en rende compte, son visage était juste à côté du mien. Nous étions si proches que nos nez s’étaient presque frôlés. J’avais cligné des yeux plusieurs fois, choqué par l’absence soudaine de distance entre nous.

« Anjelica est ici, » annonça Luxon.

« Hein ? » avais-je crié.

À peine avais-je regardé la porte qu’elle s’était ouverte en trombe. Anjelica se tenait sur le seuil, les épaules gonflées par l’effort. Elle avait dû sprinter jusqu’ici à toute vitesse. D’ailleurs, j’entendais des bruits de pas derrière elle. Livia et Noëlle étaient sur ses talons.

« Clarisse ! » avait rugi Anjie.

Miss Clarisse fit claquer sa langue en signe d’agacement et s’éloigna de moi. Pas très loin, cependant — à peine l’espace d’une main.

« Je ne faisais que plaisanter », dit-elle. « Ce n’est pas la peine de t’énerver comme ça. »

« Je ne peux vraiment pas baisser ma garde avec toi. Tu es comme le reste de la noblesse de la cour. Toujours en train de jouer au plus malin. »

« Ou bien est-ce que vous êtes comme tous les autres seigneurs régionaux ? Toujours aussi prompts à s’offenser », déclara Miss Clarisse d’une voix basse et menaçante.

Les filles se lancèrent des regards furtifs. Noëlle et Livia eurent juste le temps de les rattraper. Elles étaient bien plus essoufflées qu’Anjie, leurs visages étaient pincés par l’épuisement.

« Nous avons finalement réussi », souffla Livia.

« Anjelica, tu es trop rapide », déclara Noëlle.

Elles s’étaient effondrées sur le sol, complètement vidées de leur force.

J’avais lancé un regard à Luxon. « Tu leur as dit que j’avais rendez-vous avec Miss Clarisse ? »

« Bien sûr que je l’ai fait. »

 

☆☆☆

 

Après une petite pause, nous avions repris notre conversation précédente, mais avec mes fiancées. Miss Clarisse souriait d’une oreille à l’autre tandis que les filles la regardaient d’un air renfrogné. Leur mécontentement manifeste rendait l’atmosphère beaucoup moins confortable. Il fallait que j’en finisse.

« Quoi qu’il en soit, tu penses que nous pourrons faire en sorte que l’opposition accepte de bloquer le plan d’action actuel ? Même si cette démarche profite globalement à la noblesse de la cour ? » demandai-je.

Miss Clarisse me jeta un coup d’œil puis elle fit un petit signe de tête. « La cour est une créature compliquée. De nombreux seigneurs s’opposent à la reine, je pense donc que nous pouvons faire appel à leur coopération pour la bloquer. Honnêtement, elle s’est fait trop d’ennemis. On dirait qu’elle s’est impatientée et qu’elle a essayé de forcer son gambit, ce qui a laissé un certain nombre de personnes dans l’embarras. »

Anjie porta une main fermée à sa bouche tandis qu’elle considérait cette information. « Sa Majesté a dit que cette guerre est une excellente occasion de s’occuper des ennemis latents. Se débarrasser des traîtres fortifiera la base du pouvoir de la famille royale. »

« C’est logique. Compter sur l’influence de quelqu’un d’autre pour les maintenir au sommet nuirait à leur légitimité, après tout. » Miss Clarisse me jeta un coup d’œil en disant cela.

Ils n’avaient pas tort, j’étais le seul à pouvoir contrôler Luxon. Dans l’état actuel des choses, cela mettait la famille royale à ma merci. Si les choses continuaient ainsi, ils ne seraient royaux que de nom.

« Personnellement, j’aimerais quand même rester en bons termes avec eux », avais-je dit.

Miss Clarisse soupira et s’appuya sur le canapé. « C’est peut-être pour cela que Sa Majesté a tant de mal. Je veux dire, si Léon disait ouvertement qu’il voudrait être roi, il monterait sur le trône en une minute. Cette possibilité terrifie probablement la reine. »

« Moi ? Devenir roi ? Ce n’est pas possible. »

« C’est tout à fait vrai », insista Miss Clarisse. « Un certain nombre de seigneurs t’adorent tout simplement, ou bien ils sont prêts à promettre leur loyauté à ta maison. » Elle sortit rapidement une lettre et la posa sur la table basse. Plusieurs sceaux y étaient apposés. J’avais reconnu deux des emblèmes familiaux comme appartenant au comte Roseblade et au comte Mottley. Je ne connaissais pas les autres.

Anjie prit la lettre. « Tu es devenu populaire », dit-elle en me lançant un petit sourire.

J’avais donc le pouvoir de prendre le trône… J’avais même des hommes prêts à me promettre leur loyauté. Il semblait que j’avais tout ce qu’il fallait pour m’établir en tant que roi.

« C’est un peu effrayant que tant de gens m’apprécient après avoir été détesté à l’académie », avais-je dit.

« Ça te dérange si je jette un coup d’œil à l’intérieur ? » demanda Anjie.

J’avais secoué la tête et elle avait rapidement brisé le sceau de l’enveloppe pour en sortir la lettre. Après l’avoir parcourue, elle poussa un long soupir.

« Il est dit que certains seigneurs régionaux se préparent déjà à trahir le royaume. Une fois la guerre commencée, ils prévoient d’escorter l’ennemi directement à travers leurs terres afin qu’il puisse plus facilement frapper nos régions centrales. »

« Alors ils doivent déjà penser que le royaume les a abandonnés », dit Livia en laissant tomber son regard sur ses mains serrées, qui reposaient sur ses genoux.

« C’est parce que le royaume les a abandonnés, » déclara Miss Clarisse en insistant bien sur ses mots. « Ils le savent. C’est pourquoi ils se préparent à changer de camp. »

L’enveloppe contenait également une lettre de la maison Roseblade, qu’Anjie avait ensuite consultée. Elle en resta bouche bée. « Il semblerait que certains d’entre eux aient commencé à faire pression sur le baron Bartfort pour qu’il persuade Léon. Plusieurs envoyés ont été dépêchés pour lui parler. »

« Ils essaient de faire pression sur mon père !? » J’étais tellement choqué que j’avais bondi de mon siège.

« Les seigneurs qui complotent une trahison ont peur de Léon », conclut Miss Clarisse. Elle croisa les bras et soupira. « Si ce n’était pas le cas, ils n’hésiteraient probablement pas. »

Anjie poursuit : « Il semblerait que les Roseblades aient intercepté ces envoyés et rejeté leurs demandes de rencontrer ton père au nom des Bartforts. Compte tenu de tout cela, il semble que le mariage de Lord Nicks avec Dorothea ait été la bonne décision. »

C’était un grand réconfort de savoir que les Roseblades faisaient tout leur possible pour protéger ma famille. Mais mon soulagement fut de courte durée, le visage d’Anjie s’était durci.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » demandai-je.

« C’est Deirdre qui a écrit cette lettre », dit-elle. « Elle dit qu’elle attend une récompense. »

« Ah oui ? Alors je vais devoir faire quelque chose de gentil pour elle. »

J’avais tendu la main pour prendre la lettre afin de la voir par moi-même, mais avant que j’en aie eu l’occasion, Anjie l’avait froissée et jetée par terre.

« Quoi ? » avais-je demandé.

« Tu n’as pas besoin de le lire », insista Anjie, visiblement enragée. Son ton ne laissait aucune place à l’argumentation.

Avant qu’elle ne l’écrase complètement, j’avais jeté un bref coup d’œil à la signature. On aurait dit qu’elle avait été scellée par un baiser au rouge à lèvres juste à la fin, mais peut-être que je l’avais seulement imaginé.

J’étais tombé dans une contemplation silencieuse, me grattant la tête en essayant de trouver une réponse. Comment allions-nous faire face à cette situation difficile ?

Noëlle remarqua mon expression troublée. « Alors… comment penses-tu répondre ? »

Si je voulais résoudre ce problème, je n’avais qu’un seul choix… « Je vais essayer de convaincre moi-même Mylène. Après cela, je consulterai Finn. »

Les sourcils d’Anjie s’étaient rapprochés. « J’admets que c’est un chevalier puissant, mais son statut ne semble pas assez important pour qu’il puisse donner un avis utile sur la position de l’empire. »

« Peut-être pas. Mais j’ai quand même besoin de lui parler. »

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Claramiel

Bonjour, Alors que dire sur moi, Je suis Clarisse.

Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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