Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 15 – Chapitre 5 – Partie 6

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Chapitre 5

Partie 6

« Père, les troupes du Clan de la Flamme ont commencé leur retraite. »

« Enfin. »

Yuuto poussa un long soupir en entendant le rapport de Kristina.

Même pour quelqu’un qui avait déjà traversé autant d’épreuves que Yuuto, ces deux derniers mois avaient été particulièrement stressants pour lui. Après tout, il était impossible de savoir quand Yggdrasil finirait par disparaître.

Malgré le stress de l’attente, Yuuto n’avait pas pu penser à un autre moyen de gagner. Le malaise constant et le poids des décisions pratiques qu’il devait prendre chaque jour avaient menacé de le rendre fou.

« On dirait qu’ils ont entendu la nouvelle de la chute de Blíkjanda-Böl. »

Yuuto en avait déjà entendu parler par le biais d’un rapport envoyé par pigeon voyageur depuis Sigrún.

Il s’était bien préparé à affronter le Clan de la Flamme une fois qu’il aurait appris la nouvelle.

Une fois les préparatifs terminés, il ne leur restait plus qu’à attendre.

« Kristina ! »

« Oui, Père ? »

« Informe les Vindálfs qui se cachent dans les clans voisins que nous avons pris Blíkjanda-Böl et que les armées du Clan de la Flamme battent en retraite ! Fais savoir à Jörgen qu’il doit agir immédiatement. »

« Très bien, Père. »

Rapide et légère comme une brise, Kristina disparut. Sa disparition n’était bien sûr qu’une illusion causée par la suppression de sa présence, mais il s’agissait tout de même d’un habile déplacement.

« Félicia ! »

« Oui, Grand frère ! »

« Nos troupes sont déjà en position, oui ? »

« Oui, Grand Frère ! Toutes les troupes du Clan de l’Acier se sont rassemblées à la porte ouest, comme tu l’as ordonné. »

« Parfait ! »

Yuuto se leva si vite que son siège faillit se renverser, et se dirigea vers la sortie si rapidement que sa cape s’agita dans les airs.

En sortant du palais, il monta sur son char favori et descendit la rue principale qui menait à la porte ouest. Comme Félicia l’avait dit, ses vingt mille soldats se tenaient là, en formation serrée, prêts à exécuter ses ordres au pied levé.

« Bravo, les hommes ! Vous avez supporté le stress de ces deux derniers mois avec grâce ! »

Utilisant le pouvoir de Gjallarhorn, l’Appel à la Guerre, qu’il avait emprunté à Fagrahvél, le patriarche du Clan de l’Épée, pour amplifier sa voix, Yuuto s’adressa à ses troupes.

Si le pouvoir d’amplifier la voix était utile en soi, cette même rune fut utilisée par Fagrahvél elle-même lors de la bataille de Vígríðr pour transformer les soldats de l’armée de l’Alliance des Clans Anti-Acier en berserkers sans peur — une perspective tout à fait terrifiante à n’en pas douter. Il n’était donc pas étonnant que Gjallarhorn ait été surnommée la Rune des Rois.

« Comme vous l’avez certainement déjà appris, l’unité des forces spéciales de Múspell, commandée par le Mánagarmr, Sigrún, a pris la capitale du Clan de la Flamme, Blíkjanda-Böl ! »

« Huzzah ! Huzzah ! Huzzah ! »

Les acclamations des troupes éclatèrent par vagues.

Ils savaient déjà à quoi s’attendre pour la bataille à venir. S’ils devaient se battre de toute façon, ils préféraient gagner la bataille et rentrer triomphants.

Toute nouvelle susceptible de leur remonter le moral avant la bataille était accueillie à bras ouverts.

« L’ennemi a lui aussi entendu cette nouvelle. En ce moment même, ils tremblent de panique et ont commencé à battre en retraite ! Si nous voulons les écraser, c’est maintenant qu’il faut agir ! »

Les acclamations s’amplifièrent tandis que Yuuto continua de parler.

« Enfin, j’ai quelques nouvelles personnelles à partager avec vous tous… En ce jour, ma seconde épouse officielle, Sigrdrífa, a donné naissance à notre petit garçon tant attendu ! Cela ne peut être qu’un bon présage pour la bataille à venir ! »

« Sieg Þjóðann ! Sieg Þjóðann ! »

L’excitation était palpable au sein des troupes.

Il avait été annoncé à l’avance que si un garçon naissait, ce serait le jour où les troupes partiraient affronter l’ennemi sur le terrain.

Utiliser le sexe du nouveau-né pour décider de ce genre de choses, c’était un peu comme décider de son avenir en le devinant dans les fissures de la carapace d’une tortue jetée au feu, mais personne ne pouvait leur reprocher d’agir ainsi — c’était une époque où la politique et la religion n’étaient que les deux faces d’une même pièce.

Juste avant le début de la bataille, le successeur tant attendu du souverain de l’empire était né. Il ne pouvait y avoir de meilleur signe de leur bonne fortune.

Yuuto souffrait d’impliquer ses enfants dans des machinations politiques, mais il n’avait pas le droit à l’erreur dans son combat contre Nobunaga. S’il tombait, il avait maintenant un garçon de son propre sang pour monter sur le trône.

« Hommes du Clan de l’Acier ! Nous sortons ! Prenez toute votre colère et votre frustration d’avoir été piégés dans ces murs ces deux derniers mois et jetez-les sur l’ennemi ! »

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« Signal de fumée confirmé. L’armée du Clan de l’Acier est sortie de ses murs. »

« C’était rapide, en effet. Ce garçon est certainement d’un calibre différent de celui du paisible Asakura Yoshikage », dit Nobunaga, laissant échapper des mots d’admiration.

Il se souvenait alors de la bataille de Kanegasaki.

Si je me souviens bien, j’étais plutôt fier de la rapidité et de l’ordre avec lesquels nous nous sommes retirés du champ de bataille, mais nos pertes ont été étonnamment faibles, non pas en raison de la discipline de nos troupes, mais parce que l’armée d’Asakura avait été tellement prise dans des conflits internes qu’elle avait été lente à nous poursuivre.

Yoshikage n’avait pas répondu à la demande de Yoshiaki de venir à Kyoto, et il n’avait pas non plus pris de mesures décisives pendant le siège. Dans tous les cas, c’était un homme incapable d’agir, même lorsque l’occasion se présentait.

Nobunaga avait, en un sens, été sauvé par cette indécision.

Si Takeda Shingen ou Uesugi Kenshin s’étaient trouvés sur le champ de bataille d’Echizen, à ce stade du conflit, Nobunaga aurait très bien pu être mis à genoux avant même d’avoir établi le siège.

Il n’était pas approprié de comparer Yuuto à un imbécile comme Yoshikage, mais par rapport à l’indécision de ce dernier, les actions du jeune garçon avaient été vraiment rapides.

Trop rapide, presque.

« Signaux de fumée en provenance du nord, confirmés. Le fort du clan de l’épée, occupé par dix mille soldats du Clan de l’Acier, semble également montrer des signes de mouvement », déclara Ran d’un ton détaché, comme l’aurait fait un réceptionniste.

Ran était un homme capable de rester calme et de penser clairement, même dans les situations les plus extrêmes. C’était la raison pour laquelle Nobunaga s’était assuré de le garder près de lui, et pourquoi il avait si bien pris soin de lui. Il n’y avait personne d’autre sur qui il pouvait compter autant en cas de besoin.

« Vraiment ? Leur plan consiste donc à nous piéger dans une attaque en tenaille, en effet… »

« À en juger par l’évidence de leurs mouvements, il a probablement déjà demandé de l’aide aux clans environnants », déclara Ran, ne perdant pas une miette des commentaires de son seigneur.

« C’est probable en effet. En d’autres termes, il nous a coincés, » déclara Nobunaga, rendant évident ce que les deux savaient déjà à ce stade.

« Oui, monsieur. Bien sûr, Suoh Yuuto doit penser la même chose », répondit Ran.

« C’est ainsi. Et voilà, Ran, notre ouverture pour une attaque. »

Les coins de la bouche de Nobunaga se retroussèrent tandis qu’un sourire des plus féroces se faufilait sur ses lèvres.

Nobunaga savait par expérience que l’opportunité se cache au milieu de la crise. Comme le dit le vieil adage, « même dans la mort, on peut trouver la vie ».

Il avait compris la vérité de ce dicton, et c’est grâce à cela qu’il avait presque réussi à unir tout le Japon sous son règne.

« Oho ? »

Il regarda ce qui était tombé dans la paume de sa main et rit.

Il semblerait que les cieux considèrent toujours Nobunaga comme un allié.

« C’est de bon augure. Nous avons déjà perdu beaucoup de terrain, mais c’est maintenant à notre tour de faire un pas en avant. »

Normalement, le Clan de la Flamme aurait été forcé de battre en retraite, étant donné les circonstances. Mais il n’y avait rien d’autre à faire.

Quiconque comprendrait ne serait-ce que les bases de la stratégie militaire serait d’accord.

Et c’est précisément à cause de la force écrasante de ces idées préconçues concernant son prochain mouvement que Nobunaga sera capable de renverser la situation.

« Keh heh heh… Suoh Yuuto ! Tu vas voir le pouvoir du Roi-Démon, Oda Nobunaga ! »

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L’eau glacée se brisait en gouttelettes sur les joues de Yuuto au fur et à mesure que ses forces avançaient. Il posa une main sur sa joue, leva les yeux et vit le ciel entièrement rempli de nuages sombres.

À peine a-t-il fait cela qu’une nouvelle goutte d’eau perla sur son visage.

« La pluie, hein… »

En regardant les gouttes tomber sur la paume de sa main, Yuuto fronça les sourcils, dégoûté.

Son visage était celui d’un homme qui avait déjà fait la guerre des dizaines de fois. Il avait marché et combattu sous une pluie battante. À ce stade, il n’avait pas l’intention de s’inquiéter d’être mouillé.

La pluie en elle-même ne le préoccupait pas particulièrement, c’était tout autre chose qui le préoccupait.

« Bon sang, ça a vraiment commencé à tomber. Et ça n’a pas l’air de vouloir s’arrêter de sitôt. »

En quelques instants, la pluie tombait partout, à perte de vue. C’était devenu une véritable tempête.

« Le moment ne pouvait pas être plus mal choisi. Cela va causer de véritables ravages dans notre poursuite. »

Les fortes pluies rendaient souvent la vue plus difficile, les vêtements et les armures étaient mouillés et refroidis, et les troupes étaient beaucoup plus susceptibles de tomber malades.

Selon une théorie, ce n’était pas les soldats ennemis, mais les maladies qui avaient tué la plupart des troupes au cours de l’histoire ancienne et médiévale.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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