Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 12 – Chapitre 1 – Partie 4

***

Chapitre 1 : Acte 1

Partie 4

Une force de trois mille de ces cavaliers nomades était mieux que ce qu’il pouvait espérer en termes de renforts… et pourtant, il ne pouvait toujours pas se défaire de ses soupçons que cet homme pourrait en fait être Loptr.

« Erm… Je comprends que cela va être impoli de ma part, mais pourriez-vous envisager de m’accorder une requête ? »

« Hm ? »

Jörgen avait renforcé sa résolution et avait fait son choix. « Seriez-vous prêt à me montrer le visage sous ce masque ? Je m’excuse de demander, mais nous sommes alliés dans la guerre, et je ne peux pas confier ma vie à quelqu’un dont je ne connais même pas le visage. »

Sur le champ de bataille, la peur de la mort était un ennemi de plus qu’il fallait combattre sans relâche.

Il y avait déjà l’énorme pression qui provenait de leur énorme désavantage numérique. S’il devait gérer la peur de la trahison en plus de cela, son cœur ne pourrait pas le supporter.

La question de Jörgen impliquait une question de vie ou de mort, mais…

« Alors vous n’avez tout simplement pas besoin de me confier votre vie, oui ? »

Hveðrungr l’avait sèchement rejeté.

 

 

« Avez-vous une grande blessure que vous cachez ? Je suis un vétéran de nombreuses batailles, vous savez. J’ai vu ma part d’horribles blessures dues au combat et à la torture. Je peux au moins vous promettre que je ne vous regarderai pas bizarrement. Pourriez-vous me montrer votre visage ? »

« Il ne s’agit pas vraiment de ce que vous promettez… » Hveðrungr s’était gratté l’arrière de la tête d’une main, comme s’il était un peu agacé par la difficulté de traiter avec lui.

Son discours et son langage corporel étaient dépourvus de toute sincérité réelle, presque comme s’il considérait les autres comme des êtres inférieurs. Cette sorte de désinvolture dans toutes ses manières correspondait, encore une fois, à l’homme dans les souvenirs de Jörgen.

En fait, tout ce qui s’était passé jusqu’à présent n’avait fait que renforcer les soupçons de Jörgen.

« Même après vous avoir autant supplié, vous ne pouvez toujours pas ? »

« Hmm, voyons voir. Si vous voulez vraiment voir mon visage, alors voyez ça avec Grand Frère. S’il m’ordonne de vous le montrer, j’y réfléchirai. »

La seule personne que Hveðrungr pouvait appeler « Grand Frère » était Yuuto.

En d’autres termes, il disait que sans un ordre direct du réginarque, il n’allait pas enlever son masque pour qui que ce soit.

C’est à ce moment que Jörgen avait eu une réalisation soudaine.

Yuuto avait été prêt à prêter directement le serment du calice de la fratrie avec cet homme. Il était difficile d’imaginer que Yuuto ne savait pas qui il était vraiment.

« … Alors, Père sait-il à quoi ressemble votre visage ? »

« Oh, je pense qu’il le sait. »

« Kh… ! » La réponse immédiate de Hveðrungr était révélatrice, et Jörgen répondit par un grognement sans mot.

Yuuto était complice de cette affaire.

Je pensais m’être habitué aux actions téméraires que Père aime souvent entreprendre, mais celle-ci doit être la plus téméraire de toutes.

Les implications de cette situation donnaient mal à la tête de Jörgen. Il baissa le visage et massa ses doigts contre ses tempes.

Les questions relatives au Calice étaient centrales dans la société clanique d’Yggdrasil, et tuer son parent juré était l’un des plus grands actes de péché. Yuuto avait choisi d’ignorer ce crime et, de plus, avait accordé à son auteur une nomination à un poste clé du pouvoir. C’était un énorme écart par rapport aux normes acceptées.

Il n’en reste pas moins vrai que notre situation actuelle ne nous permet pas de faire la fine bouche avec nos ressources. En ce moment, le Clan de l’Acier n’a pas besoin de gens au cœur pur et aux mains propres. C’est de gens avec du pouvoir et des compétences.

L’habileté de cet homme à l’épée était égale à celle de Sigrún et Skáviðr, les deux plus grands combattants du Clan de l’Acier. Quant à ses capacités de commandant, il avait fait passer sous son règne le Clan de la Panthère de simple clan mineur dans les steppes de Miðgarðr à l’une des nations les plus fortes d’Yggdrasil. Ses réalisations exceptionnelles en tant que leader n’avaient d’égal que celles de Yuuto.

Le Clan de l’Acier étant entouré d’ennemis, il était exactement le genre de talent qu’ils voulaient absolument avoir à leurs côtés.

« Hrrgh… » Jörgen poussa un long soupir et jeta un regard noir à Hveðrungr. « Si c’est comme ça, alors je n’ai plus rien à dire sur le sujet, » s’exclama-t-il amèrement.

L’ancien patriarche du Clan du Loup que Loptr avait assassiné, Fárbauti, avait été le premier père juré de Jörgen, et quelqu’un avec qui il avait partagé les joies et les peines de presque vingt ans.

C’était quelqu’un que Jörgen avait admiré avec respect, adoration et beaucoup de gratitude.

Et maintenant, son assassin se tenait juste ici, et Jörgen devait le laisser partir impunément. Rien ne pouvait être plus frustrant pour lui, même s’il savait pourquoi il devait réfréner la main.

« … En fait, il y a une chose que je dois vous dire. Si vous visitez Iárnviðr, je vous conseille de ne pas y rester trop longtemps. Je ne peux pas garantir votre sécurité là-bas. »

« Héhé. J’ai compris. » Avec un sourire en coin, Hveðrungr avait hoché la tête.

Cette réponse intrépide et insolente était suffisante pour faire tressaillir d’irritation les tempes de Jörgen. Jörgen avait serré les poings, incapable de supprimer complètement sa colère.

« Je dois m’occuper de la préparation des troupes, je vais donc prendre congé. » Avec ces quelques mots d’adieu, Jörgen avait rapidement quitté la pièce, l’indignation inexprimée se lisant sur son visage.

Linéa regarda Jörgen partir, la colère s’échappant de lui dans ses pas lourds et son langage corporel grossier. Une fois qu’il était parti, elle s’était tournée vers Hveðrungr.

« Y a-t-il une sorte de rancune personnelle entre vous et Jörgen ? » avait-elle demandé.

Le Jörgen que Linéa connaissait était un homme dont l’allure farouche cachait une personnalité aimable et sincère, et une affinité pour prendre soin des autres.

Elle ne l’avait vu exprimer ouvertement ce genre de colère qu’une seule fois auparavant : lorsqu’elle avait abordé le sujet de Botvid, le patriarche du Clan de la Griffe. Cependant, il avait semblé cette fois-ci encore plus furieux qu’à l’époque.

Jörgen et Hveðrungr étaient sur le point d’aller à la guerre ensemble, luttant contre la force d’invasion de l’Alliance des Clan Anti-Acier de trente mille personnes attaquant de l’est. Elle avait de bonnes raisons d’être anxieuse et de se demander si tout irait bien pour eux.

« Heh heh, on dirait qu’il m’a confondu avec quelqu’un d’autre, » dit Hveðrungr, jouant les idiots d’une manière si évidente que c’en était presque insultant.

Son obscurcissement plutôt éhonté était particulièrement approprié pour un homme qui cachait son visage derrière un masque de fer.

Cependant, après qu’il ait fait un tel démenti direct, il y avait peu de choses que Linéa pouvait faire pour l’interroger davantage.

Linéa laissa échapper un petit soupir. « Très bien, alors. Cependant, faites de votre mieux pour vous entendre avec lui. Je vous demande de ne pas oublier que c’est un moment critique pour nous. »

Elle décida qu’il valait mieux laisser l’affaire de côté pour l’instant. Sans comprendre exactement ce qui se passait entre eux, mettre son nez au milieu de tout ça ne ferait que les exaspérer davantage, et elle ne pouvait pas prendre ce risque.

« Vous devriez peut-être dire cela à Jörgen, » dit Hveðrungr, ses lèvres se retroussant en un sourire sarcastique. « Maintenant, je vais aussi y aller. » Il se retourna et quitta la pièce.

Linéa avait attendu qu’il soit parti, puis elle avait secoué la tête et elle s’était dit à voix haute : « Je suppose que je n’ai pas d’autre choix que d’interroger Père à ce sujet plus tard. Franchement, cet homme… »

Elle lui avait déjà dit et répété qu’il devait être ouvert avec elle, son second, sur tout ce qui se passait d’important, que ce soit politique ou personnel. Pourtant, il y avait un secret de plus qui n’attendait que d’exploser violemment comme une de ces bombes tetsuhau.

En raison de sa position, Linéa serait la personne responsable de la plus grande partie du travail nécessaire pour gérer les retombées de ce genre de choses.

« Je vais devoir m’assurer qu’il me donne beaucoup d’attention plus tard pour compenser. Ce n’est que justice, » dit-elle en hochant la tête.

Dans le Clan de la Corne, son Chef des Subordonnés, Rasmus, était ce qu’elle avait de plus proche d’une figure paternelle après la mort de son père biologique… mais Rasmus était déjà très vieux. Il ne lui restait plus beaucoup d’années, et Linéa voulait pouvoir lui faire le cadeau de voir ses enfants.

Plus encore, elle voulait avoir les enfants de l’homme qu’elle aimait.

Elle se serait retenue et aurait mis ces désirs de côté si Mitsuki, la femme de Yuuto, était toujours sans enfant, mais elle était déjà enceinte, donc il n’y avait pas de problème.

« Bien que, je suppose que dans ces circonstances, je ne devrais pas penser à de telles choses. »

Après quelques instants de réflexion, elle s’était levée, s’était approchée de la fenêtre et avait regardé dehors.

Même en regardant la ville comme ça, on pouvait sentir son énergie, sa prospérité.

Elle était florissante à une échelle incomparable à ce qu’elle était il y a seulement deux ans.

Et c’était effrayant.

Comme pour la ville de Gimlé, le Clan de l’Acier s’était développé à une vitesse fulgurante — et il était devenu trop grand, trop vite.

Lorsque des personnes issues de cultures différentes et possédant des valeurs fondamentales différentes se rencontraient, il leur fallait un certain temps avant d’apprendre à vivre ensemble dans une relative harmonie.

En ce moment, les personnes de pas moins de sept clans différents se mélangeaient chaotiquement en tant que Clan de l’Acier, et les résultats pouvaient difficilement être appelés unité.

Même un homme chaleureux et amical comme Jörgen gardait son inimitié pour le patriarche du Clan de la Griffe, Botvid, et le commandant du régiment de cavalerie indépendant, Hveðrungr.

Il y avait sûrement beaucoup d’autres problèmes de ce genre qui se cachent juste sous la surface.

Linéa savait que s’inquiéter trop était une mauvaise habitude pour elle, mais elle sentait le malaise monter lentement en elle.

Le régiment de cavalerie indépendant avait son quartier général principal sur un haut plateau herbeux, à environ une heure de route au sud-est de Gimlé.

Actuellement, Gimlé connaissait toujours un afflux important et régulier de nouveaux résidents, et avec l’augmentation de la population, il n’était tout simplement pas possible de prendre les dispositions nécessaires pour disposer des installations appropriées pour accueillir trois mille cavaliers et leurs chevaux.

De plus, le plateau était, logiquement, un choix plus approprié pour leur quartier général en ce qui concerne l’approvisionnement en nourriture, les exercices et l’entraînement des chevaux.

Comparé aux plaines près de la rivière, plus près de Gimlé, le plateau était beaucoup plus froid et l’air beaucoup plus réduit, mais pour ces hommes qui avaient grandi comme des nomades dans les steppes de Miðgarðr, ce n’était pas un problème.

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

Laisser un commentaire