Le Maître de Ragnarok et la Bénédiction d’Einherjar – Tome 11 – Chapitre 2 – Partie 1

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Chapitre 2 : Acte 2

Partie 1

« Ce fut un mariage très excitant, n’est-ce pas ? Bien que, je suppose que l’on pourrait dire que rien ne pourrait être plus approprié pour le plus grand héros de ces temps turbulent. Maintenant, Princesse, vous serez la prochaine, j’en suis sûr ! »

C’était le lendemain de la cérémonie de mariage de Yuuto et Mitsuki, et Linéa avait fait une courte pause dans son travail en prenant un thé et en discutant agréablement avec son assistant, Haugspori, lorsqu’il lui avait soudainement annoncé cette bombe, tout à fait inattendue.

Linéa avait été tellement décontenancée que son thé était parti dans le mauvais tuyau, et elle avait postillonné et toussé bruyamment.

Après quelques instants, sa toux s’était calmée et elle avait fixé Haugspori d’un regard plein de reproches.

« D’où est-ce que ça vient ? Tu comprends la situation dans laquelle nous sommes en ce moment, n’est-ce pas ? »

« Certainement, » répondit calmement Haugspori, pas du tout perturbé par le ton colérique de son patriarche. « Selon le seigneur réginarque, nous sommes confrontés à une guerre bien plus importante que toutes celles que nous avons menées auparavant. »

Haugspori était un Einherjar de la rune Ljósálfar, l’Elfe de Lumière, et le plus fort général du Clan de la Corne. Linéa lui faisait entièrement confiance, alors naturellement, elle l’avait mis au courant de la réunion du conseil de guerre de la nuit dernière.

« C’est précisément la raison pour laquelle je t’en ai parlé. »

« Hm ? »

« Une fois le conflit engagé, le réginarque sera obligé de se déplacer d’un endroit à l’autre, pour rencontrer l’ennemi au combat, tandis que vous serez sûrement affecté au soutien logistique depuis ici, à Gimlé. Naturellement, vous aurez très peu d’occasions de le voir par la suite. »

« Hmm…, » Linéa ne pouvait pas ne pas être d’accord. Cela avait du sens pour elle.

En fait, l’année dernière, Yuuto n’avait été présent dans la capitale du clan de Gimlé (et à Iárnviðr, avant cela) que pendant environ deux tiers du temps.

Il n’avait passé que la moitié de l’année ici, mais c’était aussi parce qu’il avait été ramené de force dans son pays d’origine, au-delà des cieux, pendant plusieurs mois.

À en juger par les circonstances actuelles, il était presque certain qu’il passerait encore plus de temps hors de la ville, avec peu ou pas de chance que ce soit le contraire.

Face à cette prise de conscience tardive de l’évidence, Linéa était restée sans voix.

« Princesse, si vous ne vous occupez pas des choses maintenant, avant que cela n’arrive, vous pourriez découvrir que plusieurs années complètes vous ont échappé sans même que vous vous en rendiez compte. »

« Nnngh… ! » En grimaçant, Linéa ne parvint pas à étouffer un gémissement douloureux.

Elle avait eu 17 ans cette année.

À Yggdrasil, il n’était pas rare de se marier vers l’âge de quinze ans, elle était donc déjà un peu « en retard » pour sa génération. Elle ne pouvait pas se permettre de se la couler douce et de repousser les choses de quelques années encore.

« Heureusement, Dame Mitsuki a déclaré qu’elle autoriserait son mari à prendre des concubines, et elle vous a même dit directement qu’elle souhaitait que vous souteniez le seigneur réginarque. Il ne devrait y avoir aucun obstacle sur votre chemin. »

« Oui, c’est vrai que Grande Soeur Mitsuki m’a dit ça. »

Linéa repensa à ce moment et soupira, se souvenant de l’admiration qu’elle avait ressentie.

Mitsuki avait dit à Linéa que, dans son nouveau rôle de réginarque, Yuuto portait désormais un fardeau bien trop lourd pour un seul homme… et que Mitsuki seule ne suffirait pas à l’aider à l’assumer.

Mitsuki était une femme comme les autres. Il ne fait aucun doute qu’elle préférerait avoir Yuuto pour elle toute seule si elle le pouvait.

Et pourtant, elle avait refusé d’être liée par la jalousie humaine naturelle, accordant plus d’importance à la façon dont elle pouvait soutenir au mieux son mari, tant dans son corps que dans son esprit, alors qu’il faisait face à ses lourdes responsabilités.

Linéa avait été envahie par l’admiration pour cette attitude inspirante. Elle avait l’impression que ce n’était pas étonnant que Yuuto ait choisi cette femme pour être sa seule compagne pour la vie.

Et, c’était la source de son plus grand obstacle.

« Cependant, Père est dévoué à Grande Sœur Mitsuki, et à elle seule, même s’il est entouré d’autres belles femmes comme Tante Félicia et Sigrún. Quelqu’un comme moi ne pourrait même pas…, » le fait de s’exprimer ainsi la rendait malheureuse.

Fille d’un patriarche, elle avait grandi en mangeant bien et en apprenant à soigner son apparence.

De son propre avis, elle se croyait au moins modestement belle, mais elle avait l’impression de ne jamais pouvoir se mesurer à ces deux piliers de beauté aux cheveux argentés et dorés, toujours aux côtés de Yuuto.

Si même elles deux n’avaient pas réussi à conquérir son cœur, alors quel espoir avait-elle ?

« Eh bien, » répondit Haugspori, « en mettant de côté la tante Sigrún pour le moment, je sais que la grand-tante Félicia et le seigneur Yuuto ont déjà une relation intime. »

« Hwuh !? » s’exclama Linéa, pratiquement abasourdie.

C’était complètement sorti de nulle part, quelque chose qu’elle n’aurait jamais imaginé.

« Qu’est-ce que tu racontes ? » avait-elle crié.

Haugspori avait eu l’air perplexe. « Je ne sais pas pourquoi vous me demandez cela. Vous pouvez le savoir rien qu’en les regardant, n’est-ce pas ? »

« N-Non, je ne peux pas, et c’est pourquoi je te le demande ! »

Haugspori avait poussé un long soupir d’exaspération.

Linéa, bien sûr, avait senti sa colère monter à ce sujet.

À Yggdrasil, le serment du Calice était absolu, et l’autorité et le statut d’un parent assermenté l’étaient également. En tant que parent juré de Haugspori, Linéa ne pouvait s’empêcher de se sentir offensée par son comportement terriblement grossier de tout à l’heure.

Cependant, sa curiosité était plus forte. Elle ravala sa colère et attendit qu’il s’explique.

Haugspori secoua la tête comme pour dire bon sang, puis poursuit. « Dans ce cas, je vous suggère de faire très attention à la grande tante Félicia la prochaine fois que vous la verrez. Observez ses mouvements et sa façon de se tenir. Elle a toujours été une femme séduisante, mais maintenant ses manières sont encore plus féminines qu’avant. »

« Hm. A- Actuellement, j’ai aussi eu ce sentiment d’elle. »

« Vraiment ? C’est évident même dans la façon dont elle regarde le Seigneur Yuuto. Par le passé, son regard brûlait d’une passion ardente, mais maintenant il est plein de chaleur, comme s’il l’enlaçait doucement. Rien qu’en regardant cette différence, il est impossible de se méprendre sur le fait que quelque chose a changé entre eux. »

« Ngh… Mais, tu n’as pas entendu le père ou la tante Félicia en parler directement, n’est-ce pas ? »

« Eh bien, ils ne le feraient pas. Normalement, les moments les plus intimes d’une personne dans la chambre à coucher ne sont pas quelque chose dont on discute avec d’autres personnes. »

« Donc, en d’autres termes, ce ne sont que des suppositions que tu as faites, basées sur… »

« Ha ha ha ! Princesse, considérez avec qui vous parlez en ce moment. » Coupant Linéa d’un rire, Haugspori avait pointé un pouce sur lui-même.

En tant que meilleur archer du Clan de la Corne, ses flèches pouvaient même abattre un oiseau volant dans le ciel avec une précision parfaite, et cette maîtrise de l’arc lui avait valu la renommée de tout le Clan de l’Acier. Il était tout aussi apprécié pour ses prouesses avec le sexe opposé, et l’on disait que toutes les femmes sur lesquelles il jetait son dévolu tombaient rapidement dans son lit.

Il avait une grande expérience des tenants et aboutissants des relations amoureuses, ce qui donnait à ses paroles un certain poids. Même sans preuve plus solide pour les étayer, Linéa ne pouvait pas simplement les rejeter comme des absurdités.

Elle déglutit nerveusement. « Si c’est vrai, alors je ne peux pas non plus rester assise à hésiter. »

« Mais quand même, qu’est-ce que je suis censé faire, exactement ? »

Une heure s’était écoulée, et Linéa était toujours assise dans son bureau, la tête entre les mains, hésitante.

On dit que le meilleur jour pour suivre des plans est le jour où on les fait, mais dans le cas de Linéa, elle avait déjà fait une demande officielle de mariage à Yuuto il y a un an et avait été rejetée.

Même le fait d’aller lui avouer ses sentiments une nouvelle fois ne lui semblait pas correct le jour suivant immédiatement son mariage. C’était trop peu scrupuleux.

« … Argh ! Je n’accomplirai rien en restant assis ici ! J’ai des choses à rapporter à Père de toute façon, alors je vais juste aller le voir ! »

Linéa avait pris une pile de papiers sur le dessus de son bureau et s’était levée.

« Ohh, vous allez “repérer l’ennemi”, je vois ! » dit Haugspori d’un ton excité.

« C’est vrai, » répondit Linéa. « Après tout, “Connais ton ennemi et connais-toi toi-même, et tu pourras mener cent batailles sans désastre”. »

C’était une citation qu’elle avait apprise de Yuuto, à l’origine par quelqu’un appelé Sun Tzu.

En fin de compte, ce qu’elle avait appris de Haugspori sur la relation entre Yuuto et Félicia n’était rien de plus que sa propre version des choses.

Ce n’est pas qu’elle n’avait pas confiance en ce qu’il disait, mais c’était quelque chose qu’elle voulait confirmer de ses propres yeux.

Se précipiter dans des choses basées sur un malentendu ne ferait que la blesser davantage, alors elle allait au moins éviter cela.

« Prenez soin de vous, Princesse, et bonne chasse. »

« Merci. »

Linéa répondit à l’envoi fougueux de Haugspori par un simple signe de tête et se dirigea vers le bureau de Yuuto.

Son bureau était la pièce d’à côté, donc c’était un court voyage.

« Père, j’ai apporté des documents décrivant le rendement de la récolte d’automne de cette année », annonça Linéa en ouvrant la porte.

Le propriétaire de ce bureau n’avait passé qu’une seule nuit depuis sa cérémonie de mariage, et pourtant, il était là, à son bureau, fixant des trous dans une carte et fronçant les sourcils.

Il devait vraiment être enfermé dans une concentration intense, car il n’avait même pas remarqué que Linéa entrait dans la pièce.

« Grand Frère, Dame Linéa est ici pour te voir. » Félicia avait tapé légèrement sur l’épaule de Yuuto, qui avait levé les yeux en sursaut.

« Hm ? O-Oh, désolé ! Je ne t’ai pas entendu entrer. De quoi as-tu besoin ? » Yuuto salua Linéa avec un sourire accueillant.

Ça semblait juste un peu maladroit et forcé.

Linéa n’avait pas à se demander pourquoi. Il était sûrement en train de se creuser la tête pour savoir comment gérer la situation causée par l’ordre impérial d’assujettissement du Clan de l’Acier.

« J’ai apporté des documents décrivant le rendement de la récolte d’automne de cette année, » avait-elle répété en tendant la liasse de papiers qu’elle portait.

« Il y a eu des pertes au début du printemps de cette année, lorsque les troupes du Clan de la Panthère et du Clan de la Foudre ont endommagé et pillé nos terres agricoles, mais malgré cela, la récolte de cette année a encore largement dépassé celle de l’année dernière. »

« Oh, vraiment ? Je suis content d’entendre ça. On ne peut pas faire la guerre l’estomac vide, comme on dit. »

« Donc, nous allons partir en guerre ? » demanda Linéa en fronçant un peu les sourcils.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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